Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1921-01-21
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 21 janvier 1921 21 janvier 1921
Description : 1921/01/21 (N18304). 1921/01/21 (N18304).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7552815t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
1
t
i" PLUVIOSE, AN 129. — N° 18.304.. 4 Le numéro: QUINZE CENTIMES VENDREDI 21 JANVIER 1921. — lqe 18.304.
Fondateurs (1869) »
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Un an Six mois Trois mois
SEINE & S.-ET-OISE. 38 a 20 ») 10 »
FRANCE & COLONIES.. 41 » 22 » 11 »
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TRIBUNE LIBRE
LA TOISON D'OR
.—————————— ) - -.- - ( w
Tous ceux qui furent té-
moins de la chute du mi-
nistère Leygues et entendi-
rent le bref réquisitoire de
M. Bonnevay qui se refusait
à « accorder sa confiance
dans la nuit », furent per-
suades que, seules, les exigences de l'in-
térêt. national inspirèrent aux Aragonau-
tes leur vote ,de défiance. Comment les
soupçonner de calculs intéressés, sur-
tout lorsqu'on savait que M. Bonnevay
avait fait campagne au 16 novembre
pour l'incompatibilité des fonctions mi-
nistérielles et du mandat législatif ?
Seul, leur souci de la grandeur fran-
çaise les avait guidés. Amour sacré de
la patrie. Hélas ! si cela fut vrai pour
quelques-uns, les intrigues de la der-
nière crise, les délibérations passion-
nées dont résonnèront, pendant plu-
sieurs jours, les couloirs - du Palais-
Bourbon et les antichambres ministé-
rielles, montrent, que, pour de nom-
breux Aragonautcs, la mise en terre du
cabinet Leygues n'était que le prélude
d'une série d'opérations dont le but fi-
nal était la conquête de la Toison d'Or.
A peine le ministère était-il abattu
que l'expédition fut organisée. Com-
ment les maroquins auraient-ils échap-
pé aux vainqueurs ? On régla vive-
ment les détails de l'affaire, afin qu'il
n'y eût point de temps perdu. Comme
il s'agissait de naviguer, avec sûreté,
vers le palais élyséen, où veillait sur
la Toison d'Or un dragon sévère et mé-
fiant, le commandement fut confié à
celui qui s'était révélé le plus habile, à
l'honorable Bonnevay-Jason. Et tandis
qu'il voguait avec astuce sur la mer
orageuse, ses compagnons poussaient
des cris tumultueux afin de mettre en
fuite les pirates qui auraient tenté de
s'emparer du précieux trésor. C'est
ainsi que l'excommunication majeure
fut lancée contre les « radicaux de sec-
te » qui sont fort à craindre bien qu'on
ne cesse de dire qu'ils n'ont pas sur-
vécu au 16 novembre, puis contre les
républicains won papalins, et même
contre les « républicains socialistes »
devenus brusquement dangereux depuis
que l'un d'entre eux prétendait diriger
l'enseignement technique, les matches
kle football et les concours de boules.
Mais par un maléfice encore inexpli-
qué, ce trie fut point l'honorable M.
Bonnevay qui saisit la Toison d'Or ; il
n'en obtint que quelques crins pour lui
et trois de ses amis, soit que son ar-
deur eût brusquement défailli, soit
(J,Il 'il crût plus sage do procéder par
degrés et de se débarrasser tout d'à-
horjj des importuns qui prétendaient Lui
donner des ordres parce qu'ils l'avaient
pris pour chef. Ainsi, il y a plusieurs
.siecles, avant d'atteindre la terre de
Colchide, le subtil Jason s'était débar-
rassé « des héros violents et belli-
queux » et avait débarqué dans une
Ile déserle l'irascible Hercule.
A la nouvelle qu'un yiautonniîT de
Saint-Nazaire, dont nul me s'était méfié,
avait saisi le trésor convoite et que le
chef de l'expédition aragnuine, loin de
IIJe dépouiller, partageait avec lui, ce
fut un beau tumulte parmi les conju-
rés. D'aucuns parlaient de ressusciter
'M. Leygues, ♦ rVaulres criaient à la tra-
ihîson et prophétisaient, la ruine de la
Cité. On votait des félicitations à ceux
qui n'avaient rien, on parlait de mettre
en pièces ceux qui revenaient de l'ex-
pédHion avec un portefeuille.
Tout à coup, quelqu'un se mit à
: crier : « Il reste les porte - cartes,
, les sous - secrétariats. » Alors, sauf
quelques sages qui aimaient mieux l'u-
mer en paix ou qui dédaignaient se dé-
ranger pour une si pauvre chère, les
Aragonaules se précipitèrent vers les
issues, se répandirent dans les couloirs
ici, comme un flot tumultueux, vinrent
abattre tour à tour le quai d'Orsay
l'imprimerie du Journal officiel, le mi-
nistère des travaux publies et même les
simples immeubles où était, censé déli-
bérer avec ses amis le nouveau chef du
gouvernement. Et c'était à qui crierait
son iloili et, ses mérites, à qui présen-
terait sa carie, à qui s'offrirait pour
sauver la pairie en danger. Hélas ! ils
étaient quatre-vingt-onze ; il n'y avait
que neuf demi-maroquins. M. Briand
leur promit de faire mieux la fois pro-
chaine.
Au fond, on ne saurait trouver tort
aux Aragonaules. Leur force est indé-
If}jahle, et il est seulement regrettable
qu'ils ne sachent point s'en servir. Ils
f)nt triomphé au 16 novembre, triom-
phé à Versailles, créé un président de
la République, soutenu deux ministè-
res, écrasé le troisième. L'équité et le
bon sens voudraient qu'ils eussent le
pouvoir ; ils ont le droit de l'exiger.
Pourquoi se résignent-ils à Ule part
inférieure d'autorité et de puissance, à
accepter les ministères de tout repos,
l'hygiène, la justice, etc., au lieu d,
saisir ceux qui comptent : les affaires
étrangères, les finances, l'intérieur ?
Douteraient-ils d'eux-mêmes 1 Au-
raient-ils peur du pouvoir ? Il est vrai
que des intrigues obscures ont peut-
être, une fois encore, malgré leur ar-
deur, écarté d'eux la Toison d'Or. Sû-
rement, il y là-dessous la main des
« radicaux de secte ».
Edouard DALADIER,
député du Vaucluse.
EDITORIAL
--
, La déclaration
Celle déclaration minis-
iérieUe a été fraîchement
accueillie par les Chambres
qui voteront, d'ailleurs,
chaleureusement pour le
cabinet.
Elle donne l'impression d'un pot
pourri qui manque d'orchestration. Vi-
siblement, chaque ministre a été char-
gé d'y intercaler son petit couplet.
Et comme chaque ministre a coutume
de travailler objectivement dans un
compartiment étanche, sans regarder
sur le voisin, sahs vues sur l'horizon de
la France, il en résulte quelques dis-
sonances naturelles à des amateurs
qui ne se sont pas mis au même diapa-
son.
Un ministère qui nuit dans le grouil-
lement des égoismes a toujours un dé-
part difficile.
Allez donc 'décoller d'emblée d'un
sol marécageux où toute grenouillé se
croit un roi !
Amsi M. Forgeot s'est accroché au
fuselage. Ironie des destins ! S'il eûl
prononcé hier ce rnbne discours contre
le cabinet Leygues, il ferait sans doute
partie aujourd'hui du ministère Briand.
Mais laissons ces querelles. d'idées.
Le meilleur conseil qui puisse être
donne à nos débutants est de se garder
contre leur excès d'habileté.
Il est malaisé, j'en conviens, de faire
sortir une politique de clarté d'un
« bioc national » de confusion. Cepen-
dantil ne faut plus s'atlarder à jouer
les difficultés ni à ruser avec le fin du
Il est admirable, sans doute, d'avoir
accoupla le socialisme indépendant de
M. Gaston Vidal avec le conservatisme
dépendant de M. Lefebvre du Prey.
Il serait plus périlleux d'affirmer,
dans le même temps, une politique in-
térieure inspirée par l'idée démocrati-
que et une politique extérieure dictée
par l esprit de réaction.
Le gouvernement de M. Briand ne
vaudra que par ses actes; et ses actes
ne prévaudront que par leur rapidité.
Depuis trop longtemps nous trébu-
chons dans le chaos de la Victoire. Il
faut en sortir hardiment, en laissant à
la Véhité le soin d'éclairer la route.
M. Bonnevay refusait de s'engager
dans l'obscurité alors que M. Leygues
portait le flambeau.
Plus d'hésitations ! maintenant que
c'est lui qui tient la chandelle.
EDMOND DU MESNIL.
Des bandits attaquent un train
CECI SE PASSE EN ITALIE
Un attentat contre un train, qui rappelle
le ^To^ndage de jUlii::;, n eu lieu à la gaio
de Rijnano, près de Fuggia. Un train de
11 Wi/cJun 1(lises Vétalt arrête dans ::;. gare au
milieu de la .1lld ; une bande d'individ'us .-c-
l-'ol'('l'lJa devant le tr;iin et .somma le per-
sonnel de ne pas bouger.
En même temps, ils commencèrent à dé-
r¡argel' les wagons et à enlever 'es mar-
chandises. Tout à coup. le télégraphe an-
nonça l'arrivée d'un train rapide.
Les bandits se jetèrent sur les vovageurs
pour les dépouiller, mais 'ans ;I( rapide il v
avait quelques carabiniers rescQ¡rt qui ou-
vrirent le Jeu contre les assaillants.
Une bataille s'engagea qui dura une heu-
re. HcÜrcuscmcnt. un train de secours, ap-
pelé par télégraphe, arriva peu apçès et les
brigands prirent la fuite.
Dans toute cette affaire, on a déploré un
mort et une vingtaine de blessés. - (Est- i
Europe.) -
On dit.
En Passant
Simple vœu
La plus courageuse moitié du genre hu-
main — quoi qu'en pensent « messieurs les
hommes » — c'est certainement le sexe faible!
Entrez seulement dans le métro pour vous
en rendre compte : il y a là des hommes qui
dorment, qui rêvent, qui ne font rien, qui
lorgnent les femmes ou qui lisent tranquille-
ment le journal — ils fumeraient bien une
pipe ou une cigarette si c'était permis. mais
ce ne serait tout de même pas un ouvrage !.
Auprès d'eux il y a des femmes qui tra-
vaillent : elles tricotent, elles brodent, elles
cousent, elles font de la dentelle — du point
de Venise même i. j'en ai vu — malgré le
roulis et les soubresauts de la machine !.
Certaines allaitent leurs enfants, d'autres les
portent sur les bras. presque toutes, en
somme, sont occupées. -
Et si les femmes trouvent moyen de tra-
vailler dans le métro, pour ne pas perdre une
eule minute, combien plus encore occupent-
elles les heures vraiment consacrées au tra-
vail !.
Vous allez me dire qu'il y a des femmes
qui ne font rien. Sans doute, mais c'est l'in-
fime minorité !
Là où un homme songe à se reposer. la.
femme trouvera encore quelque besogne à
faire: un enfant à endormir, un compte à
régler, un point à coudre, une dentelle a re-
passer, une fleur à arroser, un nœud à chif-
fonner. Quand elle n'aurait qu'une mèche
de cheveux à friser ou'ses ongles à polir, si
frêlp soit-elle, la femme est toujours .active !
toujours elle songe a sa tache quotidienne
qui n'est, hélas ! jamais achevée. tâche
d'utilité première ou tâche frivole de beauté
et d'élégance, mais tâche quand même, tou-
jours poursuivie !
C'est pourquoi il est évident que ce serait
faire un grand bien que d'appeler les fem-
mes aux affaires publiques : travailleuses,
consciencieuses, diligentes et tenaces, elles
donneraient une activité nouvelle et salutaire
aux vieux rouages qui tournent avec tant de
lenteur — et quelquefois à reculons ! — elles
défendraient ferme les intérêts et les droits
de leurs sœurs, et feraient peut-être régner
la justice autant qu'il peut .y avoir une jus-
tice parmi nous.
Souhaitons que le nouveau Sénat - amé-
lioré, selon le dire des journaux de toute
opinion — se montre plus galant et mieux
inspiré qu'il ne le fut l'an passé, et que,
pour commencer, il nous donne enfin notre
« carte d'électrice » !.
Gab.
QD
Autrefois
Le calme de Vespasien
Vespasien, empereur romain, ne fut pas
toujours très clément, néanmoins sa man-
suétude alla parfois fort loin.
Un certain Démétrius affectait de le cen-
surer publiquement et poussait l'insolence
jusqu'à se présenter devant lui sans le sar
tuer.
Au lieu de sévir, Vespasien se contenta
de dire à l'impertinent :
« Tu fais ce que lu peux pour que je Vote
la vie ; mais sache que quand j'entends un
chien aboyer après mai, je ne le tue pas
pour cela ».
Aujourd'hui
L'amicale des G. C.
On annonce la prochaine création d'un
nouveau groupe de mutilés, composé à peu
près exclusivement de ceux qu'au Val-de-
Grâce, pendant la guerre, on appelait :
le a6 Blessés, c'est-à-dire les mutilés de la
face.
Le docteur Moreslin, le « sculpteur de fi-
gures », lit des merveilles de rhinoplastie
sur ces [nores, qui subissaient opération
sur opération avec une g ailé jamais dé-
mentie.
Au 5e Blessés, on avait même fondé un
organe humoristique spécial. La Greffe gé-
nérale, qui obtint un succès considérable
dans les hôpitwu.r, et dans ie public. Les
quinze numéros de. ce. journal forment une
collection déjà à peu près introuvable uu-
jourd'hui.
Quant au, nouveau groupe, qui se fonde
sous la présidence du colonel Picot, vicc-
president de la commission, de l'armée, il
h choisi ce litre pittoresque : l'Amicale des
Gueules cassées.
L'araignée
M. Leredu, ministre rcuouvelc, recevait
hier, dans les couloirs, les félicitations de
ses collègues :
— Bravo, cher ami, dit l'un d'eux. Vous
pourrez adopter bientôt la fameuse devise
de Fouquel : Quo non ascendam ?
— Bah! répondit le ministre en souriant,
ici. je ne monterai jamais plus haut que le
Ida/und. 1
— Plaignons l'araignée, fil 11/1, troisième
Mais M. Leredu cessa de sourire• Il n'ai-
député.
me pas les mauvais plaisants.
L'hygiène
M. Lefebvre du Prey, présentement mi-
nislre de l'agriculture, n'était pas d'abord
très fixé sur la spécialité qu'il accepterait
dans le ministère.
Ses amis sollicitaient, pour lui le minis-
tère de Vhggiène.
— A l'hygiène! s'écria M. Briand. Vous
n'y pensvz pas ! Un homme (lui a neuf CII-
fants !
Les chaussettes inutiles
■ Le Journul de Roubaix du 7 janvier pu-
blie ce fait divers dont l'intérêt n'échappera
à personne :
— Jeudi-, vers 8 h. ie cadavre d'un hom-
me a clé relire lia canal, quai de l'aman.
On n'a pas pu ctobiir encore /ton nie nid i\
aucun papier n'ayant été trouvé sur lui.
Il était nu-pieds el portail, un veston et un
pantalon en coton noir, unflilcl bleu mari-
1/c,1m maillot de laine noire, une chemise
de couteur et des chaussettes grises.
Nul doute que ee signe particulier : ne
pieds en chaussettes grises permette une
identification rainde du noyé roubaisien.
Le Tapirt.
Contre la candidalure officielle
Le Sénat, saisi de protestations docu-
mentées contre l'élection sénatoriale des
Basses-Alpes, a chargé une sOlls-cornmls-
sion de procéder à une enquête.
C'est bien.
Mais ce qui sera mieux, c'est que l'en-
quête aboutisse, par une sanction, à Ja
condamnation de mœurs électorales indi-
gnes d'une démocratie.
On sait que, dans les Basses-Alpes, un
vétéran républicain, un probe et coura-
geux démocrate, Henry-Michel, a été dé-
pouillé de son siège par les tralics de Ja
candidature officielle.
M. Honnorat, ministre de l'instruction
publique (qui lui devait son élection de
député !) s'est présenté contre lui et ne f/lt
emporté que par deux voix de majorité.
Or, dans le cours même de la période
électorale, le ministre de l'instruction pu-
blique aurait prodigué des subventions à
des municipalités et décoré de la Légion
d'honneur trois délégués sénatoriaux.
Au demeurant, M. Honnorat est eoutu-
mier d'élections funambulesques.
Lorsqu'il se présenta pour la première
fois à la députation dans ces mêmes Bas-
ses-Alpes, ce fut son adversaire, M. Guyot
de Villeneuve, qui fut. tout d'abord élu, à
une voix de majorité !
Par.la suite, l'addition fut recommencée.
M. Cuyot de Villeneuve connut l'infortune
de la soustraction et M. Honnorat le
bonheur de la nmJiipljcation. Il fut pro-
clamé éilu à deux voix de majorité.
Au Sénat de mettre un terme à (Je pa-
reilles pratiques électorales et de morali-
ser le scrutin par une juste condamnation
de la candidature officielle !
- ..,. —-
Expulsons les brebis galeuses
DE L'ETRANGER
Le rapport que vient de faire au conseil
municipal M. Emile Massard, sur le fonc-
tionnement de la préfecture de police, au
cours de l'année 1920, est riche en observa-
tions, souvent attristantes, sur notre pau-
vre humanité.
C'est ainsi que nous apprenons que la
première division de la préfecture a procédé
à plus de 25.000 arrestations, dont 3.711
s'exerçant sur des étrangers et 322 sur des
étrangères.
Et cela rouvre la question, déjà si sou-
vent examinée, de la pègre internationale
qui infeste notre pays.
L'étranger, auquel de fâcheuses aventu-
res ont rendu difficile le séjour en son pays,
a trop tendance à venir planter chez nous
sa tente, y apportant toute la gangrène
physique et morale qui en fait, par le
monde, un perpétuel indésirable. C'est
contro cette opinion qu'il faudrait lutter
par des faits, en reconduisant sans plus
de forme à la frontière les métèques er-
rants qui ne cherchent qu'à reprendre
chez nous le cours d'exploits qui leur fer-
mèrent déjà d'autres pays.
La France est hospitalière : elle aime
les étrangers et les accueille largement, à
condition toutefois qu'ils ne viennent pas
augmenter le nombre des vagabonds dou-
teux et néfastes, dont nous avons nous-
mêmes déjà suffisamment.
Il faudrait souhaiter que nos services, de
police, qui veillent avec sollicitude à la
bonne renommée de notre pays, pratiquent
largement les expulsions' contre toutes les
brebis galeuses qui nous infestent.
1
Les trois communistes
français
ont été assassinés
LES AUTEURS DE CE CRIME
SONT DES BOLCHEVIKS.
De l'Agence Russunion :
La disparition des trois socialistes fran-
çais est bien due à un crime, consomme
pua- les agents de la commission extraor-
dinaire panrusse, vraisemblablement en
vertu d'ordres donnés par Djerjinsky, le
président de cette commission.
Les détails manquent encore sur le brus-
que changement d'attitude du gouvernement
soviétique à l'égard des trois socialistes
frunçais. Quoi qu'il en soit, déjà en septem-
bre 1020, LcfclHTc et ses compagnons
avaient été soumis à une surveillance se-
crète très serrée et 'i chitciiérine leur avait,
à trois reprises, refusé les Jaisse-r-passcr
qu'ils sollicitaient pour quitter la Russie
soviétique par voie de terre.
Il faut supposer que Lelebvre eut vent
que quelque chose se tramait contre lui et
ses compagnons, car il s'adressa à Sadoul,
puis de nouveau a Tchitchérine, en insis-
tauf pour Xiblenir l'autorisation do parut.
Ces nouvelles démarches n'eurent aucun
succès. I
C'est alors que Lefebvre, Vengeât et Le-
petit, d'accord avec un haut fonctionnaire
soviétique, imaginèrent un voyage dans-la
région du Volga et, déjouant en cours de
route la surveilance des agents de la com-
mission extraordinaire, prirent la fuite dans
la direction de Mourmansk.
Mais la d Tchéka » est très bien informée.
L'arrivée des socialistes français à Mour-
mansk l'ut iunnediafetnent signalée aux au-
torités soviétiques de Moscou. Avisée du
•fait, la commission extraordinaire panrussc
envoya d'urgence à la poursuite des fugitifs
trois de ses agents : Barachnikoff, Parciiine
et Oumansky.
Il s'en fallut de vingt-quatre heures, que
Lefebvre, .Vcrgeat et Lepelit ne fussent ar-
rêtés à Mourmansk. Mais ils prirent la mer
avant l'arrivée des agents de Moscou. On
organisa la poursuite et un garde-côte, bol-
cheviste rejoignit, en pleine mer, la frêle
embarcation sur laquelle se trouvaient les
socialistes français. On sait le reste : Le-
febvre, Vergeat et Lepetit furent jetés par-
dessus bord, non sans, cependant, que I a-
gent, Barachnikoff se fut emparé des pa-
piers qu'ils avaient sur eux et. qui se trou-
vent. actuellement déposés à la commission
extraordinaire de Moscou, sous le no 8.974.
Le dépôt est daté du 18 décembre 1920.
L'ACTUALITÉ
4»
Le ministère Briand
expose son programme
- ) ---+0 -E-- 1
POLITIQUE EXTÉRIEURE : Exiger de l'Allemagne te
désarmement et l'exécution du traité de paix, conso-
lider les alliances et les ententes, refuser toutes rela-
tions avec les Soviets. 1
POLITIQUE INTÉRIEURE : Faire une politique d'éco.
nomies, s'occuper des régions dévastées et des muti-
tilés, poursuivre les réformes sociales dans la légalité,
décentraliser l'Administration.
LE CABINET FAIT APPEL AU CONCOURS DE TOUS LES RÉPUBLICAINS
Voici le texte de la déclaration ministé-
rielle qui a été lue à la Chambre par M.
Aristide Briand, président du conseil, et
au Sénat par M. Marraud, remplaçant M.
Bonncvay, garde des sceaux, vice-président
du conseil, empêché :
Messieurs,
Appelé par M. le président de la Répu-
blique à Ja responsabilité du pouvoir, le
gouvernement qui se présente devant vous
a pleinemcn.jcunscience de la grandeur de
sa tâche. Il en connaît toutes les difficultés.
Il se déclare prêt à les affronter mais il
sait qu'elles seraient insurmontables s'il
n'obtenait l'entière confiance et l'étroite col-
laboration des Chamibres.
Nous avons .un traité de paix avec l'Al-
lemagne : nous n'avons pas encore la paix,
la paix réelle, la seule qui puisse être solide
et durable : la paix de justice et de mora-
lité qui consacrera les droits essentiels et
assurera la sécurité de la France.
Il faut désarmer l'Allemagne
Nous n'obtiendrons cette sécurité que si
l'Allemagne est désarmée. C'est pour notre
pays une question vitale qui trace au gou-
vernement. le premier et le plus sacre de
¡CS devoirs. Nous n'y faillirons pas.
Lit reconstitution de notre sol ravagé de
nos industries détruites, l'équilibre de nos
tinances ne sont possibles rpie si l'Allema-
gne exécute les réparations que le traité
de Versailles lui impose. A cet effet, nos
alliés nous donneront leur appui. Nous le
leur diemandons donc au nom du droit et de
la justice pour lesquels nous avons com-
battu, par lesquels nous avons vaincu.
Et faire exécuter le traité
Les peuples aspirent a la reprise des
échanges ; mais le retour à des relations
normales n'est possible, le malaise qui pèse
sur le monde ne peut être dissipé que si
l'effroyable iniquité d'hier est réparée. La
sanction de la grande guerre, la consécra-
tion de la victoire, c'est l'exécution du traité.
L'Allemagne est vaincue, mais aucune de
ses mines, de ses usines n'a été détruite.
Ses forces de production restent entières et
même les conditions du change que lui a
infligées la défaite lui ouvrent les plus lar-
ges espoirs d'expansion économique. Il est
possjble de prévoir son prompt relèvement.
Loin de nous la pensée d'y faire obstacle.
Mars la prospérité du peuple agresseur ve-
nant, après sa défaite, contraster avec la
ruine du peuple victorieux, ce serait, à la
morale la plus élémentaire, un défi que la
France ne peut accepter.
.Au besoin par la force
No'us avons la force ; nous pourrions,
nous saurions nous en servir, s'il le fallait,
pour imposer le respect de tous les engage-
ments souscrits. Mais la France républicai-
ne est essentiellement p;:J..CiÜqu,(;b c'est dans
la paix qu'elle veut amener l'Allemagne à
l'exécution des obligations contractées.
La France réclame son du tout son dù.
Elle est raisonnable Elle ne demande pas
l'impossible.
Mais ce qui importe dès maintenant, c'est
que lo-u'U s les facultés de paiement du débi-
teur, en i(llr'gent, en nature, en participations
de toutes sortes, — s'exercent au profit du
créancier. Ce n'est que justice.
Telles sont nos vues, tel est notre but. Jl
ne peut être atteint que par un accord étroit
entre nos alliés et nous.
Cet accord est la condition primordiale du
règlement de toutes les questions qui tien-
nent en suspens le rétablissement effectif de
la paix. Nous ferons tout pour le main-'
tenir et le développer.
La France et ses alliés
Nous avons Ja ferme confiance que notre
grande amie et alliée, l'Angleterre, nous y
aidera de toutes ses forces. Rien ne peut
plus, en effet, entamer les relations des deux
grands pays qui ont appris à se connaître
mieux et à s'estiimer davantage dans les ru-
des combats où ils ont versé leur sang en
commun. C'est leur intime union qui as-
sure la paix du monde. Qu'il s'agisse de
l'exécution du traité de Versailles ou règle-
ment du problème oriental, du maintien de
la paix étabdie par les traités dans l'Europe
c en tira le ou des rapports à entretenir avec
les peuples de l'est de l'Europe, l'alliance
ta:o:ilc entre la (Jnando-Bretagne et la Fran-
ce est la base de notre politique extérieure.
Avec l'Italie, nos efforts tendront à res-
serrer les liens que la guerre a déjà si heu-
reusement consolidés entre deux grands
pays latins. Nous avons confiance de rcn-
contrer à Rome, pour les solutions qui nous
- les dispositions amicales que
les Italiens ont trouvées à Paris pour le
règlement de la question a(LrialtÓqllJc.
L'amitié séculaire de la France et des
Etats-Unis, les inoubliables souvenirs de
notre histoire commune qui ont mêlé dans
le passé et qui mêleiraient, s'il était néces-
saire, dans l'avenir, le sang de nos soldats
sur les champs de bataille de ln. liberté, ga-
rantissent notre union dans la paix com-
me dans la guerre. Nous sommes sûrs que
nos amis Américains nous donneront, par
la réparation d@ goe dommages, le axtçafi
appui inappréciable qui a décidé de la vie-
toire dans la grande guerre où nous avons
défendu ensemble la cause de la civilisation.
Nous respectons les scrupules qui les font
hésiter sur la forme initiale à donner à la
SociéLé des Nations dont ils n'ont, d'ailleurs,
jamais mis en doute les principes généreux
et bienfaisants.
Les intérêts indiscutables qui nous ont
amenés à nous lier à la noble Belgique par
un accord militaire pour notre défense cum.
mune ont préparé la conclusion d'une eu-
liente économique également désirée des
deux côts de la frontière.
Malgré la dissemblance de nos régimes
douaniers, l'union entre Français et Belges,
cimenilée par leurs sacrifices, est aussi dési-
rable pour le développement économique des
deux pays que pour leur sécurité commune.
Nos amis de l'Europe Centrale
Nos rapports avec nos amis et alliés do
l'Europe Centrale continueront à s'inspirer
des sentiments confiants et chaleureux nés
pendant la guerre, au cours de laquelle fions
avons combattu pour le triomphe des as-
pirations nationales de la Pologne, de la
Roumanie, du peuple tchéco-slovaque et de
l'Etat des Serbes, Croates et Slovènes. Noua
ne négligerons rien non plus pour provoquer
dans la stricte exécution des traités, entre
tous les Etats sortis du démembremer-1 de
l'Empire austro-hongrois les accords qui per-
mettront à chacun de ces pays de se re-
constituer économiquement et de vivre.
La situation en Orient appelle tout parti-
culièrement notre attention. Il y a argon* o
à ce que la paix soit réalisée avec ;,:
quieet que, tenant compte dies circonstances
nouvelles, les conversations se poursuivent
amicalement avec nos alliés pour résoudre
la question oTientale.
Pas d'accord avec les Soviets
Nous n'avons rien oublié des sacrifices
que la grande nation russe a faits au début
de la guerre pour la cause de la liberté du
monde. Le peuple russe a répandu si gé-
néreusement son sang que nous lui en gai-
nerons une reconnaissance inaltérable, IImÜ
dans l'état actuel, pas plus que les gou-
vernements qui nous ont précédés nous ne
reconnaîtrons le pouvoir ues Soviets. Nàïja
ne saurions reprendre des relations ave c la
Russie tant qu'il n'y aura pas à Moscou i ai
regnne qui représente véritablement le peu-
ple lusse et soit prêt à tenir les Z"
rneinfs pris par les gouvernements lune-
neurs de ce pays.
'Le bolchevisme est une affaire russe taiit
qu'il reste comme dans ses frontières rj,
nous n'avons pas à intervenir dans les Af-
faires intérieures de la Russie. Mais il Iltil;
est impossible d'admettre que les ai r i
des Soviets sortent de leur territoire wr
attaquer nos alliés. ',.
Enfin, le souci de la grandeur e.t ce la
prospérité de la France fait au gouverne
ment de la République un devoir impériaux
de pourvoir à la représentation de notre
pays partout on'se discutent les grands in-
térêts internationaux.
Tel est le programme de politique cyté-
iïïon que BOUtS proposons à voire appro-
Le service militaire
Dans une Europe qui n'est pas MI cor a
pacifiee, pour nous maintenir en état de
defendtre et de faire triompher nos droits v
nous avons besoin d'être et de rester fer^
Nous nous garderons d'affaiblir notre puis-
sance militaire ; c'est un lourd fardeau peur
le pays. Il doit être réduit au strict. c'rs-
saire. Nous nous appliquerons à faire v u r
Je plus tôt possible les projets de loi sou-
mis à la Chambre, qui tendent à la diminu-
tion de la durée du service nulitair et a
une organisation de notre armée rricuK
adaptée aux conditions modernes de'. la ";1'3
nataonale.
Le budget et les économies
Pour être forte, il ne suffit pas à la Fran-
ce d avoir une armée solide : il lui faut
aussi des finances saints, Celles-ci exigent
des citoyens un effort considérable mais-
<;,ui, Ou.s peirue d'entrave!' l'essor du paze,
S Q t être limite à l'indispensable : il est
en conséquence, urgent de comprimer 1eR
dépenses puJJliqulCs. C'est à quoi le gouver-
nement est fermement décidé. Il se propose.
notamment, de procéder à la liquidation la-
pide des organismes ci-ces pour la guerre.
Il convient, d'autre part, de rétablir l'é-
quilibre entre les dépenses ainsi comprimées
et 1es recettes de l'Elat. Le plein rendement
de celles-ci sera assu.ré _par la réorganisa-
tion des services financiers et en particu-
tion des Services chargés dt,,la peroop-
tion.
Nous sommes résolus à hâter le vote du
budget et à réintroduire dans nos finan-
ces, profondément troublées par la guerre
1 ordre, la régularité et la clurt.
Mais, si par ces mesures au sujet des-
quelles nous nous concerterons avec vos
commissions des finances, nous pouvons es-
perer parer à la crise financière, il est es-
sentiel, pour en hâter la fin, que le Trésor
n'ait plus à faire face à la charge des répa-
rations dues par l'Allemagne.
Forte par son aimée gt par ses finances.
t
i" PLUVIOSE, AN 129. — N° 18.304.. 4 Le numéro: QUINZE CENTIMES VENDREDI 21 JANVIER 1921. — lqe 18.304.
Fondateurs (1869) »
VICTOR HUGO
AUGUSTE VACQUERIE
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TRIBUNE LIBRE
LA TOISON D'OR
.—————————— ) - -.- - ( w
Tous ceux qui furent té-
moins de la chute du mi-
nistère Leygues et entendi-
rent le bref réquisitoire de
M. Bonnevay qui se refusait
à « accorder sa confiance
dans la nuit », furent per-
suades que, seules, les exigences de l'in-
térêt. national inspirèrent aux Aragonau-
tes leur vote ,de défiance. Comment les
soupçonner de calculs intéressés, sur-
tout lorsqu'on savait que M. Bonnevay
avait fait campagne au 16 novembre
pour l'incompatibilité des fonctions mi-
nistérielles et du mandat législatif ?
Seul, leur souci de la grandeur fran-
çaise les avait guidés. Amour sacré de
la patrie. Hélas ! si cela fut vrai pour
quelques-uns, les intrigues de la der-
nière crise, les délibérations passion-
nées dont résonnèront, pendant plu-
sieurs jours, les couloirs - du Palais-
Bourbon et les antichambres ministé-
rielles, montrent, que, pour de nom-
breux Aragonautcs, la mise en terre du
cabinet Leygues n'était que le prélude
d'une série d'opérations dont le but fi-
nal était la conquête de la Toison d'Or.
A peine le ministère était-il abattu
que l'expédition fut organisée. Com-
ment les maroquins auraient-ils échap-
pé aux vainqueurs ? On régla vive-
ment les détails de l'affaire, afin qu'il
n'y eût point de temps perdu. Comme
il s'agissait de naviguer, avec sûreté,
vers le palais élyséen, où veillait sur
la Toison d'Or un dragon sévère et mé-
fiant, le commandement fut confié à
celui qui s'était révélé le plus habile, à
l'honorable Bonnevay-Jason. Et tandis
qu'il voguait avec astuce sur la mer
orageuse, ses compagnons poussaient
des cris tumultueux afin de mettre en
fuite les pirates qui auraient tenté de
s'emparer du précieux trésor. C'est
ainsi que l'excommunication majeure
fut lancée contre les « radicaux de sec-
te » qui sont fort à craindre bien qu'on
ne cesse de dire qu'ils n'ont pas sur-
vécu au 16 novembre, puis contre les
républicains won papalins, et même
contre les « républicains socialistes »
devenus brusquement dangereux depuis
que l'un d'entre eux prétendait diriger
l'enseignement technique, les matches
kle football et les concours de boules.
Mais par un maléfice encore inexpli-
qué, ce trie fut point l'honorable M.
Bonnevay qui saisit la Toison d'Or ; il
n'en obtint que quelques crins pour lui
et trois de ses amis, soit que son ar-
deur eût brusquement défailli, soit
(J,Il 'il crût plus sage do procéder par
degrés et de se débarrasser tout d'à-
horjj des importuns qui prétendaient Lui
donner des ordres parce qu'ils l'avaient
pris pour chef. Ainsi, il y a plusieurs
.siecles, avant d'atteindre la terre de
Colchide, le subtil Jason s'était débar-
rassé « des héros violents et belli-
queux » et avait débarqué dans une
Ile déserle l'irascible Hercule.
A la nouvelle qu'un yiautonniîT de
Saint-Nazaire, dont nul me s'était méfié,
avait saisi le trésor convoite et que le
chef de l'expédition aragnuine, loin de
IIJe dépouiller, partageait avec lui, ce
fut un beau tumulte parmi les conju-
rés. D'aucuns parlaient de ressusciter
'M. Leygues, ♦ rVaulres criaient à la tra-
ihîson et prophétisaient, la ruine de la
Cité. On votait des félicitations à ceux
qui n'avaient rien, on parlait de mettre
en pièces ceux qui revenaient de l'ex-
pédHion avec un portefeuille.
Tout à coup, quelqu'un se mit à
: crier : « Il reste les porte - cartes,
, les sous - secrétariats. » Alors, sauf
quelques sages qui aimaient mieux l'u-
mer en paix ou qui dédaignaient se dé-
ranger pour une si pauvre chère, les
Aragonaules se précipitèrent vers les
issues, se répandirent dans les couloirs
ici, comme un flot tumultueux, vinrent
abattre tour à tour le quai d'Orsay
l'imprimerie du Journal officiel, le mi-
nistère des travaux publies et même les
simples immeubles où était, censé déli-
bérer avec ses amis le nouveau chef du
gouvernement. Et c'était à qui crierait
son iloili et, ses mérites, à qui présen-
terait sa carie, à qui s'offrirait pour
sauver la pairie en danger. Hélas ! ils
étaient quatre-vingt-onze ; il n'y avait
que neuf demi-maroquins. M. Briand
leur promit de faire mieux la fois pro-
chaine.
Au fond, on ne saurait trouver tort
aux Aragonaules. Leur force est indé-
If}jahle, et il est seulement regrettable
qu'ils ne sachent point s'en servir. Ils
f)nt triomphé au 16 novembre, triom-
phé à Versailles, créé un président de
la République, soutenu deux ministè-
res, écrasé le troisième. L'équité et le
bon sens voudraient qu'ils eussent le
pouvoir ; ils ont le droit de l'exiger.
Pourquoi se résignent-ils à Ule part
inférieure d'autorité et de puissance, à
accepter les ministères de tout repos,
l'hygiène, la justice, etc., au lieu d,
saisir ceux qui comptent : les affaires
étrangères, les finances, l'intérieur ?
Douteraient-ils d'eux-mêmes 1 Au-
raient-ils peur du pouvoir ? Il est vrai
que des intrigues obscures ont peut-
être, une fois encore, malgré leur ar-
deur, écarté d'eux la Toison d'Or. Sû-
rement, il y là-dessous la main des
« radicaux de secte ».
Edouard DALADIER,
député du Vaucluse.
EDITORIAL
--
, La déclaration
Celle déclaration minis-
iérieUe a été fraîchement
accueillie par les Chambres
qui voteront, d'ailleurs,
chaleureusement pour le
cabinet.
Elle donne l'impression d'un pot
pourri qui manque d'orchestration. Vi-
siblement, chaque ministre a été char-
gé d'y intercaler son petit couplet.
Et comme chaque ministre a coutume
de travailler objectivement dans un
compartiment étanche, sans regarder
sur le voisin, sahs vues sur l'horizon de
la France, il en résulte quelques dis-
sonances naturelles à des amateurs
qui ne se sont pas mis au même diapa-
son.
Un ministère qui nuit dans le grouil-
lement des égoismes a toujours un dé-
part difficile.
Allez donc 'décoller d'emblée d'un
sol marécageux où toute grenouillé se
croit un roi !
Amsi M. Forgeot s'est accroché au
fuselage. Ironie des destins ! S'il eûl
prononcé hier ce rnbne discours contre
le cabinet Leygues, il ferait sans doute
partie aujourd'hui du ministère Briand.
Mais laissons ces querelles. d'idées.
Le meilleur conseil qui puisse être
donne à nos débutants est de se garder
contre leur excès d'habileté.
Il est malaisé, j'en conviens, de faire
sortir une politique de clarté d'un
« bioc national » de confusion. Cepen-
dantil ne faut plus s'atlarder à jouer
les difficultés ni à ruser avec le fin du
Il est admirable, sans doute, d'avoir
accoupla le socialisme indépendant de
M. Gaston Vidal avec le conservatisme
dépendant de M. Lefebvre du Prey.
Il serait plus périlleux d'affirmer,
dans le même temps, une politique in-
térieure inspirée par l'idée démocrati-
que et une politique extérieure dictée
par l esprit de réaction.
Le gouvernement de M. Briand ne
vaudra que par ses actes; et ses actes
ne prévaudront que par leur rapidité.
Depuis trop longtemps nous trébu-
chons dans le chaos de la Victoire. Il
faut en sortir hardiment, en laissant à
la Véhité le soin d'éclairer la route.
M. Bonnevay refusait de s'engager
dans l'obscurité alors que M. Leygues
portait le flambeau.
Plus d'hésitations ! maintenant que
c'est lui qui tient la chandelle.
EDMOND DU MESNIL.
Des bandits attaquent un train
CECI SE PASSE EN ITALIE
Un attentat contre un train, qui rappelle
le ^To^ndage de jUlii::;, n eu lieu à la gaio
de Rijnano, près de Fuggia. Un train de
11 Wi/cJun 1(lises Vétalt arrête dans ::;. gare au
milieu de la .1lld ; une bande d'individ'us .-c-
l-'ol'('l'lJa devant le tr;iin et .somma le per-
sonnel de ne pas bouger.
En même temps, ils commencèrent à dé-
r¡argel' les wagons et à enlever 'es mar-
chandises. Tout à coup. le télégraphe an-
nonça l'arrivée d'un train rapide.
Les bandits se jetèrent sur les vovageurs
pour les dépouiller, mais 'ans ;I( rapide il v
avait quelques carabiniers rescQ¡rt qui ou-
vrirent le Jeu contre les assaillants.
Une bataille s'engagea qui dura une heu-
re. HcÜrcuscmcnt. un train de secours, ap-
pelé par télégraphe, arriva peu apçès et les
brigands prirent la fuite.
Dans toute cette affaire, on a déploré un
mort et une vingtaine de blessés. - (Est- i
Europe.) -
On dit.
En Passant
Simple vœu
La plus courageuse moitié du genre hu-
main — quoi qu'en pensent « messieurs les
hommes » — c'est certainement le sexe faible!
Entrez seulement dans le métro pour vous
en rendre compte : il y a là des hommes qui
dorment, qui rêvent, qui ne font rien, qui
lorgnent les femmes ou qui lisent tranquille-
ment le journal — ils fumeraient bien une
pipe ou une cigarette si c'était permis. mais
ce ne serait tout de même pas un ouvrage !.
Auprès d'eux il y a des femmes qui tra-
vaillent : elles tricotent, elles brodent, elles
cousent, elles font de la dentelle — du point
de Venise même i. j'en ai vu — malgré le
roulis et les soubresauts de la machine !.
Certaines allaitent leurs enfants, d'autres les
portent sur les bras. presque toutes, en
somme, sont occupées. -
Et si les femmes trouvent moyen de tra-
vailler dans le métro, pour ne pas perdre une
eule minute, combien plus encore occupent-
elles les heures vraiment consacrées au tra-
vail !.
Vous allez me dire qu'il y a des femmes
qui ne font rien. Sans doute, mais c'est l'in-
fime minorité !
Là où un homme songe à se reposer. la.
femme trouvera encore quelque besogne à
faire: un enfant à endormir, un compte à
régler, un point à coudre, une dentelle a re-
passer, une fleur à arroser, un nœud à chif-
fonner. Quand elle n'aurait qu'une mèche
de cheveux à friser ou'ses ongles à polir, si
frêlp soit-elle, la femme est toujours .active !
toujours elle songe a sa tache quotidienne
qui n'est, hélas ! jamais achevée. tâche
d'utilité première ou tâche frivole de beauté
et d'élégance, mais tâche quand même, tou-
jours poursuivie !
C'est pourquoi il est évident que ce serait
faire un grand bien que d'appeler les fem-
mes aux affaires publiques : travailleuses,
consciencieuses, diligentes et tenaces, elles
donneraient une activité nouvelle et salutaire
aux vieux rouages qui tournent avec tant de
lenteur — et quelquefois à reculons ! — elles
défendraient ferme les intérêts et les droits
de leurs sœurs, et feraient peut-être régner
la justice autant qu'il peut .y avoir une jus-
tice parmi nous.
Souhaitons que le nouveau Sénat - amé-
lioré, selon le dire des journaux de toute
opinion — se montre plus galant et mieux
inspiré qu'il ne le fut l'an passé, et que,
pour commencer, il nous donne enfin notre
« carte d'électrice » !.
Gab.
QD
Autrefois
Le calme de Vespasien
Vespasien, empereur romain, ne fut pas
toujours très clément, néanmoins sa man-
suétude alla parfois fort loin.
Un certain Démétrius affectait de le cen-
surer publiquement et poussait l'insolence
jusqu'à se présenter devant lui sans le sar
tuer.
Au lieu de sévir, Vespasien se contenta
de dire à l'impertinent :
« Tu fais ce que lu peux pour que je Vote
la vie ; mais sache que quand j'entends un
chien aboyer après mai, je ne le tue pas
pour cela ».
Aujourd'hui
L'amicale des G. C.
On annonce la prochaine création d'un
nouveau groupe de mutilés, composé à peu
près exclusivement de ceux qu'au Val-de-
Grâce, pendant la guerre, on appelait :
le a6 Blessés, c'est-à-dire les mutilés de la
face.
Le docteur Moreslin, le « sculpteur de fi-
gures », lit des merveilles de rhinoplastie
sur ces [nores, qui subissaient opération
sur opération avec une g ailé jamais dé-
mentie.
Au 5e Blessés, on avait même fondé un
organe humoristique spécial. La Greffe gé-
nérale, qui obtint un succès considérable
dans les hôpitwu.r, et dans ie public. Les
quinze numéros de. ce. journal forment une
collection déjà à peu près introuvable uu-
jourd'hui.
Quant au, nouveau groupe, qui se fonde
sous la présidence du colonel Picot, vicc-
president de la commission, de l'armée, il
h choisi ce litre pittoresque : l'Amicale des
Gueules cassées.
L'araignée
M. Leredu, ministre rcuouvelc, recevait
hier, dans les couloirs, les félicitations de
ses collègues :
— Bravo, cher ami, dit l'un d'eux. Vous
pourrez adopter bientôt la fameuse devise
de Fouquel : Quo non ascendam ?
— Bah! répondit le ministre en souriant,
ici. je ne monterai jamais plus haut que le
Ida/und. 1
— Plaignons l'araignée, fil 11/1, troisième
Mais M. Leredu cessa de sourire• Il n'ai-
député.
me pas les mauvais plaisants.
L'hygiène
M. Lefebvre du Prey, présentement mi-
nislre de l'agriculture, n'était pas d'abord
très fixé sur la spécialité qu'il accepterait
dans le ministère.
Ses amis sollicitaient, pour lui le minis-
tère de Vhggiène.
— A l'hygiène! s'écria M. Briand. Vous
n'y pensvz pas ! Un homme (lui a neuf CII-
fants !
Les chaussettes inutiles
■ Le Journul de Roubaix du 7 janvier pu-
blie ce fait divers dont l'intérêt n'échappera
à personne :
— Jeudi-, vers 8 h. ie cadavre d'un hom-
me a clé relire lia canal, quai de l'aman.
On n'a pas pu ctobiir encore /ton nie nid i\
aucun papier n'ayant été trouvé sur lui.
Il était nu-pieds el portail, un veston et un
pantalon en coton noir, unflilcl bleu mari-
1/c,1m maillot de laine noire, une chemise
de couteur et des chaussettes grises.
Nul doute que ee signe particulier : ne
pieds en chaussettes grises permette une
identification rainde du noyé roubaisien.
Le Tapirt.
Contre la candidalure officielle
Le Sénat, saisi de protestations docu-
mentées contre l'élection sénatoriale des
Basses-Alpes, a chargé une sOlls-cornmls-
sion de procéder à une enquête.
C'est bien.
Mais ce qui sera mieux, c'est que l'en-
quête aboutisse, par une sanction, à Ja
condamnation de mœurs électorales indi-
gnes d'une démocratie.
On sait que, dans les Basses-Alpes, un
vétéran républicain, un probe et coura-
geux démocrate, Henry-Michel, a été dé-
pouillé de son siège par les tralics de Ja
candidature officielle.
M. Honnorat, ministre de l'instruction
publique (qui lui devait son élection de
député !) s'est présenté contre lui et ne f/lt
emporté que par deux voix de majorité.
Or, dans le cours même de la période
électorale, le ministre de l'instruction pu-
blique aurait prodigué des subventions à
des municipalités et décoré de la Légion
d'honneur trois délégués sénatoriaux.
Au demeurant, M. Honnorat est eoutu-
mier d'élections funambulesques.
Lorsqu'il se présenta pour la première
fois à la députation dans ces mêmes Bas-
ses-Alpes, ce fut son adversaire, M. Guyot
de Villeneuve, qui fut. tout d'abord élu, à
une voix de majorité !
Par.la suite, l'addition fut recommencée.
M. Cuyot de Villeneuve connut l'infortune
de la soustraction et M. Honnorat le
bonheur de la nmJiipljcation. Il fut pro-
clamé éilu à deux voix de majorité.
Au Sénat de mettre un terme à (Je pa-
reilles pratiques électorales et de morali-
ser le scrutin par une juste condamnation
de la candidature officielle !
- ..,. —-
Expulsons les brebis galeuses
DE L'ETRANGER
Le rapport que vient de faire au conseil
municipal M. Emile Massard, sur le fonc-
tionnement de la préfecture de police, au
cours de l'année 1920, est riche en observa-
tions, souvent attristantes, sur notre pau-
vre humanité.
C'est ainsi que nous apprenons que la
première division de la préfecture a procédé
à plus de 25.000 arrestations, dont 3.711
s'exerçant sur des étrangers et 322 sur des
étrangères.
Et cela rouvre la question, déjà si sou-
vent examinée, de la pègre internationale
qui infeste notre pays.
L'étranger, auquel de fâcheuses aventu-
res ont rendu difficile le séjour en son pays,
a trop tendance à venir planter chez nous
sa tente, y apportant toute la gangrène
physique et morale qui en fait, par le
monde, un perpétuel indésirable. C'est
contro cette opinion qu'il faudrait lutter
par des faits, en reconduisant sans plus
de forme à la frontière les métèques er-
rants qui ne cherchent qu'à reprendre
chez nous le cours d'exploits qui leur fer-
mèrent déjà d'autres pays.
La France est hospitalière : elle aime
les étrangers et les accueille largement, à
condition toutefois qu'ils ne viennent pas
augmenter le nombre des vagabonds dou-
teux et néfastes, dont nous avons nous-
mêmes déjà suffisamment.
Il faudrait souhaiter que nos services, de
police, qui veillent avec sollicitude à la
bonne renommée de notre pays, pratiquent
largement les expulsions' contre toutes les
brebis galeuses qui nous infestent.
1
Les trois communistes
français
ont été assassinés
LES AUTEURS DE CE CRIME
SONT DES BOLCHEVIKS.
De l'Agence Russunion :
La disparition des trois socialistes fran-
çais est bien due à un crime, consomme
pua- les agents de la commission extraor-
dinaire panrusse, vraisemblablement en
vertu d'ordres donnés par Djerjinsky, le
président de cette commission.
Les détails manquent encore sur le brus-
que changement d'attitude du gouvernement
soviétique à l'égard des trois socialistes
frunçais. Quoi qu'il en soit, déjà en septem-
bre 1020, LcfclHTc et ses compagnons
avaient été soumis à une surveillance se-
crète très serrée et 'i chitciiérine leur avait,
à trois reprises, refusé les Jaisse-r-passcr
qu'ils sollicitaient pour quitter la Russie
soviétique par voie de terre.
Il faut supposer que Lelebvre eut vent
que quelque chose se tramait contre lui et
ses compagnons, car il s'adressa à Sadoul,
puis de nouveau a Tchitchérine, en insis-
tauf pour Xiblenir l'autorisation do parut.
Ces nouvelles démarches n'eurent aucun
succès. I
C'est alors que Lefebvre, Vengeât et Le-
petit, d'accord avec un haut fonctionnaire
soviétique, imaginèrent un voyage dans-la
région du Volga et, déjouant en cours de
route la surveilance des agents de la com-
mission extraordinaire, prirent la fuite dans
la direction de Mourmansk.
Mais la d Tchéka » est très bien informée.
L'arrivée des socialistes français à Mour-
mansk l'ut iunnediafetnent signalée aux au-
torités soviétiques de Moscou. Avisée du
•fait, la commission extraordinaire panrussc
envoya d'urgence à la poursuite des fugitifs
trois de ses agents : Barachnikoff, Parciiine
et Oumansky.
Il s'en fallut de vingt-quatre heures, que
Lefebvre, .Vcrgeat et Lepelit ne fussent ar-
rêtés à Mourmansk. Mais ils prirent la mer
avant l'arrivée des agents de Moscou. On
organisa la poursuite et un garde-côte, bol-
cheviste rejoignit, en pleine mer, la frêle
embarcation sur laquelle se trouvaient les
socialistes français. On sait le reste : Le-
febvre, Vergeat et Lepetit furent jetés par-
dessus bord, non sans, cependant, que I a-
gent, Barachnikoff se fut emparé des pa-
piers qu'ils avaient sur eux et. qui se trou-
vent. actuellement déposés à la commission
extraordinaire de Moscou, sous le no 8.974.
Le dépôt est daté du 18 décembre 1920.
L'ACTUALITÉ
4»
Le ministère Briand
expose son programme
- ) ---+0 -E-- 1
POLITIQUE EXTÉRIEURE : Exiger de l'Allemagne te
désarmement et l'exécution du traité de paix, conso-
lider les alliances et les ententes, refuser toutes rela-
tions avec les Soviets. 1
POLITIQUE INTÉRIEURE : Faire une politique d'éco.
nomies, s'occuper des régions dévastées et des muti-
tilés, poursuivre les réformes sociales dans la légalité,
décentraliser l'Administration.
LE CABINET FAIT APPEL AU CONCOURS DE TOUS LES RÉPUBLICAINS
Voici le texte de la déclaration ministé-
rielle qui a été lue à la Chambre par M.
Aristide Briand, président du conseil, et
au Sénat par M. Marraud, remplaçant M.
Bonncvay, garde des sceaux, vice-président
du conseil, empêché :
Messieurs,
Appelé par M. le président de la Répu-
blique à Ja responsabilité du pouvoir, le
gouvernement qui se présente devant vous
a pleinemcn.jcunscience de la grandeur de
sa tâche. Il en connaît toutes les difficultés.
Il se déclare prêt à les affronter mais il
sait qu'elles seraient insurmontables s'il
n'obtenait l'entière confiance et l'étroite col-
laboration des Chamibres.
Nous avons .un traité de paix avec l'Al-
lemagne : nous n'avons pas encore la paix,
la paix réelle, la seule qui puisse être solide
et durable : la paix de justice et de mora-
lité qui consacrera les droits essentiels et
assurera la sécurité de la France.
Il faut désarmer l'Allemagne
Nous n'obtiendrons cette sécurité que si
l'Allemagne est désarmée. C'est pour notre
pays une question vitale qui trace au gou-
vernement. le premier et le plus sacre de
¡CS devoirs. Nous n'y faillirons pas.
Lit reconstitution de notre sol ravagé de
nos industries détruites, l'équilibre de nos
tinances ne sont possibles rpie si l'Allema-
gne exécute les réparations que le traité
de Versailles lui impose. A cet effet, nos
alliés nous donneront leur appui. Nous le
leur diemandons donc au nom du droit et de
la justice pour lesquels nous avons com-
battu, par lesquels nous avons vaincu.
Et faire exécuter le traité
Les peuples aspirent a la reprise des
échanges ; mais le retour à des relations
normales n'est possible, le malaise qui pèse
sur le monde ne peut être dissipé que si
l'effroyable iniquité d'hier est réparée. La
sanction de la grande guerre, la consécra-
tion de la victoire, c'est l'exécution du traité.
L'Allemagne est vaincue, mais aucune de
ses mines, de ses usines n'a été détruite.
Ses forces de production restent entières et
même les conditions du change que lui a
infligées la défaite lui ouvrent les plus lar-
ges espoirs d'expansion économique. Il est
possjble de prévoir son prompt relèvement.
Loin de nous la pensée d'y faire obstacle.
Mars la prospérité du peuple agresseur ve-
nant, après sa défaite, contraster avec la
ruine du peuple victorieux, ce serait, à la
morale la plus élémentaire, un défi que la
France ne peut accepter.
.Au besoin par la force
No'us avons la force ; nous pourrions,
nous saurions nous en servir, s'il le fallait,
pour imposer le respect de tous les engage-
ments souscrits. Mais la France républicai-
ne est essentiellement p;:J..CiÜqu,(;b c'est dans
la paix qu'elle veut amener l'Allemagne à
l'exécution des obligations contractées.
La France réclame son du tout son dù.
Elle est raisonnable Elle ne demande pas
l'impossible.
Mais ce qui importe dès maintenant, c'est
que lo-u'U s les facultés de paiement du débi-
teur, en i(llr'gent, en nature, en participations
de toutes sortes, — s'exercent au profit du
créancier. Ce n'est que justice.
Telles sont nos vues, tel est notre but. Jl
ne peut être atteint que par un accord étroit
entre nos alliés et nous.
Cet accord est la condition primordiale du
règlement de toutes les questions qui tien-
nent en suspens le rétablissement effectif de
la paix. Nous ferons tout pour le main-'
tenir et le développer.
La France et ses alliés
Nous avons Ja ferme confiance que notre
grande amie et alliée, l'Angleterre, nous y
aidera de toutes ses forces. Rien ne peut
plus, en effet, entamer les relations des deux
grands pays qui ont appris à se connaître
mieux et à s'estiimer davantage dans les ru-
des combats où ils ont versé leur sang en
commun. C'est leur intime union qui as-
sure la paix du monde. Qu'il s'agisse de
l'exécution du traité de Versailles ou règle-
ment du problème oriental, du maintien de
la paix étabdie par les traités dans l'Europe
c en tira le ou des rapports à entretenir avec
les peuples de l'est de l'Europe, l'alliance
ta:o:ilc entre la (Jnando-Bretagne et la Fran-
ce est la base de notre politique extérieure.
Avec l'Italie, nos efforts tendront à res-
serrer les liens que la guerre a déjà si heu-
reusement consolidés entre deux grands
pays latins. Nous avons confiance de rcn-
contrer à Rome, pour les solutions qui nous
- les dispositions amicales que
les Italiens ont trouvées à Paris pour le
règlement de la question a(LrialtÓqllJc.
L'amitié séculaire de la France et des
Etats-Unis, les inoubliables souvenirs de
notre histoire commune qui ont mêlé dans
le passé et qui mêleiraient, s'il était néces-
saire, dans l'avenir, le sang de nos soldats
sur les champs de bataille de ln. liberté, ga-
rantissent notre union dans la paix com-
me dans la guerre. Nous sommes sûrs que
nos amis Américains nous donneront, par
la réparation d@ goe dommages, le axtçafi
appui inappréciable qui a décidé de la vie-
toire dans la grande guerre où nous avons
défendu ensemble la cause de la civilisation.
Nous respectons les scrupules qui les font
hésiter sur la forme initiale à donner à la
SociéLé des Nations dont ils n'ont, d'ailleurs,
jamais mis en doute les principes généreux
et bienfaisants.
Les intérêts indiscutables qui nous ont
amenés à nous lier à la noble Belgique par
un accord militaire pour notre défense cum.
mune ont préparé la conclusion d'une eu-
liente économique également désirée des
deux côts de la frontière.
Malgré la dissemblance de nos régimes
douaniers, l'union entre Français et Belges,
cimenilée par leurs sacrifices, est aussi dési-
rable pour le développement économique des
deux pays que pour leur sécurité commune.
Nos amis de l'Europe Centrale
Nos rapports avec nos amis et alliés do
l'Europe Centrale continueront à s'inspirer
des sentiments confiants et chaleureux nés
pendant la guerre, au cours de laquelle fions
avons combattu pour le triomphe des as-
pirations nationales de la Pologne, de la
Roumanie, du peuple tchéco-slovaque et de
l'Etat des Serbes, Croates et Slovènes. Noua
ne négligerons rien non plus pour provoquer
dans la stricte exécution des traités, entre
tous les Etats sortis du démembremer-1 de
l'Empire austro-hongrois les accords qui per-
mettront à chacun de ces pays de se re-
constituer économiquement et de vivre.
La situation en Orient appelle tout parti-
culièrement notre attention. Il y a argon* o
à ce que la paix soit réalisée avec ;,:
quieet que, tenant compte dies circonstances
nouvelles, les conversations se poursuivent
amicalement avec nos alliés pour résoudre
la question oTientale.
Pas d'accord avec les Soviets
Nous n'avons rien oublié des sacrifices
que la grande nation russe a faits au début
de la guerre pour la cause de la liberté du
monde. Le peuple russe a répandu si gé-
néreusement son sang que nous lui en gai-
nerons une reconnaissance inaltérable, IImÜ
dans l'état actuel, pas plus que les gou-
vernements qui nous ont précédés nous ne
reconnaîtrons le pouvoir ues Soviets. Nàïja
ne saurions reprendre des relations ave c la
Russie tant qu'il n'y aura pas à Moscou i ai
regnne qui représente véritablement le peu-
ple lusse et soit prêt à tenir les Z"
rneinfs pris par les gouvernements lune-
neurs de ce pays.
'Le bolchevisme est une affaire russe taiit
qu'il reste comme dans ses frontières rj,
nous n'avons pas à intervenir dans les Af-
faires intérieures de la Russie. Mais il Iltil;
est impossible d'admettre que les ai r i
des Soviets sortent de leur territoire wr
attaquer nos alliés. ',.
Enfin, le souci de la grandeur e.t ce la
prospérité de la France fait au gouverne
ment de la République un devoir impériaux
de pourvoir à la représentation de notre
pays partout on'se discutent les grands in-
térêts internationaux.
Tel est le programme de politique cyté-
iïïon que BOUtS proposons à voire appro-
Le service militaire
Dans une Europe qui n'est pas MI cor a
pacifiee, pour nous maintenir en état de
defendtre et de faire triompher nos droits v
nous avons besoin d'être et de rester fer^
Nous nous garderons d'affaiblir notre puis-
sance militaire ; c'est un lourd fardeau peur
le pays. Il doit être réduit au strict. c'rs-
saire. Nous nous appliquerons à faire v u r
Je plus tôt possible les projets de loi sou-
mis à la Chambre, qui tendent à la diminu-
tion de la durée du service nulitair et a
une organisation de notre armée rricuK
adaptée aux conditions modernes de'. la ";1'3
nataonale.
Le budget et les économies
Pour être forte, il ne suffit pas à la Fran-
ce d avoir une armée solide : il lui faut
aussi des finances saints, Celles-ci exigent
des citoyens un effort considérable mais-
<;,ui, Ou.s peirue d'entrave!' l'essor du paze,
S Q t être limite à l'indispensable : il est
en conséquence, urgent de comprimer 1eR
dépenses puJJliqulCs. C'est à quoi le gouver-
nement est fermement décidé. Il se propose.
notamment, de procéder à la liquidation la-
pide des organismes ci-ces pour la guerre.
Il convient, d'autre part, de rétablir l'é-
quilibre entre les dépenses ainsi comprimées
et 1es recettes de l'Elat. Le plein rendement
de celles-ci sera assu.ré _par la réorganisa-
tion des services financiers et en particu-
tion des Services chargés dt,,la peroop-
tion.
Nous sommes résolus à hâter le vote du
budget et à réintroduire dans nos finan-
ces, profondément troublées par la guerre
1 ordre, la régularité et la clurt.
Mais, si par ces mesures au sujet des-
quelles nous nous concerterons avec vos
commissions des finances, nous pouvons es-
perer parer à la crise financière, il est es-
sentiel, pour en hâter la fin, que le Trésor
n'ait plus à faire face à la charge des répa-
rations dues par l'Allemagne.
Forte par son aimée gt par ses finances.
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