Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-06-19
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 juin 1910 19 juin 1910
Description : 1910/06/19 (N14709). 1910/06/19 (N14709).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7544158h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/12/2012
N'f 14709. - 4 MESSIDOR, «H US. CINQ CENTIMES LE NUMERO DtMAMSHE 19 JUIN IMO. — N° 14781.
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.AUGUSTE VACQUERIE
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AUGUSTE VACQUERIE
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TRIBUNE LIBRE
t-i i j- e -
Socio-Royaliste Unifié
m. eicu, qui va prendre la
parole dans l'interpellation
en cours à la Chambre, a
l'amour des nouveautés en
politique. C'est lui qui inau-
gura, il y a quelque vingt
ans, la politique de ralliement des con-
servateurs à la République. Réussit-
elle beaucoup à son parti ? La chose est
controversée et controversable. Aussi
bien, n'est-ce pas le lieu de le recher-
cher ici. On pratiquait alors au Saint-
Siège la manière douce. Léon XIII
croyait plus à l'efficacité du miel que
du vinaigre pour la capture des mou-
ches. Merry de) Val, le moine de l'In-
quisition et des autodafés, n'était pas
encore le Saint-Esprit des décisions
pontificales, l'inspirateur de l'infailli-
ble sagesse. C'était le temps où certains
socialistes unifiés, convaincus déjà que
l'anticléricalisme était « vieux jeu et
rococo », suivant leurs propres expres-
sions, disaient couramment que « Pel-
letan et de Mun devaient être mis dans
le même sac »*
Ces temps ne sont plus. Enfermer
Pelletan et ses amis, lisez : le parti
radical et radical-socialiste, dans un
sac — pour les jeter sans doute à la
fosse commune — est encore le rêve
cher à ces mêmes socialistes unifiés.
Mais de M. de Mun il n'est plus ques-
tion. Que dis-je ? On se sert de ses
amis, devenus des alliés, pour mener à
bien l'opération contre le parti radical.
« Marchepied », disent les socialistes
unifiés, en parlant des royalistes. « Ba-
lai », répliquent les réactionnaires, en
parlant de ces socialistes unifiés.
« Marchepied » et « balai » ont ad-
mirablement fonctionné aux dernières
élections. Pelletan en a été ému et a dé-
noncé à l'opinion publique, avec sa
verve habituelle, le pacte innommable,
dont les deux partis rougissent, paraît-
il, également. Cela ne faisait pas l'af-
faire des vrais socialistes unifiés. Jau-
rès, Sembat, Allard, et d'autres sei-
gneurs de moindre importance de l'uni-
fication, ont protesté contre la thèse de
Pelletan. Ils n'auraient pas été fâchés
d'établir que les radicaux ont, tout
comme les socialistes, bénéficié des
voix réactionnaires. Et M. Piou leur
est venu en aide par sa théorie de la
« force d'appoint », exposée, l'autre
dimanche, au banquet d'Albert, dans
la Somme. Malheureusement pour MM.
Piou, Allard, Sembat et Jaurès, Pelle-
tan avait répondu d'avance à leur ar-
gumentation, et sa démonstration reste
entière, appuyée sur des faits d'ailleurs
inattaquables.
L'expérience ne manque cependant
pas d'intérêt. Elle a donné assez de
résultats pour qu'on songe à en faire
une plus large application. C'est à cette
situation de demain que pensait sans
doute le chef de l'Action toujours ap-
pelée Libérale, lorsqu'il disait à ce
banquet : « Un temps nouveau com-
mencè peut-être ; préparez-vous à for-
mer un parti nouveau. »
Qu'un « temps nouveau commence »,
cela ne semble guère contestable. On
n'avait pas vu, en effet, jusqu'ici mar-
cher avec un aussi bel entrain, la main
dans la main, révolutionnaires et réac-
tionnaires à la. consolidation des ins-
titutions républicaines. C'est là un spec-
tacle insolite. Les républicains n'y
étaient pas habitués. Qu'à cette ère nou-
velle, la formation d'un parti nouveau
apparaisse comme indispensable, rien
de moins extraordinaire. Autre temps,
autre mœurs ; c'est surtout en politique
que le dicton est vrai. Mais ça n'a pas
d'importance, dirait Feydeau.
Que sera ce nouveau parti catholi-
que ? Comment composé ? Quel en sera
le programme ? Sous quel titre le dési-
gnera-t-on ?
Voilà l'essentiel. Me sera-t-il permis
de donner à M. Piou une indication per-
sonnelle ? Au cours de la période élec-
torale, j'ai entendu un de ces socialis-
tes très unifiés, hervéistes, antimilita-
ristes et antipatriotes, dont Rouanet —
après Fournière — voudrait bien que
son parti se séparât avec éclat, s'adres-
ser à peu près en ces termes aux roya-
listes :
« Venez à nous, vous tous qui, im-
bus de solides croyances religieuses^
avez été élevés dans les principes d'or-
dre, de conservation sociale, de respect
de l'armée, d'amour de la patrie. Il y
a dans votre passé à prendre et à lais-
ser. Pourvu que dans l'ordre social
vous pensiez comme nous, on sera vite
d'accord. Plus de propriété indivi-
duelle, plus de bourgeois, plus d'ar-
mée, plus de patrie 1 Si vous estimez
que la Révolution peut seule vous sau-
ver « de la franc-maçonnerie, de ces
« curés de la laïque, dont les radicaux
« veulent imposer l'enseignement aux
« enfants de la classe ouvrière »,
comme disait l'autre jour Pierre
Myrens au banquet de Mariguane, les
portes de nos groupes socialistes vous
sont toutes grandes ouvertes. Nous ne
vous demanderons pas si vous alliez
hier à la messe, si vous y allez encore
aujourd'hui, ni si vouscontinuerez à y
aller demain. C'est votre affaire. Cela
ne nous regarde pas. Vous êtes des
nôtres. »
Je livre aux méditations de M. Piou
ce petit discours, dont je ne reproduis
pas rigoureusement les expressions,
mais dont je garantis le fond.
N'y a-t-il pas là tout son program-
me ? On y trouve du moins les arti-
fcles essentiels : cette liberté de cons-
cience à laquelle les républicains n'ont
cessé d'attenter depuis quarante ans ;
la liberté d'enseignement à laquelle
ils se disposent à attenter encore. Afin
de complaire à M. Grousseau, on y
ajoutera la liberté — sont-ils amoureux
de libertés, ces bons cléricaux ! — pour
les municipalités de répartir également
les fonds destinés à l'enseignement en-
tre les écoles privées et les écoles pu-
bliques. Vous pensez bien, au surplus,
que la représentation proportionnelle et
la réforme administrative ne seront pas
omises. Quant « aux œuvres sociales »,
l'Action Libérale ou, plus exactement,
le nouveau parti catholique entend les
multiplier.
— Mais, m'objectera-t-on, de « la
propriété individuelle, de l'armée et de
la patrie », vous ne parlez pas.
— Pardon ! je croyais la question
vidée. Pour la propriété individuelle,
nous avons l'aveu de M. Piou, lui-mê-
me : « On s'indigne, a-t-il dit dans la
Somme, om nos votes aient pu aller à
des ennemis de la propriété. »
On est plus indigné, Monsieur
Piou, — si l'indignation est ici de
mise, — on est à coup sûr plus écœu-
ré que « vos votes » aient pu aller à
des ennemis de l'armée et de la patrie.
Quand un parti tombe si bas, il se
déshonore à jamais.
« Le plus sûr moyen d'aller à la réac-
tion, c'est le désordre. Le plus sûr
moyen d'aller à la dictature, c'est l'in-
discipline militaire », a dit un jour M.
Paul Deschanel. Réaction et dictature
ne répugnent pas à M. Piou et à ses
amis. Mais que le nouveau parti catho-
lique en formation ne s'avise pas, au
Parlement, d'évoquer les mots de « pro-
priété, ordre, armée, patrie » ; j'espère
qu'il trouvera encore des républicains
pour lui faire observer poliment qu'on
ne parle pas de corde dans la maison
d'un pendu, et, au besoin, pour lui
crier : « Silence au parti socio-roya-
liste unifié (n
Henri MICHEL,
-————.———— ————————-.
LA POLITIQUE
L'INTERPELLATION DE M. BERTEAUX
La Chambre a fait, hier, le
meilleur, accueil à l'interpella-
tion sur la politique générale,
développée par M. Berteaux
I avec- un talent tet une mesure
unanimement appréciés.
Les mouvements de l'Assemblée furent
exactement dans le sens contraire de
ceux qui avaient accueilli la déclaration
du gouvernement.
> Cette fois, c'était à la droite de pro-
tester, d'interrompre, de manifester son
humeur, tandis que la gauche soutenait
son orateur par ses applaudissements ré-
pétés.
Sous une forme aimable, qui donnait
à son intervention son véritable caractère
de discussion loyale sur les idées et non
pas de « mauvaise querelle de personne n,
le sympathique président du groupe radi-
cal socialiste a posé à M. le Président du
Conseil des questions précises qui exi-
gent des réponses catégoriques.
M. Berteaux a conduit sa discussion
avec cette simplicité d'allures, et cette
- loyauté sans emphase qui - - lui - sont -- cou-
tumières, et sa dialectique, pour être sans
violence, n'en fut pas moins rigoureuse.
Sur l'école laïque, « la justice de clas-
se », les réformes sociales, de même que
sur l'apaisement et le problème financier,
M. Berteaux a traduit en termes excel-
lents la pensée politique de son parti.
Les réserves qu'il a formulées ont ame-
né M. le président du Conseil à faire de
son banc quelques courtes déclarations
qui laissent deviner le sens de ses expli-
cations prochaines. Avec une bonne grâ-
ce parfaite, M. Briand a reconnu que ce
débat était logique et nécessaire, et, répu-
diant ses thuriféraires maladroits, il s'est
félicité de voir les présidents des divers
groupes de la Chambre, venir exposer à
la tribune leur idéal politique et formu-
ler leurs observations et leurs critiques.
Ce fut en résumé une séance excellen-
te qui a contribué à affermir cette impres-
sion qu'il existe dans la nouvelle Cham-
bre — malgré toutes les statistiques of-'
ficielles — une majorité de gauche, ex-
clusivement de gauche, et qu'aucun gou-
vernement républicain ne saurait gouver-
ner sans elle.
j
LES ON-DIT;
»>»
Aujourd'hui samedi:
Lever du soleil : 3 h. 58 du matin.
Coucher du soleil ; 8 h. 4 du soir.
Lever de la lune : 3 h. 54 du soir.
Coucher de la lune : 1 h. 34 du matin.
Courses à Saint-Ouen.
AUTREFOIS
Le Rappel, frappé d'interdiction. par le
gouvernement de l'Ordre moral, au nom de
la liberté, ne paraît pas le 19 juin 1874.
AUJOURD'HUI
Listes civiles allemandes
A propos de l'augmentation de la listé
civile votée au kaiser, la Gazette de l'Alle-
magne du Nord rappelle les chiffres des
listes civiles de l'Empire allemand.
Celle du roi de Prusse srèLevait à 17 mil-
lions 625.000 francs, elle a èté- portée à 22
millions. Le roi de Bavière reçoit 6.714.288
francs ; le roi de Saxe, 5.222.820 fr. ; le
roi de Wurtemberg, 2,558,787 fr. ; le grand-
duc de Bade, 2,301,765 fr. ; le grand-duo de
Hesse, 1,500,000 fr. ; le grand-duc de Hol-
denbourg, 831,250 fr. ; le grand-duc de
Saxe-Weimar, 1,250,000 fr. ; le régent de
Brun-swick, 1,375,000 fr. ; le grand-duc de
Saxe-Meiningen, 2,121,631 fr. 25 ; le prince
de Schwarzemberg-Sonderhausen, 643,792
lianes 80 ; le prince de Schwarzembere-
Hudolstadt, 420,836 fr. 75.
Tout cela fait un total de 47,040,168
'francs 75, sans compter les listes civiles
des petits Etats de 50,000 à 60,000 âmes.
Les distractions de Pasteur.
Pasteur était fort distrait, - comme la - plu-
part des grands savants qu'absorbe une
idée fixe.
Un jour qu'il était à table, en famille,
et qu'on apportait du raisin pour le dessert,
Pasteur arrêta du geste ceux des convives
qui se disposaient à croquer tels quels les
grains sucrés :
— Rien de plus dangereux que de man-
ger du raisin sans le laver au préalable.
Ce disant, le savant, pour donner l'exem-
ple, trempait sa grappe dans un verre
d'eau.
- Le raisin, en effet, est toujours de sa
nature un peu humide, expliquait-il, de
sorte que les poussières pathogènes en sus-
pension dans l'atmosphère se collent vo-
lontiers sur la peau du fruit.
Et là-dessus, Pasteur, emporté par son
sujet se met à décrire les microbes, les
bacilles, les germes morbides de tout genre
qui peuvent contaminer une grappe.
Chacun écoutait avec intérêt la petite con-
férence. Mais-ce fut une soudaine explosion
de rires quand, le conférencier, d'un geste
machinal, saisit le verre d'eau où il ve-
nait de noyer tous ces terribles microbes,
et le vida d'un trait.
Et Pasteur ne fut pas le dernier à rire.
l
Chi va piano.
Après avoir rendu au Sénat ce qui lui
appartient, il serait bon de restituer à la
Chambre ce qui est sa propriété.
Les vénérables hôtes du Luxembourg
n'ont pas, en effet, le monopole de cette
« sage lenteur » que nous avons signalée.
Les députés n'apportent, parfois, guère
plus de célérité dans leurs travaux.
Et M. Antonin Dubost — qui entend dé-
gager la responsabilité de l'Assemblée
qu'il préside — vient de le rappeler aux
élus du suffrage universel.
Sont' notamment en souffrance au Pa-
lais-Bourbon :
Un texte sur l'organisation judiciaire,
gai date des 8 février et 2 mars 1900 ; une
proposition modifiant les articles 414 et
415 du Code pénal et remontant au 14 fé-
vrier 1896. D'autres sont plus anciennes
encore, telles : une loi sur la chasse aux
petite oiseaux, votée par le Sénat le 7 juil-
let 1893 ; une loi sur la défense contre le
phylloxéra en Algérie, votée le 21 janvier
1892 — le phylloxéra a eu le temps de
vieillir ; une réforme des trésoreries
générales, votée le 16 juin 1890.
Sans compter une loi en faveur des Qè-
ves pauvres des grandes écoles de l'Etat
et une loi modifiant le mode de presta-
tion de serment devant les tribunaux, qui
attendent depuis 1883 le bon plaisir de la
Chambre.
Si bien que sénateurs et députés méri-
tent, en l'occurrence, un peu de cette jus-
tice distributive qu'ils aiment à prôner.
Prétexte
M. le préfet de police, dont l'étheroma-
f me sénile se complique de manie de la
persécution, a mis en demeure le prési-
dent de la République de choisir entre sa
démission et l'exécution de Liabeuf.
« C'est, dit-il couramment, une affaire
personnelle. La tête de Liabeuf ou la
mieàne. »
Ces intolérables manières d'agent pro-
vocateur ne sont qu'un prétexte.
En réalité, M. Lépine sait que sa pré-
sence à la préfecture de police est devenue
impossible. Déjà son successeur est choisi.
M. Lépine, en effet, a accumulé les er-
reurs sur les fautes, et les gaffes sur les
sottises.
C'est à son obstination stupide à cou-
vrir, envers et contre tous, des agents des
mœurs faux-témoins, qu'est dû l'effroya-
ble drame de la rue Aubry-le-Boucher.
C'est à sa partialité inconcevable que
sont dues les récentes poursuites et l'ac-
quittement significatif de La Torre et
Petit.
C'est à l'instinct de brutalité du général
en chef des flics qu'est due la persistance
honteuse des « passages à tabacs », de ces
immondes sévices exercés dans les postes
par les agents de police sur des prison-
niers désarmés.
C'est à son manque de pondération et de
tact qu'est dû. le mécontentement des ins-
pecteurs et du personnel de la préfecture
de police.
Exclusivent préoccupé de parade et
de « bluff )>, M. Lépine n'a exercé aucune
surveillance sur son entourage, et il
n'ignore pas qu'un scandale financier est
sur le point d'éclater, où sont compromis
certains de ses plus hauts collaborateurs.
Sentant sa situation intenable, il affecte
donc de vouloir partir spontanément — et
en beauté ! — avant qu'éclate l'orage qui
l'obligerait à s'en aller.
Depuis quelques semaines, le préfet de
police cherchait un prétexte.
Il l'a trouvé.
» »
UN PRECEDENT
Les rares partisans de l'exécution de
Liabeuf invoquent bien maladroitement,
pour justifier leur intransigeance impi-
toyable, la nécessité de protéger les agents
contre les apaches. Il y a une dizaine
d'années, un agent qui conduisait au
poste un apache quelconque, boulevard
Rochechouart, fut - frappé - mortellement d'un
coup de couteau à la tempe par un « ami »
de ceJui qu'il venait d'arrêter. L'assassin,
un nommé Guyonnard, comparut devant
le jury qui le condamna à mort. Mais
l'exécution n'eut ,pas lieu et sa peine fut
commuée en celle des travaux forcés. Ce-
pendant l'affaire ne comportait auicune
circonstance atténuante. Guyonnard avait
attaqué l'agent làcihement, par derrière, et
avait les antécédents les plus déplorables.
La grâce de Guyonnard, en faveur du-
quel on ne pouvait invoquer aucune cir-
constance atténuante et qui n'avait pas les
excuses de Liabeuf, n'ébranla pas 'les fon-
dements de l'ordre sacré. Et M. Lépine,
déjà préfet de police à cette époque, ne
songea pas alors à démissionner.
1 »
Hpaiseipt-Liberté
Notre Sainte-Mère l'Eglise, qui s'évertue
si adroitement en France au petit jeu nou-
veau « apaisement-liberté », a vraiment,
une singulière façon d'affirmer ses princi-
pes libéraux dans les pays soumis encore
à sa domination.
Ainsi on mande de Barcelone :
Un artisan, redoutant d'être tuberculeux, se
présente à un dispensaire spécial. Pour l'aus-
culter on le fait déshabiller.
— Qu'avez-vous donc là au bras, mon ami ?
— C'est un tatouage, monsieur le docteur,
rapport à mes idées.
Ses idées sont révolutionnaires, le tatouage
aussi. On aurait pu le renvoyer, lui refuser l'ad-
mission, ce qui eût été suffisamment inhumain.
Mais certaines âmes sont davantage compliquées
et ténébreuses.
On l'accepte, on entreprend de le convertir.
Il se montre irréductible. Alors on le rabionne,
ce qui l'affaiblit encore davantage, à ce point
qu'il devient impossible de le chloroformer pour
l'opération. - -
— QueUe opération Y bes poumons i
Non, son bras. Ces dames et ces messieurs
du patronnage, toutes personnes bien pensantes
et confites en dévotion, n'ont toléré l'ennemi
que dans un but : effacer l'emblème attentatoire
à leurs principes.
Et comme on ne peut endormir l'homme sans
risquer de l'achever, ce qui entraînerait trop de
désagréments, comme, d'autre part, il est hors
d'état de se défendre, on lui arrache la peau du
bras — on l'écorche vif.
Puis on le renvoie. Le docteur Queralio dé-
rionce le fait ; Lerroux, député, en appelle à
l'opinion.
« Affaire privée àt dirait M. Brizon..
-. A LA CHAMBRE "-
'-J.
Ea Politique générale
Au nom des radicaux socialistes, M. Maurice
Berteaux dit ce qu'elle doit être.
Des hors-d'œuvre pour commencer..
M. Bénazet sert le premier. Il présente des
petites choses excellentes dans un ravier
agréable. Tout le monde trouve son petit
plat exquis, sauf toutefois le général Brun
qui n'aime que la mauvaise cuisine.
Le député de l'Indre — qui s'intéresse,
non sans compétence — à 1 aviation mili-
: traire ,critique, justement, une décision du
ministre de la guerre qui, contrairement
aux votes du parlement, a fait passer de
l'artillerie au génie les crédits affectés à no-
tre locomotion aérienne.
Avec une louante énergie et une parfaite
documentation, M. Benazet met le général
Chocolat en fâcheuse posture, aux applau-
dissements de la Chambre.
La défense du ministre est piteuse. Ar.
Brun déclare qu'il a voulu « obéir » (cron-
gn'ieu gn'ieu) aux décisions du Sénat et
que les aviateurs ont toutes ses sympa-
thies ! On ne s'en serait jamais douté.
Faut-il ajouter que ces affirmations sont
produites dans un français de caserne.
M. Bénazet est indulgent. Il n'insiste
pas.
Espérons qu'un jour, au lieu de « ques-
tionner n, il interpellera.
VALIDATIONS
Second ravier. C'est un M. Charles Du-
mas qui nous l'offre. Hélas !
M. Charles Dumas est socialiste unifié ;
du moins il est catalogué ainsi. Que dire
de ce bon petit jeune homme ? Il porte des
bottines du verni le plus éclatant ; une
cravate de la soie la plus mauve et la plus
brochée ; une jaquette de coupe de Maxis-
te (ne pas confondre avec Marxiste) ; des
moustaches relevées au petit fer. et au-
tre chose aussi. que nous ne saurions
dire ici.
Il porte aussi des documents, des col-
liers, un revolver, une montre, une carte
et une médaille qui devaient faire invali-
der M. Gérault-Richard.
Si tout autre que M. Dumas eut — avt,
une telle documentation — attaqué le sous-
empereur de la Guadeloupe, celui-ci eût
été certes invalidé.
Mais M. Dumas porte un thermomètre
qui marque soixante-neuf degrés au-des-
sous de celui de M. Brizon.
Il a toute une collection de crécelles
dans la gorge. Quant à ses bras, ils s'é-
lèvent à espaces réguliers vers le plafond
pour retomber automatiquement et en ca-
dence sur la tribune.
C'est l'Empereur du grotesque. M. Brizon
— excellent lieutenant — peut être fier
d'avoir un tel capitaine dont la grammaire
est encore plus « petit nègre » que la sien-
ne. Ce n'est pas que nous entendions dé-
fendre l'élection de M. Gérault-Richard.
Elle nous est -apparue comme. coloniale.
Gardes du corps, montres, verroteries,
rien ne manque, à vrai dire, à cette paro-
die du scrutin.
Et si au lieu de Dumas, un député spi-
rituel et malicieux fut intervenu, pour
combattre cette étrange comédie électorale
— peut-être M. Gérault-Richard eut-il eu
un « triomphe » (?) moins facile.
Mais M. Dumas est' un de ces avocats
qui valent à leurs clients le maximum et à
leurs adversaires le concours du ministère
public.
N'insistons pas et conseillons seule-
ment à M. Dumas de prendre quelques le-
çons chez Sarah Bernhardt, ou même à
<( Bobino-Musie-Hall ».
M. Berry ayant cru devoir faire adopter
le vote nominal, quand une élection est
contestée, on est obligé de perdre une heure
pour -admettre M. Gerault-Rîchardt C'est
beaucoup pour lui.
Et on en revient aux interpellations.
M. BERTEAUX
M. Berteaux monte à la tribune.
Au nom des radicaux socialistes, il pro-
nonce un excellent discours que M. Briand
— un peu nerveux — transforme en dialo-
gue et qui est longuement applaudi par les
gauches.
L'aimable et éminent vice-président de
la Chambre — qui est dans un de ses meil-
leurs jours — précise admirablemenf l'œu-
vre. et les espérances du parti radical so-
cialiste. La déclaration ministérielle ne lui
donne pas toute satisfaction.
Au nom de son parti il veut des expli-
cations — et soutenu par les encourage-
ments mérités des républicains, il amène
M. Briand à intervenir et à promettre
d'autres précisions.
Lors de sa lecture, dit M. Berteaux, la dé-
claration avait recueilli l'approbation de la droite
et du centre. Cette approbation s'était exprimée
les jours suivants dans des interviews qui sem-
blaient attribuer au gouvernement l'intention
d'abandonner en partie le programme républi-
cain.
,
Est-il nécessaire, d'ailleurs, de dire que nous
n'avens jamais pensé que la liberté dût être
l'apanage de quelques-uns ? (Applaudissements
repétés à gauche.) devons-nous dire que nous
n'avons jamais admis que la justice dût être
faussée au; profit d'un parti quelconque ? (Très
bien aux mêmes bancs.)
Etait-il besoin vraiment d'inscrire de pareil-
les affirmations dans une déclaration du gou-
vernement ; et ne semblait-on pas en le fai-
sant, faire ti-cp de cas des accusations sans fon-
dement jetées par ses adversaires à la Répu-
blique ? -
Nous avons donné à nos adversaires toutes
les libertés (Exclamations à droite) : liberté de
réunion, liberté communale, liberté d'associa-
tion.
ix à droite. — Excepté pour les catholi-
ques 1
M. Derteaux. — A ceux qui ont comploté con-.
tre la République, notre justice n'a-t-elle pas fait
Un traitement moins dur qu'aux ouvriers traînés
devant elle ? Nos tribunaux, ont-ils donc été
trop partiaux ? (SaJves d'applaudissements à
0fmr,.htO
M. Lauche - Nous pouvons en témoigner
ici 1
M. Berteaux. — La mauvaise organisation de
la justice produit sans doute des abus regretta-
bles, par exemple quand il s'agit de ! application
des lois de protection ouvrière. (Applaudisse-
ments su>r de nombreux bancs à gauche.)
Nous rit pouvons oublier non plus la situation
défavorable laite aux fonctionnaires qui osent
se déclarer ouvertement républicains. (Bruit à
droite, applaudissements à gaucho et à l'extrê-
me gaucne.) iVa-t-on pas constaté le même ré-
sultat pour les ollicieis qui osent manifester les
mêmes sentiments de loyalisme politique ?
Certes, nous voulons la justuce éyale pour
tous, monsieur le président du conseil ; mais
nous ne voulons pas que ce soit les partis qui
vous soutiennent qui en fassent tou les frans.
(Applaudissements à gauche.)
- oUS ne voulons pas que sous prétexte de
liberté, on puisse. t'ar menaces, einnêcher les
pères de famille, commerçants on ouvriers,
d'envoyer leurs enfants à l'école qui leur con-
vient. (Vifs applaudissements.)
Nos sentiments, d'ailleurs, trouvent un écho
dans le pays, comme le prouve l'entrée. ici
par les « bleus » de Bretagne et de Norman-
die, de nombreuses recrues républicaines. Nous
revendiquons tout notre programme dont nous
entendons ne rien supprimer.
Nous sommes d'accord avec le président du
conseil sur la nécessité de réaliser avant tout
les réformes sociales.
Nous voulons, comme lui, introduire plus de
justice, de cordialité et de sécurité dans les
rapports entre le capital et le travail. NouS nous
rallierons à toutes les propositions tendant à
l'extenon des libertés syndicales. (Très bien 1)
Nous partageons la volonté exprimée par ceux
de nos collègues qui réclament pour le monde
agricole des rélormes indispensables. le monde
Déjà, la République lui a donné les syndicats
agricoles, la loi de protection contre les frau-
des, le bien de famille insaisissable ; elle doit
et veutt poursuivre cette œuvre de progrès.
La déclaration ministérielle, si longue qu'elle
soit, n'a pas tout dit.
Elle a passé sous silence la question des re-
traites des ouvriers et employés de chemins de
fer et celle de la réglementation du travail des
mécaniciens et chaulfeurs.
Il y a huit jours, la délégation de ce person-
nel était reçue par le ministre des travaux pu-
blics, -le président du conseil présent. Ils ont,
l'un et l'autre, reconnu la légitimité des récla-
mations sur la du)'ée du travail et de repos de
ce personnel. Nous demandons qu'ils tiennent
la main à l'observation de la loi.
Si je passe à la loi des retraites ouvrières
et paysanneq, je dois constater qu'une commu-
nication à la presse donne à entendre qu'en dé-
pit des promesses du ministre du travail, son
application ne commencera pas au premier jan-
vier 1911.
M. Briand, président du conseil. - Il n'y a
eu aucune communication officielle a la presse. -
M. Jaurès, — Alors, on ne peut même plus
s'en rapporter à ce que dit le Temps ?
M. Briand. — Vous savez dans quelles condi-
tions difficiles cette réforme si longtemps pro-
mise à été votée.
M. Berteaux. — La déclaration ne dit pas un
mot non plus de la loi des cadres dont la partie
relative à l'artillerie a seule été votée. Elle se
tait sur la réforme des conseils de guerre.
M. Briand. — Pour q\ae cette discussion s'ins-
titue en bonne foi, vous pouvez reprocher à la
déclaration de se taire encore sur bien d'autres
points.
N'oubliez pas que le gouvernement est au
pouvoir depuis plusieurs mois et qu'il ne pou-
vait- pas se prononcer sur un programme gé-
néral.
M. Berteaux. — Le gouvernement doit tfouver
des ressources pour l'équilibre du budget. Peut-
il les demander aux impôts indirects 'l. Non as-
surément. Vous serez amené à l'impôt général
progressif sur le revenu.
Pour aboutir dans cette entreprise, il vous
faudra une majorité avec laquelle yous ayez
nou.é un contrat loyal. (Vifs applaudissements.)
M. Briand. — Il sera loyal de mon côté. C'est
pour cela que j'ai fait une déclaration com-
plète, à propos de laquelle des procès de ten-
dance noujs ont été laits. Il faut que, dès le
début d'une législature, on sache s'il y a en-
tente entre le gouvernement et la majorité. (Ap-
plaudissements au cenfre.)
Je veux un contrat non pour une misérable
vie au jour le jour, dont je ne veux pas, mais
pour une œuvre durable. (Applaudissements au
centre.)
J'espère qulaprès ces explications nos col-
lègues seront renseignés sur les intentions du
gouvernement et son programme, et que l'u-
nion se fera pour la poursuite d'un commun
effort d'un but déterminé.
M. Berteaux. — Nous regrettons, en ce qui
concerne les élections, que le gouvernement ne
les ait pas fait procéder d'un programme indi-
quant les réformes que le pays était en droit
d'attendre du parti républicain. (Vifs applaudis-
sements à gauche.)
M. Ch. Benoîst. — Vous parlez comme un mi-
nitre de la Restauration..
M. Berteaux. — On a .vu, par suite, des
luttes personnelles prendre la place de la ba-
taille d'où devait sortir l'indication élargie des
réformes à réaliser.
J'espère que le gouvernement donnera, à la
Chambre des précisions assez complètes pour
que mes amis et mois puissions lui accorder
notre concours. (Vifs applaudissements à gauche.
L'orateur reçoit les lélicitations de ses collè-
gues.)
Le succès de M. Maurice Berteaux a elè
significatif.
Attendons les réponses promises.
Avant de se séparer, la Chambre ajour-
na une proposition — très judicieuse — de
M. Klotz, demandant que, pour faire res-
pecter l'ordre du jour, les questions impré-
vues ne puissent être posées qu'en fin de
séance.
Lundi suite des interpellions.
Paul Coulon.
— ♦ J
AU SENAT
i
LA RECHERCHE DE LA PATERNITÉ
La séance est ouverte à trois heures et
demie, sous la présidence de M. Antonin
Dubost
On poursuit la discussion de la proposa
tion de M. Rivet sur la recherche de la pa",
ternité.
M. Louis Martin a la parol, e sur l'arti-
cle 4.
pondaAenr t
.AUGUSTE VACQUERIE
1 ABONNEMENTS
Un mil Mi wii Sx Mit ha
Paris. 2fr. 5lr. 9fr. 18 fr4
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AUGUSTE VACQUERIE
ANNONCES
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6, Place de la Bourse
et aux BUREAUX DU JOURNAÛ
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TRIBUNE LIBRE
t-i i j- e -
Socio-Royaliste Unifié
m. eicu, qui va prendre la
parole dans l'interpellation
en cours à la Chambre, a
l'amour des nouveautés en
politique. C'est lui qui inau-
gura, il y a quelque vingt
ans, la politique de ralliement des con-
servateurs à la République. Réussit-
elle beaucoup à son parti ? La chose est
controversée et controversable. Aussi
bien, n'est-ce pas le lieu de le recher-
cher ici. On pratiquait alors au Saint-
Siège la manière douce. Léon XIII
croyait plus à l'efficacité du miel que
du vinaigre pour la capture des mou-
ches. Merry de) Val, le moine de l'In-
quisition et des autodafés, n'était pas
encore le Saint-Esprit des décisions
pontificales, l'inspirateur de l'infailli-
ble sagesse. C'était le temps où certains
socialistes unifiés, convaincus déjà que
l'anticléricalisme était « vieux jeu et
rococo », suivant leurs propres expres-
sions, disaient couramment que « Pel-
letan et de Mun devaient être mis dans
le même sac »*
Ces temps ne sont plus. Enfermer
Pelletan et ses amis, lisez : le parti
radical et radical-socialiste, dans un
sac — pour les jeter sans doute à la
fosse commune — est encore le rêve
cher à ces mêmes socialistes unifiés.
Mais de M. de Mun il n'est plus ques-
tion. Que dis-je ? On se sert de ses
amis, devenus des alliés, pour mener à
bien l'opération contre le parti radical.
« Marchepied », disent les socialistes
unifiés, en parlant des royalistes. « Ba-
lai », répliquent les réactionnaires, en
parlant de ces socialistes unifiés.
« Marchepied » et « balai » ont ad-
mirablement fonctionné aux dernières
élections. Pelletan en a été ému et a dé-
noncé à l'opinion publique, avec sa
verve habituelle, le pacte innommable,
dont les deux partis rougissent, paraît-
il, également. Cela ne faisait pas l'af-
faire des vrais socialistes unifiés. Jau-
rès, Sembat, Allard, et d'autres sei-
gneurs de moindre importance de l'uni-
fication, ont protesté contre la thèse de
Pelletan. Ils n'auraient pas été fâchés
d'établir que les radicaux ont, tout
comme les socialistes, bénéficié des
voix réactionnaires. Et M. Piou leur
est venu en aide par sa théorie de la
« force d'appoint », exposée, l'autre
dimanche, au banquet d'Albert, dans
la Somme. Malheureusement pour MM.
Piou, Allard, Sembat et Jaurès, Pelle-
tan avait répondu d'avance à leur ar-
gumentation, et sa démonstration reste
entière, appuyée sur des faits d'ailleurs
inattaquables.
L'expérience ne manque cependant
pas d'intérêt. Elle a donné assez de
résultats pour qu'on songe à en faire
une plus large application. C'est à cette
situation de demain que pensait sans
doute le chef de l'Action toujours ap-
pelée Libérale, lorsqu'il disait à ce
banquet : « Un temps nouveau com-
mencè peut-être ; préparez-vous à for-
mer un parti nouveau. »
Qu'un « temps nouveau commence »,
cela ne semble guère contestable. On
n'avait pas vu, en effet, jusqu'ici mar-
cher avec un aussi bel entrain, la main
dans la main, révolutionnaires et réac-
tionnaires à la. consolidation des ins-
titutions républicaines. C'est là un spec-
tacle insolite. Les républicains n'y
étaient pas habitués. Qu'à cette ère nou-
velle, la formation d'un parti nouveau
apparaisse comme indispensable, rien
de moins extraordinaire. Autre temps,
autre mœurs ; c'est surtout en politique
que le dicton est vrai. Mais ça n'a pas
d'importance, dirait Feydeau.
Que sera ce nouveau parti catholi-
que ? Comment composé ? Quel en sera
le programme ? Sous quel titre le dési-
gnera-t-on ?
Voilà l'essentiel. Me sera-t-il permis
de donner à M. Piou une indication per-
sonnelle ? Au cours de la période élec-
torale, j'ai entendu un de ces socialis-
tes très unifiés, hervéistes, antimilita-
ristes et antipatriotes, dont Rouanet —
après Fournière — voudrait bien que
son parti se séparât avec éclat, s'adres-
ser à peu près en ces termes aux roya-
listes :
« Venez à nous, vous tous qui, im-
bus de solides croyances religieuses^
avez été élevés dans les principes d'or-
dre, de conservation sociale, de respect
de l'armée, d'amour de la patrie. Il y
a dans votre passé à prendre et à lais-
ser. Pourvu que dans l'ordre social
vous pensiez comme nous, on sera vite
d'accord. Plus de propriété indivi-
duelle, plus de bourgeois, plus d'ar-
mée, plus de patrie 1 Si vous estimez
que la Révolution peut seule vous sau-
ver « de la franc-maçonnerie, de ces
« curés de la laïque, dont les radicaux
« veulent imposer l'enseignement aux
« enfants de la classe ouvrière »,
comme disait l'autre jour Pierre
Myrens au banquet de Mariguane, les
portes de nos groupes socialistes vous
sont toutes grandes ouvertes. Nous ne
vous demanderons pas si vous alliez
hier à la messe, si vous y allez encore
aujourd'hui, ni si vouscontinuerez à y
aller demain. C'est votre affaire. Cela
ne nous regarde pas. Vous êtes des
nôtres. »
Je livre aux méditations de M. Piou
ce petit discours, dont je ne reproduis
pas rigoureusement les expressions,
mais dont je garantis le fond.
N'y a-t-il pas là tout son program-
me ? On y trouve du moins les arti-
fcles essentiels : cette liberté de cons-
cience à laquelle les républicains n'ont
cessé d'attenter depuis quarante ans ;
la liberté d'enseignement à laquelle
ils se disposent à attenter encore. Afin
de complaire à M. Grousseau, on y
ajoutera la liberté — sont-ils amoureux
de libertés, ces bons cléricaux ! — pour
les municipalités de répartir également
les fonds destinés à l'enseignement en-
tre les écoles privées et les écoles pu-
bliques. Vous pensez bien, au surplus,
que la représentation proportionnelle et
la réforme administrative ne seront pas
omises. Quant « aux œuvres sociales »,
l'Action Libérale ou, plus exactement,
le nouveau parti catholique entend les
multiplier.
— Mais, m'objectera-t-on, de « la
propriété individuelle, de l'armée et de
la patrie », vous ne parlez pas.
— Pardon ! je croyais la question
vidée. Pour la propriété individuelle,
nous avons l'aveu de M. Piou, lui-mê-
me : « On s'indigne, a-t-il dit dans la
Somme, om nos votes aient pu aller à
des ennemis de la propriété. »
On est plus indigné, Monsieur
Piou, — si l'indignation est ici de
mise, — on est à coup sûr plus écœu-
ré que « vos votes » aient pu aller à
des ennemis de l'armée et de la patrie.
Quand un parti tombe si bas, il se
déshonore à jamais.
« Le plus sûr moyen d'aller à la réac-
tion, c'est le désordre. Le plus sûr
moyen d'aller à la dictature, c'est l'in-
discipline militaire », a dit un jour M.
Paul Deschanel. Réaction et dictature
ne répugnent pas à M. Piou et à ses
amis. Mais que le nouveau parti catho-
lique en formation ne s'avise pas, au
Parlement, d'évoquer les mots de « pro-
priété, ordre, armée, patrie » ; j'espère
qu'il trouvera encore des républicains
pour lui faire observer poliment qu'on
ne parle pas de corde dans la maison
d'un pendu, et, au besoin, pour lui
crier : « Silence au parti socio-roya-
liste unifié (n
Henri MICHEL,
-————.———— ————————-.
LA POLITIQUE
L'INTERPELLATION DE M. BERTEAUX
La Chambre a fait, hier, le
meilleur, accueil à l'interpella-
tion sur la politique générale,
développée par M. Berteaux
I avec- un talent tet une mesure
unanimement appréciés.
Les mouvements de l'Assemblée furent
exactement dans le sens contraire de
ceux qui avaient accueilli la déclaration
du gouvernement.
> Cette fois, c'était à la droite de pro-
tester, d'interrompre, de manifester son
humeur, tandis que la gauche soutenait
son orateur par ses applaudissements ré-
pétés.
Sous une forme aimable, qui donnait
à son intervention son véritable caractère
de discussion loyale sur les idées et non
pas de « mauvaise querelle de personne n,
le sympathique président du groupe radi-
cal socialiste a posé à M. le Président du
Conseil des questions précises qui exi-
gent des réponses catégoriques.
M. Berteaux a conduit sa discussion
avec cette simplicité d'allures, et cette
- loyauté sans emphase qui - - lui - sont -- cou-
tumières, et sa dialectique, pour être sans
violence, n'en fut pas moins rigoureuse.
Sur l'école laïque, « la justice de clas-
se », les réformes sociales, de même que
sur l'apaisement et le problème financier,
M. Berteaux a traduit en termes excel-
lents la pensée politique de son parti.
Les réserves qu'il a formulées ont ame-
né M. le président du Conseil à faire de
son banc quelques courtes déclarations
qui laissent deviner le sens de ses expli-
cations prochaines. Avec une bonne grâ-
ce parfaite, M. Briand a reconnu que ce
débat était logique et nécessaire, et, répu-
diant ses thuriféraires maladroits, il s'est
félicité de voir les présidents des divers
groupes de la Chambre, venir exposer à
la tribune leur idéal politique et formu-
ler leurs observations et leurs critiques.
Ce fut en résumé une séance excellen-
te qui a contribué à affermir cette impres-
sion qu'il existe dans la nouvelle Cham-
bre — malgré toutes les statistiques of-'
ficielles — une majorité de gauche, ex-
clusivement de gauche, et qu'aucun gou-
vernement républicain ne saurait gouver-
ner sans elle.
j
LES ON-DIT;
»>»
Aujourd'hui samedi:
Lever du soleil : 3 h. 58 du matin.
Coucher du soleil ; 8 h. 4 du soir.
Lever de la lune : 3 h. 54 du soir.
Coucher de la lune : 1 h. 34 du matin.
Courses à Saint-Ouen.
AUTREFOIS
Le Rappel, frappé d'interdiction. par le
gouvernement de l'Ordre moral, au nom de
la liberté, ne paraît pas le 19 juin 1874.
AUJOURD'HUI
Listes civiles allemandes
A propos de l'augmentation de la listé
civile votée au kaiser, la Gazette de l'Alle-
magne du Nord rappelle les chiffres des
listes civiles de l'Empire allemand.
Celle du roi de Prusse srèLevait à 17 mil-
lions 625.000 francs, elle a èté- portée à 22
millions. Le roi de Bavière reçoit 6.714.288
francs ; le roi de Saxe, 5.222.820 fr. ; le
roi de Wurtemberg, 2,558,787 fr. ; le grand-
duc de Bade, 2,301,765 fr. ; le grand-duo de
Hesse, 1,500,000 fr. ; le grand-duc de Hol-
denbourg, 831,250 fr. ; le grand-duc de
Saxe-Weimar, 1,250,000 fr. ; le régent de
Brun-swick, 1,375,000 fr. ; le grand-duc de
Saxe-Meiningen, 2,121,631 fr. 25 ; le prince
de Schwarzemberg-Sonderhausen, 643,792
lianes 80 ; le prince de Schwarzembere-
Hudolstadt, 420,836 fr. 75.
Tout cela fait un total de 47,040,168
'francs 75, sans compter les listes civiles
des petits Etats de 50,000 à 60,000 âmes.
Les distractions de Pasteur.
Pasteur était fort distrait, - comme la - plu-
part des grands savants qu'absorbe une
idée fixe.
Un jour qu'il était à table, en famille,
et qu'on apportait du raisin pour le dessert,
Pasteur arrêta du geste ceux des convives
qui se disposaient à croquer tels quels les
grains sucrés :
— Rien de plus dangereux que de man-
ger du raisin sans le laver au préalable.
Ce disant, le savant, pour donner l'exem-
ple, trempait sa grappe dans un verre
d'eau.
- Le raisin, en effet, est toujours de sa
nature un peu humide, expliquait-il, de
sorte que les poussières pathogènes en sus-
pension dans l'atmosphère se collent vo-
lontiers sur la peau du fruit.
Et là-dessus, Pasteur, emporté par son
sujet se met à décrire les microbes, les
bacilles, les germes morbides de tout genre
qui peuvent contaminer une grappe.
Chacun écoutait avec intérêt la petite con-
férence. Mais-ce fut une soudaine explosion
de rires quand, le conférencier, d'un geste
machinal, saisit le verre d'eau où il ve-
nait de noyer tous ces terribles microbes,
et le vida d'un trait.
Et Pasteur ne fut pas le dernier à rire.
l
Chi va piano.
Après avoir rendu au Sénat ce qui lui
appartient, il serait bon de restituer à la
Chambre ce qui est sa propriété.
Les vénérables hôtes du Luxembourg
n'ont pas, en effet, le monopole de cette
« sage lenteur » que nous avons signalée.
Les députés n'apportent, parfois, guère
plus de célérité dans leurs travaux.
Et M. Antonin Dubost — qui entend dé-
gager la responsabilité de l'Assemblée
qu'il préside — vient de le rappeler aux
élus du suffrage universel.
Sont' notamment en souffrance au Pa-
lais-Bourbon :
Un texte sur l'organisation judiciaire,
gai date des 8 février et 2 mars 1900 ; une
proposition modifiant les articles 414 et
415 du Code pénal et remontant au 14 fé-
vrier 1896. D'autres sont plus anciennes
encore, telles : une loi sur la chasse aux
petite oiseaux, votée par le Sénat le 7 juil-
let 1893 ; une loi sur la défense contre le
phylloxéra en Algérie, votée le 21 janvier
1892 — le phylloxéra a eu le temps de
vieillir ; une réforme des trésoreries
générales, votée le 16 juin 1890.
Sans compter une loi en faveur des Qè-
ves pauvres des grandes écoles de l'Etat
et une loi modifiant le mode de presta-
tion de serment devant les tribunaux, qui
attendent depuis 1883 le bon plaisir de la
Chambre.
Si bien que sénateurs et députés méri-
tent, en l'occurrence, un peu de cette jus-
tice distributive qu'ils aiment à prôner.
Prétexte
M. le préfet de police, dont l'étheroma-
f me sénile se complique de manie de la
persécution, a mis en demeure le prési-
dent de la République de choisir entre sa
démission et l'exécution de Liabeuf.
« C'est, dit-il couramment, une affaire
personnelle. La tête de Liabeuf ou la
mieàne. »
Ces intolérables manières d'agent pro-
vocateur ne sont qu'un prétexte.
En réalité, M. Lépine sait que sa pré-
sence à la préfecture de police est devenue
impossible. Déjà son successeur est choisi.
M. Lépine, en effet, a accumulé les er-
reurs sur les fautes, et les gaffes sur les
sottises.
C'est à son obstination stupide à cou-
vrir, envers et contre tous, des agents des
mœurs faux-témoins, qu'est dû l'effroya-
ble drame de la rue Aubry-le-Boucher.
C'est à sa partialité inconcevable que
sont dues les récentes poursuites et l'ac-
quittement significatif de La Torre et
Petit.
C'est à l'instinct de brutalité du général
en chef des flics qu'est due la persistance
honteuse des « passages à tabacs », de ces
immondes sévices exercés dans les postes
par les agents de police sur des prison-
niers désarmés.
C'est à son manque de pondération et de
tact qu'est dû. le mécontentement des ins-
pecteurs et du personnel de la préfecture
de police.
Exclusivent préoccupé de parade et
de « bluff )>, M. Lépine n'a exercé aucune
surveillance sur son entourage, et il
n'ignore pas qu'un scandale financier est
sur le point d'éclater, où sont compromis
certains de ses plus hauts collaborateurs.
Sentant sa situation intenable, il affecte
donc de vouloir partir spontanément — et
en beauté ! — avant qu'éclate l'orage qui
l'obligerait à s'en aller.
Depuis quelques semaines, le préfet de
police cherchait un prétexte.
Il l'a trouvé.
» »
UN PRECEDENT
Les rares partisans de l'exécution de
Liabeuf invoquent bien maladroitement,
pour justifier leur intransigeance impi-
toyable, la nécessité de protéger les agents
contre les apaches. Il y a une dizaine
d'années, un agent qui conduisait au
poste un apache quelconque, boulevard
Rochechouart, fut - frappé - mortellement d'un
coup de couteau à la tempe par un « ami »
de ceJui qu'il venait d'arrêter. L'assassin,
un nommé Guyonnard, comparut devant
le jury qui le condamna à mort. Mais
l'exécution n'eut ,pas lieu et sa peine fut
commuée en celle des travaux forcés. Ce-
pendant l'affaire ne comportait auicune
circonstance atténuante. Guyonnard avait
attaqué l'agent làcihement, par derrière, et
avait les antécédents les plus déplorables.
La grâce de Guyonnard, en faveur du-
quel on ne pouvait invoquer aucune cir-
constance atténuante et qui n'avait pas les
excuses de Liabeuf, n'ébranla pas 'les fon-
dements de l'ordre sacré. Et M. Lépine,
déjà préfet de police à cette époque, ne
songea pas alors à démissionner.
1 »
Hpaiseipt-Liberté
Notre Sainte-Mère l'Eglise, qui s'évertue
si adroitement en France au petit jeu nou-
veau « apaisement-liberté », a vraiment,
une singulière façon d'affirmer ses princi-
pes libéraux dans les pays soumis encore
à sa domination.
Ainsi on mande de Barcelone :
Un artisan, redoutant d'être tuberculeux, se
présente à un dispensaire spécial. Pour l'aus-
culter on le fait déshabiller.
— Qu'avez-vous donc là au bras, mon ami ?
— C'est un tatouage, monsieur le docteur,
rapport à mes idées.
Ses idées sont révolutionnaires, le tatouage
aussi. On aurait pu le renvoyer, lui refuser l'ad-
mission, ce qui eût été suffisamment inhumain.
Mais certaines âmes sont davantage compliquées
et ténébreuses.
On l'accepte, on entreprend de le convertir.
Il se montre irréductible. Alors on le rabionne,
ce qui l'affaiblit encore davantage, à ce point
qu'il devient impossible de le chloroformer pour
l'opération. - -
— QueUe opération Y bes poumons i
Non, son bras. Ces dames et ces messieurs
du patronnage, toutes personnes bien pensantes
et confites en dévotion, n'ont toléré l'ennemi
que dans un but : effacer l'emblème attentatoire
à leurs principes.
Et comme on ne peut endormir l'homme sans
risquer de l'achever, ce qui entraînerait trop de
désagréments, comme, d'autre part, il est hors
d'état de se défendre, on lui arrache la peau du
bras — on l'écorche vif.
Puis on le renvoie. Le docteur Queralio dé-
rionce le fait ; Lerroux, député, en appelle à
l'opinion.
« Affaire privée àt dirait M. Brizon..
-. A LA CHAMBRE "-
'-J.
Ea Politique générale
Au nom des radicaux socialistes, M. Maurice
Berteaux dit ce qu'elle doit être.
Des hors-d'œuvre pour commencer..
M. Bénazet sert le premier. Il présente des
petites choses excellentes dans un ravier
agréable. Tout le monde trouve son petit
plat exquis, sauf toutefois le général Brun
qui n'aime que la mauvaise cuisine.
Le député de l'Indre — qui s'intéresse,
non sans compétence — à 1 aviation mili-
: traire ,critique, justement, une décision du
ministre de la guerre qui, contrairement
aux votes du parlement, a fait passer de
l'artillerie au génie les crédits affectés à no-
tre locomotion aérienne.
Avec une louante énergie et une parfaite
documentation, M. Benazet met le général
Chocolat en fâcheuse posture, aux applau-
dissements de la Chambre.
La défense du ministre est piteuse. Ar.
Brun déclare qu'il a voulu « obéir » (cron-
gn'ieu gn'ieu) aux décisions du Sénat et
que les aviateurs ont toutes ses sympa-
thies ! On ne s'en serait jamais douté.
Faut-il ajouter que ces affirmations sont
produites dans un français de caserne.
M. Bénazet est indulgent. Il n'insiste
pas.
Espérons qu'un jour, au lieu de « ques-
tionner n, il interpellera.
VALIDATIONS
Second ravier. C'est un M. Charles Du-
mas qui nous l'offre. Hélas !
M. Charles Dumas est socialiste unifié ;
du moins il est catalogué ainsi. Que dire
de ce bon petit jeune homme ? Il porte des
bottines du verni le plus éclatant ; une
cravate de la soie la plus mauve et la plus
brochée ; une jaquette de coupe de Maxis-
te (ne pas confondre avec Marxiste) ; des
moustaches relevées au petit fer. et au-
tre chose aussi. que nous ne saurions
dire ici.
Il porte aussi des documents, des col-
liers, un revolver, une montre, une carte
et une médaille qui devaient faire invali-
der M. Gérault-Richard.
Si tout autre que M. Dumas eut — avt,
une telle documentation — attaqué le sous-
empereur de la Guadeloupe, celui-ci eût
été certes invalidé.
Mais M. Dumas porte un thermomètre
qui marque soixante-neuf degrés au-des-
sous de celui de M. Brizon.
Il a toute une collection de crécelles
dans la gorge. Quant à ses bras, ils s'é-
lèvent à espaces réguliers vers le plafond
pour retomber automatiquement et en ca-
dence sur la tribune.
C'est l'Empereur du grotesque. M. Brizon
— excellent lieutenant — peut être fier
d'avoir un tel capitaine dont la grammaire
est encore plus « petit nègre » que la sien-
ne. Ce n'est pas que nous entendions dé-
fendre l'élection de M. Gérault-Richard.
Elle nous est -apparue comme. coloniale.
Gardes du corps, montres, verroteries,
rien ne manque, à vrai dire, à cette paro-
die du scrutin.
Et si au lieu de Dumas, un député spi-
rituel et malicieux fut intervenu, pour
combattre cette étrange comédie électorale
— peut-être M. Gérault-Richard eut-il eu
un « triomphe » (?) moins facile.
Mais M. Dumas est' un de ces avocats
qui valent à leurs clients le maximum et à
leurs adversaires le concours du ministère
public.
N'insistons pas et conseillons seule-
ment à M. Dumas de prendre quelques le-
çons chez Sarah Bernhardt, ou même à
<( Bobino-Musie-Hall ».
M. Berry ayant cru devoir faire adopter
le vote nominal, quand une élection est
contestée, on est obligé de perdre une heure
pour -admettre M. Gerault-Rîchardt C'est
beaucoup pour lui.
Et on en revient aux interpellations.
M. BERTEAUX
M. Berteaux monte à la tribune.
Au nom des radicaux socialistes, il pro-
nonce un excellent discours que M. Briand
— un peu nerveux — transforme en dialo-
gue et qui est longuement applaudi par les
gauches.
L'aimable et éminent vice-président de
la Chambre — qui est dans un de ses meil-
leurs jours — précise admirablemenf l'œu-
vre. et les espérances du parti radical so-
cialiste. La déclaration ministérielle ne lui
donne pas toute satisfaction.
Au nom de son parti il veut des expli-
cations — et soutenu par les encourage-
ments mérités des républicains, il amène
M. Briand à intervenir et à promettre
d'autres précisions.
Lors de sa lecture, dit M. Berteaux, la dé-
claration avait recueilli l'approbation de la droite
et du centre. Cette approbation s'était exprimée
les jours suivants dans des interviews qui sem-
blaient attribuer au gouvernement l'intention
d'abandonner en partie le programme républi-
cain.
,
Est-il nécessaire, d'ailleurs, de dire que nous
n'avens jamais pensé que la liberté dût être
l'apanage de quelques-uns ? (Applaudissements
repétés à gauche.) devons-nous dire que nous
n'avons jamais admis que la justice dût être
faussée au; profit d'un parti quelconque ? (Très
bien aux mêmes bancs.)
Etait-il besoin vraiment d'inscrire de pareil-
les affirmations dans une déclaration du gou-
vernement ; et ne semblait-on pas en le fai-
sant, faire ti-cp de cas des accusations sans fon-
dement jetées par ses adversaires à la Répu-
blique ? -
Nous avons donné à nos adversaires toutes
les libertés (Exclamations à droite) : liberté de
réunion, liberté communale, liberté d'associa-
tion.
ix à droite. — Excepté pour les catholi-
ques 1
M. Derteaux. — A ceux qui ont comploté con-.
tre la République, notre justice n'a-t-elle pas fait
Un traitement moins dur qu'aux ouvriers traînés
devant elle ? Nos tribunaux, ont-ils donc été
trop partiaux ? (SaJves d'applaudissements à
0fmr,.htO
M. Lauche - Nous pouvons en témoigner
ici 1
M. Berteaux. — La mauvaise organisation de
la justice produit sans doute des abus regretta-
bles, par exemple quand il s'agit de ! application
des lois de protection ouvrière. (Applaudisse-
ments su>r de nombreux bancs à gauche.)
Nous rit pouvons oublier non plus la situation
défavorable laite aux fonctionnaires qui osent
se déclarer ouvertement républicains. (Bruit à
droite, applaudissements à gaucho et à l'extrê-
me gaucne.) iVa-t-on pas constaté le même ré-
sultat pour les ollicieis qui osent manifester les
mêmes sentiments de loyalisme politique ?
Certes, nous voulons la justuce éyale pour
tous, monsieur le président du conseil ; mais
nous ne voulons pas que ce soit les partis qui
vous soutiennent qui en fassent tou les frans.
(Applaudissements à gauche.)
- oUS ne voulons pas que sous prétexte de
liberté, on puisse. t'ar menaces, einnêcher les
pères de famille, commerçants on ouvriers,
d'envoyer leurs enfants à l'école qui leur con-
vient. (Vifs applaudissements.)
Nos sentiments, d'ailleurs, trouvent un écho
dans le pays, comme le prouve l'entrée. ici
par les « bleus » de Bretagne et de Norman-
die, de nombreuses recrues républicaines. Nous
revendiquons tout notre programme dont nous
entendons ne rien supprimer.
Nous sommes d'accord avec le président du
conseil sur la nécessité de réaliser avant tout
les réformes sociales.
Nous voulons, comme lui, introduire plus de
justice, de cordialité et de sécurité dans les
rapports entre le capital et le travail. NouS nous
rallierons à toutes les propositions tendant à
l'extenon des libertés syndicales. (Très bien 1)
Nous partageons la volonté exprimée par ceux
de nos collègues qui réclament pour le monde
agricole des rélormes indispensables. le monde
Déjà, la République lui a donné les syndicats
agricoles, la loi de protection contre les frau-
des, le bien de famille insaisissable ; elle doit
et veutt poursuivre cette œuvre de progrès.
La déclaration ministérielle, si longue qu'elle
soit, n'a pas tout dit.
Elle a passé sous silence la question des re-
traites des ouvriers et employés de chemins de
fer et celle de la réglementation du travail des
mécaniciens et chaulfeurs.
Il y a huit jours, la délégation de ce person-
nel était reçue par le ministre des travaux pu-
blics, -le président du conseil présent. Ils ont,
l'un et l'autre, reconnu la légitimité des récla-
mations sur la du)'ée du travail et de repos de
ce personnel. Nous demandons qu'ils tiennent
la main à l'observation de la loi.
Si je passe à la loi des retraites ouvrières
et paysanneq, je dois constater qu'une commu-
nication à la presse donne à entendre qu'en dé-
pit des promesses du ministre du travail, son
application ne commencera pas au premier jan-
vier 1911.
M. Briand, président du conseil. - Il n'y a
eu aucune communication officielle a la presse. -
M. Jaurès, — Alors, on ne peut même plus
s'en rapporter à ce que dit le Temps ?
M. Briand. — Vous savez dans quelles condi-
tions difficiles cette réforme si longtemps pro-
mise à été votée.
M. Berteaux. — La déclaration ne dit pas un
mot non plus de la loi des cadres dont la partie
relative à l'artillerie a seule été votée. Elle se
tait sur la réforme des conseils de guerre.
M. Briand. — Pour q\ae cette discussion s'ins-
titue en bonne foi, vous pouvez reprocher à la
déclaration de se taire encore sur bien d'autres
points.
N'oubliez pas que le gouvernement est au
pouvoir depuis plusieurs mois et qu'il ne pou-
vait- pas se prononcer sur un programme gé-
néral.
M. Berteaux. — Le gouvernement doit tfouver
des ressources pour l'équilibre du budget. Peut-
il les demander aux impôts indirects 'l. Non as-
surément. Vous serez amené à l'impôt général
progressif sur le revenu.
Pour aboutir dans cette entreprise, il vous
faudra une majorité avec laquelle yous ayez
nou.é un contrat loyal. (Vifs applaudissements.)
M. Briand. — Il sera loyal de mon côté. C'est
pour cela que j'ai fait une déclaration com-
plète, à propos de laquelle des procès de ten-
dance noujs ont été laits. Il faut que, dès le
début d'une législature, on sache s'il y a en-
tente entre le gouvernement et la majorité. (Ap-
plaudissements au cenfre.)
Je veux un contrat non pour une misérable
vie au jour le jour, dont je ne veux pas, mais
pour une œuvre durable. (Applaudissements au
centre.)
J'espère qulaprès ces explications nos col-
lègues seront renseignés sur les intentions du
gouvernement et son programme, et que l'u-
nion se fera pour la poursuite d'un commun
effort d'un but déterminé.
M. Berteaux. — Nous regrettons, en ce qui
concerne les élections, que le gouvernement ne
les ait pas fait procéder d'un programme indi-
quant les réformes que le pays était en droit
d'attendre du parti républicain. (Vifs applaudis-
sements à gauche.)
M. Ch. Benoîst. — Vous parlez comme un mi-
nitre de la Restauration..
M. Berteaux. — On a .vu, par suite, des
luttes personnelles prendre la place de la ba-
taille d'où devait sortir l'indication élargie des
réformes à réaliser.
J'espère que le gouvernement donnera, à la
Chambre des précisions assez complètes pour
que mes amis et mois puissions lui accorder
notre concours. (Vifs applaudissements à gauche.
L'orateur reçoit les lélicitations de ses collè-
gues.)
Le succès de M. Maurice Berteaux a elè
significatif.
Attendons les réponses promises.
Avant de se séparer, la Chambre ajour-
na une proposition — très judicieuse — de
M. Klotz, demandant que, pour faire res-
pecter l'ordre du jour, les questions impré-
vues ne puissent être posées qu'en fin de
séance.
Lundi suite des interpellions.
Paul Coulon.
— ♦ J
AU SENAT
i
LA RECHERCHE DE LA PATERNITÉ
La séance est ouverte à trois heures et
demie, sous la présidence de M. Antonin
Dubost
On poursuit la discussion de la proposa
tion de M. Rivet sur la recherche de la pa",
ternité.
M. Louis Martin a la parol, e sur l'arti-
cle 4.
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