Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1916-10-18
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 18 octobre 1916 18 octobre 1916
Description : 1916/10/18 (N16771). 1916/10/18 (N16771).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7550625w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
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Broussilov et son Soldat
"," ,- i igji O a ■ ", -" .--" -.---
Il est bien plus difncile
(le détruire à tout jamais
une légende qu'une ville.
Or, cette guerre emporte
en ses tumultes beaucoup
de préjugés, de fausses croyances,
mal équilibrées sur des vérités an-
ciennes. Le soldat russe n'est pas
un barbare ; et il n'est plus le « vieux
brisquard », le moujik sorti du vil-
lage pour aller dans une caserne
s'abêtir pendant seize ou dix-huit
ans. L'armée russe, recrutée main-
tenant dans toutes les classes, a ra-
jeuni. Les tirailleurs sibériens s'y
confondent avec des Cosaques, des
Tcherkesses, des Bouriates, des
musulmans de la Volga, des Polo-
nais, etc., tout un monde de tribus
et de peuples, qui s'agglomère au
bloc grand-russe contre le « Nié-
meto » détesté, l'Allemand.
Le soldat russe a cette vertu su-
prême, la patience, si indispensa-
ble à tous les hommes dans toutes
les luttes pour la vie. Voyez-le dans
la tranchée : d'un œil tranquille, il
observe la ligne menaçante, à quel-
ques mètres de la sienne ; d'une
oreille indifférente, il suit le siffle-
ment d'une « valise », — c'est ainsi
que chez lui on appelle les « mar-
mites ». Au repos, il lit ou se fait
lire une lettre, un vieux morceau de
journal. Puis, quand il sort de la
tranchée, il va droit à l'ennemi sous
une grêle de balles, et Quelquefois,
les jours où les munitions lui ont
manqué, il s'est battu avec la bran-
ehe d'un arbre ou avec ses poings.
Le célèbre-explorateur et écrivain
suédois, Sven Hedin, qui, avant læ,
guerre avait adopté la France com-
me sa « seconde patrie », et qui ac-
cable des injures de son mépris nos
alliés et nous, depuis que les Alle-
mands ont acheté sa conscience, est
obligé de reconnaître que le soldat
russe n'est pas l'imbécile et le brutal
.de la légende ancienne.
A Suvalki, capitale de la provin-
ce russe de ce nom, il interroge un
prisonnier qui n'a pas encore quin-
ze ans, Pavel Koslovsky : « Pour-
quoi t'es-tu engagé ? — Lorsque la
patrie est en danger, répond le jeu-
ne Russe, c'est le devoir de tous les
hommes de fairè la guerre. » Plus
: loin, dans son livre La. Guerre con-
tre la Russiey Sven Hedin raconte
mie dans Przemysl conquise, le
10 mars 1915, les Russes entrèrent
« en jouant de leurs fifres et en
chantant.., Ils visitèrent maison
après maison dans chaque rue, pour
voir s'il y avait des prisonniers ou
des armes. On n'eut pas à se plain-
dre de leur conduite. Deux soldats,
coupables d'avoir tenté le pillage,
furent fusillés. »
Broussilov est le digne chef du
soldat russe, endurant, ferme en sa
hardiesse, inaccessible au désespoir.
A vrai dire, on ne le croyait pas
; destiné aux plus hautes charges.
; Sorti du corps des pages, en 1872,
5 jcolonel en 1892, général-major en
1900, il prit en 1902 la direction de
; l'Ecole des officiers de cavalerie.
Il entraînait ses officiers par des
concours hippiques, organisait des
Ï steeple-chases, des raids. Lorsqu'en
1906, il fut promu général-lieute-
nant, certains chefs de corps firent
: la grimace devant, ou plutôt der-
j rière, ce sportsman qui avait un
air hautain, sec.
Ce n'était qu'un air. Dès les pre-
miers jours, il se révéla de grande
intelligence, d'instruction forte. La
preuve, c'est qu'il ne croit pas tout
: savoir. Il écoute volontiers l'avis de
; ses subordonnés et leur laisse large
* initiative dans le cadre de l'action
qui leur est confié. Ce cavalier porte
son attention particulièrement sur
l'infanterie, l'arme principale, que
les autres doivent seconder. Il atta-
> che une extrême importance aux
Services de l'arrière. Enfin, comme
ïl n'a passé par aucune « Académie
Vie guerre », son esprit est resté li-
bre, très personnel.
Vainqueur en Galicie, il touchait
, presque le seuil de la plaine hon-
groise, lorsque démuni de moyens
tle combat, il dut sous un orage de
Xer et de feu, battre en retraite.
L'adversité n'ébranla point son cou-
rage, parce qu'il garda intacte sa;
: foi en lui-même, ainsi qu'en ses sol-
Bats. Pendant des mois de recueil-
l lement, il a reforgé son instrument
de guerre, celui qui s'adapte seul
aux exigences de notre époque in-
dustrielle, l'époque de la machine.
« La technique encore et toujours ! »
répète-t-il en regardant son inter-
locuteur de ses petits yeux clairs
sous les sourcils arqués.
Broussilov a conservé, malgré ses
soixante-six ans, une vigueur
peu commune. De taille moyenne,
mince, il passe encore pour l'un des
meilleurs cavaliers de son armée.
Aucun élan ne le rebute. Quand il
visite ses positions, si son automo-
bile s'enlise dans la terre grasse, il
prend un cheval pour continuer sa
route. Dans les marais du Polôssié,
il parcourt à pied, de la boue jus-
qu'au genou, des verstes entières.
- Comme la plupart des généraux
de cette guerre, il se plaît à loger
dans un wagon, roulotte de luxe.
Considérant la nourriture un mal
nécessaire, il expédie ses repas en
vingt minutes. Sa joie est de tra-
vailler, non pour lui-même. « Je
n'ai besoin de rien, dit-il; je suis
vieux; j'ai tout ce qu'on peut sou-
haiter. Mon unique désir est de ser-
vir de mon mieux la Russie. »
Ses soldats l'adorent. Pourtant,
il ne leur parle que rarement, en
phrases sèches et saccadées. Mais
ils sentent que leur général, présent
toujours au milieu de leurs fati-
gues, vibre d'un cœur très sensible
pour eux, pour leur terre commune.
Ils sont fiers de lui, que l'ennemi
redoute; il leur a donné sa foi. Si,
de par son ordre, ils doivent dans
la bataille tenir à tout prix, ils
tiennent sous les plus terribles ra-
fales. « Impossible de reculer, di-
sent-ils. Nous sommes les soldats de
Broussilov. »
Broussilov souhaite chez eux un
peu plus de haine contre l'Alle-
mand. « La haine de l'ennemi dé-
cuple les forces, déelare-t-il ; elle
est un des garants de la victoire.
Or, le cœur slave répugne un peu à
cette haine; il faut donc l'entrete-
nir. Et si les canailles recourent
aux balles explosibles, qu'on leur
rende la pareille !. »
Voilà un homme qui sait raison-
ner. Pourquoi faire de l'humanité
envers des canailles, que la Kultur
prussienne a dressées pour la - dé-
vastation et pour le meurtre ?.
GEORGES BEAU ME.
———————— ,. -.- - C ————————
LA FOLITIGiTJÊ
M. Briand,
la Démocratie nationale
et l'Avenir du Pays
- T
Les explications familières
fournies par M. Briand, à
quelques intimes, sur l'avenir
du Pays, — explications trans-
crites et tfansmises par M.
Capus, dans le Figaro, — ne
constituent pas -- un --- discours-
programme, mais le programme a un
discours. Quand M. Briand prononcera-
t-il ce discours ? Alors que les circons-
tances seront propices.
Pour le noment, tenons-nous-en à de
simples propos de table ou de fumoir,
comme il vous plaira.
En politique, a dit M. Briand à son petit
auditoire, je crois bien que notre pays
aura repris d'instinct, par les leçons aux-
quelles il n'aura pas pu échapper, la notion
de direction et d'autoirité. avec cette dif-
férence que sous les régimes passés, cette
autorité lui était imposée historiquement
et par la coutume, et qu'aujourd'hui c'est
lui-même qui la réclame à ses élus. ainsi
qu'une direction de plus en iptus ferme et
concentrée de ses affaires. Vous compre-
nez que je ne parle pas pour moi, je parle
en songeant a la prochaine promotion
d'hommes politiques qui devront a/m ver
sur la scène avec un regard neuf, qui se-
ront moins engagés que leurs aînés dans
leurs opinions et dans les doctrines, qui se
soumettrant plus facilement à l'expé-
rience.
J'essaye de forcer sa pensée :
— En réalité, lui dis-je, heureux ceux qui
n'ont pas encore d'opinions ! Ils pourront
les établir à la mesure des faits.
— Non, répond M. Briand, je ne vais pas
si loin dans l'empirisme. Nos méthodes
politiques actuelles ne sont pas toutes
abhnélM par la guerre. Elles demandent
simplement Õ. être revisées, refondues,
réadaptées. je suis convaincu, par exem-
ple, que l'esprit de guerre est en train
de heurter le particularisme local et qu'il
le brisera, lui substituant la notion du bien
public. Cette notion se perdait dans ce
qu'on pourrait appeler la pulvérisation, des
efforts. Et ce qu'il faudra maintenant, ce
sera, au contraire, leur concentration dans
l'intérêt général. Telle est, à mon avis, une
des besognes de demain ; concentrer au
lieu de disperser. Et vous ne vous imagi-
nez pas avec quelle bonne volonté le suf-
frage universel acceptera ces principes.
A mon avis il y est prêt. La guerre l'a
mis en état de; réceptivité. Il ne s'agit plus
COMMUNIQUES OFFICIELS
806e jour de la Guerre. 1 --
Mardi 17 Octobre 1916 I -'' - -
- FRONT OCCIDENTAL 1 -
Communiqués Français
15 HEURES
- Au nord de la Somme, nous avons con-
quis un nouvel îlot de maisons du village
de Sailly-Saillisel L'ennemi a prononcé ce
matin une violente contre-attaque et a
réussi à pénétrer dans quelques éléments
de notre première ligne. Une contre-atta-
que immédiate l'a entièrement rejeté. Le
nombre des prisonniers faits dans la jour-
née d'hier au cours de la contre-attaque
est de 90 ; nous avons enlevé deux mitrail-
leuses.
Au sud de la Somme, une nouvelle atta-
que sur nos positions à l'est de Berny-en-
Santerre a été brisée par notre feu.
Sur le reste du front, canonnade inter-
mittente.
LA GUERRE AERIENNE
Nos avions ont exécuté de nombreux vols
dans la région de la Somme. Ils ont livré
65 combats au cours desquels 2 avions en-
nemis ont été abauus. 3 autres ont atterri
précipitamment dans leurs lignes.
23 HEURES.
Sur tout le front de la Somme, bombar-
dement réciproque atteignant parfois une
grande violence. L'ennemi a lancé, à l'est
de Belloy-en-Santerre deux nouvelles atta-
ques qui, comme les précédentes, ont été
complètement repoussées et ont subi de
fortes pertes.
Rien à signaler sur le reste (lu front.
AVIATION
Des avions allemands ont lancé quelques
bombes sur Amiens sans aucun résultat
militaire.
Communiqué Anglais
11 HEURES
Rien à signaler sur l'ensemble du front
en dehors d un coup de main sur les tran-
chées allemandes à l'ouest de Serre.
Communiqué Belge
Au cours de la nuit. activité des patrouil-
les belges sur tout le front. Dans la région
de Kloosterhoek et de la Maison du Pas-
seur, une vingtaine de prisonniers ont été
ramenés à la sùite (l'incursions dans les
tranchées allemandes.
Aujourd'hui, duels d'artillerie récipro-
ques et luttes à coups de bombes, tant
dans le secteur de Dixmude que vers Boe-
singhe.
L'EMPRUNT FRANÇAIS
17 octobre 1916 — 23 heures.
Un grand nombre de souscripteurs à
l'Emprunt, qui, dans les campagnes, ef-
fectuent leurs versements aux bureaux de
poste ont exprimé le désir que les coupons
de la Rente française fussent payables
dans ces mêmes bureaux sans qu'ils soient
obligés d'aller à la perception.
Les niinistères des finances et des pos-
tes se sont mis d'accord pour donner, â
bref délai, satisfaction à ce désir dans des
conditions qui seront très prochainement
portées,, la connaissance du public.
FRONT BALKANIQUE
- Communiqué
de l'armée d'Orient
Le duel d'artillerie continue. Il est par-
ticulièrement violent sur la rive droite du
Vardar. Les troupes serbes ont repoussé
de violâtes contre-attaques sur la - Bela-
Voda et la Tchema.
que 'de lui parler nettement et franche-
ment ; de lui faire prendre conscience de
son propre état.
!'Ainsi s'est exprimé notre Premier. Au
risque d'être taxés de vanité ou de fla-
gorncrie, nous remarquerons que le
« speech » de l'homme d'Etat effleure la
plupart des préoccupations que nous
n'avons cessé de proposer ici, comme
fins ou moyens de la Démocratie natio-
nale.
— Notion. restaurée par le suffrage
universel, de direction et d'autorité ;
— Direction de plus en plus fermr. cl
concentrée des affaires publiques ;
- Méthodes politiques révise ref on-
dues, réadaptées ;
- Notion du bien public ;
—
- Concentration des efforts 'dans ViiU
térêt général ;
— Inclination du suffrage universel
à accepter et à proposer lui-même ces
directives nouvelles ;
Et le président, dès la fin de la guerre,
aperçoit l'avenir qui nous sourit : la vie
libre ; la fortune ; la République indis
cutée et puissante:
A * qui donc reviendra l'honneur d'or-
ganiser le nouveau régime ?
Ici, M. Briand, avec coquetterie, s'ef-
face : « Je ne parle pas pour moi, ie
parle en songeant à la prochaine promo-
tion d'hommes politiques qui devront,
arriver sur la scène avec un regard
neuf. »
Il s'agit de ceux qui se seront libérés
et de la contrainte et du joug des formu-
les clichées et qui, fidèles à leur idéal,
sans être serfs de mauvais usages et de
précédents fâcheux, reviendront à cette
saine politique expérimentale préconi-
sée, jadis, par Gambetla. Comme le tri-
bun de 1870, M. Briand fait appel déjà
à de nouvelles couches sociales, à des
effectifs politiques neufs.
Au moment où un travail profond se
trahit ch'ez les socialistes, au moment où
le radicalisme, lentement, péniblement,
se ranime pour de nouvelles destinées,
M. Briand, d'un geste amical et presque
affectueux, les prend par la main et leur
iimique les bons passages, au milieu des
décombres :
« Attention ! Ici, un pas ! Là, une fla-
que d'eau ! Evitez ce bourbier 1 Prenez
garde à la peinture 1 Encore un petit
étage ! Ah 1 nous y voici. Quelle vue
admirable 1: Messieurs ! Prenez place
sur le balcon. Tenez 1 cyest vous qui
touchez de 11' main les beaux fruits de
ces vergers ! C'est vous qui cueillerez
les fleurs de ces parterres. Ah 1 jeu.
nesse 1 »
Et là-dessus, ironiquement, Mentor
nous avertit qu'il ne faut pas s'attarder
à rêver. L'heure rose n'a pas encore lui.
Ça crépite fort, à deux pas d'ici. Ren-
trez vile, petits imprudents 1
Cependant, M. le Ministre, pendant
que les uns nous refont une France
forte, n'est -il pas permis aux autres de
lui préparer quelques atours pour, qu'en
même temps aussi, elle soit belle 1
Préparons la République de demain.
Toute la Question !
-, .♦«
Sous la signature de notre excellent
confrère G. Brouville, dans lie Radical,
cette conclusion d'un très judicieux article
sur les garanties de la paix future :
« Il faut résolument envisager le sta-
tut nouveau de l'Europe nouvelle et y exa-
miner quelle place naturelle la France
doit y tenir. - Notre frontière ouverte et
notre abaissement ont été la conclusion
des traités de Vienne et de Francfort. Etu-
dions donc par quels moyens les résultats
néfastes de cas deux traités peuvent être
réparés et l'œuvre extérieure de la troi-
sième République se relier à celle de la
première. »
Encha.ntés de constater une fois encore
que les vrais radicaux n'oublient pas la
grande tradition républicaine et natio-
nale. (
Ïi-A. SITTTA.TIO»
»
Le Parti Radical
et la Politique extérieure
l'. ■-
L'annonce d'une prochaine réunion du
Comité exécutif du Parti radical et radi-
cal-socialiste n'a pas seulement provoqué
une grande curiosité au point de vue de
la future orientation intérieure, mais éga-
lement au point de vue de la politique
extérieure du Pays.
A tort ou à raison, le Parti radical est
considéré comme responsable de nos des-
tinées militaires et diplomatiques. Quin-
ze ans dvant la guerre, il a porté la char-
ge du ouvoir. Il peut enregistrer à son
actif, nbn seulement l'alliance franco-
russe, qu'il a constamment soutenue, de-
puis l'origine, mais encore l'entente cor-
diale qisi date du ministère Combes-Del-
cassé. ■
Aujourd'hui, les radicaux peuvent di-
re avec fierté à la galerie : « Notre ges-
tion diplomatique, la voilà ! »'
Il est de toute évidence d'ailleurs, que
l'évolution de l'Italie en notre faveur a
été facilitée par la conduite de nos affai-
res, sous l'impulsion de la politique ra-
dicale. Le voyage de M. Loubet à Ro-
me est une « page » dans l'histoire du
rapprochement franco-italien, partant,
dans la - dislocation de la Triple-Alliance.
Lorsque M. de Bulow parlait avec ironie
du tour de valse de l'Italie, il ne cachait
pas son inquiétude. L'événement l'a jus-
tifiée.
C'est donc avec une légitime autorité
que les radicaux peuvent se tourner face
à l'opinion pour réclamer le bénéfice de
leur clairvoyance.
Sans ces précédents heureux, nous
n'aurions pas affronté le péril de la
guerre avec les chances diplomatiques
que l'on sait. C'est un des ministres, lié
ouvertement au radicalisme, Delcassé,
qui a enlevé le pacte de Londres, suprê-
me garantie de la: France, quand notre
sort n'était pas encore assuré pas la se-
maine glorieuse de la Marne.
Solidaires des Alliés, les Français doi-
vent cette solidarité à la longue patience
d'dn parti souvent attaqué et qui a des
moyens de se défendre. Cela il saura le
proclamer hautement dès qu'il délibérera
et il saura montrer au Pays que son œu-
vre nécessaire a. rendu des services ines-
timables à la politique nationale.
D'ailleurs, depuis la guerre, et grâce
en partie, à l'initiative vigilante et à l'in-
fatigable activité de Franklin-Bouillon,
président du Comité exécutif, des rap-
prochements précieux avec les Parle-
ments des pays alliés ont permis & nos
amis d'inscrire un nouveau titre à leur
actif.
C'est donc en pleine confiance que les
radicaux pourront reparaître au grand
jour devant le public attentif. Ils ont ap-
porté à la nation des garanties diploma-
tiques de sécurité dans le passé; ils doi-
vent souhaiter d'en apporter de nouvelles
dans l'avenir. Ils ont été et ils restent une
grande' force historique dans notre'vie
publique. Leur destinée est à la merci de
leur persévérance, de leur fermeté et de
leur sagesse. En attendant beaucoup
d'eux, çm ne dépasse pas les droits à la
confiante que le passé fournit à l'avenir.
ALBERT MILHAUD.
L'ACTUALITÉ
Les Emprunts allemands
-
Le montant des souscriptions au cinquiè-
me emprunt allemand atteindrait 10.590
millions de marks. Les précédents em-
prunts avaient respectivement donné les'
résultats suivants :
1° 4.460.000.000 marks avec 1.117.235
souscripteurs.
2° 9.060.000.000 marks avec 2.691.COO
souscripteurs.
3° 12.105.000.c00 marks avec 3.555.176
souset-ipteum
4* 10.712.000.000 marks avec 5.279.645
souscripteurs. -'
Ainsi, après avoir atteint leur maximum
au. troisième emprunt, et bien que le nom-
bre des souscripteurs ait augmenté, les
sommes souscrites diminuent.
Quel démenti catégorique à l'optimisme
officiel de Guillaume II et ■die' ses minis-
très I
Lorsque, le 20 août l&lo, le docteur Hlf.
ferich présenta le troisième emprunt au
Reichstag, il se vanta d'envisager sans in-
quiétude l'énorme accroissement des dé-
penses - de guerre. ----------
« L argent, disait-il, est semblable à ces
chemins de fer qui portent à nos troupes
le nécessaire pour vivre et combattre. Com-
me les wagons de chemins de fer, bien
remplis, roulent vers le front et reviennent
ensuite vers les ateliers nationaux, ainsi
l'argent roule hors de la caisse impériale
pour payer les dépenses de guerre et Óloit
y rentrer de nouveau sous forme d'acquit-
tement des souscriptions aux emprunts
d'Etat. »
Telle était la théorie.
Dans le « Rappel » des 2 et 17 septem-
bre 1915. j'avais indiqué qu'il viendrait un
moment où, dans le circuit germanique,
un arrêt se produirait et où les souscrip-
tions deviendraient insuffisantes.
L'événement confirme aujourd'hui mes
prévisions.
Et il ne s'agit pas là d'un accident pas-
sager, mais bien d'une fatalité économique
contre laquelle "tontes les subtilités du mi-
nistre du Trésor resteront vaines.
D'après les chiffres mêmes soumis par
ce dernier, le revenu annuel du peuple al-
lemand était avant la guerre de 43 mil-
liards de marks.
De ces 43 milliards, 8 étaient employés
en dépenses publiques, 27 ou 28 en dépen-
ses privées, le surplus allait à l'épargne.
Quelle brèche la guerre n'a-t-elle pas fai-
te dans cette magnifique richesse ?
Que reste-t-il des 20 milliards de marks
du commerce extérieur ? La flotte est im-
mobilisée et ne peut plus donner le mil-
liard de revenu annuel qu'elle procurait au
peuple allemand. Combien de commerces
arrêtés ? Il n'est pas exagéré d'évaluer à
15 milliards la diminution du revenu nor-
mal par année de guerre.
Les dépenses de guerre n'étant pas in-
férieures à 70 milliards, on voit que tout
le revenu normal actuel serait insuffisant
à les solder, à supposer qu'il n'y ait plus
die dépenses privées.
Mais celles-ci existent et elles n'ont pas
diminué. Elles ont augmenté, au contraire.
en raison même de l'augmentation qui a
frappé tous les objets de consommation.
Les sommes payées (par le Trésor vien-
nent campenser en conséquence la dimi-
nution absolue et relative des revenus al-
lemands. Elles ne peuvent donc pas re-
tourner aux emprunts. Le docteur Helf-
feiich avait oublié, dans sa comparaison,
que les wagons, qui vont de l'armée au
front et réciproquement, sont souvent ga-
Irés dans des stations intermédiaires, où
ils demeurent parfois longtemps. L'argent
fait de même. Et les combinaisons de l'Etat
allemand par lesquelles il espérait mas-
quer son insolvabilité, retiennent encore
le cours normal de l'argent et menacent
d'aggraver le pélrH qu'elles voulaient con-
jurer.
Il reste donc, pour faire face aux dépen-
ses de guerre, les capitaux acquis qu'on a
pu mobiliser.
On sait que ce fut l'œuvre des Caisses
de prêts. Celles-ci ont prêté 75 de la
valeur des objets mis en gage chez elles
i afin de permettre les souscriptions nt
premier emprunt, puis elles ont prett
75 sur les titres de ce premier emprua
pour permettre les souscriptions au deu.
xièrae et ainsi de suite.
Qui ne voit qu'avec ce système les sous,
criptions vont chaque fois en diminuant J
Bien plus le capitaliste allemand qui *
consciencieusement souscrit par ce procède
s'est à la; quatrième opération, endetté d'ur.
capital égal à son capital primitif. Et o.
comprend qu'il hésite a accroître encore
sa dette.
Son travail ne lui a pas permis die àe
libérer et son inquiétude s'est manifestés
dans les demandes dont il a assailli les,
!pouvoirs publics pour savoir si les caisses
de prêts subsisteraient longtemps ajprèsi
la guerre. Que lui importerait s'il avait pu
dénouer les liens des engagements anté-
rieurs ?
Pour que les sommes souscrites fussent
en augmentation ou seulement se maintins-
sent, il aurait fallu que dans ces deux an*
nées de guerre, grâce à son travail et il
son économie, chaque capitaliste allemand
se fût constitué un capital mobile égal à
son capital primitif.
Il suffit d'énoncer le problème pour en
concevoir l'impossibilité.
On dit même qu'à ce dernier emprunt lé
nombre des souscripteurs aurait diminué.
Cela ne ferait que confirmer l'épuisement
financier du pays. :
Ainsi, les dépenses de guerre de l'Empir.
allemand vont en augmentant, les sous:
criptlons aux emprunts de guerre vont et
diminuant.
Concluez.
CAMILLE BOUCHÉ, 1
.————————— » • » —•
La progression lente i
En dépit des efforts désespérés de la pro-
pagande allemande, de plus en plus active,
la certitude de la victoire remplace, chez
les Alliés, ce qui n'avait été jusqu'ici
que la confiance la plus raisonnée.
Le martèlement du front allemand rsd
poursuit d'une manière continue. L'ennemi
se défend furieusement, qu'on ne l'oublie
pas. Il laisse dans ses tranchées, dans ses
profonds abris, des monceaux de cadavres.
Si ce sont là des témoignages irrécusables
de l'habileté et de la vigueur de notre ar-
tillerie, ce sont aussi les preuves indénia
ble s d'une froide volonté chez notre adver-
sairei. Il s'abandonne rien que contraint
et lorcé.
Village par village, tranchée par Iran-
chée, notre infanterie progresse. Tout ce
qu'elle conquiert, elle le garde. Et l'ennemi,
recule to-uiours !
Les forces britanniques menacent les
avancées de Bapaume. Les troupes fran-
çaises ont enlevé, au nord de la Somme, IC&
majeure partie dit village de Sailly-Sailliséi,
dont elles restent maîtresses. Au sud de la
Somme, c'est la région de Chaulnes qui
peu à peu tombe en notre possession.
Les coups de main exécutés par les An-
glais et sur notre front nous permettent de
surveiller de très près le mouvement des
effectifs ennemis. Nous avons tout licu de.
nous montrer rassurés.
Notre armée d'Orient est actuellement cri
pleine action. La duplicité grecque nous,
cause, évidemment, des pertes de temps.
Il nous faudra déloger de Sérès et de Ca-
valla des ennemis qui semblaient ne ;a-:
mais devoir pénétrer dans ces villes sa-
crées pour les Hellènes, pas plus qu'ils ne
devaient occuper Florina, d'oit nous les.
avons chassés.
Les Serbes tiennent tête énergiquement
et repoussent les contre-attaques furieuses
des Bulgares. Nos troupes sont sur le Var-
dar où la lutte d'artillerie atteint une
grande violence ; les Anglais progressent
à l'est de la Struma.
Les Roumains, conformément aux nou-
velles prescriptions du commandement,
engagent de concert avec nous l'action qui
doit précipiter la marche des événements,
dans les Balkans. 1
LI PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
visite le Nord, le Pas-de-Calais et la Somme
———— ) -+- - ( ———— -
Le Président de la République .e. quitté
Paris dimanche soir, avec MM. Viviaoi,
garde des-sceaux ; Malvy, ministre de l'in-
térieur ; Ribot, ministre des finances ; le
général Roques, ministre de la guerre, et
Denvs Cochin, ministre d'Etat, pour alier
visiter, dans les départements du Nord, du
Pas-de-Calais et de la Somme, les popula-
tions de plusieurs villes bombardées par
l'ennemi.
Il est arrivé à Armentières lundi, a 8 h.
et demie du matin, et en a suivi les rues les
plus dévastées. Il a été reçu par les auto-
rités civiles et par les officiers; anglais. Il
a liemis, ao cours de Kette visite, Ses
décoration s s a.iv an tes :
« La cravate de commandeur de la Lé-
gion d'honneur à M. Trêpont, pcéfet du
Nord, qui a fait preuve de sang-fro-id et d'é-
nergie pendant l'invasion, a témoigné le
plus grand dévouement envers ses admi-
nistrés, a été emmené comme otage par les
Allemands et a courageusement supporté
les épreuves de la captivité.
« La rosette d'officier à M. Jacomet, pro-
cureur général à la cour de Donai, qui a
également été transporté comme otage en
Allemagne et qui a rempli avec fermeté
d'âme tous les devoirs de la magistrature.
« La croix de chevalier à M. Borromée,
secrétaire général de iLa préfecture du Nord,
dont l'attitude envers les autorités ennemies
a été digne d'éloges et qui n été. lui aussi,
déporté en Allemagne ; à M. Chas, maire
d'Armentières,pendant l'occupation, a été arrêté comme
otage, et qui, depuis la libération de la ville,
a prodigué aux habitants sms un bombar-
dement quotidien les secours et les soins *
à VI. Leibas, rrîaire de-Roubaix, qui a. vail-
lamment défendu lés droits et les intérêts de
"es administrés contre l'envahissear, qui a
été incarcéré pendant plus de deux mois à
Roubaix par les Allemands et qui a été em-
mené comme ota.æ. avec MM. Trépont. Ja-
comet et Rorromée. »
D'Armentières, le Président et les minis-
tres se sont rendus à Béthune, dont ils ont
parcouru à pied les quartiers les. plus eni
dommagés par le bombardement. La croijrç
de la Légion d'honneur a été remise à M.
Bonnefoy-Sibour, socis-préfet, qui iemplit
ses fonctions avec beaucoup de courage et
de sang-froid. Des Croix de guerre ont étéj
décernées à des soldats anglais, ainsi qu'ài
des pompiers français qui ont opéré de pé-
rilleux sauvetages sous le feu de l'ennemi.'
Les troupes anglaises rendaient les boli-
netirs. -
L'après-midi, le Président et les ministres
sont allés à Arras, dont ils ont longuement
visité tous les quartiers. Ceux des habitants,
oui sent restés dans la ville, malgré les,
bombardements continus, leur ont fait l'ac-
cueil !e plus reconnaissant. Sur une des pro-
menades de la ville a en lieu, Tuines. en présence d'officiers anglais et <1
quelques soldats français, une nomvcUe re,.
mise de décorations. <
Ont été nommés :
c Commandeur de la Légion d'honneur.
M. Briens. préfet du Pas-de-Calais, qui.
assuré, avec un dévouement de tous les ins-
tants. les mesures de protection nécesaai»
res.
c Chevaliers (au titre de guerre) : Mgr
Lohbedr'T. évêque d'Arras : « D'octobre 1914
à juin 1915, est resté à Arras au milieu des
premières, lignes françaises, sous un bom-
bardement parfois très. violent, se dépen.
sant sans compter pour remplir son minis-
tère. visiter nos soldats, inhumer les morts,
pourvoir les ambulances, donnant à tous ua
magnifique exempie de calme, de sang-froid.
d'énergie et de devoir pleinement accompli
sous la menace -immédiate de l'ennemi u ;
Al Gerbore, vice-président du oonsetl d
préfecture, qui n'a cessé de faine preuve
d'abnéaation et dprocureur de la République, qui a rempa
ses fonctions sans relâche au péril de soi
vie ; M. Godefroy, ju&e d'instruction, qui est
resté lui aussi à son poste et a été bless4
par un obus. »
La maire d'Amis amii nçu la Légion
fondateur : AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
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TRIBZJNM HZJBRM
Broussilov et son Soldat
"," ,- i igji O a ■ ", -" .--" -.---
Il est bien plus difncile
(le détruire à tout jamais
une légende qu'une ville.
Or, cette guerre emporte
en ses tumultes beaucoup
de préjugés, de fausses croyances,
mal équilibrées sur des vérités an-
ciennes. Le soldat russe n'est pas
un barbare ; et il n'est plus le « vieux
brisquard », le moujik sorti du vil-
lage pour aller dans une caserne
s'abêtir pendant seize ou dix-huit
ans. L'armée russe, recrutée main-
tenant dans toutes les classes, a ra-
jeuni. Les tirailleurs sibériens s'y
confondent avec des Cosaques, des
Tcherkesses, des Bouriates, des
musulmans de la Volga, des Polo-
nais, etc., tout un monde de tribus
et de peuples, qui s'agglomère au
bloc grand-russe contre le « Nié-
meto » détesté, l'Allemand.
Le soldat russe a cette vertu su-
prême, la patience, si indispensa-
ble à tous les hommes dans toutes
les luttes pour la vie. Voyez-le dans
la tranchée : d'un œil tranquille, il
observe la ligne menaçante, à quel-
ques mètres de la sienne ; d'une
oreille indifférente, il suit le siffle-
ment d'une « valise », — c'est ainsi
que chez lui on appelle les « mar-
mites ». Au repos, il lit ou se fait
lire une lettre, un vieux morceau de
journal. Puis, quand il sort de la
tranchée, il va droit à l'ennemi sous
une grêle de balles, et Quelquefois,
les jours où les munitions lui ont
manqué, il s'est battu avec la bran-
ehe d'un arbre ou avec ses poings.
Le célèbre-explorateur et écrivain
suédois, Sven Hedin, qui, avant læ,
guerre avait adopté la France com-
me sa « seconde patrie », et qui ac-
cable des injures de son mépris nos
alliés et nous, depuis que les Alle-
mands ont acheté sa conscience, est
obligé de reconnaître que le soldat
russe n'est pas l'imbécile et le brutal
.de la légende ancienne.
A Suvalki, capitale de la provin-
ce russe de ce nom, il interroge un
prisonnier qui n'a pas encore quin-
ze ans, Pavel Koslovsky : « Pour-
quoi t'es-tu engagé ? — Lorsque la
patrie est en danger, répond le jeu-
ne Russe, c'est le devoir de tous les
hommes de fairè la guerre. » Plus
: loin, dans son livre La. Guerre con-
tre la Russiey Sven Hedin raconte
mie dans Przemysl conquise, le
10 mars 1915, les Russes entrèrent
« en jouant de leurs fifres et en
chantant.., Ils visitèrent maison
après maison dans chaque rue, pour
voir s'il y avait des prisonniers ou
des armes. On n'eut pas à se plain-
dre de leur conduite. Deux soldats,
coupables d'avoir tenté le pillage,
furent fusillés. »
Broussilov est le digne chef du
soldat russe, endurant, ferme en sa
hardiesse, inaccessible au désespoir.
A vrai dire, on ne le croyait pas
; destiné aux plus hautes charges.
; Sorti du corps des pages, en 1872,
5 jcolonel en 1892, général-major en
1900, il prit en 1902 la direction de
; l'Ecole des officiers de cavalerie.
Il entraînait ses officiers par des
concours hippiques, organisait des
Ï steeple-chases, des raids. Lorsqu'en
1906, il fut promu général-lieute-
nant, certains chefs de corps firent
: la grimace devant, ou plutôt der-
j rière, ce sportsman qui avait un
air hautain, sec.
Ce n'était qu'un air. Dès les pre-
miers jours, il se révéla de grande
intelligence, d'instruction forte. La
preuve, c'est qu'il ne croit pas tout
: savoir. Il écoute volontiers l'avis de
; ses subordonnés et leur laisse large
* initiative dans le cadre de l'action
qui leur est confié. Ce cavalier porte
son attention particulièrement sur
l'infanterie, l'arme principale, que
les autres doivent seconder. Il atta-
> che une extrême importance aux
Services de l'arrière. Enfin, comme
ïl n'a passé par aucune « Académie
Vie guerre », son esprit est resté li-
bre, très personnel.
Vainqueur en Galicie, il touchait
, presque le seuil de la plaine hon-
groise, lorsque démuni de moyens
tle combat, il dut sous un orage de
Xer et de feu, battre en retraite.
L'adversité n'ébranla point son cou-
rage, parce qu'il garda intacte sa;
: foi en lui-même, ainsi qu'en ses sol-
Bats. Pendant des mois de recueil-
l lement, il a reforgé son instrument
de guerre, celui qui s'adapte seul
aux exigences de notre époque in-
dustrielle, l'époque de la machine.
« La technique encore et toujours ! »
répète-t-il en regardant son inter-
locuteur de ses petits yeux clairs
sous les sourcils arqués.
Broussilov a conservé, malgré ses
soixante-six ans, une vigueur
peu commune. De taille moyenne,
mince, il passe encore pour l'un des
meilleurs cavaliers de son armée.
Aucun élan ne le rebute. Quand il
visite ses positions, si son automo-
bile s'enlise dans la terre grasse, il
prend un cheval pour continuer sa
route. Dans les marais du Polôssié,
il parcourt à pied, de la boue jus-
qu'au genou, des verstes entières.
- Comme la plupart des généraux
de cette guerre, il se plaît à loger
dans un wagon, roulotte de luxe.
Considérant la nourriture un mal
nécessaire, il expédie ses repas en
vingt minutes. Sa joie est de tra-
vailler, non pour lui-même. « Je
n'ai besoin de rien, dit-il; je suis
vieux; j'ai tout ce qu'on peut sou-
haiter. Mon unique désir est de ser-
vir de mon mieux la Russie. »
Ses soldats l'adorent. Pourtant,
il ne leur parle que rarement, en
phrases sèches et saccadées. Mais
ils sentent que leur général, présent
toujours au milieu de leurs fati-
gues, vibre d'un cœur très sensible
pour eux, pour leur terre commune.
Ils sont fiers de lui, que l'ennemi
redoute; il leur a donné sa foi. Si,
de par son ordre, ils doivent dans
la bataille tenir à tout prix, ils
tiennent sous les plus terribles ra-
fales. « Impossible de reculer, di-
sent-ils. Nous sommes les soldats de
Broussilov. »
Broussilov souhaite chez eux un
peu plus de haine contre l'Alle-
mand. « La haine de l'ennemi dé-
cuple les forces, déelare-t-il ; elle
est un des garants de la victoire.
Or, le cœur slave répugne un peu à
cette haine; il faut donc l'entrete-
nir. Et si les canailles recourent
aux balles explosibles, qu'on leur
rende la pareille !. »
Voilà un homme qui sait raison-
ner. Pourquoi faire de l'humanité
envers des canailles, que la Kultur
prussienne a dressées pour la - dé-
vastation et pour le meurtre ?.
GEORGES BEAU ME.
———————— ,. -.- - C ————————
LA FOLITIGiTJÊ
M. Briand,
la Démocratie nationale
et l'Avenir du Pays
- T
Les explications familières
fournies par M. Briand, à
quelques intimes, sur l'avenir
du Pays, — explications trans-
crites et tfansmises par M.
Capus, dans le Figaro, — ne
constituent pas -- un --- discours-
programme, mais le programme a un
discours. Quand M. Briand prononcera-
t-il ce discours ? Alors que les circons-
tances seront propices.
Pour le noment, tenons-nous-en à de
simples propos de table ou de fumoir,
comme il vous plaira.
En politique, a dit M. Briand à son petit
auditoire, je crois bien que notre pays
aura repris d'instinct, par les leçons aux-
quelles il n'aura pas pu échapper, la notion
de direction et d'autoirité. avec cette dif-
férence que sous les régimes passés, cette
autorité lui était imposée historiquement
et par la coutume, et qu'aujourd'hui c'est
lui-même qui la réclame à ses élus. ainsi
qu'une direction de plus en iptus ferme et
concentrée de ses affaires. Vous compre-
nez que je ne parle pas pour moi, je parle
en songeant a la prochaine promotion
d'hommes politiques qui devront a/m ver
sur la scène avec un regard neuf, qui se-
ront moins engagés que leurs aînés dans
leurs opinions et dans les doctrines, qui se
soumettrant plus facilement à l'expé-
rience.
J'essaye de forcer sa pensée :
— En réalité, lui dis-je, heureux ceux qui
n'ont pas encore d'opinions ! Ils pourront
les établir à la mesure des faits.
— Non, répond M. Briand, je ne vais pas
si loin dans l'empirisme. Nos méthodes
politiques actuelles ne sont pas toutes
abhnélM par la guerre. Elles demandent
simplement Õ. être revisées, refondues,
réadaptées. je suis convaincu, par exem-
ple, que l'esprit de guerre est en train
de heurter le particularisme local et qu'il
le brisera, lui substituant la notion du bien
public. Cette notion se perdait dans ce
qu'on pourrait appeler la pulvérisation, des
efforts. Et ce qu'il faudra maintenant, ce
sera, au contraire, leur concentration dans
l'intérêt général. Telle est, à mon avis, une
des besognes de demain ; concentrer au
lieu de disperser. Et vous ne vous imagi-
nez pas avec quelle bonne volonté le suf-
frage universel acceptera ces principes.
A mon avis il y est prêt. La guerre l'a
mis en état de; réceptivité. Il ne s'agit plus
COMMUNIQUES OFFICIELS
806e jour de la Guerre. 1 --
Mardi 17 Octobre 1916 I -'' - -
- FRONT OCCIDENTAL 1 -
Communiqués Français
15 HEURES
- Au nord de la Somme, nous avons con-
quis un nouvel îlot de maisons du village
de Sailly-Saillisel L'ennemi a prononcé ce
matin une violente contre-attaque et a
réussi à pénétrer dans quelques éléments
de notre première ligne. Une contre-atta-
que immédiate l'a entièrement rejeté. Le
nombre des prisonniers faits dans la jour-
née d'hier au cours de la contre-attaque
est de 90 ; nous avons enlevé deux mitrail-
leuses.
Au sud de la Somme, une nouvelle atta-
que sur nos positions à l'est de Berny-en-
Santerre a été brisée par notre feu.
Sur le reste du front, canonnade inter-
mittente.
LA GUERRE AERIENNE
Nos avions ont exécuté de nombreux vols
dans la région de la Somme. Ils ont livré
65 combats au cours desquels 2 avions en-
nemis ont été abauus. 3 autres ont atterri
précipitamment dans leurs lignes.
23 HEURES.
Sur tout le front de la Somme, bombar-
dement réciproque atteignant parfois une
grande violence. L'ennemi a lancé, à l'est
de Belloy-en-Santerre deux nouvelles atta-
ques qui, comme les précédentes, ont été
complètement repoussées et ont subi de
fortes pertes.
Rien à signaler sur le reste (lu front.
AVIATION
Des avions allemands ont lancé quelques
bombes sur Amiens sans aucun résultat
militaire.
Communiqué Anglais
11 HEURES
Rien à signaler sur l'ensemble du front
en dehors d un coup de main sur les tran-
chées allemandes à l'ouest de Serre.
Communiqué Belge
Au cours de la nuit. activité des patrouil-
les belges sur tout le front. Dans la région
de Kloosterhoek et de la Maison du Pas-
seur, une vingtaine de prisonniers ont été
ramenés à la sùite (l'incursions dans les
tranchées allemandes.
Aujourd'hui, duels d'artillerie récipro-
ques et luttes à coups de bombes, tant
dans le secteur de Dixmude que vers Boe-
singhe.
L'EMPRUNT FRANÇAIS
17 octobre 1916 — 23 heures.
Un grand nombre de souscripteurs à
l'Emprunt, qui, dans les campagnes, ef-
fectuent leurs versements aux bureaux de
poste ont exprimé le désir que les coupons
de la Rente française fussent payables
dans ces mêmes bureaux sans qu'ils soient
obligés d'aller à la perception.
Les niinistères des finances et des pos-
tes se sont mis d'accord pour donner, â
bref délai, satisfaction à ce désir dans des
conditions qui seront très prochainement
portées,, la connaissance du public.
FRONT BALKANIQUE
- Communiqué
de l'armée d'Orient
Le duel d'artillerie continue. Il est par-
ticulièrement violent sur la rive droite du
Vardar. Les troupes serbes ont repoussé
de violâtes contre-attaques sur la - Bela-
Voda et la Tchema.
que 'de lui parler nettement et franche-
ment ; de lui faire prendre conscience de
son propre état.
!'Ainsi s'est exprimé notre Premier. Au
risque d'être taxés de vanité ou de fla-
gorncrie, nous remarquerons que le
« speech » de l'homme d'Etat effleure la
plupart des préoccupations que nous
n'avons cessé de proposer ici, comme
fins ou moyens de la Démocratie natio-
nale.
— Notion. restaurée par le suffrage
universel, de direction et d'autorité ;
— Direction de plus en plus fermr. cl
concentrée des affaires publiques ;
- Méthodes politiques révise ref on-
dues, réadaptées ;
- Notion du bien public ;
—
- Concentration des efforts 'dans ViiU
térêt général ;
— Inclination du suffrage universel
à accepter et à proposer lui-même ces
directives nouvelles ;
Et le président, dès la fin de la guerre,
aperçoit l'avenir qui nous sourit : la vie
libre ; la fortune ; la République indis
cutée et puissante:
A * qui donc reviendra l'honneur d'or-
ganiser le nouveau régime ?
Ici, M. Briand, avec coquetterie, s'ef-
face : « Je ne parle pas pour moi, ie
parle en songeant à la prochaine promo-
tion d'hommes politiques qui devront,
arriver sur la scène avec un regard
neuf. »
Il s'agit de ceux qui se seront libérés
et de la contrainte et du joug des formu-
les clichées et qui, fidèles à leur idéal,
sans être serfs de mauvais usages et de
précédents fâcheux, reviendront à cette
saine politique expérimentale préconi-
sée, jadis, par Gambetla. Comme le tri-
bun de 1870, M. Briand fait appel déjà
à de nouvelles couches sociales, à des
effectifs politiques neufs.
Au moment où un travail profond se
trahit ch'ez les socialistes, au moment où
le radicalisme, lentement, péniblement,
se ranime pour de nouvelles destinées,
M. Briand, d'un geste amical et presque
affectueux, les prend par la main et leur
iimique les bons passages, au milieu des
décombres :
« Attention ! Ici, un pas ! Là, une fla-
que d'eau ! Evitez ce bourbier 1 Prenez
garde à la peinture 1 Encore un petit
étage ! Ah 1 nous y voici. Quelle vue
admirable 1: Messieurs ! Prenez place
sur le balcon. Tenez 1 cyest vous qui
touchez de 11' main les beaux fruits de
ces vergers ! C'est vous qui cueillerez
les fleurs de ces parterres. Ah 1 jeu.
nesse 1 »
Et là-dessus, ironiquement, Mentor
nous avertit qu'il ne faut pas s'attarder
à rêver. L'heure rose n'a pas encore lui.
Ça crépite fort, à deux pas d'ici. Ren-
trez vile, petits imprudents 1
Cependant, M. le Ministre, pendant
que les uns nous refont une France
forte, n'est -il pas permis aux autres de
lui préparer quelques atours pour, qu'en
même temps aussi, elle soit belle 1
Préparons la République de demain.
Toute la Question !
-, .♦«
Sous la signature de notre excellent
confrère G. Brouville, dans lie Radical,
cette conclusion d'un très judicieux article
sur les garanties de la paix future :
« Il faut résolument envisager le sta-
tut nouveau de l'Europe nouvelle et y exa-
miner quelle place naturelle la France
doit y tenir. - Notre frontière ouverte et
notre abaissement ont été la conclusion
des traités de Vienne et de Francfort. Etu-
dions donc par quels moyens les résultats
néfastes de cas deux traités peuvent être
réparés et l'œuvre extérieure de la troi-
sième République se relier à celle de la
première. »
Encha.ntés de constater une fois encore
que les vrais radicaux n'oublient pas la
grande tradition républicaine et natio-
nale. (
Ïi-A. SITTTA.TIO»
»
Le Parti Radical
et la Politique extérieure
l'. ■-
L'annonce d'une prochaine réunion du
Comité exécutif du Parti radical et radi-
cal-socialiste n'a pas seulement provoqué
une grande curiosité au point de vue de
la future orientation intérieure, mais éga-
lement au point de vue de la politique
extérieure du Pays.
A tort ou à raison, le Parti radical est
considéré comme responsable de nos des-
tinées militaires et diplomatiques. Quin-
ze ans dvant la guerre, il a porté la char-
ge du ouvoir. Il peut enregistrer à son
actif, nbn seulement l'alliance franco-
russe, qu'il a constamment soutenue, de-
puis l'origine, mais encore l'entente cor-
diale qisi date du ministère Combes-Del-
cassé. ■
Aujourd'hui, les radicaux peuvent di-
re avec fierté à la galerie : « Notre ges-
tion diplomatique, la voilà ! »'
Il est de toute évidence d'ailleurs, que
l'évolution de l'Italie en notre faveur a
été facilitée par la conduite de nos affai-
res, sous l'impulsion de la politique ra-
dicale. Le voyage de M. Loubet à Ro-
me est une « page » dans l'histoire du
rapprochement franco-italien, partant,
dans la - dislocation de la Triple-Alliance.
Lorsque M. de Bulow parlait avec ironie
du tour de valse de l'Italie, il ne cachait
pas son inquiétude. L'événement l'a jus-
tifiée.
C'est donc avec une légitime autorité
que les radicaux peuvent se tourner face
à l'opinion pour réclamer le bénéfice de
leur clairvoyance.
Sans ces précédents heureux, nous
n'aurions pas affronté le péril de la
guerre avec les chances diplomatiques
que l'on sait. C'est un des ministres, lié
ouvertement au radicalisme, Delcassé,
qui a enlevé le pacte de Londres, suprê-
me garantie de la: France, quand notre
sort n'était pas encore assuré pas la se-
maine glorieuse de la Marne.
Solidaires des Alliés, les Français doi-
vent cette solidarité à la longue patience
d'dn parti souvent attaqué et qui a des
moyens de se défendre. Cela il saura le
proclamer hautement dès qu'il délibérera
et il saura montrer au Pays que son œu-
vre nécessaire a. rendu des services ines-
timables à la politique nationale.
D'ailleurs, depuis la guerre, et grâce
en partie, à l'initiative vigilante et à l'in-
fatigable activité de Franklin-Bouillon,
président du Comité exécutif, des rap-
prochements précieux avec les Parle-
ments des pays alliés ont permis & nos
amis d'inscrire un nouveau titre à leur
actif.
C'est donc en pleine confiance que les
radicaux pourront reparaître au grand
jour devant le public attentif. Ils ont ap-
porté à la nation des garanties diploma-
tiques de sécurité dans le passé; ils doi-
vent souhaiter d'en apporter de nouvelles
dans l'avenir. Ils ont été et ils restent une
grande' force historique dans notre'vie
publique. Leur destinée est à la merci de
leur persévérance, de leur fermeté et de
leur sagesse. En attendant beaucoup
d'eux, çm ne dépasse pas les droits à la
confiante que le passé fournit à l'avenir.
ALBERT MILHAUD.
L'ACTUALITÉ
Les Emprunts allemands
-
Le montant des souscriptions au cinquiè-
me emprunt allemand atteindrait 10.590
millions de marks. Les précédents em-
prunts avaient respectivement donné les'
résultats suivants :
1° 4.460.000.000 marks avec 1.117.235
souscripteurs.
2° 9.060.000.000 marks avec 2.691.COO
souscripteurs.
3° 12.105.000.c00 marks avec 3.555.176
souset-ipteum
4* 10.712.000.000 marks avec 5.279.645
souscripteurs. -'
Ainsi, après avoir atteint leur maximum
au. troisième emprunt, et bien que le nom-
bre des souscripteurs ait augmenté, les
sommes souscrites diminuent.
Quel démenti catégorique à l'optimisme
officiel de Guillaume II et ■die' ses minis-
très I
Lorsque, le 20 août l&lo, le docteur Hlf.
ferich présenta le troisième emprunt au
Reichstag, il se vanta d'envisager sans in-
quiétude l'énorme accroissement des dé-
penses - de guerre. ----------
« L argent, disait-il, est semblable à ces
chemins de fer qui portent à nos troupes
le nécessaire pour vivre et combattre. Com-
me les wagons de chemins de fer, bien
remplis, roulent vers le front et reviennent
ensuite vers les ateliers nationaux, ainsi
l'argent roule hors de la caisse impériale
pour payer les dépenses de guerre et Óloit
y rentrer de nouveau sous forme d'acquit-
tement des souscriptions aux emprunts
d'Etat. »
Telle était la théorie.
Dans le « Rappel » des 2 et 17 septem-
bre 1915. j'avais indiqué qu'il viendrait un
moment où, dans le circuit germanique,
un arrêt se produirait et où les souscrip-
tions deviendraient insuffisantes.
L'événement confirme aujourd'hui mes
prévisions.
Et il ne s'agit pas là d'un accident pas-
sager, mais bien d'une fatalité économique
contre laquelle "tontes les subtilités du mi-
nistre du Trésor resteront vaines.
D'après les chiffres mêmes soumis par
ce dernier, le revenu annuel du peuple al-
lemand était avant la guerre de 43 mil-
liards de marks.
De ces 43 milliards, 8 étaient employés
en dépenses publiques, 27 ou 28 en dépen-
ses privées, le surplus allait à l'épargne.
Quelle brèche la guerre n'a-t-elle pas fai-
te dans cette magnifique richesse ?
Que reste-t-il des 20 milliards de marks
du commerce extérieur ? La flotte est im-
mobilisée et ne peut plus donner le mil-
liard de revenu annuel qu'elle procurait au
peuple allemand. Combien de commerces
arrêtés ? Il n'est pas exagéré d'évaluer à
15 milliards la diminution du revenu nor-
mal par année de guerre.
Les dépenses de guerre n'étant pas in-
férieures à 70 milliards, on voit que tout
le revenu normal actuel serait insuffisant
à les solder, à supposer qu'il n'y ait plus
die dépenses privées.
Mais celles-ci existent et elles n'ont pas
diminué. Elles ont augmenté, au contraire.
en raison même de l'augmentation qui a
frappé tous les objets de consommation.
Les sommes payées (par le Trésor vien-
nent campenser en conséquence la dimi-
nution absolue et relative des revenus al-
lemands. Elles ne peuvent donc pas re-
tourner aux emprunts. Le docteur Helf-
feiich avait oublié, dans sa comparaison,
que les wagons, qui vont de l'armée au
front et réciproquement, sont souvent ga-
Irés dans des stations intermédiaires, où
ils demeurent parfois longtemps. L'argent
fait de même. Et les combinaisons de l'Etat
allemand par lesquelles il espérait mas-
quer son insolvabilité, retiennent encore
le cours normal de l'argent et menacent
d'aggraver le pélrH qu'elles voulaient con-
jurer.
Il reste donc, pour faire face aux dépen-
ses de guerre, les capitaux acquis qu'on a
pu mobiliser.
On sait que ce fut l'œuvre des Caisses
de prêts. Celles-ci ont prêté 75 de la
valeur des objets mis en gage chez elles
i afin de permettre les souscriptions nt
premier emprunt, puis elles ont prett
75 sur les titres de ce premier emprua
pour permettre les souscriptions au deu.
xièrae et ainsi de suite.
Qui ne voit qu'avec ce système les sous,
criptions vont chaque fois en diminuant J
Bien plus le capitaliste allemand qui *
consciencieusement souscrit par ce procède
s'est à la; quatrième opération, endetté d'ur.
capital égal à son capital primitif. Et o.
comprend qu'il hésite a accroître encore
sa dette.
Son travail ne lui a pas permis die àe
libérer et son inquiétude s'est manifestés
dans les demandes dont il a assailli les,
!pouvoirs publics pour savoir si les caisses
de prêts subsisteraient longtemps ajprèsi
la guerre. Que lui importerait s'il avait pu
dénouer les liens des engagements anté-
rieurs ?
Pour que les sommes souscrites fussent
en augmentation ou seulement se maintins-
sent, il aurait fallu que dans ces deux an*
nées de guerre, grâce à son travail et il
son économie, chaque capitaliste allemand
se fût constitué un capital mobile égal à
son capital primitif.
Il suffit d'énoncer le problème pour en
concevoir l'impossibilité.
On dit même qu'à ce dernier emprunt lé
nombre des souscripteurs aurait diminué.
Cela ne ferait que confirmer l'épuisement
financier du pays. :
Ainsi, les dépenses de guerre de l'Empir.
allemand vont en augmentant, les sous:
criptlons aux emprunts de guerre vont et
diminuant.
Concluez.
CAMILLE BOUCHÉ, 1
.————————— » • » —•
La progression lente i
En dépit des efforts désespérés de la pro-
pagande allemande, de plus en plus active,
la certitude de la victoire remplace, chez
les Alliés, ce qui n'avait été jusqu'ici
que la confiance la plus raisonnée.
Le martèlement du front allemand rsd
poursuit d'une manière continue. L'ennemi
se défend furieusement, qu'on ne l'oublie
pas. Il laisse dans ses tranchées, dans ses
profonds abris, des monceaux de cadavres.
Si ce sont là des témoignages irrécusables
de l'habileté et de la vigueur de notre ar-
tillerie, ce sont aussi les preuves indénia
ble s d'une froide volonté chez notre adver-
sairei. Il s'abandonne rien que contraint
et lorcé.
Village par village, tranchée par Iran-
chée, notre infanterie progresse. Tout ce
qu'elle conquiert, elle le garde. Et l'ennemi,
recule to-uiours !
Les forces britanniques menacent les
avancées de Bapaume. Les troupes fran-
çaises ont enlevé, au nord de la Somme, IC&
majeure partie dit village de Sailly-Sailliséi,
dont elles restent maîtresses. Au sud de la
Somme, c'est la région de Chaulnes qui
peu à peu tombe en notre possession.
Les coups de main exécutés par les An-
glais et sur notre front nous permettent de
surveiller de très près le mouvement des
effectifs ennemis. Nous avons tout licu de.
nous montrer rassurés.
Notre armée d'Orient est actuellement cri
pleine action. La duplicité grecque nous,
cause, évidemment, des pertes de temps.
Il nous faudra déloger de Sérès et de Ca-
valla des ennemis qui semblaient ne ;a-:
mais devoir pénétrer dans ces villes sa-
crées pour les Hellènes, pas plus qu'ils ne
devaient occuper Florina, d'oit nous les.
avons chassés.
Les Serbes tiennent tête énergiquement
et repoussent les contre-attaques furieuses
des Bulgares. Nos troupes sont sur le Var-
dar où la lutte d'artillerie atteint une
grande violence ; les Anglais progressent
à l'est de la Struma.
Les Roumains, conformément aux nou-
velles prescriptions du commandement,
engagent de concert avec nous l'action qui
doit précipiter la marche des événements,
dans les Balkans. 1
LI PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
visite le Nord, le Pas-de-Calais et la Somme
———— ) -+- - ( ———— -
Le Président de la République .e. quitté
Paris dimanche soir, avec MM. Viviaoi,
garde des-sceaux ; Malvy, ministre de l'in-
térieur ; Ribot, ministre des finances ; le
général Roques, ministre de la guerre, et
Denvs Cochin, ministre d'Etat, pour alier
visiter, dans les départements du Nord, du
Pas-de-Calais et de la Somme, les popula-
tions de plusieurs villes bombardées par
l'ennemi.
Il est arrivé à Armentières lundi, a 8 h.
et demie du matin, et en a suivi les rues les
plus dévastées. Il a été reçu par les auto-
rités civiles et par les officiers; anglais. Il
a liemis, ao cours de Kette visite, Ses
décoration s s a.iv an tes :
« La cravate de commandeur de la Lé-
gion d'honneur à M. Trêpont, pcéfet du
Nord, qui a fait preuve de sang-fro-id et d'é-
nergie pendant l'invasion, a témoigné le
plus grand dévouement envers ses admi-
nistrés, a été emmené comme otage par les
Allemands et a courageusement supporté
les épreuves de la captivité.
« La rosette d'officier à M. Jacomet, pro-
cureur général à la cour de Donai, qui a
également été transporté comme otage en
Allemagne et qui a rempli avec fermeté
d'âme tous les devoirs de la magistrature.
« La croix de chevalier à M. Borromée,
secrétaire général de iLa préfecture du Nord,
dont l'attitude envers les autorités ennemies
a été digne d'éloges et qui n été. lui aussi,
déporté en Allemagne ; à M. Chas, maire
d'Armentières,
otage, et qui, depuis la libération de la ville,
a prodigué aux habitants sms un bombar-
dement quotidien les secours et les soins *
à VI. Leibas, rrîaire de-Roubaix, qui a. vail-
lamment défendu lés droits et les intérêts de
"es administrés contre l'envahissear, qui a
été incarcéré pendant plus de deux mois à
Roubaix par les Allemands et qui a été em-
mené comme ota.æ. avec MM. Trépont. Ja-
comet et Rorromée. »
D'Armentières, le Président et les minis-
tres se sont rendus à Béthune, dont ils ont
parcouru à pied les quartiers les. plus eni
dommagés par le bombardement. La croijrç
de la Légion d'honneur a été remise à M.
Bonnefoy-Sibour, socis-préfet, qui iemplit
ses fonctions avec beaucoup de courage et
de sang-froid. Des Croix de guerre ont étéj
décernées à des soldats anglais, ainsi qu'ài
des pompiers français qui ont opéré de pé-
rilleux sauvetages sous le feu de l'ennemi.'
Les troupes anglaises rendaient les boli-
netirs. -
L'après-midi, le Président et les ministres
sont allés à Arras, dont ils ont longuement
visité tous les quartiers. Ceux des habitants,
oui sent restés dans la ville, malgré les,
bombardements continus, leur ont fait l'ac-
cueil !e plus reconnaissant. Sur une des pro-
menades de la ville a en lieu,
quelques soldats français, une nomvcUe re,.
mise de décorations. <
Ont été nommés :
c Commandeur de la Légion d'honneur.
M. Briens. préfet du Pas-de-Calais, qui.
assuré, avec un dévouement de tous les ins-
tants. les mesures de protection nécesaai»
res.
c Chevaliers (au titre de guerre) : Mgr
Lohbedr'T. évêque d'Arras : « D'octobre 1914
à juin 1915, est resté à Arras au milieu des
premières, lignes françaises, sous un bom-
bardement parfois très. violent, se dépen.
sant sans compter pour remplir son minis-
tère. visiter nos soldats, inhumer les morts,
pourvoir les ambulances, donnant à tous ua
magnifique exempie de calme, de sang-froid.
d'énergie et de devoir pleinement accompli
sous la menace -immédiate de l'ennemi u ;
Al Gerbore, vice-président du oonsetl d
préfecture, qui n'a cessé de faine preuve
d'abnéaation et dprocureur de la République, qui a rempa
ses fonctions sans relâche au péril de soi
vie ; M. Godefroy, ju&e d'instruction, qui est
resté lui aussi à son poste et a été bless4
par un obus. »
La maire d'Amis amii nçu la Légion
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