Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1913-08-22
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 août 1913 22 août 1913
Description : 1913/08/22 (N15895). 1913/08/22 (N15895).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/01/2013
N- 15,895. — 1" FRUCTIDOR, AN 121.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
VENDREDI 22 AOUT 1913. — N. 15,Sas.
Fondateur t
[AUGUSTE VACQUERIE
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Do mois Trois mois III mois 01V
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TRIBUNE LIBRE
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Un cas d'illogisme fiscal
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Pour solidement établir
l'équilibre branlant du bud-
get 1913 et préparer — ce
qui était presque de la pré-
somption — l'équilibre pro-
blématique du budget 1914,
le- ministre des Finances proposa à la
Chambre, on s'en souvient, tout un cha-
pelet de taxes et accroissements de
taxes qui n'eurent pas l'heur de plaire
à la Commission du budget, pas plus
d'ailleurs qu'elles ne plurent aux con-
tribuables fortement menacés dans leur
bourse.
De ces taxes ou accroissements de
taxes nous voulons retenir, pour l'ins-
tant, et à seule fin d'en montrer la fâ-
icheuse répercussion, celles seulement
qui visent directement les valeurs mo-
bilières de tous ordres, les successions
et les mutations à titre onéreux.
En ce qui concerne ces dernières, il
est admis et reconnu de tous qu'elles
écrasent déjà la terre par leur exorbi-
tance et sont la principale cause de sa
dépréciation. Répondre à la plainte do-
lente de nos paysans et à ses patientes
revendications par une aggravation au
droit exécré de mutation serait le pire
des contresens fiscaux.
S'il'se montre sans entrailles pour les
valeurs immobilières, M. Dumont mon-
tre moins de ménagements encore pour
la fortune mobilière ; il porte de 4 à 5
pour cent le taux de l'impôt qui frappe
le revenu des actions et obligations, et
'de 8 à 10 pour cent celui de l'impôt sur
les lots et primes de remboursement.
Par un autre côté, il relève de 0,25 à
0,30 centimes pour cent le droit de trans-
mission sur les titres au porteur. Enfin,
pour des raisons d'équivalence ou de sy-
métrie faciles à saisir, il rehausse, de 2
à 3 pour cent, le droit de timbre perçu
sur les valeurs étrangères à leur entrée
en France.
En somme, les droits variés qui frap-
pent actuellement les valeurs françaises
et étrangères de toute' nature subissent,
dans leur ensemble, une majoration; in
globo, variant de 20 à 50 pour cent.
Pour montrer ce qu'il y a d'excessif et
d'inopportun dans cette surtaxation, il
me suffit de noter que les taxes corres-
pondant à celles que nous percevons
dans notre pays sont : en Angleterre, de
1 pour cent sur les titres au porteur, et
ae 112 pour cent sur les titres nominatifs;
ien Hollande, de 0,40 centimes pour cent
sur les valeurs de tous ordres, sauf sur
les valeurs à lots qui payeni 1 pour
cent ; en Allemagne, de 1 pour cent sur
les fonds d'Etat, fonds de provinces et
de villes et sur les obligations des che-
mins de fer étrangers, de 2 pour cert
sur les obligations industrielles et de 3
pour cent sur les actions de société.
Faut-il rappeler qu'en Belgique des
taxes de faveur accueillent les valeurs
ae toutes sortes venant de l'étranger ;
qu'en Suisse on est plus accueillant en-
core et qu'aucun impôt n'atteint les va-
leurs de tous ordres qui viennent s'y
hospitaliser ?
Les propositions du ministre des Fi-
nances relèvent respectivement de 20
pour cent, 25 pour cent et 50 pour cent
les droits de transmission, l'impôt sur
le revenu et le droit de timbre qui frap-
pent actuellement les valeurs de tous or-
dres. L'accroissement est d'importan-
ce ; il indisposera nécessairement les
porteurs'de ces valeurs tt les aiguillera
plus encore que par le passé, vers celles
d'entre elles qui peuvent, par leur na-
ture, le mieux échapper à l'étreinte du
ïisc : les valeurs étrangères. Sang dou-
te celles-ci .sont traitées aussi durement
par le nouveau projet que le sont
les valeurs nationales ; mais elles ont
isur ces dernières l'avantage de pouvoir
chapper aux droits qui les frappent.
Le marché de ces valeurs sera sim-
plement déplacé. Les détenteurs de ca-
pitaux disponibles se pourvoiront de ti-
tres étrangers au dehors de nos frontiè-
res, ert notre fisc se trouvera, de ce fait,
impuissant à prélever sur eux la moin-
dre taxe. Les détenteurs de valeurs
françaises seront incités eux--mêmes à
dégonfler leur portefeuille de ces valeurs
et à le bourrer de titres étrangers. Une
.'entente entre toutes les nations pourrait
seule enrayer cette tendance ; mais il en
est parmi elles, telles la Belgique et la
Suisse, qui se refusent à toute conversa-
tion sur ce point. En sorte que l'accrois-
lesient des droits sur les valeurs mobi-
lières ne peut donner que des mécomp-
tes.
Et ce n'est là qu'un des inconvénients
du projet proposé par le ministre des
Finances. Parallèlement à la surtaxa-
tion des valeurs mobilières de tous or-
dres, M. Dumont entend demander à un
impôt général sur le revenu les som-
mes supplémentaires indispensables à
l'équilibre du budget de 1914. Certes,
ses intentions sont -- excellentes, et son
souci d'équilibre budgétaire est loua-
ble ; il n'oublie qu'une chose, c'est que
l'impôt général sur le revenu qu'il pro
pose atteindra derechef les valeurs mo-
bilières et en accentuera l'évasion. On
dit vulgairement qu'on ne saurait tirer
deux moutures du même sac; c'est pour-
tant l'opération que prétend mener à
bien - l'administration des finances ; elle
oublie, en l'espèce, qu'à vouloir trop
souvent frapper à la même porte on ris-
que de la fermer. C'est par ce côté sur-
tout que péche le projet dont est saisie
la Commission du budget. Il est illogi-
que et aléatoire dans ses conséquences ;
il aurait, en outre, pour résultat, de fJr-
tement diminuer l'annuité successorale
mobilière et les ressources qu'en tire le
Trésor. C'est un danger qu'il faut, à
tout prix, éviter ; nous avons pleine
confiance sur ce point dans la clair-
voyance mise en éveil du ministre des
Finances. Il s'est trop longtemps nourri
de pure logique pour persister dans l'il-
logisme fiscal.
A-E. GAUTHIER,
rsénateur. ancien ministre.
0-e
Les On=Dit
'-—
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui jeudi j -
Lever du soleil, 4 h. 52 du matin.
Coucher du soleil, 6 h. 55 du soir.;
Lever de la lune, 8 h. 23 du soir.
Coucher de la lune, 9 h. 32 du matin..
Courses à Deauville (trot), Pieppe et
Saint-Malo..
AUTREFOIS
Le Rappel du 22 août 1877 3
On télégraphie de Raguse qu'après un
bombardement énergique, les Monténégrins
ont pris d'assaut la colline, les tranchées et
le fort de Cadjaliza.
— L'administration municipale va faire
construire et établir douze chalets d'un mo-
dèle uniforme, destinés à remplacer, dans
les marchés découverts de Paris, les bureaux
actuels des receveûrs et des surveillants,
Les histoires de l'abbi
L'abbé Raynal -avait la manie de racon-
ter des histoires ; il savait par cœur tous
les « anas » et îles, débitait à tout pro-
pas.
Un jour qu'il s'était emparé de la con-
versation et qu'il faisait ses contes à l'or-
dinaire, Mme du Dèffand, qui était aveu-
gle, l'interrompit en lui disant :
— Bon Dieu, l'abbé, fermez ce livre, on
m',a déjà lu cela cent foie.
Maître et laquais
Le marquis de Venfignac sortait un jour.
de chez le roi ; il ne trouvait pas ses
gens ; il va à la porte du Louvre et crie
de toute la force :
— Laquais, laquais de Ventignac 1
Personne ne lui répondit ; il crie encore
plus fort :
— Laquais de Ventignae, laquais du dia-
ble !
— Plait-il, monsieur, répondirent les La-
quais.
— Pets te des coquins, s'écria le marquis,
à ce mot ils ont reconnu leur maître.
AUJOURD'HUI
Le « train blanc a
La gare d'Austerlitz a présenté, hier, une
vive animation, à l'occasipn du quarante et
unième « pàlerinage national » de Lour-
des.
Le train cc blanc » est parti le premier.
On estime qu'il convoie deux cent soixante
malades ou écllopés. Les autres, qui sui-
vront, représentent un total de 15.000 pèle-
rins pour toute la Fraince.
S'imagine-t-on la quantité de crasse et de
microbes que ces pauvres gens vont dépo-
ser dans la piscine.
Train blanc, eau noire.
*
La paille et la poutre
A la réunion tenue vendredi par la Fé-
dération des cafetiers berlinois, on a sur
tout discuté la question de la bière de
Pilsen. Le président a protesté énergique-
ment contre l'absorption, par des gosiers al-
lemands, d'une bière fabriquée en Bohê-
me, par des Tçhèques ennemi 4© l'Alle-
inagnq, ,..
LE FAIT DU - JOUR
GARE D'AUSTERLITZ : LES PÈLERINS PARTENT POUR LOURDES
e. Mon fils, il est quelque chose de plus grand que la grandeur de Dieu. C'est la bêj
tise humaine ». (- jules Noriac -
r: ,K_ tise humaine ». (Jules Noriac ha, Bêtise humaine y chap. dernier) «
c( Il y a, dit-il, de tout aussi bonnes biè-
res en Allemagne et les médecins devraient
détruire la légende d'après laquelle la biè-
re de Pilsen serait meilleure pour la san-
té ; quant aux débitants, ils devraient se
refuser à verser de cette bière ».
Il'est piquant de constater que, de tous
côtés, ces mêmes Allemands protestent en
ce moment contre le prétendu boycottage
des produits allemands en France..
Une école de carillonneurs
Il paraît qu'on créera bientôt en Belgique
une école où les musiciens amoureux du
son des cloches pourront apprendre l'art
de faire chanter les carillons.
On assure que la création de cette école
est décidée en principe. Une commission
administrative sera constituée dans quel-
ques mois. L'école serait établie à Malines,
que l'on peut considérer dès à présent déjà
comme le conservatoire de l'art du caril-
lonneur.
On espère que les cours, qui porteront
surtout sur la technique et l'harmonie, se-
raient fréquentés par un certain nombre,
d'élèves néerlandais. Les Pays-Bas suivent,
en effet, pas à pas la Belgique dans le
mouvement pour la rénovation de l'art du
carillon.
LA CONTRAINTE PAR CORPS
0 .+-
Notre confrère, M. Baugeron, rédacteur
en chef de la Bataille de Bordeaux, dont
nous avons relaté l'arrestation illégale, n'a
heureusement plus été inquiété par l'étran-
ge commissaire de police qui le fit arrêter
à huit heures et demie du soir.
D'autre part, les frais, que M. Baugeron
avait été condamné à payer étant acquittés,
il n'est plus menacé de la contrainte par
corps. Mais cette odieuse mesure n'en sub-
siste pas moins, et, demain peut-être,, at-
teindra quelque autre journaliste.
Pourtant, rappelons-le encore une fois,
puisque le Garde des Sceaux l'a décidément
oublié, M. Razimbaud, le distingué et sym-
pathique député de l'Hérault, était interve-
nu, à la demande de notre directeur, auprès
de M. Barthou, pour que l'application de la
contrainte par corps. fût au moins suspen-
due.
Voici le texte même de sa lettre que nous
avons publiée déjà :
* Monsieur le président du Conseil,
Il m'est signalé que certains journalistes con-
damnés sont sur le point de subir la contrainte
par corps, au moment même où. comme rappor-
teur de la Commission des réformes judiciaires,
je vais être en état de déposer le rapport ten-
dant à l'abolition de cette peine, vestige des ins-
titutions barbares.
Les journalistes qui sont actuellement mena-
cés de la contrainte par corps sont dignes du
plus grand intérêt.
Aussi, ai-je l'honneur de faire appel, d'une fa-
çon toute spéciale, à vos sentiments de bien-
veillanoe et d'humanité en faveur de ces person-
nes et je vous prie de vouloir 'bien faire exami-
ner à nouveau leur dossier en vue de leur ac-
corder un légitime sursis. ,.
Veuillez 'agréer, etc.
On conçoit que M. Barthou n'ait fait au-
cune promesse officielle à M. Razimbaud,
mais nous croyons savoir qu'il lui donna
l'assurance que la contrainte par corps ne
serait plus appliquée. Or, il dépend bien du
Gouvernement qu'elle me le soit pas. La
parole est donc à M. Barthou.
Pour le salut commun
Ainsi que nos lecteurs l'ont vu hier, M.
Emile Combes, à la séance du conseil gé-
néral de la Charente-Inférieure, a éloquem-
ment et énergiquement protesté contre les
décisions qui ont pour effet de laisser les
côtes charentaisooJ. désarmées, à là merci
de l'Etranger.
« Je ne puis quant à moi accepter, a dit
l'ancien président du Gom&eil,le sacrifice du
port de Rochefort quelles que, soient les
compensations accordées.
« On abuse d'une situation politique ex-
térieure qui peut changer. Il est permis
d entrevoir une éventualité qui rende né-
cessaire l'action de l'armée navale; dans
1 Atlantique.
« Personne plus que moi n'est partisan
d'une entente amicaf© avec l'Angleterre,
mais cette situation n'obligeait pas le gou-
vernement à transformer Rochefort en un
simple port de construction.
« Si un. port est bien placé pour infliger
à l'ennemi des désastres commerciaux,
pour faire la guerre de course, recevoir nos
navires obligés de se ravitailler, c'est as-
surément le port de Rochefort.
« Je persiste à penser qu'il doit rester
un port de guerre.
« Je proteste contre le refus de l'admi-
nistration de la marine de fortifier nos
passes, la rade d'Enet et d'approfondir la
Charente. ElLe a ainsi manqué de pré-
voyanoe. » ,
Ce langage, dans la bouche de l'homme
d'Etat, respecté de tous, ne peut manquer
de retenir l'attention du gouvernement.
Ce .n'est pas au nom d'intérêts particu-
liers que M. Emile Combes adjure celui-ci
de aéparer les fautes commises, c'est au
nom de l'intérêt national, au nom de la
Patrie toute entière menacée dans sa sé-
curité.
Certes, elle est légitime et noble la pro-
testation des populations oharentaises' con-
tre la mesure dont elles' sont les premières
victimes. Mais, alors qu'il en est temps,
que les pouvoirs publics ne s"y trompent
pas : en se dressant contre les funestes
mesures dont elles sont les premières vic-
times, les populations charentaises se dres-
sent aussi loyales et fières pour le salut
commun.
Lee coQséqueQcee du liépipat
1 i. ,
Ainsi que l'opinion tout entière l'espérait,
M. Lescouvé, procureur de la République,
a décidé d'ouvrir une information en faux
témoignage oontre les quatre agents des
plus compromis dans le scandale du 51 ar-
rondissement.
D'ores et déjà, un juge d'instruction est
commis, M. Bouchardon ; d'ores et déjà,
quatre criminels sur sept auront à répon-
dre de leurs crimes devant la juridiction
de droit commun.
Mais les autres ?
De nouveau, voici qu'il est question de
« mesures disciplinaires », de « sanctions
purement administratives », le délit de
faux témoignage ne pouvant juridiquement
être établi que si la déposition suspecte a
été produite, non par écrit, mais orale-
ment, à la barre d'un tribunal.
Soit, mais le délit de faux témoignage
n'est malheureusement pas le seul dont se
soit rendue coupable la bande des policiers-
ajpaehes. -
Nous sommes en mesure d'affirmer que
le dossier de l'enquête contient d'innom-
brables plaintes, dont le contrôle général
de la préfecture de police a vérifié les as-
sertions et qui tendent à établir que les
trois malandrins provisoirement hors de
cause pratiquaient journellement le ran-
çonnement des filles soumises, « le vol à
Ia dénonciation », et le chantage.
Nous sommes en mesure d'affirmer en-
core que les nobles et courageux agents
en uniforme qui ont dénoncé leurs désho-
norants collègues ont fourni à l'appui de
leurs accusations toutes les précisions dé-
sirables.
Il serait révoltant et intolérable que fût
innocenté l'un quelconque des répugnants
personnages qui avaient mis en coupe ré-1
Ftée le 58 arrondissement. -
Le personnel sain et probe de la police
est unanime à réclamer un débat judiciai-
re public et contradictoire et, dès le début
de cette triste affaire, M. Hennion a mon-
tré qu'il le souhaitait aussi.
Nous ne voulons donc pas croire qu'un
seul coupable puisse échapper au châti-
ment mérité. C'en est bien fait de ce régi-
me honteux, dû à M. Lépine, et sous le-
quel le mot d'ordre était de tout cacher,
toujours.
On se rappelle que sous le Lépinat, cent
scandales furent étouffés, dont chacun eût
dû entraîner plusieurs révocations.
Peu importait à M. Lépine l'honnêteté,
pourvu que l'on fût dans sa main un ins-
trument docile. C'est ainsi qu'il imposa à
l'Amicaie de la préfecture un caissier vo-
leur. C'est ainsi qu'il fit son homme de
confiance d'un contrôleur général prévari-
cateur. C'est ainsi encore que son état-ma-
jor, commanditant des maisons de coulis-
ses, trafiquait erf Bourse, comme nous le
disions avant-hier, de ses renseignements
confidentiels.
Par' bonheur, ces temps sont passés. Ml
Hennion, sans forfanterie comme sans fai-
blesse, se montre résolu à traquer impi-
toyablement tous les fonctionnaires indi-
gnes.
Il ferait beau voir que la chancellerie re-
fusât de s'associer à son œuvre salutaire
d'épuration.
LIRE EN 2' PAGE :
Le Scandale policier
NOS CHRONIQUEURS
_.= y
La Ville et les Champs
9
1
J +
C'est d'une vieille gentilhommière
d'un minuscule village ge TAvallonnais
que j'écris ces lignes.
Un paysan s'est fait, à peu de frais, le
successeur des hobereaux dans, le ma-
noir aux quatre tours d'angle où le sei-
gneur de ces lieux résidait, sur le pied
de trois à quatre mille livres de revenu.
Cela ne comportait pas un grand train
de vie, mais c'était assez, au temps de
la vieille France, pour se suffire et mê-
me faire figure. Noblesse de petit équi-
page qui n'alla jamais à Versailles et ne
s'en trouva pas plus mal. On ne dit pas
que ce château ait, à une époque quel-
conque, abrité la misère humiliée d'un
capitaine Fracasse.
Si les châ.t.elain furent Ues. sages, et
si de grands revers ne les atteignirent
pas, qu'ils durent être heureux 1 Les
quatre tours de leur solide demeure
seigneuriale commandaient un site ra-
vissant. J'ai sous les yeux, dans le corps
de logis qui regarde le sud-est, la plus
belle vue panoramique : des prés et des
champs, parsemés de boqueteaux ; l'ar-
doise et la tuile d'habitations éparses
dans la vaste étendue verte et blonde,
rayée de haies noires, coupée de routes
qu'indiquent des peupliers et fermée, à
l'horizon, d'une ligne bleuissante de
l'horizon, d'une 1-i f~a l jolie petite ville
collines. Au loin, Ta jolie petite ville
d'Avallon s'aperçoit, où, la nuit venue,
s'allument de rares feux clignotants qui
percent les ténèbres de la campagne
dormante,
Vous vous doutez que ce beau pays
est, comme tant d'autres, abandonné de
ses enfants ingrats qui vont, filles et
garçons, chercher à Paris le bonheur de
Vivre qu'ils trouvent ici en naissant et
n'apprécient point. Impérissable vérité
du vers de Virgile : Trop heureux les
laboureurs, si leur bonheur leur était
connu !
La dépopulation est, à coup sûr, un
fléau, rançon redoutable d'un dévelop-
pement de civilisation matérielle au
cours duquel ont fléchi, peu à peu, lés
ressorts moraux nécessaires. Ce n'est
peut-être pas un mal pire que la déser-
tion des campagnes.
L'un, aussi bient est lié à l'autre. Par-
mi les causes complexes de la natalité
décroissante dont la France souffre, on
ne fait pas la part assez grande au goût
de la dépense ostentatoire, au besoin de
paraître. C'est un travers urbain, et le
paysan le reçoit de la ville où il va cher-
cher des conditions d'existence qu'il
suppose meilleures. Cette manie, que
gouverne lajoi de l'imitation, guide jus-
qu'au choix des plaisirs. L'assommoir,
la fille, le beuglant, le cinéma man-
quaient-ils tellement, avant qu'il les
connût, au campagnard arrivé de son
village, et sitôt qu'il en eût goûté, fallut-
il à toute force qu'il retournât à leurs
délices ? (Tn lui a répété que le paradis
des sens est dans les grandes villes. Il
en tâte et ne trouve pas que ce soit ce
qu'on a dit. Mais il ne voudra pas avoir
l'air moins qu'un autre capable des
joies qu'il a enviées. Il fera voir, au con-
traire, qu'il n'est pas un rustre et qu'il
sait s'amuser. S'il s'écoutait, qu'il pren-
drait vite le train pour ,rcg.agner son
village 1 En attendant, il dépense en de
stupides plaisirs à peu près tout son
gain. Quand il convolera, comptez que
son souci ne sera point d'élever ses en-
fants, mais de n'en pas avoir, ou d'en
avoir aussi peu qu'il se pourra : Il fau-
drait liarder, et la vie ne serait pas
gaie ! De quoi la femme tombera aisé-
ment d'accord, d'autant que ses raisons
personnelles s'ajouteront, en les corro-
borant, à celles du mari. Hélas ! si ces
pauvres gens n'avaient jamais quitté les
champs, ils auraient fait souche, comme
c'était jadis .la coutume, sans regarder
aux bouches à nourrir, parce que telles
étaient les mœurs rustiques. A présent,
le mal qui désole les villes gagne les
ruraux. C'est que trop d'entre eux y
vont prendre leçon et à leur tour font
école.
Cependant, la funeste émigration in-
térieure porte ses fruits. Les campagnes
s'appauvrissent, la main-d'œuvre man-
quant ; le village misérable né connaît
plus la gaîté d'autrefois. Ceux de ses
habitants qui y sont restés, faute d'oc-
casions, ou pour quelque raison, ceux
même qu'y attache un instinct atavique
plus fort que toutes les séductions, en-
vient les heureux que la chance a favo-
risés d'un métier à la ville. A Paris,
par dessus tout, ils imaginent que les
jours doivent couler dans une liesse
perpétuelle, à tout le moins au milieu
d'un bien-être qui leur est inconnu. Ils
se doutent bien qu'on n'échappe pas
plus à Paris qu'ailleurs aux rudes né-
cessités du travail. Mais quoi 1 l'argent,
même durement gagné, paie la peine en
plaisirs. Et cela est tentant.
Ceux qui reviennent, en passant, n'ont
garde de détromper ces bonnes gens.
On se moquerait d'eux, s'ils avouaient
qu'ils ont été des dupes. Ils ne l'avouent
pas. Ils se targuent d'imaginaires féli-
cités, Les réalités peu reluisantes, ils
les tarent. Recruteurs malencontreux,
quelquefois sincères, parce qu'eux-mê-
mes ils s'abusent,, ils fournissent la ville
dévoratrice de proies' nouvelles. Et ainsi
les réserves de force et de santé de la
race tarissent, en même temps que l'é-
quilibre économique de la nation est en.
péril.
Ce ne sont malheureusement pas Ses
considérations ^'intérêt nationale troli
abstraites, qui toucheront un seul des
villageois qui, Jeur service militaire ac-
compli, auront pris en dégoût leur hum-
ble et saine vie. Il faudrait que, par tous
les moyens appropriés, on les puisse
mettre en garde. Notamment, je tien-
drais pour efficaces de claires statisti-
ques dressées à leur intention et mises
sous leurs yeux, à la caserne. Elles éta-
bliraient le coût de l'existence dans les
grands centres, la mortalité, l'offre et la
demande pour les diverses professions.
Des exemples concrets, bien choisis,
viendraient à l'appui. On apprendrait
aux petits soldats arrachés à la charrue
ce qu'ils ignorent, les risques nombreux
de toute espèce, les 'déceptions et les
déboires -promis à leur naïve impatience
de jouir, et peut-être leur infidélité à la
terre n'irait elle pas au delà d'un fuga-
ce désir. A quelques-uns, et qui sait ? à
beaucoup, ,l'expérience amère peut-être
serait-elle tépargnée., -
Mais, mieux encore, que cette propa-
gande préventive s'exerce dès l'enfance.
Qu'à l'école, aux œuvres postscolaires,,
que par les soins, enfin, d'organisations
officielles ou officieuses, on s'efforce de
retenir le jeune campagnard sur le sol
fécondé par les anciens, que rendraient
plus riche et de pfus de profit encore les
procédés vulgarisés de la culture ration-
nelle, joints à l'effort heureux de l'im-
mémorial amour qui marie le laboureur
à la glèbe.
Et ce ne serait point au seul bon sens
de ces garçons et de ces filles qu'il con-
viendrait de parler. Leur sensibilité
aussi pourrait et devrait être éveillée.
Qu'on ne se borne point à -leur dire
qu'ils gagneront aussi bien et mieux
leur vie aux champs qu'à la ville. Qu'on
fasse naître en eux le goût de la Nature
adorable pour laquelle, d'ordinaire, ils
n'ont pas de regard. Qu'on la leur mon-
tre non seulement vivifiante, aumônière
de santé, mais si belle ! pleine de toutes
les grâces et dispensatrice des meilleu-
res émotions. Qu'ils en sachent les ma-
gnificences et les splendeurs, et les se-
reines harmonies. Pourquoi ne le pour-
raient-ils pas ? Qu'ils se voient unis à
elle par des accords qui font participer
de sa grandeur et de sa beauté 'leur la-
beur, dans la coblesse du geste qui
l'accomplit. Qu'ils acquièrent, enfin, le
goût d'orner leur existence rustique.
Pourquoi pas ? Mais qu'ils fuient, qu'on
leur enseigne à fuir avec horreur l'imi-
tation servile, si ridicule et si déplacée,
des élégances urbaines. Qu'ils ressusci-
tent les vieux arts régionaux et les ap-
pliquent, comme firent leurs pères, à
l'habitat, au mobilier, au costume et à
la parure. Y a-t-il rien d'impossible à
ce qu'ils les fassent revivre, en les re-
nouvelant ? La nature, le caractère, la
forme et la couleur des choses qui les
environnent, abondent pour eux en uti-
les conseils.
Alors il y aura, dans les campagnes,
des paysans qui comprendront pour-
quoi des gens de la ville se plaisent tant
au village et s'en vont à regret. Alors ce
ne sera plus 'le rural qui portera envie
au citadin. Et tel est le rêve que j'ai
fait aux champs.
Eugène HOLLANDE.
Les. Préfets
et la lutte contre l'alcoolisme
INTERVFATION DE M. PAUL TRUC.
PREFET DE LÀ CREUSE
Le Rappel di 15 août a signalé l'heureuse
initiative ide M. Alfred Roth, (préfet du
Morbihan. Ce dernier a écrit à tous les
maires de son département pour leur de-
mander de l'aider à lutter contre l'alcoolis-
me en limitant le nombre des débits de
boissons.
Le préfet de la Creuse, M. Paul Truc, a
pris, lui aussi, nettement position. Pour
répondre au désir de la Ligue nationale
contre l'alcoolisme, il va saisir très .pro-
chainement les maires et les Conseils mu-
nicipaux d'un projet de réglementation et
de limitation du nombre des débits de
boissons. Il l'eût fait avant la réunion du
Conseil général, Je 18 août, si la chose eût
été possible. Mais du 11" au 18 août, le
temps matériel manquait pour consulter
tous les maires et les Conseils municipaux
et obtenir leur réponse. Cette consultation
aura lieu en avril 1914.
M. le préfet de la Creuse ne manque ja-
mais, quand s'len offre l'occasion, de com-
battre l'alcoolisme. C'est un de ses thèmes
aux -conseils de revision, dans écoles, où
il va intervenir d'accord avec l'inspection
académique.
D'autre part, il va rappeler aux agents
de la force publique qu'ils ont à appliquer
la loi sur l'ivresse publique.
Nous félicitons M. Paul Truc de la haute
conception qu'il a du rôle social du préfet.
Si tous les bons citoyens font leur devoir.
l'alcoolisme reculera pour le plus, grand
bien de la démocratie et de la République.
JULES HAYAUX.
N. B. — Nous rappelons que nous serons
reconnaissant à nos amis des départe-
ments de nous renseigner sur les efforts
faits par les préfets et les Conseils géné-
raux pour lutter contre l'alcoolisme. Ils
peuvent nous adresser leurs communica-
tions au Rappel, f iwUeyard de Stras*
bourg, paris.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
VENDREDI 22 AOUT 1913. — N. 15,Sas.
Fondateur t
[AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Do mois Trois mois III mois 01V
fParis 2 fr. 5 fr. 9 fr. 18 £ f.'
lépartements. 2 - 6 — 11— 20 —
fUnion Postale. 3 — 9 — 16 - 38 —
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AUGUSTE VACQUERIE
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E7 AUX BUREAUX DU JOURNAL
Adresser toutes les communications au Directeur
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De 9 heures du soir à 3 heures du matin : 143-93
TRIBUNE LIBRE
.r_. --.:-.
a
Un cas d'illogisme fiscal
qp -
mrnm—mmm —l
Pour solidement établir
l'équilibre branlant du bud-
get 1913 et préparer — ce
qui était presque de la pré-
somption — l'équilibre pro-
blématique du budget 1914,
le- ministre des Finances proposa à la
Chambre, on s'en souvient, tout un cha-
pelet de taxes et accroissements de
taxes qui n'eurent pas l'heur de plaire
à la Commission du budget, pas plus
d'ailleurs qu'elles ne plurent aux con-
tribuables fortement menacés dans leur
bourse.
De ces taxes ou accroissements de
taxes nous voulons retenir, pour l'ins-
tant, et à seule fin d'en montrer la fâ-
icheuse répercussion, celles seulement
qui visent directement les valeurs mo-
bilières de tous ordres, les successions
et les mutations à titre onéreux.
En ce qui concerne ces dernières, il
est admis et reconnu de tous qu'elles
écrasent déjà la terre par leur exorbi-
tance et sont la principale cause de sa
dépréciation. Répondre à la plainte do-
lente de nos paysans et à ses patientes
revendications par une aggravation au
droit exécré de mutation serait le pire
des contresens fiscaux.
S'il'se montre sans entrailles pour les
valeurs immobilières, M. Dumont mon-
tre moins de ménagements encore pour
la fortune mobilière ; il porte de 4 à 5
pour cent le taux de l'impôt qui frappe
le revenu des actions et obligations, et
'de 8 à 10 pour cent celui de l'impôt sur
les lots et primes de remboursement.
Par un autre côté, il relève de 0,25 à
0,30 centimes pour cent le droit de trans-
mission sur les titres au porteur. Enfin,
pour des raisons d'équivalence ou de sy-
métrie faciles à saisir, il rehausse, de 2
à 3 pour cent, le droit de timbre perçu
sur les valeurs étrangères à leur entrée
en France.
En somme, les droits variés qui frap-
pent actuellement les valeurs françaises
et étrangères de toute' nature subissent,
dans leur ensemble, une majoration; in
globo, variant de 20 à 50 pour cent.
Pour montrer ce qu'il y a d'excessif et
d'inopportun dans cette surtaxation, il
me suffit de noter que les taxes corres-
pondant à celles que nous percevons
dans notre pays sont : en Angleterre, de
1 pour cent sur les titres au porteur, et
ae 112 pour cent sur les titres nominatifs;
ien Hollande, de 0,40 centimes pour cent
sur les valeurs de tous ordres, sauf sur
les valeurs à lots qui payeni 1 pour
cent ; en Allemagne, de 1 pour cent sur
les fonds d'Etat, fonds de provinces et
de villes et sur les obligations des che-
mins de fer étrangers, de 2 pour cert
sur les obligations industrielles et de 3
pour cent sur les actions de société.
Faut-il rappeler qu'en Belgique des
taxes de faveur accueillent les valeurs
ae toutes sortes venant de l'étranger ;
qu'en Suisse on est plus accueillant en-
core et qu'aucun impôt n'atteint les va-
leurs de tous ordres qui viennent s'y
hospitaliser ?
Les propositions du ministre des Fi-
nances relèvent respectivement de 20
pour cent, 25 pour cent et 50 pour cent
les droits de transmission, l'impôt sur
le revenu et le droit de timbre qui frap-
pent actuellement les valeurs de tous or-
dres. L'accroissement est d'importan-
ce ; il indisposera nécessairement les
porteurs'de ces valeurs tt les aiguillera
plus encore que par le passé, vers celles
d'entre elles qui peuvent, par leur na-
ture, le mieux échapper à l'étreinte du
ïisc : les valeurs étrangères. Sang dou-
te celles-ci .sont traitées aussi durement
par le nouveau projet que le sont
les valeurs nationales ; mais elles ont
isur ces dernières l'avantage de pouvoir
chapper aux droits qui les frappent.
Le marché de ces valeurs sera sim-
plement déplacé. Les détenteurs de ca-
pitaux disponibles se pourvoiront de ti-
tres étrangers au dehors de nos frontiè-
res, ert notre fisc se trouvera, de ce fait,
impuissant à prélever sur eux la moin-
dre taxe. Les détenteurs de valeurs
françaises seront incités eux--mêmes à
dégonfler leur portefeuille de ces valeurs
et à le bourrer de titres étrangers. Une
.'entente entre toutes les nations pourrait
seule enrayer cette tendance ; mais il en
est parmi elles, telles la Belgique et la
Suisse, qui se refusent à toute conversa-
tion sur ce point. En sorte que l'accrois-
lesient des droits sur les valeurs mobi-
lières ne peut donner que des mécomp-
tes.
Et ce n'est là qu'un des inconvénients
du projet proposé par le ministre des
Finances. Parallèlement à la surtaxa-
tion des valeurs mobilières de tous or-
dres, M. Dumont entend demander à un
impôt général sur le revenu les som-
mes supplémentaires indispensables à
l'équilibre du budget de 1914. Certes,
ses intentions sont -- excellentes, et son
souci d'équilibre budgétaire est loua-
ble ; il n'oublie qu'une chose, c'est que
l'impôt général sur le revenu qu'il pro
pose atteindra derechef les valeurs mo-
bilières et en accentuera l'évasion. On
dit vulgairement qu'on ne saurait tirer
deux moutures du même sac; c'est pour-
tant l'opération que prétend mener à
bien - l'administration des finances ; elle
oublie, en l'espèce, qu'à vouloir trop
souvent frapper à la même porte on ris-
que de la fermer. C'est par ce côté sur-
tout que péche le projet dont est saisie
la Commission du budget. Il est illogi-
que et aléatoire dans ses conséquences ;
il aurait, en outre, pour résultat, de fJr-
tement diminuer l'annuité successorale
mobilière et les ressources qu'en tire le
Trésor. C'est un danger qu'il faut, à
tout prix, éviter ; nous avons pleine
confiance sur ce point dans la clair-
voyance mise en éveil du ministre des
Finances. Il s'est trop longtemps nourri
de pure logique pour persister dans l'il-
logisme fiscal.
A-E. GAUTHIER,
rsénateur. ancien ministre.
0-e
Les On=Dit
'-—
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui jeudi j -
Lever du soleil, 4 h. 52 du matin.
Coucher du soleil, 6 h. 55 du soir.;
Lever de la lune, 8 h. 23 du soir.
Coucher de la lune, 9 h. 32 du matin..
Courses à Deauville (trot), Pieppe et
Saint-Malo..
AUTREFOIS
Le Rappel du 22 août 1877 3
On télégraphie de Raguse qu'après un
bombardement énergique, les Monténégrins
ont pris d'assaut la colline, les tranchées et
le fort de Cadjaliza.
— L'administration municipale va faire
construire et établir douze chalets d'un mo-
dèle uniforme, destinés à remplacer, dans
les marchés découverts de Paris, les bureaux
actuels des receveûrs et des surveillants,
Les histoires de l'abbi
L'abbé Raynal -avait la manie de racon-
ter des histoires ; il savait par cœur tous
les « anas » et îles, débitait à tout pro-
pas.
Un jour qu'il s'était emparé de la con-
versation et qu'il faisait ses contes à l'or-
dinaire, Mme du Dèffand, qui était aveu-
gle, l'interrompit en lui disant :
— Bon Dieu, l'abbé, fermez ce livre, on
m',a déjà lu cela cent foie.
Maître et laquais
Le marquis de Venfignac sortait un jour.
de chez le roi ; il ne trouvait pas ses
gens ; il va à la porte du Louvre et crie
de toute la force :
— Laquais, laquais de Ventignac 1
Personne ne lui répondit ; il crie encore
plus fort :
— Laquais de Ventignae, laquais du dia-
ble !
— Plait-il, monsieur, répondirent les La-
quais.
— Pets te des coquins, s'écria le marquis,
à ce mot ils ont reconnu leur maître.
AUJOURD'HUI
Le « train blanc a
La gare d'Austerlitz a présenté, hier, une
vive animation, à l'occasipn du quarante et
unième « pàlerinage national » de Lour-
des.
Le train cc blanc » est parti le premier.
On estime qu'il convoie deux cent soixante
malades ou écllopés. Les autres, qui sui-
vront, représentent un total de 15.000 pèle-
rins pour toute la Fraince.
S'imagine-t-on la quantité de crasse et de
microbes que ces pauvres gens vont dépo-
ser dans la piscine.
Train blanc, eau noire.
*
La paille et la poutre
A la réunion tenue vendredi par la Fé-
dération des cafetiers berlinois, on a sur
tout discuté la question de la bière de
Pilsen. Le président a protesté énergique-
ment contre l'absorption, par des gosiers al-
lemands, d'une bière fabriquée en Bohê-
me, par des Tçhèques ennemi 4© l'Alle-
inagnq, ,..
LE FAIT DU - JOUR
GARE D'AUSTERLITZ : LES PÈLERINS PARTENT POUR LOURDES
e. Mon fils, il est quelque chose de plus grand que la grandeur de Dieu. C'est la bêj
tise humaine ». (- jules Noriac -
r: ,K_ tise humaine ». (Jules Noriac ha, Bêtise humaine y chap. dernier) «
c( Il y a, dit-il, de tout aussi bonnes biè-
res en Allemagne et les médecins devraient
détruire la légende d'après laquelle la biè-
re de Pilsen serait meilleure pour la san-
té ; quant aux débitants, ils devraient se
refuser à verser de cette bière ».
Il'est piquant de constater que, de tous
côtés, ces mêmes Allemands protestent en
ce moment contre le prétendu boycottage
des produits allemands en France..
Une école de carillonneurs
Il paraît qu'on créera bientôt en Belgique
une école où les musiciens amoureux du
son des cloches pourront apprendre l'art
de faire chanter les carillons.
On assure que la création de cette école
est décidée en principe. Une commission
administrative sera constituée dans quel-
ques mois. L'école serait établie à Malines,
que l'on peut considérer dès à présent déjà
comme le conservatoire de l'art du caril-
lonneur.
On espère que les cours, qui porteront
surtout sur la technique et l'harmonie, se-
raient fréquentés par un certain nombre,
d'élèves néerlandais. Les Pays-Bas suivent,
en effet, pas à pas la Belgique dans le
mouvement pour la rénovation de l'art du
carillon.
LA CONTRAINTE PAR CORPS
0 .+-
Notre confrère, M. Baugeron, rédacteur
en chef de la Bataille de Bordeaux, dont
nous avons relaté l'arrestation illégale, n'a
heureusement plus été inquiété par l'étran-
ge commissaire de police qui le fit arrêter
à huit heures et demie du soir.
D'autre part, les frais, que M. Baugeron
avait été condamné à payer étant acquittés,
il n'est plus menacé de la contrainte par
corps. Mais cette odieuse mesure n'en sub-
siste pas moins, et, demain peut-être,, at-
teindra quelque autre journaliste.
Pourtant, rappelons-le encore une fois,
puisque le Garde des Sceaux l'a décidément
oublié, M. Razimbaud, le distingué et sym-
pathique député de l'Hérault, était interve-
nu, à la demande de notre directeur, auprès
de M. Barthou, pour que l'application de la
contrainte par corps. fût au moins suspen-
due.
Voici le texte même de sa lettre que nous
avons publiée déjà :
* Monsieur le président du Conseil,
Il m'est signalé que certains journalistes con-
damnés sont sur le point de subir la contrainte
par corps, au moment même où. comme rappor-
teur de la Commission des réformes judiciaires,
je vais être en état de déposer le rapport ten-
dant à l'abolition de cette peine, vestige des ins-
titutions barbares.
Les journalistes qui sont actuellement mena-
cés de la contrainte par corps sont dignes du
plus grand intérêt.
Aussi, ai-je l'honneur de faire appel, d'une fa-
çon toute spéciale, à vos sentiments de bien-
veillanoe et d'humanité en faveur de ces person-
nes et je vous prie de vouloir 'bien faire exami-
ner à nouveau leur dossier en vue de leur ac-
corder un légitime sursis. ,.
Veuillez 'agréer, etc.
On conçoit que M. Barthou n'ait fait au-
cune promesse officielle à M. Razimbaud,
mais nous croyons savoir qu'il lui donna
l'assurance que la contrainte par corps ne
serait plus appliquée. Or, il dépend bien du
Gouvernement qu'elle me le soit pas. La
parole est donc à M. Barthou.
Pour le salut commun
Ainsi que nos lecteurs l'ont vu hier, M.
Emile Combes, à la séance du conseil gé-
néral de la Charente-Inférieure, a éloquem-
ment et énergiquement protesté contre les
décisions qui ont pour effet de laisser les
côtes charentaisooJ. désarmées, à là merci
de l'Etranger.
« Je ne puis quant à moi accepter, a dit
l'ancien président du Gom&eil,le sacrifice du
port de Rochefort quelles que, soient les
compensations accordées.
« On abuse d'une situation politique ex-
térieure qui peut changer. Il est permis
d entrevoir une éventualité qui rende né-
cessaire l'action de l'armée navale; dans
1 Atlantique.
« Personne plus que moi n'est partisan
d'une entente amicaf© avec l'Angleterre,
mais cette situation n'obligeait pas le gou-
vernement à transformer Rochefort en un
simple port de construction.
« Si un. port est bien placé pour infliger
à l'ennemi des désastres commerciaux,
pour faire la guerre de course, recevoir nos
navires obligés de se ravitailler, c'est as-
surément le port de Rochefort.
« Je persiste à penser qu'il doit rester
un port de guerre.
« Je proteste contre le refus de l'admi-
nistration de la marine de fortifier nos
passes, la rade d'Enet et d'approfondir la
Charente. ElLe a ainsi manqué de pré-
voyanoe. » ,
Ce langage, dans la bouche de l'homme
d'Etat, respecté de tous, ne peut manquer
de retenir l'attention du gouvernement.
Ce .n'est pas au nom d'intérêts particu-
liers que M. Emile Combes adjure celui-ci
de aéparer les fautes commises, c'est au
nom de l'intérêt national, au nom de la
Patrie toute entière menacée dans sa sé-
curité.
Certes, elle est légitime et noble la pro-
testation des populations oharentaises' con-
tre la mesure dont elles' sont les premières
victimes. Mais, alors qu'il en est temps,
que les pouvoirs publics ne s"y trompent
pas : en se dressant contre les funestes
mesures dont elles sont les premières vic-
times, les populations charentaises se dres-
sent aussi loyales et fières pour le salut
commun.
Lee coQséqueQcee du liépipat
1 i. ,
Ainsi que l'opinion tout entière l'espérait,
M. Lescouvé, procureur de la République,
a décidé d'ouvrir une information en faux
témoignage oontre les quatre agents des
plus compromis dans le scandale du 51 ar-
rondissement.
D'ores et déjà, un juge d'instruction est
commis, M. Bouchardon ; d'ores et déjà,
quatre criminels sur sept auront à répon-
dre de leurs crimes devant la juridiction
de droit commun.
Mais les autres ?
De nouveau, voici qu'il est question de
« mesures disciplinaires », de « sanctions
purement administratives », le délit de
faux témoignage ne pouvant juridiquement
être établi que si la déposition suspecte a
été produite, non par écrit, mais orale-
ment, à la barre d'un tribunal.
Soit, mais le délit de faux témoignage
n'est malheureusement pas le seul dont se
soit rendue coupable la bande des policiers-
ajpaehes. -
Nous sommes en mesure d'affirmer que
le dossier de l'enquête contient d'innom-
brables plaintes, dont le contrôle général
de la préfecture de police a vérifié les as-
sertions et qui tendent à établir que les
trois malandrins provisoirement hors de
cause pratiquaient journellement le ran-
çonnement des filles soumises, « le vol à
Ia dénonciation », et le chantage.
Nous sommes en mesure d'affirmer en-
core que les nobles et courageux agents
en uniforme qui ont dénoncé leurs désho-
norants collègues ont fourni à l'appui de
leurs accusations toutes les précisions dé-
sirables.
Il serait révoltant et intolérable que fût
innocenté l'un quelconque des répugnants
personnages qui avaient mis en coupe ré-1
Ftée le 58 arrondissement. -
Le personnel sain et probe de la police
est unanime à réclamer un débat judiciai-
re public et contradictoire et, dès le début
de cette triste affaire, M. Hennion a mon-
tré qu'il le souhaitait aussi.
Nous ne voulons donc pas croire qu'un
seul coupable puisse échapper au châti-
ment mérité. C'en est bien fait de ce régi-
me honteux, dû à M. Lépine, et sous le-
quel le mot d'ordre était de tout cacher,
toujours.
On se rappelle que sous le Lépinat, cent
scandales furent étouffés, dont chacun eût
dû entraîner plusieurs révocations.
Peu importait à M. Lépine l'honnêteté,
pourvu que l'on fût dans sa main un ins-
trument docile. C'est ainsi qu'il imposa à
l'Amicaie de la préfecture un caissier vo-
leur. C'est ainsi qu'il fit son homme de
confiance d'un contrôleur général prévari-
cateur. C'est ainsi encore que son état-ma-
jor, commanditant des maisons de coulis-
ses, trafiquait erf Bourse, comme nous le
disions avant-hier, de ses renseignements
confidentiels.
Par' bonheur, ces temps sont passés. Ml
Hennion, sans forfanterie comme sans fai-
blesse, se montre résolu à traquer impi-
toyablement tous les fonctionnaires indi-
gnes.
Il ferait beau voir que la chancellerie re-
fusât de s'associer à son œuvre salutaire
d'épuration.
LIRE EN 2' PAGE :
Le Scandale policier
NOS CHRONIQUEURS
_.= y
La Ville et les Champs
9
1
J +
C'est d'une vieille gentilhommière
d'un minuscule village ge TAvallonnais
que j'écris ces lignes.
Un paysan s'est fait, à peu de frais, le
successeur des hobereaux dans, le ma-
noir aux quatre tours d'angle où le sei-
gneur de ces lieux résidait, sur le pied
de trois à quatre mille livres de revenu.
Cela ne comportait pas un grand train
de vie, mais c'était assez, au temps de
la vieille France, pour se suffire et mê-
me faire figure. Noblesse de petit équi-
page qui n'alla jamais à Versailles et ne
s'en trouva pas plus mal. On ne dit pas
que ce château ait, à une époque quel-
conque, abrité la misère humiliée d'un
capitaine Fracasse.
Si les châ.t.elain furent Ues. sages, et
si de grands revers ne les atteignirent
pas, qu'ils durent être heureux 1 Les
quatre tours de leur solide demeure
seigneuriale commandaient un site ra-
vissant. J'ai sous les yeux, dans le corps
de logis qui regarde le sud-est, la plus
belle vue panoramique : des prés et des
champs, parsemés de boqueteaux ; l'ar-
doise et la tuile d'habitations éparses
dans la vaste étendue verte et blonde,
rayée de haies noires, coupée de routes
qu'indiquent des peupliers et fermée, à
l'horizon, d'une ligne bleuissante de
l'horizon, d'une 1-i f~a l jolie petite ville
collines. Au loin, Ta jolie petite ville
d'Avallon s'aperçoit, où, la nuit venue,
s'allument de rares feux clignotants qui
percent les ténèbres de la campagne
dormante,
Vous vous doutez que ce beau pays
est, comme tant d'autres, abandonné de
ses enfants ingrats qui vont, filles et
garçons, chercher à Paris le bonheur de
Vivre qu'ils trouvent ici en naissant et
n'apprécient point. Impérissable vérité
du vers de Virgile : Trop heureux les
laboureurs, si leur bonheur leur était
connu !
La dépopulation est, à coup sûr, un
fléau, rançon redoutable d'un dévelop-
pement de civilisation matérielle au
cours duquel ont fléchi, peu à peu, lés
ressorts moraux nécessaires. Ce n'est
peut-être pas un mal pire que la déser-
tion des campagnes.
L'un, aussi bient est lié à l'autre. Par-
mi les causes complexes de la natalité
décroissante dont la France souffre, on
ne fait pas la part assez grande au goût
de la dépense ostentatoire, au besoin de
paraître. C'est un travers urbain, et le
paysan le reçoit de la ville où il va cher-
cher des conditions d'existence qu'il
suppose meilleures. Cette manie, que
gouverne lajoi de l'imitation, guide jus-
qu'au choix des plaisirs. L'assommoir,
la fille, le beuglant, le cinéma man-
quaient-ils tellement, avant qu'il les
connût, au campagnard arrivé de son
village, et sitôt qu'il en eût goûté, fallut-
il à toute force qu'il retournât à leurs
délices ? (Tn lui a répété que le paradis
des sens est dans les grandes villes. Il
en tâte et ne trouve pas que ce soit ce
qu'on a dit. Mais il ne voudra pas avoir
l'air moins qu'un autre capable des
joies qu'il a enviées. Il fera voir, au con-
traire, qu'il n'est pas un rustre et qu'il
sait s'amuser. S'il s'écoutait, qu'il pren-
drait vite le train pour ,rcg.agner son
village 1 En attendant, il dépense en de
stupides plaisirs à peu près tout son
gain. Quand il convolera, comptez que
son souci ne sera point d'élever ses en-
fants, mais de n'en pas avoir, ou d'en
avoir aussi peu qu'il se pourra : Il fau-
drait liarder, et la vie ne serait pas
gaie ! De quoi la femme tombera aisé-
ment d'accord, d'autant que ses raisons
personnelles s'ajouteront, en les corro-
borant, à celles du mari. Hélas ! si ces
pauvres gens n'avaient jamais quitté les
champs, ils auraient fait souche, comme
c'était jadis .la coutume, sans regarder
aux bouches à nourrir, parce que telles
étaient les mœurs rustiques. A présent,
le mal qui désole les villes gagne les
ruraux. C'est que trop d'entre eux y
vont prendre leçon et à leur tour font
école.
Cependant, la funeste émigration in-
térieure porte ses fruits. Les campagnes
s'appauvrissent, la main-d'œuvre man-
quant ; le village misérable né connaît
plus la gaîté d'autrefois. Ceux de ses
habitants qui y sont restés, faute d'oc-
casions, ou pour quelque raison, ceux
même qu'y attache un instinct atavique
plus fort que toutes les séductions, en-
vient les heureux que la chance a favo-
risés d'un métier à la ville. A Paris,
par dessus tout, ils imaginent que les
jours doivent couler dans une liesse
perpétuelle, à tout le moins au milieu
d'un bien-être qui leur est inconnu. Ils
se doutent bien qu'on n'échappe pas
plus à Paris qu'ailleurs aux rudes né-
cessités du travail. Mais quoi 1 l'argent,
même durement gagné, paie la peine en
plaisirs. Et cela est tentant.
Ceux qui reviennent, en passant, n'ont
garde de détromper ces bonnes gens.
On se moquerait d'eux, s'ils avouaient
qu'ils ont été des dupes. Ils ne l'avouent
pas. Ils se targuent d'imaginaires féli-
cités, Les réalités peu reluisantes, ils
les tarent. Recruteurs malencontreux,
quelquefois sincères, parce qu'eux-mê-
mes ils s'abusent,, ils fournissent la ville
dévoratrice de proies' nouvelles. Et ainsi
les réserves de force et de santé de la
race tarissent, en même temps que l'é-
quilibre économique de la nation est en.
péril.
Ce ne sont malheureusement pas Ses
considérations ^'intérêt nationale troli
abstraites, qui toucheront un seul des
villageois qui, Jeur service militaire ac-
compli, auront pris en dégoût leur hum-
ble et saine vie. Il faudrait que, par tous
les moyens appropriés, on les puisse
mettre en garde. Notamment, je tien-
drais pour efficaces de claires statisti-
ques dressées à leur intention et mises
sous leurs yeux, à la caserne. Elles éta-
bliraient le coût de l'existence dans les
grands centres, la mortalité, l'offre et la
demande pour les diverses professions.
Des exemples concrets, bien choisis,
viendraient à l'appui. On apprendrait
aux petits soldats arrachés à la charrue
ce qu'ils ignorent, les risques nombreux
de toute espèce, les 'déceptions et les
déboires -promis à leur naïve impatience
de jouir, et peut-être leur infidélité à la
terre n'irait elle pas au delà d'un fuga-
ce désir. A quelques-uns, et qui sait ? à
beaucoup, ,l'expérience amère peut-être
serait-elle tépargnée., -
Mais, mieux encore, que cette propa-
gande préventive s'exerce dès l'enfance.
Qu'à l'école, aux œuvres postscolaires,,
que par les soins, enfin, d'organisations
officielles ou officieuses, on s'efforce de
retenir le jeune campagnard sur le sol
fécondé par les anciens, que rendraient
plus riche et de pfus de profit encore les
procédés vulgarisés de la culture ration-
nelle, joints à l'effort heureux de l'im-
mémorial amour qui marie le laboureur
à la glèbe.
Et ce ne serait point au seul bon sens
de ces garçons et de ces filles qu'il con-
viendrait de parler. Leur sensibilité
aussi pourrait et devrait être éveillée.
Qu'on ne se borne point à -leur dire
qu'ils gagneront aussi bien et mieux
leur vie aux champs qu'à la ville. Qu'on
fasse naître en eux le goût de la Nature
adorable pour laquelle, d'ordinaire, ils
n'ont pas de regard. Qu'on la leur mon-
tre non seulement vivifiante, aumônière
de santé, mais si belle ! pleine de toutes
les grâces et dispensatrice des meilleu-
res émotions. Qu'ils en sachent les ma-
gnificences et les splendeurs, et les se-
reines harmonies. Pourquoi ne le pour-
raient-ils pas ? Qu'ils se voient unis à
elle par des accords qui font participer
de sa grandeur et de sa beauté 'leur la-
beur, dans la coblesse du geste qui
l'accomplit. Qu'ils acquièrent, enfin, le
goût d'orner leur existence rustique.
Pourquoi pas ? Mais qu'ils fuient, qu'on
leur enseigne à fuir avec horreur l'imi-
tation servile, si ridicule et si déplacée,
des élégances urbaines. Qu'ils ressusci-
tent les vieux arts régionaux et les ap-
pliquent, comme firent leurs pères, à
l'habitat, au mobilier, au costume et à
la parure. Y a-t-il rien d'impossible à
ce qu'ils les fassent revivre, en les re-
nouvelant ? La nature, le caractère, la
forme et la couleur des choses qui les
environnent, abondent pour eux en uti-
les conseils.
Alors il y aura, dans les campagnes,
des paysans qui comprendront pour-
quoi des gens de la ville se plaisent tant
au village et s'en vont à regret. Alors ce
ne sera plus 'le rural qui portera envie
au citadin. Et tel est le rêve que j'ai
fait aux champs.
Eugène HOLLANDE.
Les. Préfets
et la lutte contre l'alcoolisme
INTERVFATION DE M. PAUL TRUC.
PREFET DE LÀ CREUSE
Le Rappel di 15 août a signalé l'heureuse
initiative ide M. Alfred Roth, (préfet du
Morbihan. Ce dernier a écrit à tous les
maires de son département pour leur de-
mander de l'aider à lutter contre l'alcoolis-
me en limitant le nombre des débits de
boissons.
Le préfet de la Creuse, M. Paul Truc, a
pris, lui aussi, nettement position. Pour
répondre au désir de la Ligue nationale
contre l'alcoolisme, il va saisir très .pro-
chainement les maires et les Conseils mu-
nicipaux d'un projet de réglementation et
de limitation du nombre des débits de
boissons. Il l'eût fait avant la réunion du
Conseil général, Je 18 août, si la chose eût
été possible. Mais du 11" au 18 août, le
temps matériel manquait pour consulter
tous les maires et les Conseils municipaux
et obtenir leur réponse. Cette consultation
aura lieu en avril 1914.
M. le préfet de la Creuse ne manque ja-
mais, quand s'len offre l'occasion, de com-
battre l'alcoolisme. C'est un de ses thèmes
aux -conseils de revision, dans écoles, où
il va intervenir d'accord avec l'inspection
académique.
D'autre part, il va rappeler aux agents
de la force publique qu'ils ont à appliquer
la loi sur l'ivresse publique.
Nous félicitons M. Paul Truc de la haute
conception qu'il a du rôle social du préfet.
Si tous les bons citoyens font leur devoir.
l'alcoolisme reculera pour le plus, grand
bien de la démocratie et de la République.
JULES HAYAUX.
N. B. — Nous rappelons que nous serons
reconnaissant à nos amis des départe-
ments de nous renseigner sur les efforts
faits par les préfets et les Conseils géné-
raux pour lutter contre l'alcoolisme. Ils
peuvent nous adresser leurs communica-
tions au Rappel, f iwUeyard de Stras*
bourg, paris.
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