Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1903-07-22
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 juillet 1903 22 juillet 1903
Description : 1903/07/22 (N12185). 1903/07/22 (N12185).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7547282f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
CINQ CKNTIMES le rtfumèro.' , PâWS ï DH®ARÏËNIËNT5
----- - ,-- --- -----_.
Eé Numro CINQ CENTIMES
FONDATEUR : AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Viub Trtii Bïii Six Mb Va ni
Paris. 2fr. 5fr. 9fr. ls frsl
Départements.. 2 — 6 - ti - 20-
Union Postale. 3 — 9 — 16 sS J2 —
RÈDUCTEUR EN CHEF: CHARLES BOS
ANNONCES
MU. Oh. LAGRANGE, CERF & Cie
6, Place de la Bourse, 6
et AUX BUREAUX DU JOURNAL
REDACTION: 14, rue du Mail, Paris
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à i heure du maltn
Ke 12135. — Meroredi 22 Juillet 1903
4 THERMIDOR AN III
ADMINISTRATION ; 14, rue du Mail
dresser lettres ci mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
MaLiMiÉilrile
On n'a pas oublié la mort tragique
de M. et Mme Fair, deux Américains
richissimes. Leur automobile, dans une
course vertigineuse, était allée s'abîmer
contre un arbre, sur la route de Bon-
nières, près de Pacy-sur-Eure. S'il se
fût agi de deux personnes ordinaires,
du commun, la catastrophe eût passé
inaperçue. A peine eût-elle obtenu les
honneurs du fait divers. Mais il s'agis-
sait de la famille Vanderbilt. Des mil-
liardaires. Pensez donc ! Les journaux
en parlèrent longuement, en termes
émus.
On posa même à ce moment-là, mais
sans y insister outre mesure, un
problème intéressant. M. Fair pos-
sédait un nombre incalculable de
Inilions; sa femme, au contraire, des
réssources relativement médiocres. A
laquelle des deux familles irait cette
grosse succession ? Le résultat dépen-
dait d'une question de survie.
Quel était celui des deux époux qui
avait rendu le dernier soupir après
l'autre ? Etait-ce Mme Fair qui avait
respiré, ne fût-ce que quelques minu-
tes, quelques secondes après la mort
de son mari ? C'était elle, et par suite
sa propre famille qui héritait de M. Fair.
Etait-ce au contraire M. Fair qui avait
survécu. Sa succession passait non plus
à sa femme en fait décédée avant lui,
mais à ses propres parents, les Vander-
bilt. L'eau allait à la rivière; les mil-
liards allaient aux milliards.
On signala le côté délicat de cette
question que le code civil règle au
moyen de diverses présomptions. Mais
le code civil ne s'applique, bien en-
tendu, que s'il n'existe pas d'autres
preuves. Du moment, par exemple,
où des témoins surgiraient qui ont
assisté à la scène et qui peuvent certi-
fier quel est celui des deux époux qui
a survécu, ce sont ces témoignages qui
font loi.
On avait oublié cette affaire, déjà
fort ancienne, puisqu'elle date de plu-
sieurs mois, lorsqu'il y a deux jours
la presse entière s'émeut, s'exalte et
se répand en virulentes récrimina-
tions. Que s'est-il donc passé? Deux
citoyens français viennent d'être arrê-
tés préventivement sous l'inculpation
de faux témoignage, précisément dans
la question de survie des époux Fair.
Ah ! le gouvernement et la justice en
ont entendu de dures. Mais que faites-
vous donc de la liberté individuelle ?
Eh quoi! on n'a même pas encore
recueilli contre ces deux hommes
l'ombre d'une preuve. Le juge d'ins-
truction lui-même a reconnu qu'il ne
connaissait pas un mot du dossier.
C'est abominable.
Appréhender ainsi deux citoyens,
les arracher à leurs affaires et à leur
famille, sur une simple enquête faite
par je ne sais quelle agence Tricoche et
sur la demande de la famille Vander-
bilt, un milliardaire américain! Tou-
jours le veau d'or ! Juste ciel ! où allons-
nous?
Un journal, dans un article admira-
blement écrit d'ailleurs,établissant hier
un rapprochement entre cette double
arrestation, la prise de la Bastille et la
célébration de la fête nationale, s'est
même écrié dans un élan de navrante
componction: «Les lampions du 14.
juillet ont chez nous, depuis quelque
temps,d'ironiqiies lendemains. »
Eh bien moi,ce qui m'étonne,ce n'est
pas l'arrestation préventive de MM.
Masse et Morane c'est l'étonnement des
journaux.Ah! vraiment vous pensez que
c'est là un cas isolé,dû à des manœu-
vres insolites où la politique et l'argent
ont une grande place?Vous pensez que
nos deux-compatriotes sont les victimes
de la lutte qui s'est engagée sur les ca-
davres de M. et Mme Fair entre leurs
puissants héritiers? Vous pensez que
c'est l'or des Vanderbilt, mettant en
œuvre des influences exceptionnelles!
quia abouti à cetteattefnte directe à la
liberté individuelle? :
Hélas! non. Le mal est bien plus
grave, plus général et plus profond.
Sans doute, en ces matières comme en
toutes autres, l'influence de la politi-
que et de l'argent, comme celle que
donnent toutes les forces sociales : la
renommée, le talent, de hautes fonc-
tions, est considérable. El cette influen-
ce,tout le mondelasubit plus ou moins.
Est-ce que la presse aurait tant parlé
de la catastrophe elle-même, si M. et
Mme Fair n'avaient appartenu à la fa-
mille Vanderbilt? Est-ce qu'elle parle-
rait de l'arrestation préventive de MM.
Masse et Morane si leur cas ne se rat-
tachait précisément à l'affaire de M. et
Mme Fair?
Mais la part de toutes les influences;
faite, il taut voir autrechose. Ce qui
a déterminé l'honorable juge d'instruc-
Honet lui a arraché le mandat d'arrêt,
-est-ce le mirager fatal des milliards
d'outre-Océan, ou l'influence d'un per-
sonnage officiel ? Eh ! non. Ce serait lui
faire une injure gratuite que de le
croire. Le jugeafait arrêter préventi-
vement ces deux messieurs parce que.
c'est l'habitude. Oui, l'incarcération
préventive, même sous l'inculpation
d'un simple délit, même sous des in-
culpations moins graves que celle de
faux témoignage, constituent encore,
même en l'an de grâce 1903, même
aux alentours du 14 Juillet, n'en dé-
plaise à notre éminent confrère M.
Montorgueil, un cas très fréquent.
Voilà ce qu'il faut dire. Voilà la
campagne à faire. Et si la presse, au
lieu de ne se laisser émouvoir, comme
presque toutes les puissances de ce
monde, que par les faits exceptionnels
de nature à intéresser le public, si la,
presse se conformaft à la hauje missioh
dont elle s'est elle-même investie et
qu'elle remplit si bien quand elle veut
s'en donner la peine, elle n'aurait qu'à
transformer sa campagne, d'ailleurs
excellente, en faveur de MM. Masse et
Morane , en une campagne plus
large et pour la conquête définitive de
la liberté individuelle, pour cet habeas
corpus qui existe depuis des siècles
dans l'aristocratique Angleterre et que
la France, ce pays labouré par tant
de révolutions populaires, ne possède
pas encore.
Chez nous, au point de vue de la
liberté individuelle, le juge d'instruc-
tion est tout puissant.
Pour arrêter quelqu'un il a si peu
besoin de connaître le dossier que l'ar-
restation préventive a souvent pour
but de surprendre l'inculpé et de per-
mettre ainsi au juge de se procurer
des preuves qu'il n'a pas.
Je sais bien que des gardes des
sceaux républicains ont, à maintes re-
prises, envoyé des circulaires pour
recommander en cette délicate matière
la plus grande prudence.
- Je sais bien que l'esprit d'humanité
et de justice chaque jour plus accusé
des juges d'instruction nous met à l'a-
bri des odieux abus d'autrefois. Néan-
moins la règle pour les délits graves et
chaaue fois qu'il apparaît au juge
qu'elle peut être utile à la manifesta-
tion de la vérité, c'est la détention pré-
ventive. C'est par là qu'on commence,
Au bout de quelques jours, dès qu'on
a tiré de cette brusque arrestation tout'
ce qu'elle est susceptible de donner, on
rend une ordonnance de mise en liberté
provisoire avec ou sans caution sui-
vant les cas.
C'est là, me direz-vous, une procé-
dure abominable. Oui, sans aucun
doute. Cette procédure méconnaît la
liberté individuelle de la façon la plus
outrageante. Et que de fois, ces arres-
tations préventives, même suspendues
au bout de quelques jours, entrainent
d'irréparables ruines !
Mais si vous voulez qu'il n'en soit
plus ainsi, Messieurs de la presse dont
l'influence sur l'opinion publique et
sur les pouvoirs publics est si consi-
dérable, faites une campagne en faveur
de cet habéas corpus que la monarchie
anglaise avait donné aux sujets de Sa
Majesté britannique, juste dix ans
avant la Révolution française, et que
la troisième République ne nous a pas
encore donné.
- Louis Puech.
Voir à la 3e page
les Dernières Dépêches
de la nuit
LA MORT DU PAPE
Les camelots qui criaient hier
les journaux de dernière heure,
clamaient : (( La mort du pape.
Cette fois, c'est la bonne !» Il
n'y avait, je vous l'assure, au-
cune ironie, qui eût confiné au
mauvais goût, dans cette manière d annon-
cer le décès de Léon XIII.
Nos braves camelots entendaient simple-
ment convaincre le public de cette vérité
qu'ils apportaient une nouvelle certaine,
définitive, et non l'un de ces (( tuyaux » va-
gues et sans consistance qui remplissent les
journaux depuis trois semaines.
Faisons notre mea culpa : nous avons
tous enterré le pape une fois par jour, de-,
puis le 4 juillet, date où nous apprîmes l'é-
tat très grave-du Saint-Père. :
Qu'on pardonne aux journalistes, ils sa-
vent trop bien qu'il n'y a qu'un tort profes-
sionnel qu'on ne leur pardonne jamais:
c'est d'arriver trop tard. Aussi, quelques-
uns de nos confrères ont-ils pris l'habi-
tude de partir toujours un peu trop tôt.
Toutes ces réflexions étaient en puis-
sance, dans le mot irrévérencieux des came-
lots : « Cette fois, c'est la bonne ».'
Pour les raisons que je viens de rappeler,.
il ne reste plus grand chose à dire sur la
situation que crée la mort du pape. Nous
n'avons rien de mieux à faire qu'à attendre
la décision du Conclave. Encore cette déci-
sion n'apprendra-t-elle rien de formel au
monde diplomatique: attendu qu'il est dif-
ficile de savoir si le cardinal choisi pour
remplacer Léon XIII poursuivra sous la
tiare la politique qu'il pratiquait quand il
ne portait que le chapeau rouge. On saisit,
mal le sens de la parole adressée par 'e pape
mourant au cardinal Oreglia : « Je vous:
recommande à l'Eglise ». Serait-ce une in-:
vestiture in extremis ?
Qu'en pense le cardinal Rampolla dont la
querelle avec son collègue Oreglia a dé-
frayé la chronique ? -
Quoi qu'il en soit, on fôurbit comme
le remarque un de nos confrères italiens
on fourbit, autour du lit de mort de Léon
XIII, les armes pour le conclave.
Le combat manquera de grandeur ; il
aura été précédé de trop de manoeuvres mes-
quines. Une seule attitude, celle de fa neu-
tralité absolue, peut être l'attitude de la
République française. Le pape qui va être
élu ne saurait rien nous devoir, et nous ne
devons rien lui devoir..
LA PETITE PATRIE
L'amour du clocher. — La régiona-
lisme. - La paésie provinciale. —
Le félibrige et son historio-
graphe — Sextius Michel et
la vallée du Rhône. — A
Paris et à Sceaux.
Lorsqu'à l'hiver de sa longue vie, consacrée
au travail et au dévouement le plus inlassable
à la cause du peuple, 19 vieux poète jette un
regard sur le passé qu'il a vécu, il revoit le
clocher natal, los toits de chaume du village où
il joua ses premiers jeux, les prés verdoyants
et le soleil ardent fonçant d'une teinte accusée
l'azur de la voûte céleste.
Enfermant dans une égale religiosité d'es-
prit toutes ces choses auxquelles s'ajoute le
souvenir des parents aimés qu'il laissa là-bas
pour s'en venir dans la grande capitale ap-
prendre les chemins périlleux qui mènent tour
à tour à la gloire, à la chute, il évoque, à côté
du sentiment grandiosa de son amour de la
patrie, ces mille détails dont le souvenir, affer-
mi par les ans, constitue pour lui l'image de
la petite patrie. Tous les efforts de centralisa-
tion administrative n'ont rien pu contre l'in-
tensité grandissante de cette forme d'amour
dont s'animent et se soutiennent tous ceux qui,
venus des quatre coins de France, ont résisté
victorieusement aux terribles atteintes du mal
des grandes villes.
Mais quand ces sentiments ont en outre l'a-
vantage de se fortifier de ce tonique vigoureux
qui s'appelle la poésie locale, quand à ses sou-
venirs personnels l'enfant prodigue échappé du
bercail provincial peut ajouter l'agrément d'un
art spécial à sa petite patrie, le spleen se trans-
forma en joie reconfortante. Lire dans la lan-
gue, l'idiome ou le dialecte de sa province d'o-
rigine des œuvres savoureuses, c'est en quelque
sorte respirer l'air de cette province, humer les
senteurs des bois où l'on vécut ses premiers
ans, c'est vivre deux fois son bonheur.
Décentralisation
Si le mouvement, de décentralisation a pris
en France depuis quelques années une telle
extension on peut affirmer sans crainte que
c'est à la saine influence du Midi qu'il le doit.
Aujourd'hui, nous voyons bien les jeunes
gens empressés à venir chercher la consécra-
tion de leur notoriété dans la ville qui fut de
si longue date le b?rceau des lettres, des scien-
ces et des arts ; mais une fois la plac3 con-
quise, ils n'ont plus ces dédains orgueilleux
qu'il était autrefois de bon ton d'affecter à
l'égard des poètes de la sous-préfecture dont
l'ambition ne dépassa point le mail ou le café
de la grande place, en matière de notoriété.
Les revues de province n'ont plus cette can-
deur de se borner exclusivement à insérer les
œuvres des académiciens d'Etampes, de Tou-
lon ou des muses Santones, et le régiona-
lisme, tout en s'efforçant vers une intelligente
fédération, a fait éclore de vrais artistes, et,ce
qui n'est pas moins louable, développé la ri-
chesse linguistique de plusieurs dialectes pro-
pices à l'expression de la beauté.
Que le Bourguignon,le Normand. le Proven-
çal ou le Gascon ne révèlent le mystère de leur
poésie qu'à un petit nombre d'initiés, c'est déjà
bien joli. Autant de braves gens que les vers
do Paul Harel, de Jasmin ou de Mistral ré-
veilleront de leur torpeur intellectuelle où les
oppriment les nombreuses années d'un labeur
ininterrompu. Celui qui aime à redire les chants
de son patetin n'est pas loin d'admirer les
grands poètes de sa patrie. Ainsi faisant, il
élève son esprit et l'accoutume à exiger un peu
d'idéal pour équilibrer le poids des tristesses
de la vie.
Les poètes provençaux
Que dire, dès lors, quand ces patois et ces
dialectes parviennent à exprimer le lyrisme de
nos pensées sous une forme définitive, à ré-
créer une langue sous laquelle transparaissent'
nos plus lointaines origines, nos affinités les
plus directos avec les peuples de l'antiquité
dont nos mœurs portent encore aujourd'hui la
si vivante empreinte ?
J'en veux ainsi venir aux trésors prodigués
par ce fécond Midi, co Midi provençal dont
Frédéric Mistral, Théodore Aubanel, Rouma-
nille, Paul Arène et Charles Gras furent les
troubadours modernes, et dont le plus affable
des poètes, M. Soxtius Michel s'est fait l'histo-
riographe littéraire, en perpétuant, dans un
livre mémorable, dont la seconde oartie vient
de voir le jour en librairie, les chères tradi-
tions du félibrige parisien, c'est-à-dire de cette
délégation permanente que les méridionaux se
chargent d'entretenir à Paris, pour le bon re-
nom de leur chère Provence.
Parmi les vénérables, M. Sextius Michel a
sa place marquée sur le banc d'honneur. Ses
cheveux argentés par le temps auréolent un
front lumineux qui pensa de belles choses,
conçut de nobles tâches et perpétra de jolis
poèmes, dont la célèbre Fauvette n'est pas le
moins populaire.
Sa vie partagée entre l'enseignement, l'ad-
ministration et la poésie, fut éclairée do joies
pures et assombrie de morne3 tristesses, que
seules sa belle philosophie et sa grandeur
d'àme l'aidèrent à supporter. Aux jours cruels
du deuil national qui suivit les désastres de
1870, ce méridional ardent conserva sa place
aux avant-postes, et cette place, ilToccilpe en-
core, puisque depuis trente-trois ans déjà, le
voici maire du XVe arrondissement de Paris.
Et tout cela est sa vie, à celui qui chanta Au-
rores et Couchants, sans oublier de muser au
Long du Rhône et de la Mer.
Et lui aussi, qui vit s'en aller avec tris-
tesse la plupart de ceux qu'il accueillit aima-.
blement lorsque venus de là-bas, du bord de
la mer bleue ou des moulins chers au re-
gretté Daudet, lui qui dut jeter un dernier
adieu sur les tombes do Charles Gras, d'Au-
banel, d'Arène et de tant d'autres pays, il a
voulu revivre ces chères heures de souvenirs,
en ces pages où se retrouvent décrits les céré- -'
monials naïfs, ingénus et parfois même offi-
ciels du félibrige à Paris et à Sceaux.
Le félibrige parisien
Sceaux, petit coin délicieux où s'abrite la
dépouille mortelle de l'aimable Florian, ermi-
tage préféré de maint poète et de mainte du-
chesse, et à deux pas duquel habite le vénéré
Sully-Prudhommo. C'est ton parc que choisi-
rent, secrète divination, les poètes du Midi
pour venir tenir leurs cours d'amour, prési-
dées par les plus aimables d'entre les reines,
tilles, femmes on sçeurs de poètes et d'artistes
natifs ou originaires de la suave Provence.
C'est là que dans la simplicité champêtre d'une
fête estivale, j'ai entendu, tour à tour, chaque,
année, les maîtres de la plume et de la pensée
célébrer les résultats heureux d'un effort inté-
ressant entre tous : la régénération de l'art
français par le culte restauré de l'art et de la
langue des vieilles provinces. Et ce n'est pqs-
être rétrograde que de professer un tel culte,
car il est essentiel au progrès du pays.
; Et si tour à tour des écrivains et des artistes
comme Anatole France. Benjamin Constante
Jules Claretie, André Theuriet, Deluns-Mon-
laud, Henry Fouquier l'ont célébré, Bonaparte
lui-même l'avait pressenti, lorsqu'on 1810 il
avait proscrit à tous les préfets de recueillir les
documents poétiques relatifs à la littérature
locale dont relovait leurs départements respec-
tifs. Ces documents, rassemblés, allaient être
l'objet de son attention quand, la guerre de
Russie déclarée, il fallut songer à de plus pres-
sants soucis. Ils dorment encore dans les gre-
niers de la Bibliothèque nationale sans espoir
d'être jamais réveillés de leur somnieil, à moinît
1alune âme ardente-et généreuse comme celle
de M. Sextius Michel néles exhume de la pous-
sière déjà séculaire qui les recouvre. Et cela
formerait un merveilleux complément à l'his-
toire de la Petite Patrie.
Alcanter DE BRAHM.
— ♦ : -
L'IMPASSE
Plus cela change, plus c'est la même chose.
Les tribunaux et les cours d'appel, dans les
espèces de tout genre qui leur sont soumises,
continuent à manifester leur sympathie aux
congrégations en acquittant purement et sim-
plement les prévenus que le parquet amène de-
vant eux.
Il faudrait pourtant mettre fin à cette anar-
chie judiciaire. De parti pris, les magistrats
acquittent les religieux. Et si par hasard la
première juridiction a fait preuve de loyalisme
et a appliqué les pénalités prévues par la loi
aux contrevenants, la juridiction d appel ré
forme le jugement et renvoie les appelants des
fins de la plainte.
Il y a, à cela, une cause première qui est le
cléricalisme des juges. Ces échappés des jésui-
tières ne veulent sous aucun prétexte condam-
ner leurs anciens maîtres et les éducateurs
choisis de leurs enfants.
Mais il y a une autre raison de ces arrêts
d'acquittement qui se multiplient, notamment
en ce qui concerne les prétendues sécularisa-
tions, ce sont les incertitudes mêmes du gou-
vernement.
Comment un cabinet prétendrait-il imposer
aux juges une interprétation de la loi, alors
qu'il est lui-même divisé sur cette interpréta-
tion, alors que son chef a changé plusieurs
fois d'opinion et a montré,par ses tergiversa-
tions, combien fragiles étaient ses volontés et
incertaines ses vues ?
M. Combes n'a pas songé à tout cela, lors-
qu'il eut, à propos du projet de loi sur les sé-
cularisations, de si singulières, de si contra-
dictoires attitudes. Aussi, va-t-il se trouver en
présence de difficultés très graves, et il serait
:mal venu à en accuser les congrégations et
même les juges, puisque c'est lui seul qui les a
suscitées. — Ch. Darcy.
LA ROUTINE
Des lecteurs du Rappel, connaissant l'intérêt
que je porte à toutes choses de l'armée, me
sollicitent de donner mon sentiment sur l'essai
du nouvel uniforme de l'infanterie. Je serais
assez tenté de me récuser, n'ayant pas assisté à
la dernière revue, et, par conséquent, ne pou-
vant parler de vûw dudit nouvel uniforme.
Cependant il est un certain nombre de points
sur lesquels il me paraît impossible que tout
le monde ne soit pas d'accord. La suppression
des boutons brillants est absolument indispen-
sable. Au soleil, les boutons de cuivre ont un
scintillement tout à fait propre à régler le feu
de l'artillerie. Le remplacement de l'incommode.
impratique tunique par la vareuse doit aussi
nécessairement être approuvé. Quant au cha-
peau « boër », je m'abstiendrai de l'apprécier
potit la raison dite plus haut, mais enfin tout
vaut mieux que ce képi qui ne protège ni du
soleil, ni du vent, et qu'il faut, dès qu'il fait
beau temps, compléter par un couvre nuque.
Or, on ne distribue point, en France, de
couvre-nuques réglementaires aux soldats ; ils
fourrent sous le képi et laissent flotter leurs
"mouchoirs ou blancs, ou jaunes, ou bleus, ou
rouges, ou à carreaux, que sais-je ? ce qui pro-
duit parfois un effet assez grotesque. Un cha-
peau à bords suffisamment longs ferait dispa-
raître ces inconvénients. 0
Reste la question du pantaton rouge. Ici on
se récrie : « Vous voulez supprimer tout le
passé do gloire de l'armée française !. » Ceux
qui tiennent, ou à peu près, co langage, pa-
raissent avoir oublié que le pantalon garance
ne fit son apparition chez nous qu'en 1829. Les
grognards du premier Empire, les combattants
épiques de la grande République, portaient
le pantalon bleu. Cela seul montre la valeur de
l'argument.
Mais quoi ? ceux mêmes qui trouvent tout
simple de voir les chasseurs à pied, l'infante-
rie coloniale, l'artillerie, le génie en bleu foncé
et en noir, sont plongés dans un profond dé-
sarroi à la pensée seule de ne plus voir la li-
gne, les cuirassiers et les dragons en rouge.
C'est très niais, ne trouvez-vois pas?
Je me déclare, puisqu'on me fait l'honneur
,do me demander mon avis, tout à fait opposé
au pantalon rougo. D'abord, et surtout, il at-
tire de fort loin l'attention, ce qui devrait suf-
fire à faire ordonner sa suppression. Et puis,
je le trouve laid, criard, gueulard même,
évoquant l'idée d'un déguisemeat, d'une mas-
carade. Dites - si l'uniformo des chasseurs à
piod et de l'infanterie do marine n'est pas in-
finement plus seyant, plus élégant dans sa
note sombre, dont l'austérité ne saurait dé-
plaire aux gens de goût. — Je conclus que
l'essai tenté est des plus intéressants, et que
c'est seulement au nom do la stupide et aveu-
gle routine que l'on peut songer à défendre
l'uniforme actuel. — L. Victor-Meunier.
ERRATUM. — Deux mots « sautés » dans mon ar-
tlfcle d'hier ont complètement dénaturé une phrase
et cela m'ennuie— chacun a son amour-propre -
parce que j'ai l'air ainsi d'avoir cité de travers du
concourt. Je rétablis la phraso en sÓulignantle:
mots omis : « DJjà — cela remonte pourtant assez
loin — la Renée Mauperln des Goncourt s'étonnait
que l'on pût encore rencontrer « des femmes sans
compartiments pour fumeurs». — L. Y.-Rf.
POUR L'ACTION
Le bulletin de l'Amicale de Lot-ft-Garon-nr.:
nous au porte le compte rendu de l'assemblée;
générale de cette amicale, la 21 mai dernier.:
Nous y relevons un certain nombre do propo-
sitions très intéressantes.
La première, qui a pour auteur M. Dubourg. i
est devinée à chacun des représentants du
département :
Les institutrices et les instituteurs membres de
.l'Amicale de Lot-et-Garonne, réunis on assemblée:
générale lo 21 mai, décident do retirer leur con-
'tiince aux membres du Parlement qui, lors de lai
discussion de la loi sur les traitements, no vote-;
ront pas le projet Chaumet. Ils croient comptcrsur;
vous. ,.., ,
Celle proposition, adoptée à l'unanimité,
marque une nouvelle étape du projet sur les
traitements.
Les instituteurs sentent bien que nombre de
députés ne voteront pas le projet Chaumet, tout
en affirmant leur plus vive sympathie pour le
corps ènseignant. Ceux de Lot-et-Garonne se:
défendent à leur façon ; si leur exemple était
suivi dans toutes les Amicales, si les députés
étaient prévenus, qui sait si les revendications
légitimes des institutrices et des instituteurs
n'aboutiraient pas rapidement ? - R. Valette.
-————————————
19,000 FRANCS DE DÉTOURNEMENTS
Arrestation d'un officier
Châteaudun, 20 juillet.
Sur la requête de l'autorité militaire, la gen-
darmerie vient d'arrêter un capitaine trésorier,
dont la garnison est à Madagascar, et qui se
trouvait en congé dans notre ville.
Le capitaine X. est accusé d'avoir détourné
19,000 fr. de la caisse dont il avait la garde.
Il dit, pour ja défana^jju'il a pardu cette
somme. Cet officier a été dirigé sur la prison
militaire du Mans.
L'ÉLECTION DE VINCENNES-MONTREUIL
L'élection législative de Vincênnes-Montreuil,
a provoqué, hier, de graves incidents. Le parti
iclèrical escomptant l'élection de M. Homard,.
un grand nombre de personnes des comités de
la Patrie Française, portant l'œillet rouge à la
boutonnière, s'étaient rendus à Vincennos. Le"
ballottage a eu le don de les mettre en fureur,
et ils se sont transportés à la permanence du
candidat républicain Ch. Deloncle, qu'ils ont.
mise à. sac. La police a arrêté plusieurs des.
manifestants, dont la conduite a produit à'
Vincennes une profonde émotion. Une contre-
manifestation républicaine a eu lieu aussitôt
devant la maison du citoyen Ch. Deloncle, qui
a été acclamé.
Ajoutons que l'élection du citoyen Deloncle,
au second tour, ne saurait faire doute, les deux
candidats socialistes, les citoyens Fabérot et
Combet, étant, nous en sommes convaincus,
prêts à faire leur devoir en faveur du candidat
désigné au premier tour par le suffrage uni-
versel.
: ; ————————————
La Dégénérescence du Roi Alexandre
(De notre correspondant particulier)
Saint-Pétersbourg, 20 juillet.
M. Korolenko, l'homme de lettres russe bien
connu, raconte dans la ROllsslaya, Viedomosti
qu'en 1889, il a vu la roi Alexandre avec sa
mère, à Yalta, s'inscrire sur le livre des visi-
teurs, lors d'une visilo au célèbre couvent de
Chersones. Alexandre, qui avait déjà 13 ans,
griffonnait sa signature avec des traits qu'on
aurait attribués à un enfant de 6 ans. Au lieu
d'Alexander, il écrivait Alaxander.
Donc, à un Ageoù d'autres enfants sont près
que au seuil de la classe de rhétorique, le
jeune Obrenovitsch ne savait pas même signer
correctement son nom ; et encore l'écriture ma-;
ladroite avait tout à fait le caractère de celle;
des enfants idiots. Quatre ans plus tard, ce
jeune dégénéré devint roi et débuta par un
coup d'Etat. :
L'auteur russe oublie d'ajouter que voilà les
beautés du système monarchique.
PARISIENS, COMPAREZ 1
Le mètre cube du gaz de houille .coûie, de-
puis déjà de nombreuses années, simple-
ment :
10 centimes à Berlin, Breslau, Liègo,
Bruxelles, Saint-Joseph, Jackson, Reims,
Nancy ;
11, à Dusseldorf, Bâle, Christiania ;
12, à Charlottenbourg, Hambourg, Stras-
bourg, Amsterdam ;
12 1/2, à La Haye ;
13, à Dresde, Cologne, Dantlig:
14, à Leipzig, Yokohama , Turin , Lubock ,
Vienne, Copenhague ;
15, à Cléveland, Milan, Mayence, Cracovie,
Bergen ;
16, à Munich, Brome, Gonèva, Colmar,
Triesle,
17, à Tourcoing;
18, à Cincinnati, Metz.
et, à Paris, provisoirement, vingt cen-
times !
Comparez, Parisiens !
Voyez ce qu'ont gagné et ce que gagnent en-
core, sur les consommateurs parisiens du gaz
de houille, messieurs les actionnaires de la
Compagnie actuelle, concessionnaire du scan-
daleux monopole do t'éclairage de Paris. On
voit que nous n'avons pas des prétentions exa-
gérées en demandant le gaz à 15 centimes. —
G.
ACADÉMIE DES SCIENCES
En des travaux récentsetqui firent sensation,
le professeur Armand Gautier démontra na-
guère que l'arsenic se rencontrait normalement
à peu près dans tous les tissus animaux.
Continuant ses recherches, le savant chi-
miste vient d'établir que l'arsenic se rencontre
en quantités appréciables dans la presque to-
talité des corps servant à le doser, si bien que
du fait même de l'analyse destinée à sa recher-
che, l'on doit rencontrer de l'arsenic pour
l'excellente raison queues réactifs utilisés en
contiennent.
La dose renfermée dans ces produits, par
exemple, s'ils ont été convenablement prépa-
rés, est minime et répond à environ un mil-
lième de milligramme. Au dessus de cette
quantité, par exemple, l'arsenic trouvé appar-
tient aux corps analysés.
A noter encore une intéressante note pré-
sentée par M.le professeur Lannelongue au nom
de M. le professeur Cornil et de M. le docteur
Coudray sur la formation du cal osseux, note
de laquelle il ressort que, contrairement à l'opi-
nion couramment admise, la cicatrice dès le
:3" jour, est envahie par des éléments osseux:
au lieu de l'être seulement au 10 ou 12'.
Mentionnons enfin une note curieuse sur la
photographie stéréoscopique de la comète Bo-
relly, réalisée par M. Guénisset, à Nanterre, et
une'autre note de M. le docteur Le Goff sur la
mensuration de l'acétone dans les produits de
la respiration des diabétiques.
En cours de séance, l'Académie a procédé à
l'élection d'un correspondant pour sa section
de médecine et de chirurgie en remplacement
de M. le .professeur. OLher; décédé. -
M. Baccelli, : de Rome, candidat présenté en
première ligné, a été élu par 32 voix ; les can-
didats présentés en ssconde ligne étaient MM.
Calmette, de Lille, qui a obtenu 4 suffrages, et
Waller, de Londres. — G. V.
LA COURSE A LA TIARE
(De notre correspondant particulier)
Milan, 20 juillet.
Losbookmcaker de Milan ont inscrit dans
leurs carnets de nombreux paris pour l'élection
du futili pape.
Les favoris sont - Rampolla et Gotta 9il, Se-
raflno Vannutelli 5(1 et Agliardi do Bergamo
1211. Les autres cardinaux no sont pas cotés.
Les enjeux ont déjà atteint un chiffre
énorme.
■ i ■■■■m», i «i — i i, i ■———mmmmi i i i
L'ATTACHÉ MILITAIRE ALLEMaND
AUX ÉTATS-UNIS
iDe notre càrresponaant particulier)
New-York, 20 juillet.
M. le commandant Etzel, attaché militaire
allemand à Washington, a été reçu avec la
plus grande déférence dans les forts de Riley
et do Leavenworth, dont il a pu étudier les
moindres détails. Les autorités militaires lui
ont fourni tous les renseignements demandés.
Après avoir torminé sa tournée d'études dans
les Etats-Unis, le commandant visitera les
Philippines.
AU VATICAN
LA MORT DU PAPE ""-0"--.,.
Le dernier jour d'un pape. — Toujour,
l'état comateux. — Le dernier adieu.
— Bénédiction suprême. — La fin.
- Les mesures d'ordre à Rome.
- Le marteau du camerlingue.
- Rampolla et Oreglia. —
Chambre mortuaire. — Vi-
sites officielles. — Les hé-
ritiers du pape.
Le pape est mort hier après-midi i
4 heures 4 minutes.
Les nouvelles que nous avions reçues de-
puis la matinée ne laissaient d'ailleurs au-
cune incertitude sur nsuc fatale de la ma-
ladie de Léon XIII. Voici, dans leur ordre
chronologique, les dépêches qui nous sont
parvenues à ce sujet :
(De notre correspondant particulier)
Rome, 20 juillet, S h. 50 matin.
Lo pape vit encore. Telle est la nouvelle qua
la popniation de Rome a apprise, non sans
élonnement, ce matin, à son rÓveil.
Home. 9 h. 30 matin.
A 9 h. les docteurs Mazzoni et Lapponi ont
signé le bulletin suivant :
Pendant la nuit, le pape n'a reposé qu'à do courts
intervalles. L?s conditions générales restent gra,
ves. Pouls, 94; respirations, 32; température, 36'2.
Après avoir rédigé ce bulletin, les médecins
ont eu ensemble un long entretien. Le docteur
Mazzoni a quitté le Vatican à 10 h. 10. Il a dé-
claré qu'il lui avait paru que le pape le recoa-"
naissait.
Dans le coma
Rome, 10 h. matin.
Le pape se trouve dans l'état comateux qui
précède l'agonie. La catastrophe est toujours
imminente.
Rome, 11 h. 55 matin.
Les cardinaux viennent d'être mandés d'ur-
Cliché communiqué par l'Agence Nationale
gence au Vatican. Cet appel indique que le
-pape est à toute extrémité.
Rome, midi 53.
L'affolement d'hiorse renouvelle au Vatican.
Une grande confusion règne dans le palais. La
mouvement des voilure, est très vif sur la
place Saint-Pierre. Les cardinaux arrivent l'un
après J'autre ot les voitures ressortent aussitôt
du Vatican pour aller prendre d'autres cardi-
naux.
L'absolution
Rome, 2 h. 5.
A Il h. 30 l'état du pape s'est aggravé. La
malade a paru entrer en agonie. Tous les car-
dinaux, appelés précipitamment, sont alors
entrés dans la chambre avec les hauts person-
nages de la cour pontificale.
Le cardinal Serafino Vannutelli, assisté par
un maître des cérémonies do la cour pontifi-
cale, a donné au papa l'absolution dernière. C o
moment a été extrêmement émouvant. Autour
du lit se tenaient les cardinaux Oreglia, Ram-
polla, de la Volpe, Vives.
Tout le monde était agenouillé, ainsi quo les
neveux du pape, et s'efforçait de retenir ses
sanglots pour ne pas contrister lo pape, qui
avait encore une conscience assez nette. Léon
XIII adressa quelques paroles au cardinal Ore-
glia, lui confiant le soin de l'Eglise.
A ce moment, Mgr Bisleti lui a demandé sa
bénédiction pour l'antichambre pontificale, qui
était réunie dans la pièce voisine. Le pape donna
sa bénédiction et dit :
— Sia queslo l'itllimo vaie ! ( Que ce soit mon
dernier adieu ! )
Le pape ensuite, avec grand effort, serra les
mains des cardinaux. Après cette crise, il reprit
légèrement. On lui donna plusieurs excitants,
qui le ranimèrent quoique peu.
Les derniers moments
Romo, 2 h. 35 soir.
Vers deux henres, le docteur Mazzoni a été -
appelé d'urgence au Vatican. On dit que c'est
afin qu'il âssislo lo pape a ses derniers mo-
ments.
:' Rome, 3 h. 15 soir.
Les diplomates qui se trouvaient ail Vatican
ont été introduits dans la chambre du pape,
ainsi que sa famille t.t ses neveux.
; Lé pape les à tous béhis avec grand effôrt et
leur a donné sa main à baiser.
Les cardinaux lui ont aussi baisé 1ft main et
se sont ensuite retirés dans la bibliothèque. On ,
prévoit une catastrophe imminente.
Rome, 3 h. 30 soir.
Lo pape a perdu ses facultés mentales. Il n'a
pas reconnu ses neveux qu'il avait préçédom-
:ment ombrassés et bénis..
: Le docteur Mazzoni déclare dans les anti-
chambres quo le pape peut encore avoir deux
heures de vie.
La mort
Le pape a perdu tout3 sa connaissance. On
fait courir à chaque instant !e bruit de sa
mort. Selon le jugement des médecins, la ca
tastropho est imminente.
Rome, i h. 30 soir.
Le pape est mort à 4 heures 4 minutes
APRÈS LA MORT
; nom. ti h. soir. -
, Le pape est mort ave'» sérénité.
Le Dr Lappout, af'rÓs avoir attcnlivemen
ausculté le cœur, a annoncé que lo pape était
-mort. Il était 4 h. 4 m.
; Le grand pénitencier a alors récité les prio.
res des morts. *
Le majordome invita ensuite toutes les per<
sonnes présentes à s'éloigner. Tout lA monde
sortit, à l'exception des neveux de Léon XIII,
du Df Lapponi, du valc* de chambre Centra,
de deux gardes-nobles et du majordome qui
s'approchaducorps et couvrit la visage du
pape d'un voile blanc.
Le comte Pocoi, le D' Lapponi, le valet de
----- - ,-- --- -----_.
Eé Numro CINQ CENTIMES
FONDATEUR : AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Viub Trtii Bïii Six Mb Va ni
Paris. 2fr. 5fr. 9fr. ls frsl
Départements.. 2 — 6 - ti - 20-
Union Postale. 3 — 9 — 16 sS J2 —
RÈDUCTEUR EN CHEF: CHARLES BOS
ANNONCES
MU. Oh. LAGRANGE, CERF & Cie
6, Place de la Bourse, 6
et AUX BUREAUX DU JOURNAL
REDACTION: 14, rue du Mail, Paris
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à i heure du maltn
Ke 12135. — Meroredi 22 Juillet 1903
4 THERMIDOR AN III
ADMINISTRATION ; 14, rue du Mail
dresser lettres ci mandats à VAdministrateur
NOS LEADERS
MaLiMiÉilrile
On n'a pas oublié la mort tragique
de M. et Mme Fair, deux Américains
richissimes. Leur automobile, dans une
course vertigineuse, était allée s'abîmer
contre un arbre, sur la route de Bon-
nières, près de Pacy-sur-Eure. S'il se
fût agi de deux personnes ordinaires,
du commun, la catastrophe eût passé
inaperçue. A peine eût-elle obtenu les
honneurs du fait divers. Mais il s'agis-
sait de la famille Vanderbilt. Des mil-
liardaires. Pensez donc ! Les journaux
en parlèrent longuement, en termes
émus.
On posa même à ce moment-là, mais
sans y insister outre mesure, un
problème intéressant. M. Fair pos-
sédait un nombre incalculable de
Inilions; sa femme, au contraire, des
réssources relativement médiocres. A
laquelle des deux familles irait cette
grosse succession ? Le résultat dépen-
dait d'une question de survie.
Quel était celui des deux époux qui
avait rendu le dernier soupir après
l'autre ? Etait-ce Mme Fair qui avait
respiré, ne fût-ce que quelques minu-
tes, quelques secondes après la mort
de son mari ? C'était elle, et par suite
sa propre famille qui héritait de M. Fair.
Etait-ce au contraire M. Fair qui avait
survécu. Sa succession passait non plus
à sa femme en fait décédée avant lui,
mais à ses propres parents, les Vander-
bilt. L'eau allait à la rivière; les mil-
liards allaient aux milliards.
On signala le côté délicat de cette
question que le code civil règle au
moyen de diverses présomptions. Mais
le code civil ne s'applique, bien en-
tendu, que s'il n'existe pas d'autres
preuves. Du moment, par exemple,
où des témoins surgiraient qui ont
assisté à la scène et qui peuvent certi-
fier quel est celui des deux époux qui
a survécu, ce sont ces témoignages qui
font loi.
On avait oublié cette affaire, déjà
fort ancienne, puisqu'elle date de plu-
sieurs mois, lorsqu'il y a deux jours
la presse entière s'émeut, s'exalte et
se répand en virulentes récrimina-
tions. Que s'est-il donc passé? Deux
citoyens français viennent d'être arrê-
tés préventivement sous l'inculpation
de faux témoignage, précisément dans
la question de survie des époux Fair.
Ah ! le gouvernement et la justice en
ont entendu de dures. Mais que faites-
vous donc de la liberté individuelle ?
Eh quoi! on n'a même pas encore
recueilli contre ces deux hommes
l'ombre d'une preuve. Le juge d'ins-
truction lui-même a reconnu qu'il ne
connaissait pas un mot du dossier.
C'est abominable.
Appréhender ainsi deux citoyens,
les arracher à leurs affaires et à leur
famille, sur une simple enquête faite
par je ne sais quelle agence Tricoche et
sur la demande de la famille Vander-
bilt, un milliardaire américain! Tou-
jours le veau d'or ! Juste ciel ! où allons-
nous?
Un journal, dans un article admira-
blement écrit d'ailleurs,établissant hier
un rapprochement entre cette double
arrestation, la prise de la Bastille et la
célébration de la fête nationale, s'est
même écrié dans un élan de navrante
componction: «Les lampions du 14.
juillet ont chez nous, depuis quelque
temps,d'ironiqiies lendemains. »
Eh bien moi,ce qui m'étonne,ce n'est
pas l'arrestation préventive de MM.
Masse et Morane c'est l'étonnement des
journaux.Ah! vraiment vous pensez que
c'est là un cas isolé,dû à des manœu-
vres insolites où la politique et l'argent
ont une grande place?Vous pensez que
nos deux-compatriotes sont les victimes
de la lutte qui s'est engagée sur les ca-
davres de M. et Mme Fair entre leurs
puissants héritiers? Vous pensez que
c'est l'or des Vanderbilt, mettant en
œuvre des influences exceptionnelles!
quia abouti à cetteattefnte directe à la
liberté individuelle? :
Hélas! non. Le mal est bien plus
grave, plus général et plus profond.
Sans doute, en ces matières comme en
toutes autres, l'influence de la politi-
que et de l'argent, comme celle que
donnent toutes les forces sociales : la
renommée, le talent, de hautes fonc-
tions, est considérable. El cette influen-
ce,tout le mondelasubit plus ou moins.
Est-ce que la presse aurait tant parlé
de la catastrophe elle-même, si M. et
Mme Fair n'avaient appartenu à la fa-
mille Vanderbilt? Est-ce qu'elle parle-
rait de l'arrestation préventive de MM.
Masse et Morane si leur cas ne se rat-
tachait précisément à l'affaire de M. et
Mme Fair?
Mais la part de toutes les influences;
faite, il taut voir autrechose. Ce qui
a déterminé l'honorable juge d'instruc-
Honet lui a arraché le mandat d'arrêt,
-est-ce le mirager fatal des milliards
d'outre-Océan, ou l'influence d'un per-
sonnage officiel ? Eh ! non. Ce serait lui
faire une injure gratuite que de le
croire. Le jugeafait arrêter préventi-
vement ces deux messieurs parce que.
c'est l'habitude. Oui, l'incarcération
préventive, même sous l'inculpation
d'un simple délit, même sous des in-
culpations moins graves que celle de
faux témoignage, constituent encore,
même en l'an de grâce 1903, même
aux alentours du 14 Juillet, n'en dé-
plaise à notre éminent confrère M.
Montorgueil, un cas très fréquent.
Voilà ce qu'il faut dire. Voilà la
campagne à faire. Et si la presse, au
lieu de ne se laisser émouvoir, comme
presque toutes les puissances de ce
monde, que par les faits exceptionnels
de nature à intéresser le public, si la,
presse se conformaft à la hauje missioh
dont elle s'est elle-même investie et
qu'elle remplit si bien quand elle veut
s'en donner la peine, elle n'aurait qu'à
transformer sa campagne, d'ailleurs
excellente, en faveur de MM. Masse et
Morane , en une campagne plus
large et pour la conquête définitive de
la liberté individuelle, pour cet habeas
corpus qui existe depuis des siècles
dans l'aristocratique Angleterre et que
la France, ce pays labouré par tant
de révolutions populaires, ne possède
pas encore.
Chez nous, au point de vue de la
liberté individuelle, le juge d'instruc-
tion est tout puissant.
Pour arrêter quelqu'un il a si peu
besoin de connaître le dossier que l'ar-
restation préventive a souvent pour
but de surprendre l'inculpé et de per-
mettre ainsi au juge de se procurer
des preuves qu'il n'a pas.
Je sais bien que des gardes des
sceaux républicains ont, à maintes re-
prises, envoyé des circulaires pour
recommander en cette délicate matière
la plus grande prudence.
- Je sais bien que l'esprit d'humanité
et de justice chaque jour plus accusé
des juges d'instruction nous met à l'a-
bri des odieux abus d'autrefois. Néan-
moins la règle pour les délits graves et
chaaue fois qu'il apparaît au juge
qu'elle peut être utile à la manifesta-
tion de la vérité, c'est la détention pré-
ventive. C'est par là qu'on commence,
Au bout de quelques jours, dès qu'on
a tiré de cette brusque arrestation tout'
ce qu'elle est susceptible de donner, on
rend une ordonnance de mise en liberté
provisoire avec ou sans caution sui-
vant les cas.
C'est là, me direz-vous, une procé-
dure abominable. Oui, sans aucun
doute. Cette procédure méconnaît la
liberté individuelle de la façon la plus
outrageante. Et que de fois, ces arres-
tations préventives, même suspendues
au bout de quelques jours, entrainent
d'irréparables ruines !
Mais si vous voulez qu'il n'en soit
plus ainsi, Messieurs de la presse dont
l'influence sur l'opinion publique et
sur les pouvoirs publics est si consi-
dérable, faites une campagne en faveur
de cet habéas corpus que la monarchie
anglaise avait donné aux sujets de Sa
Majesté britannique, juste dix ans
avant la Révolution française, et que
la troisième République ne nous a pas
encore donné.
- Louis Puech.
Voir à la 3e page
les Dernières Dépêches
de la nuit
LA MORT DU PAPE
Les camelots qui criaient hier
les journaux de dernière heure,
clamaient : (( La mort du pape.
Cette fois, c'est la bonne !» Il
n'y avait, je vous l'assure, au-
cune ironie, qui eût confiné au
mauvais goût, dans cette manière d annon-
cer le décès de Léon XIII.
Nos braves camelots entendaient simple-
ment convaincre le public de cette vérité
qu'ils apportaient une nouvelle certaine,
définitive, et non l'un de ces (( tuyaux » va-
gues et sans consistance qui remplissent les
journaux depuis trois semaines.
Faisons notre mea culpa : nous avons
tous enterré le pape une fois par jour, de-,
puis le 4 juillet, date où nous apprîmes l'é-
tat très grave-du Saint-Père. :
Qu'on pardonne aux journalistes, ils sa-
vent trop bien qu'il n'y a qu'un tort profes-
sionnel qu'on ne leur pardonne jamais:
c'est d'arriver trop tard. Aussi, quelques-
uns de nos confrères ont-ils pris l'habi-
tude de partir toujours un peu trop tôt.
Toutes ces réflexions étaient en puis-
sance, dans le mot irrévérencieux des came-
lots : « Cette fois, c'est la bonne ».'
Pour les raisons que je viens de rappeler,.
il ne reste plus grand chose à dire sur la
situation que crée la mort du pape. Nous
n'avons rien de mieux à faire qu'à attendre
la décision du Conclave. Encore cette déci-
sion n'apprendra-t-elle rien de formel au
monde diplomatique: attendu qu'il est dif-
ficile de savoir si le cardinal choisi pour
remplacer Léon XIII poursuivra sous la
tiare la politique qu'il pratiquait quand il
ne portait que le chapeau rouge. On saisit,
mal le sens de la parole adressée par 'e pape
mourant au cardinal Oreglia : « Je vous:
recommande à l'Eglise ». Serait-ce une in-:
vestiture in extremis ?
Qu'en pense le cardinal Rampolla dont la
querelle avec son collègue Oreglia a dé-
frayé la chronique ? -
Quoi qu'il en soit, on fôurbit comme
le remarque un de nos confrères italiens
on fourbit, autour du lit de mort de Léon
XIII, les armes pour le conclave.
Le combat manquera de grandeur ; il
aura été précédé de trop de manoeuvres mes-
quines. Une seule attitude, celle de fa neu-
tralité absolue, peut être l'attitude de la
République française. Le pape qui va être
élu ne saurait rien nous devoir, et nous ne
devons rien lui devoir..
LA PETITE PATRIE
L'amour du clocher. — La régiona-
lisme. - La paésie provinciale. —
Le félibrige et son historio-
graphe — Sextius Michel et
la vallée du Rhône. — A
Paris et à Sceaux.
Lorsqu'à l'hiver de sa longue vie, consacrée
au travail et au dévouement le plus inlassable
à la cause du peuple, 19 vieux poète jette un
regard sur le passé qu'il a vécu, il revoit le
clocher natal, los toits de chaume du village où
il joua ses premiers jeux, les prés verdoyants
et le soleil ardent fonçant d'une teinte accusée
l'azur de la voûte céleste.
Enfermant dans une égale religiosité d'es-
prit toutes ces choses auxquelles s'ajoute le
souvenir des parents aimés qu'il laissa là-bas
pour s'en venir dans la grande capitale ap-
prendre les chemins périlleux qui mènent tour
à tour à la gloire, à la chute, il évoque, à côté
du sentiment grandiosa de son amour de la
patrie, ces mille détails dont le souvenir, affer-
mi par les ans, constitue pour lui l'image de
la petite patrie. Tous les efforts de centralisa-
tion administrative n'ont rien pu contre l'in-
tensité grandissante de cette forme d'amour
dont s'animent et se soutiennent tous ceux qui,
venus des quatre coins de France, ont résisté
victorieusement aux terribles atteintes du mal
des grandes villes.
Mais quand ces sentiments ont en outre l'a-
vantage de se fortifier de ce tonique vigoureux
qui s'appelle la poésie locale, quand à ses sou-
venirs personnels l'enfant prodigue échappé du
bercail provincial peut ajouter l'agrément d'un
art spécial à sa petite patrie, le spleen se trans-
forma en joie reconfortante. Lire dans la lan-
gue, l'idiome ou le dialecte de sa province d'o-
rigine des œuvres savoureuses, c'est en quelque
sorte respirer l'air de cette province, humer les
senteurs des bois où l'on vécut ses premiers
ans, c'est vivre deux fois son bonheur.
Décentralisation
Si le mouvement, de décentralisation a pris
en France depuis quelques années une telle
extension on peut affirmer sans crainte que
c'est à la saine influence du Midi qu'il le doit.
Aujourd'hui, nous voyons bien les jeunes
gens empressés à venir chercher la consécra-
tion de leur notoriété dans la ville qui fut de
si longue date le b?rceau des lettres, des scien-
ces et des arts ; mais une fois la plac3 con-
quise, ils n'ont plus ces dédains orgueilleux
qu'il était autrefois de bon ton d'affecter à
l'égard des poètes de la sous-préfecture dont
l'ambition ne dépassa point le mail ou le café
de la grande place, en matière de notoriété.
Les revues de province n'ont plus cette can-
deur de se borner exclusivement à insérer les
œuvres des académiciens d'Etampes, de Tou-
lon ou des muses Santones, et le régiona-
lisme, tout en s'efforçant vers une intelligente
fédération, a fait éclore de vrais artistes, et,ce
qui n'est pas moins louable, développé la ri-
chesse linguistique de plusieurs dialectes pro-
pices à l'expression de la beauté.
Que le Bourguignon,le Normand. le Proven-
çal ou le Gascon ne révèlent le mystère de leur
poésie qu'à un petit nombre d'initiés, c'est déjà
bien joli. Autant de braves gens que les vers
do Paul Harel, de Jasmin ou de Mistral ré-
veilleront de leur torpeur intellectuelle où les
oppriment les nombreuses années d'un labeur
ininterrompu. Celui qui aime à redire les chants
de son patetin n'est pas loin d'admirer les
grands poètes de sa patrie. Ainsi faisant, il
élève son esprit et l'accoutume à exiger un peu
d'idéal pour équilibrer le poids des tristesses
de la vie.
Les poètes provençaux
Que dire, dès lors, quand ces patois et ces
dialectes parviennent à exprimer le lyrisme de
nos pensées sous une forme définitive, à ré-
créer une langue sous laquelle transparaissent'
nos plus lointaines origines, nos affinités les
plus directos avec les peuples de l'antiquité
dont nos mœurs portent encore aujourd'hui la
si vivante empreinte ?
J'en veux ainsi venir aux trésors prodigués
par ce fécond Midi, co Midi provençal dont
Frédéric Mistral, Théodore Aubanel, Rouma-
nille, Paul Arène et Charles Gras furent les
troubadours modernes, et dont le plus affable
des poètes, M. Soxtius Michel s'est fait l'histo-
riographe littéraire, en perpétuant, dans un
livre mémorable, dont la seconde oartie vient
de voir le jour en librairie, les chères tradi-
tions du félibrige parisien, c'est-à-dire de cette
délégation permanente que les méridionaux se
chargent d'entretenir à Paris, pour le bon re-
nom de leur chère Provence.
Parmi les vénérables, M. Sextius Michel a
sa place marquée sur le banc d'honneur. Ses
cheveux argentés par le temps auréolent un
front lumineux qui pensa de belles choses,
conçut de nobles tâches et perpétra de jolis
poèmes, dont la célèbre Fauvette n'est pas le
moins populaire.
Sa vie partagée entre l'enseignement, l'ad-
ministration et la poésie, fut éclairée do joies
pures et assombrie de morne3 tristesses, que
seules sa belle philosophie et sa grandeur
d'àme l'aidèrent à supporter. Aux jours cruels
du deuil national qui suivit les désastres de
1870, ce méridional ardent conserva sa place
aux avant-postes, et cette place, ilToccilpe en-
core, puisque depuis trente-trois ans déjà, le
voici maire du XVe arrondissement de Paris.
Et tout cela est sa vie, à celui qui chanta Au-
rores et Couchants, sans oublier de muser au
Long du Rhône et de la Mer.
Et lui aussi, qui vit s'en aller avec tris-
tesse la plupart de ceux qu'il accueillit aima-.
blement lorsque venus de là-bas, du bord de
la mer bleue ou des moulins chers au re-
gretté Daudet, lui qui dut jeter un dernier
adieu sur les tombes do Charles Gras, d'Au-
banel, d'Arène et de tant d'autres pays, il a
voulu revivre ces chères heures de souvenirs,
en ces pages où se retrouvent décrits les céré- -'
monials naïfs, ingénus et parfois même offi-
ciels du félibrige à Paris et à Sceaux.
Le félibrige parisien
Sceaux, petit coin délicieux où s'abrite la
dépouille mortelle de l'aimable Florian, ermi-
tage préféré de maint poète et de mainte du-
chesse, et à deux pas duquel habite le vénéré
Sully-Prudhommo. C'est ton parc que choisi-
rent, secrète divination, les poètes du Midi
pour venir tenir leurs cours d'amour, prési-
dées par les plus aimables d'entre les reines,
tilles, femmes on sçeurs de poètes et d'artistes
natifs ou originaires de la suave Provence.
C'est là que dans la simplicité champêtre d'une
fête estivale, j'ai entendu, tour à tour, chaque,
année, les maîtres de la plume et de la pensée
célébrer les résultats heureux d'un effort inté-
ressant entre tous : la régénération de l'art
français par le culte restauré de l'art et de la
langue des vieilles provinces. Et ce n'est pqs-
être rétrograde que de professer un tel culte,
car il est essentiel au progrès du pays.
; Et si tour à tour des écrivains et des artistes
comme Anatole France. Benjamin Constante
Jules Claretie, André Theuriet, Deluns-Mon-
laud, Henry Fouquier l'ont célébré, Bonaparte
lui-même l'avait pressenti, lorsqu'on 1810 il
avait proscrit à tous les préfets de recueillir les
documents poétiques relatifs à la littérature
locale dont relovait leurs départements respec-
tifs. Ces documents, rassemblés, allaient être
l'objet de son attention quand, la guerre de
Russie déclarée, il fallut songer à de plus pres-
sants soucis. Ils dorment encore dans les gre-
niers de la Bibliothèque nationale sans espoir
d'être jamais réveillés de leur somnieil, à moinît
1alune âme ardente-et généreuse comme celle
de M. Sextius Michel néles exhume de la pous-
sière déjà séculaire qui les recouvre. Et cela
formerait un merveilleux complément à l'his-
toire de la Petite Patrie.
Alcanter DE BRAHM.
— ♦ : -
L'IMPASSE
Plus cela change, plus c'est la même chose.
Les tribunaux et les cours d'appel, dans les
espèces de tout genre qui leur sont soumises,
continuent à manifester leur sympathie aux
congrégations en acquittant purement et sim-
plement les prévenus que le parquet amène de-
vant eux.
Il faudrait pourtant mettre fin à cette anar-
chie judiciaire. De parti pris, les magistrats
acquittent les religieux. Et si par hasard la
première juridiction a fait preuve de loyalisme
et a appliqué les pénalités prévues par la loi
aux contrevenants, la juridiction d appel ré
forme le jugement et renvoie les appelants des
fins de la plainte.
Il y a, à cela, une cause première qui est le
cléricalisme des juges. Ces échappés des jésui-
tières ne veulent sous aucun prétexte condam-
ner leurs anciens maîtres et les éducateurs
choisis de leurs enfants.
Mais il y a une autre raison de ces arrêts
d'acquittement qui se multiplient, notamment
en ce qui concerne les prétendues sécularisa-
tions, ce sont les incertitudes mêmes du gou-
vernement.
Comment un cabinet prétendrait-il imposer
aux juges une interprétation de la loi, alors
qu'il est lui-même divisé sur cette interpréta-
tion, alors que son chef a changé plusieurs
fois d'opinion et a montré,par ses tergiversa-
tions, combien fragiles étaient ses volontés et
incertaines ses vues ?
M. Combes n'a pas songé à tout cela, lors-
qu'il eut, à propos du projet de loi sur les sé-
cularisations, de si singulières, de si contra-
dictoires attitudes. Aussi, va-t-il se trouver en
présence de difficultés très graves, et il serait
:mal venu à en accuser les congrégations et
même les juges, puisque c'est lui seul qui les a
suscitées. — Ch. Darcy.
LA ROUTINE
Des lecteurs du Rappel, connaissant l'intérêt
que je porte à toutes choses de l'armée, me
sollicitent de donner mon sentiment sur l'essai
du nouvel uniforme de l'infanterie. Je serais
assez tenté de me récuser, n'ayant pas assisté à
la dernière revue, et, par conséquent, ne pou-
vant parler de vûw dudit nouvel uniforme.
Cependant il est un certain nombre de points
sur lesquels il me paraît impossible que tout
le monde ne soit pas d'accord. La suppression
des boutons brillants est absolument indispen-
sable. Au soleil, les boutons de cuivre ont un
scintillement tout à fait propre à régler le feu
de l'artillerie. Le remplacement de l'incommode.
impratique tunique par la vareuse doit aussi
nécessairement être approuvé. Quant au cha-
peau « boër », je m'abstiendrai de l'apprécier
potit la raison dite plus haut, mais enfin tout
vaut mieux que ce képi qui ne protège ni du
soleil, ni du vent, et qu'il faut, dès qu'il fait
beau temps, compléter par un couvre nuque.
Or, on ne distribue point, en France, de
couvre-nuques réglementaires aux soldats ; ils
fourrent sous le képi et laissent flotter leurs
"mouchoirs ou blancs, ou jaunes, ou bleus, ou
rouges, ou à carreaux, que sais-je ? ce qui pro-
duit parfois un effet assez grotesque. Un cha-
peau à bords suffisamment longs ferait dispa-
raître ces inconvénients. 0
Reste la question du pantaton rouge. Ici on
se récrie : « Vous voulez supprimer tout le
passé do gloire de l'armée française !. » Ceux
qui tiennent, ou à peu près, co langage, pa-
raissent avoir oublié que le pantalon garance
ne fit son apparition chez nous qu'en 1829. Les
grognards du premier Empire, les combattants
épiques de la grande République, portaient
le pantalon bleu. Cela seul montre la valeur de
l'argument.
Mais quoi ? ceux mêmes qui trouvent tout
simple de voir les chasseurs à pied, l'infante-
rie coloniale, l'artillerie, le génie en bleu foncé
et en noir, sont plongés dans un profond dé-
sarroi à la pensée seule de ne plus voir la li-
gne, les cuirassiers et les dragons en rouge.
C'est très niais, ne trouvez-vois pas?
Je me déclare, puisqu'on me fait l'honneur
,do me demander mon avis, tout à fait opposé
au pantalon rougo. D'abord, et surtout, il at-
tire de fort loin l'attention, ce qui devrait suf-
fire à faire ordonner sa suppression. Et puis,
je le trouve laid, criard, gueulard même,
évoquant l'idée d'un déguisemeat, d'une mas-
carade. Dites - si l'uniformo des chasseurs à
piod et de l'infanterie do marine n'est pas in-
finement plus seyant, plus élégant dans sa
note sombre, dont l'austérité ne saurait dé-
plaire aux gens de goût. — Je conclus que
l'essai tenté est des plus intéressants, et que
c'est seulement au nom do la stupide et aveu-
gle routine que l'on peut songer à défendre
l'uniforme actuel. — L. Victor-Meunier.
ERRATUM. — Deux mots « sautés » dans mon ar-
tlfcle d'hier ont complètement dénaturé une phrase
et cela m'ennuie— chacun a son amour-propre -
parce que j'ai l'air ainsi d'avoir cité de travers du
concourt. Je rétablis la phraso en sÓulignantle:
mots omis : « DJjà — cela remonte pourtant assez
loin — la Renée Mauperln des Goncourt s'étonnait
que l'on pût encore rencontrer « des femmes sans
compartiments pour fumeurs». — L. Y.-Rf.
POUR L'ACTION
Le bulletin de l'Amicale de Lot-ft-Garon-nr.:
nous au porte le compte rendu de l'assemblée;
générale de cette amicale, la 21 mai dernier.:
Nous y relevons un certain nombre do propo-
sitions très intéressantes.
La première, qui a pour auteur M. Dubourg. i
est devinée à chacun des représentants du
département :
Les institutrices et les instituteurs membres de
.l'Amicale de Lot-et-Garonne, réunis on assemblée:
générale lo 21 mai, décident do retirer leur con-
'tiince aux membres du Parlement qui, lors de lai
discussion de la loi sur les traitements, no vote-;
ront pas le projet Chaumet. Ils croient comptcrsur;
vous. ,.., ,
Celle proposition, adoptée à l'unanimité,
marque une nouvelle étape du projet sur les
traitements.
Les instituteurs sentent bien que nombre de
députés ne voteront pas le projet Chaumet, tout
en affirmant leur plus vive sympathie pour le
corps ènseignant. Ceux de Lot-et-Garonne se:
défendent à leur façon ; si leur exemple était
suivi dans toutes les Amicales, si les députés
étaient prévenus, qui sait si les revendications
légitimes des institutrices et des instituteurs
n'aboutiraient pas rapidement ? - R. Valette.
-————————————
19,000 FRANCS DE DÉTOURNEMENTS
Arrestation d'un officier
Châteaudun, 20 juillet.
Sur la requête de l'autorité militaire, la gen-
darmerie vient d'arrêter un capitaine trésorier,
dont la garnison est à Madagascar, et qui se
trouvait en congé dans notre ville.
Le capitaine X. est accusé d'avoir détourné
19,000 fr. de la caisse dont il avait la garde.
Il dit, pour ja défana^jju'il a pardu cette
somme. Cet officier a été dirigé sur la prison
militaire du Mans.
L'ÉLECTION DE VINCENNES-MONTREUIL
L'élection législative de Vincênnes-Montreuil,
a provoqué, hier, de graves incidents. Le parti
iclèrical escomptant l'élection de M. Homard,.
un grand nombre de personnes des comités de
la Patrie Française, portant l'œillet rouge à la
boutonnière, s'étaient rendus à Vincennos. Le"
ballottage a eu le don de les mettre en fureur,
et ils se sont transportés à la permanence du
candidat républicain Ch. Deloncle, qu'ils ont.
mise à. sac. La police a arrêté plusieurs des.
manifestants, dont la conduite a produit à'
Vincennes une profonde émotion. Une contre-
manifestation républicaine a eu lieu aussitôt
devant la maison du citoyen Ch. Deloncle, qui
a été acclamé.
Ajoutons que l'élection du citoyen Deloncle,
au second tour, ne saurait faire doute, les deux
candidats socialistes, les citoyens Fabérot et
Combet, étant, nous en sommes convaincus,
prêts à faire leur devoir en faveur du candidat
désigné au premier tour par le suffrage uni-
versel.
: ; ————————————
La Dégénérescence du Roi Alexandre
(De notre correspondant particulier)
Saint-Pétersbourg, 20 juillet.
M. Korolenko, l'homme de lettres russe bien
connu, raconte dans la ROllsslaya, Viedomosti
qu'en 1889, il a vu la roi Alexandre avec sa
mère, à Yalta, s'inscrire sur le livre des visi-
teurs, lors d'une visilo au célèbre couvent de
Chersones. Alexandre, qui avait déjà 13 ans,
griffonnait sa signature avec des traits qu'on
aurait attribués à un enfant de 6 ans. Au lieu
d'Alexander, il écrivait Alaxander.
Donc, à un Ageoù d'autres enfants sont près
que au seuil de la classe de rhétorique, le
jeune Obrenovitsch ne savait pas même signer
correctement son nom ; et encore l'écriture ma-;
ladroite avait tout à fait le caractère de celle;
des enfants idiots. Quatre ans plus tard, ce
jeune dégénéré devint roi et débuta par un
coup d'Etat. :
L'auteur russe oublie d'ajouter que voilà les
beautés du système monarchique.
PARISIENS, COMPAREZ 1
Le mètre cube du gaz de houille .coûie, de-
puis déjà de nombreuses années, simple-
ment :
10 centimes à Berlin, Breslau, Liègo,
Bruxelles, Saint-Joseph, Jackson, Reims,
Nancy ;
11, à Dusseldorf, Bâle, Christiania ;
12, à Charlottenbourg, Hambourg, Stras-
bourg, Amsterdam ;
12 1/2, à La Haye ;
13, à Dresde, Cologne, Dantlig:
14, à Leipzig, Yokohama , Turin , Lubock ,
Vienne, Copenhague ;
15, à Cléveland, Milan, Mayence, Cracovie,
Bergen ;
16, à Munich, Brome, Gonèva, Colmar,
Triesle,
17, à Tourcoing;
18, à Cincinnati, Metz.
et, à Paris, provisoirement, vingt cen-
times !
Comparez, Parisiens !
Voyez ce qu'ont gagné et ce que gagnent en-
core, sur les consommateurs parisiens du gaz
de houille, messieurs les actionnaires de la
Compagnie actuelle, concessionnaire du scan-
daleux monopole do t'éclairage de Paris. On
voit que nous n'avons pas des prétentions exa-
gérées en demandant le gaz à 15 centimes. —
G.
ACADÉMIE DES SCIENCES
En des travaux récentsetqui firent sensation,
le professeur Armand Gautier démontra na-
guère que l'arsenic se rencontrait normalement
à peu près dans tous les tissus animaux.
Continuant ses recherches, le savant chi-
miste vient d'établir que l'arsenic se rencontre
en quantités appréciables dans la presque to-
talité des corps servant à le doser, si bien que
du fait même de l'analyse destinée à sa recher-
che, l'on doit rencontrer de l'arsenic pour
l'excellente raison queues réactifs utilisés en
contiennent.
La dose renfermée dans ces produits, par
exemple, s'ils ont été convenablement prépa-
rés, est minime et répond à environ un mil-
lième de milligramme. Au dessus de cette
quantité, par exemple, l'arsenic trouvé appar-
tient aux corps analysés.
A noter encore une intéressante note pré-
sentée par M.le professeur Lannelongue au nom
de M. le professeur Cornil et de M. le docteur
Coudray sur la formation du cal osseux, note
de laquelle il ressort que, contrairement à l'opi-
nion couramment admise, la cicatrice dès le
:3" jour, est envahie par des éléments osseux:
au lieu de l'être seulement au 10 ou 12'.
Mentionnons enfin une note curieuse sur la
photographie stéréoscopique de la comète Bo-
relly, réalisée par M. Guénisset, à Nanterre, et
une'autre note de M. le docteur Le Goff sur la
mensuration de l'acétone dans les produits de
la respiration des diabétiques.
En cours de séance, l'Académie a procédé à
l'élection d'un correspondant pour sa section
de médecine et de chirurgie en remplacement
de M. le .professeur. OLher; décédé. -
M. Baccelli, : de Rome, candidat présenté en
première ligné, a été élu par 32 voix ; les can-
didats présentés en ssconde ligne étaient MM.
Calmette, de Lille, qui a obtenu 4 suffrages, et
Waller, de Londres. — G. V.
LA COURSE A LA TIARE
(De notre correspondant particulier)
Milan, 20 juillet.
Losbookmcaker de Milan ont inscrit dans
leurs carnets de nombreux paris pour l'élection
du futili pape.
Les favoris sont - Rampolla et Gotta 9il, Se-
raflno Vannutelli 5(1 et Agliardi do Bergamo
1211. Les autres cardinaux no sont pas cotés.
Les enjeux ont déjà atteint un chiffre
énorme.
■ i ■■■■m», i «i — i i, i ■———mmmmi i i i
L'ATTACHÉ MILITAIRE ALLEMaND
AUX ÉTATS-UNIS
iDe notre càrresponaant particulier)
New-York, 20 juillet.
M. le commandant Etzel, attaché militaire
allemand à Washington, a été reçu avec la
plus grande déférence dans les forts de Riley
et do Leavenworth, dont il a pu étudier les
moindres détails. Les autorités militaires lui
ont fourni tous les renseignements demandés.
Après avoir torminé sa tournée d'études dans
les Etats-Unis, le commandant visitera les
Philippines.
AU VATICAN
LA MORT DU PAPE ""-0"--.,.
Le dernier jour d'un pape. — Toujour,
l'état comateux. — Le dernier adieu.
— Bénédiction suprême. — La fin.
- Les mesures d'ordre à Rome.
- Le marteau du camerlingue.
- Rampolla et Oreglia. —
Chambre mortuaire. — Vi-
sites officielles. — Les hé-
ritiers du pape.
Le pape est mort hier après-midi i
4 heures 4 minutes.
Les nouvelles que nous avions reçues de-
puis la matinée ne laissaient d'ailleurs au-
cune incertitude sur nsuc fatale de la ma-
ladie de Léon XIII. Voici, dans leur ordre
chronologique, les dépêches qui nous sont
parvenues à ce sujet :
(De notre correspondant particulier)
Rome, 20 juillet, S h. 50 matin.
Lo pape vit encore. Telle est la nouvelle qua
la popniation de Rome a apprise, non sans
élonnement, ce matin, à son rÓveil.
Home. 9 h. 30 matin.
A 9 h. les docteurs Mazzoni et Lapponi ont
signé le bulletin suivant :
Pendant la nuit, le pape n'a reposé qu'à do courts
intervalles. L?s conditions générales restent gra,
ves. Pouls, 94; respirations, 32; température, 36'2.
Après avoir rédigé ce bulletin, les médecins
ont eu ensemble un long entretien. Le docteur
Mazzoni a quitté le Vatican à 10 h. 10. Il a dé-
claré qu'il lui avait paru que le pape le recoa-"
naissait.
Dans le coma
Rome, 10 h. matin.
Le pape se trouve dans l'état comateux qui
précède l'agonie. La catastrophe est toujours
imminente.
Rome, 11 h. 55 matin.
Les cardinaux viennent d'être mandés d'ur-
Cliché communiqué par l'Agence Nationale
gence au Vatican. Cet appel indique que le
-pape est à toute extrémité.
Rome, midi 53.
L'affolement d'hiorse renouvelle au Vatican.
Une grande confusion règne dans le palais. La
mouvement des voilure, est très vif sur la
place Saint-Pierre. Les cardinaux arrivent l'un
après J'autre ot les voitures ressortent aussitôt
du Vatican pour aller prendre d'autres cardi-
naux.
L'absolution
Rome, 2 h. 5.
A Il h. 30 l'état du pape s'est aggravé. La
malade a paru entrer en agonie. Tous les car-
dinaux, appelés précipitamment, sont alors
entrés dans la chambre avec les hauts person-
nages de la cour pontificale.
Le cardinal Serafino Vannutelli, assisté par
un maître des cérémonies do la cour pontifi-
cale, a donné au papa l'absolution dernière. C o
moment a été extrêmement émouvant. Autour
du lit se tenaient les cardinaux Oreglia, Ram-
polla, de la Volpe, Vives.
Tout le monde était agenouillé, ainsi quo les
neveux du pape, et s'efforçait de retenir ses
sanglots pour ne pas contrister lo pape, qui
avait encore une conscience assez nette. Léon
XIII adressa quelques paroles au cardinal Ore-
glia, lui confiant le soin de l'Eglise.
A ce moment, Mgr Bisleti lui a demandé sa
bénédiction pour l'antichambre pontificale, qui
était réunie dans la pièce voisine. Le pape donna
sa bénédiction et dit :
— Sia queslo l'itllimo vaie ! ( Que ce soit mon
dernier adieu ! )
Le pape ensuite, avec grand effort, serra les
mains des cardinaux. Après cette crise, il reprit
légèrement. On lui donna plusieurs excitants,
qui le ranimèrent quoique peu.
Les derniers moments
Romo, 2 h. 35 soir.
Vers deux henres, le docteur Mazzoni a été -
appelé d'urgence au Vatican. On dit que c'est
afin qu'il âssislo lo pape a ses derniers mo-
ments.
:' Rome, 3 h. 15 soir.
Les diplomates qui se trouvaient ail Vatican
ont été introduits dans la chambre du pape,
ainsi que sa famille t.t ses neveux.
; Lé pape les à tous béhis avec grand effôrt et
leur a donné sa main à baiser.
Les cardinaux lui ont aussi baisé 1ft main et
se sont ensuite retirés dans la bibliothèque. On ,
prévoit une catastrophe imminente.
Rome, 3 h. 30 soir.
Lo pape a perdu ses facultés mentales. Il n'a
pas reconnu ses neveux qu'il avait préçédom-
:ment ombrassés et bénis..
: Le docteur Mazzoni déclare dans les anti-
chambres quo le pape peut encore avoir deux
heures de vie.
La mort
Le pape a perdu tout3 sa connaissance. On
fait courir à chaque instant !e bruit de sa
mort. Selon le jugement des médecins, la ca
tastropho est imminente.
Rome, i h. 30 soir.
Le pape est mort à 4 heures 4 minutes
APRÈS LA MORT
; nom. ti h. soir. -
, Le pape est mort ave'» sérénité.
Le Dr Lappout, af'rÓs avoir attcnlivemen
ausculté le cœur, a annoncé que lo pape était
-mort. Il était 4 h. 4 m.
; Le grand pénitencier a alors récité les prio.
res des morts. *
Le majordome invita ensuite toutes les per<
sonnes présentes à s'éloigner. Tout lA monde
sortit, à l'exception des neveux de Léon XIII,
du Df Lapponi, du valc* de chambre Centra,
de deux gardes-nobles et du majordome qui
s'approchaducorps et couvrit la visage du
pape d'un voile blanc.
Le comte Pocoi, le D' Lapponi, le valet de
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