Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-09-10
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 septembre 1906 10 septembre 1906
Description : 1906/09/10 (N13331). 1906/09/10 (N13331).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7549676q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
, me 13331. - 23 FRUCTIDOR AN 114 OÏHÏQ CENTIMES LE NUMERO.':" , LUNDI 10 SEPTEMBRE 1908. — H- 13331.
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE
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C'est avec juste raison que l'on a signa-
lé à maintes reprises et que l'on signale
- - encore tous les jours l'état lamentable de
nos bureaux de poste. Il y a deux ans, à
la suite d'une active et spirituelle cam-
pgne iie presse, quelques mesures d'hy-
giène avaient été prises. M. Bérard, tou-
jours animé d'excellentes intentions, et
toujours prêt à donner satisfaction aux
réclamations très justifiées qu'à ce sujet
on lui adresse, avait essayé de remédier
à cet état de chose : quelques devantures
furent repeintes ; quelques carreaux fu-
rent nettoyés ; pendant un certain
temps, on trouva de l'encre, et non de
la boue, des plumes, et l'on risqua moins
de laisser, gravées dans la poussière ac-
cumulée sur les tables, les traces de son
passage.
Le manque de crédit, l'inertie de la
haute administration, ont paralysé cette
action utile. -
Aujourd'hui, nous sommes encore ré-
duits à constater là malpropreté des bu-
reaux.
On ne saurait faire retomber la res-
ponsabilité de cette situation, ni sur les
receveurs, ni sur leurs auxiliaires, dont
la tâche n'est pas de balayer le sol, ni
nettoyer les murs, mais de répondre au
public et de distribuer les lettres. Ce ne
sont pas eux les coupables. Il doit bien
exister, rue de Grenelle, des fonction-
naires chargés d'étudier ces questions ?
Peut-être ne leur apparaissent-elles pas
comme intéressantes et dignes de fixer
leur attention : si cela est, s'ils
croient que nos plaintes sont chi-
mériques, que ce sont des pré-
textes à réclamation, que le temps
prescrira, qu'ils lisent ce fait-divers que
: nous trouvons dans les journaux. Mieux
que tous les discours et tous les écrits, il
leur indiquera le bien-fondé de nos do-
léances, et surtout combien il est urgent
de solutionner le problème de la salu-
brité des locaux administratifs. Nous le
transcrivons tel que nous le lisons : « Un
facteur des postes et télégraphes, Char-
les Angot, étant mort subitement, il y a
trois jours dans le bureau central du
quinzième, M. Coeuille, commissaire de
police, a fait surseoir à l'inhumation et
envoyé le corps à la Morgue, l'enquête
ayant fait soupçonner que certaines dis-
r positions vicieusesdes locaux pourraient
avoir été, directement ou non, la cause
de cette mort. »
Le résultat de l'autopsie nous fera
connaître la vérité : nous saurons si ce
malheureux était atteint d'une affection
que les siens ignoraient, mais, en admet-
tant même cette hypothèse si favorable
à l'administration, il -n'en demeure pas
moins qu'il existe dans ce bureau « des
dispositions vicieuses ►> et que la respon-
sabilité du sous-secrétariat est engagée.
Comme ce bureau ne se distingue pas
des autres, il reste acquis que tous cons-
tituent un danger pour les agents qui les
fréquent. Si ce décès pouvait servir
de leçon, et si une réforme pouvait être
apportée, mais.
***
Ce qui doit nous surprendre, c'est que
de pareils accidents ne se produisent pas
tous les jours ; aucun souci de l'hygiène
ne préside à l'agencement du local ; les
installations sont défectueuses, pas
d'air, pas de lumière, les facteurs pour
l'opération du tri sont empilés les uns
sur les autres. Nos bureaux de poste
sont des foyers de tuberculose. L'Etat
qui fait — et il a raison — tant de re-
commandations aux simples citoyens
pour éviter la propagationde ce terrible
fléau, agirait sagement en prenant, dans
lés établissements qui lui appartiennent,
quelques précautions. Il pourrait prêcher
d'exemple.
Si les ressources font défaut, le mi-
nistre compétent n'a qu'à en demander
le Parlement ne les lui refusera pas,d'au-
tant plus que les budgets postes rap-
portent assez au Trésor, et que l'on
pourrait même trouver des économies
correspondantes. Mais encore ne les
trouverait-on pas, que l'on a quand
même le devoir de remédier à cette si-
tuation. Elle n'est pas particulière à
Paris, d'ailleurs. La province n'a rien à
nous envier sous ce rapport. Si M. Bé-
rard avait une journée à perdre — et il
ne la perdrait pas — je l'engage vive-
ment à venir à Boulogne-sur-mer, visi-
ter le bureau de poste, que j'ai eu le
plaisir de voir, il y a quelques jours, et
qui m'a donné une hauté opinion de
l'administration des postes française. Il
est honteux qu'une ville aussi fréquentée
: que Boulogne, qui compte à cette époque
environ 70,000 habItants, possède un
local aussi répugnant. Il faut être du
pays pour le trouver sans guide, car on
fa placé dans une petite rue, assez loin
du centre de la ville.
'.,
L'extérieur est d'une propreté douteu-
se, la pluie seule est chargée du net-
toyage. - -
Quant à l'intérieur, il est tout simple-
ment repoussant. Il fut jadis peint en
vert. Aujourd'hui, il est d'une couleur
innomable. Jamais le sol ne fut balayé,
ni lès carreaux nettoyés. Les employés
sont derrière des murs ; ils communi-
quent avec le public par des guichets
analogues à ceux que nous voyons dans
les prisons. Pour ces malheureux, c'est
le régime cellulaire. Deux tables crasseu-
ses et trois ou quatre chaises préhisto-
riques constituent le mobilier de ce bu-
reau. Lorsqu'il y a vingt personnes, on
ne peut plus ni entrer ni sortr. Les étran-
gers, si nombreux dans cette cité, doivent
avoir une idée flatteuse de notre adminis-
tration. Ce que je dis pour ce bureau
pourrait être dit de pas mal d'autres.
.**
Quelles différences, comme construc-
tion, comme aménagement, comme com-
modité, avec les bureaux d'Anvers, de
Barcelone, de Naples, de Rome, de Lon-
dres.. Les faire visiter à quelques hauts
fonctionnaires serait chose fort bonne
pour nous. Ils pourraient faire quelques
comparaisons qui ne seraient pas en no-
tre honneur, mais qui nous seraient uti-
les. Qu'ils examinent également nos wa-
gons-postes. On dirait, en vérité, qu'ils
remontent à la plus haute antiquité, et
que leur place est tout indiquée pour
quelque musée.
Les ambulants se plaignent de ces ca-
banons roulants, ils ne se plaignent pas
assez. Leur service est assez pénible
pour que l'administration leur donne au
moins quelque confort..
Nous voulons espérer que nos plain-
tes seront un jour écoutées et comprises.
L'administration oppose à toutes ces ré-
clamations la force d'inertie, persuadée
qu'elle est, que le temps arrange tout,
que les événements se modifient d'eux-
mêmes, que la colère s'use et que les con-
tribuables finissent toujours par com-
prendre que tout est pour le mieux dans
le meilleur des mondes administrants ;
mais il ne faudrait cependant pas ou-
blier que nous sommes les payeurs et que
l'on pourrait peut-être tenir compte de
nos désirs. La démocratie n'est pas tail-
lable et corvéable à merci.
Fernand Cervais.
LES ON-DIT
LA DOCTRINE DE MUNROE
Nous avons eu depuis quel-
que temps, à propos du Con-
grès panaméricain et dans
d'autres circonstances, à mon-
trer comment la doctrine de
Monroë, d'abord limitée aux
seuls Etats-Unis, s'étendant aux Répu-
bliques sud-américaines. -
Par suite, les créances de nos natio-
naux, vis-à-vis des Etats des Républi-
ques de l'Amérique du Sud semblaient
quelque peu compromises. Il fallait —»
et nous l'avons expliqué — ou que les
peuples renonçassent à soutenir les inté-
rêts de leurs nationaux, en conflit avec
les débiteurs parfois peu consciencieux
du Nouveau-Monde ; ou qu'ils s'expo-
sassent à une affaire avec les Etats-
Unis.
Les Américains du Nord ont, paraît-
il compris eux-mêmes ce qu'il y avait
d'inacceptable dans ces conséquences de
leur doctrine.
Un écrivain new-yorkais, M. Harold
Boloe, écrit dans l'Appleton's Magazine
que « la doctrine de Monroë n'est plus
aujourd'hui un principe moral, mais une
question commerciale. » Elle comprend
notamment, ajoute notre confrère M.
Jean Longuet, l'obligation pour les
Etats-Unis de prendre la responsabilité
de la dette d'un milliard des Républi-
ques sud-américaines en Euoper.
C'est alors une chose à discuter. En
tant que principe moral, la doctrine de
Monroë blesse bien des préjugés aux-
quels nous avons la faiblesse de rester
attachés. En tant que question commer-
ciale, elle demande à être envisagée
d'une manière plus positive et terre-à-
terre.
Si les Etats-Unis se substituent, pour
la garantie des créances aux Républi-
ques sud-américaines, il est permis d'a-
voir confiance dans des endosseurs dont
le crédit est l'un des plus sûrs du monde.
Faites votre politique comme vous
l'entendrez ; mais commencez par payer
vos dettes. -,
LA GUERRE DE FS70
Racontée par le a Rappel »
Numéro du 11 septembre 1870
« En rentrant à Paris, ma première
parole est : Vive Paris 1 vive à jamais
ce foyer de civilisation. Vouloir l'inves-
tir, c'est prétendre investir la civilisa-
tion elle-même? Qu'avons-nous à crain-
dre ? l'humanité entière est avec nous.
Union, union de tous, avec le gouver-
nement de la défense natiçnale.
« Après ce long esclavage, la France
est rentrée dans la liberté, elle s'enve-
loppe du drapeau de la démocratie ré-
publicaine, c'est le drapeau de tous les
pluples. Laterre-a encore une fois e-
connu en elle le soldat du droit.
EDGAR QUINET. *
L'Union «. toutes les haines sont,
pour un instant oubliées. Et il ne reste
plus dans nos cœurs que ce sentiment:
de fraternité sublime qui nous porte à
nous donner la main, tous, sans dis-
tinction de parti, d'opinion, de nuan-
ces, la liberté menacée et la France en
péril. Heure vraiment superbe, toutes
les voix s'unissent pour crier : Vive la
nation !. » EDOUARD LOCKROY.
Convocation de la Constituante. -
« Le gouvernement de La défense natio-
nale : convoque les collèges électoraux
pour le 16 octobre, à l'effet de nommer
une assemblée constituante. C'est là
une décision généreuse et forte qui lui
fait, certes, grand honneur. » PAUL
MEURICE.
La guerre. — Le maire de la Ferté-
sous-Jouarre informe officiellement le
maire de Coulommiers qu'il s'attend à
voir arriver les Prussiens, ce soir, 9
septembre. »
« Le commandant de la place de
Langres informe que les mobiles ont
pris 100 prussiens, des armes, des che-
vaux, une calèche. »
Défense de Paris. — « Le Syndicat
des constructeurs mécaniciens de Paris
et la Société des Ingénieurs civils se
sont offerts au gouvernement pour lui
fournir des mitrailleuses. L'industrie
privée pourra fabriquer ces engins
avec une grande rapidité. »
« A partir de demain, samedi 10 sep-
tembre, à midi, au pied de la statue de
la ville de Strasbourg, place de la Con-
corde, un registre sera ouvert, sur le-
quel les citoyens sont invités à venir
apposer leurs signatures. On lira sur la
première page : « Les Parisiens, hon-
neur à nos frères défenseurs de Stras-
bourg et à leur brave général Uhrich.
Des citoyens de bonne volonté sont in-
vités "à se relayer deux par deux, pour
garder ce registre d'honneur. u LissA-
GARAY.
, Ça. et là. — « Les représentations du
Théâtre français ont cessé. La Comédie
française, à qui les circonstances pré-
sentes montrent un devoir nouveau, a
conçu la pensée de transformer son
foyer en ambulance.» Signé : MADE-
LEINE BROHAN, MARIE FAVART, CLÉMEN-
TINE JOUASSIN, EDILE RIQUIER. »
cc On sait qu'une grande partie du
Jardin du Luxembourg vient d'être
transformée en parcs à bestiaux, et
qu'on y a accumulé d'innombrables
moutons, destinés à l'alimentation de
Paris, en cas de siège. Les boulevards
d'Enfer et Saint-Jacques ont subi la
même transformation. Ils sont déjà en-
tourés de palissades en planches. »
« Ordre est donné aux habitants de
la zone militaire de vider les locaux
qu'ils occupest. » GÉNÉRAL TROCHU.
UN AUTO EN 1844
Sommes-nous assez fiars cle ce ma-
gnifique mouvement automobiliste qui
lance la France dans une frénésie de
vitesse, en tête des nations civilisées !
Eh bien ! mais, ce n'est peut-être pas
une nouveauté, l'industrie automobile,
et, en cherchant un peu, on la rattache-
'rait à la préhistoire 1
Sans aller si loin, il y avait déjà, à
Paris, des autos, ou quelque chose
d'approchant, soixante ans avant nos
circuits.
Vers la fin de décembre 1844, en
effet, le public remarquait, à la barrière
de Montparnasse, une petite voiture
« entièrement construite en fer, menée
par deux hommes et roulant avec une
grande rapidité sans le secours de che-
vaux. Cet appareil singulier se compo-
sait d'un train posé sur trois roues en
fer, dont la première servait à donner
la direction. » Pas d'essence ni ae pé-
trole, la traction était assurée par deux
hommes assis dos à dos et tirant à hue
et à dia. C'était à la fois singulier et
économique. L'engrenage correspon-
dant aux moyeux permettait d'obtenir
le mouvement sans déployer trop de
force.
L'inventeur de la machine était un
serrurier du quartier Montparnasse qui
arrivait à couvrir de longues distances
avec son auto avant la lettre.
LES FIGURES DE PIERRE NATURELLES
La nature fait de l'art, comme M.
Jourdain faisait de la prose. En quel-
que coin de la France que vous ayez été
amenés à vous abriter contre les ri-
gueurs, de la canicule, vous avez cer-
tainement remarqué des: rochers d'é-
trange'forme, qu'on jurerait sculptés
de main d'homme-
La vallée de la Valouse est comman-
dée par un prodigieux Homme de pier-
re qui semble s'adosser à la montagne
pour ne pas se mouiller les pieds dans
le lit du torrent. Au-dessus du lac d'An-
tre, qui vit une colonie romaine floris-
sante, s'érige un délicat et colossal pro.
fil de Vierge:, qui se détache, particu-
lièrement impressionnant au soleil cou-
chant. Des menhirs, de loin, ressem-
blent à des passants mystérieux arrêtés
dans les solitudes sauvages, égarés
dans les landes.
Partout, mêmes jeux de similitude,
même œuvre fantaisiste du temps et des
éléments. Dans les Carpathes, sur la
crête des Bucégi, se trouve un crapaud
monstrueux qui paraît prêt à sauter.
Sur les Jépi et le Caraïman, sont sculp-
tés des crocodiles géants et des sau-
riens préhistoriques.
LE MARQUIS DE FÉLIZAT
On va vendre un des plus beaux do-
maines de l'Est, celui de Félizat, avec
bois, prés, .vignes, fermes massives
comme des maisons fortes du moyen
âge, château : découronné, hélas 1 par
le temps rar les guerres. Non loin
de là se récoltait un petit vin que dai-
gnèrent apprécier Henri IV et la Belle
Gabrielle, Vous aurez ces souvenirs
fugitifs et ces réalités terrestres pour
moins de -cent mille francs. C'est don-
né. Et ceci, comme au conteur de la
chambrée, me rappelle une histoire.
Sous l'Empire second, un Félizat,
propriétaire de. bonne mine, portant
beau et un tantinet mystificateur, se
présenta dans la bonne société de Pa-
ris, introduit on ne sait par qui, et se
fit un soir annoncer dans un salon, où
trônait la brillante Metternich, sous ce
titre ronflant :
— Monsieur le Marquis de FélizaT 1
Chacun de s'enquérir, dans ce milieu
un peu mêlé du bonapartiste panaché,
sur ce marquis inconnu de l'armorial.
Lui, ne perdit pas contenance, insinua
que sa famille, un peu déchue, était
originaire d'Espagne et que s'il n'affi-
chait pas sa grandesse, c'était par sim-
ple modestie. Il dansa avec les plus
belles, fut fêté des plus fiers, disparut
comme un papiHtln. Morny demanda
des renseignements à l'un de ses pr/
fets qui lui révéla le secret de l'inno-
cente farce. L'impératrice fit une scène
à ce sujet à son auguste époux.
Le Passant.
LE PANGERMANISME
Les personnes qui considèrent le panger-
manisme comme un thème à remontoir
pour les chroniques d'été, pourront consta-
ter qu'elles font fausse Toute.
Le Congrès des Pangermanistes qui vient
de se clore à Dresde, est fécond en ensei-
gnements. Toutes les revendications des
pangermanistes ont été étalées au grand
jour. Les Allemands d'Autriche ont affiché
leurs aspirations comme les Allemands des
provinces baltiques russes.
Les flamingants d'Anvers se sont même
joints aux congressistes pour proclamer
leurs tendances pangermanistes et se ral-
lier à un.programme peu fait pour rassurer
les partisans de l'indépendance de la Bel-
gique.
C'est la première fois qu'on voit entrer
en lice les flamingants. On connaissait
leurs sympathies pour l'Allemagne, mais
on ne croyait pas que cette disposition d'es-
prit pût se concilier avec l'idée de l'absorp-
tion de la Belgique flamande par la Germa-
nie. Ce fait a une importance capitale, en
raison même de l'état d'âme qu'il révèle, et
dont, à Bruxelles même, on ne soupçon-
nait pas l'importance. Il
Les autres parties du programme panger-
maniiste lSont connuos. Les congressistes
dissimulent à peine leurs espérances et pa-
raissent attendre, de la mort de François-
Joseph, la réalisation de leurs désirs.
Ainsi que nous l'avons dit plusieurs fois,
la mort de l'empereur d'Autriche sera l'a-
vènement le plus considérable que l'ave-
nir nous réserve. Nous aurons à ce moment
besoin d'une diplomatie vigilante, active,
intelligente, ayant à sa disposition une ar-
mée puissante. Avec ces éléments, nous
pourrons jouer un rôle prépondérant dans
le drame que préparent à l'Europe les pan-
germanistes résolus à exécuter leurs pro-
jets, au détriment des Slaves, des Tchè.
ques, des Bataves et des Madgyars.
JEAN CLERVAL.
- +
LES COULISSES DES CHAMBRES
Le personnel de l'intérieur
On se souvient que M. Clemenceau, mi-
nistre de l'intérieur, a récemment régle-
menté la durée des heures du travail du
personnel de l'administration centrale de
son département. Un contrôle a notam-
ment été établi, au moyen de feuilles de
présence, afin de permettre au ministre de
s'assurer que ses prescriptions sont res-
pectées par tous les fonctionnaires.
Conformément aux instructions de M.
Clemenceau, ces feuilles de présence ont
circulé hier, à deux reprises différentes,
dans la matinée et dans la soirée, dans les
divers services du ministère.
Le matin, on a constaté l'absence d'un
employé qui avait prétexté, une maladie,
Ce prétexte a été reconnu inexact.
Dans l'après-midi, on a constaté qu'un
autre employé qui était venu le matin, ne
s'était pas présenté à son bureau.
Pour ce premier manquement" le minis-
tre a infligé aux deux employés en ques-
tion, un blâme formel.
On a en outre reconnu que les deux mé-
decins de service au ministère de l'inté-
rieur n'étaient pas à leur poste. Ils vont
être énergiquement rappelés à leurs de-
voirs.
Le ministère des finances
Le Journal officiel publie aujourd'hui le
décret aux termes duquel M. Barthou, mi-
nistre des travaux publics, des postes et
des télégraphes, est chargé par intérim du
ministère des finances pendant la durée de
l'absence de M, Poincaré, ministre des fi-
nances.
» i ■ ■ ■■■ ——
A CUBA
La Havane, 7 septembre.
Aujourd'hui, on a fait sauter à la dynamite
deux ponts sur le chemin de fer de l'Ouest-
Cubain, entre Pinar-del-Rio et San-Luc.
Les rebelles ont arrêté un détachement
envoyé pour réparer la ligne et on a dû
demander au gouvernement d'envoyer des
mitrailleuses pour protéger les ouvriers.
Le chef insurgé Pino Guerra s'efforce
d'augmenter rapidement le nombre de ses
troupes dans le district. Les habitants ne
croient pas que le gouvernement puisse
dompter l'insurrection.
Les chefs libéraux qui se trouvent en ce
moment à la Havane refusent de continuer
les conférences engagées sur la question de
la paix, le gouvernement ayant arrêté plu-
la paix, libéraux notables' au cours des négo-
sieurs
ciations. L'attitude des libéraux sert la cause
des insurgés et comme la loyauté de bien
des recrues gouvernementales est douteuse,
les chefs de plusieurs maisons de commer-
ce ont télégraphié à leurs maisons princi-
pales qu'ils ne croient pas le gouvernement
du président Palma capable de venir à
bout de l'insurrection.
Le gouvernement s'est décidé à offrir un
armis de dix jours, mais 1e général Pino
Guerra; rai a'tait savoir qu'il ne pourrait
accepter l'armistice qu'à une rooditiqn,
c'est que les élections de décembre dénier
seraient annulées.
(Voir en deuxième édition)
FEMME ÉGORGÉE
Un crime rue de la Folie-Méricourt -
CHRONIQUE
Le théâtre en Chine
Le théâtre chinois est essentiellement
historique ; il puise ses sujets dans
l'histoire ancienne du pays et dans ses
légendes. De jeunes auteurs, cependant,
sont romantiques et ont écrit récem-
ment des ouvrages débarrassés du mer-
veilleux obligatoire et dont les sujets
touchent parfois à l'actualité.
Il est formellement interdit de met-
tre en scène les faits et gestes des mem-
bres de la dynastie régnante.
Chaque pièce dure en moyenne vingt-
quatre heures ; les spectateurs, dans la
majeure partie des villes, doivent ap-
porter leur chandelle ; ils prennent leur
repas tout en écoutant la pièce avec
une attention qui ne faiblit à aucun
moment.
Il faut être Chinois pour vivre quel-
ques heures dans une salle de specta-
cle, l'odeur se dégageant des gens as-
semblés, des provisions apportées con-
sistant souvent en poissons secs, en
ails confits, sirop de cancrelas et autres
savoureuses choses ausst chères aux
estomacs des Célestes, a vite fait d'en
chasser les Européens..
Les acteurs ne parlent pas, ils crient
d'une voix de fausset pouvant seule do-
miner le bruit d'un orchestre bruyant,
épouvantable, où dominent le gong et
les cymbales.
Le public n'applaudit jamais ; il y
j ! a, dans un angle de la scène, un hom-
me tapant sur une. sorte de grosse cais-
se qui manifeste à lui seul l'impression
de toute la salle.
Quand il trouve que le dialogue ou
le jeu de l'acteur est bien, il frappe un
coup ; s'il juge bon de donner la note
très bien, il en frappe deux.
A certains moments, les bien et très
bien se succèdent avec tant d'enthou-
siasme que l'on n'entend plus que les
coups de grosse caisse.
Cet homme, qui appartient au théâ-
tre, représente la classique claque de
nos salles de spectacle ; il est armé pour
faire, à lui seul, autant de bruit que la
meilleure équipe de romains.
La mise en scène, les décors, les ac-
cessoires sont autant de choses incon-
nues dans le théâtre chinois : des pan-
cartes et des drapeaux remplacent tout
cela.
Deux drapeaux tenus par deux figu-
rants représentent un magnifique pa-
lais ; une pancarte au bout d'un bam-
bou indique qu'à cet endroit il y a une
rivière, un parc, un jardin, etc.
Une chaise, munie d'une pancarte,
figure, selon les 'besoins, une monta-
gne, un cheval, une maison.
La foudre est représentée par un gros
boulet et fonte que deux hommes se
renvoient d'un bout à l'autre du devant
de la scène, sous les yeux du public.
L'imagination du metteur en scène
a atteint son plus grand succès dans le
procédé employé pour simuler les
éclairs. Jugez-en plutôt :
Un des hommes, qui renverra tout à
l'heure, le boulet donnant l'illusion du
tonnerre, a devant lui une grosse lam-
pe, dont la mèche énorme brûle à l'air ;
au moment voulu, il emplit sa bouche
de pétrole et souffle ce liquide au-des-
sur de la lampe, ce qui produit sur la
scène d'immenses flammes jetant une
grande clarté.
Notre Antoine n'aurait pas trouvé ce
procédé si commode et combien pré-
cieux pour atteindre, à peu de frais, à
la réalité I
, Pour figurer la neige ou la pluie, c'est
encore bien plus facile : un gamin ar-
rive sur la scène, il est porteur d'une
pancarte sur laquelle est écrit : il nei-
ge, ou il pleut. S'il neige, les acteurs
se mettent à trembler ; s'il pleut, ils ac-
célèrent le pas, et tant que la pancarte
n'est pas remportée dans les coulisses,
ils continuent à jouer en marchant à
pas précipités.
Les costumes des acteurs sont tou-
jours très riches : les hommes ont un
masque sur la figure ou une très lon-
gue barbe ; seuls les acteurs comiques
gardent une figure naturelle-
Je dois convenir que certains obtien-
nent, par des procédés peu compliqués,
de grands succès d'hilarité.
J'emprunte à l'Echo de Chine, jour-
nal publié à Shanghar l'analyse d'une
pièce qui se joue avec beaucoup de suc-
cès sur toutes les scènes du Céleste-
Empire.
Le personnage au riche manteau est
l'Empereur qui vivait il y a mille ans.
La femme au visage peint en vert est
sa femme — le fait qu'elle a le visage
peint en vert montre qu'elle est laide.
Le gros homme avec des taches blan-
ches autour de la bouche est un bouf-
fon — la peinturé blanche suffit à in-
diquer le caractère plaisant d'un ac-
teur. - &a fille est fort belle et chante
parfaitement et constamment. L'Empe-
reur est fascine et sa laide épouse en
devient encore plus verte de jalousie.
Alors, elle prie une fée de la rendre
belle. La fée lui ordonne de gravir une
haute montagne. On apporte sur la scè-
ne une chaise avec une étiquette por-
tant : « Ceci est une haute montagne ».
La verte Impératrice y monte et fait
des gestes et contorsions pour démon-
trer qu'elle est épuisée par l'ascension i
Elle disparaît derrière un rideau et ra
vient la figure peinte en rose et let
joues écarlates. Le charme a opéré.
elle est redevenue balle.
Lorsqu'elle revient au palais, person-
ne ne la reconnaît et la fille du bouf..
fon, qui a pris sa place, l'exile dans un
pays lointain et glacial. Elle va dans
un coin de la scène, où un tableau indi.
que qu'elle est dans un pays glacial*
Elle y chante pour gagner sa vie. A ce
moment, les cymbales font rage.
Ayant chanté, elle tend les bras et
agite son poing en l'air, ce qui veut dire
qu'elle frappe à une porte. Un homme,
qui est en face d'elle, mais qui en est
censé séparé par une porte invisible,
ouvre ceitte porte et elle sort de son pays
glacial — le tableau ayant été enlevé.
Enfin, elle est rendue à l'Empereur,
qui l'aime plus que jamais, et punit sa
rivale en la condamnant à des beso-
gnes domestiques, consistant, à ce que
nous voyons, à courir autour de la scè-
ne en trainant deux drapeaux, ce qui
veut dire qu'elle traîne un pousse-
pousse.
Cette pitoyable intrigue se déroule
dans le calme le plus parfait, en vingt-
quatre heures d'horloge.
A Pakoï, un Français de passage pé-
nétra, un soir, dans le théâtre où se
jouait, paraît-il, une pièce remportant
un énorme succès.
Notre compatriote remarqua parmt
les acteurs un homme coiffé d'un képi
et affublé d'une paire d'épaulettes de
l'infanterie de marine.
Ce personnage recevait, sans bron-
cher, les coups que lui portaient les
autres artistes ; ce qui amusait beau-
coup les spectateurs.
Ayant demandé à l'interprète, l'ac-
compagnant, ce que signifiait cet hom-
me si imperturbablement calme sous
les coups, le Céleste lui répondit que
l'on jouait un épisode de la guerre de
Chine, où les Français n'avaient pas le
plus beau rôle.
Dans le pays de la vieille Thou-Shi,
c'était logique. Mais notre Français
avait le bonnet près de l'oreille ; il gra-
vit les marches conduisant à la scène
et, une fois là, se mit à administrer une
sévère correction aux Chinois ridicule
sant l'armée française. Pendant qu'il
frappait à tour de bras, l'homme, char-
gé de manifester l'enthousiasme des
spectateurs, répétait sur sa peau d'âne
les très bien t très bien t -
La représentation prit fin sur cette
esclandre. Mais le succès de la pièce
ne s'en affirma que davantage, et les
Célestes eurent le courage de la repré-
senter à Cholon.
Cholon est une ville essentiellement
chinoise de cent cinquante mille habi-
tants, située aux portes de Saigon.
L'administration française prit mal
cette 'forfanterie, les artistes furent ex-
pulsés. et le théâtre, qui leur avait don-
né asile, fut fermé.
Jean du Pnom.
£
UIIE ESCADRE JAPONAISE EN ANGLETERRE
, Londres, 8 septembre.
On mande de Tokio au Daily Telegraph,
le 7 septembre :
On assure que Tes autorités navales ont
fait entrer dans le prochain budget un
crédit destiné à l'envoi d'une escadre ja-
ponaise en Angleterre.
L'escadre passerait à l'aller par le Cap
et retournerait au Japon en visitant l'Amé-
rique.
—.■
LES MEHtS DE M
La situation politique
Saint-Pétersbourg, 8 septembre.
En ce moment, accalmie générale. Les
partis politiques, démoralisés par la tour-
mente, en profitent pour se regrouper. Les
cadets, les octobristes, les pacifistes orga-
nisent des congrès auxquels M. Stolypine
ne met aucun obstacle.
Les intentions libérales1 exprimées par M.
Stolypine lui valent la reconnaissance et
l'admiration. On comprend que la création
de conseils de guerre pour juger les délita
lui est imposée.
Cette mesure pourtant anéantit presque
entièrement l'impression heureu-se produite
par la déclaration ministérielle.
Les paysans restent généralement cal-
mes. Beauèoup profitent de la panique qui
règne parmi les propriétaires pour acheter
des terres à bas prix.
Les réformes
Londres, 8 septembre.
Plusieurs journaux publient la dépêche
suivante de Saint-Pétersbourg, 7 septem-
bre :
On annonoe, de très bonne source, qu'un
décret impérial contenant le détail des ré-
formes sera publié au mois d'octobre.
Saint-Pétersbourg, 8 septembre.
Au conseil de cabinet tenu hier, les règle-
ments définitifs sur la vente des terres aux
paysans ont été élaborés.
Le général Trépoff
Londres, 8 septembre.
Le correspondant du Daily Mail à Saint-
Pétersbourg télégraphie le 7 septembre :
Le général Trépoff part demain pour Ba-
den-Baden. Il est inexact qu'il soit en die-
grâce ; il souffre d'une angine de poitrine,
de douleurs et d'abcès aux jambes.
Les médecins lui ont ordonné un change
ment d'air.
Le poste de gouverneur du Paîtîfe serf
probablement confié au général Dedouline.
Désordres et attentats
Bakou, 8 septembre.
La grève politique a échoué. Après uni
courte cessation, le travail a repris partout
Sébastopol, 8 septembre:
Un officier de gendarmerie a été assassiM
hier soir, dans un tramway, par deux hom-
mes vêtus comme des ouvriers,
Les malfaiteurs se sont échappés. :
Loatfres, 8 septembre.
Le Standard dément qpe son eormptf»
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE
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ADMINISTRATION : 14, RUE OU MAIL. - TELEPHONE 108.80
Adresser lettres et mandats à l'Administrateur
C'est avec juste raison que l'on a signa-
lé à maintes reprises et que l'on signale
- - encore tous les jours l'état lamentable de
nos bureaux de poste. Il y a deux ans, à
la suite d'une active et spirituelle cam-
pgne iie presse, quelques mesures d'hy-
giène avaient été prises. M. Bérard, tou-
jours animé d'excellentes intentions, et
toujours prêt à donner satisfaction aux
réclamations très justifiées qu'à ce sujet
on lui adresse, avait essayé de remédier
à cet état de chose : quelques devantures
furent repeintes ; quelques carreaux fu-
rent nettoyés ; pendant un certain
temps, on trouva de l'encre, et non de
la boue, des plumes, et l'on risqua moins
de laisser, gravées dans la poussière ac-
cumulée sur les tables, les traces de son
passage.
Le manque de crédit, l'inertie de la
haute administration, ont paralysé cette
action utile. -
Aujourd'hui, nous sommes encore ré-
duits à constater là malpropreté des bu-
reaux.
On ne saurait faire retomber la res-
ponsabilité de cette situation, ni sur les
receveurs, ni sur leurs auxiliaires, dont
la tâche n'est pas de balayer le sol, ni
nettoyer les murs, mais de répondre au
public et de distribuer les lettres. Ce ne
sont pas eux les coupables. Il doit bien
exister, rue de Grenelle, des fonction-
naires chargés d'étudier ces questions ?
Peut-être ne leur apparaissent-elles pas
comme intéressantes et dignes de fixer
leur attention : si cela est, s'ils
croient que nos plaintes sont chi-
mériques, que ce sont des pré-
textes à réclamation, que le temps
prescrira, qu'ils lisent ce fait-divers que
: nous trouvons dans les journaux. Mieux
que tous les discours et tous les écrits, il
leur indiquera le bien-fondé de nos do-
léances, et surtout combien il est urgent
de solutionner le problème de la salu-
brité des locaux administratifs. Nous le
transcrivons tel que nous le lisons : « Un
facteur des postes et télégraphes, Char-
les Angot, étant mort subitement, il y a
trois jours dans le bureau central du
quinzième, M. Coeuille, commissaire de
police, a fait surseoir à l'inhumation et
envoyé le corps à la Morgue, l'enquête
ayant fait soupçonner que certaines dis-
r positions vicieusesdes locaux pourraient
avoir été, directement ou non, la cause
de cette mort. »
Le résultat de l'autopsie nous fera
connaître la vérité : nous saurons si ce
malheureux était atteint d'une affection
que les siens ignoraient, mais, en admet-
tant même cette hypothèse si favorable
à l'administration, il -n'en demeure pas
moins qu'il existe dans ce bureau « des
dispositions vicieuses ►> et que la respon-
sabilité du sous-secrétariat est engagée.
Comme ce bureau ne se distingue pas
des autres, il reste acquis que tous cons-
tituent un danger pour les agents qui les
fréquent. Si ce décès pouvait servir
de leçon, et si une réforme pouvait être
apportée, mais.
***
Ce qui doit nous surprendre, c'est que
de pareils accidents ne se produisent pas
tous les jours ; aucun souci de l'hygiène
ne préside à l'agencement du local ; les
installations sont défectueuses, pas
d'air, pas de lumière, les facteurs pour
l'opération du tri sont empilés les uns
sur les autres. Nos bureaux de poste
sont des foyers de tuberculose. L'Etat
qui fait — et il a raison — tant de re-
commandations aux simples citoyens
pour éviter la propagationde ce terrible
fléau, agirait sagement en prenant, dans
lés établissements qui lui appartiennent,
quelques précautions. Il pourrait prêcher
d'exemple.
Si les ressources font défaut, le mi-
nistre compétent n'a qu'à en demander
le Parlement ne les lui refusera pas,d'au-
tant plus que les budgets postes rap-
portent assez au Trésor, et que l'on
pourrait même trouver des économies
correspondantes. Mais encore ne les
trouverait-on pas, que l'on a quand
même le devoir de remédier à cette si-
tuation. Elle n'est pas particulière à
Paris, d'ailleurs. La province n'a rien à
nous envier sous ce rapport. Si M. Bé-
rard avait une journée à perdre — et il
ne la perdrait pas — je l'engage vive-
ment à venir à Boulogne-sur-mer, visi-
ter le bureau de poste, que j'ai eu le
plaisir de voir, il y a quelques jours, et
qui m'a donné une hauté opinion de
l'administration des postes française. Il
est honteux qu'une ville aussi fréquentée
: que Boulogne, qui compte à cette époque
environ 70,000 habItants, possède un
local aussi répugnant. Il faut être du
pays pour le trouver sans guide, car on
fa placé dans une petite rue, assez loin
du centre de la ville.
'.,
L'extérieur est d'une propreté douteu-
se, la pluie seule est chargée du net-
toyage. - -
Quant à l'intérieur, il est tout simple-
ment repoussant. Il fut jadis peint en
vert. Aujourd'hui, il est d'une couleur
innomable. Jamais le sol ne fut balayé,
ni lès carreaux nettoyés. Les employés
sont derrière des murs ; ils communi-
quent avec le public par des guichets
analogues à ceux que nous voyons dans
les prisons. Pour ces malheureux, c'est
le régime cellulaire. Deux tables crasseu-
ses et trois ou quatre chaises préhisto-
riques constituent le mobilier de ce bu-
reau. Lorsqu'il y a vingt personnes, on
ne peut plus ni entrer ni sortr. Les étran-
gers, si nombreux dans cette cité, doivent
avoir une idée flatteuse de notre adminis-
tration. Ce que je dis pour ce bureau
pourrait être dit de pas mal d'autres.
.**
Quelles différences, comme construc-
tion, comme aménagement, comme com-
modité, avec les bureaux d'Anvers, de
Barcelone, de Naples, de Rome, de Lon-
dres.. Les faire visiter à quelques hauts
fonctionnaires serait chose fort bonne
pour nous. Ils pourraient faire quelques
comparaisons qui ne seraient pas en no-
tre honneur, mais qui nous seraient uti-
les. Qu'ils examinent également nos wa-
gons-postes. On dirait, en vérité, qu'ils
remontent à la plus haute antiquité, et
que leur place est tout indiquée pour
quelque musée.
Les ambulants se plaignent de ces ca-
banons roulants, ils ne se plaignent pas
assez. Leur service est assez pénible
pour que l'administration leur donne au
moins quelque confort..
Nous voulons espérer que nos plain-
tes seront un jour écoutées et comprises.
L'administration oppose à toutes ces ré-
clamations la force d'inertie, persuadée
qu'elle est, que le temps arrange tout,
que les événements se modifient d'eux-
mêmes, que la colère s'use et que les con-
tribuables finissent toujours par com-
prendre que tout est pour le mieux dans
le meilleur des mondes administrants ;
mais il ne faudrait cependant pas ou-
blier que nous sommes les payeurs et que
l'on pourrait peut-être tenir compte de
nos désirs. La démocratie n'est pas tail-
lable et corvéable à merci.
Fernand Cervais.
LES ON-DIT
LA DOCTRINE DE MUNROE
Nous avons eu depuis quel-
que temps, à propos du Con-
grès panaméricain et dans
d'autres circonstances, à mon-
trer comment la doctrine de
Monroë, d'abord limitée aux
seuls Etats-Unis, s'étendant aux Répu-
bliques sud-américaines. -
Par suite, les créances de nos natio-
naux, vis-à-vis des Etats des Républi-
ques de l'Amérique du Sud semblaient
quelque peu compromises. Il fallait —»
et nous l'avons expliqué — ou que les
peuples renonçassent à soutenir les inté-
rêts de leurs nationaux, en conflit avec
les débiteurs parfois peu consciencieux
du Nouveau-Monde ; ou qu'ils s'expo-
sassent à une affaire avec les Etats-
Unis.
Les Américains du Nord ont, paraît-
il compris eux-mêmes ce qu'il y avait
d'inacceptable dans ces conséquences de
leur doctrine.
Un écrivain new-yorkais, M. Harold
Boloe, écrit dans l'Appleton's Magazine
que « la doctrine de Monroë n'est plus
aujourd'hui un principe moral, mais une
question commerciale. » Elle comprend
notamment, ajoute notre confrère M.
Jean Longuet, l'obligation pour les
Etats-Unis de prendre la responsabilité
de la dette d'un milliard des Républi-
ques sud-américaines en Euoper.
C'est alors une chose à discuter. En
tant que principe moral, la doctrine de
Monroë blesse bien des préjugés aux-
quels nous avons la faiblesse de rester
attachés. En tant que question commer-
ciale, elle demande à être envisagée
d'une manière plus positive et terre-à-
terre.
Si les Etats-Unis se substituent, pour
la garantie des créances aux Républi-
ques sud-américaines, il est permis d'a-
voir confiance dans des endosseurs dont
le crédit est l'un des plus sûrs du monde.
Faites votre politique comme vous
l'entendrez ; mais commencez par payer
vos dettes. -,
LA GUERRE DE FS70
Racontée par le a Rappel »
Numéro du 11 septembre 1870
« En rentrant à Paris, ma première
parole est : Vive Paris 1 vive à jamais
ce foyer de civilisation. Vouloir l'inves-
tir, c'est prétendre investir la civilisa-
tion elle-même? Qu'avons-nous à crain-
dre ? l'humanité entière est avec nous.
Union, union de tous, avec le gouver-
nement de la défense natiçnale.
« Après ce long esclavage, la France
est rentrée dans la liberté, elle s'enve-
loppe du drapeau de la démocratie ré-
publicaine, c'est le drapeau de tous les
pluples. Laterre-a encore une fois e-
connu en elle le soldat du droit.
EDGAR QUINET. *
L'Union «. toutes les haines sont,
pour un instant oubliées. Et il ne reste
plus dans nos cœurs que ce sentiment:
de fraternité sublime qui nous porte à
nous donner la main, tous, sans dis-
tinction de parti, d'opinion, de nuan-
ces, la liberté menacée et la France en
péril. Heure vraiment superbe, toutes
les voix s'unissent pour crier : Vive la
nation !. » EDOUARD LOCKROY.
Convocation de la Constituante. -
« Le gouvernement de La défense natio-
nale : convoque les collèges électoraux
pour le 16 octobre, à l'effet de nommer
une assemblée constituante. C'est là
une décision généreuse et forte qui lui
fait, certes, grand honneur. » PAUL
MEURICE.
La guerre. — Le maire de la Ferté-
sous-Jouarre informe officiellement le
maire de Coulommiers qu'il s'attend à
voir arriver les Prussiens, ce soir, 9
septembre. »
« Le commandant de la place de
Langres informe que les mobiles ont
pris 100 prussiens, des armes, des che-
vaux, une calèche. »
Défense de Paris. — « Le Syndicat
des constructeurs mécaniciens de Paris
et la Société des Ingénieurs civils se
sont offerts au gouvernement pour lui
fournir des mitrailleuses. L'industrie
privée pourra fabriquer ces engins
avec une grande rapidité. »
« A partir de demain, samedi 10 sep-
tembre, à midi, au pied de la statue de
la ville de Strasbourg, place de la Con-
corde, un registre sera ouvert, sur le-
quel les citoyens sont invités à venir
apposer leurs signatures. On lira sur la
première page : « Les Parisiens, hon-
neur à nos frères défenseurs de Stras-
bourg et à leur brave général Uhrich.
Des citoyens de bonne volonté sont in-
vités "à se relayer deux par deux, pour
garder ce registre d'honneur. u LissA-
GARAY.
, Ça. et là. — « Les représentations du
Théâtre français ont cessé. La Comédie
française, à qui les circonstances pré-
sentes montrent un devoir nouveau, a
conçu la pensée de transformer son
foyer en ambulance.» Signé : MADE-
LEINE BROHAN, MARIE FAVART, CLÉMEN-
TINE JOUASSIN, EDILE RIQUIER. »
cc On sait qu'une grande partie du
Jardin du Luxembourg vient d'être
transformée en parcs à bestiaux, et
qu'on y a accumulé d'innombrables
moutons, destinés à l'alimentation de
Paris, en cas de siège. Les boulevards
d'Enfer et Saint-Jacques ont subi la
même transformation. Ils sont déjà en-
tourés de palissades en planches. »
« Ordre est donné aux habitants de
la zone militaire de vider les locaux
qu'ils occupest. » GÉNÉRAL TROCHU.
UN AUTO EN 1844
Sommes-nous assez fiars cle ce ma-
gnifique mouvement automobiliste qui
lance la France dans une frénésie de
vitesse, en tête des nations civilisées !
Eh bien ! mais, ce n'est peut-être pas
une nouveauté, l'industrie automobile,
et, en cherchant un peu, on la rattache-
'rait à la préhistoire 1
Sans aller si loin, il y avait déjà, à
Paris, des autos, ou quelque chose
d'approchant, soixante ans avant nos
circuits.
Vers la fin de décembre 1844, en
effet, le public remarquait, à la barrière
de Montparnasse, une petite voiture
« entièrement construite en fer, menée
par deux hommes et roulant avec une
grande rapidité sans le secours de che-
vaux. Cet appareil singulier se compo-
sait d'un train posé sur trois roues en
fer, dont la première servait à donner
la direction. » Pas d'essence ni ae pé-
trole, la traction était assurée par deux
hommes assis dos à dos et tirant à hue
et à dia. C'était à la fois singulier et
économique. L'engrenage correspon-
dant aux moyeux permettait d'obtenir
le mouvement sans déployer trop de
force.
L'inventeur de la machine était un
serrurier du quartier Montparnasse qui
arrivait à couvrir de longues distances
avec son auto avant la lettre.
LES FIGURES DE PIERRE NATURELLES
La nature fait de l'art, comme M.
Jourdain faisait de la prose. En quel-
que coin de la France que vous ayez été
amenés à vous abriter contre les ri-
gueurs, de la canicule, vous avez cer-
tainement remarqué des: rochers d'é-
trange'forme, qu'on jurerait sculptés
de main d'homme-
La vallée de la Valouse est comman-
dée par un prodigieux Homme de pier-
re qui semble s'adosser à la montagne
pour ne pas se mouiller les pieds dans
le lit du torrent. Au-dessus du lac d'An-
tre, qui vit une colonie romaine floris-
sante, s'érige un délicat et colossal pro.
fil de Vierge:, qui se détache, particu-
lièrement impressionnant au soleil cou-
chant. Des menhirs, de loin, ressem-
blent à des passants mystérieux arrêtés
dans les solitudes sauvages, égarés
dans les landes.
Partout, mêmes jeux de similitude,
même œuvre fantaisiste du temps et des
éléments. Dans les Carpathes, sur la
crête des Bucégi, se trouve un crapaud
monstrueux qui paraît prêt à sauter.
Sur les Jépi et le Caraïman, sont sculp-
tés des crocodiles géants et des sau-
riens préhistoriques.
LE MARQUIS DE FÉLIZAT
On va vendre un des plus beaux do-
maines de l'Est, celui de Félizat, avec
bois, prés, .vignes, fermes massives
comme des maisons fortes du moyen
âge, château : découronné, hélas 1 par
le temps rar les guerres. Non loin
de là se récoltait un petit vin que dai-
gnèrent apprécier Henri IV et la Belle
Gabrielle, Vous aurez ces souvenirs
fugitifs et ces réalités terrestres pour
moins de -cent mille francs. C'est don-
né. Et ceci, comme au conteur de la
chambrée, me rappelle une histoire.
Sous l'Empire second, un Félizat,
propriétaire de. bonne mine, portant
beau et un tantinet mystificateur, se
présenta dans la bonne société de Pa-
ris, introduit on ne sait par qui, et se
fit un soir annoncer dans un salon, où
trônait la brillante Metternich, sous ce
titre ronflant :
— Monsieur le Marquis de FélizaT 1
Chacun de s'enquérir, dans ce milieu
un peu mêlé du bonapartiste panaché,
sur ce marquis inconnu de l'armorial.
Lui, ne perdit pas contenance, insinua
que sa famille, un peu déchue, était
originaire d'Espagne et que s'il n'affi-
chait pas sa grandesse, c'était par sim-
ple modestie. Il dansa avec les plus
belles, fut fêté des plus fiers, disparut
comme un papiHtln. Morny demanda
des renseignements à l'un de ses pr/
fets qui lui révéla le secret de l'inno-
cente farce. L'impératrice fit une scène
à ce sujet à son auguste époux.
Le Passant.
LE PANGERMANISME
Les personnes qui considèrent le panger-
manisme comme un thème à remontoir
pour les chroniques d'été, pourront consta-
ter qu'elles font fausse Toute.
Le Congrès des Pangermanistes qui vient
de se clore à Dresde, est fécond en ensei-
gnements. Toutes les revendications des
pangermanistes ont été étalées au grand
jour. Les Allemands d'Autriche ont affiché
leurs aspirations comme les Allemands des
provinces baltiques russes.
Les flamingants d'Anvers se sont même
joints aux congressistes pour proclamer
leurs tendances pangermanistes et se ral-
lier à un.programme peu fait pour rassurer
les partisans de l'indépendance de la Bel-
gique.
C'est la première fois qu'on voit entrer
en lice les flamingants. On connaissait
leurs sympathies pour l'Allemagne, mais
on ne croyait pas que cette disposition d'es-
prit pût se concilier avec l'idée de l'absorp-
tion de la Belgique flamande par la Germa-
nie. Ce fait a une importance capitale, en
raison même de l'état d'âme qu'il révèle, et
dont, à Bruxelles même, on ne soupçon-
nait pas l'importance. Il
Les autres parties du programme panger-
maniiste lSont connuos. Les congressistes
dissimulent à peine leurs espérances et pa-
raissent attendre, de la mort de François-
Joseph, la réalisation de leurs désirs.
Ainsi que nous l'avons dit plusieurs fois,
la mort de l'empereur d'Autriche sera l'a-
vènement le plus considérable que l'ave-
nir nous réserve. Nous aurons à ce moment
besoin d'une diplomatie vigilante, active,
intelligente, ayant à sa disposition une ar-
mée puissante. Avec ces éléments, nous
pourrons jouer un rôle prépondérant dans
le drame que préparent à l'Europe les pan-
germanistes résolus à exécuter leurs pro-
jets, au détriment des Slaves, des Tchè.
ques, des Bataves et des Madgyars.
JEAN CLERVAL.
- +
LES COULISSES DES CHAMBRES
Le personnel de l'intérieur
On se souvient que M. Clemenceau, mi-
nistre de l'intérieur, a récemment régle-
menté la durée des heures du travail du
personnel de l'administration centrale de
son département. Un contrôle a notam-
ment été établi, au moyen de feuilles de
présence, afin de permettre au ministre de
s'assurer que ses prescriptions sont res-
pectées par tous les fonctionnaires.
Conformément aux instructions de M.
Clemenceau, ces feuilles de présence ont
circulé hier, à deux reprises différentes,
dans la matinée et dans la soirée, dans les
divers services du ministère.
Le matin, on a constaté l'absence d'un
employé qui avait prétexté, une maladie,
Ce prétexte a été reconnu inexact.
Dans l'après-midi, on a constaté qu'un
autre employé qui était venu le matin, ne
s'était pas présenté à son bureau.
Pour ce premier manquement" le minis-
tre a infligé aux deux employés en ques-
tion, un blâme formel.
On a en outre reconnu que les deux mé-
decins de service au ministère de l'inté-
rieur n'étaient pas à leur poste. Ils vont
être énergiquement rappelés à leurs de-
voirs.
Le ministère des finances
Le Journal officiel publie aujourd'hui le
décret aux termes duquel M. Barthou, mi-
nistre des travaux publics, des postes et
des télégraphes, est chargé par intérim du
ministère des finances pendant la durée de
l'absence de M, Poincaré, ministre des fi-
nances.
» i ■ ■ ■■■ ——
A CUBA
La Havane, 7 septembre.
Aujourd'hui, on a fait sauter à la dynamite
deux ponts sur le chemin de fer de l'Ouest-
Cubain, entre Pinar-del-Rio et San-Luc.
Les rebelles ont arrêté un détachement
envoyé pour réparer la ligne et on a dû
demander au gouvernement d'envoyer des
mitrailleuses pour protéger les ouvriers.
Le chef insurgé Pino Guerra s'efforce
d'augmenter rapidement le nombre de ses
troupes dans le district. Les habitants ne
croient pas que le gouvernement puisse
dompter l'insurrection.
Les chefs libéraux qui se trouvent en ce
moment à la Havane refusent de continuer
les conférences engagées sur la question de
la paix, le gouvernement ayant arrêté plu-
la paix, libéraux notables' au cours des négo-
sieurs
ciations. L'attitude des libéraux sert la cause
des insurgés et comme la loyauté de bien
des recrues gouvernementales est douteuse,
les chefs de plusieurs maisons de commer-
ce ont télégraphié à leurs maisons princi-
pales qu'ils ne croient pas le gouvernement
du président Palma capable de venir à
bout de l'insurrection.
Le gouvernement s'est décidé à offrir un
armis de dix jours, mais 1e général Pino
Guerra; rai a'tait savoir qu'il ne pourrait
accepter l'armistice qu'à une rooditiqn,
c'est que les élections de décembre dénier
seraient annulées.
(Voir en deuxième édition)
FEMME ÉGORGÉE
Un crime rue de la Folie-Méricourt -
CHRONIQUE
Le théâtre en Chine
Le théâtre chinois est essentiellement
historique ; il puise ses sujets dans
l'histoire ancienne du pays et dans ses
légendes. De jeunes auteurs, cependant,
sont romantiques et ont écrit récem-
ment des ouvrages débarrassés du mer-
veilleux obligatoire et dont les sujets
touchent parfois à l'actualité.
Il est formellement interdit de met-
tre en scène les faits et gestes des mem-
bres de la dynastie régnante.
Chaque pièce dure en moyenne vingt-
quatre heures ; les spectateurs, dans la
majeure partie des villes, doivent ap-
porter leur chandelle ; ils prennent leur
repas tout en écoutant la pièce avec
une attention qui ne faiblit à aucun
moment.
Il faut être Chinois pour vivre quel-
ques heures dans une salle de specta-
cle, l'odeur se dégageant des gens as-
semblés, des provisions apportées con-
sistant souvent en poissons secs, en
ails confits, sirop de cancrelas et autres
savoureuses choses ausst chères aux
estomacs des Célestes, a vite fait d'en
chasser les Européens..
Les acteurs ne parlent pas, ils crient
d'une voix de fausset pouvant seule do-
miner le bruit d'un orchestre bruyant,
épouvantable, où dominent le gong et
les cymbales.
Le public n'applaudit jamais ; il y
j ! a, dans un angle de la scène, un hom-
me tapant sur une. sorte de grosse cais-
se qui manifeste à lui seul l'impression
de toute la salle.
Quand il trouve que le dialogue ou
le jeu de l'acteur est bien, il frappe un
coup ; s'il juge bon de donner la note
très bien, il en frappe deux.
A certains moments, les bien et très
bien se succèdent avec tant d'enthou-
siasme que l'on n'entend plus que les
coups de grosse caisse.
Cet homme, qui appartient au théâ-
tre, représente la classique claque de
nos salles de spectacle ; il est armé pour
faire, à lui seul, autant de bruit que la
meilleure équipe de romains.
La mise en scène, les décors, les ac-
cessoires sont autant de choses incon-
nues dans le théâtre chinois : des pan-
cartes et des drapeaux remplacent tout
cela.
Deux drapeaux tenus par deux figu-
rants représentent un magnifique pa-
lais ; une pancarte au bout d'un bam-
bou indique qu'à cet endroit il y a une
rivière, un parc, un jardin, etc.
Une chaise, munie d'une pancarte,
figure, selon les 'besoins, une monta-
gne, un cheval, une maison.
La foudre est représentée par un gros
boulet et fonte que deux hommes se
renvoient d'un bout à l'autre du devant
de la scène, sous les yeux du public.
L'imagination du metteur en scène
a atteint son plus grand succès dans le
procédé employé pour simuler les
éclairs. Jugez-en plutôt :
Un des hommes, qui renverra tout à
l'heure, le boulet donnant l'illusion du
tonnerre, a devant lui une grosse lam-
pe, dont la mèche énorme brûle à l'air ;
au moment voulu, il emplit sa bouche
de pétrole et souffle ce liquide au-des-
sur de la lampe, ce qui produit sur la
scène d'immenses flammes jetant une
grande clarté.
Notre Antoine n'aurait pas trouvé ce
procédé si commode et combien pré-
cieux pour atteindre, à peu de frais, à
la réalité I
, Pour figurer la neige ou la pluie, c'est
encore bien plus facile : un gamin ar-
rive sur la scène, il est porteur d'une
pancarte sur laquelle est écrit : il nei-
ge, ou il pleut. S'il neige, les acteurs
se mettent à trembler ; s'il pleut, ils ac-
célèrent le pas, et tant que la pancarte
n'est pas remportée dans les coulisses,
ils continuent à jouer en marchant à
pas précipités.
Les costumes des acteurs sont tou-
jours très riches : les hommes ont un
masque sur la figure ou une très lon-
gue barbe ; seuls les acteurs comiques
gardent une figure naturelle-
Je dois convenir que certains obtien-
nent, par des procédés peu compliqués,
de grands succès d'hilarité.
J'emprunte à l'Echo de Chine, jour-
nal publié à Shanghar l'analyse d'une
pièce qui se joue avec beaucoup de suc-
cès sur toutes les scènes du Céleste-
Empire.
Le personnage au riche manteau est
l'Empereur qui vivait il y a mille ans.
La femme au visage peint en vert est
sa femme — le fait qu'elle a le visage
peint en vert montre qu'elle est laide.
Le gros homme avec des taches blan-
ches autour de la bouche est un bouf-
fon — la peinturé blanche suffit à in-
diquer le caractère plaisant d'un ac-
teur. - &a fille est fort belle et chante
parfaitement et constamment. L'Empe-
reur est fascine et sa laide épouse en
devient encore plus verte de jalousie.
Alors, elle prie une fée de la rendre
belle. La fée lui ordonne de gravir une
haute montagne. On apporte sur la scè-
ne une chaise avec une étiquette por-
tant : « Ceci est une haute montagne ».
La verte Impératrice y monte et fait
des gestes et contorsions pour démon-
trer qu'elle est épuisée par l'ascension i
Elle disparaît derrière un rideau et ra
vient la figure peinte en rose et let
joues écarlates. Le charme a opéré.
elle est redevenue balle.
Lorsqu'elle revient au palais, person-
ne ne la reconnaît et la fille du bouf..
fon, qui a pris sa place, l'exile dans un
pays lointain et glacial. Elle va dans
un coin de la scène, où un tableau indi.
que qu'elle est dans un pays glacial*
Elle y chante pour gagner sa vie. A ce
moment, les cymbales font rage.
Ayant chanté, elle tend les bras et
agite son poing en l'air, ce qui veut dire
qu'elle frappe à une porte. Un homme,
qui est en face d'elle, mais qui en est
censé séparé par une porte invisible,
ouvre ceitte porte et elle sort de son pays
glacial — le tableau ayant été enlevé.
Enfin, elle est rendue à l'Empereur,
qui l'aime plus que jamais, et punit sa
rivale en la condamnant à des beso-
gnes domestiques, consistant, à ce que
nous voyons, à courir autour de la scè-
ne en trainant deux drapeaux, ce qui
veut dire qu'elle traîne un pousse-
pousse.
Cette pitoyable intrigue se déroule
dans le calme le plus parfait, en vingt-
quatre heures d'horloge.
A Pakoï, un Français de passage pé-
nétra, un soir, dans le théâtre où se
jouait, paraît-il, une pièce remportant
un énorme succès.
Notre compatriote remarqua parmt
les acteurs un homme coiffé d'un képi
et affublé d'une paire d'épaulettes de
l'infanterie de marine.
Ce personnage recevait, sans bron-
cher, les coups que lui portaient les
autres artistes ; ce qui amusait beau-
coup les spectateurs.
Ayant demandé à l'interprète, l'ac-
compagnant, ce que signifiait cet hom-
me si imperturbablement calme sous
les coups, le Céleste lui répondit que
l'on jouait un épisode de la guerre de
Chine, où les Français n'avaient pas le
plus beau rôle.
Dans le pays de la vieille Thou-Shi,
c'était logique. Mais notre Français
avait le bonnet près de l'oreille ; il gra-
vit les marches conduisant à la scène
et, une fois là, se mit à administrer une
sévère correction aux Chinois ridicule
sant l'armée française. Pendant qu'il
frappait à tour de bras, l'homme, char-
gé de manifester l'enthousiasme des
spectateurs, répétait sur sa peau d'âne
les très bien t très bien t -
La représentation prit fin sur cette
esclandre. Mais le succès de la pièce
ne s'en affirma que davantage, et les
Célestes eurent le courage de la repré-
senter à Cholon.
Cholon est une ville essentiellement
chinoise de cent cinquante mille habi-
tants, située aux portes de Saigon.
L'administration française prit mal
cette 'forfanterie, les artistes furent ex-
pulsés. et le théâtre, qui leur avait don-
né asile, fut fermé.
Jean du Pnom.
£
UIIE ESCADRE JAPONAISE EN ANGLETERRE
, Londres, 8 septembre.
On mande de Tokio au Daily Telegraph,
le 7 septembre :
On assure que Tes autorités navales ont
fait entrer dans le prochain budget un
crédit destiné à l'envoi d'une escadre ja-
ponaise en Angleterre.
L'escadre passerait à l'aller par le Cap
et retournerait au Japon en visitant l'Amé-
rique.
—.■
LES MEHtS DE M
La situation politique
Saint-Pétersbourg, 8 septembre.
En ce moment, accalmie générale. Les
partis politiques, démoralisés par la tour-
mente, en profitent pour se regrouper. Les
cadets, les octobristes, les pacifistes orga-
nisent des congrès auxquels M. Stolypine
ne met aucun obstacle.
Les intentions libérales1 exprimées par M.
Stolypine lui valent la reconnaissance et
l'admiration. On comprend que la création
de conseils de guerre pour juger les délita
lui est imposée.
Cette mesure pourtant anéantit presque
entièrement l'impression heureu-se produite
par la déclaration ministérielle.
Les paysans restent généralement cal-
mes. Beauèoup profitent de la panique qui
règne parmi les propriétaires pour acheter
des terres à bas prix.
Les réformes
Londres, 8 septembre.
Plusieurs journaux publient la dépêche
suivante de Saint-Pétersbourg, 7 septem-
bre :
On annonoe, de très bonne source, qu'un
décret impérial contenant le détail des ré-
formes sera publié au mois d'octobre.
Saint-Pétersbourg, 8 septembre.
Au conseil de cabinet tenu hier, les règle-
ments définitifs sur la vente des terres aux
paysans ont été élaborés.
Le général Trépoff
Londres, 8 septembre.
Le correspondant du Daily Mail à Saint-
Pétersbourg télégraphie le 7 septembre :
Le général Trépoff part demain pour Ba-
den-Baden. Il est inexact qu'il soit en die-
grâce ; il souffre d'une angine de poitrine,
de douleurs et d'abcès aux jambes.
Les médecins lui ont ordonné un change
ment d'air.
Le poste de gouverneur du Paîtîfe serf
probablement confié au général Dedouline.
Désordres et attentats
Bakou, 8 septembre.
La grève politique a échoué. Après uni
courte cessation, le travail a repris partout
Sébastopol, 8 septembre:
Un officier de gendarmerie a été assassiM
hier soir, dans un tramway, par deux hom-
mes vêtus comme des ouvriers,
Les malfaiteurs se sont échappés. :
Loatfres, 8 septembre.
Le Standard dément qpe son eormptf»
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