Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-07-10
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 10 juillet 1908 10 juillet 1908
Description : 1908/07/10 (N14000). 1908/07/10 (N14000).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7549459h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
W 14000. - 21 Messidor An 118
cnro cEsnimEg wbmcro
"Vendredi 10 Juillet 1908. — N: 14000.
t., 'O.p.ate.., -.',
► - Fondateur ;
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Oa Mil Trac suit Sil" Ct n
Paris 2 tr. 5 fr. 9 ir. 181T.
Départements 2 - 6 — t t - 20-
lJoion Postale 2 - 9 - t6 - 32. o
Fondateur t
AUGUSTE VACdUERlE
- I
ANNONCES
MM. I^AGlfcaUVaE, CERF ê
6, Place, de la Bourse
et aux BUREAUX DU rURNAJ.
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, : : -, TRIBUNE LIBRE
PARAITRE
C'est le titre d'une comédie
qui fut un gros succès ; et
c'est le titre aussi d'une co-
médie plus générale, qui se
ioua tous ies jours depuis
qu'il y a , des hommes.
.n8 avaient la véritame jusuue,
w s'Us avaient le vrai art. de guérir, ils
;« n'auraient que (aire de bonnets car-
x rés. t)
'Des bonnets carrés, du prestige, lé-
gitime ou non, qu'il soit offert ou re-
cherché, tout le monde en veut. Et ce
n'est pas le plus beau de notre affaire.
La toute récente création de nou-
veaux pairs d'Angleterre a provoque
chez nos voisins d'outre-Manche un
- I-tl de gaieté ohez les uns, quelques
irrognements chez les autres ; car le pi*
quant de la mesure c'est qu'elle tut
prise paraît-il sur l insistance et au
profit des libéraux, grands contemp-
leurs de toutes tes vanités. Mais « le
bonnet carré » ? la perruque à mar-
jeaux ? Cela yaut bien qu'on réfléchis-
se. -Et quand on réfléchit sur des idées
arrêtées de longue date, ces idées sont
bien malades. Philinte a souri ; Alces-
te a rouié de gros yeux. Et tout est
retrouvé pour le mieux dans le meilleur
des mondes.
A vrai dire, s'il est toujours comique
de voir les gens prêcher d'une sonte et
n.gir d'une autre, que nous manque-t-il
Je plus souvent à nous-mêmes, pour
les imiter, sinon l'occasion ? La philo-
sophie console parfois des ambitions,
elle en bride rarement. Et il n'est pas
rare que notre sagesse ait pour origine
les raisons mêmes qui dictaient sa con-
duite au renaM de la fable. D'ailleurs
nous ne nous rendons pas toujours un
compte exact de la portée que peut avoir
un principe ni des spéculations où
s'amuse notre pensée. Quand il n'est
guère autre chose qu'un paradoxe ou
nous nous plaisons, il nous plaît. Il
est comme un panache sur notre esprit.
Mais lorsque vient l'heure où nous lui
Sdevons sacrifier un bénéfice réel, nous
en rabattons. Pour s'en aller tout de go
à la traverse de ce fatras de préjugés,
de conventions, de vieilleries, de sot-
itises, où se dorlote l'indolence humai-
ne comme un dormeur sous un édre-
don, il faut une belle raillance et pas
mal de désintéressement. N'est-il pas
£ >ien plus doux de se laisser couler sur
le fleuve facile de la vie, sous le ra-
gard admiratif ou complaisant du rive-
rain, que de remonter le-dur courant ?
Et quand il s'agit d'une question com-
me celle des titres honorifiques, les dis-
tinctions, de toutes ces broderies,
ëcharpes et médailles ou plumes dont
nous mous parons à-la façon des rois
nègres, nous sommes bien d'accond
pour proclamer leur vanité. Mais sont-
ce des calices à boire ? Qu'ont-ellete, ces
choses, de déshonorant ? Et, en toute
conscience, ne les méritons-nous
point ? Nos idées, tes plus fermes aux
heures de la spéculation philosophique,
aie valent pas une noisette quand elles
sont prises dans cette rude entaille fai-
te pour l'une de ses branches, de l'in-
térêt privé, et pour l'autre de l'opinion
du voisin. Même complètement déta-
ichés des choses, combien reculent, par
pudeur, par - fausse honte ; combien
'd autres hésitent par paresse, par lnau-
férence, par goût de la tranquillité ?
D'ailleurs ce n'est point, à bien ré-
fléchir, un si grand mal en soi-même
que ces marques distinctives par où
s'affirme aux yeux des autres le mérite
îdes hommes. C'est même une chose
(juste, utile. Il est bon que les meilleurs
deviennent des exemples ; et c'est une
loi de la nature que les plus panfaits
passent en évidence, provoquent, «sti-
înulsnt l'imitation ; ils sont ainsi les
nelifs ouvriers de l'évolution. Mais là
où les choses se gâtent c'est que pour
beaucoup ces marques de supériorité
ne sont plus guère que des moyens. Et
derrière la vanité satisfaite il y a, ce
qui. est plus grave, profit usurpé,
« La vanité est si ancrée dans le cœur
0e l'homme s'écrie Pascal, qu'un sol-
dat, un goujat, un cuisinier, un cro-
heteur se vante et veut avoir des- ad-
mirateurs, et les philosophes mêmes
-en veulent. » Ce qui, après tout, n'a
rien de déshonorant. Paine une chose
très bien, le prouver, provoquer à ce
jsujet une constatation flatteuse, qu'est-
ce autre chose que de s'assurer, fut-on
penseur ou marmiton, la préférence
dans son métier, c'est-à-dire s'assurer
Ha vie ? Mais quand au lieu de prou-
ver on veut jeter de la poudre aux
yeux et obtenir par la ruse ce qu'on
-n'obtient point par le mérité, cette am-
bition-là est la plus basse qui soit.
jEt l'activité qu'elle provoque ne vaut
pas un fétu de paille.
Car ce qui le pousse, ce besoin de
paraître, grand et lancinant moteur de
si nombreuses actions humaines, c'est
tce même sentiment atavique de domi-
nation qui armait les premiers hom-
Ines. Le plus fort primait le faible, le
domestiquait, l'asservissait. Et n'est-ce
point user du même procédé, par
d a,tes, moyens que la force, par le
tprestige, que d'en imposer à son voi
«in ? Ce lustre que nous recevons 'des
lifres, des décorations, des uniformes,
est une manière de mainmise sur les
autres, une diminuiio capitis pour eux,
un moyen d'esclavage et, non justifiés,
une piperie. -
Sont-ils bien nécessaires, d'ailleurs,
à la véritable supériorité, ces signes ex-
térieurs de supériorité ? Les peuples
républicains de naissance ne les con-
naissent point, ne les admettent pas.
Ils jugent fort sagement que la vraie
valeur s'impose de reste sans que le
fait du prince ait à intervenir dans ce
but. D'autre part, les distances factices
qui se créent ainsi, et cette espèce de
pavoi où les plus sages, les plus sim-
ples, les plus modestes se trouvent por-
tés comme des Bouddhas, ne sont que
des moyens douteux quant aux résul-
tats d'honorer la vertu.
Certes les hommes diffèrent entre
eux. Et on a pu dire fort justement
« qu'il y a plus de distance entre tel et
tel homme qu'entre tel homme et telle
bête. » Mais c'est affaire à la nature. Et
en ce faisant n'y va-t-elle pas de telle
sorte que la teinte fondue est parfaite
et que le plus habile n'y saurait tran-
cher les tons ? Pourquoi nous aviser de
tracer des limites nous-mêmes à des
castes ? Si distants que les hommes
soient les uns des autres il y a moins
encore d'éloignement entre eux qu'en-
tre eux et leur lointain modèle, cet
idéal vers lequel un instinct secret les
pousse ; et vus de ce point, où dans
quelques milliers d'années ils se doi-
vent rejoindre, en dépit des présentes
distances qui les séparent, ils se con-
fondent.
C'est qu't regarder 'à'un peu près,
nous n'avons pas lieu d'être bien fiers.
Nous sommes encore en pleine barba-
rie. A peine en sortons-nous, si nous
en sommes sortis ; et nous avons en-
core dans le sang toutes les tares de
cette barbarie, dont la moins tenace
n'est, certes, pas la vanité. Vous m'ob-
jecterez que le jour où les hommes
n'auront plus leur vanité pour stimu-
lant, l'énergie humaine perdra, la moi-
tié de son intensité. L'âpreté humaine,
faudrait-il dire ; car cette intensité
n'est pas plus nécessaire à la vie que
la fièvre au malade ; et de ce qu'il man-
que au malade sa maladie, il n'est pas
prouvé qu'il lui manque quelque
chose.
X.
LA POLITIQUE
APRES L'INCIDENT D'AZEMMOUR
- Il n'est pas vrai que la nou-
velle question posée par M.
Jaurès à M. Pichon ait été inu-
tile : l'exaspération même des
, feuilles azizistes souligne l'et-
I fet utile de cette intervention.
On doit se féliciter de toutes les initia-
tives parlementaires qui stimulent.. le
gouvernement visiblement embarrassé et
divisé en présence de cette question ma-
rocaine sans cesse grosse de consé-
quences.
Et, sans doute, il serait surprenant
que parmi nos ministres quelques-uns
n'aient point démêlé la gravité de cer-
taines imprudences ou de certaines in-
oertitude
Le fait dont le gouvernement tout en-
tier doit tenir compte, c'est que les par-
tisans de l'évacuation du pays chaouia,
d'abord fort rares, deviennent de plus
en plus nombreux. La nécessité de cette
opération est si visible qu'elle est préco-
nisée par des représentants de toutes
les nuances de l'arc-en-ciel politique,
des feuilles rouges aux feuilles roses.
D'abord, Jes coups de tête des chefs
militaires restent toujours possibles en
présence "d'un ministre qui distribua à
trois jours d'intervalle alternativement
éloges et blâmes à l'occasion d'un mê-
me fait.
Ensuite, il y a lieu He ramener à leurs
postes ordinaires ces tirailleurs sénéga-
lais dont l'absence a eu pour effet d'ex-
poser au massacre des Maures de peti-
tes colonnes comme celles que comman-
dait l'infortuné capitaine Mangin. D'au-
tres événements aussi déplorables pour-
raient de nouveau se produire. Enfin, il
serait temps, d'ailleurs, au dire d'indis-
crets ,de mettre fin à certaines désertions
suscitées par le prestige de l'uniforme
glorieux ae l'armée d'Abd el Aziz : Quel
rêve ! Voir Marrakech et mourir !
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Utiiourd'hui jeudi :
8 Lever du soleil, à 4 h. 8 ; coucher, ï
Matinées. - Nouveau-Cirque, Cirque Mé-
drano, Jardin d'Acclimatation.
Courses à Maisons-Laffitte.
Pointe d'ail.
Un de nos plus sympathiques mi-
nistres (ils le sont tous !), qui est ori-
ginaire du Midi, se rendait l'autre ma-
- tin au Conseil des ministres en com-
pagnie du garde des sceaux. 'Or, il em-
poisonnait littéralement l'ail. Comme il
gravissait assez rapidement les mar-
ches du perron de l'Elysée : « Ouf 1
fit-il essoufflé, je perds l'haleine. »
— Ah 1 mon cher, reprit flegmati-
quement M. Briand, puissiez-vous dire
vrai. Quel bonheur pour vos collè-
gues I »
Y )
Pour M. Chéfon.
Louvois visitait un jour les Bureaux
du ministère de la guerre. Il entre par-
tout et, sur une table, il trouve une
p" aire de lunettes :
— Voyons un peu, dit-il, si 'elles va-
lent les miennes.
On juge l'occasion superbe pour glis-
ser sous son nez son propre éloge, ad-
mirablement calligraphié par le plus
habile expéditionnaire de la maison.
Alors, Louvois, rejetant les lunettes r:
— Elles ne sont guère meilleures que
les miennes. elles grossissent vrai-
ment trop les choses..
AUTREFOIS
Rappel du 10 juillet 1872. —» A VAssem-
blée, l'urgence a été déclarée sur le pro»
jet d'emprunt de 3 milliards.
On va inaugurer, à l'Ecole des beaux-arts,
un monument élevé au peintre Ingres.
Mort de Denonvilliers, de l'Académie de
mdecine, un des représentants les plus
distingués de la chirurgie française.
Le pont du Point-du-Jour est maintenant
complètement réparé. On ne voit plus trace
des brèches faites par les obus prussiens et
français.
Remise au général Faidherbe, ex-général
de l'armée du Nord, pendant la guerre,
d'une épée d'honneur qui lui est offerte par
plusieurs millions de souscripteurs ; sur la
lame sont inscrits les noms de toutes les
communes qui ont participé à la souscrip-
tion.
On dit que la censure a refusé à M. Car-
valho, directeur du Vaudeville, l'autorisa-
tion de jouer Les Marrons du feu, d'Alfred
de Musset.
Hôtel. particulier.
Un de nos amis descendait, l'autre
soir, la rue Notre-Dame-de-Lorette,
lorsqu'il fut poliment accosté par une
dame d'âge canonique, de maintien ré-
servé.
Notre ami s'arrête et écoute la solli-
citeuse lui dire :
— Monsieur, avez-vous une bonne
amie ?
- Vous êtes bien curieuse, mada-
me ?
— Oh ! tranquillisez-vous, fe ne vous
en procurerai point. Mais si vous en
avez une, et que vous ne sachiez où
conduire votre conquête, je vous re-
commande cet abri confortable et douil-
let. :-
Et la dame, avec un sourire, tira de
son réticule une carte de visite où se
lisaient ces mots :
COQUET PIED-A-TERRE
Très discret
Ancien Hôtel particulier
d'un Littérateur bien connu
Rue N°
Paris.
- Mais c'est l'hôtel de feu X., s'ex-
clama notre Parisien suffoqué. Cette
demeure, où vingt années durant, dé-
filèrent tous ces gens de tM~h~ que
le plus malicieux des gros I\omn\ de
- gros bon sens secevait. comme des
neveux 1
— Oui, monsieur, répartit la dame,
que voulez-vous. La critique est mor-
te, mais l'amour est éternel.
Des « Lectures pour tous ».
Les animaux favoris de nos plus no-
toires contemporains : Dumas père
possédait un vautour nommé Jugur-
tha ; Théophile Gautier entretenait tou-
te une meute. Sur les tapis de Loti,
ronronnent Moumoutte-Blanche et Mou-
moutte-Chinoise ; sur ceux d'Anatole
France, le contemplatif Pascal et le ter-
rible Hamilcaf.
Henri Pille avait deux coqs, Gobe-
Hannetons et Souffle-à-Rebours. Ed-
mond Haraucourt, lui aussi, posséda
un cop, M. Blanc, qui adorait le poulet
froid.
Le ouistiti Vermillon, de Manette Sa-
lomon, se nommait Cocoli, et logea un
an. rue Saint-Georges, chez Jules de
Goncourt.
Sur la table de travail dé M. Max
Nordau, il y a toujours une petite sou-
ris qui se promène, se faufile parmi
les piles de livres et les feuilles de pa-
pier, et, au moindre bruit, couche ses
oreilles, et se réfugie dans une minus-
cule maison de verre, près de l'en-
crier.
Jenny est tortue, de son métier, chez
M. Maurice Barrés, à Neuilly ; M. Ai-
mé Morot héberge, sous son toit, d'é-
normes serpents crotales. Sous les châ-
taigners de la place Beauveau, dans les
jardins du ministère, caquète, piaille
et mue toute une volière (ce ne sont
pas les attachés de cabinet). C'est au
milieu des hôtes de sa volière : cigo-
gnes, grues, flamants roses, ibis, paons
et pintades, que M. Clemenceau se re-
pose des soucis du pouvoir.
Au voleur t
On raconte qu'un financier, qui dé-
fraye toutes les chroniques depuis quel-
ques mois, fut pris l'autre soir d'une
peur irraisonnée. Troublé sans doute
par la lecture des faits divers et les ré-
cits des crimes d'actualité, il se mit à
sonner éperdument ses domestiques, en
criant : « Venez, venez vite, il y a un
voleur dans ma chambre ! »
'Après maintes recherches, son valet
de chambre lui dit, imperturbable ■:
« Monsieur peut être assuré qu'il n'y
a que lui dans sa chambre. »
Nez à nez. -.
à nez.
L'archevêque de Bordeaux qui a un
petit nez grec, d'un dessin régulier, ai-
mait à plaisanter l'évêque du Puy, qui
est affligé d'un appendice nasal énor-
me.
L'évêque finit par se lasser de ses
brocarts. « Hé l monseigneur, répondit-
il, que Votre Grandeur laisse donc
mon nez ! Elle croit sans doute qu'il a
été fait aux dépens du sien 1 »
Comédien amateur.
Un jeune coiffeur, quI se croyait rdu
talent, jouait le rôle du compère dans
une revue du théâtre de Pont-à-Mous-
son. Il fut outrageusement sifflé. Avec
un flegme imperturbable, il s'approche
de la rampe, salue le public et s'expri-
me ainsi : « Hier, messieurs, je vous
accommodais * ce soir, je vous incom-
modé ; demain, je vous raccommode-
rai. a
Salve d'applaudissements 1
En passait.
Les députés ont éprouvé le besoin de fon-
der un nouveau groupe. On ignore S'il fera
beaucoup de besogne, mais on peut être as-
suré qu'il fera beaucoup de bruit. Il s'agit
en effet de réunir — sans distinction d'opi-
nions — tous les élus du peuple qui s'adon-
nent à la musique. Le nouveau groupe s'est
dénommé lui-même « le groupe des dépu-
tés-musiciens n.
Sa création répond au besoin d'harmonie
universelle qui règne dans les couloirs du
Palais-Bourbon depuis que M. Clemenceau
a déclaré catégoriquement qu'il n'avait plus
d'ennemis. Désormais, plus de sons discor-
dants ; la mesure sera constamment res-
pectée ; et au lieu de potiner pendant les
entr'actes, nos élus iront faire des gammes
et des arpèges ou des vocalises dans les sal-.
les réservées jusqu'ici aux commissions.
Les « députés-musiciens » ont choisi com-
me chef d'orchestre M. Pichon, qui a fait
ses preuves dans le concert européen, et
comme sous-chef le général Picquart, dont
le talent de pianiste n'est plus à louer. M.
Ribot jouera de la petite flûte, M. Jaurès de
la grosse caisse et l'abbé Lemire de l'har-
monium.
On assure que M. Aijnard exécutera sur
le trombone des variations admirables, et
que M. Paul Deschanel est un virtuose du
piston qu'on ne soupçonnait pas.
Maujan est irrésistible dans « l'homme-
orchestre » et il joue simultanément du
chapeau chinois, des cimbales, du tambour
et de l'ophicléide avec un brio qui fait pâ-
mer M. le président du Conseil.
Bref, sans rivaliser encore avec la musi-
que de la garde répufJlicaine, la fanfare du
Palais-Bourbon a déjà groupé un nombre
d'exécutants remarquables, dont les débuts
en public seront sensationnels.
J'espère que les sénateurs ne vont pas
demeurer en reste, et qu'ils auront à cœur
de former immédiatement « l'orphéon du
Luxembourg u, -
J'aimerais — lors des prochaines solen-
nités du H juillet — entendre l'orphéon du
Luxembourg entonner le clic-tir des vieil-
lards, de Faust, tandis que la fanfare dit
Palais-Bourbon ferait éclater dans les airs
(sous la hxxule direction de M. Pichon) la
marche fameuse du te siège de Pékin ».
Le Chemineau.
Les services administratifs
du Vatican
Le Vatican vient de faire connaître les
transformations apportées dans l'organisa-
tion administrative de ses divers. services.
La liste de ce qu'il appelle des réformes
administratives est assez longue. Nous ne
croyons pas devoir la publier parce que
la plipart de ces réformes ne présentent
pas, aux yeux de nos lecteurs, un bien
grand intérêt.
Il en est une cependant qui vaut la peine
d'être mentionnée, c'est celle qui concerne
la congrégation de la propagande.
Les attributions de cette congrégation,
qui fait souvent parler d'elle, parce qu'elle
airige la politique extérieure du Vatican,
consistent à surveiller et à étendre l'in-
fluence de nglise dans les pays dits de
miss'on, c'est-a-dire partout où le catholi-
cisme n'est pas religion d'Etat, mais sim-
plement religion dominante. Cette influen-
ce s'exerce comme on le sait, au moyen
de prêtres qui s'appellent des missionnai-
res et qui sont -chargés d'évangéliser les
populations dites « infidèles ».
» Or, jusqu'à ce jour, écrit le correspon-
dant du Temps à Rome, faisaient partie des
pays de mission la Grande-Bretagne, la
Hollande, le Canada et les Etats-Unis d'A-
mérique. A partir d'aujourd'hui, ces pays
rentrent dans le droit commun et sont dé-
tachés de la congrégation de la propa-
gande.
(1 Par cette mesure, le Vatican laisse en-
tendre évidemment qu'en Angleterre, en
HoMande, et dans toute l'Amérique du
Nord, le catholicisme est de plus en plus
en progrès, au point d'y constituer une
force nationale, et que, de plus, il cesse
d'y être persécuté par les autres religions.
C'est la une réforme qui fera grand effet
dans les pays qui en sont l'objet, et qui
confirme l'importance que prennent de plus
en plus dans l'Eglise les pays anglo-sa-
xons. »
Ces renseignements, évidemment puisés
à bonne source, sont 3a confirmation de
ce que nous disons depuis longtemps dé-
jà, à savoir que. pour compenser son dé-
chet européen, le Vatican oriente de plus
en plis ses efforts du côté du Nouveau-
Monde où il est sûr de voir s'otivrir à son
profit. de puissants coffres-forts.
La polit:que qui consiste à donner l'im-
pression que le catholicisme en Amérique
est devenu une force nationale, est évi-
demment une politiaue d'intérêt fort ha-
bile. - P, G.,
TRIBUNE CORPORATIVE
Congrès annuel des Cantonniers
Deuxième Journée "V
La délégation chez le ministre. - Discours en faveur de
l'union. — Lcs nouveaux -statuts. — Le Conseil fédéral.
Remerciements à la presse.
La deuxième journée au congrès des
cantonniers a été, comme la. première,
bien employée, et les travailleurs de la
route ont montré qu'ils n'aiment pas chô-
mer devant 5a besogne, si lourde et si fa-
tigante soit-elle.
Hier matin, pendant. que la délégation
nommée la veille était présentée par MM.
Cornet et Noguès, députés, à M. Barthou,
ministre des travaux publics, et qu'elle lui
remettait le cahier de ses revendications
en même temps qu'elle l'invitait à venir
présider le banquet qui doit clôturer, ce
soir. les travaux du congrès, les commis-
sions nommées par le congrès pour l'éla-
boration de ses travaux et notamment des
nouveaux statuts de la Fédération, se réu-
nissait au Palais d'Orléans.
Séance de l'après-midi
, 3 heures, la séance plénière est ou-
verte par M. Bussières, député, qui sou-
haite la bienvenue à son collègue et ami,
M. Charles Dumont, député du, Jura
et donne quelques conseils pratiques de
nature à sceller l'union qui s'est effectuée
dans la dernière séance entre les deux fé-
dérations jusqu'alors divisées.
L'assemblée applaudit et acclame, une
fois de plus, l'union des cantonniers.
Dans une allocution très applaudie, M.
Dumont s'associe aux paroles de son col-
lègue et manifeste l'espoir qu'une union
durable donnera à la Fédération la force
dont elle a besoin pour poursuivre la réa-
lisation de ses légitimes revendications.
Le bureau de séance est ensuite composé
comme suit :
Président. M. Rialland, du Maine-et-
Loire ; assesseurs. MM. Tissandier, du
Cantal, et Malon, de la Meuse ; secrétaire,
M. Lefèvre, de PAisne.
A ce moment, M. Jean Bourrât, député
des Pyrénées-Orientales, fait son entrée
dans la salle, au milieu des applaudisse-
ments des congressistes.
Malgré la fatigue qui a fini par s'empa-
rer de sa voix, M. Lucien Cornet tient à
présenter son collègue, en demandant la
parole pour lui et pour son autre collè-
gue, M. Noguès. Il profite de la circons-
tance pour faire l'éloge de M. Charles Du-
mont, dont le cœur chaud et les idées gé-
néreuses pour tout ce qui touche aux œu-
vres de la démocratie laborieuse ne pou-
vaient manquer de le faire s'intéresser au
sort des modestes fonctionnaires crue sont
les cantonniers. £
M. Bourrât, qui n'a que quelques ins-
tants à consacrer au congrès parce que le
devoir parlementaire l'appelle à la Cham-
bre. prononcé une allocution très cordiale-
ment chaleureuse et aussi trSs applaudie.
Le député des Pyrénées-Orientales dit
combien il aime à revoir par la pensée le
premier banquet des cantonniers qui eut
lieu il y a sept ans, dans le Salon des Fa-
milles, à Saint-Mandé, sous la présidence
de son collègue et ami, M Lucien Cornet.
C'était le début et comme l'éveil à la vie
corporative de cete vaillante armée d'hum-
bles fonctionnaires que sont les canton-
niers. Il se félicite aujourd'hui de voir les
cantonniers prendre conscience de leur for-
ce et s'unir pour arriver à la réalisation
de leurs revendications.
« Je suis, dit-il, l'unique conducteur des
ponts-et-chaussées qui fasse partie de la
Chambre des députés et j'en reporte tout
l'honneur sur la grande famille à laquelle
j'ai appartenu. »
Après avoir rappelé qu'il fut, au conseil
général des Pyrénées-Orientales, un défen-
seur des cantonniers contre l'administra-
tion qui voyait d'un mauvais œil poindre
leurs revendications et qui s'opposait à tou-
tes réformes les concernant ; après avoir
dit qu'il s'est efforcé depuis, dans la com-
mission parlementaire qui a eu à s'occu-
per de la situation des cantonniers, d'ob-
tenir 'les améliorations qui ont été faites et
qui doivent être suivies sans cesse d'au-
tres réformes, au fur et à mesure que
marche le progrès, il recommande aux
congressistes de conserver précieusement
l'union qu'ils viennent d'accomplir et à la-
quelle ont tant contribué ses collègues,
union qui leur permettra d'éviter les er-
reurs et de faire une excellente besogne
pour leur avenir corporatif.
M. Noguès succède à M. Bourrât. Il re-
mercie l'assemblée du sympathique accueil
fait-à son collègue et dit combien il est
heureux de voir scellée une union à laquelle
M. Cornet et lui ont travaillé de leur mieux.
Il voit dans le bon esprit du congrès la
juste récompense des efforts qui ont été
faits pour aboutir à ce résultat.
Vous en étiez arrivés, dit-il, à vous tirer
les uns sur les autres pour deb questions
de personnes. Vous avez enfin reconnu que
vous faisiez fausse route, que les divisions
affaiblissent les meilleurs organismes et
que seule l'union est génératrice de force.
Dans cette œuvre d'union entreprise par
vos présidents d'honneur, je dois reconnaî-
tre que chacun ayant- bien voulu y mettre
du sien, les deux bureaux de vos fédéra-
tions ont facilité notre tâche. Le principe
d'union ayant été admis, restaient à régler
les questions de détail. Nous avons pensé
que vous étiez mieux qualifiés que nous pour
opérer ce règlement, et c'est la tâche qui
vous incombe aujourd'hui. Nous avons
réussi à rapprocher les partis en présence,
à préparer leur soudure. A vous d'y appor-
ter le ciment nécessaire pour que cette sou-
dure devienne définitive.
Le premier mot du ministre des travaux
publics, qui nous a fait ce matin l'honneur
de recevoir votre délégation et de lui pro-
mettre d'assister. à votre banquet parce
qu'il s'agit d'une agape d'union fraternelle,
a été celui-ci : « Voilà une bonne opération.
C'est le meilleur moyen, pour les canton-
niers, d'aboutir à. des résultats sérieux dans
leurs revendications. »
Ne vous divisez donc plus, ait M. Noguès,
et le temps fera disparaître tout qui, .jus-
que-là, a pu retarder votre marche dans la
voie où vous' devez trouver une amélioraI
tion de votre condition. Vous n'êtes, pas ri-
ches. Les travailleurs sont généralement
pauvres, et vous êtes les plus pauvres des
fonctionnaires organisés corporativement.
Faites des économies. Réduisez vos '!rai!f
le plus possible, ne dépensez, pour votre
journal, notamment, que le strict nécessai-
re. Faites-vous des réserves pour l'avenir.
et la bonne marche de votre fédération.
Nous uésirons que vous quittiez Paria
dans la paix et dans l'union fraternelle, et
c'est dans cet espoir que nous vous disons
que vous pouvez compter sur notre dévoue-
ment pour vous aider.
Les paroles de M. Noguès sont couver-
tes d'applaudissements et de cris de : Vivô
l'union t
M. Cornet prend à nouveau la parole.
- Mon collègue et ami, M. Noguès, dit-il,
ne vous a pas tout dit au sujet de la visite
faite au ministre des travaux publics. Il ne
vous a pas dit qu'il avait préparé l'ac-
cueil qui a été fait à votre délégation en faf.
sant le siège du ministre et si bien que M.
Barthou a formellement promis de venic
présider votre banquet.
C'est la meilleure démonstration que le
gouvernement a .suivi avec intérêt vos ef-
forts vers l'union. Il ne fût point venu si
vous n eussiez point été d'accord entre
vous. Il viendra pour la première fois vous
présider parce que la grande famille des
cantonniers vient d'affirmer sa complète
entente. C'est un résultat que vous devez
à M. Noguès et à votre délégation.
toute la salle applaudit ces paroles et
on crie encore : Vive l'union 1
Les nouveaux statuts
La parole est ensuite donnée à, M. Lau-
nois, rapporteur de la commission chargée
de présenter les nouveaux statuts de la fé-
dération unifiée.
Après avoir dit que la commission, dans
son travail, s'est inspirée du désir de fu-
sionner, d'une façon aussi parfaite qu'elle a
pu le faire, les statuts des deux anciennes
fédérations, M. Launois donne lecture des
nouveaux statuts .arrêtés par cette commis-
sion.
Les articles de ces statuts sont adoptés
un à un, au fur et à mesure de leur lecture.
Une discussion s'engage au sujet de l'arti-
cle 23, relatif à l'organisation des scrutins
secrets dans les assemblées générales de la
fédération.
Y prennent part un certain nombre de
délégués, notamment MM. Fourtineau, Cou-
dry, Dénier, Noguès, Launois.
M. Dénier, de l'Yonne, ayant fait remar-
quer qu'il né pouvait pas être fédéré parce
qu'il n'avait pii réussir à grouper ses col-
lègues du département, mais qu'il n'en était
pas moins de cœur avec la fédération, M.
Cornet vient dire, aux applaudissements
de toute la salle, que M. Dénier est le seul
survivant des trois cantonniers qui eurent
les premiers lidée d'un groupement corpo-
ratif, il y a 7 ou 8 ans, et à ce titre, il de-
mande qu'il 60it admis comme membre ho-
noraire et appelé au bureau à la place
d'iKonneur.
C'est au milieu d'une ovation que ce brave
cantonnier vient prendre place au bureau
et qu'il remercie ses collègues par quel-
ques paroles émues.
La salle, à ce moment, donne un specta-
cle réellement beau de sa reconnaissance
à. l'égard d'un des premiers artisans de l'u-
nion corporative des cantonniers.
Finalement ,il est décidé, en ce qui con-
cerne l'article 23,que les termes de cet arti-
cle seront maintenus et qu'il ne sera rien
changé au mode de scrutin qui accorde une
voix à chaque délégué représentant une as-
sociation, quel que soit le nombre des mem-
bres de cette association, les intérêts de
toutés les associations étant absolument
les mêmes.
L'ensemble des statuts est ensuite mi.
aux voix et adopté.
Le nouveau conseil fédéral
M. Launois, rapporteur de la commis-
sion de révision des statuts, dit que. cette
commission a crn devoir se préoccuper, en
vue d'ajouter une nouveilo force à l'esprit
d'ufron, de la composition du nouveau
conseil fédéral. Sans vouloir en rien peser
sur 'a décision et les votes du congrès, qui-
est souverain juge de ce qu'il convient de
faire, elle a pensé qu'une indication aurait
peut-être son utilité. Elle propose donc de
faire entrer dans -le conse;' fédéral, qui se-
ra composé de 9 membres, trois membres
pris dans chacun des conseils fédéraux
des deux fédératons anciennes.
Les trois autres membres qui devront
compléter le conseil seraient pris parm.
les candidatures qui pourront se produire
dans le sein du congrès.
Cette proposition est acceptée, et on afd-
fiche aussitôt la liste des membres des an-
ciens conseils fédéraux.
La seance est alors suspenaue pour pro-
céder au scrutin secret, lequel a lieu par
l'appel du délégué de chaque département,
muni de pouvoirs réguliers.
Apris le dépouillement du scrutin pour
la nomination des six membres en ques-
tion, la séance est reprise et le président
proclame (lus les délégués dont les noms
suivent :
MM. Leroy, de l'Oise ; Génibel, du Lot-ef-
Garonne ; Marand, de la Haute-Vienne ;
conseillers sortants de la fédération #bnéra-
le ; Launois, des Ardennes ; Vial, du Rhô-
ne : Labussière, de l'Allier, conseillers sor-
tants de la fédération nationale.
- Après le dépouillement du scrutin ouvert
pour compléter le conseil fédéral, les trois
membres suivants sont proclamés élus :
M. Lecat, de la Marne ; Vérité, de la:
Somme ; Héron, de l'Eure-et-Loir.
L'élection des cinq membres qui doivenf
composer la commission de contrôle est
remise la prochaine séance,
Remerciements à la presse
Avant de lever la séance, un membre dtf
congrès demande à l'swettaWée de voter dq
cnro cEsnimEg wbmcro
"Vendredi 10 Juillet 1908. — N: 14000.
t., 'O.p.ate.., -.',
► - Fondateur ;
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Oa Mil Trac suit Sil" Ct n
Paris 2 tr. 5 fr. 9 ir. 181T.
Départements 2 - 6 — t t - 20-
lJoion Postale 2 - 9 - t6 - 32. o
Fondateur t
AUGUSTE VACdUERlE
- I
ANNONCES
MM. I^AGlfcaUVaE, CERF ê
6, Place, de la Bourse
et aux BUREAUX DU rURNAJ.
Adresser toutes les Communications au Directeur
Adresser Lettres et Mandats au Directeur
ADMINISTRATION' ST REDACTION : 14, Rue du Mail. ----\ Téléphone : 102-82
, : : -, TRIBUNE LIBRE
PARAITRE
C'est le titre d'une comédie
qui fut un gros succès ; et
c'est le titre aussi d'une co-
médie plus générale, qui se
ioua tous ies jours depuis
qu'il y a , des hommes.
.n8 avaient la véritame jusuue,
w s'Us avaient le vrai art. de guérir, ils
;« n'auraient que (aire de bonnets car-
x rés. t)
'Des bonnets carrés, du prestige, lé-
gitime ou non, qu'il soit offert ou re-
cherché, tout le monde en veut. Et ce
n'est pas le plus beau de notre affaire.
La toute récente création de nou-
veaux pairs d'Angleterre a provoque
chez nos voisins d'outre-Manche un
- I-tl de gaieté ohez les uns, quelques
irrognements chez les autres ; car le pi*
quant de la mesure c'est qu'elle tut
prise paraît-il sur l insistance et au
profit des libéraux, grands contemp-
leurs de toutes tes vanités. Mais « le
bonnet carré » ? la perruque à mar-
jeaux ? Cela yaut bien qu'on réfléchis-
se. -Et quand on réfléchit sur des idées
arrêtées de longue date, ces idées sont
bien malades. Philinte a souri ; Alces-
te a rouié de gros yeux. Et tout est
retrouvé pour le mieux dans le meilleur
des mondes.
A vrai dire, s'il est toujours comique
de voir les gens prêcher d'une sonte et
n.gir d'une autre, que nous manque-t-il
Je plus souvent à nous-mêmes, pour
les imiter, sinon l'occasion ? La philo-
sophie console parfois des ambitions,
elle en bride rarement. Et il n'est pas
rare que notre sagesse ait pour origine
les raisons mêmes qui dictaient sa con-
duite au renaM de la fable. D'ailleurs
nous ne nous rendons pas toujours un
compte exact de la portée que peut avoir
un principe ni des spéculations où
s'amuse notre pensée. Quand il n'est
guère autre chose qu'un paradoxe ou
nous nous plaisons, il nous plaît. Il
est comme un panache sur notre esprit.
Mais lorsque vient l'heure où nous lui
Sdevons sacrifier un bénéfice réel, nous
en rabattons. Pour s'en aller tout de go
à la traverse de ce fatras de préjugés,
de conventions, de vieilleries, de sot-
itises, où se dorlote l'indolence humai-
ne comme un dormeur sous un édre-
don, il faut une belle raillance et pas
mal de désintéressement. N'est-il pas
£ >ien plus doux de se laisser couler sur
le fleuve facile de la vie, sous le ra-
gard admiratif ou complaisant du rive-
rain, que de remonter le-dur courant ?
Et quand il s'agit d'une question com-
me celle des titres honorifiques, les dis-
tinctions, de toutes ces broderies,
ëcharpes et médailles ou plumes dont
nous mous parons à-la façon des rois
nègres, nous sommes bien d'accond
pour proclamer leur vanité. Mais sont-
ce des calices à boire ? Qu'ont-ellete, ces
choses, de déshonorant ? Et, en toute
conscience, ne les méritons-nous
point ? Nos idées, tes plus fermes aux
heures de la spéculation philosophique,
aie valent pas une noisette quand elles
sont prises dans cette rude entaille fai-
te pour l'une de ses branches, de l'in-
térêt privé, et pour l'autre de l'opinion
du voisin. Même complètement déta-
ichés des choses, combien reculent, par
pudeur, par - fausse honte ; combien
'd autres hésitent par paresse, par lnau-
férence, par goût de la tranquillité ?
D'ailleurs ce n'est point, à bien ré-
fléchir, un si grand mal en soi-même
que ces marques distinctives par où
s'affirme aux yeux des autres le mérite
îdes hommes. C'est même une chose
(juste, utile. Il est bon que les meilleurs
deviennent des exemples ; et c'est une
loi de la nature que les plus panfaits
passent en évidence, provoquent, «sti-
înulsnt l'imitation ; ils sont ainsi les
nelifs ouvriers de l'évolution. Mais là
où les choses se gâtent c'est que pour
beaucoup ces marques de supériorité
ne sont plus guère que des moyens. Et
derrière la vanité satisfaite il y a, ce
qui. est plus grave, profit usurpé,
« La vanité est si ancrée dans le cœur
0e l'homme s'écrie Pascal, qu'un sol-
dat, un goujat, un cuisinier, un cro-
heteur se vante et veut avoir des- ad-
mirateurs, et les philosophes mêmes
-en veulent. » Ce qui, après tout, n'a
rien de déshonorant. Paine une chose
très bien, le prouver, provoquer à ce
jsujet une constatation flatteuse, qu'est-
ce autre chose que de s'assurer, fut-on
penseur ou marmiton, la préférence
dans son métier, c'est-à-dire s'assurer
Ha vie ? Mais quand au lieu de prou-
ver on veut jeter de la poudre aux
yeux et obtenir par la ruse ce qu'on
-n'obtient point par le mérité, cette am-
bition-là est la plus basse qui soit.
jEt l'activité qu'elle provoque ne vaut
pas un fétu de paille.
Car ce qui le pousse, ce besoin de
paraître, grand et lancinant moteur de
si nombreuses actions humaines, c'est
tce même sentiment atavique de domi-
nation qui armait les premiers hom-
Ines. Le plus fort primait le faible, le
domestiquait, l'asservissait. Et n'est-ce
point user du même procédé, par
d a,tes, moyens que la force, par le
tprestige, que d'en imposer à son voi
«in ? Ce lustre que nous recevons 'des
lifres, des décorations, des uniformes,
est une manière de mainmise sur les
autres, une diminuiio capitis pour eux,
un moyen d'esclavage et, non justifiés,
une piperie. -
Sont-ils bien nécessaires, d'ailleurs,
à la véritable supériorité, ces signes ex-
térieurs de supériorité ? Les peuples
républicains de naissance ne les con-
naissent point, ne les admettent pas.
Ils jugent fort sagement que la vraie
valeur s'impose de reste sans que le
fait du prince ait à intervenir dans ce
but. D'autre part, les distances factices
qui se créent ainsi, et cette espèce de
pavoi où les plus sages, les plus sim-
ples, les plus modestes se trouvent por-
tés comme des Bouddhas, ne sont que
des moyens douteux quant aux résul-
tats d'honorer la vertu.
Certes les hommes diffèrent entre
eux. Et on a pu dire fort justement
« qu'il y a plus de distance entre tel et
tel homme qu'entre tel homme et telle
bête. » Mais c'est affaire à la nature. Et
en ce faisant n'y va-t-elle pas de telle
sorte que la teinte fondue est parfaite
et que le plus habile n'y saurait tran-
cher les tons ? Pourquoi nous aviser de
tracer des limites nous-mêmes à des
castes ? Si distants que les hommes
soient les uns des autres il y a moins
encore d'éloignement entre eux qu'en-
tre eux et leur lointain modèle, cet
idéal vers lequel un instinct secret les
pousse ; et vus de ce point, où dans
quelques milliers d'années ils se doi-
vent rejoindre, en dépit des présentes
distances qui les séparent, ils se con-
fondent.
C'est qu't regarder 'à'un peu près,
nous n'avons pas lieu d'être bien fiers.
Nous sommes encore en pleine barba-
rie. A peine en sortons-nous, si nous
en sommes sortis ; et nous avons en-
core dans le sang toutes les tares de
cette barbarie, dont la moins tenace
n'est, certes, pas la vanité. Vous m'ob-
jecterez que le jour où les hommes
n'auront plus leur vanité pour stimu-
lant, l'énergie humaine perdra, la moi-
tié de son intensité. L'âpreté humaine,
faudrait-il dire ; car cette intensité
n'est pas plus nécessaire à la vie que
la fièvre au malade ; et de ce qu'il man-
que au malade sa maladie, il n'est pas
prouvé qu'il lui manque quelque
chose.
X.
LA POLITIQUE
APRES L'INCIDENT D'AZEMMOUR
- Il n'est pas vrai que la nou-
velle question posée par M.
Jaurès à M. Pichon ait été inu-
tile : l'exaspération même des
, feuilles azizistes souligne l'et-
I fet utile de cette intervention.
On doit se féliciter de toutes les initia-
tives parlementaires qui stimulent.. le
gouvernement visiblement embarrassé et
divisé en présence de cette question ma-
rocaine sans cesse grosse de consé-
quences.
Et, sans doute, il serait surprenant
que parmi nos ministres quelques-uns
n'aient point démêlé la gravité de cer-
taines imprudences ou de certaines in-
oertitude
Le fait dont le gouvernement tout en-
tier doit tenir compte, c'est que les par-
tisans de l'évacuation du pays chaouia,
d'abord fort rares, deviennent de plus
en plus nombreux. La nécessité de cette
opération est si visible qu'elle est préco-
nisée par des représentants de toutes
les nuances de l'arc-en-ciel politique,
des feuilles rouges aux feuilles roses.
D'abord, Jes coups de tête des chefs
militaires restent toujours possibles en
présence "d'un ministre qui distribua à
trois jours d'intervalle alternativement
éloges et blâmes à l'occasion d'un mê-
me fait.
Ensuite, il y a lieu He ramener à leurs
postes ordinaires ces tirailleurs sénéga-
lais dont l'absence a eu pour effet d'ex-
poser au massacre des Maures de peti-
tes colonnes comme celles que comman-
dait l'infortuné capitaine Mangin. D'au-
tres événements aussi déplorables pour-
raient de nouveau se produire. Enfin, il
serait temps, d'ailleurs, au dire d'indis-
crets ,de mettre fin à certaines désertions
suscitées par le prestige de l'uniforme
glorieux ae l'armée d'Abd el Aziz : Quel
rêve ! Voir Marrakech et mourir !
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Utiiourd'hui jeudi :
8 Lever du soleil, à 4 h. 8 ; coucher, ï
Matinées. - Nouveau-Cirque, Cirque Mé-
drano, Jardin d'Acclimatation.
Courses à Maisons-Laffitte.
Pointe d'ail.
Un de nos plus sympathiques mi-
nistres (ils le sont tous !), qui est ori-
ginaire du Midi, se rendait l'autre ma-
- tin au Conseil des ministres en com-
pagnie du garde des sceaux. 'Or, il em-
poisonnait littéralement l'ail. Comme il
gravissait assez rapidement les mar-
ches du perron de l'Elysée : « Ouf 1
fit-il essoufflé, je perds l'haleine. »
— Ah 1 mon cher, reprit flegmati-
quement M. Briand, puissiez-vous dire
vrai. Quel bonheur pour vos collè-
gues I »
Y )
Pour M. Chéfon.
Louvois visitait un jour les Bureaux
du ministère de la guerre. Il entre par-
tout et, sur une table, il trouve une
p" aire de lunettes :
— Voyons un peu, dit-il, si 'elles va-
lent les miennes.
On juge l'occasion superbe pour glis-
ser sous son nez son propre éloge, ad-
mirablement calligraphié par le plus
habile expéditionnaire de la maison.
Alors, Louvois, rejetant les lunettes r:
— Elles ne sont guère meilleures que
les miennes. elles grossissent vrai-
ment trop les choses..
AUTREFOIS
Rappel du 10 juillet 1872. —» A VAssem-
blée, l'urgence a été déclarée sur le pro»
jet d'emprunt de 3 milliards.
On va inaugurer, à l'Ecole des beaux-arts,
un monument élevé au peintre Ingres.
Mort de Denonvilliers, de l'Académie de
mdecine, un des représentants les plus
distingués de la chirurgie française.
Le pont du Point-du-Jour est maintenant
complètement réparé. On ne voit plus trace
des brèches faites par les obus prussiens et
français.
Remise au général Faidherbe, ex-général
de l'armée du Nord, pendant la guerre,
d'une épée d'honneur qui lui est offerte par
plusieurs millions de souscripteurs ; sur la
lame sont inscrits les noms de toutes les
communes qui ont participé à la souscrip-
tion.
On dit que la censure a refusé à M. Car-
valho, directeur du Vaudeville, l'autorisa-
tion de jouer Les Marrons du feu, d'Alfred
de Musset.
Hôtel. particulier.
Un de nos amis descendait, l'autre
soir, la rue Notre-Dame-de-Lorette,
lorsqu'il fut poliment accosté par une
dame d'âge canonique, de maintien ré-
servé.
Notre ami s'arrête et écoute la solli-
citeuse lui dire :
— Monsieur, avez-vous une bonne
amie ?
- Vous êtes bien curieuse, mada-
me ?
— Oh ! tranquillisez-vous, fe ne vous
en procurerai point. Mais si vous en
avez une, et que vous ne sachiez où
conduire votre conquête, je vous re-
commande cet abri confortable et douil-
let. :-
Et la dame, avec un sourire, tira de
son réticule une carte de visite où se
lisaient ces mots :
COQUET PIED-A-TERRE
Très discret
Ancien Hôtel particulier
d'un Littérateur bien connu
Rue N°
Paris.
- Mais c'est l'hôtel de feu X., s'ex-
clama notre Parisien suffoqué. Cette
demeure, où vingt années durant, dé-
filèrent tous ces gens de tM~h~ que
le plus malicieux des gros I\omn\ de
- gros bon sens secevait. comme des
neveux 1
— Oui, monsieur, répartit la dame,
que voulez-vous. La critique est mor-
te, mais l'amour est éternel.
Des « Lectures pour tous ».
Les animaux favoris de nos plus no-
toires contemporains : Dumas père
possédait un vautour nommé Jugur-
tha ; Théophile Gautier entretenait tou-
te une meute. Sur les tapis de Loti,
ronronnent Moumoutte-Blanche et Mou-
moutte-Chinoise ; sur ceux d'Anatole
France, le contemplatif Pascal et le ter-
rible Hamilcaf.
Henri Pille avait deux coqs, Gobe-
Hannetons et Souffle-à-Rebours. Ed-
mond Haraucourt, lui aussi, posséda
un cop, M. Blanc, qui adorait le poulet
froid.
Le ouistiti Vermillon, de Manette Sa-
lomon, se nommait Cocoli, et logea un
an. rue Saint-Georges, chez Jules de
Goncourt.
Sur la table de travail dé M. Max
Nordau, il y a toujours une petite sou-
ris qui se promène, se faufile parmi
les piles de livres et les feuilles de pa-
pier, et, au moindre bruit, couche ses
oreilles, et se réfugie dans une minus-
cule maison de verre, près de l'en-
crier.
Jenny est tortue, de son métier, chez
M. Maurice Barrés, à Neuilly ; M. Ai-
mé Morot héberge, sous son toit, d'é-
normes serpents crotales. Sous les châ-
taigners de la place Beauveau, dans les
jardins du ministère, caquète, piaille
et mue toute une volière (ce ne sont
pas les attachés de cabinet). C'est au
milieu des hôtes de sa volière : cigo-
gnes, grues, flamants roses, ibis, paons
et pintades, que M. Clemenceau se re-
pose des soucis du pouvoir.
Au voleur t
On raconte qu'un financier, qui dé-
fraye toutes les chroniques depuis quel-
ques mois, fut pris l'autre soir d'une
peur irraisonnée. Troublé sans doute
par la lecture des faits divers et les ré-
cits des crimes d'actualité, il se mit à
sonner éperdument ses domestiques, en
criant : « Venez, venez vite, il y a un
voleur dans ma chambre ! »
'Après maintes recherches, son valet
de chambre lui dit, imperturbable ■:
« Monsieur peut être assuré qu'il n'y
a que lui dans sa chambre. »
Nez à nez. -.
à nez.
L'archevêque de Bordeaux qui a un
petit nez grec, d'un dessin régulier, ai-
mait à plaisanter l'évêque du Puy, qui
est affligé d'un appendice nasal énor-
me.
L'évêque finit par se lasser de ses
brocarts. « Hé l monseigneur, répondit-
il, que Votre Grandeur laisse donc
mon nez ! Elle croit sans doute qu'il a
été fait aux dépens du sien 1 »
Comédien amateur.
Un jeune coiffeur, quI se croyait rdu
talent, jouait le rôle du compère dans
une revue du théâtre de Pont-à-Mous-
son. Il fut outrageusement sifflé. Avec
un flegme imperturbable, il s'approche
de la rampe, salue le public et s'expri-
me ainsi : « Hier, messieurs, je vous
accommodais * ce soir, je vous incom-
modé ; demain, je vous raccommode-
rai. a
Salve d'applaudissements 1
En passait.
Les députés ont éprouvé le besoin de fon-
der un nouveau groupe. On ignore S'il fera
beaucoup de besogne, mais on peut être as-
suré qu'il fera beaucoup de bruit. Il s'agit
en effet de réunir — sans distinction d'opi-
nions — tous les élus du peuple qui s'adon-
nent à la musique. Le nouveau groupe s'est
dénommé lui-même « le groupe des dépu-
tés-musiciens n.
Sa création répond au besoin d'harmonie
universelle qui règne dans les couloirs du
Palais-Bourbon depuis que M. Clemenceau
a déclaré catégoriquement qu'il n'avait plus
d'ennemis. Désormais, plus de sons discor-
dants ; la mesure sera constamment res-
pectée ; et au lieu de potiner pendant les
entr'actes, nos élus iront faire des gammes
et des arpèges ou des vocalises dans les sal-.
les réservées jusqu'ici aux commissions.
Les « députés-musiciens » ont choisi com-
me chef d'orchestre M. Pichon, qui a fait
ses preuves dans le concert européen, et
comme sous-chef le général Picquart, dont
le talent de pianiste n'est plus à louer. M.
Ribot jouera de la petite flûte, M. Jaurès de
la grosse caisse et l'abbé Lemire de l'har-
monium.
On assure que M. Aijnard exécutera sur
le trombone des variations admirables, et
que M. Paul Deschanel est un virtuose du
piston qu'on ne soupçonnait pas.
Maujan est irrésistible dans « l'homme-
orchestre » et il joue simultanément du
chapeau chinois, des cimbales, du tambour
et de l'ophicléide avec un brio qui fait pâ-
mer M. le président du Conseil.
Bref, sans rivaliser encore avec la musi-
que de la garde répufJlicaine, la fanfare du
Palais-Bourbon a déjà groupé un nombre
d'exécutants remarquables, dont les débuts
en public seront sensationnels.
J'espère que les sénateurs ne vont pas
demeurer en reste, et qu'ils auront à cœur
de former immédiatement « l'orphéon du
Luxembourg u, -
J'aimerais — lors des prochaines solen-
nités du H juillet — entendre l'orphéon du
Luxembourg entonner le clic-tir des vieil-
lards, de Faust, tandis que la fanfare dit
Palais-Bourbon ferait éclater dans les airs
(sous la hxxule direction de M. Pichon) la
marche fameuse du te siège de Pékin ».
Le Chemineau.
Les services administratifs
du Vatican
Le Vatican vient de faire connaître les
transformations apportées dans l'organisa-
tion administrative de ses divers. services.
La liste de ce qu'il appelle des réformes
administratives est assez longue. Nous ne
croyons pas devoir la publier parce que
la plipart de ces réformes ne présentent
pas, aux yeux de nos lecteurs, un bien
grand intérêt.
Il en est une cependant qui vaut la peine
d'être mentionnée, c'est celle qui concerne
la congrégation de la propagande.
Les attributions de cette congrégation,
qui fait souvent parler d'elle, parce qu'elle
airige la politique extérieure du Vatican,
consistent à surveiller et à étendre l'in-
fluence de nglise dans les pays dits de
miss'on, c'est-a-dire partout où le catholi-
cisme n'est pas religion d'Etat, mais sim-
plement religion dominante. Cette influen-
ce s'exerce comme on le sait, au moyen
de prêtres qui s'appellent des missionnai-
res et qui sont -chargés d'évangéliser les
populations dites « infidèles ».
» Or, jusqu'à ce jour, écrit le correspon-
dant du Temps à Rome, faisaient partie des
pays de mission la Grande-Bretagne, la
Hollande, le Canada et les Etats-Unis d'A-
mérique. A partir d'aujourd'hui, ces pays
rentrent dans le droit commun et sont dé-
tachés de la congrégation de la propa-
gande.
(1 Par cette mesure, le Vatican laisse en-
tendre évidemment qu'en Angleterre, en
HoMande, et dans toute l'Amérique du
Nord, le catholicisme est de plus en plus
en progrès, au point d'y constituer une
force nationale, et que, de plus, il cesse
d'y être persécuté par les autres religions.
C'est la une réforme qui fera grand effet
dans les pays qui en sont l'objet, et qui
confirme l'importance que prennent de plus
en plus dans l'Eglise les pays anglo-sa-
xons. »
Ces renseignements, évidemment puisés
à bonne source, sont 3a confirmation de
ce que nous disons depuis longtemps dé-
jà, à savoir que. pour compenser son dé-
chet européen, le Vatican oriente de plus
en plis ses efforts du côté du Nouveau-
Monde où il est sûr de voir s'otivrir à son
profit. de puissants coffres-forts.
La polit:que qui consiste à donner l'im-
pression que le catholicisme en Amérique
est devenu une force nationale, est évi-
demment une politiaue d'intérêt fort ha-
bile. - P, G.,
TRIBUNE CORPORATIVE
Congrès annuel des Cantonniers
Deuxième Journée "V
La délégation chez le ministre. - Discours en faveur de
l'union. — Lcs nouveaux -statuts. — Le Conseil fédéral.
Remerciements à la presse.
La deuxième journée au congrès des
cantonniers a été, comme la. première,
bien employée, et les travailleurs de la
route ont montré qu'ils n'aiment pas chô-
mer devant 5a besogne, si lourde et si fa-
tigante soit-elle.
Hier matin, pendant. que la délégation
nommée la veille était présentée par MM.
Cornet et Noguès, députés, à M. Barthou,
ministre des travaux publics, et qu'elle lui
remettait le cahier de ses revendications
en même temps qu'elle l'invitait à venir
présider le banquet qui doit clôturer, ce
soir. les travaux du congrès, les commis-
sions nommées par le congrès pour l'éla-
boration de ses travaux et notamment des
nouveaux statuts de la Fédération, se réu-
nissait au Palais d'Orléans.
Séance de l'après-midi
, 3 heures, la séance plénière est ou-
verte par M. Bussières, député, qui sou-
haite la bienvenue à son collègue et ami,
M. Charles Dumont, député du, Jura
et donne quelques conseils pratiques de
nature à sceller l'union qui s'est effectuée
dans la dernière séance entre les deux fé-
dérations jusqu'alors divisées.
L'assemblée applaudit et acclame, une
fois de plus, l'union des cantonniers.
Dans une allocution très applaudie, M.
Dumont s'associe aux paroles de son col-
lègue et manifeste l'espoir qu'une union
durable donnera à la Fédération la force
dont elle a besoin pour poursuivre la réa-
lisation de ses légitimes revendications.
Le bureau de séance est ensuite composé
comme suit :
Président. M. Rialland, du Maine-et-
Loire ; assesseurs. MM. Tissandier, du
Cantal, et Malon, de la Meuse ; secrétaire,
M. Lefèvre, de PAisne.
A ce moment, M. Jean Bourrât, député
des Pyrénées-Orientales, fait son entrée
dans la salle, au milieu des applaudisse-
ments des congressistes.
Malgré la fatigue qui a fini par s'empa-
rer de sa voix, M. Lucien Cornet tient à
présenter son collègue, en demandant la
parole pour lui et pour son autre collè-
gue, M. Noguès. Il profite de la circons-
tance pour faire l'éloge de M. Charles Du-
mont, dont le cœur chaud et les idées gé-
néreuses pour tout ce qui touche aux œu-
vres de la démocratie laborieuse ne pou-
vaient manquer de le faire s'intéresser au
sort des modestes fonctionnaires crue sont
les cantonniers. £
M. Bourrât, qui n'a que quelques ins-
tants à consacrer au congrès parce que le
devoir parlementaire l'appelle à la Cham-
bre. prononcé une allocution très cordiale-
ment chaleureuse et aussi trSs applaudie.
Le député des Pyrénées-Orientales dit
combien il aime à revoir par la pensée le
premier banquet des cantonniers qui eut
lieu il y a sept ans, dans le Salon des Fa-
milles, à Saint-Mandé, sous la présidence
de son collègue et ami, M Lucien Cornet.
C'était le début et comme l'éveil à la vie
corporative de cete vaillante armée d'hum-
bles fonctionnaires que sont les canton-
niers. Il se félicite aujourd'hui de voir les
cantonniers prendre conscience de leur for-
ce et s'unir pour arriver à la réalisation
de leurs revendications.
« Je suis, dit-il, l'unique conducteur des
ponts-et-chaussées qui fasse partie de la
Chambre des députés et j'en reporte tout
l'honneur sur la grande famille à laquelle
j'ai appartenu. »
Après avoir rappelé qu'il fut, au conseil
général des Pyrénées-Orientales, un défen-
seur des cantonniers contre l'administra-
tion qui voyait d'un mauvais œil poindre
leurs revendications et qui s'opposait à tou-
tes réformes les concernant ; après avoir
dit qu'il s'est efforcé depuis, dans la com-
mission parlementaire qui a eu à s'occu-
per de la situation des cantonniers, d'ob-
tenir 'les améliorations qui ont été faites et
qui doivent être suivies sans cesse d'au-
tres réformes, au fur et à mesure que
marche le progrès, il recommande aux
congressistes de conserver précieusement
l'union qu'ils viennent d'accomplir et à la-
quelle ont tant contribué ses collègues,
union qui leur permettra d'éviter les er-
reurs et de faire une excellente besogne
pour leur avenir corporatif.
M. Noguès succède à M. Bourrât. Il re-
mercie l'assemblée du sympathique accueil
fait-à son collègue et dit combien il est
heureux de voir scellée une union à laquelle
M. Cornet et lui ont travaillé de leur mieux.
Il voit dans le bon esprit du congrès la
juste récompense des efforts qui ont été
faits pour aboutir à ce résultat.
Vous en étiez arrivés, dit-il, à vous tirer
les uns sur les autres pour deb questions
de personnes. Vous avez enfin reconnu que
vous faisiez fausse route, que les divisions
affaiblissent les meilleurs organismes et
que seule l'union est génératrice de force.
Dans cette œuvre d'union entreprise par
vos présidents d'honneur, je dois reconnaî-
tre que chacun ayant- bien voulu y mettre
du sien, les deux bureaux de vos fédéra-
tions ont facilité notre tâche. Le principe
d'union ayant été admis, restaient à régler
les questions de détail. Nous avons pensé
que vous étiez mieux qualifiés que nous pour
opérer ce règlement, et c'est la tâche qui
vous incombe aujourd'hui. Nous avons
réussi à rapprocher les partis en présence,
à préparer leur soudure. A vous d'y appor-
ter le ciment nécessaire pour que cette sou-
dure devienne définitive.
Le premier mot du ministre des travaux
publics, qui nous a fait ce matin l'honneur
de recevoir votre délégation et de lui pro-
mettre d'assister. à votre banquet parce
qu'il s'agit d'une agape d'union fraternelle,
a été celui-ci : « Voilà une bonne opération.
C'est le meilleur moyen, pour les canton-
niers, d'aboutir à. des résultats sérieux dans
leurs revendications. »
Ne vous divisez donc plus, ait M. Noguès,
et le temps fera disparaître tout qui, .jus-
que-là, a pu retarder votre marche dans la
voie où vous' devez trouver une amélioraI
tion de votre condition. Vous n'êtes, pas ri-
ches. Les travailleurs sont généralement
pauvres, et vous êtes les plus pauvres des
fonctionnaires organisés corporativement.
Faites des économies. Réduisez vos '!rai!f
le plus possible, ne dépensez, pour votre
journal, notamment, que le strict nécessai-
re. Faites-vous des réserves pour l'avenir.
et la bonne marche de votre fédération.
Nous uésirons que vous quittiez Paria
dans la paix et dans l'union fraternelle, et
c'est dans cet espoir que nous vous disons
que vous pouvez compter sur notre dévoue-
ment pour vous aider.
Les paroles de M. Noguès sont couver-
tes d'applaudissements et de cris de : Vivô
l'union t
M. Cornet prend à nouveau la parole.
- Mon collègue et ami, M. Noguès, dit-il,
ne vous a pas tout dit au sujet de la visite
faite au ministre des travaux publics. Il ne
vous a pas dit qu'il avait préparé l'ac-
cueil qui a été fait à votre délégation en faf.
sant le siège du ministre et si bien que M.
Barthou a formellement promis de venic
présider votre banquet.
C'est la meilleure démonstration que le
gouvernement a .suivi avec intérêt vos ef-
forts vers l'union. Il ne fût point venu si
vous n eussiez point été d'accord entre
vous. Il viendra pour la première fois vous
présider parce que la grande famille des
cantonniers vient d'affirmer sa complète
entente. C'est un résultat que vous devez
à M. Noguès et à votre délégation.
toute la salle applaudit ces paroles et
on crie encore : Vive l'union 1
Les nouveaux statuts
La parole est ensuite donnée à, M. Lau-
nois, rapporteur de la commission chargée
de présenter les nouveaux statuts de la fé-
dération unifiée.
Après avoir dit que la commission, dans
son travail, s'est inspirée du désir de fu-
sionner, d'une façon aussi parfaite qu'elle a
pu le faire, les statuts des deux anciennes
fédérations, M. Launois donne lecture des
nouveaux statuts .arrêtés par cette commis-
sion.
Les articles de ces statuts sont adoptés
un à un, au fur et à mesure de leur lecture.
Une discussion s'engage au sujet de l'arti-
cle 23, relatif à l'organisation des scrutins
secrets dans les assemblées générales de la
fédération.
Y prennent part un certain nombre de
délégués, notamment MM. Fourtineau, Cou-
dry, Dénier, Noguès, Launois.
M. Dénier, de l'Yonne, ayant fait remar-
quer qu'il né pouvait pas être fédéré parce
qu'il n'avait pii réussir à grouper ses col-
lègues du département, mais qu'il n'en était
pas moins de cœur avec la fédération, M.
Cornet vient dire, aux applaudissements
de toute la salle, que M. Dénier est le seul
survivant des trois cantonniers qui eurent
les premiers lidée d'un groupement corpo-
ratif, il y a 7 ou 8 ans, et à ce titre, il de-
mande qu'il 60it admis comme membre ho-
noraire et appelé au bureau à la place
d'iKonneur.
C'est au milieu d'une ovation que ce brave
cantonnier vient prendre place au bureau
et qu'il remercie ses collègues par quel-
ques paroles émues.
La salle, à ce moment, donne un specta-
cle réellement beau de sa reconnaissance
à. l'égard d'un des premiers artisans de l'u-
nion corporative des cantonniers.
Finalement ,il est décidé, en ce qui con-
cerne l'article 23,que les termes de cet arti-
cle seront maintenus et qu'il ne sera rien
changé au mode de scrutin qui accorde une
voix à chaque délégué représentant une as-
sociation, quel que soit le nombre des mem-
bres de cette association, les intérêts de
toutés les associations étant absolument
les mêmes.
L'ensemble des statuts est ensuite mi.
aux voix et adopté.
Le nouveau conseil fédéral
M. Launois, rapporteur de la commis-
sion de révision des statuts, dit que. cette
commission a crn devoir se préoccuper, en
vue d'ajouter une nouveilo force à l'esprit
d'ufron, de la composition du nouveau
conseil fédéral. Sans vouloir en rien peser
sur 'a décision et les votes du congrès, qui-
est souverain juge de ce qu'il convient de
faire, elle a pensé qu'une indication aurait
peut-être son utilité. Elle propose donc de
faire entrer dans -le conse;' fédéral, qui se-
ra composé de 9 membres, trois membres
pris dans chacun des conseils fédéraux
des deux fédératons anciennes.
Les trois autres membres qui devront
compléter le conseil seraient pris parm.
les candidatures qui pourront se produire
dans le sein du congrès.
Cette proposition est acceptée, et on afd-
fiche aussitôt la liste des membres des an-
ciens conseils fédéraux.
La seance est alors suspenaue pour pro-
céder au scrutin secret, lequel a lieu par
l'appel du délégué de chaque département,
muni de pouvoirs réguliers.
Apris le dépouillement du scrutin pour
la nomination des six membres en ques-
tion, la séance est reprise et le président
proclame (lus les délégués dont les noms
suivent :
MM. Leroy, de l'Oise ; Génibel, du Lot-ef-
Garonne ; Marand, de la Haute-Vienne ;
conseillers sortants de la fédération #bnéra-
le ; Launois, des Ardennes ; Vial, du Rhô-
ne : Labussière, de l'Allier, conseillers sor-
tants de la fédération nationale.
- Après le dépouillement du scrutin ouvert
pour compléter le conseil fédéral, les trois
membres suivants sont proclamés élus :
M. Lecat, de la Marne ; Vérité, de la:
Somme ; Héron, de l'Eure-et-Loir.
L'élection des cinq membres qui doivenf
composer la commission de contrôle est
remise la prochaine séance,
Remerciements à la presse
Avant de lever la séance, un membre dtf
congrès demande à l'swettaWée de voter dq
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