Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-07-30
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 30 juillet 1908 30 juillet 1908
Description : 1908/07/30 (N14020). 1908/07/30 (N14020).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75494798
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
iw. tAOfiO.- il q%apmid«w An l ie .--é. CSI!lQ CKarUMMtE KCMBRO
Jeudi 30 Juillet 1M8 —H *4020. -
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Ht MM Tr«u uni Sd Mil mon
Paris. 2 fr. 5 Ir. 9 Ir. 18 tr.
Départements 2 — 6 — t t - 20-
Union Postale 2 -. 9 — 46 — 32 —
.IIlr- Â 9 lu
AUGUSTE VACQUERIE
.1
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF. CM
6, Place, de la Bourse
et aux BUREAUX DU JOURNAL
Adresser toutes les Connu naications an Directeur
Adresser Lettres et Mandats au Directeur
ADMINISTRATION ET REDACTION : 14, Rue du Mail. — Téléphone: 102-82
, ,. TRIBUNE LIBRE
CHOSES D'EUROPE
y »
« Allons t ce siècle com-
mence bien. Au Nord comme
au Midi, il y a chez les na-
tions un réveil do l'esprit
d'indépendance. Le petit oi-
seau que Byron croyait en-
tendre chanter et dont la voix disait
que les peuples finiraient par être les
plus forts, est encore là haut, quelque
part dans les'branches qui verdissent,
t parle à nouveau d'espérance. Quel
que soi leur pouvoir de résistance et
'd'ir.<;ttie, les gouvernements dô réaction
'doivnt subir l'irrésistible poussée des
idées. La force prime encore le droit,
mais quelque chose se détend dans la
rigueur de son étreinte, et le jour n'est
pas si loin où le petit oiseau aura rai-
son. »
Il me plaît de dire à M. Clemenceau
que, s'il. n'avait pas prévu un voyage
présidentiel en Russie, sous un (gouver-
nement dont il serait lui-mime le chef,
•— voyage dont tout bon Français d'ail-
leurs se réjouit, — il a du moins été bon
prophète en écrivant, en 1901, les li-
gnes ci-dessus. -
Les peuples, en ce moment, sont en
train de réaliser le rêve chanté par le
petit oiseau de Byron, et de démontrer
qu'ils sont les plus forts.
La Russie a sa Constitution, plus 'ou
snoins précaire et respectée ; la Turquie
vient de recevoir la sienne des mains
encore teintes de sang d'Abdul Hamid.
Tout, pourtant, permet de croire,
! S'espérer que cette charte renouvelée
par te sultan à son peuple, ne sera pas
nn leurre ou un piège, cette fois. Le
'double danger qui te menace, en Tur-
quie et en Asie Mineure, la popularité
croissante, les succès des Jeunes-Turcs,
Vadhésion d'une partie de l'armée au
mouvement révolutionnaire, tout invite
'Abdul Hamid à ne pas recommencer la
comédie de 1876 et à maintenir et res-
pecter la Constitution dont il renouvelle,
à plus de trente ans d'intervalle, le don
plus contraint que joyeux à ses sujets.
Il n'y a que de très bonnes choses
IllS- cette Constitution et certain article,
s'il est loyalement appliqué, rendra !e
sort des Turcs enviable à des Républi-
ques :
(1 Les membres de l'Assemblée géné-
tale, dit l'article 47, sont Id-res dans
l'émission de leur opinion ou de leur
vote. Aucun d'eux ne peut être lié par
des instructions ou promesses, ni in-
fluencé par la menace. ) ,. ,
Je 'veux espérer aussi qu'ils seront li-
brement élus, qu'il n'y aura pas en Tur-
quie des préfets pour trafiquer électo-
ralement des faveurs officielles, pour
boycotter le suffrage universel, pour
surveiller, dénoncer électeurs, députés
ministres mêmes, pour, en un mot,
:« faire » ou essayer de « faire » les
élections.
Je veux espérer aussi que le prochain
Parlement turc ne ressemblera pas au
premier, dont la servilié fut telle, que
que
les députés reçurent le surnom d'~e<
çffendim « oui, monsieur ». Ah ! les
« oui monsieur » ne sont pas seulement
les députés que souhaitent 1rs tsars ou
les sultans, et nous ne savons que trop
comment, même dans la meilleure des
Républiques, les chefs de gouvernement
affectionnent les représentants du peu-
ple qui savent dire : « Oui, monsieur » à
, toutes leurs fantaisies. Mais, au lieu de
les appeler comme en Turquie Evet ef-
fendim, M. Clemenceau, autrefois — au-
trefois, bien entendu, — les surnom-
mait les « machines à burcoux de ta-
*
Heureuse Turquie, qui a ce si bons ta-
bacs, si elle n'a pas" de ces machines !
, Saluons, quoi qu'il en scit, le grand
'événement qui libère un peuple plongi
sous la plus barbare des oppressions,
iiin peuple livré jusque-là à la plus san-
glante des répressions ; écoutons à la
Ifois, les acclamations qui s'clèvent sur
.(s rives de la mer Noire et sur les bord?-
de la Baltique.
{ Le vénéré président Fallières -est par-
tout reçu avec un enthousiasme qui
nous réjouit et nous réconforte. A quoi
fervent ces voyages ? demandait, il y a
peu d'années M. Clemenceau, à propos
des visites du tsar à la France ou de
notre ministre des affaires étrangères à
la Russie. Et de quelles diatribes il ac-
compagnait sa question contre les cré-
dits votés, cqntre les milliards, prix
1J\me alliance inutile, contre les dépu-
tés, qui ne demandaient pas d'explica-
tions !.
A quoi servent ces Voyages ? Mais ils
Servent, au moins, à resserrer les liens
d'amitié qui unissent les peuples, à af-
fermir, à consolider le règne Icle là
f)aix.
Ils servent pëlîl-êïrëàlissï, par lé cori-
tact des idées, des civilisations, à hâter
l'avènement de la liberté dans les Etats
despotiques ; et qui sait si leur fré-
quence, en ces dernières années, n'a pas
contribué, par voie indirecte, à ce mou-
vement profond qui s'opère dans la vieil-
le Europe et se prolonge dans les pays
d'Orient.
A mesure que le respect du droit se
trouvera mieux assuré au sein des na-
tions, il s'imposera davantage e..ut're les
nations, et ce sera la plus haute garan-
tie de la paix. i
Paul BOURÉLY,
Député de l'Ardèche.
LA POLITIQUE
LES TOASTS DE REVEL
Sur le fond grisâtre des
proses protocolaires surgissent
en relief et en lumière quel-
ques expressions plus voyan-
tes des toasts de Revel.
L'insistance des deux chefs
d'Etat est significative lorsqu'ils répè-
tent dans les mêmes termes le désir que
la France et la Russie éprouvent à
maintenir et consolider la paix' du
monde.
La sincérité des intentions est éviden-
te. N'est-ce pas le tsar qui a joué un
rôle si actif dans la convocation de la
Conférence de La Haye? N'est-ce pas le
représentant de la France, M. Léon
Bourgeois, qui s'est inlassablement atta-
ché à la recherche des procédures conci-
liatrices dans cette même Conférence ?
Nul ne serait donc autorisé à contes-
ter au dehors les vœux pacifiques des
deux nations amies et alliées.
Le président de la République a a jou-
té d'ailleurs à la portée de ces déclara-
tions en indiquant que l'alliance franco-
russe était une « garantie d'équilibre »,
Ce qu'elle fut, elle le reste, en effet :
un utile contrepoids à la Triple-Allian-
ce. M. Fallières l'insinua, sans le dire,
mais le sens de ses paroles était clair.
Ce qu'il faut noter dans les deux
toasts, en surplus, c'est l'allure modeste
et discrète, le ton calme et froid. Dans
un - temps où lés souverains ont trans-
formé le son de ces harangues en clique-
tis d'épées ou sonneries de clairons la
différence méritait d'être notée.
Les deux toasts, certes, n'apportent
aucune révélation. L'alliance franco-
russe est maintenue par le vœu des deux
pays, par le lien des intérêts. La Russie
la conserve, après comme avant la Dou-
ma; en France, elle a été consentie, af-
firmée, pratiquée par des ministres ré-
publicains, radicaux, radicaux-socialis-
tes, voire même par un ministre socia-
liste.
Mais ce ne sont pas là les seules sug-
gestions que détermine le voyage du
président à Revel.
Naturellement, le souvenir renaît au
récent séjour du rot Edouard VII dans
ce port. Pour que le tsar et le président
aient omis toute allusion à cette récente
entrevue, il faut que leur désir ait été
intense d'éviter le retour de ces campa-
gnes violentes de presse qui, récemment,
ont opposé nations à nations. Encore
une fois, un point de gagné, pour la
paix du monde.
• ♦ Â
LES ON-DIT -
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mercredi : -
Lever du soleil, à 4 h. 30 ; coucher, à
G h. 41.
Courses a Chantilly.
L'embarras du choix. 0:"--
Un de nos ministres les plus élo-
quents passe pour courtiser à la fois
une très brune actrice sémillante et la
femme d'un haut fonctionnaire d'une
beauté blonde et sculpturale.
L'actrice 'voulait absolument savoir
laquelle des deux il aimait le mieux.
Elle insistait l'autre soir, après souper :
« Voyons, avouez, dit-elle, que si nous
tombions toutes deux ensemble dans
une rivière, je ne serais pas la premiè-
re que vous songeriez à sauver ?
— « Ma foi, ma chère petite, c'est
bien possible, répondit-il avec un fleg-
me admirable, mais c'est que vous avez
l'air de savoir bien mieux nager. »
Patins à routette9 .0
Le patin à roulettes serait sur le
point d'être définitivement adopté dans
l'àrméc italienne, au préjudice de la
bicyclette, qui y avait fait cependant
son apparition.
Uétat-major général rêprohà la
bicyclette d'être encombrante, lourde,
et de river le soldat aux grandes routes
qu'il ne peut quitter qu'en abandonnant
son instrument. Le patin à roulâtes n'a
aucun 'de ces inconvénients. Avec lui,
le premier soldat venu, avec son équi-
pement et son armement, peut faire fa-
cilement 50, 60 et 100. kilomètres par
jour, sur route, bien -entendu.
Quand il est obligé de quitter la rou-
te pour pénétrer dans des terrains acci-
dentés. il a cet avantage sur le véloci-
pédiste qu'il détache ses patins, les ac-
croche à son sac et passe partout où
un homme peut se frayer une issue.
Trouve-t-il de nouveau une bonne rou-
te, en quelques secondes il a ses patins
aux pieds, .et le voilà reparti à une vi-
tesse de 10 à 15 kilomètres à l'heure.
L'introduction du patin est très chau-
dement soutenue par de nombreux of-
ficiers qui ont vu, dans le Piémont,
mettre en usage avec les plus grands
avantages ce moyen de locomotion.
Attendons-nous donc à voir, d'ici à
peu de temps, des régiments de pati-
neurs dans l'armée italienne.
Confesseurs.
On sait combien les confesseurs
« mondains » appelés à réconforter
l'âme et à soulager la conscience des
« belles Madames », ont des trésors
d'indulgence et de pitié.
L'un d'eux discutait récemment de
l'adultère avec un prêtre d'un rigorisme
absolu. Ce dernier grommelait des im-
précations terribles : « péché mortel.;
abomination., crime. »
Et l'abbé mondain : « Mon Dieu, rap-
pelez-vous donc la parabole de la fem-
me adultère. Crime., abomination.,
péché mortel., si vous voulez ! Mais
l'adultère n'est aussi, bien souvent, que
la curiosité des plaisirs d'autrui. »
AUTREFOIS
Rappel du 30 juillet 1872. - Fermé pour
cause d'inondation ; cette inscription se li-
s'ait hier sur un grand nombre des maga-
sins des quartiers Saint-Denis, Saint-Mar-
tin et Montmartre. Un orage à pluie tor-
rentielle avait formé partout des lacs qui
s'étaient vidés dans les caves et dans les
sous-sols. Rue Chapon, les gamins avaient
transformé la rue en école de natation.
Le iournal la Renaissance publie un son-
net dédié par Victor Hugo à Judith Gautier
et que l'on dit être le seul sonnet qu'ait
écrit le poète.
Le conseil de guerre vient de condamner
à cinq ans de prison Alfred Besnard, pour
avoir rempli sous la commune les fonctions
de secrétaire général des contributions indi-
rectes. Seulement, il y a quatre mois que
«Besnard est mort, à San-Fernando (Amé-
rique du Sud). Besnard n'avait que 32 ans.
Il avait collaboré à plusieurs journaux et
avait fait jouer quelques petites pièces, en-
tre autres l'Ami Choufcard, qui eut plus de
cent représentations aux Folies-Dramati-
ques.
Mort, à l'âge de 85 ans, du compositeur
Carafa, l'auteur de Masameno, de Jeanne
d'Arc, du Valet de chambre, de la VioleHe.
Il était membre de l'Institut.
Mort du ciseleur Charles Duron.
Prix de Rome, sculpture : grand-prix, M.
Coutan ; premier second grand-prix, M. Du-
mildtre ; 2e second grand prix M. Hugues.
t
Un record
Un savant Autrichien, en combinant
dernièrement les différents mouve-
ments de translation et de rotation de
notre petite planète, est arrivé à ce ré-
sultat assez invraisemblable au premier
abord, et pourtant très réel. à savoir
qu'en restant assis sur sa chaise pen-
dant une heure seulement, un homme
ne parcourt pas moins de 137.600 kilo-
mètres ? En effet, par suite du mouve-
ment de rotation de la terre autour de
son axe. chacun de nous, même sans
bouger, effectue un trajet de 1.600 kilo-
mètres là l'heure. En outre, la terre
tournant autour du soleil, ne fait pas
moins de 106.000 kilomètres en une
heure. Mais ce n'est pas tout, le soleil
lui-même se meut dans l'espace à l'al-
lure de 701.000 kilomètres par jour, ou
30.000 kilomètres en 60 minutes. En
additionnant ces trois chiffres, on ar-
rive à ce singulier résultat ctiie
que nous sommes, même les plus sé-
dentaires, nous parcourons 137,600 ki-
lomètres par heure, soit sensiulement
plus de 3 millions de kilomètres par
jour.
Donc, inutile de se fracasser le crâne
en automobile pour faire du 120 à l'heu-
re.
Mots historiques. ,
Les mots « historiques » ont été rare-
ment trouvés ou prononcés par ceux
auxquels on les attribue.
Tantôt ils ont été prononcés par d'au-
tres, tantôt ils sont nés dans l'imagina-
tion des chroniqueurs ou des histo-
riens.
C'est ainsi que le fameux mot prête
au comte d'Artois à son retour en
France : « Il n'y a rien de change : il
n'y a qu'un Français de plus » a été
trouvé en réalité par M. Beugnot.
Le comité royaliste de Paris et les
comités de Bordeaux s'évertuaient en
vain, en 1814, à composer une phrase
destinée à devenir célèbre et que le
comte d'Artois devait solennellement
prononcer, lorsque M. Beugnot vint
heureusement les tirer d'embarras.
Ce mot, d'ailleurs très heureux, fut
tourné" en dérision quelque temps
après. Le Jardin des Plantes rèçut, la
première girafe amenée en France. On
fit à cette occasion frapper une mé-
daille satirique portant cette légende :
« Il n'y a rien de changé en France, il
n'y a qu'une bête de phis ! H
La Bastille
» Miimi
Lorsque l'avocat- Linguel fut mis à la
Bastille, il vit entrer dans sa chambre
un personnage grand, sec, sombre, qu'
lui causa quelque frayeur,
« Qui Mes-vous, monsieur, lui dit-
il ?
- « Je suis le barbier de la Bastille.
— « Eh bien, vous auriez bien dû
commencer par la raser. »
— .ii ———— • .M ■
BARRE A DROITE
La présence, aux diverses cérémonies qui
ont eu lieu dimanche à Caen de tout ce que
le département du Calvados compte de re-
présentants progressistes et nationalistes au
Parlement, a donné à ces fêtes leur carac-
tère véritable. Il s'agissait de célébrer les
victoires républicaines de la Normandie aux
dernières élections municipales, et ce fut,
en réalité, l'union du gouvernement et des
républicains. de droite qui fut l'objet de
toutes les réjouissances officielles.
Tous les amis de M. Ribot étaient là, de-
puis M. Tillaye, l'ancien ministre ultra-mo-
déré, jusqu'au comte de Saint-Quentin, en
passant par M. Flandin, progressiste, sans
oublier le nationaliste intégral Engerand,
qui, sous les armes le matin pour l'accom-
plissement d'une période d'instruction mili-
taire au 3g9 de ligne, assistait le soir au
banquet, Y civil, par permission spéciale.
Tous étaient venus saluer le président du
conseil et lui témoigner de leur joie, comme
l'a dit M. Laniel à Lisieux, de voir « les
destinées de la République entre ses mains.»
Si l'on ne fit pas de longs discours en
présence des 600 maires du département
venus par ordre, et dont la plupart ne sont
guère républicains, on échangea des poi-
gnées de mains qui furent autrement élo-
quentes que la plus belle des rhétoriques.
Il n'est pas nécessaire de discourir à per-
te de vue quand on sait se comprendre à
demi-mot ; le petit discours de M. Tillaye
sruffisait amplement, et d'ailleurs, de Nor-
mand à Breton, on se comprend aisément.
Si M. Clemenceau porte toujours le cha-
peau sur l'oreille, il a eu soin dimanche de
ne pas lui donner des allures de bataille"
mais des airs de gaieté et d'entrain qui'
semblaient vouloir dire aux Normands les
plus circonspects : « Allons, les gars de
Normandie, on joue du biniou chez Marian-
ne, venez donc danser avec nous, vous se-
rez tous les bienvenus ! »
M. Chéron a bien compris ce que ces ma-
nifestations avaient d'insolite, car en rece-
vant les membres du gouvernement, ses
collègues, il a cru devoir rappeler que les
portes de l'Hôtel de Ville de Caen étaient,
hier encore, brutalement fermées aux répu-
blicains.
En les ouvrant indistinctement aux répu-
blicains et aux progressistes et nationalistes
amis des réactionnaires, on peut regretter
qu'elles aient été trop largement ouvertes
et que les réactionnaires s'y soient trouvés
un peu trop chez eux.
Il eût été préférable que les fêtes de Caen
fussent marquées par moins d'enthousiasme
de la part de ceux qui furent, les adversai-
res de M. Chéron avant de se proclamer les
amis de M. Clemenceau.
C'est un nouveau coup de barre à droite
qui a été donné par le gouvernement. Il est
d'autant plus regrettable qu'il s'est produit
dans un pays où des progrès n'ont été ac-
complis par l'idée républicaine que sous
l'impulsion de l'ancien bloc de gauche et
que les démocrates sincères peuvent crain-
dre d.e voir leur œuvre compromise dans
l'avenir. — P. G.
LE SOUL KISS
Le Soul Kiss
Ça ne vous dit rien ? Est-ce du chinois,
du japonais ou du javanais ?
Ce n'est rien de tout ça. C'est de l'an-
glais et ça signifie - : le baiser long.
Les Latins sont décidément en aécadence.
Ils avaient autrefois le monopole de l'a-
mour enflammé, cantharidé et raffiné. Ils
sont dépassés, aujourdhui, par les Anglo-
Saxons.
C'est, en effet, en Amérique, qu'existe
cette coutume lascive du Soul Kiss.
Le Sout Kiss fait fureur à New-York. On
cite les noms des artistes qui sont passés
maîtres en l'art de le donner. On bat dies
records .Tel initié sait pratiquer le Sout
Kiss pendant près d'une minute, tel autre
arrive à deux minutes. Vous êtes obligé de
respirer.
Le Soul Kiss, c'est la « fricassée de mu-
seau » de nos anciens. Il s'applique bouche
sur bouche. Il fait fureur à New-York où
•ses partisans pullulent. Le parc de Brook-
lyn est leur séjour de prédilection. Les bai-
sers des couples enlacés y font concurrence
au becquetage des oiseaux. L'amour triom-
phe sur la mousse comme sous la feuillôe.
Et la situation est devenue tellement &ca-
breuse que la police de New-York a dû
prendre un arrêté limitant l'application du
Soul Kiss à une durée de deux secondes.
Deux secondes ! C'est assez pour un oi-
seau, -mais c'est peu pour un mammifère-de
notre race.
Nous nous demandons comment la police
américaine va s'y prendre pour contrôler la
durée des Soul lÚss. Les Américains, qui
sont ingénieux, au possible, vont certaine-
ment inventer un instrument pour mesurer
ce contrôle. Il faut nous attendre, d'ici quel-
ques jours, à l'apparition d'un « baisomè-
tre ».
Voyez d'ici le succès qu'aura cet appareil
quand M. Déranger réussira à l'imposer aux
agents qui devront faire la chasse aux Soul
Kiss dans les bois de Boulogne, de Clamart,
de Vincennes et de Meudon ?
Quel clou pour les prochaines revues
d'hiver !
En at tendant, nous voudrions bien voir
la tête du savant raccorni, quinteux et sau-
mâtre, qui a défini le baiser ainsi : « Le
« baiser, c'est la juxtaposition des mus-
cc des érecteurs de l'orifice buccal à l'état
« de contraction. »
Quelle horreur ! Ce savant devait être u",\.
ennemi du Soul Kiss et n'a jamais dû em-
brasser que sa belle-mère.
« La juxtaposition des muscles éreoteurs
de l'orifice buccal ! Pouah ! On t'en fichera
des juxtapositions » dira le gavroche. Et il
aura mison, car le baiser restera éternel
comme la chanson d'amour que la nature
murmure, à travers les siècles, dans les
buissons comme dans les chaumières.
C'est égal, nous donnerions bien notre
stock d'actions des mines de gigots de la
lune pour voir nos braves agents fatre usa-
ge du « baisomètre » Il -- J, C.
- LA RÉVOLUTION EN TURQUIE
a .-
lit mnifttin i Elillllliull
L'apaisement en Macédoine. - Les projets des Jeunes-Turcs.
— L'amnistie politique.
Constantinople, 28 juillet.
Tandis que, ce matin, III circulation se
faisait tranquillement à Péra et à Galata,
tout Stamboul était des plus animée ; des
meetings et des processions étaient organi-
sés et l'on envoyait des députations à la
Porte.
On vient de publier une amnistie géné-
rale. L'éloignement du ministre de la ma-
rine a en vérité, amené un peu de cs-lme,
mais on réclamerait maintenant, semble-
t-il, l'éloignement de la camarilla.de Yildiz.
Provisoirement, on ne saurait embrasser
la situation d'un coup d'oeil ; elle pourrait
devenir sérieuse, si le calme ne se produit
pas. Ce qui a essentiellement contribué à
provoquer le mécontentement, c'est que le
sultan ne s'est pas montré à la manifesta-
tion de Yildiz.
Les élections
Constantinopie, 28 juillet.
On vient de publier un iradé ordonnant
que l'on procède immédiatement aux élec-
tions, conformément à !a loi. A Constanti-
nople et aux environs, ceci semble un peu
calmer les esprits.
Les rues de Stamboul, surtout devant, la
Porte, sont plemes d'une foule immense qui
acclame le grand-vizir revenant à sept heu-
res et demie Je la Porte.
Des démonstrations ont eu lieu contre les
journaux modérés.
Pour les prisonniers politiques
Constantinople, 28 juillet.
Une foule innombrable, à Stamboul, sem-
ble attendre la libération de tous lec prison-
niers politiques.
Les élèves des écoles militaires, auxquels
on avait défendu de sortir, ont eu recours
à la violence pour pouvoir sortir, et ont
maltraité le général IsmaL', inspecteur des
écoles.
Parmi les softas et les autres classes de
la société, se forment ces groupes anti-
libéraux et patriotiques contre les chauvins
du parti jeune-turc.
Jusquà ce soir, le calme n'a été troublé
nulle part.
Dans raprès-midi. il y a eu de nouveaux
défliés précédés de drapeaux .portant des
inscriptions.
Un. grand meeting a été tenu devant la
Porte et on a envoyé au grand-vizir une
députation dont faisait partie le conseiller
d'Etat Moukta-bey, fils du .cheik ul-Islam,
et qui a demandé l'amnistie générale. Les
éditeurs des journaux turcs se sont en
même temps présentés chez le grand-vizir
et ont exposé qu'il était nécessaire d'accor-
der l'amnistie pour tranquilliser la popula-
tion. Le grand vizir a annoncé la publica-
tion ^'un iradé prononçant l'amnistie pour
tous les condamnés, détenus et exilés po-
litiques. ,- -
Les journaux ont porté l'arade à la con-
naissance du pubFc par des suppléments.
Plusieurs officiers ont pris part à un
grand meeting tenu devant le ministère de
la guerre. Ce meeting a envoyé une dépu-
tation de six membres auprès du grand-
vizir, pour lui demander d'éloigner et de
runir certains fonctionnaires ayant failli
à leurs devoirs, et en particulier le minis-
tre de la marine. Le grand vizir a répondu
que ces fonctionnaires étaient protégés par
la Constitution.
Malgré cela, l'amiral Rami pachâ. minis-
tre de la marine, a été relevé aujourd'hui
de ses fonctions et a été remplacé par le
vice-amiral Halil pacha.
Violenie manifestation
Constantinople, 28 juillet.
Le bruit que le nazif Sourouri. considéré
comme espion, serait nommé gouverneur
de Péra, cause de l'animaiion.
La foiiile est allée briser les vitres de sa
maison.
Les élèves de l'Académie navale devaient
faire une grande manifestation. Le bruit
court qu'ils en ont été empêchés.
Les élèves des autres écoles militaires
sont consignés.
L'aspect de Stamboul est très animé. Des
centaines de camelots vendent des jour-
naux. D'autres camelots vendent des ban-
des rouges avec l'inscription turque : Li-
berté, Egalité. Justice.
Dans i'après-midi, le Comité ottoman de
l'union du progrès (section de Constantino-
p'e) a répandu une proclamation conseil-
lant à hacun de vaquer maintenant à ses
affaires et de respecter la propriété et la
vie.
Les nationalités
Constantinople, 28 juillet.
Voici une communication officielle aux
journaux turcs :
Le commandant du 3' corps avait demandé
l'amnistie POUi' les insurgés des différentes na-
tionalités dans les trois vilayets à condition
qu'ils Hvreraicnt leurs armes aux autorités et
qu'ils rentreraient chez eux. Comme la convo-
cation des deux Chambres a amené la concor-
de complète entre les différentes nationalités
et a assuré la fidélité et rattachement sincère
au SuLtan, celui-ci a accédé a cette demande
sous les conditions précitées.
Les Jeunes-Turcs
Londres, 28 juillet.
Le correspondant du Daily Graphie à Pa-
ris a eu une conversation avec Hamed-
R;z>tl. chef du parti Jeune-Turc à Paris.
Ilamed-Riza lui a dit :
Nous ne demandons pas mieux que de voir
le Sultan remplir ses engagements ; aussi long-
temps qu'il les tiendra, son trône et sa per-
sonne seront sacrés. "-
S'il établit un gouvernement libéral consti-
tutionnel, il n'aura pas de plus fidèles sujets
quo les membres du parti Jeune-Turc. Nous
envisageons l'avenir avec confiance, et si le
Sullan exécute largement ses promesses, une
nouvelle ère de paix s'ouvrira, devant l'empire
turc.
Le sionisme
Londres, 28 juillet.
Le Dailij Tclegraph publie un télégram-
me d'un de ses correspondants de Saint-
Pétersbourg, disant que le programme du
PîurU Jeune-Turc, comprend la rétrocession
.1 1&
de la Palestine aux juifs. sur la base dit
projet des Sionistes.
Le sultan harangue la foule
Constantinople, 28 juillet.
Les journaux turcs annoncent seulemenf
aujourd'hui que le sultan s'est montra
avant-hier vers minuit à la foule rascml
biée devant Yi!diz-Kiosk.
Le sultan a ouvert lui-même la fenêtre
et a demandé pourquoi la foule était ve.
nue. Quelqu'un lui a crié :
Nous ne voulons pas autre chose que vois
Vi:)Lre Majesté en bonne santé. Depuis trente'
deux -nns, quelques traîtres nous ont caché
Votre Majesté. Maintenant nous l'avons vue.
Mille remerciements 1 Que notre Padichah vivf
longtemps I
Le sultan a répondu :
Mes enfants, soyez tranquil!es. Depuis mo:
avènement au trône, j'ai travaillé pour la
prospérité et le salut de la patrie.
Le bien-être de mes sujets qui me sont auss
chers que mes propres enfants, est mon plu*.
vif désir. Votre wenir, Dieu nfen est témoin'
est désormaiS assuré. Je travaillerai avec vous.
Vivez maintenant comme des frères en iouis-
sant de votre liberté. Je suis satisfait de la
fidélité et de la reconnaissance que vous nia
témoignez. Rentrez chez vous et prenez du re-
pos.
La fmiie s'est retirée après avoir vive-
ment acclamé le sultan, qui avait auprès de
;lui le grand-vizir, le cheik-ul-Islam, lviamil
puoha et 1 Omer-Rouchdi pacha.
1 Constantinople, 27 juillet.
Par suite de l'amertume intense causée
par l'ancien régime, par les abus criants,
par les inj ustices, par les arbitraires de
toute sorte, de véhémentes imprécations
commencent à se faire entendre contre un
certain nombre de fonctionnaires notables.
Cet état d'esprit, quoiqu'on le considère
assez naturel dans les circonstances actuel.
les, est cependant regardé comme un symp- 1
tôme inquiétant, car on appréhende des in-
cidents regrcttabks.
On conçoit qu'il faudra apporter de
grands changements, surtout du côté des
fonctionnaires du palais, qui se sont iden-
tifiés avec le gouvernement personnel c*
ont été la cause de beaucoup de souffran-
ces et on comprend que la tâche à laquelle
le gouvernement constitutionnel va avoir
à faire face, consistera surtout à écarter les
fonctionnaires incapables et corrompus et
à rétablir l'ordre dans !es différentes bran-
ches de l'administration.
Cette tâche, on le voit, est immense et
elle occupera un temps considérable.
La censure subsiste
Constantinople, 28 juillet.
La censure des télégrammes envoyés &
la presse étrangère est maintenant limitée.
Ainsi une dépêche d'hier, qui parlait de la
divergence de vues qui régnait au conseil
dos ministres tenu jeudi dernier à Yildiz-
Kiosk, conseil au cours duquel le sort de
l'Empire était en jeu, a été supprimée. Au
cours de ce conseil, en effet, quelques-uns
des ministres ne voulaient faire que des
concessions partielles, alors que les autres,
parmi lesquels Saïd pacha, Kiamil pacha.
préconisaient le rétablissement complet de
la Constitution. Le sultan pencha pour cette
dernière alternative. On ajoute même que
le sultan versa des larmes en dormant son
autorisation.
Comment a été obtenue l'amnistie
Cens tantinople, 28 juillet.
Les manifestations populaires ont conUI
nué dans toute la ville cet après-midi : ca-
pendant on a remarqué que quelques grou-
pes avaient adopté une attitude quelque
peu menaçante à cause du délai accordé à
l'exécution de la promesse d'amnistie gé-
nérale pour les individus coupables de fau-
tes politiques.
Une délégation importante s'est - rendue
auprès du grand-vizir pour exiger l'exécu-
tion immédiate de la mesure, en menaçant,
dans le cas contraire, de se rendre dans les
prisons pour libérer les prisonniers. la délé-
gation a également exigé la révocation des
ministres incapables et d'autres hauts fonc-
tionnaires associés à l'ancien régime.
Cette démarche causa au sultan une telle
impression que des ordres furent immédia-
tement donnés pour qu'on relâchât tous les
prisonniers politiques.
La situation est donc plus calme ; cepen-
dant, on continue à appréhender des trou-
bles.
Le serment constitutionnel
Constantinople, 28 juillet.
Il s'est produit hier à Andrinople uns
scène curilJse. La proclamation de la
Constitution ayant été notifiée aux autori-
tés militaires et les Jeunes-Turcs
firent jurer à celles-ci qu'elles soutien-
draient la Constitution. Les autorités ayant'
juré, l'ordre a été rétabli.
L'attitude des Grecs
Athènes, 28 juilïcf.
On mande de Smyrne que plusieurs mi".
liers de Grecs et de Turcs et de nombreux
officiers ont organisé une manifestation
imposante pour célébrer le rétablissement
de la Constitution en Turquie.
Les musiques ont joué les hymnes groc
et turc.
A JanÍno, en Epire, les Grecs ont mani-
festé avec enthousiasme. Ils avaient le mé-
tropolite et les notables à leur tête. Des
cris répétés de : « Vive la Constitution !
Vive la liberté ! » ont été poussés.
A Salonique également., !a manifestation"
des Circcs a été très imposante. EnVer bey,
a harangué la foule.
Dans plusieurs localités de Macédoine, leg
Jeunes-Turcs ont obligé les chefs bulgares
à se réconcilier.
De tous côtés, on signale un !'!rBn'd apai-
sement. Partout, les Grecs se montrent
tout disposés à appuyer le nouvel état de
choses.
La presse aihéniciïïîa ne cesse -dc rcd4
Jeudi 30 Juillet 1M8 —H *4020. -
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Ht MM Tr«u uni Sd Mil mon
Paris. 2 fr. 5 Ir. 9 Ir. 18 tr.
Départements 2 — 6 — t t - 20-
Union Postale 2 -. 9 — 46 — 32 —
.IIlr- Â 9 lu
AUGUSTE VACQUERIE
.1
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF. CM
6, Place, de la Bourse
et aux BUREAUX DU JOURNAL
Adresser toutes les Connu naications an Directeur
Adresser Lettres et Mandats au Directeur
ADMINISTRATION ET REDACTION : 14, Rue du Mail. — Téléphone: 102-82
, ,. TRIBUNE LIBRE
CHOSES D'EUROPE
y »
« Allons t ce siècle com-
mence bien. Au Nord comme
au Midi, il y a chez les na-
tions un réveil do l'esprit
d'indépendance. Le petit oi-
seau que Byron croyait en-
tendre chanter et dont la voix disait
que les peuples finiraient par être les
plus forts, est encore là haut, quelque
part dans les'branches qui verdissent,
t parle à nouveau d'espérance. Quel
que soi leur pouvoir de résistance et
'd'ir.<;ttie, les gouvernements dô réaction
'doivnt subir l'irrésistible poussée des
idées. La force prime encore le droit,
mais quelque chose se détend dans la
rigueur de son étreinte, et le jour n'est
pas si loin où le petit oiseau aura rai-
son. »
Il me plaît de dire à M. Clemenceau
que, s'il. n'avait pas prévu un voyage
présidentiel en Russie, sous un (gouver-
nement dont il serait lui-mime le chef,
•— voyage dont tout bon Français d'ail-
leurs se réjouit, — il a du moins été bon
prophète en écrivant, en 1901, les li-
gnes ci-dessus. -
Les peuples, en ce moment, sont en
train de réaliser le rêve chanté par le
petit oiseau de Byron, et de démontrer
qu'ils sont les plus forts.
La Russie a sa Constitution, plus 'ou
snoins précaire et respectée ; la Turquie
vient de recevoir la sienne des mains
encore teintes de sang d'Abdul Hamid.
Tout, pourtant, permet de croire,
! S'espérer que cette charte renouvelée
par te sultan à son peuple, ne sera pas
nn leurre ou un piège, cette fois. Le
'double danger qui te menace, en Tur-
quie et en Asie Mineure, la popularité
croissante, les succès des Jeunes-Turcs,
Vadhésion d'une partie de l'armée au
mouvement révolutionnaire, tout invite
'Abdul Hamid à ne pas recommencer la
comédie de 1876 et à maintenir et res-
pecter la Constitution dont il renouvelle,
à plus de trente ans d'intervalle, le don
plus contraint que joyeux à ses sujets.
Il n'y a que de très bonnes choses
IllS- cette Constitution et certain article,
s'il est loyalement appliqué, rendra !e
sort des Turcs enviable à des Républi-
ques :
(1 Les membres de l'Assemblée géné-
tale, dit l'article 47, sont Id-res dans
l'émission de leur opinion ou de leur
vote. Aucun d'eux ne peut être lié par
des instructions ou promesses, ni in-
fluencé par la menace. ) ,. ,
Je 'veux espérer aussi qu'ils seront li-
brement élus, qu'il n'y aura pas en Tur-
quie des préfets pour trafiquer électo-
ralement des faveurs officielles, pour
boycotter le suffrage universel, pour
surveiller, dénoncer électeurs, députés
ministres mêmes, pour, en un mot,
:« faire » ou essayer de « faire » les
élections.
Je veux espérer aussi que le prochain
Parlement turc ne ressemblera pas au
premier, dont la servilié fut telle, que
que
les députés reçurent le surnom d'~e<
çffendim « oui, monsieur ». Ah ! les
« oui monsieur » ne sont pas seulement
les députés que souhaitent 1rs tsars ou
les sultans, et nous ne savons que trop
comment, même dans la meilleure des
Républiques, les chefs de gouvernement
affectionnent les représentants du peu-
ple qui savent dire : « Oui, monsieur » à
, toutes leurs fantaisies. Mais, au lieu de
les appeler comme en Turquie Evet ef-
fendim, M. Clemenceau, autrefois — au-
trefois, bien entendu, — les surnom-
mait les « machines à burcoux de ta-
*
Heureuse Turquie, qui a ce si bons ta-
bacs, si elle n'a pas" de ces machines !
, Saluons, quoi qu'il en scit, le grand
'événement qui libère un peuple plongi
sous la plus barbare des oppressions,
iiin peuple livré jusque-là à la plus san-
glante des répressions ; écoutons à la
Ifois, les acclamations qui s'clèvent sur
.(s rives de la mer Noire et sur les bord?-
de la Baltique.
{ Le vénéré président Fallières -est par-
tout reçu avec un enthousiasme qui
nous réjouit et nous réconforte. A quoi
fervent ces voyages ? demandait, il y a
peu d'années M. Clemenceau, à propos
des visites du tsar à la France ou de
notre ministre des affaires étrangères à
la Russie. Et de quelles diatribes il ac-
compagnait sa question contre les cré-
dits votés, cqntre les milliards, prix
1J\me alliance inutile, contre les dépu-
tés, qui ne demandaient pas d'explica-
tions !.
A quoi servent ces Voyages ? Mais ils
Servent, au moins, à resserrer les liens
d'amitié qui unissent les peuples, à af-
fermir, à consolider le règne Icle là
f)aix.
Ils servent pëlîl-êïrëàlissï, par lé cori-
tact des idées, des civilisations, à hâter
l'avènement de la liberté dans les Etats
despotiques ; et qui sait si leur fré-
quence, en ces dernières années, n'a pas
contribué, par voie indirecte, à ce mou-
vement profond qui s'opère dans la vieil-
le Europe et se prolonge dans les pays
d'Orient.
A mesure que le respect du droit se
trouvera mieux assuré au sein des na-
tions, il s'imposera davantage e..ut're les
nations, et ce sera la plus haute garan-
tie de la paix. i
Paul BOURÉLY,
Député de l'Ardèche.
LA POLITIQUE
LES TOASTS DE REVEL
Sur le fond grisâtre des
proses protocolaires surgissent
en relief et en lumière quel-
ques expressions plus voyan-
tes des toasts de Revel.
L'insistance des deux chefs
d'Etat est significative lorsqu'ils répè-
tent dans les mêmes termes le désir que
la France et la Russie éprouvent à
maintenir et consolider la paix' du
monde.
La sincérité des intentions est éviden-
te. N'est-ce pas le tsar qui a joué un
rôle si actif dans la convocation de la
Conférence de La Haye? N'est-ce pas le
représentant de la France, M. Léon
Bourgeois, qui s'est inlassablement atta-
ché à la recherche des procédures conci-
liatrices dans cette même Conférence ?
Nul ne serait donc autorisé à contes-
ter au dehors les vœux pacifiques des
deux nations amies et alliées.
Le président de la République a a jou-
té d'ailleurs à la portée de ces déclara-
tions en indiquant que l'alliance franco-
russe était une « garantie d'équilibre »,
Ce qu'elle fut, elle le reste, en effet :
un utile contrepoids à la Triple-Allian-
ce. M. Fallières l'insinua, sans le dire,
mais le sens de ses paroles était clair.
Ce qu'il faut noter dans les deux
toasts, en surplus, c'est l'allure modeste
et discrète, le ton calme et froid. Dans
un - temps où lés souverains ont trans-
formé le son de ces harangues en clique-
tis d'épées ou sonneries de clairons la
différence méritait d'être notée.
Les deux toasts, certes, n'apportent
aucune révélation. L'alliance franco-
russe est maintenue par le vœu des deux
pays, par le lien des intérêts. La Russie
la conserve, après comme avant la Dou-
ma; en France, elle a été consentie, af-
firmée, pratiquée par des ministres ré-
publicains, radicaux, radicaux-socialis-
tes, voire même par un ministre socia-
liste.
Mais ce ne sont pas là les seules sug-
gestions que détermine le voyage du
président à Revel.
Naturellement, le souvenir renaît au
récent séjour du rot Edouard VII dans
ce port. Pour que le tsar et le président
aient omis toute allusion à cette récente
entrevue, il faut que leur désir ait été
intense d'éviter le retour de ces campa-
gnes violentes de presse qui, récemment,
ont opposé nations à nations. Encore
une fois, un point de gagné, pour la
paix du monde.
• ♦ Â
LES ON-DIT -
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui mercredi : -
Lever du soleil, à 4 h. 30 ; coucher, à
G h. 41.
Courses a Chantilly.
L'embarras du choix. 0:"--
Un de nos ministres les plus élo-
quents passe pour courtiser à la fois
une très brune actrice sémillante et la
femme d'un haut fonctionnaire d'une
beauté blonde et sculpturale.
L'actrice 'voulait absolument savoir
laquelle des deux il aimait le mieux.
Elle insistait l'autre soir, après souper :
« Voyons, avouez, dit-elle, que si nous
tombions toutes deux ensemble dans
une rivière, je ne serais pas la premiè-
re que vous songeriez à sauver ?
— « Ma foi, ma chère petite, c'est
bien possible, répondit-il avec un fleg-
me admirable, mais c'est que vous avez
l'air de savoir bien mieux nager. »
Patins à routette9 .0
Le patin à roulettes serait sur le
point d'être définitivement adopté dans
l'àrméc italienne, au préjudice de la
bicyclette, qui y avait fait cependant
son apparition.
Uétat-major général rêprohà la
bicyclette d'être encombrante, lourde,
et de river le soldat aux grandes routes
qu'il ne peut quitter qu'en abandonnant
son instrument. Le patin à roulâtes n'a
aucun 'de ces inconvénients. Avec lui,
le premier soldat venu, avec son équi-
pement et son armement, peut faire fa-
cilement 50, 60 et 100. kilomètres par
jour, sur route, bien -entendu.
Quand il est obligé de quitter la rou-
te pour pénétrer dans des terrains acci-
dentés. il a cet avantage sur le véloci-
pédiste qu'il détache ses patins, les ac-
croche à son sac et passe partout où
un homme peut se frayer une issue.
Trouve-t-il de nouveau une bonne rou-
te, en quelques secondes il a ses patins
aux pieds, .et le voilà reparti à une vi-
tesse de 10 à 15 kilomètres à l'heure.
L'introduction du patin est très chau-
dement soutenue par de nombreux of-
ficiers qui ont vu, dans le Piémont,
mettre en usage avec les plus grands
avantages ce moyen de locomotion.
Attendons-nous donc à voir, d'ici à
peu de temps, des régiments de pati-
neurs dans l'armée italienne.
Confesseurs.
On sait combien les confesseurs
« mondains » appelés à réconforter
l'âme et à soulager la conscience des
« belles Madames », ont des trésors
d'indulgence et de pitié.
L'un d'eux discutait récemment de
l'adultère avec un prêtre d'un rigorisme
absolu. Ce dernier grommelait des im-
précations terribles : « péché mortel.;
abomination., crime. »
Et l'abbé mondain : « Mon Dieu, rap-
pelez-vous donc la parabole de la fem-
me adultère. Crime., abomination.,
péché mortel., si vous voulez ! Mais
l'adultère n'est aussi, bien souvent, que
la curiosité des plaisirs d'autrui. »
AUTREFOIS
Rappel du 30 juillet 1872. - Fermé pour
cause d'inondation ; cette inscription se li-
s'ait hier sur un grand nombre des maga-
sins des quartiers Saint-Denis, Saint-Mar-
tin et Montmartre. Un orage à pluie tor-
rentielle avait formé partout des lacs qui
s'étaient vidés dans les caves et dans les
sous-sols. Rue Chapon, les gamins avaient
transformé la rue en école de natation.
Le iournal la Renaissance publie un son-
net dédié par Victor Hugo à Judith Gautier
et que l'on dit être le seul sonnet qu'ait
écrit le poète.
Le conseil de guerre vient de condamner
à cinq ans de prison Alfred Besnard, pour
avoir rempli sous la commune les fonctions
de secrétaire général des contributions indi-
rectes. Seulement, il y a quatre mois que
«Besnard est mort, à San-Fernando (Amé-
rique du Sud). Besnard n'avait que 32 ans.
Il avait collaboré à plusieurs journaux et
avait fait jouer quelques petites pièces, en-
tre autres l'Ami Choufcard, qui eut plus de
cent représentations aux Folies-Dramati-
ques.
Mort, à l'âge de 85 ans, du compositeur
Carafa, l'auteur de Masameno, de Jeanne
d'Arc, du Valet de chambre, de la VioleHe.
Il était membre de l'Institut.
Mort du ciseleur Charles Duron.
Prix de Rome, sculpture : grand-prix, M.
Coutan ; premier second grand-prix, M. Du-
mildtre ; 2e second grand prix M. Hugues.
t
Un record
Un savant Autrichien, en combinant
dernièrement les différents mouve-
ments de translation et de rotation de
notre petite planète, est arrivé à ce ré-
sultat assez invraisemblable au premier
abord, et pourtant très réel. à savoir
qu'en restant assis sur sa chaise pen-
dant une heure seulement, un homme
ne parcourt pas moins de 137.600 kilo-
mètres ? En effet, par suite du mouve-
ment de rotation de la terre autour de
son axe. chacun de nous, même sans
bouger, effectue un trajet de 1.600 kilo-
mètres là l'heure. En outre, la terre
tournant autour du soleil, ne fait pas
moins de 106.000 kilomètres en une
heure. Mais ce n'est pas tout, le soleil
lui-même se meut dans l'espace à l'al-
lure de 701.000 kilomètres par jour, ou
30.000 kilomètres en 60 minutes. En
additionnant ces trois chiffres, on ar-
rive à ce singulier résultat ctiie
que nous sommes, même les plus sé-
dentaires, nous parcourons 137,600 ki-
lomètres par heure, soit sensiulement
plus de 3 millions de kilomètres par
jour.
Donc, inutile de se fracasser le crâne
en automobile pour faire du 120 à l'heu-
re.
Mots historiques. ,
Les mots « historiques » ont été rare-
ment trouvés ou prononcés par ceux
auxquels on les attribue.
Tantôt ils ont été prononcés par d'au-
tres, tantôt ils sont nés dans l'imagina-
tion des chroniqueurs ou des histo-
riens.
C'est ainsi que le fameux mot prête
au comte d'Artois à son retour en
France : « Il n'y a rien de change : il
n'y a qu'un Français de plus » a été
trouvé en réalité par M. Beugnot.
Le comité royaliste de Paris et les
comités de Bordeaux s'évertuaient en
vain, en 1814, à composer une phrase
destinée à devenir célèbre et que le
comte d'Artois devait solennellement
prononcer, lorsque M. Beugnot vint
heureusement les tirer d'embarras.
Ce mot, d'ailleurs très heureux, fut
tourné" en dérision quelque temps
après. Le Jardin des Plantes rèçut, la
première girafe amenée en France. On
fit à cette occasion frapper une mé-
daille satirique portant cette légende :
« Il n'y a rien de changé en France, il
n'y a qu'une bête de phis ! H
La Bastille
» Miimi
Lorsque l'avocat- Linguel fut mis à la
Bastille, il vit entrer dans sa chambre
un personnage grand, sec, sombre, qu'
lui causa quelque frayeur,
« Qui Mes-vous, monsieur, lui dit-
il ?
- « Je suis le barbier de la Bastille.
— « Eh bien, vous auriez bien dû
commencer par la raser. »
— .ii ———— • .M ■
BARRE A DROITE
La présence, aux diverses cérémonies qui
ont eu lieu dimanche à Caen de tout ce que
le département du Calvados compte de re-
présentants progressistes et nationalistes au
Parlement, a donné à ces fêtes leur carac-
tère véritable. Il s'agissait de célébrer les
victoires républicaines de la Normandie aux
dernières élections municipales, et ce fut,
en réalité, l'union du gouvernement et des
républicains. de droite qui fut l'objet de
toutes les réjouissances officielles.
Tous les amis de M. Ribot étaient là, de-
puis M. Tillaye, l'ancien ministre ultra-mo-
déré, jusqu'au comte de Saint-Quentin, en
passant par M. Flandin, progressiste, sans
oublier le nationaliste intégral Engerand,
qui, sous les armes le matin pour l'accom-
plissement d'une période d'instruction mili-
taire au 3g9 de ligne, assistait le soir au
banquet, Y civil, par permission spéciale.
Tous étaient venus saluer le président du
conseil et lui témoigner de leur joie, comme
l'a dit M. Laniel à Lisieux, de voir « les
destinées de la République entre ses mains.»
Si l'on ne fit pas de longs discours en
présence des 600 maires du département
venus par ordre, et dont la plupart ne sont
guère républicains, on échangea des poi-
gnées de mains qui furent autrement élo-
quentes que la plus belle des rhétoriques.
Il n'est pas nécessaire de discourir à per-
te de vue quand on sait se comprendre à
demi-mot ; le petit discours de M. Tillaye
sruffisait amplement, et d'ailleurs, de Nor-
mand à Breton, on se comprend aisément.
Si M. Clemenceau porte toujours le cha-
peau sur l'oreille, il a eu soin dimanche de
ne pas lui donner des allures de bataille"
mais des airs de gaieté et d'entrain qui'
semblaient vouloir dire aux Normands les
plus circonspects : « Allons, les gars de
Normandie, on joue du biniou chez Marian-
ne, venez donc danser avec nous, vous se-
rez tous les bienvenus ! »
M. Chéron a bien compris ce que ces ma-
nifestations avaient d'insolite, car en rece-
vant les membres du gouvernement, ses
collègues, il a cru devoir rappeler que les
portes de l'Hôtel de Ville de Caen étaient,
hier encore, brutalement fermées aux répu-
blicains.
En les ouvrant indistinctement aux répu-
blicains et aux progressistes et nationalistes
amis des réactionnaires, on peut regretter
qu'elles aient été trop largement ouvertes
et que les réactionnaires s'y soient trouvés
un peu trop chez eux.
Il eût été préférable que les fêtes de Caen
fussent marquées par moins d'enthousiasme
de la part de ceux qui furent, les adversai-
res de M. Chéron avant de se proclamer les
amis de M. Clemenceau.
C'est un nouveau coup de barre à droite
qui a été donné par le gouvernement. Il est
d'autant plus regrettable qu'il s'est produit
dans un pays où des progrès n'ont été ac-
complis par l'idée républicaine que sous
l'impulsion de l'ancien bloc de gauche et
que les démocrates sincères peuvent crain-
dre d.e voir leur œuvre compromise dans
l'avenir. — P. G.
LE SOUL KISS
Le Soul Kiss
Ça ne vous dit rien ? Est-ce du chinois,
du japonais ou du javanais ?
Ce n'est rien de tout ça. C'est de l'an-
glais et ça signifie - : le baiser long.
Les Latins sont décidément en aécadence.
Ils avaient autrefois le monopole de l'a-
mour enflammé, cantharidé et raffiné. Ils
sont dépassés, aujourdhui, par les Anglo-
Saxons.
C'est, en effet, en Amérique, qu'existe
cette coutume lascive du Soul Kiss.
Le Sout Kiss fait fureur à New-York. On
cite les noms des artistes qui sont passés
maîtres en l'art de le donner. On bat dies
records .Tel initié sait pratiquer le Sout
Kiss pendant près d'une minute, tel autre
arrive à deux minutes. Vous êtes obligé de
respirer.
Le Soul Kiss, c'est la « fricassée de mu-
seau » de nos anciens. Il s'applique bouche
sur bouche. Il fait fureur à New-York où
•ses partisans pullulent. Le parc de Brook-
lyn est leur séjour de prédilection. Les bai-
sers des couples enlacés y font concurrence
au becquetage des oiseaux. L'amour triom-
phe sur la mousse comme sous la feuillôe.
Et la situation est devenue tellement &ca-
breuse que la police de New-York a dû
prendre un arrêté limitant l'application du
Soul Kiss à une durée de deux secondes.
Deux secondes ! C'est assez pour un oi-
seau, -mais c'est peu pour un mammifère-de
notre race.
Nous nous demandons comment la police
américaine va s'y prendre pour contrôler la
durée des Soul lÚss. Les Américains, qui
sont ingénieux, au possible, vont certaine-
ment inventer un instrument pour mesurer
ce contrôle. Il faut nous attendre, d'ici quel-
ques jours, à l'apparition d'un « baisomè-
tre ».
Voyez d'ici le succès qu'aura cet appareil
quand M. Déranger réussira à l'imposer aux
agents qui devront faire la chasse aux Soul
Kiss dans les bois de Boulogne, de Clamart,
de Vincennes et de Meudon ?
Quel clou pour les prochaines revues
d'hiver !
En at tendant, nous voudrions bien voir
la tête du savant raccorni, quinteux et sau-
mâtre, qui a défini le baiser ainsi : « Le
« baiser, c'est la juxtaposition des mus-
cc des érecteurs de l'orifice buccal à l'état
« de contraction. »
Quelle horreur ! Ce savant devait être u",\.
ennemi du Soul Kiss et n'a jamais dû em-
brasser que sa belle-mère.
« La juxtaposition des muscles éreoteurs
de l'orifice buccal ! Pouah ! On t'en fichera
des juxtapositions » dira le gavroche. Et il
aura mison, car le baiser restera éternel
comme la chanson d'amour que la nature
murmure, à travers les siècles, dans les
buissons comme dans les chaumières.
C'est égal, nous donnerions bien notre
stock d'actions des mines de gigots de la
lune pour voir nos braves agents fatre usa-
ge du « baisomètre » Il -- J, C.
- LA RÉVOLUTION EN TURQUIE
a .-
lit mnifttin i Elillllliull
L'apaisement en Macédoine. - Les projets des Jeunes-Turcs.
— L'amnistie politique.
Constantinople, 28 juillet.
Tandis que, ce matin, III circulation se
faisait tranquillement à Péra et à Galata,
tout Stamboul était des plus animée ; des
meetings et des processions étaient organi-
sés et l'on envoyait des députations à la
Porte.
On vient de publier une amnistie géné-
rale. L'éloignement du ministre de la ma-
rine a en vérité, amené un peu de cs-lme,
mais on réclamerait maintenant, semble-
t-il, l'éloignement de la camarilla.de Yildiz.
Provisoirement, on ne saurait embrasser
la situation d'un coup d'oeil ; elle pourrait
devenir sérieuse, si le calme ne se produit
pas. Ce qui a essentiellement contribué à
provoquer le mécontentement, c'est que le
sultan ne s'est pas montré à la manifesta-
tion de Yildiz.
Les élections
Constantinopie, 28 juillet.
On vient de publier un iradé ordonnant
que l'on procède immédiatement aux élec-
tions, conformément à !a loi. A Constanti-
nople et aux environs, ceci semble un peu
calmer les esprits.
Les rues de Stamboul, surtout devant, la
Porte, sont plemes d'une foule immense qui
acclame le grand-vizir revenant à sept heu-
res et demie Je la Porte.
Des démonstrations ont eu lieu contre les
journaux modérés.
Pour les prisonniers politiques
Constantinople, 28 juillet.
Une foule innombrable, à Stamboul, sem-
ble attendre la libération de tous lec prison-
niers politiques.
Les élèves des écoles militaires, auxquels
on avait défendu de sortir, ont eu recours
à la violence pour pouvoir sortir, et ont
maltraité le général IsmaL', inspecteur des
écoles.
Parmi les softas et les autres classes de
la société, se forment ces groupes anti-
libéraux et patriotiques contre les chauvins
du parti jeune-turc.
Jusquà ce soir, le calme n'a été troublé
nulle part.
Dans raprès-midi. il y a eu de nouveaux
défliés précédés de drapeaux .portant des
inscriptions.
Un. grand meeting a été tenu devant la
Porte et on a envoyé au grand-vizir une
députation dont faisait partie le conseiller
d'Etat Moukta-bey, fils du .cheik ul-Islam,
et qui a demandé l'amnistie générale. Les
éditeurs des journaux turcs se sont en
même temps présentés chez le grand-vizir
et ont exposé qu'il était nécessaire d'accor-
der l'amnistie pour tranquilliser la popula-
tion. Le grand vizir a annoncé la publica-
tion ^'un iradé prononçant l'amnistie pour
tous les condamnés, détenus et exilés po-
litiques. ,- -
Les journaux ont porté l'arade à la con-
naissance du pubFc par des suppléments.
Plusieurs officiers ont pris part à un
grand meeting tenu devant le ministère de
la guerre. Ce meeting a envoyé une dépu-
tation de six membres auprès du grand-
vizir, pour lui demander d'éloigner et de
runir certains fonctionnaires ayant failli
à leurs devoirs, et en particulier le minis-
tre de la marine. Le grand vizir a répondu
que ces fonctionnaires étaient protégés par
la Constitution.
Malgré cela, l'amiral Rami pachâ. minis-
tre de la marine, a été relevé aujourd'hui
de ses fonctions et a été remplacé par le
vice-amiral Halil pacha.
Violenie manifestation
Constantinople, 28 juillet.
Le bruit que le nazif Sourouri. considéré
comme espion, serait nommé gouverneur
de Péra, cause de l'animaiion.
La foiiile est allée briser les vitres de sa
maison.
Les élèves de l'Académie navale devaient
faire une grande manifestation. Le bruit
court qu'ils en ont été empêchés.
Les élèves des autres écoles militaires
sont consignés.
L'aspect de Stamboul est très animé. Des
centaines de camelots vendent des jour-
naux. D'autres camelots vendent des ban-
des rouges avec l'inscription turque : Li-
berté, Egalité. Justice.
Dans i'après-midi, le Comité ottoman de
l'union du progrès (section de Constantino-
p'e) a répandu une proclamation conseil-
lant à hacun de vaquer maintenant à ses
affaires et de respecter la propriété et la
vie.
Les nationalités
Constantinople, 28 juillet.
Voici une communication officielle aux
journaux turcs :
Le commandant du 3' corps avait demandé
l'amnistie POUi' les insurgés des différentes na-
tionalités dans les trois vilayets à condition
qu'ils Hvreraicnt leurs armes aux autorités et
qu'ils rentreraient chez eux. Comme la convo-
cation des deux Chambres a amené la concor-
de complète entre les différentes nationalités
et a assuré la fidélité et rattachement sincère
au SuLtan, celui-ci a accédé a cette demande
sous les conditions précitées.
Les Jeunes-Turcs
Londres, 28 juillet.
Le correspondant du Daily Graphie à Pa-
ris a eu une conversation avec Hamed-
R;z>tl. chef du parti Jeune-Turc à Paris.
Ilamed-Riza lui a dit :
Nous ne demandons pas mieux que de voir
le Sultan remplir ses engagements ; aussi long-
temps qu'il les tiendra, son trône et sa per-
sonne seront sacrés. "-
S'il établit un gouvernement libéral consti-
tutionnel, il n'aura pas de plus fidèles sujets
quo les membres du parti Jeune-Turc. Nous
envisageons l'avenir avec confiance, et si le
Sullan exécute largement ses promesses, une
nouvelle ère de paix s'ouvrira, devant l'empire
turc.
Le sionisme
Londres, 28 juillet.
Le Dailij Tclegraph publie un télégram-
me d'un de ses correspondants de Saint-
Pétersbourg, disant que le programme du
PîurU Jeune-Turc, comprend la rétrocession
.1 1&
de la Palestine aux juifs. sur la base dit
projet des Sionistes.
Le sultan harangue la foule
Constantinople, 28 juillet.
Les journaux turcs annoncent seulemenf
aujourd'hui que le sultan s'est montra
avant-hier vers minuit à la foule rascml
biée devant Yi!diz-Kiosk.
Le sultan a ouvert lui-même la fenêtre
et a demandé pourquoi la foule était ve.
nue. Quelqu'un lui a crié :
Nous ne voulons pas autre chose que vois
Vi:)Lre Majesté en bonne santé. Depuis trente'
deux -nns, quelques traîtres nous ont caché
Votre Majesté. Maintenant nous l'avons vue.
Mille remerciements 1 Que notre Padichah vivf
longtemps I
Le sultan a répondu :
Mes enfants, soyez tranquil!es. Depuis mo:
avènement au trône, j'ai travaillé pour la
prospérité et le salut de la patrie.
Le bien-être de mes sujets qui me sont auss
chers que mes propres enfants, est mon plu*.
vif désir. Votre wenir, Dieu nfen est témoin'
est désormaiS assuré. Je travaillerai avec vous.
Vivez maintenant comme des frères en iouis-
sant de votre liberté. Je suis satisfait de la
fidélité et de la reconnaissance que vous nia
témoignez. Rentrez chez vous et prenez du re-
pos.
La fmiie s'est retirée après avoir vive-
ment acclamé le sultan, qui avait auprès de
;lui le grand-vizir, le cheik-ul-Islam, lviamil
puoha et 1 Omer-Rouchdi pacha.
1 Constantinople, 27 juillet.
Par suite de l'amertume intense causée
par l'ancien régime, par les abus criants,
par les inj ustices, par les arbitraires de
toute sorte, de véhémentes imprécations
commencent à se faire entendre contre un
certain nombre de fonctionnaires notables.
Cet état d'esprit, quoiqu'on le considère
assez naturel dans les circonstances actuel.
les, est cependant regardé comme un symp- 1
tôme inquiétant, car on appréhende des in-
cidents regrcttabks.
On conçoit qu'il faudra apporter de
grands changements, surtout du côté des
fonctionnaires du palais, qui se sont iden-
tifiés avec le gouvernement personnel c*
ont été la cause de beaucoup de souffran-
ces et on comprend que la tâche à laquelle
le gouvernement constitutionnel va avoir
à faire face, consistera surtout à écarter les
fonctionnaires incapables et corrompus et
à rétablir l'ordre dans !es différentes bran-
ches de l'administration.
Cette tâche, on le voit, est immense et
elle occupera un temps considérable.
La censure subsiste
Constantinople, 28 juillet.
La censure des télégrammes envoyés &
la presse étrangère est maintenant limitée.
Ainsi une dépêche d'hier, qui parlait de la
divergence de vues qui régnait au conseil
dos ministres tenu jeudi dernier à Yildiz-
Kiosk, conseil au cours duquel le sort de
l'Empire était en jeu, a été supprimée. Au
cours de ce conseil, en effet, quelques-uns
des ministres ne voulaient faire que des
concessions partielles, alors que les autres,
parmi lesquels Saïd pacha, Kiamil pacha.
préconisaient le rétablissement complet de
la Constitution. Le sultan pencha pour cette
dernière alternative. On ajoute même que
le sultan versa des larmes en dormant son
autorisation.
Comment a été obtenue l'amnistie
Cens tantinople, 28 juillet.
Les manifestations populaires ont conUI
nué dans toute la ville cet après-midi : ca-
pendant on a remarqué que quelques grou-
pes avaient adopté une attitude quelque
peu menaçante à cause du délai accordé à
l'exécution de la promesse d'amnistie gé-
nérale pour les individus coupables de fau-
tes politiques.
Une délégation importante s'est - rendue
auprès du grand-vizir pour exiger l'exécu-
tion immédiate de la mesure, en menaçant,
dans le cas contraire, de se rendre dans les
prisons pour libérer les prisonniers. la délé-
gation a également exigé la révocation des
ministres incapables et d'autres hauts fonc-
tionnaires associés à l'ancien régime.
Cette démarche causa au sultan une telle
impression que des ordres furent immédia-
tement donnés pour qu'on relâchât tous les
prisonniers politiques.
La situation est donc plus calme ; cepen-
dant, on continue à appréhender des trou-
bles.
Le serment constitutionnel
Constantinople, 28 juillet.
Il s'est produit hier à Andrinople uns
scène curilJse. La proclamation de la
Constitution ayant été notifiée aux autori-
tés militaires et les Jeunes-Turcs
firent jurer à celles-ci qu'elles soutien-
draient la Constitution. Les autorités ayant'
juré, l'ordre a été rétabli.
L'attitude des Grecs
Athènes, 28 juilïcf.
On mande de Smyrne que plusieurs mi".
liers de Grecs et de Turcs et de nombreux
officiers ont organisé une manifestation
imposante pour célébrer le rétablissement
de la Constitution en Turquie.
Les musiques ont joué les hymnes groc
et turc.
A JanÍno, en Epire, les Grecs ont mani-
festé avec enthousiasme. Ils avaient le mé-
tropolite et les notables à leur tête. Des
cris répétés de : « Vive la Constitution !
Vive la liberté ! » ont été poussés.
A Salonique également., !a manifestation"
des Circcs a été très imposante. EnVer bey,
a harangué la foule.
Dans plusieurs localités de Macédoine, leg
Jeunes-Turcs ont obligé les chefs bulgares
à se réconcilier.
De tous côtés, on signale un !'!rBn'd apai-
sement. Partout, les Grecs se montrent
tout disposés à appuyer le nouvel état de
choses.
La presse aihéniciïïîa ne cesse -dc rcd4
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Collections numériques similaires Bretagne Bretagne /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Bretagne "Recueil de titres originaux, copies, extraits, armes et tombeaux, concernant des abbayes et prieurés de France, formé par Gaignières et rangé par ordre alphabétique des monastères, du IXe au XVIIe siècle. VI. /ark:/12148/btv1b52525645v.highres « Recueil des principales maisons du royaume, distribuées suivant le projet et la table pour Mgr le duc de Bourgogne et Mgrs les ducs d'Anjou et de Berry. » — Généalogies des maisons royales et princières et de leurs ramifications, pièces originales, copies, dessins et aquarelles provenant de Gaignières. — Cf. H. BOUCHOT, Inventaire des dessins exécutés pour Roger de Gaignières..., t. III (Paris 1891), p. 395-423. II Pièces et extraits antérieurs à 1327 ; nombreux portraits d'après les monuments. /ark:/12148/btv1b525255926.highresNoblesse réformations de la noblesse Noblesse réformations de la noblesse /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Noblesse réformations de la noblesse " Noblesse Noblesse /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Noblesse "
- Auteurs similaires Bretagne Bretagne /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Bretagne "Recueil de titres originaux, copies, extraits, armes et tombeaux, concernant des abbayes et prieurés de France, formé par Gaignières et rangé par ordre alphabétique des monastères, du IXe au XVIIe siècle. VI. /ark:/12148/btv1b52525645v.highres « Recueil des principales maisons du royaume, distribuées suivant le projet et la table pour Mgr le duc de Bourgogne et Mgrs les ducs d'Anjou et de Berry. » — Généalogies des maisons royales et princières et de leurs ramifications, pièces originales, copies, dessins et aquarelles provenant de Gaignières. — Cf. H. BOUCHOT, Inventaire des dessins exécutés pour Roger de Gaignières..., t. III (Paris 1891), p. 395-423. II Pièces et extraits antérieurs à 1327 ; nombreux portraits d'après les monuments. /ark:/12148/btv1b525255926.highresNoblesse réformations de la noblesse Noblesse réformations de la noblesse /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Noblesse réformations de la noblesse " Noblesse Noblesse /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Noblesse "
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k75494798/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k75494798/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k75494798/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k75494798/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k75494798
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k75494798
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k75494798/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest