Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1902-03-06
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 mars 1902 06 mars 1902
Description : 1902/03/06 (N11682). 1902/03/06 (N11682).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7549333x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
CÎNO -, CENTIMES le Numéro. PAAIS&DÉPANft LA N'l'l.ê'r. nilVO nRTVTTTMWfi
foNDATEUR; ÂDGUSTE VFICQUEBIE
ABONNEMENTS
V. 1018 Trots Doit Six moîi Cn as
Paris. 2fr. 5 fr. 9 fr. 48 fr.
Sîôpartemerits.. 2 — 6— 14 — 20 - ;
Postale '":" S — 46 — 32 -
A
BINURRCIIRUEH CHEF : CHARLES BOS
ôt X-iég-eil^i
1^1 'NONCES .1
l LJ GRANGE, CERF & Olt
ty'Flace de la Bourse, 6
Ot AUX BUREAUX du JOURNA&
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REDACTION : tai, rue Montmartre, 131,
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 lettre du matin
No 11682. - Jeudi 8 Mars 10022$
15 VENTOSE AN 110
ADIIINIS'IrIRA'TION: 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à l'administrateur
L'échéance du 45 mars étant une des
plus considérables de l'année, nous prions les
personnes-dont l'abonnement expire à cette
date d'enroyer, dès à présent, avec la
dernière bande, le montant de leur renOlt-
vellement à l'Administrateur de notre jour-
nal, 131, rue Montmartre.
On peut également s'abonner sans frais
dans tous les bureaux de poste.
NOS LEADERS
le Dinde Marseille
La crainto des électeurs estlecommen-
uement delà sagesse. Si cetaxiome avait
besoin de quelque démonstration, je la
chercherais dans le discours que vient de
prononcer, dans la cité républicaine de
Marseille, M. Ribot. Nous n'avonsguère
besoin, j'imagine, de dire, même rapi-
dement, l'attitude politique qu'a suivie
ala Chambre, parallèlement avec M. Mé-
line, le leader des modérés, ni de rap-
peler les embûches qu'il a suscitées au
ministère de défense et d'action républi-
caines ni de refaire l'historique des
accords regrettables que son parti a con-
tractés avec la faction clérico-césa-
rienne. Nous connaissons tous la
longue opposition que M. Ribot a per-
sonnellement faite au gouvernement.
T M. Ribot a tenu, dans son discours
d'hier, à distinguer entre l'opposition
que ses amis et lui avaient apportée à
!'œuvl'e du gouvernement, et une autre
opposition — non loyale, sans doute,
cette dernière — faite par les nationa-
listes.
A la Patrie française, on doit être plus
qu'ému de cette façon de juger la ma-
nière qu'ont les vivelarmistes de con-
cevoir l'action politique.
Monarchistes, cléricaux, nationalis-
tes, ne marchandaient pourtant pas
leurs applaudissements à MM. Ribot et
Aynard quand ceux-ci, tout récemment,
attaquaient l'ordre du jour Henri Bris-
son, réclamant la prompte suppression
de la loi Falloux.
Ceux qui ont vu la Chambre ce jour-
là,regardant la droite et le centre agités
par la même passion, pouvaient bien
croire que la situation politique ne
comportait rien que la lutte de deux
grands partis: le parti démocratique
et.. l'autre.
Tous ces faits sont présents à la mé-
moire, inutile donc d'insister. M. Ribot
aujourd'hui s'élève très énergiquement
contre le nationalisme, c'est d'ailleurs là
ileseul point nouveaudesondiscours-pro-
gramme. Au point de vue enseignement
il est pour la liberté.C'est assez vague, et
il ne se compromet guère.Nous sommes
,tous pour la liberté; la réclamant pour
nous, nous ne saurions la refuser aux
autres ; le tout est de savoir — M. Ribot
ne l'a pas indiqué — où elle commence
et où elle finit.Les idées du député d'Ar-
ras ne sont guère di fïérentes en ce qui
concerne les réformes sociales. Il de-
mande que l' « évolution se fasse paci-
fiquement et librement ». Le parti répu-
blicain, que je sache, n'a jamais préco-
nisé les moyens violents pour substi
tuer aux impôts qui écrasent les pau-
vres gens d'autres impôts plus justes,ou
,pour accomplir les réformes que notre
démocratie attend depuis plus do trente
ans, ,
Après toutes ces explications qui ne
sont pas précisément nouvelles, l'ora-
teur s'est préoccupé do l'armée natio-
nale.
« Le ministère actuel, dit-il, pas plus
Que ses prédécesseurs n'a eu ce parti
pris d'affaiblie la défense nationale. »
Alors si M. Waldeck-Rousseau n'a pas,
depuis la formation du ministère, livré
systématiquement la France aux
étrangers, pourquoi M. Ribot l'a-t-il
combattu, et a-t-il crié sur tous les
tons et en tous lieux les torts du
gouvernement ? Pendant trois ans en
tablant sur l'affection que nous avons
pour l'armée, sur l'amour que nous
avons voué à la belle patrie qui est la
nôtre, M. Ribot a essayé de mettre en
minorité le cabinet, pour assumer, sans
doute, la tâche glorieuse de rendre la
France plus prospère et plus grande,
comme successeur de M. Waldeck-
Rousseau. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait,
quand il possédait le pouvoir ?
Enfin le député d'Arras termine,— et
des journaux L de son parti ont omis de
parler des applaudissements enthou-
siastes, qui ont dû éclater - en dé-
clarant qu'il est « hostile à tous les
projets de revision derrière lesquels se
cachent assez mal les tendances plébis-
citaires ». M. Ribot a mis du temps à
s'en apercevoir et c'est à la veille des
élections, combattu par un nationaliste,
que le péril césarien lui apparaît. C'est
bien curieux. Mais que vont dire de cette
déclaration antinationaliste les ligues
st sous-ligues de la Patrie française ou
des Patriotes, que vont penser les Cop-
pée, les Lemaître, les Dausset, les Dé-
roulède, passés, présents et futurs ? Ils
trouveront sans doute que c'est bien
mal à M. Ribot de les abandonner à
leur triste sort.
Après avoir constaté, ces temps der-
niers, l'adhésion de farouches antimi-
nistériels à la politiquo de M. Wal-
deck-Rousseau, on est fondé à croire
que M. Ribot, retour de Marseille, de-
viendra un soutien du Jûiflisfcère
fense et d'action républicaines. Nous l'en
félicitons d'avance.,
A. Gervals.
Nous publierons demain un article
de M. Lucien Victor-Meunier.
Il Ml 11l wammmmmmmm
L'ALLEMAGNE ET LES ÉTATS-UNIS
Qu'est-ce que l'Allemagne
veut obtenir des Etats-Unis ?
rien, ou du moins fort peu de
chose, si nous écoutons le chan-
celier allemand.
Le chancelier allemand : « Le
voyage - du prince Henri ne
poursuit aucun but politique. Ce que nous
désirons, c'est que les bonnes relations
traditionnelles entre l'Allemagne et les
Etats-Unis soient continuées telles qu'elles
existent depuis le grand Frédéric et le grand
Washington, Les deux peuples, allemand
et américain, méritent un respect mutuel,
et je ne puis prévoir, en envisageant l'a-
venir, aucune raison qui les empêche de
continuer à vivre en parfaite concorde et
amitié,)
De son côté, le prince Henri, parlant aux
citoyens des Etats Unis, s'exprime en
ces termes : « Vous savez de qui je suis le
représentant. Ma mission est de resserrer
les liens d'amitié qui existent entre les deux
gouvernements. L'Allemagne sera toujours
prête à vous serrer la main à travers l'A
tlantique, quand vous le Voudrez. Je re-
présente aussi une nation toujours prête à
combattre, une nation en armes, mais non
belliqueuse. Mon souverain est toujours
l'avocat de la paix et son intention est de
rester en bons termes avec les autres puis-
sances. »
Aie ! il y a bien là quelque petite chose
qui n'est pas purement une offre de poignée
de main; il y a en outre une sorte d'offre
de l'armée allemande, qui n'est pas « bel-
liqueuse », chacun sait ça, mais qui est
« toujours prête à combattre ». Le chance-
lier n'avait pas été aussi loin; il s'était con-
tenté de nous déclarer que l'amitié améri-
cano-allemande dure depuis le grand Was-
hington, et le grand Frédéric, ce qui nous
donne à supposer que c'est ce dernier —
le grand Frédéric — et non le simple fran-
çais Rochambeau, qui a fait capituler lord
Cornwallis à Yorktown, capitulation qui
assura l'indépendance des Etats-Unis; le
prince Henry fait mieux; il éprouve le be-
soin de rappeler aux Américains que l'ar-
mée allemande est nombreuse et forte; il
dit : — gardez-moi votre amitié, pour
qu'on lui réponde : — réservez-nous les
bons offices de votre armée.
Nous supposions bien que le kaiser n'a-
vait pas envoyé son frère aux Etats-Unis,
uniquement pour lui donner l'occasion
d'admirer miss Roosewelt brisant une bou-
teille de champagne sur la muraille d'un
yacht allemand. — Ch. B.
PARTI RADICAL-SOCIALISTE
Le comité exécutif du parti républicain ra-
dical et radical-socialiste s'est réuni hier soir,
62, rue Tiquetonne, sous la présidence de M.
Henri Brisson, député.
Les pouvoirs du comité directeur ont été
défiais; il est composé do MM. Henri Brisson,
Léon Bourgois, Isambert, Pellelan, députés,
Desmos, vicd-président du Sénat, Combes,
Val lé, sénateurs. Il a pour secrétaire M. Cha-
denier, ancien préfet. Sa mission durera jus-
qu'à la fin do la période électorale.
Des résolutions concernant la propagande
et l'organisation du parti ont été prises.
Toutes les demandes de renseignements, de
brochures et d'adhésion doivent être adressées
au siège social du comité exécutif, 62, rue
Tiquetonne, à Paris.
« O» —
VICTOIRE RÉPUBLICAINE
(De notre correspondant varlicullerj
Toulouse, le 4 mars 1902.
Comme vos lecteurs le savent, M. Castels,
républicain ministériel, a été élu dimanche
dernier conseiller général du canton de Galan
(Hautes-Pyrénées), contre M. Labroquère, na-
tionaliste.
Le conseil d'Etat avait invalidé M. Labro-
quère; à leur tour les électeurs ont condamné
sans appel les manœuvres de corruption aux-
quelles se livraient depuis longtemps les réac-
tionnaires du département; ceux-ci cependant
avaient déployé pendant les dernières semai-
nes une activité extraordinaire et commis de
nombreux faits de pression. La victoire du
candidat républicain n'en est que plus signi-
ficative. Elle est due à l'esprit d'union des
électeurs, écœurés des louches agissements du
« parti sans nom », et surtout à la superbe
campagne qu'a menée M. Castets, qui a fait
acclamer dans toutes les communes son pro-
gramme de réformes démocratiques. — F, V.
—— —« ♦ —
LES DROITS DE DOUANE
La commission des douanes a entendu M.
Dupuy, ministre de l'agriculture, au sujet de
la proposition de loi de M. Prevet qui tend à
supprimer pour le gouvernement le droit de
suspendre en tout ou en partie, par décret, les
droits de douane sur les blés et à substituer le
régime de la loi au régime des décrets.
M. Dupuy a déclaré ne pouvoir s'associer à
la proposition, parce qu'elle supprimerait une
des prérogatives du pouvoir exécutif.
4>
LA JOURNÉE DE HUIT HEURES
La commission sénatoriale chargée d'exa-
miner la proposition do loi relative à la durée
du travail dans les mines a entendu M. Darcy,
président, et Grisier, secrétaire général du co-
mité des houillères de France, ainsi que plu-
sieurs directeurs de mines.
Elle entendra aujourd'hui les représentants
des industries métallurgiques puis, le 12 mars,
les représentants de3 syndicats d'ouvriers mi-
neurs. Ceux-ci seront, en outre, entendus con-
tradictoirement avec les représentants des di-
rections des mines.
-- LA TAXE DES JOURNAUX
Le rapport de M. Sembat, au nom de la
commission du budget, sur l'affranchissement
des journaux périodiques, conclut à la taxe de
0 fr. 01 pour les journaux d'un poids inférieur
à 50 grammes circulant dans les départements
français. La taxe sera réduits à 0 fr. 005 pour
les journaux circulant dans les départements
delà publication ou les départements limitro-
phes. .;
La discussion de ce projet j~M~c'&OMM~ i
LETTRE DE
SAINT-PÉTERSBOURG
Ce que les journaux russes ne peu-
vent pas dire. — Une singulière
mesure. — Nouveaux troubles
universitaires. — La prison
après le massacre.— Cal-
me trompeur.
(De notre correspondant spécial en Russie)
Saint-Pétersbourg, 28 février.
Pour la première fois et pir ordre, les jour-
naux russes publient une liste, interminable,
d'étudiants et d'ouvriers emprisonnés à lasui'e
des troubles qui éclatèrent ces derniers jours
dans la plupart des conircs universitaires et
dont la presse, par ordre également, ne fit pas
mention. Qu'espère la direction de la police
en faisant donner aux mesures de répression
cette publicité boiteuse qui ouvre tout au moins,
à ce public qu'on veut laisser dans l'ignorance
d'événements qui sont l'indice d'une agitation
permanente dos milieux universitaires et popu-
laircs le champ à toutes les hypothèses ?
Voilà ce qui nous échappe, et ce que ne com-
prennent pas non plus les quelques propagan-
distes à l'abri des griffes de la police peters-
bourgeoise, que nous avons rencontrés aujour-
d'hui.
La mesure fait, d'ailleurs, l'objet de tous
les commentaires et l'on se félicite générale-
ment, dans les milieux où dominent les ten-
dances socialistes, de ce nouveau mode de pro-
pagande contre l'absolutisme, innové par la
gouvernement.,.
Grève d'étudiants
Mais si la lecture des ceotaine de noms im-
primés co matin doit faire naître des sentiments
de révolteen l'âme russe,elle n'inléresseraitque
médiocrement les lecteurs et les charmantes
lectrices du Rappel. Vous me permettrez donc
de les passer sous silence, pour, sans autre
préambule, vous faire un récit succinct, mais
rigoureusement exact des événements qui ont
motivé d'aussi nombreuses arrestations, qu'on
tient cachées ici et dont le télégraphe n'a pu,
grâce à la censire, transmettre que de très
faibles échos à l'extérieur. C'est en matière de
protestation contre le fameux « règlement pro-
visoire » qui exclut des écoles supérieures et
astreint au service militaire obligatoire dans
des compagnies disciplinais, pour une durée
fixée arbitrairement, les étudiants suspects aux
autorités, que le 20 février, à la suite de con-
damnations nouvelles, la plupart des élèves des
grandes écoles désertaient,sur un mot d'ordre,
les salles de cours. Quinze étudiants étaient
exilés le lendemain matin; une proclamation,
le môme jour, était répandue à des milliers
d'oxomplaires, dans tous les milieux, par les
soins de groupements illicites d'étudiants.
Ceux-ci réclamaient, avec beaucoup de modé-
ration d'ailleurs, ces choses invraisemblables
ici: la liberté de réunion, la liberté de la pa-
role, le respect de la personnalité.
La réponse ne se faisait pas attendro. Vers le
milieu de la nuit qui suivit, des milliers de po-
liciers envahissaient simultanémenldesmillicrs
do chambres d'étudiants, se mettaient à la re-
cherche du document compromettant et, le
lendemain matin, les prisonsde la ville avaient
plus de 400 hôles nouveaux.
A coups de Nagaïka
Dans un besoin de fuir l'isolement la plu-
part des perquisitionnés laissés libres et de
très nombreux ouvriers se réunissaient, le
jour qui suivit, dans la grande salle de la
maison du peuple édifiée, comme on sait, par
les soins paternels du tsar Nicolas II.
Ils étaient là un millier à discuter de façon
très calme, quand la police, soudain, fit irrup-
tion de toutes les issues. Armés de la terrible
nagaïka, les policiers, durant plus d'une heure,
frappèrent avec une rage sauvage les femmes
et les hommes qui tentèrent inutilement de ré-
sister ou de s'enfuir.
On imagine le terrifiant spectacle do cette
tuerie, ces êlros désarmés, bientôt ensanglan-
tes, aux prises avec les brutes affolées de car-
nage, les hurlements de douleur des blessés
dominés par le sifflement des lanières de cuir
à pointes d'acier.
Heureux les plus grièvement atteints : ils
furent conduits à l'hôpital! Les autres, depuis,
attendent dans les cachots, avant la dépor-
tation, le bon plaisir des magistrats enquê-
teurs.
A Moscou, à Riga, à lékathérinoslaw, àKief,
à Tomsk, les incidents et les arrestations se
sont multipliés pendant le mois de février.
Le calmo, aujourd'hui, semble être revenu,
mais trep de haine s'est amassée dans le cœur
de la jeunesse studieuse et du prolétariat des
fabriques pour qu'il soit durable. — A. G.
N. D. L. R. — L'Agence Bavas a publié hier dans
deux de ses feuilles, un « ordre du jour » que le
ministre de l'instruction publique russe vient de
faire insérer dans le Messager officiel. Les événe-
ments auxquels se rapporte cet ordre du jour, et
qui se sont déroulés à Moscou,sont bien antérieurs
aux faits que signale notre correspondant à Saint.
Pétersbourg et les mesures qu'édicté cet ordre du
jour sont déjà connues du public.
UNE OUESTION DE PRIORITÉ
La téléphonie sans fil. — M. Maiche et
M. Ducretet. — Les expériences de
M. Maiche. -- A 7 kilomètres.
— Rendons à César.
A deux reprises, ces temps derniers (voir nos
numéros des 26 janvier et 17 février), M. de
Vaulabelle a signalé à l'attention de nos lec-
teurs les récentes expériences de téléphonie
sans fil exécutées à Paris par M. Ducrclet.
Sans contester en rien le réel intérêt des re-
cherches de cet habile constructeur, on ne sau-
rait cependant accepter sans réserves les as-
sertions émises dans les deux articles que nous
venons de rappeler.
A s'en rapporter, en effet, aux dires de M.
de Vaulabelle, c'est à M. Ducretet que doit re-
venir sans conteste possible tout le mérite de
la découverte de la téléphonie sans fil, do
môme que c'est au physicien Bourbouze qu'ap-
partiendrait celui d'avoir, le premier, commu-
niqué télégraphiquement à grande distance par
voie terrestre.
Dans la réalité des choses, cependant, il an
est tout autrement.
Les expériences de Bourbouze, expériences
qui remontent à 1870, tous les électriciens sont
unanimes à le reconnaître, furent sans résul-
tats précis et se trouvèrent en réalité si peu
encourageantes que leur auteur ne les pour-
suivit pas ; et, quant à la téléphonie sans fil, à
rencontre des assertions de M. de Vaulabelle et
en dépit de la discussion, à l'aide do laquelle il
s'est efforcé de justifier son affirmation, ce
n'est point M. Ducretet, mais bien M. Maiche
qui est le véritable découvreur de la re-
cette.
La chose, au surplus, est aisée à démon-
trer.
Les essais de M. Ducretot, essais dont cet au-
teur a présenté les résultats à l'Académie des
sciences dans la séance du 13 janvier 1902, da-
tent des derniers jours de 1901.
Or, plusieurs mois auparavant, le Figaro
(n* du 14 avril 1901), et la Science française
(n" du 14 avril 1901), enregistraient le compte
rendu d'une suite d'expériences exécutées dans
i te foré,t dfl Saint-Germain flfl jH&fiûfii fjifl Jfe
moins autorisés et dans lesquelles, grâce à
l'emploi, des dispositions combinées par M.
Matchsèommunique? téi £ phonique-
ment sans autre fil condiicleur que la terre
seule à environ un kilomètre de distance. M.
Ducretet, en janvier 1901, ne communique, re-
marquons-le, qu'à une dislance de quelques
mèlre seulement.
Mais ce n'est pas tout. Dès le 19 février 1901
M. Maieho, sous le titre suivant : «Système de
transmission des signauv télégraphiques et
téléphoniques», dans le mémoire descriptif
déposé par lui au ministère du commerce, à
l'appui d'une demande de brevet, décrivait en
tous ses détails le principe de son système de
téléphonie sans fil.
Depuis lors, du reste, M. Maiche a très no-
tablement encore perfectionné son invention.
Il y a environ un an, comme nous le notions
à l'instant, il pouvait échanger sans conduc-
teur des signaux téléphoniques à un kilomètre
distance ; le mois dernier or. des expériences
poursuivies à Marchais les 16, 17 et 18 janvier
1902, c'est-à-dire au moment même où M. Du-
cretet annonçait triomphalement communiquer
à une distance représentée par l'épaisseur d'un
corps de bâtiment, M. Maiche communiquait
à plusieurs kilomètres, ainsi que nous le voyons
mentionné dans le compte rendu de la séance
du 7 février 1902 de la Société des ingénieurs
civils publié par la revue spéciale l'Eclairage
électrique:
Effectuas avec des appareils établis pour fonc-
tionner avec une portée de 400 mètres, avec des
fils de base de lo à 20 mètres, soit d'une longueur
égale environ au vingtième de la portée, les essais
ftirent néanmoins poussés successivement à 1.590,
3 500 et 7 000 mMrcs, en prenant des fils de base
d3 plus en plus longs.Jusqu'à 5.500 mètres les St,
gnnux téléphoniques ou télégraphiques ont été
parfaiteizinï netg et clairs. A 7.000 mètres, les
signaux'cléphoniquss n'étaient plus perçus que
d'une façon indistincte, mais les signaux télégra-
phiques avaient conservé leur netteté.
Voilà, n'est-il pas vrai, qui dépasse singu-
lièrement les résultats obtenus par M. Ducre-
tet, et qui, par surcroît, établit nettement et
sans réplique le droit de priorité de M. Mai-
che.
M. Ducretot est un homme do science trop
consciencieux pour ne pas reconnaître, en pré-
sence de ces faits, qu'il ignorait très certaine-
ment, lors de sa communication à l'Académie
des sciences, qu'il fût précédé dans la ques-
tion par M. Maiche et que c'est bien à celui-
ci que revient entièrement le mérite d'avoir le
premier réussi à montrer la possibilité d'éta-
blir à distance des communications télépho-
niques en prenant le sol pour conducteur.
Voir à la 3e page
les DERNIÈRES DÉPÊCHÉS
de la nuit et la
REVUE DES JOURNAUX
du matin
CARABINES EXPLOSIVES
(De notre correspondant particulier)
Bombay, 4 mars.
Au cours de sa tournée d'inspection, legéné-
ral Hill a fait une constatation qui a vivement
surpris les chefs do l'armée anglo-indienne. Les
carabines des régiments de cavalerie sont abso-
lument inutilisables. C'est ainsi que les che-
vau-légers de Calcutta ont vu une partie de
leurs armes éclater entre leurs mains. On peut
dire sans exagération que les cavaliers ont
peur de leur carabine 1 -
L'administration militaire a décidé le rem-
placement des armes à feu de la cavalerie.
L'ARMÉE «57M-MB680B8
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 4 mars.
En tout silence le ministre commun de la
guerre est en train de créer quarante nouveaux
régiments d'infanterie.
Le nombre des bataillons dans chaque régi-
ment a été réduit de 4 à 3 etdes quatrièmes ba-
taillons détachés on formera le no fau des nou-
veaux régiments.
, Les délégations qui se réuniront cette année
n'auront plus qu'à voter le crédit nécessaire.
——————————— .4>
PRÊTRE mmm A L'AGONIE
(De notre correspondant particulier)
Milan, 4 mars.
Don Albertario, le prêtre qui, en , 1898, prit
part aux émeutes de Milan, est à l'agonie. La
maladie de foie dont il souffrait s'est aggravée
à tel point qu'on craint use issue fatale.
M ■■ l .1 — ■ —
Grandes manœuvrel à Gibraltar
(De notre correspondant particulier)
Londres, 4 mars.
Des manœuvres d'artillerie de siège auront
lieu à Gibraltar du 9 au 15 mars.
L'escadre prendra part aux manœuvres.
■ .i —— ■
A MONTMARTRE
Dimanche prochain aura lieu à la mairie du
IS., place Jules-Joiïrin, la matinée annuelle
donnée par les Auiis de l'Adolescence.
M. Henri Brisson présidera cette fête, à la-
quelle prendront part les artistes les plus émi-
nents des principaux théâtres de Paris.
C'est dire que cette cérémonie sera des plus
brillantes et qu'elle aura le succès de celles qui
l'ont précédée.
— — ■«&»■ ■ ■
UNE CENTENAIRE
Une lettre peu banale
Nous recevons, avec prière d'insérer, la lettre
suivante :
Le commissaire général du concours général
des animaux gras prie M. le Directeur de vou-
loir bien annoncer que lo dimanche 9 mars
sera célébr:" à Angerville (Seine-et-Oise), l'an-
niversaire de la mère Meunier, qui a passé
cent ans et qui, plus heureuse que VictorHugo,
assistera à son centenaire.
Le maire d'Angerville, commissaire général
du concours, inspecteur général de l'agricul-
ture. - Ernest lIlinault.
— ■ ■■
UN EMPRUNT ALGÉRIEN
Conformément au vote émis en novembre
dernier par les délégations financières algé-
riennes, lo gouvernement vient da soumettre à
la Chambre un projet de loi tendant à auto-
riser l'Algérie à contracter un emprunt de cent
millions.
■ — ■ ■
EN TURQUIE
Constantinople, 5 mars.
Le ministre des Etats-Unis a remis samedi
lt la Porte une note relative an rapt de miss
Stone et demandant le châtiment des coupa-
bles.
La Porte a répondu qu'elle déçlioskit todtâ
Rili.&iUliJlfJ.Ir -- - .-' <
L'ASSASSINAT DE
LA PETITE CHËZE
L'incurie de la police. - Un crime qui
aurait pu être évité. - Responsabi-
lités à établir. — Détails rétros-
pectifs. — A la recherche de l'en-
fant. — Deux jours d'angois-
ses. — Etranglée. — Doulou-
reux anniversaire. — Une
fausse piste. — L'au-
topsie.
Avant de poursuivre le récit de l'abomina-
ble attentat dont a été victime la petite Chèze,
il est nécessaire de souligner la nonchalance,
l'incurie des hommes do police auxquels se
sont adressés les malheureux parents.
Entre 8 h. et 8 h. 114, dimanche matin, la
petite Angèle disparaissait ; dès 9 h. 112, le
père se rendait au poste du passage Tourla-
que, d'où on l'envoyait au commissariat de
Clignancourt, rue Marcadet. M. Chèze expli-
qua au secrétaire du commissaire qu'étant
donnés le caractère et l'éducation d'Angèle,
cette enfant avait dû être victime d'un
rapt.
Le secrétaire, en l'absence du commis-
saire, se borna à enregistrer la déclaration du
père.
A 10 h., Mme Véron, directrice d'une insti-
tution de jeunes filles, 71, rue Marcadet, et
tante de la victime, se rendait rue Francœur,
au domicile particulier de M. Carpin, commis-
saire de police, en vue de le supplier de faire
des investigations actives et surtout immé-
diates. Il lui fut répondu que M. Carpin, en-
core couché, ne pouvait la recevoir et qu'elle
n'avait, d'aillours, qu'à se rendre au commis-
sariat; — ce q-i'elle fit aussitôt.
Devant l'inertie manifeste de la police, Mme
Véron et M. Chèze tirent eux-mêmes des re-
cherches dans le quartier, auprès des voisins et
dos commerçants,jusqu'à une heure de l'après-
midi.
A ce moment Mme Véron se rendit chez un
journaliste, qui est l'ami de M. Chèze, et le
pria de l'accompagner au poste central, à la
mairie du 18* arrondissement.
Là, un inspecteur reçut Mme Véron et lui
dit :
— Angèle Chèze? Oui, nous nous occupons de la
disparition de cette enfant.On ne nous a pas encore
signalé qu'elle avait été retrouvée.
— Mais vous faites faire des recherches? demanda
tUmo Véron.
— D3S recherches ! Ah ! bien, s'il fallait recher-
cher tous les enfants qui se perdent nous n'aurions
plus autre chose à faire! Chaque jour il se perd
huit enfants à Clignancourt.
En désespoir de cause, Mme Véron et le
journaliste retournent au commissariat, rue
Marcadet. Il était alors 3 heures environ. Tou-
jours pas de M. Carpin! Le secrétaire ne put
que se répandre en doléances polies.
A 9 heures du soir, seulement, M. Chèze re-
cevait la visite d'un inspecteur de M. Carpin
qui lui annonçait que le service de la Sûreté
enverrait le lundi matin un inspecteur de la
sûreté.
En d'autres termes, on annonçait aux pa-
rents éplorés qu'on ne s'occuperait de leur fil-
lette que 24 heures après sa disparition. Et
l'on s'étonne de n'avoir retrouvé qu'un cada-
vre !
Avant le crime
Il nous faut revenir sur les circonstances
douloureuses qui ont accompagné cet épouvan-
table forfait.
La petite Angèle était d'une nature plutôt
chétive et d'un caractère timide et doux, elle
était la seconde des trois enfants de M. Théo-
dore Chèze, employé comme comptable à la
Banque Gallot, rue Lafayette.
Ses parents, qui l'aimaient tendrement, la
surveillaient avec un soin jaloux. Aussi quand
dimanche, vers 8 heures, ils l'envoyèrent faire
une commission chez un tripier du voisinage,
i's étaient loin de se douter qu'en plein jour
un enfant pouvait être enlevé dans des circons-
tances aussi dramatiques.
Il ne lui fallait que quelques instants pour
faire la course dont on l'avait chargée; aussi
quand au bout de 20 minutes les parents cons-
tatèrent qne l'enfant n'était pas rentrée, ils
furent pris d'inquiétude et le père se mit im-
médiatement à la recherche do sa fille.
Voici comment M. Chèze raconte le doulou-
reux calvaire qu'il a dû gravir.
Après s'être rendu au commissariat, où il fut
reçu de la façon que l'on sait, le père commença
seul les recherches.
Jusqu'au soir j'ai marché seul, interrogeant cent
personnes, sans rien trouver. A neuf heures dusoir,
un délégué du commissaire se présenta chez moi. Il
m'annonça qu'un inspecteur de la sûreté «marche-
rait » le lendemain matin sur l'affaire. Je l'accom-
pagnai chez la tripière où ma petite Angèle était
allée faire une commission et au poste de l'impasse
Tourlaque, où il me fut répondu qu'aucune nou-
velle n'était parvenue de la préfecture.
Rentré chez-moi, ne pouvant plus rien faire, après
cette journée de recherches personnelles et do dé-
marches j'écrivis dans la nuit diverses lettres par-
mi lesquelles une adressée à M. Camus, directeur
de l'école communale que fréquente mon fils Thé-
odore. Dans cette lettre je priai M. Camus d'inter-
roger les élèves de son école et, s'il le jugeait pos-
sible, de prier ses collègues, les directeurs des écoles
avoisinltutes, d'en faire autant. Je ne dormis pas.
Lundi matin M. Chèzo alla trouver un de ses
amis, M. Pilar,professeur de violon.
Celui-ci se rendit à l'hôpital Bichat, et ex-
plora le quartier, interrogeant les cantonniers,
les commerçants, tous ceux qui pouvaient
avoir vu la fillolta au moment de l'enlève-
ment.
La Sûreté « marche »
Ccmme M. Pihr venait rendre compte aux
parents éplorés de ses démarches infructueuses,
un agent de police vint se mettre à la dispo-
sition de la famille,
La Sûreté marchait.
Avoc le père, l'agent reprit l'enquête chez la
tripière, et do là tous deux allèrent dans la di-
rection des fortifications.
A la porte do la rue du Poteau, l'inspecteur
interrogea des douaniers qui ne purent répon-
dre; ils n'étaient pas de service la veille.
Ils suivirent alors les fortifications; l'agent,
hors Paris, le père, dans Paris. Pas de trace
nulle part, et pas de renseignements au com-
missariat.
On a vu l'assassin.
M. Pilar n'était pas, de son côte, resté inac-
tif et il avait fini par découvrir, sinon la piste,
du moins un signalement assez complet du ra-
visseur.
Ce signalement avait été fourni par deux
enfants fréquentant l'école de la rue Lepic.
Ceux-ci avaient vu dimanche, vers 8 heures
et quart, l'enfant arrêtée devant l'étalage d'un
épicier. Un individu d'environ 40 ans, d'alluros
suspectes, était près d'elle, et l'enfant le suivit
un instant,puis, quelques pas plus loin, dans
la rue plus déserte, l'inconnu la saisit brutale-
ment et l'entraîna.
L'enfant criait.
Lundi soir, vaincu par la fatigue, M. Chèze
s'endormit et à minuit on vint le réveiller. Sa
fille était retrouvée, mais hélas 1 morte, assas-
sinée.
Le père et l'enfant
Nous avons dit hiercomment le père avait re-
connu le cadavre de sa fille, et comment il
avait retrouvé la petite Angèle, que 36 heures
heures auparavant, il avait vue sortir de CpeZ
lui fiante et iw«ui0^' -. i
Lorsque le jeune Pelletier découvrit le pa-
quet qui contenait le corps de la malheureuse
victime, la petite Angèlo venait d'être assajs&L-.
née, elle râlait encoio faiblement, mais maigre
les soins qui lui furent prodigués, elle ne tarda
pas à expirer.
Nul n'avait vu l'assassin apporter son funèbre
colis, la rue à cette heure est déserte, et le mi-
sérable savait qu'il pouvait déposer là son far-
deau sans éveiller l'attention de personne.
Le lieu est sauvage, la rue des Saules rampe
sur les flancs de la Butte; au bas elle se ter-
mine par uu escalior, en haut elle est bordée
par larue Sainl-Vinceul étroite et lugubre.
Dès qu'il se trouva on face du cadavre de sa
fille, M. Chèze tomba à genoux et éclata en
sanglots.
Mme Chèze, déjà malade, a dû s'aliter quand
elle a appris la fatale nouvelle.
Le docteur qui la soigne a de grandes crain-
tes à son sujet, d'autant plus qu'elle était souf-
frante depuis longtemps déjà. Mais depuis la
disparition de sa fille, son état est devenu ef-
frayant.
Lorsque le cadavre de la petite Angèle a été
déposé au poste du passage Tourlaquo, il y
avait exactement un an que le dernier enfant
de M. Chèze était né.
Douloureux anniversaire !
L'ENOUÈTE
M. Cocheferta poursuivi son enquête jusqu'à
5 heures du malin.
Il a recueilli beaucoup d'indications; mais,
outre qu'elles sont souvent contradictoires,
elles manquent pour la plupart de préci-
sion. Des enfants ont bien vu un homme
cheminer avec la pauvre enfant ; mais ils ne
donnent de cet individu qu'un signalement
iusuffisant. Bref, les renseignements qui pour-
raient mettre sur la traco ao l'auteur de ce
crime atroce font jusqu'à présent complèîe-
ment défaut. On redouble donc d'activité en
vue de recueillir quelque iudicalion impor-
tante.
Une fausse piste
Un instant on avait cru être sur une pis'.e
sérieuse. Une marchande d'objets religieux
était venue déclarer à M. Dupuis. commis-
saire de police, qu'elle avait vu dimanche,
dans le voisinage du Sacré-Coour, un groupe
de loqueteux au milieu desquels elle avait re-
marqué un homme âgé assez bien vêtu, qui
tenait par la main une fillette de l'âge d'Adèle
Chèze.
Mais, confrontée avec le cadavre de la pe-
tite victime, cette marchande ne l'a pas recon-
nue pour la fillette qu'elle avait vue en com-
pagnie de cet homme âgé.
L'autopsie
Le corps d'Angèle Chèze a été transporté à
la Morgue hier matin, à 11 heures, et le D*
Socquet a commencé l'autopsie dans l'après-
midi. ,
Le médecin légiste a constaté que l'estomac
de l'enfant était entièrement vide, ce qui indi-
que que la petite victime a été tuée au moins
trois ou quatre heures après avoir mangé.
En dehors des marques de strangulation et
des traces laissées par la corde sur les poi-
gnets et les jambes, le corps ne portait aucune
trace de violences, le linge n'était pas souillé.
Une nouvelle piste
Dans la journée, M. Carpin a reçu la décla-
ration de Mme Zanerotti, marchande de pom-
mes de torre frites, demeurant 39, rue des
Saules. En sortant du débit de vins situé à
l'angle de cette rue et de la rue Darwin, vers
9 heures et demie, la brave femme avait avisé
un homme chargé d'un volumineux paquet
qu'il déposa sur le trottoir devant le n, 31.
Comme l'homme avait mauvaise mine, Mme
Zanerotli, prise de frayeur, s'empressa de ren-
trer chez elle.
Cet homme, qu'on croit être l'assassin, est
activement recherché. On suppose qu'il habite
rue de la Barre. Toujours est-il qu'il y a un
mois environ il a été remarqué sur la Butte,
cherchant à entraîner une fillette.
Des photographies d'une maison en cons-
truction, au n* 6 de la rue Darwin, ont été pri-
ses par le photographe de la préfecture de
police, On suppose que c'est dans les caves da
cet immeuble que le triste personnage aurait
commis son épouvantable crime.
Le signalement de cet individu correspond
exrctemont à celui fourni par les personnes
qui ont vu la fillette et son ravisseur.
Depuis le soir du crime il n'a pas reparu à
son domicile et les renseignements recueillis
sur son compte sont déplorables au point do vue
des mœurs.
On suppose qu'il a dû se rendre chez des
parents qui habitent dans le département de
Seine-et-Oise.
L'ACCIDENT DE M, WALDECK-ROUSSEAU
Etat satisfaisant des blessés. — Le
bulletin de santé.
L'état de santé de M. Waldeck-Rousseau est
tout à fait satisfaisant. Le président du con-
seil a passé une bonne nuit. Les médecins qui
le soignent sont complètement rassurés.
Hier matin, les docteurs Poirier et Babinsky
ont de nouveau rendu visile au président du
conseil et ont examiné l'épaule dont le malade
ne souffrait presque plus. A l'issue de cette
consultation, M. le professeur Poirier, inter-
rogé par tes collaborateurs do M. Waldeck-
Rousseau,a répondu: « Le président est bien.
Je suis très content. »
Voici le bulletin qui a été ensuite rédigé à
midi et demi :
Nuit bonne. Dépression moins grande. Douleurs
moins vives dans l'épaule, dont on pourra corn.
mencer le massage demain. Repos absolu.
POIRIER, BABINSKY.
L'épreuve radiographique
L'épreuve radiographique faite il y a deux
jours a permis aux médecins de constater qu'il
n'y avait pas, à l'épaule. de luxation et que
des massages suffiraient à produire un complet
rétablissement d'ici dix à douze jours. Les
plaies relevées sur diverses parties du corps
étaient peu profondes et sont d'jà formées.
Le président du conseil pourra certainement
reprendre la direction de son ministère dans
quarante huit-heures, sans toutefois quitter la
chambre.
M. René Waldeck-Rousseau, auquel lé doc-
teur Poirier a prescrit également le repos le
plus absolu, ne reprendra pas ses fonctions
avant la fin de la semaine. Un épapchement
sanguin s'est produit à la jambe, qui retarde la
guérison du chef de cabinet de M. Waldeck.
Rousseau.
Hier soir encore sont arrivés des télégram-
mes demandant des nouvelles du président de
conseil, et plusieurs membres du corps diplo
malique sont venus s'enquérir de sont état.
LA BKÏliÈKE
Voici toutes les indications concernant l'or,
ganisation du cortège organisé, pour demain,
par le comité de la Mi-Carême (Rive gau,
che).
Composition du cortège
Gardes de Paris à cheval. — Sa peurs Monjarret.
— Huit trompettes à cheval. - Marché des CarmeS'
six landaus. — Lavoir Sainte-Loniso, un cfutr. -
Cycle amical de la Sorbocno, scanius. — Char dtf
Jardin des Plantes, six animaux et un dompiuuft
— Cbar do la musique, faalare dqk QohoUifr qI
foNDATEUR; ÂDGUSTE VFICQUEBIE
ABONNEMENTS
V. 1018 Trots Doit Six moîi Cn as
Paris. 2fr. 5 fr. 9 fr. 48 fr.
Sîôpartemerits.. 2 — 6— 14 — 20 - ;
Postale '":" S — 46 — 32 -
A
BINURRCIIRUEH CHEF : CHARLES BOS
ôt X-iég-eil^i
1^1 'NONCES .1
l LJ GRANGE, CERF & Olt
ty'Flace de la Bourse, 6
Ot AUX BUREAUX du JOURNA&
i
REDACTION : tai, rue Montmartre, 131,
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 lettre du matin
No 11682. - Jeudi 8 Mars 10022$
15 VENTOSE AN 110
ADIIINIS'IrIRA'TION: 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à l'administrateur
L'échéance du 45 mars étant une des
plus considérables de l'année, nous prions les
personnes-dont l'abonnement expire à cette
date d'enroyer, dès à présent, avec la
dernière bande, le montant de leur renOlt-
vellement à l'Administrateur de notre jour-
nal, 131, rue Montmartre.
On peut également s'abonner sans frais
dans tous les bureaux de poste.
NOS LEADERS
le Dinde Marseille
La crainto des électeurs estlecommen-
uement delà sagesse. Si cetaxiome avait
besoin de quelque démonstration, je la
chercherais dans le discours que vient de
prononcer, dans la cité républicaine de
Marseille, M. Ribot. Nous n'avonsguère
besoin, j'imagine, de dire, même rapi-
dement, l'attitude politique qu'a suivie
ala Chambre, parallèlement avec M. Mé-
line, le leader des modérés, ni de rap-
peler les embûches qu'il a suscitées au
ministère de défense et d'action républi-
caines ni de refaire l'historique des
accords regrettables que son parti a con-
tractés avec la faction clérico-césa-
rienne. Nous connaissons tous la
longue opposition que M. Ribot a per-
sonnellement faite au gouvernement.
T M. Ribot a tenu, dans son discours
d'hier, à distinguer entre l'opposition
que ses amis et lui avaient apportée à
!'œuvl'e du gouvernement, et une autre
opposition — non loyale, sans doute,
cette dernière — faite par les nationa-
listes.
A la Patrie française, on doit être plus
qu'ému de cette façon de juger la ma-
nière qu'ont les vivelarmistes de con-
cevoir l'action politique.
Monarchistes, cléricaux, nationalis-
tes, ne marchandaient pourtant pas
leurs applaudissements à MM. Ribot et
Aynard quand ceux-ci, tout récemment,
attaquaient l'ordre du jour Henri Bris-
son, réclamant la prompte suppression
de la loi Falloux.
Ceux qui ont vu la Chambre ce jour-
là,regardant la droite et le centre agités
par la même passion, pouvaient bien
croire que la situation politique ne
comportait rien que la lutte de deux
grands partis: le parti démocratique
et.. l'autre.
Tous ces faits sont présents à la mé-
moire, inutile donc d'insister. M. Ribot
aujourd'hui s'élève très énergiquement
contre le nationalisme, c'est d'ailleurs là
ileseul point nouveaudesondiscours-pro-
gramme. Au point de vue enseignement
il est pour la liberté.C'est assez vague, et
il ne se compromet guère.Nous sommes
,tous pour la liberté; la réclamant pour
nous, nous ne saurions la refuser aux
autres ; le tout est de savoir — M. Ribot
ne l'a pas indiqué — où elle commence
et où elle finit.Les idées du député d'Ar-
ras ne sont guère di fïérentes en ce qui
concerne les réformes sociales. Il de-
mande que l' « évolution se fasse paci-
fiquement et librement ». Le parti répu-
blicain, que je sache, n'a jamais préco-
nisé les moyens violents pour substi
tuer aux impôts qui écrasent les pau-
vres gens d'autres impôts plus justes,ou
,pour accomplir les réformes que notre
démocratie attend depuis plus do trente
ans, ,
Après toutes ces explications qui ne
sont pas précisément nouvelles, l'ora-
teur s'est préoccupé do l'armée natio-
nale.
« Le ministère actuel, dit-il, pas plus
Que ses prédécesseurs n'a eu ce parti
pris d'affaiblie la défense nationale. »
Alors si M. Waldeck-Rousseau n'a pas,
depuis la formation du ministère, livré
systématiquement la France aux
étrangers, pourquoi M. Ribot l'a-t-il
combattu, et a-t-il crié sur tous les
tons et en tous lieux les torts du
gouvernement ? Pendant trois ans en
tablant sur l'affection que nous avons
pour l'armée, sur l'amour que nous
avons voué à la belle patrie qui est la
nôtre, M. Ribot a essayé de mettre en
minorité le cabinet, pour assumer, sans
doute, la tâche glorieuse de rendre la
France plus prospère et plus grande,
comme successeur de M. Waldeck-
Rousseau. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait,
quand il possédait le pouvoir ?
Enfin le député d'Arras termine,— et
des journaux L de son parti ont omis de
parler des applaudissements enthou-
siastes, qui ont dû éclater - en dé-
clarant qu'il est « hostile à tous les
projets de revision derrière lesquels se
cachent assez mal les tendances plébis-
citaires ». M. Ribot a mis du temps à
s'en apercevoir et c'est à la veille des
élections, combattu par un nationaliste,
que le péril césarien lui apparaît. C'est
bien curieux. Mais que vont dire de cette
déclaration antinationaliste les ligues
st sous-ligues de la Patrie française ou
des Patriotes, que vont penser les Cop-
pée, les Lemaître, les Dausset, les Dé-
roulède, passés, présents et futurs ? Ils
trouveront sans doute que c'est bien
mal à M. Ribot de les abandonner à
leur triste sort.
Après avoir constaté, ces temps der-
niers, l'adhésion de farouches antimi-
nistériels à la politiquo de M. Wal-
deck-Rousseau, on est fondé à croire
que M. Ribot, retour de Marseille, de-
viendra un soutien du Jûiflisfcère
fense et d'action républicaines. Nous l'en
félicitons d'avance.,
A. Gervals.
Nous publierons demain un article
de M. Lucien Victor-Meunier.
Il Ml 11l wammmmmmmm
L'ALLEMAGNE ET LES ÉTATS-UNIS
Qu'est-ce que l'Allemagne
veut obtenir des Etats-Unis ?
rien, ou du moins fort peu de
chose, si nous écoutons le chan-
celier allemand.
Le chancelier allemand : « Le
voyage - du prince Henri ne
poursuit aucun but politique. Ce que nous
désirons, c'est que les bonnes relations
traditionnelles entre l'Allemagne et les
Etats-Unis soient continuées telles qu'elles
existent depuis le grand Frédéric et le grand
Washington, Les deux peuples, allemand
et américain, méritent un respect mutuel,
et je ne puis prévoir, en envisageant l'a-
venir, aucune raison qui les empêche de
continuer à vivre en parfaite concorde et
amitié,)
De son côté, le prince Henri, parlant aux
citoyens des Etats Unis, s'exprime en
ces termes : « Vous savez de qui je suis le
représentant. Ma mission est de resserrer
les liens d'amitié qui existent entre les deux
gouvernements. L'Allemagne sera toujours
prête à vous serrer la main à travers l'A
tlantique, quand vous le Voudrez. Je re-
présente aussi une nation toujours prête à
combattre, une nation en armes, mais non
belliqueuse. Mon souverain est toujours
l'avocat de la paix et son intention est de
rester en bons termes avec les autres puis-
sances. »
Aie ! il y a bien là quelque petite chose
qui n'est pas purement une offre de poignée
de main; il y a en outre une sorte d'offre
de l'armée allemande, qui n'est pas « bel-
liqueuse », chacun sait ça, mais qui est
« toujours prête à combattre ». Le chance-
lier n'avait pas été aussi loin; il s'était con-
tenté de nous déclarer que l'amitié améri-
cano-allemande dure depuis le grand Was-
hington, et le grand Frédéric, ce qui nous
donne à supposer que c'est ce dernier —
le grand Frédéric — et non le simple fran-
çais Rochambeau, qui a fait capituler lord
Cornwallis à Yorktown, capitulation qui
assura l'indépendance des Etats-Unis; le
prince Henry fait mieux; il éprouve le be-
soin de rappeler aux Américains que l'ar-
mée allemande est nombreuse et forte; il
dit : — gardez-moi votre amitié, pour
qu'on lui réponde : — réservez-nous les
bons offices de votre armée.
Nous supposions bien que le kaiser n'a-
vait pas envoyé son frère aux Etats-Unis,
uniquement pour lui donner l'occasion
d'admirer miss Roosewelt brisant une bou-
teille de champagne sur la muraille d'un
yacht allemand. — Ch. B.
PARTI RADICAL-SOCIALISTE
Le comité exécutif du parti républicain ra-
dical et radical-socialiste s'est réuni hier soir,
62, rue Tiquetonne, sous la présidence de M.
Henri Brisson, député.
Les pouvoirs du comité directeur ont été
défiais; il est composé do MM. Henri Brisson,
Léon Bourgois, Isambert, Pellelan, députés,
Desmos, vicd-président du Sénat, Combes,
Val lé, sénateurs. Il a pour secrétaire M. Cha-
denier, ancien préfet. Sa mission durera jus-
qu'à la fin do la période électorale.
Des résolutions concernant la propagande
et l'organisation du parti ont été prises.
Toutes les demandes de renseignements, de
brochures et d'adhésion doivent être adressées
au siège social du comité exécutif, 62, rue
Tiquetonne, à Paris.
« O» —
VICTOIRE RÉPUBLICAINE
(De notre correspondant varlicullerj
Toulouse, le 4 mars 1902.
Comme vos lecteurs le savent, M. Castels,
républicain ministériel, a été élu dimanche
dernier conseiller général du canton de Galan
(Hautes-Pyrénées), contre M. Labroquère, na-
tionaliste.
Le conseil d'Etat avait invalidé M. Labro-
quère; à leur tour les électeurs ont condamné
sans appel les manœuvres de corruption aux-
quelles se livraient depuis longtemps les réac-
tionnaires du département; ceux-ci cependant
avaient déployé pendant les dernières semai-
nes une activité extraordinaire et commis de
nombreux faits de pression. La victoire du
candidat républicain n'en est que plus signi-
ficative. Elle est due à l'esprit d'union des
électeurs, écœurés des louches agissements du
« parti sans nom », et surtout à la superbe
campagne qu'a menée M. Castets, qui a fait
acclamer dans toutes les communes son pro-
gramme de réformes démocratiques. — F, V.
—— —« ♦ —
LES DROITS DE DOUANE
La commission des douanes a entendu M.
Dupuy, ministre de l'agriculture, au sujet de
la proposition de loi de M. Prevet qui tend à
supprimer pour le gouvernement le droit de
suspendre en tout ou en partie, par décret, les
droits de douane sur les blés et à substituer le
régime de la loi au régime des décrets.
M. Dupuy a déclaré ne pouvoir s'associer à
la proposition, parce qu'elle supprimerait une
des prérogatives du pouvoir exécutif.
4>
LA JOURNÉE DE HUIT HEURES
La commission sénatoriale chargée d'exa-
miner la proposition do loi relative à la durée
du travail dans les mines a entendu M. Darcy,
président, et Grisier, secrétaire général du co-
mité des houillères de France, ainsi que plu-
sieurs directeurs de mines.
Elle entendra aujourd'hui les représentants
des industries métallurgiques puis, le 12 mars,
les représentants de3 syndicats d'ouvriers mi-
neurs. Ceux-ci seront, en outre, entendus con-
tradictoirement avec les représentants des di-
rections des mines.
-- LA TAXE DES JOURNAUX
Le rapport de M. Sembat, au nom de la
commission du budget, sur l'affranchissement
des journaux périodiques, conclut à la taxe de
0 fr. 01 pour les journaux d'un poids inférieur
à 50 grammes circulant dans les départements
français. La taxe sera réduits à 0 fr. 005 pour
les journaux circulant dans les départements
delà publication ou les départements limitro-
phes. .;
La discussion de ce projet
LETTRE DE
SAINT-PÉTERSBOURG
Ce que les journaux russes ne peu-
vent pas dire. — Une singulière
mesure. — Nouveaux troubles
universitaires. — La prison
après le massacre.— Cal-
me trompeur.
(De notre correspondant spécial en Russie)
Saint-Pétersbourg, 28 février.
Pour la première fois et pir ordre, les jour-
naux russes publient une liste, interminable,
d'étudiants et d'ouvriers emprisonnés à lasui'e
des troubles qui éclatèrent ces derniers jours
dans la plupart des conircs universitaires et
dont la presse, par ordre également, ne fit pas
mention. Qu'espère la direction de la police
en faisant donner aux mesures de répression
cette publicité boiteuse qui ouvre tout au moins,
à ce public qu'on veut laisser dans l'ignorance
d'événements qui sont l'indice d'une agitation
permanente dos milieux universitaires et popu-
laircs le champ à toutes les hypothèses ?
Voilà ce qui nous échappe, et ce que ne com-
prennent pas non plus les quelques propagan-
distes à l'abri des griffes de la police peters-
bourgeoise, que nous avons rencontrés aujour-
d'hui.
La mesure fait, d'ailleurs, l'objet de tous
les commentaires et l'on se félicite générale-
ment, dans les milieux où dominent les ten-
dances socialistes, de ce nouveau mode de pro-
pagande contre l'absolutisme, innové par la
gouvernement.,.
Grève d'étudiants
Mais si la lecture des ceotaine de noms im-
primés co matin doit faire naître des sentiments
de révolteen l'âme russe,elle n'inléresseraitque
médiocrement les lecteurs et les charmantes
lectrices du Rappel. Vous me permettrez donc
de les passer sous silence, pour, sans autre
préambule, vous faire un récit succinct, mais
rigoureusement exact des événements qui ont
motivé d'aussi nombreuses arrestations, qu'on
tient cachées ici et dont le télégraphe n'a pu,
grâce à la censire, transmettre que de très
faibles échos à l'extérieur. C'est en matière de
protestation contre le fameux « règlement pro-
visoire » qui exclut des écoles supérieures et
astreint au service militaire obligatoire dans
des compagnies disciplinais, pour une durée
fixée arbitrairement, les étudiants suspects aux
autorités, que le 20 février, à la suite de con-
damnations nouvelles, la plupart des élèves des
grandes écoles désertaient,sur un mot d'ordre,
les salles de cours. Quinze étudiants étaient
exilés le lendemain matin; une proclamation,
le môme jour, était répandue à des milliers
d'oxomplaires, dans tous les milieux, par les
soins de groupements illicites d'étudiants.
Ceux-ci réclamaient, avec beaucoup de modé-
ration d'ailleurs, ces choses invraisemblables
ici: la liberté de réunion, la liberté de la pa-
role, le respect de la personnalité.
La réponse ne se faisait pas attendro. Vers le
milieu de la nuit qui suivit, des milliers de po-
liciers envahissaient simultanémenldesmillicrs
do chambres d'étudiants, se mettaient à la re-
cherche du document compromettant et, le
lendemain matin, les prisonsde la ville avaient
plus de 400 hôles nouveaux.
A coups de Nagaïka
Dans un besoin de fuir l'isolement la plu-
part des perquisitionnés laissés libres et de
très nombreux ouvriers se réunissaient, le
jour qui suivit, dans la grande salle de la
maison du peuple édifiée, comme on sait, par
les soins paternels du tsar Nicolas II.
Ils étaient là un millier à discuter de façon
très calme, quand la police, soudain, fit irrup-
tion de toutes les issues. Armés de la terrible
nagaïka, les policiers, durant plus d'une heure,
frappèrent avec une rage sauvage les femmes
et les hommes qui tentèrent inutilement de ré-
sister ou de s'enfuir.
On imagine le terrifiant spectacle do cette
tuerie, ces êlros désarmés, bientôt ensanglan-
tes, aux prises avec les brutes affolées de car-
nage, les hurlements de douleur des blessés
dominés par le sifflement des lanières de cuir
à pointes d'acier.
Heureux les plus grièvement atteints : ils
furent conduits à l'hôpital! Les autres, depuis,
attendent dans les cachots, avant la dépor-
tation, le bon plaisir des magistrats enquê-
teurs.
A Moscou, à Riga, à lékathérinoslaw, àKief,
à Tomsk, les incidents et les arrestations se
sont multipliés pendant le mois de février.
Le calmo, aujourd'hui, semble être revenu,
mais trep de haine s'est amassée dans le cœur
de la jeunesse studieuse et du prolétariat des
fabriques pour qu'il soit durable. — A. G.
N. D. L. R. — L'Agence Bavas a publié hier dans
deux de ses feuilles, un « ordre du jour » que le
ministre de l'instruction publique russe vient de
faire insérer dans le Messager officiel. Les événe-
ments auxquels se rapporte cet ordre du jour, et
qui se sont déroulés à Moscou,sont bien antérieurs
aux faits que signale notre correspondant à Saint.
Pétersbourg et les mesures qu'édicté cet ordre du
jour sont déjà connues du public.
UNE OUESTION DE PRIORITÉ
La téléphonie sans fil. — M. Maiche et
M. Ducretet. — Les expériences de
M. Maiche. -- A 7 kilomètres.
— Rendons à César.
A deux reprises, ces temps derniers (voir nos
numéros des 26 janvier et 17 février), M. de
Vaulabelle a signalé à l'attention de nos lec-
teurs les récentes expériences de téléphonie
sans fil exécutées à Paris par M. Ducrclet.
Sans contester en rien le réel intérêt des re-
cherches de cet habile constructeur, on ne sau-
rait cependant accepter sans réserves les as-
sertions émises dans les deux articles que nous
venons de rappeler.
A s'en rapporter, en effet, aux dires de M.
de Vaulabelle, c'est à M. Ducretet que doit re-
venir sans conteste possible tout le mérite de
la découverte de la téléphonie sans fil, do
môme que c'est au physicien Bourbouze qu'ap-
partiendrait celui d'avoir, le premier, commu-
niqué télégraphiquement à grande distance par
voie terrestre.
Dans la réalité des choses, cependant, il an
est tout autrement.
Les expériences de Bourbouze, expériences
qui remontent à 1870, tous les électriciens sont
unanimes à le reconnaître, furent sans résul-
tats précis et se trouvèrent en réalité si peu
encourageantes que leur auteur ne les pour-
suivit pas ; et, quant à la téléphonie sans fil, à
rencontre des assertions de M. de Vaulabelle et
en dépit de la discussion, à l'aide do laquelle il
s'est efforcé de justifier son affirmation, ce
n'est point M. Ducretet, mais bien M. Maiche
qui est le véritable découvreur de la re-
cette.
La chose, au surplus, est aisée à démon-
trer.
Les essais de M. Ducretot, essais dont cet au-
teur a présenté les résultats à l'Académie des
sciences dans la séance du 13 janvier 1902, da-
tent des derniers jours de 1901.
Or, plusieurs mois auparavant, le Figaro
(n* du 14 avril 1901), et la Science française
(n" du 14 avril 1901), enregistraient le compte
rendu d'une suite d'expériences exécutées dans
i te foré,t dfl Saint-Germain flfl jH&fiûfii fjifl Jfe
moins autorisés et dans lesquelles, grâce à
l'emploi, des dispositions combinées par M.
Matchsèommunique? téi £ phonique-
ment sans autre fil condiicleur que la terre
seule à environ un kilomètre de distance. M.
Ducretet, en janvier 1901, ne communique, re-
marquons-le, qu'à une dislance de quelques
mèlre seulement.
Mais ce n'est pas tout. Dès le 19 février 1901
M. Maieho, sous le titre suivant : «Système de
transmission des signauv télégraphiques et
téléphoniques», dans le mémoire descriptif
déposé par lui au ministère du commerce, à
l'appui d'une demande de brevet, décrivait en
tous ses détails le principe de son système de
téléphonie sans fil.
Depuis lors, du reste, M. Maiche a très no-
tablement encore perfectionné son invention.
Il y a environ un an, comme nous le notions
à l'instant, il pouvait échanger sans conduc-
teur des signaux téléphoniques à un kilomètre
distance ; le mois dernier or. des expériences
poursuivies à Marchais les 16, 17 et 18 janvier
1902, c'est-à-dire au moment même où M. Du-
cretet annonçait triomphalement communiquer
à une distance représentée par l'épaisseur d'un
corps de bâtiment, M. Maiche communiquait
à plusieurs kilomètres, ainsi que nous le voyons
mentionné dans le compte rendu de la séance
du 7 février 1902 de la Société des ingénieurs
civils publié par la revue spéciale l'Eclairage
électrique:
Effectuas avec des appareils établis pour fonc-
tionner avec une portée de 400 mètres, avec des
fils de base de lo à 20 mètres, soit d'une longueur
égale environ au vingtième de la portée, les essais
ftirent néanmoins poussés successivement à 1.590,
3 500 et 7 000 mMrcs, en prenant des fils de base
d3 plus en plus longs.Jusqu'à 5.500 mètres les St,
gnnux téléphoniques ou télégraphiques ont été
parfaiteizinï netg et clairs. A 7.000 mètres, les
signaux'cléphoniquss n'étaient plus perçus que
d'une façon indistincte, mais les signaux télégra-
phiques avaient conservé leur netteté.
Voilà, n'est-il pas vrai, qui dépasse singu-
lièrement les résultats obtenus par M. Ducre-
tet, et qui, par surcroît, établit nettement et
sans réplique le droit de priorité de M. Mai-
che.
M. Ducretot est un homme do science trop
consciencieux pour ne pas reconnaître, en pré-
sence de ces faits, qu'il ignorait très certaine-
ment, lors de sa communication à l'Académie
des sciences, qu'il fût précédé dans la ques-
tion par M. Maiche et que c'est bien à celui-
ci que revient entièrement le mérite d'avoir le
premier réussi à montrer la possibilité d'éta-
blir à distance des communications télépho-
niques en prenant le sol pour conducteur.
Voir à la 3e page
les DERNIÈRES DÉPÊCHÉS
de la nuit et la
REVUE DES JOURNAUX
du matin
CARABINES EXPLOSIVES
(De notre correspondant particulier)
Bombay, 4 mars.
Au cours de sa tournée d'inspection, legéné-
ral Hill a fait une constatation qui a vivement
surpris les chefs do l'armée anglo-indienne. Les
carabines des régiments de cavalerie sont abso-
lument inutilisables. C'est ainsi que les che-
vau-légers de Calcutta ont vu une partie de
leurs armes éclater entre leurs mains. On peut
dire sans exagération que les cavaliers ont
peur de leur carabine 1 -
L'administration militaire a décidé le rem-
placement des armes à feu de la cavalerie.
L'ARMÉE «57M-MB680B8
(De notre correspondant particulier)
Budapest, 4 mars.
En tout silence le ministre commun de la
guerre est en train de créer quarante nouveaux
régiments d'infanterie.
Le nombre des bataillons dans chaque régi-
ment a été réduit de 4 à 3 etdes quatrièmes ba-
taillons détachés on formera le no fau des nou-
veaux régiments.
, Les délégations qui se réuniront cette année
n'auront plus qu'à voter le crédit nécessaire.
——————————— .4>
PRÊTRE mmm A L'AGONIE
(De notre correspondant particulier)
Milan, 4 mars.
Don Albertario, le prêtre qui, en , 1898, prit
part aux émeutes de Milan, est à l'agonie. La
maladie de foie dont il souffrait s'est aggravée
à tel point qu'on craint use issue fatale.
M ■■ l .1 — ■ —
Grandes manœuvrel à Gibraltar
(De notre correspondant particulier)
Londres, 4 mars.
Des manœuvres d'artillerie de siège auront
lieu à Gibraltar du 9 au 15 mars.
L'escadre prendra part aux manœuvres.
■ .i —— ■
A MONTMARTRE
Dimanche prochain aura lieu à la mairie du
IS., place Jules-Joiïrin, la matinée annuelle
donnée par les Auiis de l'Adolescence.
M. Henri Brisson présidera cette fête, à la-
quelle prendront part les artistes les plus émi-
nents des principaux théâtres de Paris.
C'est dire que cette cérémonie sera des plus
brillantes et qu'elle aura le succès de celles qui
l'ont précédée.
— — ■«&»■ ■ ■
UNE CENTENAIRE
Une lettre peu banale
Nous recevons, avec prière d'insérer, la lettre
suivante :
Le commissaire général du concours général
des animaux gras prie M. le Directeur de vou-
loir bien annoncer que lo dimanche 9 mars
sera célébr:" à Angerville (Seine-et-Oise), l'an-
niversaire de la mère Meunier, qui a passé
cent ans et qui, plus heureuse que VictorHugo,
assistera à son centenaire.
Le maire d'Angerville, commissaire général
du concours, inspecteur général de l'agricul-
ture. - Ernest lIlinault.
— ■ ■■
UN EMPRUNT ALGÉRIEN
Conformément au vote émis en novembre
dernier par les délégations financières algé-
riennes, lo gouvernement vient da soumettre à
la Chambre un projet de loi tendant à auto-
riser l'Algérie à contracter un emprunt de cent
millions.
■ — ■ ■
EN TURQUIE
Constantinople, 5 mars.
Le ministre des Etats-Unis a remis samedi
lt la Porte une note relative an rapt de miss
Stone et demandant le châtiment des coupa-
bles.
La Porte a répondu qu'elle déçlioskit todtâ
Rili.&iUliJlfJ.Ir -- - .-' <
L'ASSASSINAT DE
LA PETITE CHËZE
L'incurie de la police. - Un crime qui
aurait pu être évité. - Responsabi-
lités à établir. — Détails rétros-
pectifs. — A la recherche de l'en-
fant. — Deux jours d'angois-
ses. — Etranglée. — Doulou-
reux anniversaire. — Une
fausse piste. — L'au-
topsie.
Avant de poursuivre le récit de l'abomina-
ble attentat dont a été victime la petite Chèze,
il est nécessaire de souligner la nonchalance,
l'incurie des hommes do police auxquels se
sont adressés les malheureux parents.
Entre 8 h. et 8 h. 114, dimanche matin, la
petite Angèle disparaissait ; dès 9 h. 112, le
père se rendait au poste du passage Tourla-
que, d'où on l'envoyait au commissariat de
Clignancourt, rue Marcadet. M. Chèze expli-
qua au secrétaire du commissaire qu'étant
donnés le caractère et l'éducation d'Angèle,
cette enfant avait dû être victime d'un
rapt.
Le secrétaire, en l'absence du commis-
saire, se borna à enregistrer la déclaration du
père.
A 10 h., Mme Véron, directrice d'une insti-
tution de jeunes filles, 71, rue Marcadet, et
tante de la victime, se rendait rue Francœur,
au domicile particulier de M. Carpin, commis-
saire de police, en vue de le supplier de faire
des investigations actives et surtout immé-
diates. Il lui fut répondu que M. Carpin, en-
core couché, ne pouvait la recevoir et qu'elle
n'avait, d'aillours, qu'à se rendre au commis-
sariat; — ce q-i'elle fit aussitôt.
Devant l'inertie manifeste de la police, Mme
Véron et M. Chèze tirent eux-mêmes des re-
cherches dans le quartier, auprès des voisins et
dos commerçants,jusqu'à une heure de l'après-
midi.
A ce moment Mme Véron se rendit chez un
journaliste, qui est l'ami de M. Chèze, et le
pria de l'accompagner au poste central, à la
mairie du 18* arrondissement.
Là, un inspecteur reçut Mme Véron et lui
dit :
— Angèle Chèze? Oui, nous nous occupons de la
disparition de cette enfant.On ne nous a pas encore
signalé qu'elle avait été retrouvée.
— Mais vous faites faire des recherches? demanda
tUmo Véron.
— D3S recherches ! Ah ! bien, s'il fallait recher-
cher tous les enfants qui se perdent nous n'aurions
plus autre chose à faire! Chaque jour il se perd
huit enfants à Clignancourt.
En désespoir de cause, Mme Véron et le
journaliste retournent au commissariat, rue
Marcadet. Il était alors 3 heures environ. Tou-
jours pas de M. Carpin! Le secrétaire ne put
que se répandre en doléances polies.
A 9 heures du soir, seulement, M. Chèze re-
cevait la visite d'un inspecteur de M. Carpin
qui lui annonçait que le service de la Sûreté
enverrait le lundi matin un inspecteur de la
sûreté.
En d'autres termes, on annonçait aux pa-
rents éplorés qu'on ne s'occuperait de leur fil-
lette que 24 heures après sa disparition. Et
l'on s'étonne de n'avoir retrouvé qu'un cada-
vre !
Avant le crime
Il nous faut revenir sur les circonstances
douloureuses qui ont accompagné cet épouvan-
table forfait.
La petite Angèle était d'une nature plutôt
chétive et d'un caractère timide et doux, elle
était la seconde des trois enfants de M. Théo-
dore Chèze, employé comme comptable à la
Banque Gallot, rue Lafayette.
Ses parents, qui l'aimaient tendrement, la
surveillaient avec un soin jaloux. Aussi quand
dimanche, vers 8 heures, ils l'envoyèrent faire
une commission chez un tripier du voisinage,
i's étaient loin de se douter qu'en plein jour
un enfant pouvait être enlevé dans des circons-
tances aussi dramatiques.
Il ne lui fallait que quelques instants pour
faire la course dont on l'avait chargée; aussi
quand au bout de 20 minutes les parents cons-
tatèrent qne l'enfant n'était pas rentrée, ils
furent pris d'inquiétude et le père se mit im-
médiatement à la recherche do sa fille.
Voici comment M. Chèze raconte le doulou-
reux calvaire qu'il a dû gravir.
Après s'être rendu au commissariat, où il fut
reçu de la façon que l'on sait, le père commença
seul les recherches.
Jusqu'au soir j'ai marché seul, interrogeant cent
personnes, sans rien trouver. A neuf heures dusoir,
un délégué du commissaire se présenta chez moi. Il
m'annonça qu'un inspecteur de la sûreté «marche-
rait » le lendemain matin sur l'affaire. Je l'accom-
pagnai chez la tripière où ma petite Angèle était
allée faire une commission et au poste de l'impasse
Tourlaque, où il me fut répondu qu'aucune nou-
velle n'était parvenue de la préfecture.
Rentré chez-moi, ne pouvant plus rien faire, après
cette journée de recherches personnelles et do dé-
marches j'écrivis dans la nuit diverses lettres par-
mi lesquelles une adressée à M. Camus, directeur
de l'école communale que fréquente mon fils Thé-
odore. Dans cette lettre je priai M. Camus d'inter-
roger les élèves de son école et, s'il le jugeait pos-
sible, de prier ses collègues, les directeurs des écoles
avoisinltutes, d'en faire autant. Je ne dormis pas.
Lundi matin M. Chèzo alla trouver un de ses
amis, M. Pilar,professeur de violon.
Celui-ci se rendit à l'hôpital Bichat, et ex-
plora le quartier, interrogeant les cantonniers,
les commerçants, tous ceux qui pouvaient
avoir vu la fillolta au moment de l'enlève-
ment.
La Sûreté « marche »
Ccmme M. Pihr venait rendre compte aux
parents éplorés de ses démarches infructueuses,
un agent de police vint se mettre à la dispo-
sition de la famille,
La Sûreté marchait.
Avoc le père, l'agent reprit l'enquête chez la
tripière, et do là tous deux allèrent dans la di-
rection des fortifications.
A la porte do la rue du Poteau, l'inspecteur
interrogea des douaniers qui ne purent répon-
dre; ils n'étaient pas de service la veille.
Ils suivirent alors les fortifications; l'agent,
hors Paris, le père, dans Paris. Pas de trace
nulle part, et pas de renseignements au com-
missariat.
On a vu l'assassin.
M. Pilar n'était pas, de son côte, resté inac-
tif et il avait fini par découvrir, sinon la piste,
du moins un signalement assez complet du ra-
visseur.
Ce signalement avait été fourni par deux
enfants fréquentant l'école de la rue Lepic.
Ceux-ci avaient vu dimanche, vers 8 heures
et quart, l'enfant arrêtée devant l'étalage d'un
épicier. Un individu d'environ 40 ans, d'alluros
suspectes, était près d'elle, et l'enfant le suivit
un instant,puis, quelques pas plus loin, dans
la rue plus déserte, l'inconnu la saisit brutale-
ment et l'entraîna.
L'enfant criait.
Lundi soir, vaincu par la fatigue, M. Chèze
s'endormit et à minuit on vint le réveiller. Sa
fille était retrouvée, mais hélas 1 morte, assas-
sinée.
Le père et l'enfant
Nous avons dit hiercomment le père avait re-
connu le cadavre de sa fille, et comment il
avait retrouvé la petite Angèle, que 36 heures
heures auparavant, il avait vue sortir de CpeZ
lui fiante et iw«ui0^' -. i
Lorsque le jeune Pelletier découvrit le pa-
quet qui contenait le corps de la malheureuse
victime, la petite Angèlo venait d'être assajs&L-.
née, elle râlait encoio faiblement, mais maigre
les soins qui lui furent prodigués, elle ne tarda
pas à expirer.
Nul n'avait vu l'assassin apporter son funèbre
colis, la rue à cette heure est déserte, et le mi-
sérable savait qu'il pouvait déposer là son far-
deau sans éveiller l'attention de personne.
Le lieu est sauvage, la rue des Saules rampe
sur les flancs de la Butte; au bas elle se ter-
mine par uu escalior, en haut elle est bordée
par larue Sainl-Vinceul étroite et lugubre.
Dès qu'il se trouva on face du cadavre de sa
fille, M. Chèze tomba à genoux et éclata en
sanglots.
Mme Chèze, déjà malade, a dû s'aliter quand
elle a appris la fatale nouvelle.
Le docteur qui la soigne a de grandes crain-
tes à son sujet, d'autant plus qu'elle était souf-
frante depuis longtemps déjà. Mais depuis la
disparition de sa fille, son état est devenu ef-
frayant.
Lorsque le cadavre de la petite Angèle a été
déposé au poste du passage Tourlaquo, il y
avait exactement un an que le dernier enfant
de M. Chèze était né.
Douloureux anniversaire !
L'ENOUÈTE
M. Cocheferta poursuivi son enquête jusqu'à
5 heures du malin.
Il a recueilli beaucoup d'indications; mais,
outre qu'elles sont souvent contradictoires,
elles manquent pour la plupart de préci-
sion. Des enfants ont bien vu un homme
cheminer avec la pauvre enfant ; mais ils ne
donnent de cet individu qu'un signalement
iusuffisant. Bref, les renseignements qui pour-
raient mettre sur la traco ao l'auteur de ce
crime atroce font jusqu'à présent complèîe-
ment défaut. On redouble donc d'activité en
vue de recueillir quelque iudicalion impor-
tante.
Une fausse piste
Un instant on avait cru être sur une pis'.e
sérieuse. Une marchande d'objets religieux
était venue déclarer à M. Dupuis. commis-
saire de police, qu'elle avait vu dimanche,
dans le voisinage du Sacré-Coour, un groupe
de loqueteux au milieu desquels elle avait re-
marqué un homme âgé assez bien vêtu, qui
tenait par la main une fillette de l'âge d'Adèle
Chèze.
Mais, confrontée avec le cadavre de la pe-
tite victime, cette marchande ne l'a pas recon-
nue pour la fillette qu'elle avait vue en com-
pagnie de cet homme âgé.
L'autopsie
Le corps d'Angèle Chèze a été transporté à
la Morgue hier matin, à 11 heures, et le D*
Socquet a commencé l'autopsie dans l'après-
midi. ,
Le médecin légiste a constaté que l'estomac
de l'enfant était entièrement vide, ce qui indi-
que que la petite victime a été tuée au moins
trois ou quatre heures après avoir mangé.
En dehors des marques de strangulation et
des traces laissées par la corde sur les poi-
gnets et les jambes, le corps ne portait aucune
trace de violences, le linge n'était pas souillé.
Une nouvelle piste
Dans la journée, M. Carpin a reçu la décla-
ration de Mme Zanerotti, marchande de pom-
mes de torre frites, demeurant 39, rue des
Saules. En sortant du débit de vins situé à
l'angle de cette rue et de la rue Darwin, vers
9 heures et demie, la brave femme avait avisé
un homme chargé d'un volumineux paquet
qu'il déposa sur le trottoir devant le n, 31.
Comme l'homme avait mauvaise mine, Mme
Zanerotli, prise de frayeur, s'empressa de ren-
trer chez elle.
Cet homme, qu'on croit être l'assassin, est
activement recherché. On suppose qu'il habite
rue de la Barre. Toujours est-il qu'il y a un
mois environ il a été remarqué sur la Butte,
cherchant à entraîner une fillette.
Des photographies d'une maison en cons-
truction, au n* 6 de la rue Darwin, ont été pri-
ses par le photographe de la préfecture de
police, On suppose que c'est dans les caves da
cet immeuble que le triste personnage aurait
commis son épouvantable crime.
Le signalement de cet individu correspond
exrctemont à celui fourni par les personnes
qui ont vu la fillette et son ravisseur.
Depuis le soir du crime il n'a pas reparu à
son domicile et les renseignements recueillis
sur son compte sont déplorables au point do vue
des mœurs.
On suppose qu'il a dû se rendre chez des
parents qui habitent dans le département de
Seine-et-Oise.
L'ACCIDENT DE M, WALDECK-ROUSSEAU
Etat satisfaisant des blessés. — Le
bulletin de santé.
L'état de santé de M. Waldeck-Rousseau est
tout à fait satisfaisant. Le président du con-
seil a passé une bonne nuit. Les médecins qui
le soignent sont complètement rassurés.
Hier matin, les docteurs Poirier et Babinsky
ont de nouveau rendu visile au président du
conseil et ont examiné l'épaule dont le malade
ne souffrait presque plus. A l'issue de cette
consultation, M. le professeur Poirier, inter-
rogé par tes collaborateurs do M. Waldeck-
Rousseau,a répondu: « Le président est bien.
Je suis très content. »
Voici le bulletin qui a été ensuite rédigé à
midi et demi :
Nuit bonne. Dépression moins grande. Douleurs
moins vives dans l'épaule, dont on pourra corn.
mencer le massage demain. Repos absolu.
POIRIER, BABINSKY.
L'épreuve radiographique
L'épreuve radiographique faite il y a deux
jours a permis aux médecins de constater qu'il
n'y avait pas, à l'épaule. de luxation et que
des massages suffiraient à produire un complet
rétablissement d'ici dix à douze jours. Les
plaies relevées sur diverses parties du corps
étaient peu profondes et sont d'jà formées.
Le président du conseil pourra certainement
reprendre la direction de son ministère dans
quarante huit-heures, sans toutefois quitter la
chambre.
M. René Waldeck-Rousseau, auquel lé doc-
teur Poirier a prescrit également le repos le
plus absolu, ne reprendra pas ses fonctions
avant la fin de la semaine. Un épapchement
sanguin s'est produit à la jambe, qui retarde la
guérison du chef de cabinet de M. Waldeck.
Rousseau.
Hier soir encore sont arrivés des télégram-
mes demandant des nouvelles du président de
conseil, et plusieurs membres du corps diplo
malique sont venus s'enquérir de sont état.
LA BKÏliÈKE
Voici toutes les indications concernant l'or,
ganisation du cortège organisé, pour demain,
par le comité de la Mi-Carême (Rive gau,
che).
Composition du cortège
Gardes de Paris à cheval. — Sa peurs Monjarret.
— Huit trompettes à cheval. - Marché des CarmeS'
six landaus. — Lavoir Sainte-Loniso, un cfutr. -
Cycle amical de la Sorbocno, scanius. — Char dtf
Jardin des Plantes, six animaux et un dompiuuft
— Cbar do la musique, faalare dqk QohoUifr qI
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