Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1921-08-13
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 août 1921 13 août 1921
Description : 1921/08/13 (N18507). 1921/08/13 (N18507).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75530176
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/02/2013
18 Thermidor, An 129. —- N8 18507
la sraotfto : çmum CENTDM
Samedi 13 août. — N° 18567
Fondataur» floeu) Ir
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIB
ABONNEMENTS
Un an BiiiMls MttM«
SEINE & S.-ET-OlSE. M » œJ » *J *
FRANCE & COLONIES.. 41 » 22 » Il
ETRANGER. 49 » 25 » SI »
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l
LE RAPPEL
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RAYMOND LANGE
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OPINIONS
La géographie de l'Europe
Je viens de lire un livre curieux qui, dans
iin milieu naturel demeuré sans changement,
mers, fleuves, montagnes, décrit un monde
disparu. Il date de quelques années à ine.
C'est une simple « géographie de l'Euro-
pe », écrite vers 1910, pour les élèves de
nos lycées et collèges.
L'auteur débute en nous apprenant que
l'Europe n'est pas seulement un nom dans
une classification arbitraire des continents.
« Elle est une individualité géographique
bien déterminée et présentant des caractè-
res généraux qui lui ont valu un rôle élevé
dans l'histoire de la civilisation. » Le mal-
heur est que, si l'Europe avait un sens
pour le géographe, elle n'avait aucun sens
pour les hommes d'Etat qui la gouvernaient.
Appliquée à la solution des problèmes que
posait la concurrence des peuples, l'in-
telligence aurait tenu compte de la solidarité
de ces peuples et, ne fût-ce que par inté.-
fêt, sauvegardé la paix. L'incompréhension
des empereurs et autres gouvernants, l'infa-
tuation des diplomates et des militaires,
l'esprit grégaire des foules, n'ont su que
faire sortir des ambitions rivales et des or-
gueils contraires, la guerre, et de la guerre,
la ruine pour tous.
La géographie politique de l'Europe
n'est plus qu'un souvenir. De nouveaux
Etats ont été créés, toutes les frontières ont
été déplacées. Le passé le plus proche est
reculé dans un incroyable lointain ; le pro-
bable est devenu l'impossible.
Des six grands empires qu' on mettait hors
de pair, l'un a été démembré, l'autre, de
lui-même. s'est décomposé et retourne à la
barbarie. « Contre-sens géographique, eth-
nographique, économique, écrit le géogra-
phe, l'Autriche-Hongrie est un contre-sens
nécessaire. Elle est indispensable à la tran-
quillité et à la stabilité de l'Europe ». S'il
a raison, à quelle nouvelle catastrophe ne
sommes-nous pas réservés ? Par bonheur,
ce qu'il dit de la Russie nous met en dé-
fiance de ses aphorismes. « Avec ses dé-
pen dances asiatiques, Sibérie, Turkestan,
Transcaucasie, la Russie domine sur un em-
pire une fois et demie plus vaste que l'Eu"
rope : c'est un de ces colosses qui peuvent
aspirer à l'empire du monde. La force de
la puissance russe est incalculable. » Rui-
née, mourant de faim, ramenée au temps
d'émigrations barbares, la Russie n' est
plus qu'un objet d'épouvante et de pitié.
L'Allemagne se présentait dans le prestige
de son extraordinaire prospérité ; elle était
U tJT,:nvll'! nuissance pufooéerme qui tenait
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le monde dans le respect et la crainte.
L'Allemagne est tombée sur les genoux,
et des deux mains s'appuie à la terre. Elle
porte le châtiment du crime dont elle est
a première responsable, elle a subi juste-
ment cette loi de la force, qu elle a divini-
sée.
En ces temps heureux, qui nous repor-
tent au paradis perdu, « la France était ri-
che », elle était le banquier du monde, et
« aucun pays n'était capable de payer plus
facilement une dette publique plus lourde »-.
Combien cette dette nous apparaît aujour-
d'hui légère ! La France ploie sous les
charges qui l'accablent. Elle a combattu
pour supprimer le militarisme. Victorieuse,
elle ne prend le sentiment de la victoire
eue par le droit de tenir sous les armes des
centaines de mille hommes et de s'imposer
un budget militaire qui achève sa ruine.
Seule peut-être, l'Angleterre sort de la guer-
re sans être diminuée. Mais 1 empire bri-
tannique, avec son centre insulaire, fait à
peine partie de l'Europe, dont sa politique
semble être bien plutôt d'empêcher la cons-
titution.
Les peuples découvrent — on les en
avait avertis — qu'ils sont les clients les
uns des autres et que, les clients ruinés, il
n'y a plus qu'à fermer boutique* On va ré-
pétant : produisons, produisons ! Mais où
écouler les produits :1 Le marché est inter-
national. L Allemagne, pour réparer, doit
multiplier ses exportations. L'Amérique se
ferme. La France, appauvrie, craint pour
son marché national. Le mark polonais et la
couronne autrichienne sont tombés à une
valeur de quelques centimes. La monnaie
n'est plus un instrument d'échange. Les
anciennes provinces de l'Autriche sont sans
ressources, la Russie est à la mendicité.
« Désormais, a écrit le maréchal Foch, les
peuples se font la guerre pour des raisons
économiques. »
Ma géographie s'achève en apothéose.
« La prépondérance de l'Europe est incon-
testable. Moins étendue que - les autres par-
ties du monde, l'Europe leur a imposé sa
domination. Elle a le premier rang dans
l'ordre économique. Elle a peuplé l'Amé-
rique. Elle a envahi l' Asie, dont la moitié
lui appartient. Le monde entier est tribu-
taire de l'Europe, centre intellectuel du
globe. » La guerre a passé, L'Amérique,
inquiète pour ses débouchés, envoie ses
grands hommes d'affaires se pencher sur le
lit de la malade et chercher des remèdes
qu'ils ne trouvent pas. L'Asie voit appro-
cher l'heure de sa revanche. Le bruit des
empires qui croulent hâte son réveil. Elle
prendra à l'Europe la acience qui donne la
puissance, elle gardera sa hafute culture
morale. Par son prestige, par le rôle qu'il
joue dans le monde, le Japon a rendu au
Jaune le sentiment de sa valeur et de sa
dignité. Les Philippines réclament l'autono-
mie. Aux Indes hollandaises, 35 à 40 mil-
lions de Malais, frères de sang des Japo-
nais, menacent de se serrer autour des cent
mille représentants de la race blanche et de
les écraser. Les Indes anglaises s'agitent.
On a beaucoup vanté les bienfaits de la
guerre. Nous pouvons espérer que la pro-
chaine guerre ramènera l'Europe au bien-
heureux état de nature.
Gabriel SEAILLES.
Encore un complot
0 qui n'est pas retenu
L'instruction ouverte par M. Jousselin
contre le Conscrit. pour excitation au meur-
tre et provocation de militaire à. la désobéis-
sance est terminée.
Le gérant cu Conscrit, M. William, et les
membres du Comité des jeunesses commu-
nistes : Laporte, Fegy, Pontillon, Kalmann,
Gayman, Deuclain, Vandame, La Croisille,
Schwaub, Perche, Regaudu et Mme Wae-
ziarg bénéficient d'une ordonnance de non-
lieu. -
Seul, M. William, en sa qualité Cl8 gérant
du Conscrit, va être tenvoyé devant le tri-
bunal correctionnel.
MM. Laporte et Fegy, poursuivis égale-
ment pour crime contre la sûreté intérieure
de l'Etat, ont bénéficié d'un non-lieu.
Ë DITORIAL
s
DÉSACCORD
„ — W* VV* V W*VVV*V>^VV%^
Pourquoi tout ce bruit et cette surprise
feinte ? Pensez-vous. nous donner comme
incident imprévu, la conséquence logique
d'une attitude préconçue ? M. Lloyd Geor-
ge dessert l'intérêt français ? Vraiment 1
Depuis Versailles, Vous ne vous en étiez
pas aperçus Plus clairvoyant, l'instinct
populaire a discerné depuis longtemps, sous
les simagrées, les sourires, les « hello »,
--- les bons mots et la belles phrase de - M.
Lloyd George, les traits traditionnels de la
politique anglaise, « England über alles. »
Eux aussi. Il jaut donc que l'Allemagne
se relève suffisamment, afin que la France
ne s'élève pas trop. Et des chausse-trapes
à tous les carrefours. Ici Feyçal, là
Tino ; plus loin, lord J' Abernon. Partout
les procédés inamicaux, et les coups de grif-
fes sous les caresses. Des concessions pour
l'amour de la paix, France généreuse )
Et nous n'avons que trop prêté l'oreille aux
uppels de ces amis au service de nos enne-
fitSs. Depuis las abdications initiales de
fttf C lemenceau — cet autre grand servi-
teur de l'Angleterre — nous avons promené
nos déconvenues à Spa, à Ostende, et au-
tres mauvais lieux, sans que rceucre de
lapaixjút consolidée — au contraire ! —
par les sacrifices que notre générosité im-
posait à notre droit.
Ah ! le croisement du tigre et du léo-
~pard*? a pas eu d' heureux résultats pour la
France. Le guêpier haut-silésien, façonné
par les mains mêmes de M. Lloyd George,
avec h complicité de M. Clemenceau (con-
contre l'avis du président Wilson), est une
des purs illustrations du néfaste traité de
Versailles. ) '\,
i ,.
Du moins, il aura donné ce résultat d'a-
mener notre bonne amie et alliée l'Angle-
terre à abattre son jeu.
L'Entente cordiale, que nous désirons
tous, n'y saurait survivre qu'autant qu'elle
sera dégagée d'un marché de dupes.
Elle implique sincérité, concessions, avan-
tages réciproques. Nous attendons encore
cette réciprocité.
J'aime mieux, dit un fabuliste de chez
nous, un franc ennemi qu'un bon ami qui
m'égratigne, e
Bon ami Léopard, si tu ne veux pas nous
entraîner vers de nouvelles catastrophes, sur-
veille tes griffes !
EDMOND DU MESNIL.
Les Soviets reconnaîtraient
les dettes de la Russie
Helsingfors, 11 août. — D'après des ren-
seignements parvenus de Moscou, de très
violentes discussions auraient surgi au sein
du Conseil des commissaires du peuple, re-
lativement ail règlement des anciennes det-
tes contractées par la Russie.
mistes ont combattu avec acharnement le
point de vue de Lénine, qui est parvenu ce-
pendant à imposer ses vues.
On annonce Itle le gouvernement rusje
publierait prochainement une déclaration
qui porterait reconnaissance officielle par
les Soviets de toutes les dettes contractées
par les gouvernements russes antérieurs.
On annonce également que Krassine par-
tirait prochainement pour Londres avec la
mission de négocier avec les puissances
.continentales sur la base de la reconnais-
sance des dettes, la reconnaissance du gou.
vernement des Soviets.
En passant
Modes sculpturales
Le « Paris » de Bariholomé, après avoir
fait couler des flots d'encre, a enfin trouvé
une place. Est-elle bonne P Hum ! Disons
qu'elle est moins mauvaise que celle que lai avait
affectée le premier projet, et n'en parlons plus.
Le « Paris » de Bartholomé représente une
maritorne « un peu là », la tête haute, un sein
à l'air, à laquelle, évidemment, il ne s'agit
pas d'en conter, car elle vous enverrait aux
quatre cents diables d'un swing de son poing
puissant, ou d'un coup de sa dague de marbte.
Le « Paris » de Bartholomé a une traîne
et un casque. Les Parisiennes de la guerre
n'eurent ni l'une ni l'autre.
Le « Paris » de Bartholomé représente tout
ce qu'on veut. sauf Paris. Mais s'il est
casé, n'y touchons pas 1 Et l'on se demande
vraiment pourquoi certains sculpteurs s'ingé-
nient à déformer les sujets qui sont livrés à
leur imagination. Au dernier concours la t'rcnd
Prix de Rome de sculpture, certains de isos
Phidias modernes, pour évoquer des fiançailles,
présentèrent des amants en toniques grecques. ;
ce ne fut pas toujours joli, joli, mais ce ne fut
pas ridicule. Mais d'autres n'hésitèrent pas à
tailler dans le marbre des commis de magasin
en veston à martingale et des cierges en robes
tailleur. Je laine deviner le résultat.
Rien n'est laid, ridicule, porno'e? -- comme
ces messieurs à redingote qui pr"iJcll. du
haut d'un piédestal, à la circulation d'un bou-
levard: on cherche où est leur bâ,.,n blanc.
Rien n'est sinistre comme ces citoyens en cha-
peau haut de forme des bronze, qui semblent
revenir d'un duel ou aller à un enterrement.
Je sais bien que si la critique est aisée, l'art
est difficile: cartes, il ne déplairait pas à noire
sens ironique de voir Jules Simon en toge,
Gambetta en guerrier antique et Musset en
gladiateur.
Et, puisque l'été a mis en vedette, chez
certains de nos confrères, la question de la
mode masculine: « Faut-il porter un col, pas
de col, un col dur, un col mou, un col ou-
vert, un col fermé », je propose d'ouoiir tn
concours sur la façon d'habiller les statues.
Je crois qu'on pourrait s'amuser cinq minutesI
Raymond LANGE.
Les Pommes du voisin
Aménité diplomatique.
L'extrême mauvaise humeur du Premier an-
glais n'a échappé à personne. Sans doute, M.
Lloyd George manque d'aménité. C',n" f tn
bourru. Ce n'est pas toujours le bourru bien-
faisant! Mais cette fois, il semblait avoir at-
teint le maximum de discourtoisie. Il fallait
voir de quel œil il considérait nos infortunés
confrères les journalistes français.
L'un d'eux qui l'avait suivi depuis Londres,
déclarait :
- Il a été d'une humeur charmante tout le
long du voyage. Mais dès que Lloyd ~Cenige
a entrevu la côte française, il a sorti ds ,.,on
gousset une rosette de la Légion d' honneur. Il
en a fleuri sa boutonnière. el du coup S,jfl ci-
sage s'est défleuri.
Et le journaliste d'ajouter :
— Bah! M. Lloyd George retrouvera sa
belle humeur en quittant la rosette.
(Aux Ecoutes).
UN MESSAGE
du président Harding
pour la Conférence de Washington
Le président Harding vient de lancer, par
câble, à l'acresse des gouvernements an-
glais, français, italien, japonais et chinois,
l'invitation officielle à la conférence de
Washington qui est définitivement fixée au
11 novembre 1921.
Voki le texte du message qui accompagne
l'invitation du président Harding :
Le président est protondément satisfait de la
~copdiaiite avec laquer les puissances intéres-
sées ont répondu à La suggestion qu'il a émise
aju sujet dune conférence où l'on discutera la
l'iaimlattion des armements en même temps que
les problèmes diu Pacifique et de 1 Extrême-
Orient, Le monde du travail chasncelle sous un
Haaxte&u. si Inurd qu'il est de toute nécessité de
r¡ùuiJ:e les graïuctes charges financières des
BttaJte et fi est vain de redherohar la stabilité
et de songer à garantir la justice socctale, la sé-
ourAé eL la paix, tandis que les dépenses irn-
Buxxkuotàves brisent, l'effort de sa jusle récom-
pense et détimieent toute l'espérance raisonua-
lie du progrès.
Las énoriiJcis dsipeiiÉes nécessitées paj' les rûva-
lités d'armements constituent inadaa&estemenit
une grande pari des charges qui pèsent sur les
entreprises et la prospérité nationale et ces
~extravagantes qu'il serait facile de
reduire ne sosuL pas impocbsiDles à justifier au
point de vue économique, mais edes consti-
tuent une menace constante à ia paix du mon-
de et non une garantie de sa cuxbsemtion,, et
cependant iil semblerait qu'il n'y a pas de rai-
son de s'attendre à un arrêt de l'accroissement
de ces dépenses à moins que les puissances les
plus gmandement intéressees ne trouvent une
0000 satisfaisante pour im accord qui assure
cette limitation.
'UIS croyons que le moment e*>t venu pour
ces puissances daborder ce sujet direstement
et en conference. ? iil est naa.Utl'el que, dans une
discussion sur la limitation des armements, la
question des armements navails occupe la pre-
mière place, nous avons pensé, d'autre part,
qu il ne convenait pas d'exclure les problèmes
relatifs aux armements d'une autre n.aM.m., de
teùile laçon. que toutes tes mesures s'uisoepûibles
d'adj-égoi- les charges financières puissent être
examinées ainsi qu'il convient.
Peut-être trouverà-t-otn aussi qu'il serait utile
de formuler des propositions grâce auxquelles
on organiserait un contrôle effioace des nouvel-
les méthodes de guerre ; cependant, il est tout
à fait clair qu'il ne saurait y avoir dans le
monde aucuaie garantie définitive de tranquil-
lité s'il ne s'y manifestait point un réel désir -de
paix, et il est bien certain que le projet de' ré-
ciuire les armements n'aurait aucune chance de
suocès, si oette volonté piacifique ne tfoywait
son expression, dans un constant effort efficace
en vue d'écarter tous les cas de mésen-
tente et de rechercher un terrain d'accord, au-s-
si bien en ce qui concerne les principes que
'tour.ajiplicatàoin.. -
Le gouvernement des Etats-Unis souhaite ar-
demment que, par uto échange de vues, et grâ
ce aux facilités que permettra la conférence, il
devienne possible de résoudre les problèmes
du Pacifique et d'Extrême-Orient dont i'ilïijpor-
tance est indiscutée.
Le gouvernement américain espère qu'un
accord sur ces questions, qui affectent des inté-
rêts internationaux, contribuera à créer une
amitié durable entre les nations qui prendront
part à la oonférenoe,
Nous croyons pouvoir affirmer que M.
Briand qui avait l'intention ète se rendre
à Washington a renoncé à son projet en
raison de la reprise des travaux parlemen-
taires.
Le bruit que nous avons transmis il y a
déjà une quinzaine, d'après lequel la langue
anglaise serait la seule admise à la confé-
rence s'est confirmé. Cette décision ne serait
également pas étrangère à l'abstention coi
président du conseil.
Le gouvernement français aurait songé à
se faire représenter par M. Viviani, mais lui
non plus ne parle pas anglais. Alors quel
sera le porte-parole de la France ?
LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE
L'appel à la Société des Nations
., ,,\.,:.,'-.,"",., ——
MM. Lloyd George et Briand n'ayant pas
réussi à s'accorder, le Conseil suprême, à
l' unanimité, a décidé de faire appel à l'arbi-
trage de la Société des Nations. Initiative, à
coup sûr, heureuse à laqueile applaudirent
par le monde tous les amis de la paix.
Les dernières propositions soumises par le
Premier britannique étaient, en effet, inaccep-
tables pour la France. M. Briand sans doute,
avait renoncé à réclamer Gleiwitz et Hinden-
burg, pour s'en tenir strictement à la ligne
Sforza. Mais M. Lloyd George demandait
pour l' Allemagne tous les centres essentiels du
fameux triangle : Beuthen, Kattowitz. Kœnig-
shutt. Dans ces conditions, fallait-il donc
rompre ?
Aucun des chefs de gouvernement ne l'a
pensé, ils ont repoussé presque avec horreur
une idée semblable et c'est ai mi que s'est fait
jour de tout renvoyer à la S. D. N..
S'est-on assez moqué pourtant de la « pau-
vre Soriété », de ses lenteurs, de son impuis-
sance, de ses résolutions académiques et trop
prudentes et cependant, les gouvernements, si
dédaigneux à son égard, se sont réjouis de
pouvoir lui demander de les tirer d'un mauvais
pas. Les amis de la S. D. N. ne pouvaient
espérer certainement plus éclatante justifica-
tion de son existence que l'appel qu'on lui
adresse ainsi en un jour difficile.
Les circonstances, d' ailleur. assurent mieux
encore l'impartialité de l' avis qui lui est de-
mandé. Au Conseil de la Société, figurent en
efiet, à côté des représentants des quatre gran-
des puissances (Angleterre, France, Itaiie, Ja-
pon) ceux de la Belgique, de l'Espagne', de
la Chine, du Brésii, Etats justements profon-
dément étrangers au conflit silésien et les noms
d'hommes comme M. Hymans, M. da Cunha,
M. Quinonès de Léon pour ne citer que
ceux-là, disent assez toute la confiance qu'à
l'avance, on peut avoir en leur jugement.
A Paris, le Conseil suprême travaillait en
des conditions déplorables. Dans une atmos-
phère de fièvre. les hommes d'Etat, exposés
sans cesse aux critiques, aux attaquas pasion-
nées de la presse attentive à épier leurs démar
ches et leurs propos, obligés de regarder sans
cesse, eux aussi, dans leur « circonscription >>,
vers leurs Parlements, devaient en hâte trou-
ver une solution à la fois équitable et accep-
table pour tous. Comment s'étonner, qu'en dé-
pit de leur habileté, MM: Briand et Lloyd
George n aient point réalisé ce miracle quand,
surtout malgré eux, nous en sommes sûrs, toute
l'affaire de Haute-Silésie avait pris le caractère
d' une sorte de match entre les Premiers de
France et d'Angleterre. Aux difficultés da
fond déjà si grandes, s'ajoutaient encore des
conflits presque de personnes. Comment donc
aboutir ?
Pour le Conseil de la S. D. N., la situation
se présente heureusement de façon fort diffé-
rente. Les hommes qui le composent, qu'ils
soient parlementaires ou ambassadeurs, parvien-
dront plus aisément à faire preuve de sérénité,
à considérer moins le point oie vue de l'Alle-
magne ou celui de la Pologne que le problème
d'ensemble, à agir — si nous pouvons cette
fois aussi, employer ce terme en « bons Euro-
péens », sans souci d'amours-propres natio-
naux artificiellement surexcités. Et ils travaille-
ront dans une atmosphère de paix.. D'ailleurs,
avant d'invoquer l' arbitrage de la Société, les
gouvernements alliés se sont mis d' accord >ur
le principe d'un envoi éventuel de renforts en
HauteSiîésie. L'ordre règncra donc sans doute
dans le territoire plébiscitaire, quand la S. D.
N. fera connaître sa décision.
Nous ne nous dissimulons pas que la résolu-
tion du Conseil suprême étonnera une partie
da l'opinion française, désireuse seulement de
voir les Alliés aboutir à une solution immé-
diate. Mais il serait pourtant profondément in-
juste de parler d'un ajournement. Nous nous
sommes engagés sur une voie nouvelle et l'on
surprend toujours en ~s' écr" r.t cie- sentiers
battus. Mais associer ainsi le monde à l'œuvre
de réorganisation européenne qont entreprise
la France et ses alliés est sons daute le seul
n oyçn qui subsiste de consolider les quelques
résultats acquis par notre victoire en jnaaintenanl
la paix.
AU CONSMÎZ, SUPREME
Le sort de la Haute-Silésie
remis à la Société des Nations
Le principe de l'envoi des renforts est admis
Hier matin, à 10 h. 1/4, M. Briand, sor-
tant de l'Elysée, où il avait mis au cou-
rant de la situation ses collègues, lesquels
avaient unanimement approuvé la position
prise par lui dans la question haut-silé-
sienne, s'est rendu à l'hotel Crillon, où il
eut une brève conversation avec M. Lloyd
George. M. Loucheur assistait a l'entre-
tien. c'
Laccord ne pouvant se faire actuelle-
ment entre les points de vue français et
britannique sur la ligne de partage de
la Haute-Silésie et les deux gouverne-
ment¡J étant résolus à éviter une rupture,
il fut décidé, e ër la proposition de M.
Lloyd George, que le problème serait trans-
mis au conseil de la Société des Nations,
les puissances alliées et associées s'enga-
geant à aocepter l'avis qui serait émis par
cette sorte de tribunal arbitral.
M. Briand, qui avaio envisagé une so
lution analogue en présence de l'impoli
bilitë d'un accord direct franco-britanni-
que, donna son approbation entière à la
proposition de M. Lloyd George, et le
Conseil suprême fut convoqué au Quai
d'Orsay pour 11 heures.
LA StATOUK UU UVNO&SU
M. Briand, en ouvrant la séance, dé-
clare qu'il y a opposition fondamentale
entre le point de vue britannique et le
point de vue français sur le partage de
la Haute-Silésie, et il propose que le dif-
férend soit renvoyé à la ïL: té des Na-
tions.
M. Lloyd George répond ai mier mi-
nistre français en indiquant ?e rânge
à la proposition de M. Briand i ajou-e
que jeudi soir la délégation britannique
et la délégation italienne ont. reconnu que
c'était là 1a meilleure solution à adopter
pour trancher le différend. t
Le premier ministre britannique pour-
suit ainsi :
Il ne s'agit pas d'un différend entre la
Grande-Bretagne et la France. Les experts
italiens sont du même avis que les nôtres,
ainsi d'ailleurs que le délégué du Japon,
4u surplus, cela n'implique aucune cri-
tique de l'attitude du gouvernement fran-
çais ni des experts français, mais il con-
vient d'insister sur ce point qu'en com-
battant le point de vue français, ta (}r,a,u,-
de-Bretagne n'agit pas isolément. Le, dif-
ficultés provienneut, non pas du problème
en soi, nvais de l'état de nervosité de l'opi-
nion publique:
La majorité du Conseil suprême a adopté
un point de vue; la France seule en a un
différent, il convient donc d'avoir recours
à un autre tribunal pour arriver à une
solution.
Nous avons fait des concessions dans
l'espoir d'aboutir à un accord, poursuit
M. Lloyd George, mais la Société dei, Ra-
tions ne doit pas se considérer comme Liée
par les suggestions qui ont été mises en
avant jusqu'ici. Elle devra procéder à une
nouvelle étude ,d'ensemble de la question
sans se préoccuper des tractations précé-
dentes, et il est entendu que nous accep-
terons sans réserves la décision prise par
elle.
- .- "Y .,. l'
On priera la Societe des Nations a en-
tamer immédiatement l'étude du problème.
Elle sera libre d'adopter la procédure qui
lui conviendra, soit qu'elle procède à la
constitution d'un tribunal international,
soit qu'elle décide. de constituer une com-
mission (te juristes jouissant d'une auto-
rité internationale.
Il faut également que nou* tenions
compte de la situation locale en Haute-
Silésie. Si l'on reconnaît qu'il convient
de renforcer les forces alliées dam cette
région, la Gravide-Bretagne participera à
l'envoi des renforts dans la même propor-
tion que les autres puissances.
M. Briand, se levant de nouveau, dé-
clare, au nom de son gouvernement, que
la France acceptera également sans réser-
ves la décision de la bociété des Nations.
M. Bonomi, premier ministre italien,
déclare qu'il est déjà tombé d'accord avec
M. Lloyci George qu'en cas d'opposition
irréductible encre le point de vue anglo-
italien, d'une part, et le point de vue fran-
çais, d'autre part, la question devrait être
renvoyée à la Société des Nations.
Le premier ministre italien conclut en
déclarant que l'Italie est prête a envoyer
des renforts en Haute-Silésie, en attendant
la décision de la Société des Nations.
Le baron Hayashi, délégué du Japon,
estime qu'on doit admettre le principe que
les districts industriels centraux de la.
Haute-Silésie devraient être attribués à
l'Allemagne; il déclare cependant accepter
la proposition tendant à soumettre le li-
tige à la Société des Nations.
M. Harvey, le délégué américain, dé-
clare que les Etats-Unis ont estimé dès le
début que la question de la Haute-Silesie
était d'ordre purement européen. Aujour-
d'hui que cette question est renvoyée à la
Société des Nations, dont les Etats-Unis
ne font pas partie, le délégué américain
estime qu'il interprète la pensée de son
gouvernement en annonçant que tes Etats-
Unis ne participeront pas à la décision.
La résolution
Ces déclarations terminées, le Conseil
vote à l'unanimité la résolution suivante :
Le Conseil suprême, avant de statuer
sur la fixation de la frontière entre l'Al-
lemagne et la Pologne en Eaute-Silésie,
conformément à l'article 88 du traité de
Versailles, décide, par application de l'ar.
ticle 11 paragraphe 2 du pacte de la So-
ciété des Vaiiorià, de soumettre au Conseil
de la Société les difficultés que présente
la fixation de cette frontière et de vouloir
bien lui faire connaître son avis sur le
tracé de la ligne qu'il appartient aux prin-
cipales puissances alliées et associées d'é-
tablir,
En raison de'la situation en Haute-Si-
lesie, le Conseil de la Société df s Nations
sera prie, de vouloir bien considérer cette
affaire comme étqitt de grande urgence.
En outre. il fut décidé à l'unanimité 9u
les trois hauts-commissaires ajliés rega-
gneraient leur poste immédia.tement et
que, d'autre pa.rt, une démarche collective
serait faite simultanément à Berlin et à
Varsovie pour inviter les gouvernements
allemand et polonais à prendre toutes les
mesures qui dépendent d'eux en vue d'em-
pêcher que l'ordre ne soit troublé.
Les renforts
Enfin, en ce qui concerne la question
des renforts, une décision de principe a
été prise : dans le cas où les experts mili-
taires estimeraient que la situation exige
le renforcement du corps d'occupation, des
croupes supplémentaires seraient éxpé.
diées. L'Angleterre et l'Italie fourniraient
leur contingent comme la France.
L'accord étant fait sur la procédure à
suivre en ce qui ooncerne la Haute-Silésie,
M, Lloyd George quitta le quai d'Orsay et
,,-' rendit à la gare du Nord où il prit le
~- ain pour Londres à midi.
Les coupables
Le Conseil passa alors à l'examm de la
question des coupables; il décida d'inviter
les autorités judiciaires des différents pays
intéressés à demander aux magistra.ts qui
ont assisté aux débats de la cour de Leip-
zig de faire des propositions sur l'attitude
à adopter après avoir pris connaissance
des dossiers.
La prochaine Sé:éMt.
La prochaine séance du Conseil aura
lieu ce matin, à 11 heures; lord Curzon,
qui n'a pas quitté Paris, y prendra part.
Cette séance sera très vraisemblablement
la dernière ; elle épuisera lès dernièrea
questions inscrites à l'ordre du jour parmi
lesquelles figure celle des sanctions. De
plus, il y aura sans doute lieu de désigner
les membres du comité chargé de s'occuper
du ravitaillement de la Russie.
LE CONSEIL DES MINISTRES
D'HIER SOIR
Un conseil des ministres a été tenu hi,
soir, à 6 h. 30, à l'Elysée. C'étàit le
second de la journée. Il avait été rendu,
nécessaire pour la décision prise par le
Conseil suprême apr. 11 pmniere réunioa
des ministres.
M. Briand, en eaet, mit ses cullègues au
courant dss entretiens qu'il avait eus avu
M. Lloyd George et de la dernière discus-
sion sur la Haute-Silesie.
Il fit ressortir qu'en soumettant cette dé,
licate question &u conseil de la Société des
nations, la France avait manifesté son évi.
dente volonté de tout faire pour ne pas 8.1',
river à une sorte de rupture avtc l'Angle-
terre,
Le président du conseil laissa entendra
qu'il estimait que la composition même dt
conseil de la Société des nations pouvaii
nous laisser espérer que le point de vu<
français serait mieux défendu là qu'au
Conseil suprême.
Le conseil de ia Sociott des nations se
réunira vraisemblablement dans la pre-
mière quinzaine de septembre.
A l'unanimité, encore une fois, les mi-
nistres ont approuvé M. Briand.
DEPART DE M. LLOYD GEORGE
M. Lloyd George a quitté Paris à midi
par le train cta Calais, se rendant à Lon-
dres.
Avant de monter dans le wagon spécial
qui lui était réservé, M. Lloyd George
s est entretenu avec lord Hardiuge, am-
bassadeur d'Angleterre à Paris, et lord
Riddell.
Puis M. ~Liojd licence, saiue pu-r MM.
Leulliar, préfet de police; Guichard, di-
recteur de 1a police municipale, et de Fou-
quières, chef du protocole, représentant le
gouvernement français, a pris place dans
le train, accompagné de ses secrétaires :
sir Maurice Hankey, Edward Grigg, Dar
vies et le capitaine Burgis.
UN DEJEUNER AU QUAI D'ORSAY
M. Briand, président du conseil, a offert
hier matin un déjeuner au ministère des
affaires étrangères en 1 honneur des mem-
bres du Conseil suprême.
M. Jusserand, ambassadeur de France
aux Etats-Unis, et M. Charles Laurent,
ambassadeur de France à Berlin, y assis-
taient. ainsi que le haut personnel du mi-
nistère des affaires étrangères.
FRÈRES D'ARMES
La Légion américaine
est acclamée
Le débarquement à Cherbourg
Cherbourg, puis Paris, ont fait hier à la
Légion américaine un accueil enthousiaste.
A Cherbourg, où le Georges-Washington,
escorté de torpilleurs, entrait en rade à
7 heures., la réception, bien que courte, fut
un merveilleux prélude aux fêtes que réser-
ve aux anciens soldats américains le gou-
vernement français.
Dès 6 heures, l'Avenir, pavoisé aux cou-
leurs américaines et françaises, et qui porte
les célégués français et des groupes de com-
battants et de mutilés, démarre pour aller
au devant de la Légion. Une heure après,
entre les deux navires, l'abordage avait iieu,
et au milieu d'acclamations, le colonel Bu-
nau-Varilla, représentant les granè muti-
lés, M. Knecht, directeur du servi-ce français
d'informations aux Etats-Unis, le comman-
dant Villaret, représentant de l'ambassa-
deur des Etats-Unis, présentaient les sou-
haits ce bienvenue de la France aux tn is
commandeurs successifs de l'American Lé-
gion : Emery, Franklin d'Ollier et Lindsley
Sur les suôis de Cherbourg, les 19ai-
la sraotfto : çmum CENTDM
Samedi 13 août. — N° 18567
Fondataur» floeu) Ir
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIB
ABONNEMENTS
Un an BiiiMls MttM«
SEINE & S.-ET-OlSE. M » œJ » *J *
FRANCE & COLONIES.. 41 » 22 » Il
ETRANGER. 49 » 25 » SI »
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l
LE RAPPEL
Rëdmetaut* en ekmfê
RAYMOND LANGE
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OPINIONS
La géographie de l'Europe
Je viens de lire un livre curieux qui, dans
iin milieu naturel demeuré sans changement,
mers, fleuves, montagnes, décrit un monde
disparu. Il date de quelques années à ine.
C'est une simple « géographie de l'Euro-
pe », écrite vers 1910, pour les élèves de
nos lycées et collèges.
L'auteur débute en nous apprenant que
l'Europe n'est pas seulement un nom dans
une classification arbitraire des continents.
« Elle est une individualité géographique
bien déterminée et présentant des caractè-
res généraux qui lui ont valu un rôle élevé
dans l'histoire de la civilisation. » Le mal-
heur est que, si l'Europe avait un sens
pour le géographe, elle n'avait aucun sens
pour les hommes d'Etat qui la gouvernaient.
Appliquée à la solution des problèmes que
posait la concurrence des peuples, l'in-
telligence aurait tenu compte de la solidarité
de ces peuples et, ne fût-ce que par inté.-
fêt, sauvegardé la paix. L'incompréhension
des empereurs et autres gouvernants, l'infa-
tuation des diplomates et des militaires,
l'esprit grégaire des foules, n'ont su que
faire sortir des ambitions rivales et des or-
gueils contraires, la guerre, et de la guerre,
la ruine pour tous.
La géographie politique de l'Europe
n'est plus qu'un souvenir. De nouveaux
Etats ont été créés, toutes les frontières ont
été déplacées. Le passé le plus proche est
reculé dans un incroyable lointain ; le pro-
bable est devenu l'impossible.
Des six grands empires qu' on mettait hors
de pair, l'un a été démembré, l'autre, de
lui-même. s'est décomposé et retourne à la
barbarie. « Contre-sens géographique, eth-
nographique, économique, écrit le géogra-
phe, l'Autriche-Hongrie est un contre-sens
nécessaire. Elle est indispensable à la tran-
quillité et à la stabilité de l'Europe ». S'il
a raison, à quelle nouvelle catastrophe ne
sommes-nous pas réservés ? Par bonheur,
ce qu'il dit de la Russie nous met en dé-
fiance de ses aphorismes. « Avec ses dé-
pen dances asiatiques, Sibérie, Turkestan,
Transcaucasie, la Russie domine sur un em-
pire une fois et demie plus vaste que l'Eu"
rope : c'est un de ces colosses qui peuvent
aspirer à l'empire du monde. La force de
la puissance russe est incalculable. » Rui-
née, mourant de faim, ramenée au temps
d'émigrations barbares, la Russie n' est
plus qu'un objet d'épouvante et de pitié.
L'Allemagne se présentait dans le prestige
de son extraordinaire prospérité ; elle était
U tJT,:nvll'! nuissance pufooéerme qui tenait
•w*. "-..-- r * - J
le monde dans le respect et la crainte.
L'Allemagne est tombée sur les genoux,
et des deux mains s'appuie à la terre. Elle
porte le châtiment du crime dont elle est
a première responsable, elle a subi juste-
ment cette loi de la force, qu elle a divini-
sée.
En ces temps heureux, qui nous repor-
tent au paradis perdu, « la France était ri-
che », elle était le banquier du monde, et
« aucun pays n'était capable de payer plus
facilement une dette publique plus lourde »-.
Combien cette dette nous apparaît aujour-
d'hui légère ! La France ploie sous les
charges qui l'accablent. Elle a combattu
pour supprimer le militarisme. Victorieuse,
elle ne prend le sentiment de la victoire
eue par le droit de tenir sous les armes des
centaines de mille hommes et de s'imposer
un budget militaire qui achève sa ruine.
Seule peut-être, l'Angleterre sort de la guer-
re sans être diminuée. Mais 1 empire bri-
tannique, avec son centre insulaire, fait à
peine partie de l'Europe, dont sa politique
semble être bien plutôt d'empêcher la cons-
titution.
Les peuples découvrent — on les en
avait avertis — qu'ils sont les clients les
uns des autres et que, les clients ruinés, il
n'y a plus qu'à fermer boutique* On va ré-
pétant : produisons, produisons ! Mais où
écouler les produits :1 Le marché est inter-
national. L Allemagne, pour réparer, doit
multiplier ses exportations. L'Amérique se
ferme. La France, appauvrie, craint pour
son marché national. Le mark polonais et la
couronne autrichienne sont tombés à une
valeur de quelques centimes. La monnaie
n'est plus un instrument d'échange. Les
anciennes provinces de l'Autriche sont sans
ressources, la Russie est à la mendicité.
« Désormais, a écrit le maréchal Foch, les
peuples se font la guerre pour des raisons
économiques. »
Ma géographie s'achève en apothéose.
« La prépondérance de l'Europe est incon-
testable. Moins étendue que - les autres par-
ties du monde, l'Europe leur a imposé sa
domination. Elle a le premier rang dans
l'ordre économique. Elle a peuplé l'Amé-
rique. Elle a envahi l' Asie, dont la moitié
lui appartient. Le monde entier est tribu-
taire de l'Europe, centre intellectuel du
globe. » La guerre a passé, L'Amérique,
inquiète pour ses débouchés, envoie ses
grands hommes d'affaires se pencher sur le
lit de la malade et chercher des remèdes
qu'ils ne trouvent pas. L'Asie voit appro-
cher l'heure de sa revanche. Le bruit des
empires qui croulent hâte son réveil. Elle
prendra à l'Europe la acience qui donne la
puissance, elle gardera sa hafute culture
morale. Par son prestige, par le rôle qu'il
joue dans le monde, le Japon a rendu au
Jaune le sentiment de sa valeur et de sa
dignité. Les Philippines réclament l'autono-
mie. Aux Indes hollandaises, 35 à 40 mil-
lions de Malais, frères de sang des Japo-
nais, menacent de se serrer autour des cent
mille représentants de la race blanche et de
les écraser. Les Indes anglaises s'agitent.
On a beaucoup vanté les bienfaits de la
guerre. Nous pouvons espérer que la pro-
chaine guerre ramènera l'Europe au bien-
heureux état de nature.
Gabriel SEAILLES.
Encore un complot
0 qui n'est pas retenu
L'instruction ouverte par M. Jousselin
contre le Conscrit. pour excitation au meur-
tre et provocation de militaire à. la désobéis-
sance est terminée.
Le gérant cu Conscrit, M. William, et les
membres du Comité des jeunesses commu-
nistes : Laporte, Fegy, Pontillon, Kalmann,
Gayman, Deuclain, Vandame, La Croisille,
Schwaub, Perche, Regaudu et Mme Wae-
ziarg bénéficient d'une ordonnance de non-
lieu. -
Seul, M. William, en sa qualité Cl8 gérant
du Conscrit, va être tenvoyé devant le tri-
bunal correctionnel.
MM. Laporte et Fegy, poursuivis égale-
ment pour crime contre la sûreté intérieure
de l'Etat, ont bénéficié d'un non-lieu.
Ë DITORIAL
s
DÉSACCORD
„ — W* VV* V W*VVV*V>^VV%^
Pourquoi tout ce bruit et cette surprise
feinte ? Pensez-vous. nous donner comme
incident imprévu, la conséquence logique
d'une attitude préconçue ? M. Lloyd Geor-
ge dessert l'intérêt français ? Vraiment 1
Depuis Versailles, Vous ne vous en étiez
pas aperçus Plus clairvoyant, l'instinct
populaire a discerné depuis longtemps, sous
les simagrées, les sourires, les « hello »,
--- les bons mots et la belles phrase de - M.
Lloyd George, les traits traditionnels de la
politique anglaise, « England über alles. »
Eux aussi. Il jaut donc que l'Allemagne
se relève suffisamment, afin que la France
ne s'élève pas trop. Et des chausse-trapes
à tous les carrefours. Ici Feyçal, là
Tino ; plus loin, lord J' Abernon. Partout
les procédés inamicaux, et les coups de grif-
fes sous les caresses. Des concessions pour
l'amour de la paix, France généreuse )
Et nous n'avons que trop prêté l'oreille aux
uppels de ces amis au service de nos enne-
fitSs. Depuis las abdications initiales de
fttf C lemenceau — cet autre grand servi-
teur de l'Angleterre — nous avons promené
nos déconvenues à Spa, à Ostende, et au-
tres mauvais lieux, sans que rceucre de
lapaixjút consolidée — au contraire ! —
par les sacrifices que notre générosité im-
posait à notre droit.
Ah ! le croisement du tigre et du léo-
~pard*? a pas eu d' heureux résultats pour la
France. Le guêpier haut-silésien, façonné
par les mains mêmes de M. Lloyd George,
avec h complicité de M. Clemenceau (con-
contre l'avis du président Wilson), est une
des purs illustrations du néfaste traité de
Versailles. ) '\,
i ,.
Du moins, il aura donné ce résultat d'a-
mener notre bonne amie et alliée l'Angle-
terre à abattre son jeu.
L'Entente cordiale, que nous désirons
tous, n'y saurait survivre qu'autant qu'elle
sera dégagée d'un marché de dupes.
Elle implique sincérité, concessions, avan-
tages réciproques. Nous attendons encore
cette réciprocité.
J'aime mieux, dit un fabuliste de chez
nous, un franc ennemi qu'un bon ami qui
m'égratigne, e
Bon ami Léopard, si tu ne veux pas nous
entraîner vers de nouvelles catastrophes, sur-
veille tes griffes !
EDMOND DU MESNIL.
Les Soviets reconnaîtraient
les dettes de la Russie
Helsingfors, 11 août. — D'après des ren-
seignements parvenus de Moscou, de très
violentes discussions auraient surgi au sein
du Conseil des commissaires du peuple, re-
lativement ail règlement des anciennes det-
tes contractées par la Russie.
mistes ont combattu avec acharnement le
point de vue de Lénine, qui est parvenu ce-
pendant à imposer ses vues.
On annonce Itle le gouvernement rusje
publierait prochainement une déclaration
qui porterait reconnaissance officielle par
les Soviets de toutes les dettes contractées
par les gouvernements russes antérieurs.
On annonce également que Krassine par-
tirait prochainement pour Londres avec la
mission de négocier avec les puissances
.continentales sur la base de la reconnais-
sance des dettes, la reconnaissance du gou.
vernement des Soviets.
En passant
Modes sculpturales
Le « Paris » de Bariholomé, après avoir
fait couler des flots d'encre, a enfin trouvé
une place. Est-elle bonne P Hum ! Disons
qu'elle est moins mauvaise que celle que lai avait
affectée le premier projet, et n'en parlons plus.
Le « Paris » de Bartholomé représente une
maritorne « un peu là », la tête haute, un sein
à l'air, à laquelle, évidemment, il ne s'agit
pas d'en conter, car elle vous enverrait aux
quatre cents diables d'un swing de son poing
puissant, ou d'un coup de sa dague de marbte.
Le « Paris » de Bartholomé a une traîne
et un casque. Les Parisiennes de la guerre
n'eurent ni l'une ni l'autre.
Le « Paris » de Bartholomé représente tout
ce qu'on veut. sauf Paris. Mais s'il est
casé, n'y touchons pas 1 Et l'on se demande
vraiment pourquoi certains sculpteurs s'ingé-
nient à déformer les sujets qui sont livrés à
leur imagination. Au dernier concours la t'rcnd
Prix de Rome de sculpture, certains de isos
Phidias modernes, pour évoquer des fiançailles,
présentèrent des amants en toniques grecques. ;
ce ne fut pas toujours joli, joli, mais ce ne fut
pas ridicule. Mais d'autres n'hésitèrent pas à
tailler dans le marbre des commis de magasin
en veston à martingale et des cierges en robes
tailleur. Je laine deviner le résultat.
Rien n'est laid, ridicule, porno'e? -- comme
ces messieurs à redingote qui pr"iJcll. du
haut d'un piédestal, à la circulation d'un bou-
levard: on cherche où est leur bâ,.,n blanc.
Rien n'est sinistre comme ces citoyens en cha-
peau haut de forme des bronze, qui semblent
revenir d'un duel ou aller à un enterrement.
Je sais bien que si la critique est aisée, l'art
est difficile: cartes, il ne déplairait pas à noire
sens ironique de voir Jules Simon en toge,
Gambetta en guerrier antique et Musset en
gladiateur.
Et, puisque l'été a mis en vedette, chez
certains de nos confrères, la question de la
mode masculine: « Faut-il porter un col, pas
de col, un col dur, un col mou, un col ou-
vert, un col fermé », je propose d'ouoiir tn
concours sur la façon d'habiller les statues.
Je crois qu'on pourrait s'amuser cinq minutesI
Raymond LANGE.
Les Pommes du voisin
Aménité diplomatique.
L'extrême mauvaise humeur du Premier an-
glais n'a échappé à personne. Sans doute, M.
Lloyd George manque d'aménité. C',n" f tn
bourru. Ce n'est pas toujours le bourru bien-
faisant! Mais cette fois, il semblait avoir at-
teint le maximum de discourtoisie. Il fallait
voir de quel œil il considérait nos infortunés
confrères les journalistes français.
L'un d'eux qui l'avait suivi depuis Londres,
déclarait :
- Il a été d'une humeur charmante tout le
long du voyage. Mais dès que Lloyd ~Cenige
a entrevu la côte française, il a sorti ds ,.,on
gousset une rosette de la Légion d' honneur. Il
en a fleuri sa boutonnière. el du coup S,jfl ci-
sage s'est défleuri.
Et le journaliste d'ajouter :
— Bah! M. Lloyd George retrouvera sa
belle humeur en quittant la rosette.
(Aux Ecoutes).
UN MESSAGE
du président Harding
pour la Conférence de Washington
Le président Harding vient de lancer, par
câble, à l'acresse des gouvernements an-
glais, français, italien, japonais et chinois,
l'invitation officielle à la conférence de
Washington qui est définitivement fixée au
11 novembre 1921.
Voki le texte du message qui accompagne
l'invitation du président Harding :
Le président est protondément satisfait de la
~copdiaiite avec laquer les puissances intéres-
sées ont répondu à La suggestion qu'il a émise
aju sujet dune conférence où l'on discutera la
l'iaimlattion des armements en même temps que
les problèmes diu Pacifique et de 1 Extrême-
Orient, Le monde du travail chasncelle sous un
Haaxte&u. si Inurd qu'il est de toute nécessité de
r¡ùuiJ:e les graïuctes charges financières des
BttaJte et fi est vain de redherohar la stabilité
et de songer à garantir la justice socctale, la sé-
ourAé eL la paix, tandis que les dépenses irn-
Buxxkuotàves brisent, l'effort de sa jusle récom-
pense et détimieent toute l'espérance raisonua-
lie du progrès.
Las énoriiJcis dsipeiiÉes nécessitées paj' les rûva-
lités d'armements constituent inadaa&estemenit
une grande pari des charges qui pèsent sur les
entreprises et la prospérité nationale et ces
~extravagantes qu'il serait facile de
reduire ne sosuL pas impocbsiDles à justifier au
point de vue économique, mais edes consti-
tuent une menace constante à ia paix du mon-
de et non une garantie de sa cuxbsemtion,, et
cependant iil semblerait qu'il n'y a pas de rai-
son de s'attendre à un arrêt de l'accroissement
de ces dépenses à moins que les puissances les
plus gmandement intéressees ne trouvent une
0000 satisfaisante pour im accord qui assure
cette limitation.
'UIS croyons que le moment e*>t venu pour
ces puissances daborder ce sujet direstement
et en conference. ? iil est naa.Utl'el que, dans une
discussion sur la limitation des armements, la
question des armements navails occupe la pre-
mière place, nous avons pensé, d'autre part,
qu il ne convenait pas d'exclure les problèmes
relatifs aux armements d'une autre n.aM.m., de
teùile laçon. que toutes tes mesures s'uisoepûibles
d'adj-égoi- les charges financières puissent être
examinées ainsi qu'il convient.
Peut-être trouverà-t-otn aussi qu'il serait utile
de formuler des propositions grâce auxquelles
on organiserait un contrôle effioace des nouvel-
les méthodes de guerre ; cependant, il est tout
à fait clair qu'il ne saurait y avoir dans le
monde aucuaie garantie définitive de tranquil-
lité s'il ne s'y manifestait point un réel désir -de
paix, et il est bien certain que le projet de' ré-
ciuire les armements n'aurait aucune chance de
suocès, si oette volonté piacifique ne tfoywait
son expression, dans un constant effort efficace
en vue d'écarter tous les cas de mésen-
tente et de rechercher un terrain d'accord, au-s-
si bien en ce qui concerne les principes que
'tour.ajiplicatàoin.. -
Le gouvernement des Etats-Unis souhaite ar-
demment que, par uto échange de vues, et grâ
ce aux facilités que permettra la conférence, il
devienne possible de résoudre les problèmes
du Pacifique et d'Extrême-Orient dont i'ilïijpor-
tance est indiscutée.
Le gouvernement américain espère qu'un
accord sur ces questions, qui affectent des inté-
rêts internationaux, contribuera à créer une
amitié durable entre les nations qui prendront
part à la oonférenoe,
Nous croyons pouvoir affirmer que M.
Briand qui avait l'intention ète se rendre
à Washington a renoncé à son projet en
raison de la reprise des travaux parlemen-
taires.
Le bruit que nous avons transmis il y a
déjà une quinzaine, d'après lequel la langue
anglaise serait la seule admise à la confé-
rence s'est confirmé. Cette décision ne serait
également pas étrangère à l'abstention coi
président du conseil.
Le gouvernement français aurait songé à
se faire représenter par M. Viviani, mais lui
non plus ne parle pas anglais. Alors quel
sera le porte-parole de la France ?
LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE
L'appel à la Société des Nations
., ,,\.,:.,'-.,"",., ——
MM. Lloyd George et Briand n'ayant pas
réussi à s'accorder, le Conseil suprême, à
l' unanimité, a décidé de faire appel à l'arbi-
trage de la Société des Nations. Initiative, à
coup sûr, heureuse à laqueile applaudirent
par le monde tous les amis de la paix.
Les dernières propositions soumises par le
Premier britannique étaient, en effet, inaccep-
tables pour la France. M. Briand sans doute,
avait renoncé à réclamer Gleiwitz et Hinden-
burg, pour s'en tenir strictement à la ligne
Sforza. Mais M. Lloyd George demandait
pour l' Allemagne tous les centres essentiels du
fameux triangle : Beuthen, Kattowitz. Kœnig-
shutt. Dans ces conditions, fallait-il donc
rompre ?
Aucun des chefs de gouvernement ne l'a
pensé, ils ont repoussé presque avec horreur
une idée semblable et c'est ai mi que s'est fait
jour de tout renvoyer à la S. D. N..
S'est-on assez moqué pourtant de la « pau-
vre Soriété », de ses lenteurs, de son impuis-
sance, de ses résolutions académiques et trop
prudentes et cependant, les gouvernements, si
dédaigneux à son égard, se sont réjouis de
pouvoir lui demander de les tirer d'un mauvais
pas. Les amis de la S. D. N. ne pouvaient
espérer certainement plus éclatante justifica-
tion de son existence que l'appel qu'on lui
adresse ainsi en un jour difficile.
Les circonstances, d' ailleur. assurent mieux
encore l'impartialité de l' avis qui lui est de-
mandé. Au Conseil de la Société, figurent en
efiet, à côté des représentants des quatre gran-
des puissances (Angleterre, France, Itaiie, Ja-
pon) ceux de la Belgique, de l'Espagne', de
la Chine, du Brésii, Etats justements profon-
dément étrangers au conflit silésien et les noms
d'hommes comme M. Hymans, M. da Cunha,
M. Quinonès de Léon pour ne citer que
ceux-là, disent assez toute la confiance qu'à
l'avance, on peut avoir en leur jugement.
A Paris, le Conseil suprême travaillait en
des conditions déplorables. Dans une atmos-
phère de fièvre. les hommes d'Etat, exposés
sans cesse aux critiques, aux attaquas pasion-
nées de la presse attentive à épier leurs démar
ches et leurs propos, obligés de regarder sans
cesse, eux aussi, dans leur « circonscription >>,
vers leurs Parlements, devaient en hâte trou-
ver une solution à la fois équitable et accep-
table pour tous. Comment s'étonner, qu'en dé-
pit de leur habileté, MM: Briand et Lloyd
George n aient point réalisé ce miracle quand,
surtout malgré eux, nous en sommes sûrs, toute
l'affaire de Haute-Silésie avait pris le caractère
d' une sorte de match entre les Premiers de
France et d'Angleterre. Aux difficultés da
fond déjà si grandes, s'ajoutaient encore des
conflits presque de personnes. Comment donc
aboutir ?
Pour le Conseil de la S. D. N., la situation
se présente heureusement de façon fort diffé-
rente. Les hommes qui le composent, qu'ils
soient parlementaires ou ambassadeurs, parvien-
dront plus aisément à faire preuve de sérénité,
à considérer moins le point oie vue de l'Alle-
magne ou celui de la Pologne que le problème
d'ensemble, à agir — si nous pouvons cette
fois aussi, employer ce terme en « bons Euro-
péens », sans souci d'amours-propres natio-
naux artificiellement surexcités. Et ils travaille-
ront dans une atmosphère de paix.. D'ailleurs,
avant d'invoquer l' arbitrage de la Société, les
gouvernements alliés se sont mis d' accord >ur
le principe d'un envoi éventuel de renforts en
HauteSiîésie. L'ordre règncra donc sans doute
dans le territoire plébiscitaire, quand la S. D.
N. fera connaître sa décision.
Nous ne nous dissimulons pas que la résolu-
tion du Conseil suprême étonnera une partie
da l'opinion française, désireuse seulement de
voir les Alliés aboutir à une solution immé-
diate. Mais il serait pourtant profondément in-
juste de parler d'un ajournement. Nous nous
sommes engagés sur une voie nouvelle et l'on
surprend toujours en ~s' écr" r.t cie- sentiers
battus. Mais associer ainsi le monde à l'œuvre
de réorganisation européenne qont entreprise
la France et ses alliés est sons daute le seul
n oyçn qui subsiste de consolider les quelques
résultats acquis par notre victoire en jnaaintenanl
la paix.
AU CONSMÎZ, SUPREME
Le sort de la Haute-Silésie
remis à la Société des Nations
Le principe de l'envoi des renforts est admis
Hier matin, à 10 h. 1/4, M. Briand, sor-
tant de l'Elysée, où il avait mis au cou-
rant de la situation ses collègues, lesquels
avaient unanimement approuvé la position
prise par lui dans la question haut-silé-
sienne, s'est rendu à l'hotel Crillon, où il
eut une brève conversation avec M. Lloyd
George. M. Loucheur assistait a l'entre-
tien. c'
Laccord ne pouvant se faire actuelle-
ment entre les points de vue français et
britannique sur la ligne de partage de
la Haute-Silésie et les deux gouverne-
ment¡J étant résolus à éviter une rupture,
il fut décidé, e ër la proposition de M.
Lloyd George, que le problème serait trans-
mis au conseil de la Société des Nations,
les puissances alliées et associées s'enga-
geant à aocepter l'avis qui serait émis par
cette sorte de tribunal arbitral.
M. Briand, qui avaio envisagé une so
lution analogue en présence de l'impoli
bilitë d'un accord direct franco-britanni-
que, donna son approbation entière à la
proposition de M. Lloyd George, et le
Conseil suprême fut convoqué au Quai
d'Orsay pour 11 heures.
LA StATOUK UU UVNO&SU
M. Briand, en ouvrant la séance, dé-
clare qu'il y a opposition fondamentale
entre le point de vue britannique et le
point de vue français sur le partage de
la Haute-Silésie, et il propose que le dif-
férend soit renvoyé à la ïL: té des Na-
tions.
M. Lloyd George répond ai mier mi-
nistre français en indiquant ?e rânge
à la proposition de M. Briand i ajou-e
que jeudi soir la délégation britannique
et la délégation italienne ont. reconnu que
c'était là 1a meilleure solution à adopter
pour trancher le différend. t
Le premier ministre britannique pour-
suit ainsi :
Il ne s'agit pas d'un différend entre la
Grande-Bretagne et la France. Les experts
italiens sont du même avis que les nôtres,
ainsi d'ailleurs que le délégué du Japon,
4u surplus, cela n'implique aucune cri-
tique de l'attitude du gouvernement fran-
çais ni des experts français, mais il con-
vient d'insister sur ce point qu'en com-
battant le point de vue français, ta (}r,a,u,-
de-Bretagne n'agit pas isolément. Le, dif-
ficultés provienneut, non pas du problème
en soi, nvais de l'état de nervosité de l'opi-
nion publique:
La majorité du Conseil suprême a adopté
un point de vue; la France seule en a un
différent, il convient donc d'avoir recours
à un autre tribunal pour arriver à une
solution.
Nous avons fait des concessions dans
l'espoir d'aboutir à un accord, poursuit
M. Lloyd George, mais la Société dei, Ra-
tions ne doit pas se considérer comme Liée
par les suggestions qui ont été mises en
avant jusqu'ici. Elle devra procéder à une
nouvelle étude ,d'ensemble de la question
sans se préoccuper des tractations précé-
dentes, et il est entendu que nous accep-
terons sans réserves la décision prise par
elle.
- .- "Y .,. l'
On priera la Societe des Nations a en-
tamer immédiatement l'étude du problème.
Elle sera libre d'adopter la procédure qui
lui conviendra, soit qu'elle procède à la
constitution d'un tribunal international,
soit qu'elle décide. de constituer une com-
mission (te juristes jouissant d'une auto-
rité internationale.
Il faut également que nou* tenions
compte de la situation locale en Haute-
Silésie. Si l'on reconnaît qu'il convient
de renforcer les forces alliées dam cette
région, la Gravide-Bretagne participera à
l'envoi des renforts dans la même propor-
tion que les autres puissances.
M. Briand, se levant de nouveau, dé-
clare, au nom de son gouvernement, que
la France acceptera également sans réser-
ves la décision de la bociété des Nations.
M. Bonomi, premier ministre italien,
déclare qu'il est déjà tombé d'accord avec
M. Lloyci George qu'en cas d'opposition
irréductible encre le point de vue anglo-
italien, d'une part, et le point de vue fran-
çais, d'autre part, la question devrait être
renvoyée à la Société des Nations.
Le premier ministre italien conclut en
déclarant que l'Italie est prête a envoyer
des renforts en Haute-Silésie, en attendant
la décision de la Société des Nations.
Le baron Hayashi, délégué du Japon,
estime qu'on doit admettre le principe que
les districts industriels centraux de la.
Haute-Silésie devraient être attribués à
l'Allemagne; il déclare cependant accepter
la proposition tendant à soumettre le li-
tige à la Société des Nations.
M. Harvey, le délégué américain, dé-
clare que les Etats-Unis ont estimé dès le
début que la question de la Haute-Silesie
était d'ordre purement européen. Aujour-
d'hui que cette question est renvoyée à la
Société des Nations, dont les Etats-Unis
ne font pas partie, le délégué américain
estime qu'il interprète la pensée de son
gouvernement en annonçant que tes Etats-
Unis ne participeront pas à la décision.
La résolution
Ces déclarations terminées, le Conseil
vote à l'unanimité la résolution suivante :
Le Conseil suprême, avant de statuer
sur la fixation de la frontière entre l'Al-
lemagne et la Pologne en Eaute-Silésie,
conformément à l'article 88 du traité de
Versailles, décide, par application de l'ar.
ticle 11 paragraphe 2 du pacte de la So-
ciété des Vaiiorià, de soumettre au Conseil
de la Société les difficultés que présente
la fixation de cette frontière et de vouloir
bien lui faire connaître son avis sur le
tracé de la ligne qu'il appartient aux prin-
cipales puissances alliées et associées d'é-
tablir,
En raison de'la situation en Haute-Si-
lesie, le Conseil de la Société df s Nations
sera prie, de vouloir bien considérer cette
affaire comme étqitt de grande urgence.
En outre. il fut décidé à l'unanimité 9u
les trois hauts-commissaires ajliés rega-
gneraient leur poste immédia.tement et
que, d'autre pa.rt, une démarche collective
serait faite simultanément à Berlin et à
Varsovie pour inviter les gouvernements
allemand et polonais à prendre toutes les
mesures qui dépendent d'eux en vue d'em-
pêcher que l'ordre ne soit troublé.
Les renforts
Enfin, en ce qui concerne la question
des renforts, une décision de principe a
été prise : dans le cas où les experts mili-
taires estimeraient que la situation exige
le renforcement du corps d'occupation, des
croupes supplémentaires seraient éxpé.
diées. L'Angleterre et l'Italie fourniraient
leur contingent comme la France.
L'accord étant fait sur la procédure à
suivre en ce qui ooncerne la Haute-Silésie,
M, Lloyd George quitta le quai d'Orsay et
,,-' rendit à la gare du Nord où il prit le
~- ain pour Londres à midi.
Les coupables
Le Conseil passa alors à l'examm de la
question des coupables; il décida d'inviter
les autorités judiciaires des différents pays
intéressés à demander aux magistra.ts qui
ont assisté aux débats de la cour de Leip-
zig de faire des propositions sur l'attitude
à adopter après avoir pris connaissance
des dossiers.
La prochaine Sé:éMt.
La prochaine séance du Conseil aura
lieu ce matin, à 11 heures; lord Curzon,
qui n'a pas quitté Paris, y prendra part.
Cette séance sera très vraisemblablement
la dernière ; elle épuisera lès dernièrea
questions inscrites à l'ordre du jour parmi
lesquelles figure celle des sanctions. De
plus, il y aura sans doute lieu de désigner
les membres du comité chargé de s'occuper
du ravitaillement de la Russie.
LE CONSEIL DES MINISTRES
D'HIER SOIR
Un conseil des ministres a été tenu hi,
soir, à 6 h. 30, à l'Elysée. C'étàit le
second de la journée. Il avait été rendu,
nécessaire pour la décision prise par le
Conseil suprême apr. 11 pmniere réunioa
des ministres.
M. Briand, en eaet, mit ses cullègues au
courant dss entretiens qu'il avait eus avu
M. Lloyd George et de la dernière discus-
sion sur la Haute-Silesie.
Il fit ressortir qu'en soumettant cette dé,
licate question &u conseil de la Société des
nations, la France avait manifesté son évi.
dente volonté de tout faire pour ne pas 8.1',
river à une sorte de rupture avtc l'Angle-
terre,
Le président du conseil laissa entendra
qu'il estimait que la composition même dt
conseil de la Société des nations pouvaii
nous laisser espérer que le point de vu<
français serait mieux défendu là qu'au
Conseil suprême.
Le conseil de ia Sociott des nations se
réunira vraisemblablement dans la pre-
mière quinzaine de septembre.
A l'unanimité, encore une fois, les mi-
nistres ont approuvé M. Briand.
DEPART DE M. LLOYD GEORGE
M. Lloyd George a quitté Paris à midi
par le train cta Calais, se rendant à Lon-
dres.
Avant de monter dans le wagon spécial
qui lui était réservé, M. Lloyd George
s est entretenu avec lord Hardiuge, am-
bassadeur d'Angleterre à Paris, et lord
Riddell.
Puis M. ~Liojd licence, saiue pu-r MM.
Leulliar, préfet de police; Guichard, di-
recteur de 1a police municipale, et de Fou-
quières, chef du protocole, représentant le
gouvernement français, a pris place dans
le train, accompagné de ses secrétaires :
sir Maurice Hankey, Edward Grigg, Dar
vies et le capitaine Burgis.
UN DEJEUNER AU QUAI D'ORSAY
M. Briand, président du conseil, a offert
hier matin un déjeuner au ministère des
affaires étrangères en 1 honneur des mem-
bres du Conseil suprême.
M. Jusserand, ambassadeur de France
aux Etats-Unis, et M. Charles Laurent,
ambassadeur de France à Berlin, y assis-
taient. ainsi que le haut personnel du mi-
nistère des affaires étrangères.
FRÈRES D'ARMES
La Légion américaine
est acclamée
Le débarquement à Cherbourg
Cherbourg, puis Paris, ont fait hier à la
Légion américaine un accueil enthousiaste.
A Cherbourg, où le Georges-Washington,
escorté de torpilleurs, entrait en rade à
7 heures., la réception, bien que courte, fut
un merveilleux prélude aux fêtes que réser-
ve aux anciens soldats américains le gou-
vernement français.
Dès 6 heures, l'Avenir, pavoisé aux cou-
leurs américaines et françaises, et qui porte
les célégués français et des groupes de com-
battants et de mutilés, démarre pour aller
au devant de la Légion. Une heure après,
entre les deux navires, l'abordage avait iieu,
et au milieu d'acclamations, le colonel Bu-
nau-Varilla, représentant les granè muti-
lés, M. Knecht, directeur du servi-ce français
d'informations aux Etats-Unis, le comman-
dant Villaret, représentant de l'ambassa-
deur des Etats-Unis, présentaient les sou-
haits ce bienvenue de la France aux tn is
commandeurs successifs de l'American Lé-
gion : Emery, Franklin d'Ollier et Lindsley
Sur les suôis de Cherbourg, les 19ai-
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