Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1877-01-05
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 janvier 1877 05 janvier 1877
Description : 1877/01/05 (A7,N1850). 1877/01/05 (A7,N1850).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7556315b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/04/2013
* Septième Année — No 1850 Mz dm Numéro à Pairie à 15 Cteti^es Département»} t 20 Geatîm« es
Vendredi 5 Janvier 1877
- ~L _,
ADMINISTRATION
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srax© <3.0 HiÊ&JTsfcy©-fet;©, £5 2a.
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JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
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Un an. 60 »
DEPARTEMENTS
Trois mois 16 fr.
Six mois. sa » -
Un an. 62 »
ABHONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF et Cu :
0, place de la Bonne) a -1
1
Par suite du nouveau traité
postal, les prix d'abonnement pour
tous les pays d'Europe, la FRANCE
EXCEPTÉE, ont été fixés comme
suit :
3 mois. 17 francs.
6 mois. 34 —
12 mois. 66 —
Les abonnements pour la France
et l'étranger partent du 1er et du 15
de chaque mois.
Après SOMMA., nous publie-
rons en feuilleton un grand roman
inédit que MM. Erckmann & Cha-
trian terminent pour le XIXe Siècle.
Il est intitulé :
.NOTRE SEIGNEUR JEAN-PIERRE
BULLETIN
1
Paris, 4 janvier 1817.
La situation reste la môme à Constanti-
nople. A l'issue de la dernière séance de la
conférence, le marquis de Salisbury a eu
une longue entrevue avec Midhat-Pacha.
L'ambassadeur anglais a vivement insisté
auprès du grand-vizir pour que la Turquie
accepte les propositions élaborées par la
conférence préliminaire. Le grand-vizir a
répondu, nous dit une dépèche de Constanti-
-nople, qu'il pouvait céder sur quelques
points, mais qu'il se verrait obligé de re-
pousser toutes les conditions qui lui sem-
bleraient contraires à la dignité de la Tur-
quie.
La même dépêche ajoute que le conseil
.des ministres turcs a dû prendre hier une
résolution qui sera communiquée aujour-
d'hui à la conférence. Ajoutons, cependant,
que, d'après un bruit répandu hier à Paris,
la réunion de la conférence serait remise
4 lundi prochain, et que les plénipotentiai-
res auraient accordé ce dernier délai à la
Porte.
Voilà, à peu près, toutes les nouvelles de
-la journée, car nous n'ajoutons pas une
grande foi à la dépêche publiée par les jour-
naux russes, dépêche d'après laquelle le
général Ignatieff aurait télégraphié à Sé-
bastopol pour demander qu'on lui expédie
un yacht afin de pouvoir quitter Constanti-
'nopl sans délai. Ce télégramme nous sem-
ble rédigé surtout dans le but de calmer
l'opinion publique en Russie, car il n'a même
pas l'avantage d'intimider les Turcs.Ceux-ci
-savent très-bien, en effet, que le général
Ignatieff, comme tous les ambassadeurs, a
toujours un ou deux stationiraires à sa dis-
position, et qu'il peut quitter Constantinople
demain si bon lui semble.
Il est une autre nouvelle que l'on in-
voque comme une preuve de la bonne foi
de l'Angleterre et aussi comme uIÍ indice
de sa résolution d'exercer une pression
considérable sur la Porte. Nous voulons
parler du départ de la flotte anglaise de la
baie de Besika. La flotte anglaise a levé
l'ancre et quitté Besika, cela n'est pas dou-
teux ; mais la vraie raison de ce départ est
l'impossibilité où elle se trouvait de rester
plus longtemps mouillée dans cette baie. Il
y a quelques jours, pendant un coup de
vent assez violent, deux vaisseaux cuiras-
sés ont été sur le point de se heurter et de
s'entre-détruire, les ancres ne mordant pas
eur le fond. S'est à la suite de cet accident,
qui a démontré que l'hivernage serait pres-
que impossible dans- ces parages, que la
flotte anglaise a reçu l'ordre de se rendre
au Pirée.
La prochaine séance de la conférence,
qu'elle se tienne aujourd'hui ou qu'elle soit
remiso à lundi, sera-t-elle décisive? Nous
ne le croyons pas. Le refus opposé par la
Turquie à toutes les demandes des puissan-
ces n'est certainement pas le dernier mot
4e la Porte. Il est certaines de ces deman-
des qu'elle finira par accorder après de lon-
gues négociations ; mais, comme le répon-
dait Midhat-Pacha au marquis de Salisbury,
11 est certains points sur lesquels elle se
montrera inflexible. Or, il est évident que,
sur ces mêmes points, la Russie ne pourra
faire aucune nouvelle concession, et c'est
pourquoi nous refardons la guerre comme
inévitable dans un délai qui ne peut pas être
bien long.
Nos lecteurs n'ont peut-être pas oublié
les observatiens que nous présentions hier
relativement à la dépêche « de l'armistice»
parvenue — ei malencontreusement ou si
heureusement, comme on voudra,—juste
é la minute psychologique de la liquida-
tion, avec trente-six heures de retard. Ces
observations n'étaient certainement pas
sans importance, puisque le Moniteur uni-
versel publie la note suivante, qui lui est évi-
demment communiquée par M. le ministre
jies affaires étrangères : -
D'après des vérifications matérielles qui ne
sauraient nous inspirer aucun doute, ce n'est
pas dans la journée de jeudi 28 décembre, mais
dans celle du vendredi 29, que la décision rela-
tive à la prolongation de l'armistiee a été prise.
Dans ces conditions, il n'y aurait plus rien
d' irréguli-er à ce que la nouvelle dont il
s'agit n'eût été connue en Europe que samedi
matin.
EKourse de XPsuris
Clêtvre le 2 janv. le 3janv HalUlle Ba.e
3 O/O
Comptant. , 71 .• 7} , „„•/• 35
com ptant.. 70 8.j :1: 71 Ï5 :11: 4-,) 1 f.
Fin cour., 70 8; 71 t-o 4a
I.; .'9-.I
-âjaf?5«. 101 50 50
5 0/0
Jompteat.. 105 75 1S5 &5 10
fia caur 10565 105 95 ,/. 30
PETITE BOURSE DU SOIR
Emprunt 3 0/0 71 fr. 20, 71 fr., 71 12 ]/2.
Emprunt 5 0/0 105 fr. 82 112, 93 3/4, 65,
105 fr. 7i 1/2, 75
5 0/0 turc. 11 fr. 45, 25
Banque Ottomane 373 fr. 75, demandée.
Egypte 249 fr. 37, 248 75.
———————— ————————
Nos adversaires ne se lassent pas de
représenter les républicains comme des
êtres sans pudeur, sans fierté, qui ne
voient dans le triomphe de leurs princi-
pes que l'occasion de gagner de l'argent
en s'emparant de toutes les places. Nous
ne nous lasserons pas de leur répondre
qu'ils se connaissent mal, et qu'ils don-
nent sottement leursqualitésaux autres.
Hier soir l'Union et la Gazette de
France se signalaient entre tous leurs
confrères de la bonne presse par une
indignation vertueuse contre ce qu'on
a coutume d'appeler l'ardeur des répu-
blicains à la curée des places. On trou-
vera donc tout naturel que nous met-
tions sous les yeux de ces royalistes
aussi purs que désintéressés certain
passage d'une brochure (1) publiée en
1816 par un nommé F. Guizot, maître
des requêtes au conseil d'Etat, et pro-
fesseur d'histoire moderne à l'Acadé-
mie de Paris. Nous avons déjà fait bien
des citations concernant le même sujet,
mais on nous rendra cette justice que
nous nous sommes toujours adressés à
des auteurs peu suspects de malveil-
lance à l'égard des royalistes. Voiei donc
les plaintes que M. Guizot met dans la
bouche des défenseurs du trône et de
l'autel en 1816 :
« Les révolutionnaires et les bona-
» partistes occupent tous les emplois ;
» eux seuls sont jugés capables de les
» rsmplir; on prodigue les rubans et les
» croix aux soldats qui ont combattu à
» Waterloo; on les refuse aux volontaires
» qui ont suivi le roi à Gand; l'épura-
» tion des tribunaux n'a eu pour but
» que de les peupler de prêtres mariés;
» partout, dans toutes les carrières,
» dans toutes les administrations, la
» qualité de buonapartiste est une
» preuve de capacité, un titre à la fa-
» veur : celle de royaliste, un brevet
» d'incapacité, un motif d'exclusion.»
Mais tout cela est de l'histoire an-
cienne. Nous sommes convaincus, par
exemple, qu'on ne trouverait pas, en
1877, un seul royaliste qui osât mettre
une seconde en parallèle l'héroïsme des
braves qui essayèrent à Waterloo de
sauver la Franco d'une invasion et le
patriotisme des rédacteurs du Moni-
teur de Gand. Laissons le passé; ne par-
lons que du présent. Qu'ont fait les
coalisés de toutes les monarchies après
le 24 mai ? Quel langage tenaient leurs
journaux ? On dirait vraiment qu'il soit
impossible de s'en souvenir, ou qu'on
ne puisse retrouver dans la collection du
Journal qlfiÓelles listes de révocations
de tous les fonctionnaires soupçonnés
de républicanisme? Ah! le beau coup
de balai !
Notez bien que nous sommes loin d'en
faire un reproche aux Beulé, aux Bro-
glie et autres ministres.de l'ordre moral.
Ils étaient ou devaient être les exécuteurs
de la volonté des gens du 24 mai ; ils
avaient pour mission d'accomplir le pro-
gramme des coalisés qui était la destruc-
tion de la République. Il faut donc con-
venir qu'ils eussent été bien niais de ne
point débuter par se priver des services
des républicains. Eux-mêmes avaient
annoncé le projet d'instituer un gouver-
nementde combat contre la République;
le commencement de la sagesse était
donc de ne souffrir dans les rangs des
combattants que des ennemis déclarés
des institutions républicaines. Et certes,
nul mieux que ce premier ministère de
l'ordre moral n'a eu le droit de répéter
après Petit-Jean :
Ce que je sais le mieux, c'est mon commencement.
Encore un coup, nous ne trouvons
à cela rien à reprendre. Seulement on
nous permettra de demander la Gazette
de France et à l'Union. pourquoi elles
blâment si vertement chez les républi-
cainsune prétention qu'elles trouvaient,
et avec raison, si légitime chez les mo-
narchistes. Nous croyons qu'on n'est
jamais mieux servi que par soi-même,
et que des républicains n'eussent jamais
administré les départements comme ont
su le faire les préfets et sous-préfets de
MM. Beulé, de Broglie, de Fourtou et
Buffet. De même nous sommes persua-
dés que pour veiller aux intérêts de la
République, il n'est rien de tel que des.
républicains. -
A cela, MOUS entendons bien qu'on
nous crie : « Vous n'êtes que des men-
diants, des quémandeurs de places, des
affamés, des voraces, » et. le reste; mais
des injures, même répétées, il satiété,
ne sont point des arguments; et tant
qu'on n'aura pas pris la peine de nous
expliquer comment et pourquoi les
vainqueurs du 24 mai, qui voulaient dé-
truire la: République, ont eu raison de
confier les fonctions à des monarchis-
tes; comment et pourquoi les vain-
queurs du 20 février, qui veulent fon-
der la République, ont tort de vouloir,
confier les fonctions à des républicains,
(1) Du gouvernement représentatif fi de l'-etat
actuel de la France. Paris. Maradan, 1816.
tant que l'on n'aura pas fait cela, nous
continuerons à croire que c'est parce
qu'on serait fort en peine de s'en tirer
honorablement.
E. SCHNERB.
*
LES CIMETIÈRES
M. Hérold, sénateur, nous adresse la lettre
suivante :
Paris, le 3 janvier 1877.
Mon cher Sarcey,
A propos du cimetière de Lagny, je ne
crois pas inutile de vous rappeler que le ré-
gime de ce nouveau cimetière est celui de
tous les cimetières de Paris sans exception.
Ces cimetières ne sont pas bénits ; la béné-
diction des fosses particulières est seule-
ment autorisée. C'est pour cela que Paris
n'a jamais été le théâtre de scènes d'into-
lérance semblables à celles qui se sont pro-
duites sur tant d'autres points de la France,
et qui ont leur prétexte ou leur cause,
comme vous voudrez, uniquemment dans
le fait de l'appropriation au profit de l'Eglise
catholique du sol du cimetière par la béné-
diction générale. Il est important d'insister
sur ce point, parce qu'il serait très-désira-
ble que le régime des cimetières de Paris et
du cimetière de Lagny fût généralisé. Il
m'est, comme à vous, absolument impos-
sible de comprendre comment la conscience
des catholiques peut être blessée de ce que,
la terre dans laquelle reposent les catholi-
ques étant bénite, la terre d'à côté ne l'est
pas. Et tout le monde saisit au contraire la
raison d'ordre public qui veut qu'on écarte
des cérémonies funèbres les luttes religieu-
ses et le scandale. Aussi, dans mon rapport
de 1874 sur le futur cimetière de Méry, ai-je
eu soin de proposer pour ce cimetière le
régime parisien, et le conseil municipal a
approuvé ma proposition. Si les choses se
passaient de même désormais pour tous les
nouveaux cimetières, tout le monde y ga-
gnerait.
Bien à vous,
HÉROLD.
4,
Un journal monarchiste, hier, com-
mençait ainsi son article: « Les répu-
blicains inaugurent la nouvelle année
en se traitant de Turcs à Maures. »
Suivaient des extraits d'une polémique
engagée entre deux ou trois journaux
républicains. C'est assez, paraît-il, pour
que nos adversaires se frottent les
mains et se répètent que la discorde est
au camp d'Agramant, etc., etc.
Le croient-ils? et, vraiment, est-ce de
benne foi qu'ils constatent aujourd'hui
chez nous les divisions que si souvent
nous avons constatées chez eux ? Il con-
vient alors de leur montrer en quoi dif-
férent nos « dissensions intestines » et
les leurs. Les républicains peuvent, en
effet, porter des jugements divers, et
quelquefois contraires, sur beaucoup
de points ; mais il en est un où vous les
trouverez toujours unis : ils sont et res-
teront d'accord pour maintenir la Ré-
publique, de même qu'ils ont été d'ac-
cord au mois de février 1875 pour la
fonder. Ainsi point de divisions, chez
nous, sur la question de gouvernement.
N'est-ce pas au contraire sur la ques-
tion de gouvernement que les monar-
chistes sont et demeureront éternelle-
ment désunis?
Voilà la différence qui marque notre
force et leur faiblesse. C'est pourquoi
les républicains peuvent à bon droit
signaler comme funestes au parti mo-
narchique les querelles sans cesse re-
naissantesqui s'élèvent entre Frohsdorf,
Chantilly, Chislehurst, —tandis que les
dissentiments signalés chez nous par
les monarchistes ne tirent à aucune
conséquence pour l'avenir de la Répu-
blique et du parti républicain. C'est
par naïveté que quelques badauds s'y
arrêtent, puisque l'on sait bien que, le
jour où la République serait menacée,
les républicains serreraient les rangs ;
et l'on sait aussi que, précisément, ce
même jour, nulle discipline ne saurait
contenir les ambitions contraires des
monarchistes.
Oui, sans doute, il existe dans le
parti républicain des divergences d'opi-
nion, et qui sont nombreuses. Quoi de
plus naturel, en somme? Mais c'est en
faveur de la République que tourne la
seule conclusion qu'on en peut tirer.
C'est un républicain que M. Dufaure ;
c'est un républicain que M. Jules Simon ;
c'est un républicain que M. Gambetta;
et c'est encore un républicain que M.
Louis Blanc. Est-ce à dire pourtant que
leurs opinions ne forment qu'une seule
et même opinion politique? Non, certes!
Or, qu'est-ce que cela prouve, sinon que
la République a gagne dans notre pays
un terrain assez vaste pour que des
hommes, séparés d'ailleurs par des dis-
sidences quelquefois profondes, puis-
sent cependant s'y rencontrer ?
La République a été acceptée depuis
cinq ans par la grande majorité de la
nation ; notre ambition, c'est qu'elle
soit acceptée bientôt, comme le seul
gouvernement possible, par la nation
tout entière. Les journaux monarchis-
tes ne contesteront point que, plus elle
comptera d'adhérents, plus elle sera
forte. Et pourtant u'est-il pas certain que,
plus elle comptera d'adhérents, plus les
opinions particulières de ses adhérents
seront divisées ? La monarchie consti-
tutionnelle est aujourd'hui la forme de
gouvernement la plus chère au peuple
anglais ; cela empêche-t-il que, chez
nos voisins, les whigs et les tories
se traitent souvent «de Turcs à Maures?»
En quoi le principe de la monarchie
»
constitutionnelle en est-il affaibli, si
ces mêmes tories et ces mêmes whigs
y sont également dévoués?
De même chez nous. Il suffit que
nous soyons d'accord sur la forme de
gouvernement que nous avons adop-
tée ; mais chacun reprend sa liberté
personnelle dans tout le reste. Celui-ci
penche plus à gauche, celui-là plus à
droite ; l'un croit mieux de passer par
ici, l'autre par là : qu'importe, si tous
sont résolms à conserver la Républi-
que ? Les questions de conduite parti-
culière séparent trop souvent les répu-
blicains ; mais la question de gouverne-
ment les réunit toujours. C'est quelque
chose que cela, et nos adversaires de la
triple alliance monarchiste seraient trop
fiers s'il leur était permis d'en dire au-
tant.
EUG. LIÉBERT.
————— ——— 4
Nous avons annoncé dernièrement, d'a-
près divers journaux, le remplacement au
ministère de la marine de M. l'amiral Fou-
richon par M. l'amiral Jauréguiberry. Cette
nouvelle est, paraît-il, complètement in-
exacte, du moins dans sa seconde partie. Il
est possible que M. l'amiral Fourichon
veuille se reposer des fatigues de sa longue
et si honorable carrière maritime, mais il
est tout à fait improbable que M. l'amiral
Jauréguiberry abandonne pour le porte-
feuille ministériel le poste le plus recher-
ché de la marine, le commandement en chef
de l'escadre d'évolutions. Depuis plusieurs
années il a complètement abandonné la vie
politique, à laquelle ne paraissent le pré-
disposer ni ses goùts ni ses travaux anté-
rieurs.
Le successeur indiqué de M. Fourichon,
dans le cas où l'honorable amiral se déci-
derait à abandonner le ministère, est, de
l'avis unanime de la marine, M. l'amiral
Pothuau. Nous savons toutes les difficultés
que l'on rencontre pour organiser notre
force navale, qu'il s'agisse du personnel ou
du matériel; il a pu l'étudier dans un temps
où tout manquait, argent et approvisionne-
ments, où nos marins avaient pu oublier le
métier de la mer, au milieu des opérations
de nos armées; c'était, là que parmi tant de
braves sortis des rangs de la flotte, l'ami-
ral Pothuau avait su conquérir entre tous
ce titre de brave. Pendant deux ans la ma-
rine l'a vu à l'œuvre, aux prises avec un
budget dont il avait dû, par dévouement
patriotique, accepter une réduction momen-
tanée, développant les écoles, ces pépiniè-
res de nos spécialités, créant de toutes
pièces le nouveau programme de la flotte
correspondant à l'état maritime réduit que
nous permettait notre situation financière.
Les nouveaux navires construits sur ce
programme commencent actuellement à sor-
tir de nos chantiers, et mieux que tout au-
tre, l'amiral Pothuau peut poursuivre l'a-
chèvement de cette flotte nouvelle dont il a
conçu le projet d'ensemble.
Il faut à la marine un ministre qui puisse
rester longtemps à la tète des affaires, et
ceci non-seulement pour la marine de
guerre, mais encore pour la marine mar-
chande, qui a besoin qu'on se préoccupe de
ses intérêts en détresse. Il faut que ce mi-
nistre soit sùr de trouver d'avance dans le
Parlement et, ce qui est plus difficile en-
core, d'y conserver l'appui d'une grande
majorité. A ce titre encore, M. l'amiral Po-
thuau se trouve tout désigné par la situation
qu'il avait acquise dans l'ancienne Assem-
blée et qu'il a gardée dans le Parlement ac-
tuel.
LES NOTABLES COMMERÇANTS
Êtes-vous de ceux qui tiennent beau-
coup aux noms ? Si vous êtes de ceux-
là, changez le titre de ces articles. Si
vous êtes au contraire de ceux qui at-
tachent plus de prix à la réalité qu'à
l'apparence et à la chose qu'au nom,
vous ne vous étonnerez pas que je con-
serve ce titre. Il se fait mieux compren-
dre, à mon avis, que tout autre, et dit
mieux ce qu'il veut dire.
Aussi bien, ce mot est celui qui est
demeuré dans l'usage.
Il y a quelques jours, on pouvait lire
dans tous les journaux : « MM. les no-
tables commerçants sont convoqués tel
jour pour élire les juges au tribunal de
commerce. » Toutes les lettres de
commerçants que je reçois parlent de
« notables commerçants »; j'en reçois
même qui sont signées : « X., notable
commerçant. »
Et cependant il n'y a plus, à parler
exactement, de « notables commer-
çants. » Il n'y en a plus depuis la loi du
21 décembre 1871. On me le fait obser-
ver, et l'on a parfaitement raison.
Seulement savez-vous ce qu'il y a à la
place ? Il y a des « commerçants recom-
rnandables par leur probité, esprit d'or-
dre et d'économie. » Ainsi l'ordonne la
nouvelle rédaction de l'article 628 du
code de commerce. Si vous voyez la
différence entre les « notables commer-
çants » et les commerçants recomman-
dables par leur probité, esprit d'ordre
et d'économie, » vous pouvez deviner
à coup sùr les rébus de Y Illustration.
Ce ne sont plus des « notables commer-
çants » qui élisent les membres de la
chambre de commerce et les juges au
tribunal de commerce ; non, ce sont
des « commerçants recommandables,
etc. » Le titre est un peu long à écrire
quand il faut le répéter souvent. C'est
pour cela sans aucun doute que l'opi-
nion publique s'est obstinée à garder
l'ancien, qui était court et clair. Pour
un peu, je fais comme elle.
Les « commerçants recommandables
par. etc.,» ont tous les droits dont jouis-
saient autrefois les « notables commer-
çants, » et ils les ont seuls ; ils ne sont
pas plus nombreux que ne l'étaient les
notables, ou si peu que la chose ne vaut
pas la peine d'en parler.
On devine pourquoi la loi de 1871 était
faite ? Précisément pour mettre fin à ce
régime des notables qui froissait la
conscience publique, et dont les cham-
bres de commerce elles-mêmes deman-
daient en grand nombre la suppression.
Il s'est même passé, à cette occasion,
une fort divertissante comédie. M. Du-
faure avait présenté, au nom du gou-
vernement de M. Thiers, un projet de
loi sur les élections consulaires, Ce pro-
jet rétablissait le régime qui avait existé
de 1848 à 1852; c'était à peu prè.s celui
dont M. Magnin et M. Coçhery, en avril
1870, avaient demandé au Corps légis-
latif l'établissement. Le projet de M. Du-
faure accordait l'électorat à tout négo-
ciant patenté depuis cinq années, domi-
cilié depuis deux ans dans le ressort
d'un tribunal de commerce.
Ce n'était pas, on le voit, le libéra-
lisme qui manquait à ce projet de loi.
Mais l'Assemblée nationale était ani-
mée déjà à la fin de 1871 pour la liberté
de cet amour profond dont elle a plus
tard donné tant de preuves. La majorité
de la commission trouva le projet du
gouvernement dangereux et funeste.
M. Batbie, rapporteur de la commis-
sion, présenta en son nom un projet
conçu dans un esprit bien différent, et
voici alors ce qui arriva. On vit soudain
l'honorable M. Dufaure, enchanté au
fond de se voir imposer une loi réac-
tionnaire, abandonner le projet présen-
té par lui-même et se ranger au sys-
tème opposé patronné par la commis-
sion. C'est le projet du gouvernement
qui fut alors repris à titre d'amende-
ment par la gauche, et M. Ricard, au
nom des républicains, prononça à cette
occasion un superbe discours dont nous
parlerons demain à nos lecteurs. M.
Dufaure ne dédaigna pas de le combat-
tre, renouvelant la remarquable his-
toire du sabre de M. Prudhomme.
Que fit la majorité ? Elle fit ce que font
les majorités toutes les fois qu'elles veu-
lent paraître changer une loi sans la
changer réellement. On fit une modifi-
cation de rédaction. On garda le sac en
y mettant une autre étiquette. Le nom
de « notable » était impopulaire, impos-
sible à maintenir. On dit : « Changeons
le nom de notables et gardons l'insti-
tution » et le tour fut fait.
Et voilà comment depuis décembre
1871, au lieu de « notables commer-
çants, » nous avons aujourd'hui des
commerçants recommandables par la
probité, l'esprit d'ordre et d'économie.
On s'y'trompait si peu au cours
même de la discussion que voici les ter-
mes dont se servait M. Ricard. Opposant
le projet du gouvernement, qu'il repre-
nait, au projet de la commission, il di-
sait : « Le gouvernement vous propose
de supprimer purement et simplement
les notabilités commerciales; tandis que
le projet de la commission propose de
les reconstituer sous une forme nou-
velle. »
Et M. Magnin,terminaità son tour son
discours par cette phrase : « Je voterai
et j'engage la Chambre à voter contre un
article qui rétablit les notablescommer-
çants. »
J'exhorte ceux de mes confrères qui
ont bien voulu remarquer judicieuse-
ment que les « notables» n'existent plus
aujourd'hui à lire la séance du 19 dé-
cembre 1871. La question au fond est
de savoir si les figurants qui ont changé
de costume dans la coulisse sont ou
non les mêmes figurants.
CHARLES BIGOT.
———————— + ————————
Nous publions plus loin le compte-rendu
adressé par M. Bamberger, député de la
Seine, à ses électeurs.
- .+
Nouvelles d'Orient
Saint-Pétersbourg, 3 janvier.
Le Nouveau Temps publie la dépêche suivante
de Constantinople :
« Les délégués ont déclaré hier à la Porte
qu'ils quitteraient Constantinople si le gouver-
nement turc ne donnait pas son entier assenti-
ment aux résolutions de la conférence.
« Le général Ignatieff a télégraphié à Sé-
bastopol,. demandant qu'on lui expédiât le
yacht impérial Hericlik. »
.nstanlinople, 2 janvier, soir.
Dans l'entrevue qu'il a eue hier avec le
grand-vizir, le marquis de Salisbury a insisté
sur l'intérêt qu'a la Turquie d'accepter les pro-
positions de l'Europe. Le grand-vizir a répondu
qu'il pouvait céder sur quelques points, mais
qu'il repoussait toutes les conditions qui étaient
contraires à la dignité de la Turquie.
Des pourparlers ont eu lieu aujourd'hui en-
tre les plénipotentiaires européens et ils conti-
nueront demain.
Midhat-Pacha a rendu visite aujourd'hui à
plusieurs plénipotentiaires.
Le conseil des ministres turcs doit prendre
demain une résolution qui sera communiquée
à la conférence, à la réunion de jeudi.
En cas de refus de la part de la Turquie, le
général Ignatieff et le marquis de Salisbury
partiront immédiatement.
La Turquie active ses préparatifs militaires.
Zia Bey est nommé gouverneur de Syrie et'
Mouktar-Pacha de l'île de Crète.
On assure que Haiit-Chérif-Pacha serait nom-
mé ambassadeur à Beriin.
Le gouvernement doit, dit-on, émettre pro-
chainement pour sept millions de livres de
papier-monnaie, dont une partie servirait à
l'amortissement de la dette ilottHiite et au re-
trait partiel de la monnaie de cuivre.
L'A gence russe nous communique la dépêche
suivante :
St-Pétersbourg, 3 janvier 1877, 3 h. 50 s.
Les contre-propositions de la Turquie sont
la négation des points essentiels du program-
me arrêté dans les réunions préliminaires de la
conférence. -
Les plénipotentiaires des six puissances ont
donné à la Porte jusqu'à jeudi pour faire sa
réponse définitive. En attendant, ils se réu-
nissent pour aviser. Ils ont consigné dans une
espèce de protocole les points sur lesquels re-
pose leuraccord. -
Le refus de la Porte est considéré comme
certain.
Sir Elliot partira pour cause de santés Lord
Salisbury quittera Constantinople sur cette
seule raison que la conférence aura pris lin.
Le général Ignatieff partira en congé sur le
yacht impérial Hériclik, qu'il a mandé de Sé-
bastopol par dépêche télégraphique.
Le grand-duc Nicolas va beaucoup mieux.
Le prince Orloff et le comte Schouvaloff n'ont
pas éLé chargés de négocier une occupation de
la Bulgarie par les troupes belges. Cette idée
a été abandonnée après la réponse faite par
M. Malou à la Chambre des députés de Bru-
xelles. -
Le Daily News publie les dépêches sui-
vantes :
Constantinople, 2 janvier.
La situation est très-grave. Il est imposs ble
de prévoir ce qui va arriver ou de savoir où en
sont les choses ; mais la situation est arrivée à
un point qui exige une prompte solution dans
un sens ou dans l'autre.
La moitié du monde diplomatique considère
la conférence comme un échec. L autre moitié
ne dit rien. On exprime l'avis que la Russie dans
le cas où la Turquie refuserait d'accepter la
projet de la conférence, laissera aux puissances
le soin de la forcer à accepter ; de cette façon,
la responsabilité de l'échec retomberait en
grande partie sur lord Salisbury, les puissances
n'étant pas prêtes à imposer leur programme
si la Russie refuse de le faire.
On ajoute que la Russie refuse de forcer la
Porte à exécuter un projet qui n'est plus russe,
mais européen, que les puissances ne peuvent
consentir à une occupation commune et qu'en
conséquence la conférence marche au devant
d'un échec complet et que la Porte en fera à sa
tête, en se moquant de l'Europe.
Les délégués turcs ne veulent discuter le
projet de la conférence que si les points sui-
vants sont abandonnés :
1° Commission internationale ;
2° Occupation étrangère ;
3° Intervention des puissances à propos de
la nomination des gouverneurs;
4° Le règlement des impôts ;
5° Le règlement relatif aux Circassiens ;
6° Les nouvelles divisions territoriales;
7° La garde nationale et trois autres points
essentiels du programme de la conférence.
On ne peut deviner ce qui arrivera. Une chose
est certaine, c'est que ni lord Salisbury, ni le
général Ignatieff n'ont l'intention de céder.
Une autre chose certaine, c'est que quelqu'un
encourage les Turcs à résister. Qui est-ce?
Quelques-uns croient que c'est l'Autriche, qui
suivrait la politique de Metternich en 1826, en
prétendant marcher de concert avec les puis-
sances et en encourageant secrètement la Tur-
quie à résister, consentant et proposant con-
férence après conférence, pour amener des
échecs successifs.
S'il en est ainsi, la politique de l'Autriche
et condamnée au même sort désastreux, au
même insuccès que celle de Metternich.
D'autres supposent quec'est un autre ambas-
sadeur qui soutient les Turcs dans leur résis-
tance. Quant à moi, je ne crois pas à cette
dernière version.
INFORMATIONS
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin sous la présidence du maréchal de
Mac-Mahon.
Il s'est occupé d'un mouvement préfecto-
ral qui paraîtra, comme nous l'avons an-
noncé, samedi ou dimanche.
M. le ministre des travaux publics est
parti mardi soir pour Bruxelles.
M. Christophle se propose d'utiliser les
vacances parlementaires, en étudiant sur
place les diverses questions qui se ratta-
chent à l'organisation des chemins de fer
de la Belgique et des Pays-Bas.
De Bruxelles le ministre se rendra à La
Haye et visitera les principaux centres de
la Hollande.
La Banque de Belgique a fait prononcer
mardi la faillite de la Banque franco-hol-
landaise.
Les principaux intéressés français ont
frappé immédiatement d'opposition ce juge-
ment, qui porterait une grave atteinte à
leurs intérêts.
On mande de Paris à la Gazette de Colo-
gne que le comte de Germiny s'est réfugié
dans un couvent belge.
Un journal annonçait hier matin que le
prince Orloff avait eu la veille une entrevue
avec le président du conseil des ministres,
et que cet entretien avait pour objet les nou-
velles d'Orient qui sont de telle nature qu'el-
les ont rendu indispensable un conseil des
ministres pour aujourd'hui.
Nous croyons savoir que l'entrevue du
prince Orloff et de M. Jules Simon avait un
caractère tout privé, l'ambassadeur de Rus-
sie traitant spécialement les affaires diplo-
matiques avec M. le ministre des affaires
étrangères.
La réunion du conseil n'a pas été le ré-
sultat ae cette entrevue.
Le recensement de la population est ter-
miné dans les vingt arrondissements de Pa-
ris. On n'a pas encore mis en ordre les ren-
seignements recueillis sur tous les points,
mais on en sait assez, à ce qu'on assure,
pour pouvoir annoncer une augmentation
de prés de 60,000 dans le chiffre des habi-
tants de la capitale. En cinq années, c'est
une augmentation bien significative.
Le Journal des Débats, annonce, que, par
un décret, le président de la République a
déclaré nulles et de nul effet les délibéra-
tions du conseil d'arrondissement de Lyon,
par lesquelles cetté assemblée avait de-
mandé, sous forme de vœux, que les em-
ployés bonapartistes qui avaient sEm vi
sous le précédent gouvernement et qui
sont encore en fonctions fussent rem-
placés; — qu'il fùt institué des fêtes na-
tionales et qu'on choisit tie préférence
les anniversaires de la prise de la Bas-
tille et de l'avènement de la République au
4 septembre ; — que tous les ministres des
Vendredi 5 Janvier 1877
- ~L _,
ADMINISTRATION
Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
srax© <3.0 HiÊ&JTsfcy©-fet;©, £5 2a.
Les Manuscrits non insérés ne seront pas rendus.
ABONNEMENTS
RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
SA,, r-ue de Lafayetto
Les Lettres non (Affranchies seront refusées,
ABONNEMENTS
JOURNAL RÉPUBLICAIN CONSERVATEUR
PARIS
Trois mois 13-fr.
Stxmo's. S."» »
Un an. 50 »
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1 Trois mois 1G fr.
Six mois ÎS2- »
[Un an. 02 A
ANNONCES : Chez MM. LAGRANGE, CER/a^
0) place de la Hont-sr, 0
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Six mois 25 »
Un an. 60 »
DEPARTEMENTS
Trois mois 16 fr.
Six mois. sa » -
Un an. 62 »
ABHONCES : Chez MM. LAGRANGE, CERF et Cu :
0, place de la Bonne) a -1
1
Par suite du nouveau traité
postal, les prix d'abonnement pour
tous les pays d'Europe, la FRANCE
EXCEPTÉE, ont été fixés comme
suit :
3 mois. 17 francs.
6 mois. 34 —
12 mois. 66 —
Les abonnements pour la France
et l'étranger partent du 1er et du 15
de chaque mois.
Après SOMMA., nous publie-
rons en feuilleton un grand roman
inédit que MM. Erckmann & Cha-
trian terminent pour le XIXe Siècle.
Il est intitulé :
.NOTRE SEIGNEUR JEAN-PIERRE
BULLETIN
1
Paris, 4 janvier 1817.
La situation reste la môme à Constanti-
nople. A l'issue de la dernière séance de la
conférence, le marquis de Salisbury a eu
une longue entrevue avec Midhat-Pacha.
L'ambassadeur anglais a vivement insisté
auprès du grand-vizir pour que la Turquie
accepte les propositions élaborées par la
conférence préliminaire. Le grand-vizir a
répondu, nous dit une dépèche de Constanti-
-nople, qu'il pouvait céder sur quelques
points, mais qu'il se verrait obligé de re-
pousser toutes les conditions qui lui sem-
bleraient contraires à la dignité de la Tur-
quie.
La même dépêche ajoute que le conseil
.des ministres turcs a dû prendre hier une
résolution qui sera communiquée aujour-
d'hui à la conférence. Ajoutons, cependant,
que, d'après un bruit répandu hier à Paris,
la réunion de la conférence serait remise
4 lundi prochain, et que les plénipotentiai-
res auraient accordé ce dernier délai à la
Porte.
Voilà, à peu près, toutes les nouvelles de
-la journée, car nous n'ajoutons pas une
grande foi à la dépêche publiée par les jour-
naux russes, dépêche d'après laquelle le
général Ignatieff aurait télégraphié à Sé-
bastopol pour demander qu'on lui expédie
un yacht afin de pouvoir quitter Constanti-
'nopl sans délai. Ce télégramme nous sem-
ble rédigé surtout dans le but de calmer
l'opinion publique en Russie, car il n'a même
pas l'avantage d'intimider les Turcs.Ceux-ci
-savent très-bien, en effet, que le général
Ignatieff, comme tous les ambassadeurs, a
toujours un ou deux stationiraires à sa dis-
position, et qu'il peut quitter Constantinople
demain si bon lui semble.
Il est une autre nouvelle que l'on in-
voque comme une preuve de la bonne foi
de l'Angleterre et aussi comme uIÍ indice
de sa résolution d'exercer une pression
considérable sur la Porte. Nous voulons
parler du départ de la flotte anglaise de la
baie de Besika. La flotte anglaise a levé
l'ancre et quitté Besika, cela n'est pas dou-
teux ; mais la vraie raison de ce départ est
l'impossibilité où elle se trouvait de rester
plus longtemps mouillée dans cette baie. Il
y a quelques jours, pendant un coup de
vent assez violent, deux vaisseaux cuiras-
sés ont été sur le point de se heurter et de
s'entre-détruire, les ancres ne mordant pas
eur le fond. S'est à la suite de cet accident,
qui a démontré que l'hivernage serait pres-
que impossible dans- ces parages, que la
flotte anglaise a reçu l'ordre de se rendre
au Pirée.
La prochaine séance de la conférence,
qu'elle se tienne aujourd'hui ou qu'elle soit
remiso à lundi, sera-t-elle décisive? Nous
ne le croyons pas. Le refus opposé par la
Turquie à toutes les demandes des puissan-
ces n'est certainement pas le dernier mot
4e la Porte. Il est certaines de ces deman-
des qu'elle finira par accorder après de lon-
gues négociations ; mais, comme le répon-
dait Midhat-Pacha au marquis de Salisbury,
11 est certains points sur lesquels elle se
montrera inflexible. Or, il est évident que,
sur ces mêmes points, la Russie ne pourra
faire aucune nouvelle concession, et c'est
pourquoi nous refardons la guerre comme
inévitable dans un délai qui ne peut pas être
bien long.
Nos lecteurs n'ont peut-être pas oublié
les observatiens que nous présentions hier
relativement à la dépêche « de l'armistice»
parvenue — ei malencontreusement ou si
heureusement, comme on voudra,—juste
é la minute psychologique de la liquida-
tion, avec trente-six heures de retard. Ces
observations n'étaient certainement pas
sans importance, puisque le Moniteur uni-
versel publie la note suivante, qui lui est évi-
demment communiquée par M. le ministre
jies affaires étrangères : -
D'après des vérifications matérielles qui ne
sauraient nous inspirer aucun doute, ce n'est
pas dans la journée de jeudi 28 décembre, mais
dans celle du vendredi 29, que la décision rela-
tive à la prolongation de l'armistiee a été prise.
Dans ces conditions, il n'y aurait plus rien
d' irréguli-er à ce que la nouvelle dont il
s'agit n'eût été connue en Europe que samedi
matin.
EKourse de XPsuris
Clêtvre le 2 janv. le 3janv HalUlle Ba.e
3 O/O
Comptant. , 71 .• 7} , „„•/• 35
com ptant.. 70 8.j :1: 71 Ï5 :11: 4-,) 1 f.
Fin cour., 70 8; 71 t-o 4a
I.; .'9-.I
-âjaf?5«. 101 50 50
5 0/0
Jompteat.. 105 75 1S5 &5 10
fia caur 10565 105 95 ,/. 30
PETITE BOURSE DU SOIR
Emprunt 3 0/0 71 fr. 20, 71 fr., 71 12 ]/2.
Emprunt 5 0/0 105 fr. 82 112, 93 3/4, 65,
105 fr. 7i 1/2, 75
5 0/0 turc. 11 fr. 45, 25
Banque Ottomane 373 fr. 75, demandée.
Egypte 249 fr. 37, 248 75.
———————— ————————
Nos adversaires ne se lassent pas de
représenter les républicains comme des
êtres sans pudeur, sans fierté, qui ne
voient dans le triomphe de leurs princi-
pes que l'occasion de gagner de l'argent
en s'emparant de toutes les places. Nous
ne nous lasserons pas de leur répondre
qu'ils se connaissent mal, et qu'ils don-
nent sottement leursqualitésaux autres.
Hier soir l'Union et la Gazette de
France se signalaient entre tous leurs
confrères de la bonne presse par une
indignation vertueuse contre ce qu'on
a coutume d'appeler l'ardeur des répu-
blicains à la curée des places. On trou-
vera donc tout naturel que nous met-
tions sous les yeux de ces royalistes
aussi purs que désintéressés certain
passage d'une brochure (1) publiée en
1816 par un nommé F. Guizot, maître
des requêtes au conseil d'Etat, et pro-
fesseur d'histoire moderne à l'Acadé-
mie de Paris. Nous avons déjà fait bien
des citations concernant le même sujet,
mais on nous rendra cette justice que
nous nous sommes toujours adressés à
des auteurs peu suspects de malveil-
lance à l'égard des royalistes. Voiei donc
les plaintes que M. Guizot met dans la
bouche des défenseurs du trône et de
l'autel en 1816 :
« Les révolutionnaires et les bona-
» partistes occupent tous les emplois ;
» eux seuls sont jugés capables de les
» rsmplir; on prodigue les rubans et les
» croix aux soldats qui ont combattu à
» Waterloo; on les refuse aux volontaires
» qui ont suivi le roi à Gand; l'épura-
» tion des tribunaux n'a eu pour but
» que de les peupler de prêtres mariés;
» partout, dans toutes les carrières,
» dans toutes les administrations, la
» qualité de buonapartiste est une
» preuve de capacité, un titre à la fa-
» veur : celle de royaliste, un brevet
» d'incapacité, un motif d'exclusion.»
Mais tout cela est de l'histoire an-
cienne. Nous sommes convaincus, par
exemple, qu'on ne trouverait pas, en
1877, un seul royaliste qui osât mettre
une seconde en parallèle l'héroïsme des
braves qui essayèrent à Waterloo de
sauver la Franco d'une invasion et le
patriotisme des rédacteurs du Moni-
teur de Gand. Laissons le passé; ne par-
lons que du présent. Qu'ont fait les
coalisés de toutes les monarchies après
le 24 mai ? Quel langage tenaient leurs
journaux ? On dirait vraiment qu'il soit
impossible de s'en souvenir, ou qu'on
ne puisse retrouver dans la collection du
Journal qlfiÓelles listes de révocations
de tous les fonctionnaires soupçonnés
de républicanisme? Ah! le beau coup
de balai !
Notez bien que nous sommes loin d'en
faire un reproche aux Beulé, aux Bro-
glie et autres ministres.de l'ordre moral.
Ils étaient ou devaient être les exécuteurs
de la volonté des gens du 24 mai ; ils
avaient pour mission d'accomplir le pro-
gramme des coalisés qui était la destruc-
tion de la République. Il faut donc con-
venir qu'ils eussent été bien niais de ne
point débuter par se priver des services
des républicains. Eux-mêmes avaient
annoncé le projet d'instituer un gouver-
nementde combat contre la République;
le commencement de la sagesse était
donc de ne souffrir dans les rangs des
combattants que des ennemis déclarés
des institutions républicaines. Et certes,
nul mieux que ce premier ministère de
l'ordre moral n'a eu le droit de répéter
après Petit-Jean :
Ce que je sais le mieux, c'est mon commencement.
Encore un coup, nous ne trouvons
à cela rien à reprendre. Seulement on
nous permettra de demander la Gazette
de France et à l'Union. pourquoi elles
blâment si vertement chez les républi-
cainsune prétention qu'elles trouvaient,
et avec raison, si légitime chez les mo-
narchistes. Nous croyons qu'on n'est
jamais mieux servi que par soi-même,
et que des républicains n'eussent jamais
administré les départements comme ont
su le faire les préfets et sous-préfets de
MM. Beulé, de Broglie, de Fourtou et
Buffet. De même nous sommes persua-
dés que pour veiller aux intérêts de la
République, il n'est rien de tel que des.
républicains. -
A cela, MOUS entendons bien qu'on
nous crie : « Vous n'êtes que des men-
diants, des quémandeurs de places, des
affamés, des voraces, » et. le reste; mais
des injures, même répétées, il satiété,
ne sont point des arguments; et tant
qu'on n'aura pas pris la peine de nous
expliquer comment et pourquoi les
vainqueurs du 24 mai, qui voulaient dé-
truire la: République, ont eu raison de
confier les fonctions à des monarchis-
tes; comment et pourquoi les vain-
queurs du 20 février, qui veulent fon-
der la République, ont tort de vouloir,
confier les fonctions à des républicains,
(1) Du gouvernement représentatif fi de l'-etat
actuel de la France. Paris. Maradan, 1816.
tant que l'on n'aura pas fait cela, nous
continuerons à croire que c'est parce
qu'on serait fort en peine de s'en tirer
honorablement.
E. SCHNERB.
*
LES CIMETIÈRES
M. Hérold, sénateur, nous adresse la lettre
suivante :
Paris, le 3 janvier 1877.
Mon cher Sarcey,
A propos du cimetière de Lagny, je ne
crois pas inutile de vous rappeler que le ré-
gime de ce nouveau cimetière est celui de
tous les cimetières de Paris sans exception.
Ces cimetières ne sont pas bénits ; la béné-
diction des fosses particulières est seule-
ment autorisée. C'est pour cela que Paris
n'a jamais été le théâtre de scènes d'into-
lérance semblables à celles qui se sont pro-
duites sur tant d'autres points de la France,
et qui ont leur prétexte ou leur cause,
comme vous voudrez, uniquemment dans
le fait de l'appropriation au profit de l'Eglise
catholique du sol du cimetière par la béné-
diction générale. Il est important d'insister
sur ce point, parce qu'il serait très-désira-
ble que le régime des cimetières de Paris et
du cimetière de Lagny fût généralisé. Il
m'est, comme à vous, absolument impos-
sible de comprendre comment la conscience
des catholiques peut être blessée de ce que,
la terre dans laquelle reposent les catholi-
ques étant bénite, la terre d'à côté ne l'est
pas. Et tout le monde saisit au contraire la
raison d'ordre public qui veut qu'on écarte
des cérémonies funèbres les luttes religieu-
ses et le scandale. Aussi, dans mon rapport
de 1874 sur le futur cimetière de Méry, ai-je
eu soin de proposer pour ce cimetière le
régime parisien, et le conseil municipal a
approuvé ma proposition. Si les choses se
passaient de même désormais pour tous les
nouveaux cimetières, tout le monde y ga-
gnerait.
Bien à vous,
HÉROLD.
4,
Un journal monarchiste, hier, com-
mençait ainsi son article: « Les répu-
blicains inaugurent la nouvelle année
en se traitant de Turcs à Maures. »
Suivaient des extraits d'une polémique
engagée entre deux ou trois journaux
républicains. C'est assez, paraît-il, pour
que nos adversaires se frottent les
mains et se répètent que la discorde est
au camp d'Agramant, etc., etc.
Le croient-ils? et, vraiment, est-ce de
benne foi qu'ils constatent aujourd'hui
chez nous les divisions que si souvent
nous avons constatées chez eux ? Il con-
vient alors de leur montrer en quoi dif-
férent nos « dissensions intestines » et
les leurs. Les républicains peuvent, en
effet, porter des jugements divers, et
quelquefois contraires, sur beaucoup
de points ; mais il en est un où vous les
trouverez toujours unis : ils sont et res-
teront d'accord pour maintenir la Ré-
publique, de même qu'ils ont été d'ac-
cord au mois de février 1875 pour la
fonder. Ainsi point de divisions, chez
nous, sur la question de gouvernement.
N'est-ce pas au contraire sur la ques-
tion de gouvernement que les monar-
chistes sont et demeureront éternelle-
ment désunis?
Voilà la différence qui marque notre
force et leur faiblesse. C'est pourquoi
les républicains peuvent à bon droit
signaler comme funestes au parti mo-
narchique les querelles sans cesse re-
naissantesqui s'élèvent entre Frohsdorf,
Chantilly, Chislehurst, —tandis que les
dissentiments signalés chez nous par
les monarchistes ne tirent à aucune
conséquence pour l'avenir de la Répu-
blique et du parti républicain. C'est
par naïveté que quelques badauds s'y
arrêtent, puisque l'on sait bien que, le
jour où la République serait menacée,
les républicains serreraient les rangs ;
et l'on sait aussi que, précisément, ce
même jour, nulle discipline ne saurait
contenir les ambitions contraires des
monarchistes.
Oui, sans doute, il existe dans le
parti républicain des divergences d'opi-
nion, et qui sont nombreuses. Quoi de
plus naturel, en somme? Mais c'est en
faveur de la République que tourne la
seule conclusion qu'on en peut tirer.
C'est un républicain que M. Dufaure ;
c'est un républicain que M. Jules Simon ;
c'est un républicain que M. Gambetta;
et c'est encore un républicain que M.
Louis Blanc. Est-ce à dire pourtant que
leurs opinions ne forment qu'une seule
et même opinion politique? Non, certes!
Or, qu'est-ce que cela prouve, sinon que
la République a gagne dans notre pays
un terrain assez vaste pour que des
hommes, séparés d'ailleurs par des dis-
sidences quelquefois profondes, puis-
sent cependant s'y rencontrer ?
La République a été acceptée depuis
cinq ans par la grande majorité de la
nation ; notre ambition, c'est qu'elle
soit acceptée bientôt, comme le seul
gouvernement possible, par la nation
tout entière. Les journaux monarchis-
tes ne contesteront point que, plus elle
comptera d'adhérents, plus elle sera
forte. Et pourtant u'est-il pas certain que,
plus elle comptera d'adhérents, plus les
opinions particulières de ses adhérents
seront divisées ? La monarchie consti-
tutionnelle est aujourd'hui la forme de
gouvernement la plus chère au peuple
anglais ; cela empêche-t-il que, chez
nos voisins, les whigs et les tories
se traitent souvent «de Turcs à Maures?»
En quoi le principe de la monarchie
»
constitutionnelle en est-il affaibli, si
ces mêmes tories et ces mêmes whigs
y sont également dévoués?
De même chez nous. Il suffit que
nous soyons d'accord sur la forme de
gouvernement que nous avons adop-
tée ; mais chacun reprend sa liberté
personnelle dans tout le reste. Celui-ci
penche plus à gauche, celui-là plus à
droite ; l'un croit mieux de passer par
ici, l'autre par là : qu'importe, si tous
sont résolms à conserver la Républi-
que ? Les questions de conduite parti-
culière séparent trop souvent les répu-
blicains ; mais la question de gouverne-
ment les réunit toujours. C'est quelque
chose que cela, et nos adversaires de la
triple alliance monarchiste seraient trop
fiers s'il leur était permis d'en dire au-
tant.
EUG. LIÉBERT.
————— ——— 4
Nous avons annoncé dernièrement, d'a-
près divers journaux, le remplacement au
ministère de la marine de M. l'amiral Fou-
richon par M. l'amiral Jauréguiberry. Cette
nouvelle est, paraît-il, complètement in-
exacte, du moins dans sa seconde partie. Il
est possible que M. l'amiral Fourichon
veuille se reposer des fatigues de sa longue
et si honorable carrière maritime, mais il
est tout à fait improbable que M. l'amiral
Jauréguiberry abandonne pour le porte-
feuille ministériel le poste le plus recher-
ché de la marine, le commandement en chef
de l'escadre d'évolutions. Depuis plusieurs
années il a complètement abandonné la vie
politique, à laquelle ne paraissent le pré-
disposer ni ses goùts ni ses travaux anté-
rieurs.
Le successeur indiqué de M. Fourichon,
dans le cas où l'honorable amiral se déci-
derait à abandonner le ministère, est, de
l'avis unanime de la marine, M. l'amiral
Pothuau. Nous savons toutes les difficultés
que l'on rencontre pour organiser notre
force navale, qu'il s'agisse du personnel ou
du matériel; il a pu l'étudier dans un temps
où tout manquait, argent et approvisionne-
ments, où nos marins avaient pu oublier le
métier de la mer, au milieu des opérations
de nos armées; c'était, là que parmi tant de
braves sortis des rangs de la flotte, l'ami-
ral Pothuau avait su conquérir entre tous
ce titre de brave. Pendant deux ans la ma-
rine l'a vu à l'œuvre, aux prises avec un
budget dont il avait dû, par dévouement
patriotique, accepter une réduction momen-
tanée, développant les écoles, ces pépiniè-
res de nos spécialités, créant de toutes
pièces le nouveau programme de la flotte
correspondant à l'état maritime réduit que
nous permettait notre situation financière.
Les nouveaux navires construits sur ce
programme commencent actuellement à sor-
tir de nos chantiers, et mieux que tout au-
tre, l'amiral Pothuau peut poursuivre l'a-
chèvement de cette flotte nouvelle dont il a
conçu le projet d'ensemble.
Il faut à la marine un ministre qui puisse
rester longtemps à la tète des affaires, et
ceci non-seulement pour la marine de
guerre, mais encore pour la marine mar-
chande, qui a besoin qu'on se préoccupe de
ses intérêts en détresse. Il faut que ce mi-
nistre soit sùr de trouver d'avance dans le
Parlement et, ce qui est plus difficile en-
core, d'y conserver l'appui d'une grande
majorité. A ce titre encore, M. l'amiral Po-
thuau se trouve tout désigné par la situation
qu'il avait acquise dans l'ancienne Assem-
blée et qu'il a gardée dans le Parlement ac-
tuel.
LES NOTABLES COMMERÇANTS
Êtes-vous de ceux qui tiennent beau-
coup aux noms ? Si vous êtes de ceux-
là, changez le titre de ces articles. Si
vous êtes au contraire de ceux qui at-
tachent plus de prix à la réalité qu'à
l'apparence et à la chose qu'au nom,
vous ne vous étonnerez pas que je con-
serve ce titre. Il se fait mieux compren-
dre, à mon avis, que tout autre, et dit
mieux ce qu'il veut dire.
Aussi bien, ce mot est celui qui est
demeuré dans l'usage.
Il y a quelques jours, on pouvait lire
dans tous les journaux : « MM. les no-
tables commerçants sont convoqués tel
jour pour élire les juges au tribunal de
commerce. » Toutes les lettres de
commerçants que je reçois parlent de
« notables commerçants »; j'en reçois
même qui sont signées : « X., notable
commerçant. »
Et cependant il n'y a plus, à parler
exactement, de « notables commer-
çants. » Il n'y en a plus depuis la loi du
21 décembre 1871. On me le fait obser-
ver, et l'on a parfaitement raison.
Seulement savez-vous ce qu'il y a à la
place ? Il y a des « commerçants recom-
rnandables par leur probité, esprit d'or-
dre et d'économie. » Ainsi l'ordonne la
nouvelle rédaction de l'article 628 du
code de commerce. Si vous voyez la
différence entre les « notables commer-
çants » et les commerçants recomman-
dables par leur probité, esprit d'ordre
et d'économie, » vous pouvez deviner
à coup sùr les rébus de Y Illustration.
Ce ne sont plus des « notables commer-
çants » qui élisent les membres de la
chambre de commerce et les juges au
tribunal de commerce ; non, ce sont
des « commerçants recommandables,
etc. » Le titre est un peu long à écrire
quand il faut le répéter souvent. C'est
pour cela sans aucun doute que l'opi-
nion publique s'est obstinée à garder
l'ancien, qui était court et clair. Pour
un peu, je fais comme elle.
Les « commerçants recommandables
par. etc.,» ont tous les droits dont jouis-
saient autrefois les « notables commer-
çants, » et ils les ont seuls ; ils ne sont
pas plus nombreux que ne l'étaient les
notables, ou si peu que la chose ne vaut
pas la peine d'en parler.
On devine pourquoi la loi de 1871 était
faite ? Précisément pour mettre fin à ce
régime des notables qui froissait la
conscience publique, et dont les cham-
bres de commerce elles-mêmes deman-
daient en grand nombre la suppression.
Il s'est même passé, à cette occasion,
une fort divertissante comédie. M. Du-
faure avait présenté, au nom du gou-
vernement de M. Thiers, un projet de
loi sur les élections consulaires, Ce pro-
jet rétablissait le régime qui avait existé
de 1848 à 1852; c'était à peu prè.s celui
dont M. Magnin et M. Coçhery, en avril
1870, avaient demandé au Corps légis-
latif l'établissement. Le projet de M. Du-
faure accordait l'électorat à tout négo-
ciant patenté depuis cinq années, domi-
cilié depuis deux ans dans le ressort
d'un tribunal de commerce.
Ce n'était pas, on le voit, le libéra-
lisme qui manquait à ce projet de loi.
Mais l'Assemblée nationale était ani-
mée déjà à la fin de 1871 pour la liberté
de cet amour profond dont elle a plus
tard donné tant de preuves. La majorité
de la commission trouva le projet du
gouvernement dangereux et funeste.
M. Batbie, rapporteur de la commis-
sion, présenta en son nom un projet
conçu dans un esprit bien différent, et
voici alors ce qui arriva. On vit soudain
l'honorable M. Dufaure, enchanté au
fond de se voir imposer une loi réac-
tionnaire, abandonner le projet présen-
té par lui-même et se ranger au sys-
tème opposé patronné par la commis-
sion. C'est le projet du gouvernement
qui fut alors repris à titre d'amende-
ment par la gauche, et M. Ricard, au
nom des républicains, prononça à cette
occasion un superbe discours dont nous
parlerons demain à nos lecteurs. M.
Dufaure ne dédaigna pas de le combat-
tre, renouvelant la remarquable his-
toire du sabre de M. Prudhomme.
Que fit la majorité ? Elle fit ce que font
les majorités toutes les fois qu'elles veu-
lent paraître changer une loi sans la
changer réellement. On fit une modifi-
cation de rédaction. On garda le sac en
y mettant une autre étiquette. Le nom
de « notable » était impopulaire, impos-
sible à maintenir. On dit : « Changeons
le nom de notables et gardons l'insti-
tution » et le tour fut fait.
Et voilà comment depuis décembre
1871, au lieu de « notables commer-
çants, » nous avons aujourd'hui des
commerçants recommandables par la
probité, l'esprit d'ordre et d'économie.
On s'y'trompait si peu au cours
même de la discussion que voici les ter-
mes dont se servait M. Ricard. Opposant
le projet du gouvernement, qu'il repre-
nait, au projet de la commission, il di-
sait : « Le gouvernement vous propose
de supprimer purement et simplement
les notabilités commerciales; tandis que
le projet de la commission propose de
les reconstituer sous une forme nou-
velle. »
Et M. Magnin,terminaità son tour son
discours par cette phrase : « Je voterai
et j'engage la Chambre à voter contre un
article qui rétablit les notablescommer-
çants. »
J'exhorte ceux de mes confrères qui
ont bien voulu remarquer judicieuse-
ment que les « notables» n'existent plus
aujourd'hui à lire la séance du 19 dé-
cembre 1871. La question au fond est
de savoir si les figurants qui ont changé
de costume dans la coulisse sont ou
non les mêmes figurants.
CHARLES BIGOT.
———————— + ————————
Nous publions plus loin le compte-rendu
adressé par M. Bamberger, député de la
Seine, à ses électeurs.
- .+
Nouvelles d'Orient
Saint-Pétersbourg, 3 janvier.
Le Nouveau Temps publie la dépêche suivante
de Constantinople :
« Les délégués ont déclaré hier à la Porte
qu'ils quitteraient Constantinople si le gouver-
nement turc ne donnait pas son entier assenti-
ment aux résolutions de la conférence.
« Le général Ignatieff a télégraphié à Sé-
bastopol,. demandant qu'on lui expédiât le
yacht impérial Hericlik. »
.nstanlinople, 2 janvier, soir.
Dans l'entrevue qu'il a eue hier avec le
grand-vizir, le marquis de Salisbury a insisté
sur l'intérêt qu'a la Turquie d'accepter les pro-
positions de l'Europe. Le grand-vizir a répondu
qu'il pouvait céder sur quelques points, mais
qu'il repoussait toutes les conditions qui étaient
contraires à la dignité de la Turquie.
Des pourparlers ont eu lieu aujourd'hui en-
tre les plénipotentiaires européens et ils conti-
nueront demain.
Midhat-Pacha a rendu visite aujourd'hui à
plusieurs plénipotentiaires.
Le conseil des ministres turcs doit prendre
demain une résolution qui sera communiquée
à la conférence, à la réunion de jeudi.
En cas de refus de la part de la Turquie, le
général Ignatieff et le marquis de Salisbury
partiront immédiatement.
La Turquie active ses préparatifs militaires.
Zia Bey est nommé gouverneur de Syrie et'
Mouktar-Pacha de l'île de Crète.
On assure que Haiit-Chérif-Pacha serait nom-
mé ambassadeur à Beriin.
Le gouvernement doit, dit-on, émettre pro-
chainement pour sept millions de livres de
papier-monnaie, dont une partie servirait à
l'amortissement de la dette ilottHiite et au re-
trait partiel de la monnaie de cuivre.
L'A gence russe nous communique la dépêche
suivante :
St-Pétersbourg, 3 janvier 1877, 3 h. 50 s.
Les contre-propositions de la Turquie sont
la négation des points essentiels du program-
me arrêté dans les réunions préliminaires de la
conférence. -
Les plénipotentiaires des six puissances ont
donné à la Porte jusqu'à jeudi pour faire sa
réponse définitive. En attendant, ils se réu-
nissent pour aviser. Ils ont consigné dans une
espèce de protocole les points sur lesquels re-
pose leuraccord. -
Le refus de la Porte est considéré comme
certain.
Sir Elliot partira pour cause de santés Lord
Salisbury quittera Constantinople sur cette
seule raison que la conférence aura pris lin.
Le général Ignatieff partira en congé sur le
yacht impérial Hériclik, qu'il a mandé de Sé-
bastopol par dépêche télégraphique.
Le grand-duc Nicolas va beaucoup mieux.
Le prince Orloff et le comte Schouvaloff n'ont
pas éLé chargés de négocier une occupation de
la Bulgarie par les troupes belges. Cette idée
a été abandonnée après la réponse faite par
M. Malou à la Chambre des députés de Bru-
xelles. -
Le Daily News publie les dépêches sui-
vantes :
Constantinople, 2 janvier.
La situation est très-grave. Il est imposs ble
de prévoir ce qui va arriver ou de savoir où en
sont les choses ; mais la situation est arrivée à
un point qui exige une prompte solution dans
un sens ou dans l'autre.
La moitié du monde diplomatique considère
la conférence comme un échec. L autre moitié
ne dit rien. On exprime l'avis que la Russie dans
le cas où la Turquie refuserait d'accepter la
projet de la conférence, laissera aux puissances
le soin de la forcer à accepter ; de cette façon,
la responsabilité de l'échec retomberait en
grande partie sur lord Salisbury, les puissances
n'étant pas prêtes à imposer leur programme
si la Russie refuse de le faire.
On ajoute que la Russie refuse de forcer la
Porte à exécuter un projet qui n'est plus russe,
mais européen, que les puissances ne peuvent
consentir à une occupation commune et qu'en
conséquence la conférence marche au devant
d'un échec complet et que la Porte en fera à sa
tête, en se moquant de l'Europe.
Les délégués turcs ne veulent discuter le
projet de la conférence que si les points sui-
vants sont abandonnés :
1° Commission internationale ;
2° Occupation étrangère ;
3° Intervention des puissances à propos de
la nomination des gouverneurs;
4° Le règlement des impôts ;
5° Le règlement relatif aux Circassiens ;
6° Les nouvelles divisions territoriales;
7° La garde nationale et trois autres points
essentiels du programme de la conférence.
On ne peut deviner ce qui arrivera. Une chose
est certaine, c'est que ni lord Salisbury, ni le
général Ignatieff n'ont l'intention de céder.
Une autre chose certaine, c'est que quelqu'un
encourage les Turcs à résister. Qui est-ce?
Quelques-uns croient que c'est l'Autriche, qui
suivrait la politique de Metternich en 1826, en
prétendant marcher de concert avec les puis-
sances et en encourageant secrètement la Tur-
quie à résister, consentant et proposant con-
férence après conférence, pour amener des
échecs successifs.
S'il en est ainsi, la politique de l'Autriche
et condamnée au même sort désastreux, au
même insuccès que celle de Metternich.
D'autres supposent quec'est un autre ambas-
sadeur qui soutient les Turcs dans leur résis-
tance. Quant à moi, je ne crois pas à cette
dernière version.
INFORMATIONS
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin sous la présidence du maréchal de
Mac-Mahon.
Il s'est occupé d'un mouvement préfecto-
ral qui paraîtra, comme nous l'avons an-
noncé, samedi ou dimanche.
M. le ministre des travaux publics est
parti mardi soir pour Bruxelles.
M. Christophle se propose d'utiliser les
vacances parlementaires, en étudiant sur
place les diverses questions qui se ratta-
chent à l'organisation des chemins de fer
de la Belgique et des Pays-Bas.
De Bruxelles le ministre se rendra à La
Haye et visitera les principaux centres de
la Hollande.
La Banque de Belgique a fait prononcer
mardi la faillite de la Banque franco-hol-
landaise.
Les principaux intéressés français ont
frappé immédiatement d'opposition ce juge-
ment, qui porterait une grave atteinte à
leurs intérêts.
On mande de Paris à la Gazette de Colo-
gne que le comte de Germiny s'est réfugié
dans un couvent belge.
Un journal annonçait hier matin que le
prince Orloff avait eu la veille une entrevue
avec le président du conseil des ministres,
et que cet entretien avait pour objet les nou-
velles d'Orient qui sont de telle nature qu'el-
les ont rendu indispensable un conseil des
ministres pour aujourd'hui.
Nous croyons savoir que l'entrevue du
prince Orloff et de M. Jules Simon avait un
caractère tout privé, l'ambassadeur de Rus-
sie traitant spécialement les affaires diplo-
matiques avec M. le ministre des affaires
étrangères.
La réunion du conseil n'a pas été le ré-
sultat ae cette entrevue.
Le recensement de la population est ter-
miné dans les vingt arrondissements de Pa-
ris. On n'a pas encore mis en ordre les ren-
seignements recueillis sur tous les points,
mais on en sait assez, à ce qu'on assure,
pour pouvoir annoncer une augmentation
de prés de 60,000 dans le chiffre des habi-
tants de la capitale. En cinq années, c'est
une augmentation bien significative.
Le Journal des Débats, annonce, que, par
un décret, le président de la République a
déclaré nulles et de nul effet les délibéra-
tions du conseil d'arrondissement de Lyon,
par lesquelles cetté assemblée avait de-
mandé, sous forme de vœux, que les em-
ployés bonapartistes qui avaient sEm vi
sous le précédent gouvernement et qui
sont encore en fonctions fussent rem-
placés; — qu'il fùt institué des fêtes na-
tionales et qu'on choisit tie préférence
les anniversaires de la prise de la Bas-
tille et de l'avènement de la République au
4 septembre ; — que tous les ministres des
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