Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1922-06-16
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 16 juin 1922 16 juin 1922
Description : 1922/06/16 (N18814). 1922/06/16 (N18814).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
27 ÏRAIRIÂL, AN 130. — N° 18814
he numéro : QtrmZE CENTIMES
VENDREDI 16 JUIN 1922. - N" 1M14
IFendatoui-9 (1369) 1
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIR -
ABONNEMENTS
Un ao Six mois Trois mots
SEINE & S.-ET-OISE. 38 » 20 n 10 »
FRANCE & COLONIES.. 41 » 22 » 11 »
ETRANGER. 49 » 26 » 13 »
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TRIBUNE LIBRE
« Ils ont des droits sur nous. »
La lecture banale des gazettes suffit à
faire connaître le sort réservé aux « im-
béciles qui furent soldats )).
Même, dans les «après l'audience», ou
M. Henri Vonoven inscrit, remarquable-
ment, les drames judiciaires de la vie
quotidienne, — des faits sont cités, qui
s'imposent à l'attention. Ici, c'est une ra-
mille bourgeoise, qui plaide contre la
dernière volonté exprimée par son en-
fant, tué à l'ennemi. Il prétendait, ce
jeune homme, assurer l'existence de sa
compagne. La famille a bien voulu don-
ner le sang de l'enfant; mais elle entend
garder l'argent. Elle le gardera; car,
tout en prononçant des paroles de re-
gret, les juges ne peuvent que constater
l'inexistence juridique du testament. La,
c'est une affaire de divorce. Le mari
s est engagé. La femme en a profité, -
puisqu'il est, heureusement, resté quel-
ques jeunes hommes dans les calmes
provinces. Aventure ordinaire, et qui
n'étonnait point les soldats: « Soldat,
toi qui dors sous la claire lune, - A
quoi rêves-tu? Je rêve au loupiot, qui
me dira papa, — fils d'un embusqué
que je ne connais pas. )) Aventure or-
dinaire. Mais elle écrivait, cette malheu-
reuse inconsciente, dans un style médio-
cre et prétentieux, des vérités surpre-
nantes. 1 - A. ,
Ce ne sont que des taits minimes dans
le grand drame. Or, de l'universalité des
faits, il faut bien déduire une règle. « Ils
ont des droits sur nous ». Ironique hypo-
crisie ! Ils peuvent, aujourd'hui, savourer
toute l'éloquence de ce boniment.
Sans doute, malgré la mauvaise vo-
lonté des gouvernements de la guerre et
l'hostilité des administrations, le Parle-
ment a manifesté, timidement d'ailleurs.
le désir de (( faire quelque chose Ce
- ne pas, cependant, quelques misera-
bles augmentations de - pensions:, accor-
dées sou à sou, qui permettront la vie,
aux veuves et aux orphelins ; ce n'est
pas l'octroi de quelques emplois infé-
rieurs qui réglera la question des mutilés,
non plus que celle des mobilisés spoliés.
Ceux-ci et ceux-là tiennent des con-
grès, formulent des protestations, émet-
tent des vœux, qu'ils soumettent aux
pouvoirs publics. Les ministres président
des banquets, et, la main tendue vers
l'Est, prononcent de fortes paroles. Puis,
chacun rentre chez soi. Les mutilés, en-
core, obtiennent quelques concessions.
Car, tout de même, l'impudeur de l'é-
goïsme ne peut se montrer par trop
cynique, mais les combattants non mu-
tilés, les mobilisés ruinés, — qu'ont-ils
.LL_
ODienur
La faute leur en revient, d'ailleurs.
On a eu des droits sur eux, et ils
n'en ont sur personne. Mais ils ont man-
que de synergie, et, trop souvent, d'es-
prit civique. Après tout, la mort, qui est
commune à tous les hommes, ou une
nouvelle mobilisation, réglera leur affai-
re. Le tout est de savoir attendre; et
ils savent attendre, ceux qui ont attendu
pendant cinq ans.
L'Union Nationale des Combattants
est parvenue, il est vrai, à faire déposer
une proposition de loi sur les fonction-
naires mobilisés. Cette proposition, dont
un gouvernement de la guerre eût dû
prendre l'initiative, a fini par être votée
par la Chambre, — trois ans après la
guerre! Où est-elle, maintenant? Quand
en finira-t-on? Et pourtant, en ce qui
concerne les pensions, elle n'est que ju-
ridique; elle ne comporte ni avantage, ni
dépense immédiate, et elle eût dû exis-
ter ckns la législation d'avant-guerre, si
l'administration avait eu le souci de la
logique et du bon sens.
Ainsi, l'Etat a montré et montre en-
core le mauvais exemple. Mais, - malgré
l'énergie active et probe de M. Beaure-
gard, secrétaire général, l'Union des
Combattants n'a pas fait preuve de vail-
lance. Les parvenus de la guerre sont
toujours en place et y sont mieux que ja-
mais. Aucune nomination n'a été rap-
portée. Aussi bien, les députés combat-
tants se sont bien gardés de causer la
moindre peine aux profiteurs immobili-
sés. Le souci de la Chambre bleu horizon
a paru être d'éviter le scandale, en je-
tant, au besoin, un os à ronger, sous la
forme de « majorations » dont bénéfi-
cierait l'ensemble des combattants.
Il est un peu comique de voir les
chefs de l'Union des Combattants, —
dont la bonne volonté, d'ailleurs, est
certaine, — naviguer d'Afrique en Amé-
rique, présider les réunions des volon-
taires patagons ou libériens, cependant
Que, dans leur pays, l'autorité, qu'ils de-
vraient avoir, ne s'affirme pas davan-
tage.
Les parlementaires doivent, pourtant,
le savoir: le mécontentement des mobi-
lisés est certain, profond, mille fois jus-
tifié, et s' accroît chaque jour. Sans dou-
te, M. Binet- V aImer n'est pas descendu
place de la Concorde, avec se$ chefs de
section, bien qu'il en ait manifesté Fin-
tention éventuelle. Et, probablement, il
n'y descendra pas. Mais d'autres mani-
festations collectives, sûres et légales, se
produiront; elles se produisent déjà. En
outre, des actions individuelles sont tou-
jours possibles.
M. Léon Daudet qualifie, - avec
quelque raison, peut-être,. --.leXDC
siècle, de « stupide ». Comment allons-
nous qualifier le XX" siècle?.
Pierre d'HUGUES.
■ J> ( ——
ÊDITOR1 AL
Voyons clair
La Conférence de La
Haye s'ouvre dans une at-
mdsphère de splendide in-
différence. Peu de bruit,
pas d'interviews sensation-
nels, pas de vedettes, point
de « frofriages » sur les pro-
- - .,. A "Il 'l -
grammes. Le fiascoae ixenes a aeçu tes
plus optimistes ; un scepticisme univer-
sel semble entourer le nouvel effort qui
va être tenté en Hollande.
Mais Vattention du monde, qui n'est
point habituée à chômer, va,; de La Haye,
se reporter sur Londres.
Car, tandis que les experts discuteront
dans une salle du, Palais de là Paix, M.
Poincaré traversera; la Manche. Enprin-
cipe, son voyage n'a pas de raison poli~.-
tique : le président du Conseil tieut re-
mercier.'la, ville de Londres au magnifi-
que secours qu'elle porte à notre Verdun
meurtri. En fait, il aura l'occasion d'é-
changer avec M. Lloyd George des vues
auxquelles l'état actuel de la politique
européenne peut donner une importance
capitale.
Faut-il, de l'entrevue prochaine des
deux hommes d'Etat attendre une évolu-
tion dans les relations franco-britanni-
ques ? C'est beaucoup dire pour qui con-
nait les tempéraments si divers, mais si
- -
accentués, .si précis aussi, de ces deux
pilotes de deux grands pays.
Autant M. Poincaré est froid et réflé-
chi, alitant M. Lloyd George. est 'capri-
cieux et versatile. L'un ne s'appuie que
sur des textesv sur des faits et sur des
dossiers ; l'autre, plus influençable,
s'emballe, s'irrite et souvent évolue.
Les dernières notes échangées entre
Londres et Paris ne semblent pas mettre
l'atmosphère au beau fixe. Au mémo-
randum fançais, si net et si ferme, a ré-
pondu un document du Foreign Office
plutôt aigre-doux. Là-dessus, nouvelle
riposte du Quai;d'Orsay. Les deux points
de vue ne se rejoignaient nullement ; et
comme le ministre anglais est à peu
près aussi entété que son collègue fran-
çais, ne sommes-nous pas dans une im-
passe
La situation du monde impose, cepen-
dant, des solutions nettes. La liaison
franco-britannique doit sortir des ténè-
bres augustes dans lesquelles elle s'est
trop longtemps plue. L'équivoque n'est
pas admissible à l'heure où se jouent des
parties aussi sensationnelles.
Que des brouillards de LondresM.
Poincaré fasse jaillir la clarté française!
Raymond LANGE.
—— ? 1 5
Or) attend du Préfet de la Seine
un geste de clémence
S'il est des ouvriers dont le sort eot-parti-
culièrement pénible, ce sont certainement ceux
de la distillation de la Société du Gaz de Pa-
ris. Non que cette société ne lfaàsce tous ses ef-
forts pour assurer dans les ateliers une par-
faite "hygiène mais parce que le métier même
comporte une effrayante mortalité.
D'après les statistiques que l'on noue com-
munique, 37,5 0/0 des distillateurs atteignent
l'âge de la retraite, dont 14,7 0/0 parmi les
ouvriers de métier du Landy, de la Villette
et de Vaugirard.
Or, une demande d'indulgence vient d'être
présentée au préfet de la Seine. Un certain
nombre d'ouvriers, estimant accomplir, sous
l'impulsion de M. Jouhaux et de la. C. G. T.,
leur devoir syndical, ont, en 1920, participé à
la grande grève. Ils furent remplacés par des
non-syndiqués tentés par l'appât du gain.
Aujourd'hui encore, ces «- remplaçants » oc-
cupent un rang d'ancienneté supérieur à ce-
lui des grévistes de 1920, dont cerains avaient
pourtant, en 1920, une vingtaine d'années de
Gervice combien périlleux.
Le syndicat voudrait qu'on leur redonnât
leur ancienne place. Son secrétaire, le citoyen
Baligean, a été reçu hier par le préfet, dont,
malgré la réponse évasive, il espère l'inter-
vention.
M. Autrand, dont l'esprit de bonté et de jus-
tice est connu, voudra certainement s'honorer
en obtenant- le geste de clémence qui adoucira
la. « vie tragique » de ces malheureux travail-
leurs.
On dit..:
En Passant
Un peu de tact, s. v. p.
En France, nous n'aimons pas beaucoup M.
Lloyd George. C'est assez naturel, après tous
les coups de pied que nous décocha son hu-
meur rageuse, sa versatilité, son incommensu-
rable égoïsme. Si le Premier anglais n'est chez
nous pas plus populaire, ce n'est, certes, pas
de notre faute, mais bien uniquement de la
sienne.
Mais nous savons aussi que M. Lloyd George
n'est pas toute l'Angleterre et nous espérons'
même qu'un jour viendra où le capricieux
homme d'Etat ne sera de l'autre côté du Chan-
nel, plus rien du tout.
Et beaucoup de Français ont pour le peuple
anglais une sympathie cordiale que beaucoup
d'Anglâis nous rendent très sincèrement.
Pourquoi alors chercher à exciter inutile-
ment deux peuples qui pourraient s'entendre ?
L'on joue actuellement sur une de nos scè-
nes-de Music-Hall une revue, — naturellement,
- où, entre une: dame qui se noie dans une
bouteille d'eau et l'histoire du Lit à travers les
âges, l'on prend vigoureusement à partie l'An-
gleterre. Une jeune Marianne dit vertement
son fait à un vieux Lloyd George : ce n'est
pas: très spirituel : c'est, beaucoup plus en-
core, déplaisant, déplacé, discourtois. -
Les Français qui ont l'habitude de recevoir
ont par le monde, J'heureuse réputatiéot' él'être
des hôtes parfaits. On ne vient pas seulement
chez nous pour nos magasins brillants, nos
théâtres, nos restaurants, nos jardins : l'on
vient aussi un peu pour nous. Les - étrangers
apprécient notre esprit, notre fantaisie aima-
ble, la façon que nous avons de sourire à la
vie, même dans les pires tourmentes.
Est-ce un heureux moyen de justifier ces
qualités que d'engu.irlander publiquement:
l'homme politique d'un Etat officiellement allié
et ami ? Je ne le crois pas. Je sais des Anglais.
qui n'aiment pas M. Lloyd George et que le
hasard d'un soir conduisit au Music-Hall en
question. IIs,en sortirent indignés et prêts à
défendre le compatriote qu'ils détestent.
Si c'est là tout le résultat cherdhé par les
auteurs, il n'y a pas de quoi les féliciter.
J'en appelle aux Français qui n'aiment pas
M. Poincaré et qui se font' un plaisir quoti-
dien d'accoler à son nom un substantif guer-
rier ou une désinence slave. Le jour où ils ver-
raient, à Londres, à Rome ou à Berlin, le chef
de notre gouvernement tourné en ridicule ou
bafoué, je gage qu'ils seraient écœurés.
Il ne subsiste pas grand chose des avanta-
ges que nous offrions à nos hOtes : si nous
perdons même notre politesse-et notre, esprit,
querestera-t-il ? JIM.
1
Aujourd nui
----
Les -, traditions s'en voat ---':-_,.;.
Même en Angleterre les traditions: s'en vont.
Ainsi, au moment du match Oarpentier-
Lewis, des sportsmen français qui s'étaient
rendus à Londres pour assister au combat, eu-
rent la désagréable surprise de ne pas retrou.
ver leurs portefeuilles.
Un haut fonctionnaire de la police les ras.
sura.
— Vous ne retrouverez pas vos billets, mais
vos papiers personnels vous seront certaine-
ment rendus. C'est l'habitude des pickpockets
anglais.
Hélas, les sportsmen ne reçurent jamais
l'envoi annoncé.
Ces pickpockets étaient-ils anglais f Voilà
la question troublante.
i
Repopulation
Un beau cas de fécondité est signalé au vil-
lage de La Houssaye :
«Mère de 13 enfants, et ayant eu deux
fois de suite deux jumeaux, Mme Le Trou-
her, femme d'un cultivateur, vient de mettre
au monde trois enfants, dont deux filles et
un garçon, qui se portent bien. »
Voilà une médaille des Mères de famille
qui sera bien placée.
Le Tapin.
Nous reverrons la carte postale
à deux sous
On n'envoyait plus- de: cartes postales. Les
petits carrés de photographies"iqui, en se ré-
pandant par le monde, faisaient pour nos si-
tes et nos monuments la plus efficace des pu-
blicités, restaient aux étalages de vendeuses
désolées.
Dame, les cartes postales elles-mêmes
étaient plus chères que jadis, et il fallait les
affranchir à vingt centimes. C'en était trop !
Le public, plus sage, que les politiciens ne
sont psychologues, avait fait'la grève.
La leçon fut utile. IVCPaúl Làffont, qui pré-
side aux destinées dm cp. T. T., non point der-
rière une montagne de dossiers,- ou dans le si-
lence de son cabinet, mais dans la vie même
de ses services, a compris que, par une mesure
trop sévère, l'Etat lui-même entêtait pour ses
frais. ;
Et nous avons maintenant l'espoir de revoir
la carte postale à deux sous. 'La Chambre a
voté hier le principe. Le Sénat, vraisemblable-
ment, se conformera au vœu des députés.
Et les heureux mortels qui, dans quelques
semaines, vont se répandre sur tous les points
de France, pourront de leurs'vi-Wégiatures heu-
reuses donner à leurs amis, retenus au travail,
.le regret.du grand air, des vastes horizons et
des paysages estivaux ! -
———————— > -+..- < ——
La réponse italienne *
au mémorandum français
Le comte Sforza a remis hier soir au mi-
nistère des affaires étrangères la réponse
de son gouvernement au mémorandum fran-
çais du lor juin relatif à la-Conférence de
La Haye.. - ,
Ce document, qui est assez court, se bor-
ne à enregistrer le point de vue français,
tout en estimant qu'il n'y a pas lieu de
modifier les conditions dans lesquelles doit
.siéger cette, réunion d'experts.
L'empereur d'Annam
qui sera bientôt l'hôte de Paris
EN DEUXIEME PAGE :
LA CHAMBRE
Suite de la discussion sur la réforme de
l'enseignement et sur les lois militaires.
Une note supplémentaire
à l'Allemagne
La C. D. R lui fixe quelques mesures
pour l'assainissement de ses finances
La Commission des réparations a adressé
mercredi une nouvelle note. au chancelier
Wirth.
Cette communication a trait à l'emprunt
for.cé, au budget des chemins de fer et des
pestes et à l'autonomie de la Reichsbank.
En ce qui concerne cette dernière question,
la note indique comment l'indépendance de la
Banque peut être obtenue. Elle ajoute :
« Tant que la Rcichsbank sera autorisée à
émettre des billets contre des bons du Trésor,
on ne saurait guère s'attendre à voir son au-
tonomie s'exercer d'une manière effective à
ce sujet.
« La Commission reconnaît que toute res-
triction de la circulation fiduciaire doit être
précédée par la couverture des dépenses pu-
bliques au moyen de recettes réelles prove-
nant des impôts et des emprunts intérieurs,
à l'exclusion des bons du Trésor escomptés
directement ou indirectement par la Reichs-
bank. Elle ne conteste pas qu'il serait actuel-
lement prématurée de tenter de rétablir pu-
rement et simplement la limitation de l'émis-
sion abolie par les lois modifiant 'la loi de
1875, qui ont été votées depuis 1914, sans
avoir préalablement remis de l'ordre dans les
finances de l'Etat. Mais elle estime que le
gouvernement allemand doit préparer dès
maintenant les mesures qu'il sera nécessaire
d'introduire ultérieurement pour rétablir une
limitation raisonnable du droit d'émission de
la Banque et faire d'une manière continue de
sérieux efforts pour en réaliser progressive-
ment l'application, aussitôt et à mesure que
les circonstances le permettront.
« Faute d'agir ainsi, il serait fort à crain-
dre que les sacrifices qui sont actuellement
demandés au peuple allemand pour arrêter
l'accroissement de la dette flottante n'attei-
gnent pas le but visé. »
L'inflation
Pendant la dernière semaine de mai et la
première semaine de juin, il a été émis pour
10 milliards 776 millions de marks de nou-
veaux billets de la Reichsbank. La totalité de
ces billets se trouvant en circulation s'élève
maintenant à près de 155 milliards de marks.
Il faut y ajouter environ 9 milliards 1/2 de
bons des caisses de prêts, ce qui porte à 164
milliards 1/2 le montant total du papier-mon-
naie circulant actuellement en Allemagne.
Le départ de M. Poincaré
pour Londres
1
Un entretien avec M. Lloyd George où il sera
question de la Russie et de l'Orient
■ M. Poincarê, président du." Conseil, quittera
Paris cet après-midi, là 3 h. 45, pour se rendre
à Londres, où il arrivera là 10 h. 45.
On annonce que tous les membres du cabi-
net 'britannique assisteront au déjeuner que
M. Lloyd George offrira lundi prochain, à
Downing street, en l'honneur "de M. Poincaré
et du maréchal Pétain.
Le Times publie un article- de. son corres-
pondant parisien sur les .relations franco-bri-
tanniques. -. - : -
« Il est à noter, dit-il, que la veille du jour
où les émissaires bolchevrstes seront informés.'
à La Haye, des puissances qui participeront
au plus grand débat actuel, M. Poincaré sera
l'hôte de M. Lloyd George. Cette -rencontre,
à un tel moment, peut influencer le courant
tout entier de la Conférence, et peut décider
de son succès ou de son échec. »
Le correspondant diplomatique" du Daily
News croit savoir que lord Hardinge a pré-
senté à M. Poincaré un mémorandum spéci-
fiant que le pacte de garantie franco-britan-
nique projeté à ICannes devait suivre et non
.pas précéder l'accord sur. les diverses ques-
tions pendantes entre la France et la Grande-
Bretagne. Parmi ces questions, celle du Pro-
che-Orient et celle de Tanger en particulier
doivent être résolues..
« Comme aucun progrès n'a été fait vers la
solution de celles-ci, dit ce journal, la discus-
sion du pact est donc hors de propos.
« En ce qui concerne le Proche Orient, la
situation est de jour en jour moins satisfai-
sante, et la conférence qui devait se réunir
dans les trois semaines qui ont suivi les pour-
parlers de Paris n'a pas eu lieu. La sugges-
tion kemaliste d'une conversation entre Alliés
et Turcs, d'où les Grecs seraient exclus, et qui
est en faveur auprès du gouvernement fran-
çais, ne rencontre qu'une opposition, celle de
la Grande-Bretagne. Dans l'état de choses ac-
tuel, il y a scission très marquée entre le point
de vue français et le point de vue britannique.
L'Italie est d'avis qu'une conférence à Ismidt
vaudrait mieux que toute autre, mais rien ne
prouve que 1A Grande-Bretagne y prendrait
part. »
POLITIQUE ETRANGERE
Les experts réunis à La Haye
ont tenu leur première séance
Une Conférence qui s'ouvre sans apparat et avec un seul discours!
M. van Karnebeek est désigné pour diriger les travaux
<3*©«î>— -
La Haye, 15 juin. - Pour la première
séance de la Conférence de La Haye, la
physionomie de la ville -n'a aucunement
changé. La population vaque à ses occu-
pations coutumières. Aucune décoration.
Aucun drapeau. Pas d'autres fleurs que
celles qui couvrent naturellement les nom-
breux jardins .de Hollande. Pas de service
d'ordre. A peine si les touristes et prome-
neurs se rendant à Scheveningen, où la sai-
son bat son. plein, s'arrêtent devant les gril-
les du Palais de la Paix, offertes en 1907
par le kaiser. ;
Les portes de la Conférence sont sévè-
rement interdites au public et même à la
presse. Le travail aura lieu en vase clos.
Le décor riche du - Palais a été maintes
fois décrit. Il est tout en mosaïque, marbre
et or, fournis par la contribution des di-
vers pays qui ont siégé ..aux conférences de
la Paix. H
Les statues de la Vérité et de la Justice
président la réunion d'aujourd'hui.
Trois tables sont disposées en rectangle.
Autour de ces tables, les Etats sont dispo-
sés par ordre alphabétique, avec un
nombre de places proportionné à l'impor-
tance des délégations : Empire britannique
et Pologne, 5 sièges ; Italie, 4 ; France,
un seul.
Le président est placé entre l'Albanie
.absente et l'Autriche, du fait que l'Allema-
gne est exclue des négociations russes de-
puis le traité de Rapallo.
LA PREMIERE SEANCE
La séance a lieu à 2 h. 30. Trente-qua-
tre Etats sont représentés, sinon par leurs
délégations non encore arrivées, du moins
par leur représentant diplomatique à La
Haye. Tel est le cas de la Roumanie, ab-
sente, de l'Allemagne, de la Russie, de l'Es-
thonie, de l'Albanie, de l'Islande.
M. Van Karnebeek, ministre des affaires
étrangères de Hollande, qui occupe provi-
soirement le fauteuil présidentiel, déclare
ouverte la session préliminaire de la Con-
férence dq La Haye.
Discours
de M. van Karnebeek
KSCOÏÏBSDE M, VAK KABNEBEEK-
M. Van Karnebeek s'exprime en ces ter-
mes : -
« Messieurs,
« Permettez-moi de vous saluer au nom dtl
gouvernement de S. M. la. reine et de vous
adresser quelques paroles de bienvenue au dé-
but de vos délibérations. Je n'ai guère besoin
de rappeler les origines de votre présence en
ces lieux. Elles sont récentes, elles datant de
Gênes où des résolutions ont été adoptées
prévoyant la réunion de deux commissions à
La Haye en vue d'examiner des divergences
existant entre le gouvernement soviétique et
les autres gouvernements, ainsi qu'un échan-
ge de vues préliminaire concernant les condi-
tions dans lesquelles la commission des ex-
perts agira vis-à-vis de la délégation russe.
« Le .gouvernement néerlandais déférant au
désir exprimé par la Conférence de Gênes
d'une manière unanime est heureux de vous
recevoir, de vous offrir l'hospitalité et d'ac-
cueillir avec faveur la proposition de faire
suivre les négociations entreprises à Gênes
par une étude plus approfondie de certaines
questions importantes restées en suspens.
Etant d'avis qu'il pouvait y avoir avantage à
faire un effort répété en vue de résoudre le
problème de la restauration de la Russie et
de la paix en Europe sur une base collective,
c'est dans cet ordre d'idées que J'g Pays-Bas,
mus par le sentiment du devoir imposé par les
traditions, se déclarent prêts à mettre à vo-
tre disposition les ressources du pays, notam-
ment cette virle qui, par sa situation et son
ambiance, a rendu souvent déjà service & la
coopération internationale. »
UN TRAVAIL D'ETUDES
Il ne m'appartient pas de vous donner des
directives.
Je n'ai pas l'intention de vous entretenir
de questions que les commissions sont appe-
lées à- traiter. Vous avez été conviés par le
président de la Conférence de Gênes en accord
avec le gouvernement néerlandais ; ce sera
à vous d'établir les conditions dans lesquelles
vos travaux se poursuivront sur la base con-
venue.
Je désire, ajouter que les. meilleurs vœux
du peuple néerlandais vous sont acquis pour
le succès de vos efforts. Le travail qui vous
attend est un travail d'études et de négocia-
tions préparatoires, tâche ardue, étant donné
les divergences profondes, les principes et.les
méthodes qui divisent la Russie soviétique et
les autres Etats représentés ici. Ce problème
est d'autant plus difficile à résoudre que le
système mis en pratique par la Russie semble
faire obstacle à la restauration économique
de ce malheureux pays. La Conférence de
Gênes, qui a été suivie en Hollande avec un
intérêt vif et soutenu, a eu le grand mérite,
bien qu'elle n'ait pas été couronnée de résul-
tats pratiques et immédiats, d'ouvrir la voie
à des possibilités de conversations ultérieures
que l'Europe - troublée et la Russie avertie
pourront mettre à profit.
Après l'épisod,e retenfissant du premier con-
tact, une phase nouvelle se présente dans la-
quelle il s'agira de recueillir, d'examiner, de
vérifier les faits élémentaires, de mesurer ;les
distances, de peser les besoins et de scruter
les impressions. L'heure première est une
phase d'étude pondérée, réglée, qui nécessite
une atmosphère de tranquillité et d'équilibre,
protectrice des responsabilités, dans le cadre
d'une publicité sage et bien ordonnée, impo-
sant respect aux impatiences, aux. empresse-
ments du dehors qui. dans les réunions inter-
nationales, ont souvent entravé l'effort des
bonnes volontés, grossissant les incidents par.
les obstacles.
Cette atmosphère propice que vous recher-
chez, j'espère que vous la trouverez ici. Que
ce soit, avec la part qu'ils prendront dans
vos délibérations, la contribution des Pay".
Bas, dont l'esprit objectif vous entoure dans
l'œuvre délicate que vous êtes appelés à pour-
suivre. Vous siégerez dans ce palais consa-
cré à la Justice internationale, voué aux idées
qui, en s'élevant au-dessus des misères hu-
maines, permettent de ne jamais désespérer.
Le gouvernement et le peuple néerlandais
suivront vos travaux avec le plus grand inté-
rêt et feront tout leur possible pour faciliter
la tâche de cette Conférence. Soyez les bien-
venus.
t
L'ELECTION DU PRESIDENT
Après de discours de M. Van Karnebeek,
la Conférence a procédé à l'élection du pré-
sident.
A l'unanimité," il a été décidé que le jon-
kheer Van Karnebeek serait maintenu défini-
tivement dans les fonctions de président des
réunions préliminaires, fonctions qu'il avait
assumées jusqu'ici à'titre provisoire. M. Van
Karnebeek a accepté la nomination.
Sur la proposition du président la séance
a été renvoyée à demain matin.
L'accord franco bricfftimiqtfe
est nécessaire
M. Jonnart, sénateur du Pas-de-Calais, e
prononcé hier, à l'assemblée générale de l'as-
sociation France-Grande-Bretagne, un dis-
cours dont voici les passages essentiels :
« C'est la violation des engagements pris par
la Russie antérieurement à l'avènement des
Soviets et les crimes commis contre le droit
de propriété et le droit des gens par la dic-
tature bolchevique, qui rendent impossibles
les accords avec un peuple malheureux au..
quel nous restons profondément attachés.
« M. Hughes, secrétaire d'Etat des Etats-
Unis, s'exprimait ainsi, il y a quelques jour®:]
« Toute nation peut, à ses risques et périls,
qui sont parfois des plus grands, se donner
les lois qu'elle veut, mais si elle recherche
des relations au dehors, les autres nations
ont le droit d'avoir leurs exigences : les rela-
tions internationales reposent sur un postu-
lat de morale internationale, et le (principe le
plus important à maintenir aujourdfhui à cet
égard est celui qu'aucun Etat n'a droit à une
place dans l'a famille des nations s'il détruit
les fondations de relations honorables, en
ayant recours à la confiscation, fà. la répudia-
tion des contrats, et s'abstient d'établir un
système adéquat de gouvernement grâce au-
quel les droits et engagements valides sont
reconnus et exécutés. »
« M. Lloyd Ceorge, dont l'esprit plein de;
fine ironie est si redoutable, disait, & Gênea.
-- aux représentants' des Soviets :
« Nous avons des préjugés indéracinables
dans l'Europe occidentale, unez nous, quand
un homme vend des marchandises il aime
généralement à être payé. Si quelqu'un va
trouver son voisin et lui demande un secours,
il ne trouve pas à emprunter s'il déclare que
ses principes ne lui permettent pas de rem-
bourser. De même, quand un pays demande
de l'argent, il n'est pas bon pour l'obtenir de
commencer par déclarer qu'il répudie sec-
dette.s. »
« Qu'on applique à La Haye les idées de M.
Hughes et de M. Lloyd George, la nouvelle
réunion sera féconde. » -
M. Jonnart a ajouté que l'entente franc:
britannique était nécessaire pour le règlement
des problèmes internationaux.
« Bien qu'absorbée par les problèmes de .c.
vie intérieure, les plus angoissants et les plus
déconcertants, elle ne rofuse pas néanmoins
de se prêter à l'étude de la reconstitution de
l'Europe. Elle y met seulement cette condi-
tion, que le relèvement de l'Europe ne se fera
pas au détriment de son propre relèvement.
« La France parlant au monde civilisé a
cru devoir ajouter qu'on multipliera les con-
férences en vain, qu'il n'y aura pas de paix
véritable, de reconstruction durable de l'Eu-
rope s'il n'y a pas entre elie et la Grande-Bre-
tagne une entente étroite, de plus en plus
étroite, et s'il n'y a plus de morale interna*
tionale ».
LE PROCÈS BASSARABO
Défense et accusation
échangent de vifs propos
.EI Je public ayant applaudi, l'audience
fut suspendue pendant 15 minutes
Ce n'est pas toujours drôle d'être témoin
aux assises.
« Avec qui avez-vous passé la nuit du
lr janvier ? » demande-t-on à l'un. « Votre
grand-père n'a-t-il pas été condamné pour ban-
queroute ? » dit-on à l'autre.
Etes-vous témoin de l'accusation ? l'avocat
général vous couvrl de fleurs et le défenseur
vous engu.irlande.
Si vous êtes favorable à la défense, c'est le
contraire exactement qui se produit, avec tou-
tefois cette différence que l'autorité de la
robe rouge donne aux sarcasmes du repré-
sentant de la vindicte publique une particu-
lière importance.
Alors, la conscience la plus pure s'émeut,
et, tremblants d'attirer sur eux la colère d'un
homme disposant d'un pouvoir si redouta-
ble, les témoins hésitent et se taisent.
,Ce n'est pas évidemment là le moyen d'é-
clairer la justice, non plus que de faire avan-
cer le procès, car fatalement des incidents
surgissent.
Il y en eut.hier plusieurs, mais aucun n'eut
un tel. caractère de gravité que celui qui se
produisit vers la fin de l'audience, au cours
de la déposition de Mme Mac Kenty, citée à
la requête de Mme Bassarabo.
Mme Mac Kenty, qui a conservé de ses re-
lations avec Hera Myrtel le plus doux souve-
nir, fait un vibrant éloge de celle qu'elle ap-
pelle « son adorable sœur en idéal ».
Comme Mme Bassarabo, le témoin cultive
les lettres et de quelle manière. L'avocat gé-
néral Mancel ne peut résister au désir de don-
ner aux jurés un échantillon de son savoir-
faire.
C'est une lettre dans laquelle, après avoir
exprimé en termes lyriques sa joie d'avoir été
admise au nombre des suivantes de la dame
du square Labruyère, Mme Mac Kenty s'écrie
enfin :
Je remercie Dieu de m'aroir (formé 7a foie
de contempler la femme, cOie
he numéro : QtrmZE CENTIMES
VENDREDI 16 JUIN 1922. - N" 1M14
IFendatoui-9 (1369) 1
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIR -
ABONNEMENTS
Un ao Six mois Trois mots
SEINE & S.-ET-OISE. 38 » 20 n 10 »
FRANCE & COLONIES.. 41 » 22 » 11 »
ETRANGER. 49 » 26 » 13 »
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TRIBUNE LIBRE
« Ils ont des droits sur nous. »
La lecture banale des gazettes suffit à
faire connaître le sort réservé aux « im-
béciles qui furent soldats )).
Même, dans les «après l'audience», ou
M. Henri Vonoven inscrit, remarquable-
ment, les drames judiciaires de la vie
quotidienne, — des faits sont cités, qui
s'imposent à l'attention. Ici, c'est une ra-
mille bourgeoise, qui plaide contre la
dernière volonté exprimée par son en-
fant, tué à l'ennemi. Il prétendait, ce
jeune homme, assurer l'existence de sa
compagne. La famille a bien voulu don-
ner le sang de l'enfant; mais elle entend
garder l'argent. Elle le gardera; car,
tout en prononçant des paroles de re-
gret, les juges ne peuvent que constater
l'inexistence juridique du testament. La,
c'est une affaire de divorce. Le mari
s est engagé. La femme en a profité, -
puisqu'il est, heureusement, resté quel-
ques jeunes hommes dans les calmes
provinces. Aventure ordinaire, et qui
n'étonnait point les soldats: « Soldat,
toi qui dors sous la claire lune, - A
quoi rêves-tu? Je rêve au loupiot, qui
me dira papa, — fils d'un embusqué
que je ne connais pas. )) Aventure or-
dinaire. Mais elle écrivait, cette malheu-
reuse inconsciente, dans un style médio-
cre et prétentieux, des vérités surpre-
nantes. 1 - A. ,
Ce ne sont que des taits minimes dans
le grand drame. Or, de l'universalité des
faits, il faut bien déduire une règle. « Ils
ont des droits sur nous ». Ironique hypo-
crisie ! Ils peuvent, aujourd'hui, savourer
toute l'éloquence de ce boniment.
Sans doute, malgré la mauvaise vo-
lonté des gouvernements de la guerre et
l'hostilité des administrations, le Parle-
ment a manifesté, timidement d'ailleurs.
le désir de (( faire quelque chose Ce
- ne pas, cependant, quelques misera-
bles augmentations de - pensions:, accor-
dées sou à sou, qui permettront la vie,
aux veuves et aux orphelins ; ce n'est
pas l'octroi de quelques emplois infé-
rieurs qui réglera la question des mutilés,
non plus que celle des mobilisés spoliés.
Ceux-ci et ceux-là tiennent des con-
grès, formulent des protestations, émet-
tent des vœux, qu'ils soumettent aux
pouvoirs publics. Les ministres président
des banquets, et, la main tendue vers
l'Est, prononcent de fortes paroles. Puis,
chacun rentre chez soi. Les mutilés, en-
core, obtiennent quelques concessions.
Car, tout de même, l'impudeur de l'é-
goïsme ne peut se montrer par trop
cynique, mais les combattants non mu-
tilés, les mobilisés ruinés, — qu'ont-ils
.LL_
ODienur
La faute leur en revient, d'ailleurs.
On a eu des droits sur eux, et ils
n'en ont sur personne. Mais ils ont man-
que de synergie, et, trop souvent, d'es-
prit civique. Après tout, la mort, qui est
commune à tous les hommes, ou une
nouvelle mobilisation, réglera leur affai-
re. Le tout est de savoir attendre; et
ils savent attendre, ceux qui ont attendu
pendant cinq ans.
L'Union Nationale des Combattants
est parvenue, il est vrai, à faire déposer
une proposition de loi sur les fonction-
naires mobilisés. Cette proposition, dont
un gouvernement de la guerre eût dû
prendre l'initiative, a fini par être votée
par la Chambre, — trois ans après la
guerre! Où est-elle, maintenant? Quand
en finira-t-on? Et pourtant, en ce qui
concerne les pensions, elle n'est que ju-
ridique; elle ne comporte ni avantage, ni
dépense immédiate, et elle eût dû exis-
ter ckns la législation d'avant-guerre, si
l'administration avait eu le souci de la
logique et du bon sens.
Ainsi, l'Etat a montré et montre en-
core le mauvais exemple. Mais, - malgré
l'énergie active et probe de M. Beaure-
gard, secrétaire général, l'Union des
Combattants n'a pas fait preuve de vail-
lance. Les parvenus de la guerre sont
toujours en place et y sont mieux que ja-
mais. Aucune nomination n'a été rap-
portée. Aussi bien, les députés combat-
tants se sont bien gardés de causer la
moindre peine aux profiteurs immobili-
sés. Le souci de la Chambre bleu horizon
a paru être d'éviter le scandale, en je-
tant, au besoin, un os à ronger, sous la
forme de « majorations » dont bénéfi-
cierait l'ensemble des combattants.
Il est un peu comique de voir les
chefs de l'Union des Combattants, —
dont la bonne volonté, d'ailleurs, est
certaine, — naviguer d'Afrique en Amé-
rique, présider les réunions des volon-
taires patagons ou libériens, cependant
Que, dans leur pays, l'autorité, qu'ils de-
vraient avoir, ne s'affirme pas davan-
tage.
Les parlementaires doivent, pourtant,
le savoir: le mécontentement des mobi-
lisés est certain, profond, mille fois jus-
tifié, et s' accroît chaque jour. Sans dou-
te, M. Binet- V aImer n'est pas descendu
place de la Concorde, avec se$ chefs de
section, bien qu'il en ait manifesté Fin-
tention éventuelle. Et, probablement, il
n'y descendra pas. Mais d'autres mani-
festations collectives, sûres et légales, se
produiront; elles se produisent déjà. En
outre, des actions individuelles sont tou-
jours possibles.
M. Léon Daudet qualifie, - avec
quelque raison, peut-être,. --.leXDC
siècle, de « stupide ». Comment allons-
nous qualifier le XX" siècle?.
Pierre d'HUGUES.
■ J> ( ——
ÊDITOR1 AL
Voyons clair
La Conférence de La
Haye s'ouvre dans une at-
mdsphère de splendide in-
différence. Peu de bruit,
pas d'interviews sensation-
nels, pas de vedettes, point
de « frofriages » sur les pro-
- - .,. A "Il 'l -
grammes. Le fiascoae ixenes a aeçu tes
plus optimistes ; un scepticisme univer-
sel semble entourer le nouvel effort qui
va être tenté en Hollande.
Mais Vattention du monde, qui n'est
point habituée à chômer, va,; de La Haye,
se reporter sur Londres.
Car, tandis que les experts discuteront
dans une salle du, Palais de là Paix, M.
Poincaré traversera; la Manche. Enprin-
cipe, son voyage n'a pas de raison poli~.-
tique : le président du Conseil tieut re-
mercier.'la, ville de Londres au magnifi-
que secours qu'elle porte à notre Verdun
meurtri. En fait, il aura l'occasion d'é-
changer avec M. Lloyd George des vues
auxquelles l'état actuel de la politique
européenne peut donner une importance
capitale.
Faut-il, de l'entrevue prochaine des
deux hommes d'Etat attendre une évolu-
tion dans les relations franco-britanni-
ques ? C'est beaucoup dire pour qui con-
nait les tempéraments si divers, mais si
- -
accentués, .si précis aussi, de ces deux
pilotes de deux grands pays.
Autant M. Poincaré est froid et réflé-
chi, alitant M. Lloyd George. est 'capri-
cieux et versatile. L'un ne s'appuie que
sur des textesv sur des faits et sur des
dossiers ; l'autre, plus influençable,
s'emballe, s'irrite et souvent évolue.
Les dernières notes échangées entre
Londres et Paris ne semblent pas mettre
l'atmosphère au beau fixe. Au mémo-
randum fançais, si net et si ferme, a ré-
pondu un document du Foreign Office
plutôt aigre-doux. Là-dessus, nouvelle
riposte du Quai;d'Orsay. Les deux points
de vue ne se rejoignaient nullement ; et
comme le ministre anglais est à peu
près aussi entété que son collègue fran-
çais, ne sommes-nous pas dans une im-
passe
La situation du monde impose, cepen-
dant, des solutions nettes. La liaison
franco-britannique doit sortir des ténè-
bres augustes dans lesquelles elle s'est
trop longtemps plue. L'équivoque n'est
pas admissible à l'heure où se jouent des
parties aussi sensationnelles.
Que des brouillards de LondresM.
Poincaré fasse jaillir la clarté française!
Raymond LANGE.
—— ? 1 5
Or) attend du Préfet de la Seine
un geste de clémence
S'il est des ouvriers dont le sort eot-parti-
culièrement pénible, ce sont certainement ceux
de la distillation de la Société du Gaz de Pa-
ris. Non que cette société ne lfaàsce tous ses ef-
forts pour assurer dans les ateliers une par-
faite "hygiène mais parce que le métier même
comporte une effrayante mortalité.
D'après les statistiques que l'on noue com-
munique, 37,5 0/0 des distillateurs atteignent
l'âge de la retraite, dont 14,7 0/0 parmi les
ouvriers de métier du Landy, de la Villette
et de Vaugirard.
Or, une demande d'indulgence vient d'être
présentée au préfet de la Seine. Un certain
nombre d'ouvriers, estimant accomplir, sous
l'impulsion de M. Jouhaux et de la. C. G. T.,
leur devoir syndical, ont, en 1920, participé à
la grande grève. Ils furent remplacés par des
non-syndiqués tentés par l'appât du gain.
Aujourd'hui encore, ces «- remplaçants » oc-
cupent un rang d'ancienneté supérieur à ce-
lui des grévistes de 1920, dont cerains avaient
pourtant, en 1920, une vingtaine d'années de
Gervice combien périlleux.
Le syndicat voudrait qu'on leur redonnât
leur ancienne place. Son secrétaire, le citoyen
Baligean, a été reçu hier par le préfet, dont,
malgré la réponse évasive, il espère l'inter-
vention.
M. Autrand, dont l'esprit de bonté et de jus-
tice est connu, voudra certainement s'honorer
en obtenant- le geste de clémence qui adoucira
la. « vie tragique » de ces malheureux travail-
leurs.
On dit..:
En Passant
Un peu de tact, s. v. p.
En France, nous n'aimons pas beaucoup M.
Lloyd George. C'est assez naturel, après tous
les coups de pied que nous décocha son hu-
meur rageuse, sa versatilité, son incommensu-
rable égoïsme. Si le Premier anglais n'est chez
nous pas plus populaire, ce n'est, certes, pas
de notre faute, mais bien uniquement de la
sienne.
Mais nous savons aussi que M. Lloyd George
n'est pas toute l'Angleterre et nous espérons'
même qu'un jour viendra où le capricieux
homme d'Etat ne sera de l'autre côté du Chan-
nel, plus rien du tout.
Et beaucoup de Français ont pour le peuple
anglais une sympathie cordiale que beaucoup
d'Anglâis nous rendent très sincèrement.
Pourquoi alors chercher à exciter inutile-
ment deux peuples qui pourraient s'entendre ?
L'on joue actuellement sur une de nos scè-
nes-de Music-Hall une revue, — naturellement,
- où, entre une: dame qui se noie dans une
bouteille d'eau et l'histoire du Lit à travers les
âges, l'on prend vigoureusement à partie l'An-
gleterre. Une jeune Marianne dit vertement
son fait à un vieux Lloyd George : ce n'est
pas: très spirituel : c'est, beaucoup plus en-
core, déplaisant, déplacé, discourtois. -
Les Français qui ont l'habitude de recevoir
ont par le monde, J'heureuse réputatiéot' él'être
des hôtes parfaits. On ne vient pas seulement
chez nous pour nos magasins brillants, nos
théâtres, nos restaurants, nos jardins : l'on
vient aussi un peu pour nous. Les - étrangers
apprécient notre esprit, notre fantaisie aima-
ble, la façon que nous avons de sourire à la
vie, même dans les pires tourmentes.
Est-ce un heureux moyen de justifier ces
qualités que d'engu.irlander publiquement:
l'homme politique d'un Etat officiellement allié
et ami ? Je ne le crois pas. Je sais des Anglais.
qui n'aiment pas M. Lloyd George et que le
hasard d'un soir conduisit au Music-Hall en
question. IIs,en sortirent indignés et prêts à
défendre le compatriote qu'ils détestent.
Si c'est là tout le résultat cherdhé par les
auteurs, il n'y a pas de quoi les féliciter.
J'en appelle aux Français qui n'aiment pas
M. Poincaré et qui se font' un plaisir quoti-
dien d'accoler à son nom un substantif guer-
rier ou une désinence slave. Le jour où ils ver-
raient, à Londres, à Rome ou à Berlin, le chef
de notre gouvernement tourné en ridicule ou
bafoué, je gage qu'ils seraient écœurés.
Il ne subsiste pas grand chose des avanta-
ges que nous offrions à nos hOtes : si nous
perdons même notre politesse-et notre, esprit,
querestera-t-il ? JIM.
1
Aujourd nui
----
Les -, traditions s'en voat ---':-_,.;.
Même en Angleterre les traditions: s'en vont.
Ainsi, au moment du match Oarpentier-
Lewis, des sportsmen français qui s'étaient
rendus à Londres pour assister au combat, eu-
rent la désagréable surprise de ne pas retrou.
ver leurs portefeuilles.
Un haut fonctionnaire de la police les ras.
sura.
— Vous ne retrouverez pas vos billets, mais
vos papiers personnels vous seront certaine-
ment rendus. C'est l'habitude des pickpockets
anglais.
Hélas, les sportsmen ne reçurent jamais
l'envoi annoncé.
Ces pickpockets étaient-ils anglais f Voilà
la question troublante.
i
Repopulation
Un beau cas de fécondité est signalé au vil-
lage de La Houssaye :
«Mère de 13 enfants, et ayant eu deux
fois de suite deux jumeaux, Mme Le Trou-
her, femme d'un cultivateur, vient de mettre
au monde trois enfants, dont deux filles et
un garçon, qui se portent bien. »
Voilà une médaille des Mères de famille
qui sera bien placée.
Le Tapin.
Nous reverrons la carte postale
à deux sous
On n'envoyait plus- de: cartes postales. Les
petits carrés de photographies"iqui, en se ré-
pandant par le monde, faisaient pour nos si-
tes et nos monuments la plus efficace des pu-
blicités, restaient aux étalages de vendeuses
désolées.
Dame, les cartes postales elles-mêmes
étaient plus chères que jadis, et il fallait les
affranchir à vingt centimes. C'en était trop !
Le public, plus sage, que les politiciens ne
sont psychologues, avait fait'la grève.
La leçon fut utile. IVCPaúl Làffont, qui pré-
side aux destinées dm cp. T. T., non point der-
rière une montagne de dossiers,- ou dans le si-
lence de son cabinet, mais dans la vie même
de ses services, a compris que, par une mesure
trop sévère, l'Etat lui-même entêtait pour ses
frais. ;
Et nous avons maintenant l'espoir de revoir
la carte postale à deux sous. 'La Chambre a
voté hier le principe. Le Sénat, vraisemblable-
ment, se conformera au vœu des députés.
Et les heureux mortels qui, dans quelques
semaines, vont se répandre sur tous les points
de France, pourront de leurs'vi-Wégiatures heu-
reuses donner à leurs amis, retenus au travail,
.le regret.du grand air, des vastes horizons et
des paysages estivaux ! -
———————— > -+..- < ——
La réponse italienne *
au mémorandum français
Le comte Sforza a remis hier soir au mi-
nistère des affaires étrangères la réponse
de son gouvernement au mémorandum fran-
çais du lor juin relatif à la-Conférence de
La Haye.. - ,
Ce document, qui est assez court, se bor-
ne à enregistrer le point de vue français,
tout en estimant qu'il n'y a pas lieu de
modifier les conditions dans lesquelles doit
.siéger cette, réunion d'experts.
L'empereur d'Annam
qui sera bientôt l'hôte de Paris
EN DEUXIEME PAGE :
LA CHAMBRE
Suite de la discussion sur la réforme de
l'enseignement et sur les lois militaires.
Une note supplémentaire
à l'Allemagne
La C. D. R lui fixe quelques mesures
pour l'assainissement de ses finances
La Commission des réparations a adressé
mercredi une nouvelle note. au chancelier
Wirth.
Cette communication a trait à l'emprunt
for.cé, au budget des chemins de fer et des
pestes et à l'autonomie de la Reichsbank.
En ce qui concerne cette dernière question,
la note indique comment l'indépendance de la
Banque peut être obtenue. Elle ajoute :
« Tant que la Rcichsbank sera autorisée à
émettre des billets contre des bons du Trésor,
on ne saurait guère s'attendre à voir son au-
tonomie s'exercer d'une manière effective à
ce sujet.
« La Commission reconnaît que toute res-
triction de la circulation fiduciaire doit être
précédée par la couverture des dépenses pu-
bliques au moyen de recettes réelles prove-
nant des impôts et des emprunts intérieurs,
à l'exclusion des bons du Trésor escomptés
directement ou indirectement par la Reichs-
bank. Elle ne conteste pas qu'il serait actuel-
lement prématurée de tenter de rétablir pu-
rement et simplement la limitation de l'émis-
sion abolie par les lois modifiant 'la loi de
1875, qui ont été votées depuis 1914, sans
avoir préalablement remis de l'ordre dans les
finances de l'Etat. Mais elle estime que le
gouvernement allemand doit préparer dès
maintenant les mesures qu'il sera nécessaire
d'introduire ultérieurement pour rétablir une
limitation raisonnable du droit d'émission de
la Banque et faire d'une manière continue de
sérieux efforts pour en réaliser progressive-
ment l'application, aussitôt et à mesure que
les circonstances le permettront.
« Faute d'agir ainsi, il serait fort à crain-
dre que les sacrifices qui sont actuellement
demandés au peuple allemand pour arrêter
l'accroissement de la dette flottante n'attei-
gnent pas le but visé. »
L'inflation
Pendant la dernière semaine de mai et la
première semaine de juin, il a été émis pour
10 milliards 776 millions de marks de nou-
veaux billets de la Reichsbank. La totalité de
ces billets se trouvant en circulation s'élève
maintenant à près de 155 milliards de marks.
Il faut y ajouter environ 9 milliards 1/2 de
bons des caisses de prêts, ce qui porte à 164
milliards 1/2 le montant total du papier-mon-
naie circulant actuellement en Allemagne.
Le départ de M. Poincaré
pour Londres
1
Un entretien avec M. Lloyd George où il sera
question de la Russie et de l'Orient
■ M. Poincarê, président du." Conseil, quittera
Paris cet après-midi, là 3 h. 45, pour se rendre
à Londres, où il arrivera là 10 h. 45.
On annonce que tous les membres du cabi-
net 'britannique assisteront au déjeuner que
M. Lloyd George offrira lundi prochain, à
Downing street, en l'honneur "de M. Poincaré
et du maréchal Pétain.
Le Times publie un article- de. son corres-
pondant parisien sur les .relations franco-bri-
tanniques. -. - : -
« Il est à noter, dit-il, que la veille du jour
où les émissaires bolchevrstes seront informés.'
à La Haye, des puissances qui participeront
au plus grand débat actuel, M. Poincaré sera
l'hôte de M. Lloyd George. Cette -rencontre,
à un tel moment, peut influencer le courant
tout entier de la Conférence, et peut décider
de son succès ou de son échec. »
Le correspondant diplomatique" du Daily
News croit savoir que lord Hardinge a pré-
senté à M. Poincaré un mémorandum spéci-
fiant que le pacte de garantie franco-britan-
nique projeté à ICannes devait suivre et non
.pas précéder l'accord sur. les diverses ques-
tions pendantes entre la France et la Grande-
Bretagne. Parmi ces questions, celle du Pro-
che-Orient et celle de Tanger en particulier
doivent être résolues..
« Comme aucun progrès n'a été fait vers la
solution de celles-ci, dit ce journal, la discus-
sion du pact est donc hors de propos.
« En ce qui concerne le Proche Orient, la
situation est de jour en jour moins satisfai-
sante, et la conférence qui devait se réunir
dans les trois semaines qui ont suivi les pour-
parlers de Paris n'a pas eu lieu. La sugges-
tion kemaliste d'une conversation entre Alliés
et Turcs, d'où les Grecs seraient exclus, et qui
est en faveur auprès du gouvernement fran-
çais, ne rencontre qu'une opposition, celle de
la Grande-Bretagne. Dans l'état de choses ac-
tuel, il y a scission très marquée entre le point
de vue français et le point de vue britannique.
L'Italie est d'avis qu'une conférence à Ismidt
vaudrait mieux que toute autre, mais rien ne
prouve que 1A Grande-Bretagne y prendrait
part. »
POLITIQUE ETRANGERE
Les experts réunis à La Haye
ont tenu leur première séance
Une Conférence qui s'ouvre sans apparat et avec un seul discours!
M. van Karnebeek est désigné pour diriger les travaux
<3*©«î>— -
La Haye, 15 juin. - Pour la première
séance de la Conférence de La Haye, la
physionomie de la ville -n'a aucunement
changé. La population vaque à ses occu-
pations coutumières. Aucune décoration.
Aucun drapeau. Pas d'autres fleurs que
celles qui couvrent naturellement les nom-
breux jardins .de Hollande. Pas de service
d'ordre. A peine si les touristes et prome-
neurs se rendant à Scheveningen, où la sai-
son bat son. plein, s'arrêtent devant les gril-
les du Palais de la Paix, offertes en 1907
par le kaiser. ;
Les portes de la Conférence sont sévè-
rement interdites au public et même à la
presse. Le travail aura lieu en vase clos.
Le décor riche du - Palais a été maintes
fois décrit. Il est tout en mosaïque, marbre
et or, fournis par la contribution des di-
vers pays qui ont siégé ..aux conférences de
la Paix. H
Les statues de la Vérité et de la Justice
président la réunion d'aujourd'hui.
Trois tables sont disposées en rectangle.
Autour de ces tables, les Etats sont dispo-
sés par ordre alphabétique, avec un
nombre de places proportionné à l'impor-
tance des délégations : Empire britannique
et Pologne, 5 sièges ; Italie, 4 ; France,
un seul.
Le président est placé entre l'Albanie
.absente et l'Autriche, du fait que l'Allema-
gne est exclue des négociations russes de-
puis le traité de Rapallo.
LA PREMIERE SEANCE
La séance a lieu à 2 h. 30. Trente-qua-
tre Etats sont représentés, sinon par leurs
délégations non encore arrivées, du moins
par leur représentant diplomatique à La
Haye. Tel est le cas de la Roumanie, ab-
sente, de l'Allemagne, de la Russie, de l'Es-
thonie, de l'Albanie, de l'Islande.
M. Van Karnebeek, ministre des affaires
étrangères de Hollande, qui occupe provi-
soirement le fauteuil présidentiel, déclare
ouverte la session préliminaire de la Con-
férence dq La Haye.
Discours
de M. van Karnebeek
KSCOÏÏBSDE M, VAK KABNEBEEK-
M. Van Karnebeek s'exprime en ces ter-
mes : -
« Messieurs,
« Permettez-moi de vous saluer au nom dtl
gouvernement de S. M. la. reine et de vous
adresser quelques paroles de bienvenue au dé-
but de vos délibérations. Je n'ai guère besoin
de rappeler les origines de votre présence en
ces lieux. Elles sont récentes, elles datant de
Gênes où des résolutions ont été adoptées
prévoyant la réunion de deux commissions à
La Haye en vue d'examiner des divergences
existant entre le gouvernement soviétique et
les autres gouvernements, ainsi qu'un échan-
ge de vues préliminaire concernant les condi-
tions dans lesquelles la commission des ex-
perts agira vis-à-vis de la délégation russe.
« Le .gouvernement néerlandais déférant au
désir exprimé par la Conférence de Gênes
d'une manière unanime est heureux de vous
recevoir, de vous offrir l'hospitalité et d'ac-
cueillir avec faveur la proposition de faire
suivre les négociations entreprises à Gênes
par une étude plus approfondie de certaines
questions importantes restées en suspens.
Etant d'avis qu'il pouvait y avoir avantage à
faire un effort répété en vue de résoudre le
problème de la restauration de la Russie et
de la paix en Europe sur une base collective,
c'est dans cet ordre d'idées que J'g Pays-Bas,
mus par le sentiment du devoir imposé par les
traditions, se déclarent prêts à mettre à vo-
tre disposition les ressources du pays, notam-
ment cette virle qui, par sa situation et son
ambiance, a rendu souvent déjà service & la
coopération internationale. »
UN TRAVAIL D'ETUDES
Il ne m'appartient pas de vous donner des
directives.
Je n'ai pas l'intention de vous entretenir
de questions que les commissions sont appe-
lées à- traiter. Vous avez été conviés par le
président de la Conférence de Gênes en accord
avec le gouvernement néerlandais ; ce sera
à vous d'établir les conditions dans lesquelles
vos travaux se poursuivront sur la base con-
venue.
Je désire, ajouter que les. meilleurs vœux
du peuple néerlandais vous sont acquis pour
le succès de vos efforts. Le travail qui vous
attend est un travail d'études et de négocia-
tions préparatoires, tâche ardue, étant donné
les divergences profondes, les principes et.les
méthodes qui divisent la Russie soviétique et
les autres Etats représentés ici. Ce problème
est d'autant plus difficile à résoudre que le
système mis en pratique par la Russie semble
faire obstacle à la restauration économique
de ce malheureux pays. La Conférence de
Gênes, qui a été suivie en Hollande avec un
intérêt vif et soutenu, a eu le grand mérite,
bien qu'elle n'ait pas été couronnée de résul-
tats pratiques et immédiats, d'ouvrir la voie
à des possibilités de conversations ultérieures
que l'Europe - troublée et la Russie avertie
pourront mettre à profit.
Après l'épisod,e retenfissant du premier con-
tact, une phase nouvelle se présente dans la-
quelle il s'agira de recueillir, d'examiner, de
vérifier les faits élémentaires, de mesurer ;les
distances, de peser les besoins et de scruter
les impressions. L'heure première est une
phase d'étude pondérée, réglée, qui nécessite
une atmosphère de tranquillité et d'équilibre,
protectrice des responsabilités, dans le cadre
d'une publicité sage et bien ordonnée, impo-
sant respect aux impatiences, aux. empresse-
ments du dehors qui. dans les réunions inter-
nationales, ont souvent entravé l'effort des
bonnes volontés, grossissant les incidents par.
les obstacles.
Cette atmosphère propice que vous recher-
chez, j'espère que vous la trouverez ici. Que
ce soit, avec la part qu'ils prendront dans
vos délibérations, la contribution des Pay".
Bas, dont l'esprit objectif vous entoure dans
l'œuvre délicate que vous êtes appelés à pour-
suivre. Vous siégerez dans ce palais consa-
cré à la Justice internationale, voué aux idées
qui, en s'élevant au-dessus des misères hu-
maines, permettent de ne jamais désespérer.
Le gouvernement et le peuple néerlandais
suivront vos travaux avec le plus grand inté-
rêt et feront tout leur possible pour faciliter
la tâche de cette Conférence. Soyez les bien-
venus.
t
L'ELECTION DU PRESIDENT
Après de discours de M. Van Karnebeek,
la Conférence a procédé à l'élection du pré-
sident.
A l'unanimité," il a été décidé que le jon-
kheer Van Karnebeek serait maintenu défini-
tivement dans les fonctions de président des
réunions préliminaires, fonctions qu'il avait
assumées jusqu'ici à'titre provisoire. M. Van
Karnebeek a accepté la nomination.
Sur la proposition du président la séance
a été renvoyée à demain matin.
L'accord franco bricfftimiqtfe
est nécessaire
M. Jonnart, sénateur du Pas-de-Calais, e
prononcé hier, à l'assemblée générale de l'as-
sociation France-Grande-Bretagne, un dis-
cours dont voici les passages essentiels :
« C'est la violation des engagements pris par
la Russie antérieurement à l'avènement des
Soviets et les crimes commis contre le droit
de propriété et le droit des gens par la dic-
tature bolchevique, qui rendent impossibles
les accords avec un peuple malheureux au..
quel nous restons profondément attachés.
« M. Hughes, secrétaire d'Etat des Etats-
Unis, s'exprimait ainsi, il y a quelques jour®:]
« Toute nation peut, à ses risques et périls,
qui sont parfois des plus grands, se donner
les lois qu'elle veut, mais si elle recherche
des relations au dehors, les autres nations
ont le droit d'avoir leurs exigences : les rela-
tions internationales reposent sur un postu-
lat de morale internationale, et le (principe le
plus important à maintenir aujourdfhui à cet
égard est celui qu'aucun Etat n'a droit à une
place dans l'a famille des nations s'il détruit
les fondations de relations honorables, en
ayant recours à la confiscation, fà. la répudia-
tion des contrats, et s'abstient d'établir un
système adéquat de gouvernement grâce au-
quel les droits et engagements valides sont
reconnus et exécutés. »
« M. Lloyd Ceorge, dont l'esprit plein de;
fine ironie est si redoutable, disait, & Gênea.
-- aux représentants' des Soviets :
« Nous avons des préjugés indéracinables
dans l'Europe occidentale, unez nous, quand
un homme vend des marchandises il aime
généralement à être payé. Si quelqu'un va
trouver son voisin et lui demande un secours,
il ne trouve pas à emprunter s'il déclare que
ses principes ne lui permettent pas de rem-
bourser. De même, quand un pays demande
de l'argent, il n'est pas bon pour l'obtenir de
commencer par déclarer qu'il répudie sec-
dette.s. »
« Qu'on applique à La Haye les idées de M.
Hughes et de M. Lloyd George, la nouvelle
réunion sera féconde. » -
M. Jonnart a ajouté que l'entente franc:
britannique était nécessaire pour le règlement
des problèmes internationaux.
« Bien qu'absorbée par les problèmes de .c.
vie intérieure, les plus angoissants et les plus
déconcertants, elle ne rofuse pas néanmoins
de se prêter à l'étude de la reconstitution de
l'Europe. Elle y met seulement cette condi-
tion, que le relèvement de l'Europe ne se fera
pas au détriment de son propre relèvement.
« La France parlant au monde civilisé a
cru devoir ajouter qu'on multipliera les con-
férences en vain, qu'il n'y aura pas de paix
véritable, de reconstruction durable de l'Eu-
rope s'il n'y a pas entre elie et la Grande-Bre-
tagne une entente étroite, de plus en plus
étroite, et s'il n'y a plus de morale interna*
tionale ».
LE PROCÈS BASSARABO
Défense et accusation
échangent de vifs propos
.EI Je public ayant applaudi, l'audience
fut suspendue pendant 15 minutes
Ce n'est pas toujours drôle d'être témoin
aux assises.
« Avec qui avez-vous passé la nuit du
lr janvier ? » demande-t-on à l'un. « Votre
grand-père n'a-t-il pas été condamné pour ban-
queroute ? » dit-on à l'autre.
Etes-vous témoin de l'accusation ? l'avocat
général vous couvrl de fleurs et le défenseur
vous engu.irlande.
Si vous êtes favorable à la défense, c'est le
contraire exactement qui se produit, avec tou-
tefois cette différence que l'autorité de la
robe rouge donne aux sarcasmes du repré-
sentant de la vindicte publique une particu-
lière importance.
Alors, la conscience la plus pure s'émeut,
et, tremblants d'attirer sur eux la colère d'un
homme disposant d'un pouvoir si redouta-
ble, les témoins hésitent et se taisent.
,Ce n'est pas évidemment là le moyen d'é-
clairer la justice, non plus que de faire avan-
cer le procès, car fatalement des incidents
surgissent.
Il y en eut.hier plusieurs, mais aucun n'eut
un tel. caractère de gravité que celui qui se
produisit vers la fin de l'audience, au cours
de la déposition de Mme Mac Kenty, citée à
la requête de Mme Bassarabo.
Mme Mac Kenty, qui a conservé de ses re-
lations avec Hera Myrtel le plus doux souve-
nir, fait un vibrant éloge de celle qu'elle ap-
pelle « son adorable sœur en idéal ».
Comme Mme Bassarabo, le témoin cultive
les lettres et de quelle manière. L'avocat gé-
néral Mancel ne peut résister au désir de don-
ner aux jurés un échantillon de son savoir-
faire.
C'est une lettre dans laquelle, après avoir
exprimé en termes lyriques sa joie d'avoir été
admise au nombre des suivantes de la dame
du square Labruyère, Mme Mac Kenty s'écrie
enfin :
Je remercie Dieu de m'aroir (formé 7a foie
de contempler la femme, cOie
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