Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1909-01-17
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 janvier 1909 17 janvier 1909
Description : 1909/01/17 (N14191). 1909/01/17 (N14191).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7546554v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/01/2013
I
N°14191.—27 Nivôse An 117. CINQ CENTIMES LE NUMÉRO Dimanche 17 Janvier 1909.—N°14191.
N* 14191. —27 Nivôse l Dimanche 17 Janvier 1909. — N* 14191
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TRIBUNE LIBRE ,"
f .U""
impressions de début
— ■ ..Hi.. - ■■
L'orientation à gauche se
confirme, et la majorité ré-
publicaine de la Chambre
semble décidée à secouer sa
torpeur.
Après la volonté du pays,
si ikJtement manifestée aux élections
sénatoriales du 3 janvier, il était diffi-
cile d'en douter.
Nous sommes pourtant franchement
heureux de l'impression causée par les
premiers votes de la session.
Le fait marquant qu'il faut, en effet,
retenir de la première - séance de la
Chambre, c'est le très beau succès de
notre ami Berteaux.
Avec une avance de plus de quarante
voix sur M. Etienne qui, d'ordinaire,
était le premier élu,Berteaux vient d'être
élu à nouveau vice-président, par 304
voix.
Ce succès, que notre ami doit évidem-
ment pour une large part aux sympa-
thies que sa cordiale loyauté lui a mé-
ritées, a aussi une signification très
nette, Berteaux n'ayant bénéficié que
des voix de gauche.
Personne n'ignore, en -effet, la coura-
geuse attitude de Berteaux ; il a, assez
souvent, manifesté sa préférence pour
'la politique du Bloc, et sa répulsion
pour toute politique de recul ou d'élar-
gissement de la majorité à droite. Par
suite des circonstances, et malgré la
maladie qui, malheureusement, l'a éloi-
gné trop longtemps des débats parle-
mentaires, il est devenu pour ainsi dire,
la personniifcation, le champion d'une
politique d'action réformatrice et d'en-
tente républicaine.
Donc, en te faisant le premier vice-
président, en le plaçant à côté du vé-
néré démocrate à qui elle vient de don-
ner un nouveau et légitime témoignage
de gratitude et de confiance, la majori-
té républicaine n'a pu que vouloir don-
ner au ministère, un avertissement et
au Davs une indication.
L'élection Berteaux, dans les condi-
tions où elle s'est faite, c'est la mani-
festation évidente, palpable, d'une vo-
lonté réfléchie du retour à la politique
d'action, et c'est aussi la manifestation
de la confiance de la Chambre dans les
hommes qui n'ont cessé de défendre
cette politique qui nécessite la colla-
boration de tous les républicains de
gauche.
Dans sa séance de jeudi, la Chambre
a également affirmé à nouveau sa vo-
lonté d'action, en élisant à la seconde
vice-présidence M. Dubief, par 264
voix. Nous avons tout lieu d'être satis-
faits des débuts de la nouvelle session,
et J'année commence mieux que n'a fini
la précédente.
A la délégation des Gauches de profi-
ter de cette bonne volonté, de ce désir
de clarté, d'action, à elle d'organiser
la majorité, de préparer le terrain à
une action vigoureuse et rapide, car si
nous voulons que cette législature qui
avait fait naître tant d'espérances, qui
a fait craindre la plus néfaste faillite,
voie la réalisation de quelques réfor-
mes républicaines, il n'est plus une mi-
nute à perdre. Et il faut dans le travail
parlementaire, apporter de. l'ordre, de
la méthode ; il est nécessaire de coor-
donner les efforts, de rapprocher les
groupes de gauche, de leur imposer une
discipline nécessaire, de les habituer
à une collaboration intime journalière.
La liste des réformes à faire aboutir
est longue et nous nous contenterons
des principales,'de celles qui déjà, de-
vant l'une ou l'autre assemblée ont été
discutées ou qui sont prêtes à l'être.
Nous n'avons pas ici à les énumérer.
Souhaitons seulement que ces velléi-
tés d'action ne s'éteignent pas comme
un feu de paille sous l'ironie ou le dé-
dain, souhaitons que par l'énergie
qu'elle apportera à l'aboutissement des
réformes, à la réalisation de son pro-
gramme, que par le spectacle réconfor-
tant de son labeur fécond, la majorité
arrive à redonner confiance à la démo-
cratie, à réveiller cet enthousiasme ré-
publicain qui a assuré nos victoires pas-
sées et qui résulte et ne peut résulter
que de l'idéal républicain en voie de
réalisation, que de l'action républi-
- caine rendue tangible par les améliora-
tions successives, par un peu plus de
justice sociale.
Nous le répétons, if n'est que temps,
si nous ne voulons pas que les élections
par l'impuissance du Parlement et par
l'étrange mmêlem-ent des partis, ne ré-
servent au parti républicain un cruel
réveil. 1
Notre espoir est grand, quand même,
car nous connaissons tout ce qu'il y a
d'enthousiasme et de confiance dans le
cœur des vaillants qui, aujourd'hui, s'im-
• patientent et crient, et nous sentons
bien surfout que s'ils voyaient se re-
commencer l'ère des batailles fructueu-
ses, de toutes les forces de leur être,
ils seraient poussés vers ceux qui mè-
neraient ces combats et ce serait au
bruit, un peu oublié, des acclamations
populaires que seraient salués les élus
qui, de tout leur cœur, de tout leur dé--
vouement auraient travaillé à apporter
leur pierre à l'édifice de justice qu'il
faudra bien finir par construire.
Le gouvernement le comprendra-t-il
et voudra-t-il enfin, sérieusement, s'at-
teler à la réalisation de son vaste pro-
gramme, en s'appuyant sur ceux qui
sont prêts à l'aider, qui souhaitent ar-
demment cette réalisation.
Nous l'espérons, mais nous souhaitons
surtout que la majorité réformatrice qui
existe à la Chambre, qui ne demande
qu'à agir, et qui en a, contre tous, la
puissance, se décide à le faire.
Elle semble le vouloir ; puisse demain
ne pas nous réserver une nouvelle dé-
sillusion !
En tout cas, nous sommes sûrs que
ceux à qui la Chambre vient de donner
une preuve éclatante de confiance et de
sympathie, sont prêts pour la bataille,
et qu'ils demanderont, avec l'autorité
que leur donnent les seules voix répu-
blicaines, que soit vigoureusement me-
née la politique du Bloc de gauche, que
le pays attend et qui, seule, garantira
notre parti contre la plus honteuse des
faillites.
Marcel REGNIER,
'Député de VAllier*
LA POLITIQUE
LES QUESTIONS AFRICAINES
AU PARLEMENT
Du débat qui à été engagé
hier, sur le Maroc, devant la
Chambre, il ressort déjà,
bien que la discussion soit
loin d'être épuisée, que nos
,agents oivils et militaires ont
en Afrique de trop nombreuses et trop
actives initiatives.
Au lieu d'exécuter très docilement les
ordres du gouvernement, ils engagent
des affaires et laissent aux ministres le
souci et au Parlement le soin de les ré-
gler.
M. Jonnart lui-même rappelait hier
que son prédécesseur M. Revoil avait
amorcé l'affaire de l'Ouenza laissant à
d'autres81a peine d'aboutir. Et yoilà
une opération engagée bien à fond sans
autorisation parlementaire.
Au Maroc, M. Regnault prenait la
responsabilité de ruiner Abd el Aziz
aux yeux de ses su jets, sans édifier le
prestige de "la France ; c'est ce que M.
Ribot, dans ses jours d'indépendance
modérée - naturellement — à l'égard
du ministère, appelait j la néfaste poli-
tique de Rabat.
- Bans la Chaouîa — que l'on n'évacue
pas, somme toute — M. le général d'A-
made a organisé tout un système d'oc-
cupations avec accompagnement 'de
télégraphes, téléphones, chemins de
fer, passerelles et ponts — alors que le
Parlement refusait de s'associer à une
politique, 'de conquête.
Dans le Maroc oriental, le général
Lyautey rêve d'exécuter de tels plans
que, pour éviter la réprobation générale,
MM. Clemenceau et Pichon refusent de
les communiquer au public.
Nous comprenons parfaitement les
ministres, mais ils ne pouvaient blâmer
plus sévèrement certaines initiatives.
Dame! l'épreuve publique est cruels !
Lâché avant-hier, M. Jomnart, désa-
voué hier, somme toute, M. le général
Lyautey. Le zèle des gouverneurs et
hauts commissaires africains entraîne
de telles audaces, que nul ne les veut
ratifier. -
La Chambre réfrénera donc comme il
convient les tentatives coupables pour
engager la France sans son aveu.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui samedi :
Lever du soleil à 7 h. 50 ; coucher à 4 h.
30 minutes.
— Matinée : Comédie-Française, matinée
au bénéfioe des victimes de la Sicile et de
la Calabre. — Odéon : Matinée poétique. —
Porte-Saint-Martin : Matinée profession-
nelle. — Gymnase : Samedi de Madame.
AUTREFOIS
Rappel du 17 janvier 1873. - La partie
du centre gauche qui a refusé de se lier
aû centre, droit q tenq um. lêmim*. M-
Christophe a élonné tes raisons invoquées
par le groupe pour ne point se séparer
des gauches. On a lu une lettre du général
Chanzy, déclarant être attaché plus que ja-
mais à la fraction du centre gauche restés
li&.Ie à. la République.
La vente des tableaux et dessins appar-
tenant à Théophile Gautier (première va-
cation), à produit 86.000 francs : un frag-
ment de f Apothéose dTlomère, par Ingres,
a été vendu 3,600 francs ; une Diane, de
Baudry, a monté à 6,000 francs ; un Puvis
de Chavanncs : 1,200 francs.
A la neuvième chambre de police correc-
tionnelle. le président a levé précipitam-
ment la séance ; les platras s'étaient mis
à pleuvoir sur le public, et une poutre ac-
cusait une courbure menaçante. La salle a
été étayée en attendant la réparation.
Mort à Naples du poète italien DaWOn-
garo.
On estime à 115 mètres le total des tra-
vallx de percement effectués actuellement,
dans le Gothard, à Goschcnen, le forêt ren-
contre un granit très dur ; du côté d'Airolo,
on est incommodé par une nappe d'eau.
Deux jeunes auteurs, MM. Alfred Gassier
et Maurice Talmeyr ont présenté à Clunij,
une pièce tirée de la, '\-,'
une pièce tirée de la Vendetta, de Balzac.
M. Octave Feuillet vient de faire rece-
voir à la Comédie-Française, une pièce en
un acte ; l'Acrobate.
Problème matrimonial
La partie nord-est du Canada manque
cle femmes. Dans ce territoire reculé.
il est très difficile à un "homme de
trouver une épouse, car il y a dix pré-
tendants pour une fiancée.Aussi les
autorités de cette contrée, d'accord avec
la Compagnie du Chemin de fer cana-
dien du Pacifique, ont trouvé un moyen,
qui, certes ne rappelle en rien oélui dont
les Romains usèrent vis-à-vis des Sa-
bines .mais qui ne manque pourtant pas
d'ingéniosité.
Un passage entièrement gratuit est
délivré aux ouvriers du territoire nord-
est, lorsqu'ils prétendent voyager à la
recherche d'une épouse. Au. retour, ni
eux, ni leurs femmes n'ont à payer
leurs places s'ils présentent le certificat
de mariage.
Mot d'auteur
Un poète plein de talent et. été fines-
se qui fait, en ce moment répéter une
.pièce en vers, voulant mener le travail
bon train, arrive l'autre jour au théâtre
à l'heure indiquée. Les acteurs de leur
côté, furent particulièrement inexacts ,
et comme X. s'en plaignait, ils tirèrent
leurs montres et soutinrent qu'ils
étaient venus assez tôt.
— Allons, conclut notre ami ; mettons
que vous avez de mauvaises montres à
répétition, et n'en parlons plus !
Ses boutades
- Monsieur le président, disait l'au-
tre jour un solliciteur à notre Premier,
vous avez bien voulu me promettre de
faire quelque chose pour moi : Eh bien,
telle pilace est vacante.
— Elle est vacante ? reprend le pré-
sident. alors que voulez-vous que j'y
fasse ?. Apprenez donc que quand une
place est vacante, elle est. déjà don-
née. Q
- ———————.———.
A SON POSTE
M. Jonnart, vice-roi d'Algérie, président
du Conseil d'administration de la Société
du Canal de Suez, député et président du
Conseil général du Pas-de-Calais, se mon-
tra quelque peu interloqué par l'accueil
plus bruyant que sympathique que lui fit la
Chamibre.
Si nous ne craignions de commettre un
crime de lèse vice-majesté nous dirions
que M. Jonnart se prit à bafouiller vice-
royalement.
Il eut un mot d'une ing'énuité char-
mante : « Il n'est pas bon, dit-il, que je sois
trop souvent absent de mon poste. »
Sire, vous avez raison, et il est fâcheux
que vous ne vous en soyez pas rendu
compte plus tôt.
Cela vous aurait évité ce rappel à l'or-
dre, plutôt sévère, de M. Clemenceau au-
jourd'hui votre supérieur hiérarchique :
« Quand un homme est doué d'une acti-
vité à ce point dévorante que les occupa-
tions parlementaires — déjà fort absorban-
tes — ne lui suffisent pas et qu'il sollicite
d'y joindre les soucis d'une vice-royauté,
est-ce trop exiger que d'attendre de lui l'ac-
complissement au moins apparent de quel-
ques-uns de ses devoirs ?
« Quel beau champ de travail pour M.
Jonnart s'il avait été seulement capable, de
.comprendre que, s'étant fait nommer gou-
verneur, il. ne lui manquait plus que d'en
exercer les fonctions. » -
(G. Clemenceau, le Bloc, 28 avril 1901).
Après cela on comprendra sans peine
que M. le président du conseil malgré sa
superbe et sa désinvolture se trouvait un
peu gêné pour recommander M. Jonnart à
la bienveillante attention de la Chambre.
L'administration de la Marine
L ACCIDENT QUOTIDIEN
M. Picard « étudie » toujours. *
Et pendant qu'il médite sur ses « étu-
des » nos cuirassés continuent à s'offrir
leur petit accident quotidien.
Hier, dans l'arsenal de Toulon, le Ter..
rible, mouillé devant le quai de l'atelier
des machines, faillit couler.
Le Terrible venait d'être réparé pour l'ac-
cident qu'il eut il y a deux mois.
Ses voies d'eau avaient été aveuglées.
Mal évidemment, puisque toutes se sont
irouvertes, avec un ensemble touchant,
avant même que le Terrible soit sorti du
port..
Les, dégâts |lê» chauf-
feries et tes machines ayant été envahies.
A grand peine le garde-côte fut ramené
dans un bassm des invalides.
L'honorable ministre de la marine a esti-
mé que des sanctions s'imposaient.
Sans hésiter, il a pris une mesure énergi-
que. -
Il a télégraphié de débaptiser immédia-
tement le Terrible.
Celui-ci s'appellera désormais le Récidi-
viste.:
»
Mais comment donc !
Lorsque M. Berteaux mit en demeure M.
le président du conseil — qui prudemment
se tenait coi — de donner son avis au su-
jet de la mise à l'ordre du jour de la con-
vention de l'Ouenza, M. Clemenceau décla-
ra notamment : « Il est naturel que M.
Jonnart, en butte à des insinuations calom-
nieuses désire s'expliquer le plus tôt pos-
sible. t)
Mais, comment donc !
Nous prions simplement M. le président
du conseil de remarquer que les « insinua-
tions les plus calomnieuses » dirigées con-
tre M. Jonnart l'ont été précisément par Ai.
Clemenceau. ""-.
Ce ne sont pas les adversaires de la con-
vention-de TOùenza, c'est M. Clemenceau
lui-même qui a écrit que M. Jonnart était
« un de ces jeunes mélinistes du Parlement
qui, voyant dans la politique d'abord l'oc-
cupation des prébendes conçoivent le gou-
vernement comme un simple marché d'inté-
rêts.. b),
(Le Bloc, 21 avril 1901).
Et encore :
« M. Jonnart n'est pas de ceux qui tien-
nent tête aux puissances quand il peut être
avantageux de s'employer à leur profit. »
(Le Bloc, 21 avril 1901.1
Et enfin :
« Les avertissements n'ont pas manque.
S'il était demeuré à son poste — qu'il
avait quitté pour Paris avant de croiser de-
vant Antibes — il eut pu être informé.
Il l'eût été certainement s'il avait exercé
ses fonctions avec une dose moyenne de
sagacité et de prudence. »
(Le Bloc, 21 avril 1901.)
Nous qui ne connarss-ons pas M. Jon-
nart et qui n'avons aucune animosité per-
sonnelle contre lui, nous comprenons par-
faitement que le « vice-roi magnifique » ait
le désir ardent de se disculper des accusa-
tions portées contre lui par M. Clemen-
ceau.
Et nous aurions été ravis d'autre part de
voir M. le prési-dent du conseil venir pren-
dre chaleureusement la défense d'un fonc-
tionnaire, dont il a brossé naguère un por-
trait si flatteur.
La répétition générale d'hier nous a mis
en goût.
Nous attendons impatiemment la pre-
mière.
POUR LA PATRIE
Il est de mioide, décidément, dans le
monde des grands fournisseurs, de couvrir
du drapeau national les opérations les plus
scandaleuses.
C'est le sabotage tricolore.
Du monde des « gros fournisseurs ii,
cette détestable habitude s'est répandue
dans les milieux gouvernementaux et, cha-
que fois que M. Thomson alLait présider
un enterrement national des victimes de
l'administration de la marine, il prononçait
solennellement les mots consacrés : « Pour
la patrie ».
M. Jonnart, 'à son tour, dans son essai de
réhabilitation de l'Ouenza, crut devoir fai..e
vibrer la corde patriotique, et associer M.
Krupp à notre défense nationale.
A parler franc, cette manie devient in-
supportable, et il faut être bien en peine
de 1^ qualité d'une marchandise, pour ne
pouvoir l'écouler que dissimulée sous ?es
plis du drapeau.
Pour nous qui sommes patriotes dans
la véritable acception du terme — comme
l'étaient nos aînés les Jacobins de 1793 —
nous n'admettons pas plus que le drapeau
de Valmy serve de haillon à la démence de
M. Hervé, que ft fanion aux convoitises de
la tribu des Djebel-Ouenzistes.
- 0-0 -
En voulez-vous des promesses ?
Qui donc oserait encore prétendre que M.
Clemenceau n'a pas souci des réformes
tant attendues par la démocratie ?
Il vient de montrer d'éclatante manière
combien eUes lui tiennent au cœur.
Savourez plutôt ces petits dialogues :
M. Charles-Benoist. — Il importe que la
Chambre s'occupe de la réforme électorale
'dans les premiers jours de mars.
M. Clemenceau. — Je n'y fais pas d'op-
position.
M. Labori. — Le gouvernement songe-t-
il aussi à la réforme des conseils de
guerre ?
M. Clemenceau. — Le gouvernement
s'engage à nouveau à laire aboutir cette
réforme dans cette législature.
M. Massé. — Et le projet de loi sur l'en-
seignement privé? Viendra-t-il avant 1910 ?
M. Clemenceau. "— Parfaitement.
M. Clemenceau — comme le montrent ses
réponses extraites de l'Officiel — s'est en-
gagé à tout ce qu'on a voulu.
Il suffisait de demander pour obtenir.
des promesses.
Malheureusement, il y a longtemps que
M. Clemenceau promet. Il y a bien long-
temps.
Il fut même jusqu'ici tellement occupé à
promettre qu'il n'a pas trouvé le loisir 1e
réaliser la moindre de ces promesses.
Barbier parlementaire, il réformera gra-
tis. demain.
La Chambre se contentera-t-elle des nou-
velles assurances que M. Clemenceau con-
tinué à lui prodiguer avec une si humble
docilité
Si l'avenir procède 63 jftKîïraif-
être dangereux. -
A LA CHAMBRE
■ ■
Les affaires du Maroc
« ■»<<■ > -
La Chambre accorde l'urgence à deux propositions : l'une
sur les incompatibilités; l'autre sur le vote personnel.
- Le débat sur le Maroc.
M. Brisson préside.
Au début de la séance, M. Zévaès soulève
un assez vif iniedent en déposant une pro-
position de loi relative aux incompatibilités
parlementaires, et destinée à remplacer
celle qui avait le même objet, et qu'il avait
déposée il y a une dizaine de jours.
La proposition de M. Zévaès, en sept ar-
ticles ,reproduit, dans ses dispositions es.
sentielles, le projet déposé autrefois par le
cabinet Bourgeois.
M. Zévaès. — Reprenant le projet de loi, dé-
posé en 1895 par le ministère Bourgeois et
rapporté favorablement par M. Maurice Faure.
nous demandons que les députés ou sénateurs
ne puissent faire partie des conseils d'adminis-
tration de sociétés financières ou industrielles,
de syndicats d'émission, ni plaider pour ces
sociétés et syndicats. Nous demandons en ou-
tre qu'ils ne puissent exercer des fonctions pu-
bliques. (Très bien 1 Très bien 1 à l'extrême-
gauche.)
M. Grodidier. — Et aux politiciens, qu'est-ce
que vous interdirez f
M. Zévaès. — Les politiciens dépendent du
suffrage universel.
M. Grosdidier. — Les autres aussi.
M. Zeraes. — Ils sont ici pour défendre leurs
programmes et non les intérêts de sociétés
financières. Il y a assez longtemps que la ma-
jorité du Parlement est rendue responsable
des tripotages de la minorité de ses membres.
M. le président. Je ne puis vous permettre
de vous exprimer dans ces termes: vous m'o-
bligeriez à vous rappeler à l'ordre.
M. Zévaès. — Je rappelais un souvenir his-
torique. Je faisais allusion, à des laits qui de-
puis vingt ans se sont déroulés dans les as-
semblées passées.
M. Lasies. - Merci pour la République.
M. Zévaès. - Elle n'est pas responsable des
fautes de quelques républicains.
M. Zévaès conclut en s'écriaftt :
Il vous appartient de dire si vous entendez
que les élus du peuple, dont vous avez assuré
l'indépendance et la dignité, se consacrent tout
entiers à leur mandat, et optent entre la poli-
tique et les affaires, entre le Parlement et les
conseils, d'administration. (Applaudissements à
gauche.)
M. OhtaJrles Benoist. président de la com-
mission du suffrage universel, expliqua le
retard du dépôt du rapport par la. maladie
du député qui s'en était chaTgé, M. Chion-
Ducollet..
Je ne fais personnellement partie d'aucun
conseil e. d'administratiop d'aucune nature. Mais
supposez que les hasards de la vie m'aient
amené à prendre la direction et la gérance
d'une grande publioation ; m'inberdiriez-vous
de siéger à la Chambre ? Il s'agit donc de
questions d'espèce qu'il faut examiner avec
soin. "Et puis il importe de se préoccuper du
recrutement des assemblées parlementaires.
Quand on aura interdit fii telle ou telle caté-
gorie de citoyens de faire partie du Parlement,
où donc irez-vous chercher des députés 7 (Inter-
ruptions à l'extrême-gauche.)
M. Grosdidier. — Sous les ponts. (On rit.)
M. le président de la commission. — Il faut
maintenir à un certain niveau le personnel
parlementaire. (Interruptions.)
M. Robin. r-- Les ouvriers valent bien les
autres.
M. le président de la commission. — Certes,
mais ils ne peuvent pas prétendre représenter
toute la nation. Le travail intellectuel doit avoir
se, place dans nos assemblées. (Interruptions
à l'extrême-gauche.)
M. Zévaès se plaint encore du retard
qu'on a mis à déposer le rapport sur sa
proposition.
Pair 447 voix contre 73, l'urgence est dé-
clarép,, -
La proposition est renvoyée à la commis-
sion du suffrage universel.
LE VOTE PAR PROCURATION
M. Lasies demanda l'urgence pour une
proposition exigeant des diéputés le vote
personnel dans tous les scrutins portant
augmenbaltion d'un crédit ou engageant la
confiance de la Chambre.
M. Lasies. — C'est qu'il y a dans cette Cham-
bre quelques ministériels par vocation, anges
gardiens de tous les gouvernements successifs,
qui se trouvent quelquefois pris entre leur fer-
veur ministérielle et leur devoir de mandataire
du peuple.
En séance, l'ange gardien vote pour le gou-
vernement et, le lendemain, le député rectifie
son vote pour les électeurs. Nous aurions dû
depuis longtemps réagir contre ces pratiques.
Soyons des ouvriers aé~, montrorfs-nous
assidus au chantier et noug pourrons dire au
suffrage universel : nous l'avons bien gagné !
A la majorité de 384 voix contre 153, sur
537 votants, l'urgence en faveur de la pro.
position de résolution de' M. Lasies est dé-
clarée.
Cette proposition est renvoyée à la com-
mission du règlement.
LA QUESTION DU MAROC
On abordie la discussion des crédits ,sup-
plémentaires du Maroc et des interpella-
tions relatives au même suijet.
M. Jules Delafosse. — Je crois que nous
jouons au Maroc l'avenir de l'Afrique française.
Si par notre faiblesse inexcusable nous lais-
sions une influence étrangère s'immiscer dans
lo gouvernement chérîften, nous perchions ln.
failliblement l'Algérie et toutes nOn possessions
dcl l'Afrique occidentale. Et voici POU)'\fuoi.
J'ai toujours pensé que la France perdrait,
tôt ou tard, ses possessions coloniales d'Asie,
d'Amérique et d'Océanie, parce que c'est dans
la force des choses et la fatalité des événements.
Mais la France peut les perdre sans en subir
un dommage mortel.
Tandis qu'en Afrique il n'en va pas de même.
L'Afrique est le grand réservoir de la France
d* demain, non seulement en produits, mais
en hommes. La natalité de la France décroît
chez nous, et il est inévitable que notre pays,
chez nouà s, la fois le plus riche en biens et le
aui est
plus pauvre en habitants, soit asservi s'il ne
peut opposer aux convoitises des ressources
autres que celles de son propre fonds.
Ces ressources, l'Afrique seule doit les don-
ner car un jour elle peut mettre à notre dis-
position des contingents énormes qui assure-
ront nôtre salut.
M. Lucien Hubert présente des observai
tîons d''un ordre différent.
M. Jlubert. - Les. ases que nous avions
données à l'Acte d'Algésiras, dont j'ai eu l'hon.
neur d'être le rapp, jurent; et doivent
être conservées : reiieeet-, er linté«
grité 1& guiss^fcé fihéfifiçnjae, ^JabHr l'or-
dre au Maroc dans l'intérêt du Maroc avani
tout.
Vous n'avez pas réussi jusqu'ici, mais nous
restons les maîtres de la situation, et le Maroc
suivra nécessairement notre sillage. M. de Bü.
low disait dans une interview que le temps
travaille pour la paix. Au Maroc, le temps
travail-le pour la France. -
Le monde musulman, là et ailleurs, com-
mence à apprécier la valeur de certains en-
gagements et de certaines amitiés. S'il regarde
fi Constantinople, c'est le rayonnement du gé-
nie français qu'il verra luire. (Très bien 1 Très
bien I)
Ne troublez pas cette vision. Appliquez l'Acte
d'Algésiras avec doigté, avec souplesse : no
déchirons pas les traités, mais rappelons-nous
qu'oti n'arrête pas l'évolution historique d'un
peuple avec un mur de papier, suivant la pa-i
rôle de la Gazette de Cologne.
La seule chose que je vous demande, c'est
que personne uo puisse prendre le Maroc COU
tre nous.
Eraîu, M. Jaurès renouvelle les critiques
qu-'il a mamtes fois adressées à la politique
marocaine du gouvernement.
Il réclame l'évacuation complète du OOfi
rttoire marocain, y compris Oudjda.
ïl réclame la publication du rapport du
général Lyautey sur l'organisation de la
police au Maroc.
M. Pichon. — Ce rapport ne sera pas publiS
tant que je serai ministre.
Je suis responsable devant les Chmbrcs, qtt:
jugeront :ncs actes, mais Je déclare que j'af
une responsabilité particulière qui ne me per-
met pas de laisser instituer à la Uibuce un t).
bat sur ui: document de ce genre.
A l'heure où la Chambre - sera appelée à sa
prononoer sur l'organisation de îa police dans
13 Maroc oriental et sur les dépenses qu'elle
comportera, je lui fournirai 1er. documents né-
cessaires ; mais quant au texte du rapport dar
M. le général Lyautey, qui touche à la politi-
que française en Europe, je no le publierai
pas. (Vifs applaudissements sur un grand nom-
bre de bancs.)
M. Jaurès. — Cest entendu. Je suis bien
obligé de constater que, par ses applaudisse-
ments, la majorité vient d'engager sa respon-
sabilité dans le refus que lui oppose le gou-
vernement de communiquer un document. C'ess
entendu : jusqu'au bout, vous no serez jamais-
saisis que de documents tardifs, intervenant
quand la partie est compromise.
La situation est compliquée et incertaine, e~
vous n'avez pas le droit de négliger aucun élé-
ment d'entente et de paix. Ayant cette boaoat,
fortune que la France et l'Allemagne peuvent
pratiquer en Orient une action — non pas COm-
binée — mais spontanément parallèle, vous n'a-
vez pas le droit de diminuer cette chance.
Vous n'êtes pas, en effet, au bout des diffi*
cul tés. Il faudra arracher la Serbie de l'étouffe-
ment économique où elle languit, et obu.
pour la Bosnie et l'Herzégovine un régime do
garanties vraiment constitutionnelles, pour tou-
tes ces solutions, vous avez besoin d'une Euro-
pe qui ne soit pas divisée contre clle-môrnft
par ce grave problème marocain.
Je comprendrais que vous risquiez les chaa*
ces de paix, trop rares, hélas l en Europe, si
vous aviez la folie de vouloir, par tous le
moyens, installer une influence prédominante
au Maroc.
Mais vous ne le voulez pas. Vous voulez V-
en aller. Faites-le donc ; car en ne le faisant
pas vous prolongez un état d'incertitude et de
malaise qui va affaiblir, pour les difficultés dg
demain, votre autorité morale.
Le soupçon subsistera que vous aidez l'AU.
triche, parce qu'elle vous a promis une corn.
pensation marocaine.
Voilà pourquoi, et pour l'honneur de votre
signature, et pour la grande action morale que
vous devez exercer en Orient, il faut en finir,
avec ce haillon de la politique marocaine. (Ap-
plaudissements à l'extrême-gauche.)
J'ai maintenant à aborder un nouvel ordre
d idées. Je demande à la Chaçnbre la permis-
sion de remettre à la prochaine séance met
observations. (Assentiment.)
La suite du discours de M. Jaurès est
renvoyée à ta prochaine séance de la Cherry
bre, après-demain lundi, deux heures.
il'-
AU SÉNAT
DISCOURS DU PRESIDENT
M. Antonin Dubost, président, en prek
nant placé au fauteuil, prononce le dis-
cours d'usage. Il se félicite du succès ré-
publicain des élections qui viennent d'avoit
lieu.,
Il envoie ensuite le salut du Sénat à la
nation italienne si cruellement éprouvée,,
après avoir insisté sur l'influence pacifique
de la France dans le monde.
La France, messieurs, voit dans ces senti.
ments des autres pays a son égard un gage de
-paix puur le monde ; elle fait tout pour les mé-
riter. et en ce moment même elle y répond dflt
son mieux en s'associant de toutes ses forcae
au grand acle de solidarité humaine qui a pouc
but d'atténuer les soufirances éprouvées pue
notre grande sœur latine, si cruellement rava.
(gée par des forces de ruine et de destruction
oui semblent s'acharner sur son sor ennobli de
tant de souvenirs et de beautés 1 (Applaudisse-
ments unanimes.)
J'étais bien certain, messieurs, de traduite
fidèlement vos sentiments unanimes, en adres*
sant pendant l'intersession, au Sénat italien;
et par lui à l'Italie tout entière l'expression (M
vos condoléances douloureusement émues.
En terminant, messieurs, je demande au S6.
nat la permission d'adresser en son nom des re-
merciements à ses vénérés doyens d'âge et au
bureau provisoire. (NoUveaux et vifs a.pplau.,
dissements.)
Après le discours du président, le Sénat
procède à ÎSrVërification des pouvoirs.
Il valide les élections de la. plupart 'detf
départements, et renvoie à une séance
ultérieure l'examen des dossiers de la
Haute-Saône, des Rouches-du-Rhône et de
l'Inde.
Le Sénat s'ajourne ensuite & mardi 3
heures.
1 ■ ■ # m
L'escadre américaine ;
,. à Marseille
Marseille, 15 janvier..
Le navire américain Georgiaest arrivé
Ce rnatin à Marseille.
Une grande animation règne sur les
quais.
A 11 Ii, g} demie, M. Penipat. adminjs-
N°14191.—27 Nivôse An 117. CINQ CENTIMES LE NUMÉRO Dimanche 17 Janvier 1909.—N°14191.
N* 14191. —27 Nivôse l Dimanche 17 Janvier 1909. — N* 14191
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N -1 ..- .-
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ADMINISTRATION & RÉDACTION ; 53, rue du Château-d'Eau : Téléphone 438.-14. — De 9 heures du soir à 2 heures du matin, 123, rue Montmartre : Téléphone 143-93
TRIBUNE LIBRE ,"
f .U""
impressions de début
— ■ ..Hi.. - ■■
L'orientation à gauche se
confirme, et la majorité ré-
publicaine de la Chambre
semble décidée à secouer sa
torpeur.
Après la volonté du pays,
si ikJtement manifestée aux élections
sénatoriales du 3 janvier, il était diffi-
cile d'en douter.
Nous sommes pourtant franchement
heureux de l'impression causée par les
premiers votes de la session.
Le fait marquant qu'il faut, en effet,
retenir de la première - séance de la
Chambre, c'est le très beau succès de
notre ami Berteaux.
Avec une avance de plus de quarante
voix sur M. Etienne qui, d'ordinaire,
était le premier élu,Berteaux vient d'être
élu à nouveau vice-président, par 304
voix.
Ce succès, que notre ami doit évidem-
ment pour une large part aux sympa-
thies que sa cordiale loyauté lui a mé-
ritées, a aussi une signification très
nette, Berteaux n'ayant bénéficié que
des voix de gauche.
Personne n'ignore, en -effet, la coura-
geuse attitude de Berteaux ; il a, assez
souvent, manifesté sa préférence pour
'la politique du Bloc, et sa répulsion
pour toute politique de recul ou d'élar-
gissement de la majorité à droite. Par
suite des circonstances, et malgré la
maladie qui, malheureusement, l'a éloi-
gné trop longtemps des débats parle-
mentaires, il est devenu pour ainsi dire,
la personniifcation, le champion d'une
politique d'action réformatrice et d'en-
tente républicaine.
Donc, en te faisant le premier vice-
président, en le plaçant à côté du vé-
néré démocrate à qui elle vient de don-
ner un nouveau et légitime témoignage
de gratitude et de confiance, la majori-
té républicaine n'a pu que vouloir don-
ner au ministère, un avertissement et
au Davs une indication.
L'élection Berteaux, dans les condi-
tions où elle s'est faite, c'est la mani-
festation évidente, palpable, d'une vo-
lonté réfléchie du retour à la politique
d'action, et c'est aussi la manifestation
de la confiance de la Chambre dans les
hommes qui n'ont cessé de défendre
cette politique qui nécessite la colla-
boration de tous les républicains de
gauche.
Dans sa séance de jeudi, la Chambre
a également affirmé à nouveau sa vo-
lonté d'action, en élisant à la seconde
vice-présidence M. Dubief, par 264
voix. Nous avons tout lieu d'être satis-
faits des débuts de la nouvelle session,
et J'année commence mieux que n'a fini
la précédente.
A la délégation des Gauches de profi-
ter de cette bonne volonté, de ce désir
de clarté, d'action, à elle d'organiser
la majorité, de préparer le terrain à
une action vigoureuse et rapide, car si
nous voulons que cette législature qui
avait fait naître tant d'espérances, qui
a fait craindre la plus néfaste faillite,
voie la réalisation de quelques réfor-
mes républicaines, il n'est plus une mi-
nute à perdre. Et il faut dans le travail
parlementaire, apporter de. l'ordre, de
la méthode ; il est nécessaire de coor-
donner les efforts, de rapprocher les
groupes de gauche, de leur imposer une
discipline nécessaire, de les habituer
à une collaboration intime journalière.
La liste des réformes à faire aboutir
est longue et nous nous contenterons
des principales,'de celles qui déjà, de-
vant l'une ou l'autre assemblée ont été
discutées ou qui sont prêtes à l'être.
Nous n'avons pas ici à les énumérer.
Souhaitons seulement que ces velléi-
tés d'action ne s'éteignent pas comme
un feu de paille sous l'ironie ou le dé-
dain, souhaitons que par l'énergie
qu'elle apportera à l'aboutissement des
réformes, à la réalisation de son pro-
gramme, que par le spectacle réconfor-
tant de son labeur fécond, la majorité
arrive à redonner confiance à la démo-
cratie, à réveiller cet enthousiasme ré-
publicain qui a assuré nos victoires pas-
sées et qui résulte et ne peut résulter
que de l'idéal républicain en voie de
réalisation, que de l'action républi-
- caine rendue tangible par les améliora-
tions successives, par un peu plus de
justice sociale.
Nous le répétons, if n'est que temps,
si nous ne voulons pas que les élections
l'étrange mmêlem-ent des partis, ne ré-
servent au parti républicain un cruel
réveil. 1
Notre espoir est grand, quand même,
car nous connaissons tout ce qu'il y a
d'enthousiasme et de confiance dans le
cœur des vaillants qui, aujourd'hui, s'im-
• patientent et crient, et nous sentons
bien surfout que s'ils voyaient se re-
commencer l'ère des batailles fructueu-
ses, de toutes les forces de leur être,
ils seraient poussés vers ceux qui mè-
neraient ces combats et ce serait au
bruit, un peu oublié, des acclamations
populaires que seraient salués les élus
qui, de tout leur cœur, de tout leur dé--
vouement auraient travaillé à apporter
leur pierre à l'édifice de justice qu'il
faudra bien finir par construire.
Le gouvernement le comprendra-t-il
et voudra-t-il enfin, sérieusement, s'at-
teler à la réalisation de son vaste pro-
gramme, en s'appuyant sur ceux qui
sont prêts à l'aider, qui souhaitent ar-
demment cette réalisation.
Nous l'espérons, mais nous souhaitons
surtout que la majorité réformatrice qui
existe à la Chambre, qui ne demande
qu'à agir, et qui en a, contre tous, la
puissance, se décide à le faire.
Elle semble le vouloir ; puisse demain
ne pas nous réserver une nouvelle dé-
sillusion !
En tout cas, nous sommes sûrs que
ceux à qui la Chambre vient de donner
une preuve éclatante de confiance et de
sympathie, sont prêts pour la bataille,
et qu'ils demanderont, avec l'autorité
que leur donnent les seules voix répu-
blicaines, que soit vigoureusement me-
née la politique du Bloc de gauche, que
le pays attend et qui, seule, garantira
notre parti contre la plus honteuse des
faillites.
Marcel REGNIER,
'Député de VAllier*
LA POLITIQUE
LES QUESTIONS AFRICAINES
AU PARLEMENT
Du débat qui à été engagé
hier, sur le Maroc, devant la
Chambre, il ressort déjà,
bien que la discussion soit
loin d'être épuisée, que nos
,agents oivils et militaires ont
en Afrique de trop nombreuses et trop
actives initiatives.
Au lieu d'exécuter très docilement les
ordres du gouvernement, ils engagent
des affaires et laissent aux ministres le
souci et au Parlement le soin de les ré-
gler.
M. Jonnart lui-même rappelait hier
que son prédécesseur M. Revoil avait
amorcé l'affaire de l'Ouenza laissant à
d'autres81a peine d'aboutir. Et yoilà
une opération engagée bien à fond sans
autorisation parlementaire.
Au Maroc, M. Regnault prenait la
responsabilité de ruiner Abd el Aziz
aux yeux de ses su jets, sans édifier le
prestige de "la France ; c'est ce que M.
Ribot, dans ses jours d'indépendance
modérée - naturellement — à l'égard
du ministère, appelait j la néfaste poli-
tique de Rabat.
- Bans la Chaouîa — que l'on n'évacue
pas, somme toute — M. le général d'A-
made a organisé tout un système d'oc-
cupations avec accompagnement 'de
télégraphes, téléphones, chemins de
fer, passerelles et ponts — alors que le
Parlement refusait de s'associer à une
politique, 'de conquête.
Dans le Maroc oriental, le général
Lyautey rêve d'exécuter de tels plans
que, pour éviter la réprobation générale,
MM. Clemenceau et Pichon refusent de
les communiquer au public.
Nous comprenons parfaitement les
ministres, mais ils ne pouvaient blâmer
plus sévèrement certaines initiatives.
Dame! l'épreuve publique est cruels !
Lâché avant-hier, M. Jomnart, désa-
voué hier, somme toute, M. le général
Lyautey. Le zèle des gouverneurs et
hauts commissaires africains entraîne
de telles audaces, que nul ne les veut
ratifier. -
La Chambre réfrénera donc comme il
convient les tentatives coupables pour
engager la France sans son aveu.
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
Aujourd'hui samedi :
Lever du soleil à 7 h. 50 ; coucher à 4 h.
30 minutes.
— Matinée : Comédie-Française, matinée
au bénéfioe des victimes de la Sicile et de
la Calabre. — Odéon : Matinée poétique. —
Porte-Saint-Martin : Matinée profession-
nelle. — Gymnase : Samedi de Madame.
AUTREFOIS
Rappel du 17 janvier 1873. - La partie
du centre gauche qui a refusé de se lier
aû centre, droit q tenq um. lêmim*. M-
Christophe a élonné tes raisons invoquées
par le groupe pour ne point se séparer
des gauches. On a lu une lettre du général
Chanzy, déclarant être attaché plus que ja-
mais à la fraction du centre gauche restés
li&.Ie à. la République.
La vente des tableaux et dessins appar-
tenant à Théophile Gautier (première va-
cation), à produit 86.000 francs : un frag-
ment de f Apothéose dTlomère, par Ingres,
a été vendu 3,600 francs ; une Diane, de
Baudry, a monté à 6,000 francs ; un Puvis
de Chavanncs : 1,200 francs.
A la neuvième chambre de police correc-
tionnelle. le président a levé précipitam-
ment la séance ; les platras s'étaient mis
à pleuvoir sur le public, et une poutre ac-
cusait une courbure menaçante. La salle a
été étayée en attendant la réparation.
Mort à Naples du poète italien DaWOn-
garo.
On estime à 115 mètres le total des tra-
vallx de percement effectués actuellement,
dans le Gothard, à Goschcnen, le forêt ren-
contre un granit très dur ; du côté d'Airolo,
on est incommodé par une nappe d'eau.
Deux jeunes auteurs, MM. Alfred Gassier
et Maurice Talmeyr ont présenté à Clunij,
une pièce tirée de la, '\-,'
une pièce tirée de la Vendetta, de Balzac.
M. Octave Feuillet vient de faire rece-
voir à la Comédie-Française, une pièce en
un acte ; l'Acrobate.
Problème matrimonial
La partie nord-est du Canada manque
cle femmes. Dans ce territoire reculé.
il est très difficile à un "homme de
trouver une épouse, car il y a dix pré-
tendants pour une fiancée.Aussi les
autorités de cette contrée, d'accord avec
la Compagnie du Chemin de fer cana-
dien du Pacifique, ont trouvé un moyen,
qui, certes ne rappelle en rien oélui dont
les Romains usèrent vis-à-vis des Sa-
bines .mais qui ne manque pourtant pas
d'ingéniosité.
Un passage entièrement gratuit est
délivré aux ouvriers du territoire nord-
est, lorsqu'ils prétendent voyager à la
recherche d'une épouse. Au. retour, ni
eux, ni leurs femmes n'ont à payer
leurs places s'ils présentent le certificat
de mariage.
Mot d'auteur
Un poète plein de talent et. été fines-
se qui fait, en ce moment répéter une
.pièce en vers, voulant mener le travail
bon train, arrive l'autre jour au théâtre
à l'heure indiquée. Les acteurs de leur
côté, furent particulièrement inexacts ,
et comme X. s'en plaignait, ils tirèrent
leurs montres et soutinrent qu'ils
étaient venus assez tôt.
— Allons, conclut notre ami ; mettons
que vous avez de mauvaises montres à
répétition, et n'en parlons plus !
Ses boutades
- Monsieur le président, disait l'au-
tre jour un solliciteur à notre Premier,
vous avez bien voulu me promettre de
faire quelque chose pour moi : Eh bien,
telle pilace est vacante.
— Elle est vacante ? reprend le pré-
sident. alors que voulez-vous que j'y
fasse ?. Apprenez donc que quand une
place est vacante, elle est. déjà don-
née. Q
- ———————.———.
A SON POSTE
M. Jonnart, vice-roi d'Algérie, président
du Conseil d'administration de la Société
du Canal de Suez, député et président du
Conseil général du Pas-de-Calais, se mon-
tra quelque peu interloqué par l'accueil
plus bruyant que sympathique que lui fit la
Chamibre.
Si nous ne craignions de commettre un
crime de lèse vice-majesté nous dirions
que M. Jonnart se prit à bafouiller vice-
royalement.
Il eut un mot d'une ing'énuité char-
mante : « Il n'est pas bon, dit-il, que je sois
trop souvent absent de mon poste. »
Sire, vous avez raison, et il est fâcheux
que vous ne vous en soyez pas rendu
compte plus tôt.
Cela vous aurait évité ce rappel à l'or-
dre, plutôt sévère, de M. Clemenceau au-
jourd'hui votre supérieur hiérarchique :
« Quand un homme est doué d'une acti-
vité à ce point dévorante que les occupa-
tions parlementaires — déjà fort absorban-
tes — ne lui suffisent pas et qu'il sollicite
d'y joindre les soucis d'une vice-royauté,
est-ce trop exiger que d'attendre de lui l'ac-
complissement au moins apparent de quel-
ques-uns de ses devoirs ?
« Quel beau champ de travail pour M.
Jonnart s'il avait été seulement capable, de
.comprendre que, s'étant fait nommer gou-
verneur, il. ne lui manquait plus que d'en
exercer les fonctions. » -
(G. Clemenceau, le Bloc, 28 avril 1901).
Après cela on comprendra sans peine
que M. le président du conseil malgré sa
superbe et sa désinvolture se trouvait un
peu gêné pour recommander M. Jonnart à
la bienveillante attention de la Chambre.
L'administration de la Marine
L ACCIDENT QUOTIDIEN
M. Picard « étudie » toujours. *
Et pendant qu'il médite sur ses « étu-
des » nos cuirassés continuent à s'offrir
leur petit accident quotidien.
Hier, dans l'arsenal de Toulon, le Ter..
rible, mouillé devant le quai de l'atelier
des machines, faillit couler.
Le Terrible venait d'être réparé pour l'ac-
cident qu'il eut il y a deux mois.
Ses voies d'eau avaient été aveuglées.
Mal évidemment, puisque toutes se sont
irouvertes, avec un ensemble touchant,
avant même que le Terrible soit sorti du
port..
Les, dégâts |lê» chauf-
feries et tes machines ayant été envahies.
A grand peine le garde-côte fut ramené
dans un bassm des invalides.
L'honorable ministre de la marine a esti-
mé que des sanctions s'imposaient.
Sans hésiter, il a pris une mesure énergi-
que. -
Il a télégraphié de débaptiser immédia-
tement le Terrible.
Celui-ci s'appellera désormais le Récidi-
viste.:
»
Mais comment donc !
Lorsque M. Berteaux mit en demeure M.
le président du conseil — qui prudemment
se tenait coi — de donner son avis au su-
jet de la mise à l'ordre du jour de la con-
vention de l'Ouenza, M. Clemenceau décla-
ra notamment : « Il est naturel que M.
Jonnart, en butte à des insinuations calom-
nieuses désire s'expliquer le plus tôt pos-
sible. t)
Mais, comment donc !
Nous prions simplement M. le président
du conseil de remarquer que les « insinua-
tions les plus calomnieuses » dirigées con-
tre M. Jonnart l'ont été précisément par Ai.
Clemenceau. ""-.
Ce ne sont pas les adversaires de la con-
vention-de TOùenza, c'est M. Clemenceau
lui-même qui a écrit que M. Jonnart était
« un de ces jeunes mélinistes du Parlement
qui, voyant dans la politique d'abord l'oc-
cupation des prébendes conçoivent le gou-
vernement comme un simple marché d'inté-
rêts.. b),
(Le Bloc, 21 avril 1901).
Et encore :
« M. Jonnart n'est pas de ceux qui tien-
nent tête aux puissances quand il peut être
avantageux de s'employer à leur profit. »
(Le Bloc, 21 avril 1901.1
Et enfin :
« Les avertissements n'ont pas manque.
S'il était demeuré à son poste — qu'il
avait quitté pour Paris avant de croiser de-
vant Antibes — il eut pu être informé.
Il l'eût été certainement s'il avait exercé
ses fonctions avec une dose moyenne de
sagacité et de prudence. »
(Le Bloc, 21 avril 1901.)
Nous qui ne connarss-ons pas M. Jon-
nart et qui n'avons aucune animosité per-
sonnelle contre lui, nous comprenons par-
faitement que le « vice-roi magnifique » ait
le désir ardent de se disculper des accusa-
tions portées contre lui par M. Clemen-
ceau.
Et nous aurions été ravis d'autre part de
voir M. le prési-dent du conseil venir pren-
dre chaleureusement la défense d'un fonc-
tionnaire, dont il a brossé naguère un por-
trait si flatteur.
La répétition générale d'hier nous a mis
en goût.
Nous attendons impatiemment la pre-
mière.
POUR LA PATRIE
Il est de mioide, décidément, dans le
monde des grands fournisseurs, de couvrir
du drapeau national les opérations les plus
scandaleuses.
C'est le sabotage tricolore.
Du monde des « gros fournisseurs ii,
cette détestable habitude s'est répandue
dans les milieux gouvernementaux et, cha-
que fois que M. Thomson alLait présider
un enterrement national des victimes de
l'administration de la marine, il prononçait
solennellement les mots consacrés : « Pour
la patrie ».
M. Jonnart, 'à son tour, dans son essai de
réhabilitation de l'Ouenza, crut devoir fai..e
vibrer la corde patriotique, et associer M.
Krupp à notre défense nationale.
A parler franc, cette manie devient in-
supportable, et il faut être bien en peine
de 1^ qualité d'une marchandise, pour ne
pouvoir l'écouler que dissimulée sous ?es
plis du drapeau.
Pour nous qui sommes patriotes dans
la véritable acception du terme — comme
l'étaient nos aînés les Jacobins de 1793 —
nous n'admettons pas plus que le drapeau
de Valmy serve de haillon à la démence de
M. Hervé, que ft fanion aux convoitises de
la tribu des Djebel-Ouenzistes.
- 0-0 -
En voulez-vous des promesses ?
Qui donc oserait encore prétendre que M.
Clemenceau n'a pas souci des réformes
tant attendues par la démocratie ?
Il vient de montrer d'éclatante manière
combien eUes lui tiennent au cœur.
Savourez plutôt ces petits dialogues :
M. Charles-Benoist. — Il importe que la
Chambre s'occupe de la réforme électorale
'dans les premiers jours de mars.
M. Clemenceau. — Je n'y fais pas d'op-
position.
M. Labori. — Le gouvernement songe-t-
il aussi à la réforme des conseils de
guerre ?
M. Clemenceau. — Le gouvernement
s'engage à nouveau à laire aboutir cette
réforme dans cette législature.
M. Massé. — Et le projet de loi sur l'en-
seignement privé? Viendra-t-il avant 1910 ?
M. Clemenceau. "— Parfaitement.
M. Clemenceau — comme le montrent ses
réponses extraites de l'Officiel — s'est en-
gagé à tout ce qu'on a voulu.
Il suffisait de demander pour obtenir.
des promesses.
Malheureusement, il y a longtemps que
M. Clemenceau promet. Il y a bien long-
temps.
Il fut même jusqu'ici tellement occupé à
promettre qu'il n'a pas trouvé le loisir 1e
réaliser la moindre de ces promesses.
Barbier parlementaire, il réformera gra-
tis. demain.
La Chambre se contentera-t-elle des nou-
velles assurances que M. Clemenceau con-
tinué à lui prodiguer avec une si humble
docilité
Si l'avenir procède 63 jftKîïraif-
être dangereux. -
A LA CHAMBRE
■ ■
Les affaires du Maroc
« ■»<<■ > -
La Chambre accorde l'urgence à deux propositions : l'une
sur les incompatibilités; l'autre sur le vote personnel.
- Le débat sur le Maroc.
M. Brisson préside.
Au début de la séance, M. Zévaès soulève
un assez vif iniedent en déposant une pro-
position de loi relative aux incompatibilités
parlementaires, et destinée à remplacer
celle qui avait le même objet, et qu'il avait
déposée il y a une dizaine de jours.
La proposition de M. Zévaès, en sept ar-
ticles ,reproduit, dans ses dispositions es.
sentielles, le projet déposé autrefois par le
cabinet Bourgeois.
M. Zévaès. — Reprenant le projet de loi, dé-
posé en 1895 par le ministère Bourgeois et
rapporté favorablement par M. Maurice Faure.
nous demandons que les députés ou sénateurs
ne puissent faire partie des conseils d'adminis-
tration de sociétés financières ou industrielles,
de syndicats d'émission, ni plaider pour ces
sociétés et syndicats. Nous demandons en ou-
tre qu'ils ne puissent exercer des fonctions pu-
bliques. (Très bien 1 Très bien 1 à l'extrême-
gauche.)
M. Grodidier. — Et aux politiciens, qu'est-ce
que vous interdirez f
M. Zévaès. — Les politiciens dépendent du
suffrage universel.
M. Grosdidier. — Les autres aussi.
M. Zeraes. — Ils sont ici pour défendre leurs
programmes et non les intérêts de sociétés
financières. Il y a assez longtemps que la ma-
jorité du Parlement est rendue responsable
des tripotages de la minorité de ses membres.
M. le président. Je ne puis vous permettre
de vous exprimer dans ces termes: vous m'o-
bligeriez à vous rappeler à l'ordre.
M. Zévaès. — Je rappelais un souvenir his-
torique. Je faisais allusion, à des laits qui de-
puis vingt ans se sont déroulés dans les as-
semblées passées.
M. Lasies. - Merci pour la République.
M. Zévaès. - Elle n'est pas responsable des
fautes de quelques républicains.
M. Zévaès conclut en s'écriaftt :
Il vous appartient de dire si vous entendez
que les élus du peuple, dont vous avez assuré
l'indépendance et la dignité, se consacrent tout
entiers à leur mandat, et optent entre la poli-
tique et les affaires, entre le Parlement et les
conseils, d'administration. (Applaudissements à
gauche.)
M. OhtaJrles Benoist. président de la com-
mission du suffrage universel, expliqua le
retard du dépôt du rapport par la. maladie
du député qui s'en était chaTgé, M. Chion-
Ducollet..
Je ne fais personnellement partie d'aucun
conseil e. d'administratiop d'aucune nature. Mais
supposez que les hasards de la vie m'aient
amené à prendre la direction et la gérance
d'une grande publioation ; m'inberdiriez-vous
de siéger à la Chambre ? Il s'agit donc de
questions d'espèce qu'il faut examiner avec
soin. "Et puis il importe de se préoccuper du
recrutement des assemblées parlementaires.
Quand on aura interdit fii telle ou telle caté-
gorie de citoyens de faire partie du Parlement,
où donc irez-vous chercher des députés 7 (Inter-
ruptions à l'extrême-gauche.)
M. Grosdidier. — Sous les ponts. (On rit.)
M. le président de la commission. — Il faut
maintenir à un certain niveau le personnel
parlementaire. (Interruptions.)
M. Robin. r-- Les ouvriers valent bien les
autres.
M. le président de la commission. — Certes,
mais ils ne peuvent pas prétendre représenter
toute la nation. Le travail intellectuel doit avoir
se, place dans nos assemblées. (Interruptions
à l'extrême-gauche.)
M. Zévaès se plaint encore du retard
qu'on a mis à déposer le rapport sur sa
proposition.
Pair 447 voix contre 73, l'urgence est dé-
clarép,, -
La proposition est renvoyée à la commis-
sion du suffrage universel.
LE VOTE PAR PROCURATION
M. Lasies demanda l'urgence pour une
proposition exigeant des diéputés le vote
personnel dans tous les scrutins portant
augmenbaltion d'un crédit ou engageant la
confiance de la Chambre.
M. Lasies. — C'est qu'il y a dans cette Cham-
bre quelques ministériels par vocation, anges
gardiens de tous les gouvernements successifs,
qui se trouvent quelquefois pris entre leur fer-
veur ministérielle et leur devoir de mandataire
du peuple.
En séance, l'ange gardien vote pour le gou-
vernement et, le lendemain, le député rectifie
son vote pour les électeurs. Nous aurions dû
depuis longtemps réagir contre ces pratiques.
Soyons des ouvriers aé~, montrorfs-nous
assidus au chantier et noug pourrons dire au
suffrage universel : nous l'avons bien gagné !
A la majorité de 384 voix contre 153, sur
537 votants, l'urgence en faveur de la pro.
position de résolution de' M. Lasies est dé-
clarée.
Cette proposition est renvoyée à la com-
mission du règlement.
LA QUESTION DU MAROC
On abordie la discussion des crédits ,sup-
plémentaires du Maroc et des interpella-
tions relatives au même suijet.
M. Jules Delafosse. — Je crois que nous
jouons au Maroc l'avenir de l'Afrique française.
Si par notre faiblesse inexcusable nous lais-
sions une influence étrangère s'immiscer dans
lo gouvernement chérîften, nous perchions ln.
failliblement l'Algérie et toutes nOn possessions
dcl l'Afrique occidentale. Et voici POU)'\fuoi.
J'ai toujours pensé que la France perdrait,
tôt ou tard, ses possessions coloniales d'Asie,
d'Amérique et d'Océanie, parce que c'est dans
la force des choses et la fatalité des événements.
Mais la France peut les perdre sans en subir
un dommage mortel.
Tandis qu'en Afrique il n'en va pas de même.
L'Afrique est le grand réservoir de la France
d* demain, non seulement en produits, mais
en hommes. La natalité de la France décroît
chez nous, et il est inévitable que notre pays,
chez nouà s, la fois le plus riche en biens et le
aui est
plus pauvre en habitants, soit asservi s'il ne
peut opposer aux convoitises des ressources
autres que celles de son propre fonds.
Ces ressources, l'Afrique seule doit les don-
ner car un jour elle peut mettre à notre dis-
position des contingents énormes qui assure-
ront nôtre salut.
M. Lucien Hubert présente des observai
tîons d''un ordre différent.
M. Jlubert. - Les. ases que nous avions
données à l'Acte d'Algésiras, dont j'ai eu l'hon.
neur d'être le rapp, jurent; et doivent
être conservées : reiieeet-, er linté«
grité 1& guiss^fcé fihéfifiçnjae, ^JabHr l'or-
dre au Maroc dans l'intérêt du Maroc avani
tout.
Vous n'avez pas réussi jusqu'ici, mais nous
restons les maîtres de la situation, et le Maroc
suivra nécessairement notre sillage. M. de Bü.
low disait dans une interview que le temps
travaille pour la paix. Au Maroc, le temps
travail-le pour la France. -
Le monde musulman, là et ailleurs, com-
mence à apprécier la valeur de certains en-
gagements et de certaines amitiés. S'il regarde
fi Constantinople, c'est le rayonnement du gé-
nie français qu'il verra luire. (Très bien 1 Très
bien I)
Ne troublez pas cette vision. Appliquez l'Acte
d'Algésiras avec doigté, avec souplesse : no
déchirons pas les traités, mais rappelons-nous
qu'oti n'arrête pas l'évolution historique d'un
peuple avec un mur de papier, suivant la pa-i
rôle de la Gazette de Cologne.
La seule chose que je vous demande, c'est
que personne uo puisse prendre le Maroc COU
tre nous.
Eraîu, M. Jaurès renouvelle les critiques
qu-'il a mamtes fois adressées à la politique
marocaine du gouvernement.
Il réclame l'évacuation complète du OOfi
rttoire marocain, y compris Oudjda.
ïl réclame la publication du rapport du
général Lyautey sur l'organisation de la
police au Maroc.
M. Pichon. — Ce rapport ne sera pas publiS
tant que je serai ministre.
Je suis responsable devant les Chmbrcs, qtt:
jugeront :ncs actes, mais Je déclare que j'af
une responsabilité particulière qui ne me per-
met pas de laisser instituer à la Uibuce un t).
bat sur ui: document de ce genre.
A l'heure où la Chambre - sera appelée à sa
prononoer sur l'organisation de îa police dans
13 Maroc oriental et sur les dépenses qu'elle
comportera, je lui fournirai 1er. documents né-
cessaires ; mais quant au texte du rapport dar
M. le général Lyautey, qui touche à la politi-
que française en Europe, je no le publierai
pas. (Vifs applaudissements sur un grand nom-
bre de bancs.)
M. Jaurès. — Cest entendu. Je suis bien
obligé de constater que, par ses applaudisse-
ments, la majorité vient d'engager sa respon-
sabilité dans le refus que lui oppose le gou-
vernement de communiquer un document. C'ess
entendu : jusqu'au bout, vous no serez jamais-
saisis que de documents tardifs, intervenant
quand la partie est compromise.
La situation est compliquée et incertaine, e~
vous n'avez pas le droit de négliger aucun élé-
ment d'entente et de paix. Ayant cette boaoat,
fortune que la France et l'Allemagne peuvent
pratiquer en Orient une action — non pas COm-
binée — mais spontanément parallèle, vous n'a-
vez pas le droit de diminuer cette chance.
Vous n'êtes pas, en effet, au bout des diffi*
cul tés. Il faudra arracher la Serbie de l'étouffe-
ment économique où elle languit, et obu.
pour la Bosnie et l'Herzégovine un régime do
garanties vraiment constitutionnelles, pour tou-
tes ces solutions, vous avez besoin d'une Euro-
pe qui ne soit pas divisée contre clle-môrnft
par ce grave problème marocain.
Je comprendrais que vous risquiez les chaa*
ces de paix, trop rares, hélas l en Europe, si
vous aviez la folie de vouloir, par tous le
moyens, installer une influence prédominante
au Maroc.
Mais vous ne le voulez pas. Vous voulez V-
en aller. Faites-le donc ; car en ne le faisant
pas vous prolongez un état d'incertitude et de
malaise qui va affaiblir, pour les difficultés dg
demain, votre autorité morale.
Le soupçon subsistera que vous aidez l'AU.
triche, parce qu'elle vous a promis une corn.
pensation marocaine.
Voilà pourquoi, et pour l'honneur de votre
signature, et pour la grande action morale que
vous devez exercer en Orient, il faut en finir,
avec ce haillon de la politique marocaine. (Ap-
plaudissements à l'extrême-gauche.)
J'ai maintenant à aborder un nouvel ordre
d idées. Je demande à la Chaçnbre la permis-
sion de remettre à la prochaine séance met
observations. (Assentiment.)
La suite du discours de M. Jaurès est
renvoyée à ta prochaine séance de la Cherry
bre, après-demain lundi, deux heures.
il'-
AU SÉNAT
DISCOURS DU PRESIDENT
M. Antonin Dubost, président, en prek
nant placé au fauteuil, prononce le dis-
cours d'usage. Il se félicite du succès ré-
publicain des élections qui viennent d'avoit
lieu.,
Il envoie ensuite le salut du Sénat à la
nation italienne si cruellement éprouvée,,
après avoir insisté sur l'influence pacifique
de la France dans le monde.
La France, messieurs, voit dans ces senti.
ments des autres pays a son égard un gage de
-paix puur le monde ; elle fait tout pour les mé-
riter. et en ce moment même elle y répond dflt
son mieux en s'associant de toutes ses forcae
au grand acle de solidarité humaine qui a pouc
but d'atténuer les soufirances éprouvées pue
notre grande sœur latine, si cruellement rava.
(gée par des forces de ruine et de destruction
oui semblent s'acharner sur son sor ennobli de
tant de souvenirs et de beautés 1 (Applaudisse-
ments unanimes.)
J'étais bien certain, messieurs, de traduite
fidèlement vos sentiments unanimes, en adres*
sant pendant l'intersession, au Sénat italien;
et par lui à l'Italie tout entière l'expression (M
vos condoléances douloureusement émues.
En terminant, messieurs, je demande au S6.
nat la permission d'adresser en son nom des re-
merciements à ses vénérés doyens d'âge et au
bureau provisoire. (NoUveaux et vifs a.pplau.,
dissements.)
Après le discours du président, le Sénat
procède à ÎSrVërification des pouvoirs.
Il valide les élections de la. plupart 'detf
départements, et renvoie à une séance
ultérieure l'examen des dossiers de la
Haute-Saône, des Rouches-du-Rhône et de
l'Inde.
Le Sénat s'ajourne ensuite & mardi 3
heures.
1 ■ ■ # m
L'escadre américaine ;
,. à Marseille
Marseille, 15 janvier..
Le navire américain Georgiaest arrivé
Ce rnatin à Marseille.
Une grande animation règne sur les
quais.
A 11 Ii, g} demie, M. Penipat. adminjs-
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