Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-06-17
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 juin 1910 17 juin 1910
Description : 1910/06/17 (N14707). 1910/06/17 (N14707).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7544156p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/12/2012
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N6 14707. = 2 MESSIDOR, Mi Itfc IIRO" CENTIMES LE - VENDREDI 17 *JUIN 1910. — fl- 14707.
Fondateur t
AUGUSTE VACQUERIÊ ,-
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AUGUSTE VACQUERIE
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TRIBUNE LIBRB; A
L-JLiXr-»
Les Idées de M. Ajam
■ flIHM
Du haut de la tribune de
la Chambre, M. Maurice Ajam
a déclaré la guerre aux mo-
nopoles. Mais, hélas ! ce sont
les monopoles d'Etat qu'il dé-
nonce.
Il n'a pas eu, et cela est fait pour
ëtonner de la part du ferme républi-
cain qu'il est, un mot de désavœu à
l'adresse des monopoleurs de l'indus-
trie privée. Il n'a pas dénoncé le péril
'évident résultant de l'accaparement des
richesses nationales par une féodalité
financière.
Economiste trop averti pour ignorer
le mouvement ascendant des trusts et
des cartels, il ne semble pas qu'il songe
à lui barrer la route.
Aussi bien, il s'est nettement affirmé
fcômme l'adversaire de l'intervention de
l'Etat en matière économique. Et c'est
toute notre législation de protectionnis-
me social qu'il a remise en question,
lorsqu'il a reproché au législateur de
tenir en tutelle « l'ouvrier majeur ».
Non-intervention. Moindre effort en
matière économique tet sociale. Voilà
les idées directrices de la politique dont
il se réclame.
C'est là, a-t-il déclaré, la politique
3u parti anti-étatiste qui s'affirme, du
parti individualiste qui s'annonce.
Individualiste ? Est-ce bien là l'épi-
thète qui convient ? J'en demande par-
don à M. Ajam, pour la science et la
conscience duquel j'ai infiniment d'es-
time, mais ce n'est là qu'un individua-
lisme d'apparence et de surface.
« Libéralisme »,conviendrait beaucoup
mieux. Et derrière ce libéralisme appa-
rait la formule classique de l'égoïste
.« laisser faire et laisser passer ».
Et pourtant, l'honorable député de la
Sarthe n'admet pas, avec l'économie
classique, que tout est pour le mieux
dans le meilleur des mondes.
Il est républicain. Il est démocrate. Il
est peuple, comme il le dit très bien, et
il s'est penché sur les misères du peu-
ple. Mais alors, que propose-t-il pour
les soulager ?
Dénoncer l'interventionnisme ; s'op-
poser aux conquêtes de l'industrialisme
cl'Etat, c'est bientôt dit. Et si l'on con-
sidère que ce remède est pire que le
mal, il faudrait au moins offrir à la
soif de justice de la démocratie politi-
que quelque panacée sociale.
t'impôt progressif sur le revenu, et
par lui la justice fiscale ? Soit. Ce n'est
pas nous qui y contredirons. Et nous
'applaudissons des deux mains lorsque
- M. Ajam déclare qu'il faudra y venir
et qu'aussi bien, quant à lui, il l'ac-
cepte avec toutes ses conséquences.
Mais tout n'est pas dit du même coup.
Et, alors même que l'on aurait établi,
par la refonte totale de notre système
d'impôt, la vérité fiscale, il n'en demeu-
rerait pas moins que la question sociale
n'aurait pas fait un pas.
A l'heure actuelle, ce qui se pose,
c'est tout le problème de la production
et de la répartition des richesses.
Production déréglée et anarchique ;
répartition faussée par le manque de
ressources de la grosse masse des con-
sommateurs, voilà le problème dans
- toute son ampleur.
Que l'ouvrier soit libéré de l'impôt,
en sera-t-il moins un prolétaire dépour-
vu et misérable ?
Que le petit fermier ou le petit com-
merçant voient diminuer leur part de
cHirges fiscales, en seront-ils moins, ce-
lui-ci la victime du grand magasin ac-
capareur, celui-là le tributaire du gros
propriétaire terrien ?
Nous disons, nous, que c'est le devoir
(Je l'Etat « d'intervenir » pour entrer
en possession de grands services indus-
triels qui exercent une influence décisive
sur la production et la richesse du pays;
pour prévenir les dangers que présente
la constitution d'une féodalité capita-
liste rançonnant travailleurs et consom-
mateurs ; pour trouver dans le bénéfice
que ces monopoles peuvent fournir rfes
ressources, soit pour le soulagement des
contribuables, soit pour la réalisation
des réformes sociales.
Voilà la doctrine sociale du parti,
telle que la rappelait avant-hier Ferdi-
nand Buisson, telle qu'elle a été consa-
crée par huit congrès successifs.
C'est l'étatisme qui monte, dira M.
1
Ajam. Et lorsque vous aurez successi-
vement repris tous les monopoles, il se-
ra trop tard pour résister au collecti-
visme, car votre socialisme d'Etat vous
aura mené au bord de l'abîme.
Pardon. L'étatisme n'est pas pour les
radicaux le but définitif. Nous sommes
des individualistes, autant et plus que
les libéraux de l'économie classique.
Les régies d'Etat, comme les régies
communales, sont nécessaires. Elles ne.
seront pas éternelles. Quand le proléta-
riat administratif, groupé dans ses syn-
dicats, aura fortifié son éducation tech-
nique et acquis le sens de ses responsa-
bilités collectives, on ne voit pas ce qui
empêchera l'Etat futur de lui déléguer
la gestion des grands services publics.
Mais, tout d'abord, il convient d'en!
chasser les accapareurs qui échafaudent
de scandaleuses fortunes au détriment,
des travailleurs et du public. Encore une
fois, l'étatisme n'est pas le but. Mais il
-est l'indispensable levier 'de la transfor-
mation sociale-
Emile DESVAUX,
tonseiUer municipal de Paris.
*
LA POLITIQUE
..-
LE PACTE HONTEUX
L'autre jour, tandis que M.
Brizon, nouvel élu socialiste,
•faisait retentir la tribune des
éclats d'une éloquence originale
—qui partait du cœur, mais qui
sortait du nez, — M. Jules JJeiahaye, le
fougueux monarchiste, l'interrompit
avec une rudesse hautaine et lui dit en
propres termes : « N'oublies pas que j'ai-
voté et fait voter pour vous, parte que
vous vous êtes engagé à ne plus manger.
de curé ! j): -
Surpris et penaud, M. Brizon dut aus-
sitôt confesser qu'il avait, en effet, dé-
claré aux électeurs que « la religion au
point de vue socialiste était une affaire
privée >1.
Sur ces entrefaites, le Temps se saisit
de l'incident pour accabler. les radi-
caux J
Sk M. Brizon, dit natre éminent confrè-
re, a fait preuve en matière religieuse
d'un large libéralisme »; et il ajoute :
« les radicaux dont l'anticléricalisme
constitue à peu près tout le programme
feraient bien de méditer la leçon ».
Ils la méditent en effet. Avec tous les
républicains d'esprit laïque demeurés fi-
dèles à l'œuvre essentielle de sécularisa-
tion de la République, ils déplorent ces
pactes honteux entre ceux qui se disent
les fils et les continuateurs de la Révo-
lution française, et les irréductibles dé-
fenseurs de ce régime théocratique qui
demeure l'éternelle école de contre-révo-
lution.
On nous la baille belle en vérité !
'« Affaire privée » l'admirable lutte en-
treprise par la société moderne contre
l'Eglise romaine; « affaire privée », le
magnifique effort de laïcité et d'émanci-
pation morale; « affaire privée », le geste
libérateur de la Séparation !
Vraiment, cette ignorance systématique
du mouvement glorieux de la pensée li-
bre n'est point à l'honneur de M. Brizon,
et le certificat de libéralisme décerné par
le Temp s nous surprend et nous peine.
Quelle puérilité que cette confusion
volontaire entre la question purement
confessionnelle et le problème essentiel
de l'éducation nationale et de l'unité mo-
rale du pays !
On nous recommande l'abandon de la
lutte anticléricale; on nous incite à l'a-
paisement; on nous objecte la nécessité
de consacrer tout notre effort à la réa-
lisation de la « démocratie sociale ».
Mais la « démocratie sociale » doit-
elle reposer sur l'abdication de l'œuvre
d'émancipation laïque à peine accom-
plie ?
La tâche qui commence implique-t-elle
l'abandon du labeur à peine achevé ?
L'apaisement qu'on nous demande,
nos adversaires l'ont-ils consenti ?
N'apparaît-il pas, au contraire, que
l'Eglise romaine se dresse plus que ja-
mais intransigeante et ultramontaine sur 1
le monde entier, et sa tactique en France,
pour être plus hypocrite, plus envelop-
pante, plus perfide, est-elle moins agis-
sante et moins dangereuse ?
Le combat éternel entre l'esprit laïque
et l'esprit théocratique reste donc enga-
gé. Aussi tous ceux qui procèdent réel-
lement de la Révolution française, tous
ceux qui ont recueilli son héritage, tous
ceux qui révèrent ses principes et qui se
consacrent à son service, tous ceux qui
'croient que nous avons de grands de-
voirs vis-à-vis des générations qui nous
ont précédés comme vis-à-vis des généra-
tions futures, estimeront que le premier
de ces devoirs est d'arracher aux con-
tempteurs de la société moderne, de l'or-
dre social et politique dans lequel nous
vivons, l'âme de la jeunesse française.
LES ON-DIT
gel
'Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil à 3 h. 58 du matin ;
Coucher à 8 h. 3 du soir.
Lever de la lune à 1 h. 41 du soir;
Coucher à 1 h. 4 du matin..
Courses à Paris.
AUTREFOIS
Le Rappel, frappé d'interdiction par le
gouvernement de t'Ordre moral, au nom
de la liberté, ne parait pas le 17 juin 1874.
A des cheveux blancs
Le duc de Nivernais, en ce XVIIIe siècle,
où tout le monde avait de l'esprit, répon-
dait à Mme de Mirepoix CI qui lui avait en-
voyé de ses cheveux blancs » :
Quoi ! Vous parlez de cheveux blancs I
Laissons, laissons courir le temps ;
Que vous importe son ravage ?
Les Amours sont toujours enfants
Et les Grâces sont de tout âge.
Pour moi, Thémise, je le sens,
Je suis toujours dans mon printemps
Quand je vous offre mon hommage ;
Si je n'avais que dix-huit ans,
Je pourrais aimer plus longtemps,
Mais non pas aimer davantage (
I
Le dernier Uniforme
'A son uniforme de général en chef des
flics, à son casque de pompier amateur, à
,son dolman de dompteur de chiens, à son
portefeuille d'administrateur de la Compa-
gnie de Suez et à oon flacon de morphine,
M. Lépine entend ajouter un aut're attri-
but.
Un communiqué - émanent évidemment
de la Préfecture de poli-ce — annonce que
« l'éventualité de la grâce de Liabeuf a pro-
voqué urne émotion générale dans le ner-
Bonnel de la Préfecture de police, et l'on
parle, au cas où la pression des révolution-
naires influerait sur la désision de M. Fal-
tières, de démissions sensationnelles. »
Et certains de nos confrères précisent en
affirmant que la plus « sensationnelle » de
ces démissions serait celle de M. Lépine.
Soit. Que M. Lépine s'en aille et qu'on lui
permette de troquer son uniforme de pré-
quelle contre il la redingote du bourreau à la-
quelle il aspire.
A moins toutefois qu'elle n'ait été réser-
vée à ceux de nos confrères qui ont cru
devoir se faire, contre Liabeuf et au profit
de M. Lépine, les pourvoyeurs de la guil-
lotine.
— »
L'Organisation
Cléricale
.4
La faction romaine reprend avec une
particulière âpreté, nous l'avons montré, la
lutte contre l'école laïque.
Son organisation est plus puissante que
jamais.
Notre ami Robelin a pu se procurer, à
cet égard, le rapport général présenté par
le directeur de l'enseignement primaire
privé et qui a été' envoyé à tous les évê-
ques et archevêques de France.
On y voit les résultats obtenus par les
cléricaux.
Tout y est relaté, dit M. Robelin : statistiques
des écoles, formation morale des instituteurs
et des institutrices, placement des maîtres, ré-
sultats de l'enseignement donné, diplômes con-
quis dans les examens. Rien n'y manque, abso-
lument rien.
D'abord, un peu de statistique diocésaine:
« L'enseignement primaire est actuellement
donné par 137 écoles de garçons, 298 écoles de
filles et 15 écoles maternelles ; 18 écoles sont
encore confiées à des congréganistes. que, pouz
cette fois, le vent de la persécution a épargnés; Il
On croit généralement que le parti clérical
ne peut pas mettre debout des écoles norma-
les privées ; la. chose n'est pourtant pas Lm-
possible, puisque nous trouvons dans le rapport
général ces lignes
« Une école normale diocésaine vient d'être
créée ; une trentaine d'élèves en marquent les
débuts ; elles y ont été admises au concours et
confiées à des maîtresses de choix, recrutées
avec la haute approbation épiscopale. n
Le rapporteur général souligne d'une façon
tout à fait précise l'esprit spécial qu'on cher-
che a maintenir parmi le personnel privé. II est
absolument nécessaire, en effet, que les institu-
teurs et institutrices privées restent bien dans
la main des évêques et des curés. Il faut qu'ils
soient soumis, dociles, disciplinés et qu'ils s'en-
traînent les uns les autres dans une gymnasti-
que morale vraiment ascétique. Au surplus, Ji-
sez :
S Le bon esprit qui anime nos instituteurs
s'est affirmé une fois de plus par le chiffre de
ceux qui ont suivi les exercices de nos retrai-
tes de fin d'année.
« Ces retraites ont groupé 380 instituteurs sur
470, auxquels il convient d'ajouter une ving.
taine autorisés à suivre des retraites spéciales.
« Quant aux institutrices, on peut évaluer à
neuf sur dix la proportion de celles qui ont
suivi l'une des nombreuses retraites organisées
a leur intention. Il
D'après ce 'rapport, il n'est pas témê.
raire d'affirmer que sur cent écoles pri-
vées, plus de quatre-vingts sont de vérita-
bles écoles congréganistes soumises à la
direction et au contrôle romains.
En face de cette organisation redoutable,
le -parti républicain a, plus que jamais, le,
devoir impérieux de prendre d'urgence les
mesures qui s'imposent ipour défendre no-
tre enseignement national.
Ci va pial)o.
- ,. ---<'
On reproche souvent au Sénat de « se hâ-
ter lentement » dans l'examen des projets
de loi qui lui -sont soumis par la Chamire.
Il semble bien que ce grief contre la vé-
nérable Haute Assemblée n'est pas tout à
fait déipourvu de fondement.
Le président du Sénat a, en effet, trans-
iflllÏJS hier au Palais-Bourbon toute une série
de propositions dont tes feuillets doivent
être considérablement jaunis.
Citons un projet de loi concernant les
trésoriers-payeurs généraux, qui date de
1890 — vingt ans ! une proposition de loi
sur les dépenses de la police dans la Ville
de Paris qui remonte à 1888 ; une propo-
teition portant aggravation de la peine des
travaux forcés à perpétuité au cai3 où elle
est substituée à la peine de mort, qui date
de 1888 ; une proposition sur La chasse de
de 1888 ; une proposition sur la chasse, de
a vingt-sept ans ! — sur les Ecoles pody-
technique, Saint-Cyr et navale ; une autre
sur la prestation de serment devant les
tribunaux, de 1883 également.
Et, enfin, un projet tendant à compléter
l'article 80 du Code d'instruction crimi-
nelle, daté du 6 mars 1893 et signé de. Ju-
les Ferry.
La justice du Sénat serait-elle lenoore
plus boiteuse que celle des prétoires ?
Les Porte-coton
de M. Ruau
.+:--
Tout comme la te Grande Catherine », ja-
dis, M. Ruau a sa cour.
Elle est avantageusement composée de
porte-coton dont la noblesse du nom le diiJ-
tpuie au mérite.
Et comme M. Ruau est un homme ai-
mable, il a toutes les tendresses pour ses
favoris.
C'est ainsi que M. de Pardieu, devenant
directeur général des haras, M. le ministre
de l'agriculture a désigné pNz le rempla-
cer M. de Sevin, qui ne semble pas avoir
les titres ni la compétence qui s'attachent à
cette haute fonction.
M. de Sevin qui a six ans de grade de
directeur — et n'a cependant jamais dirigé
de dépôt — a été tout récemment promu
à la première classe et inscrit sur le ta-
bleau d'avancement qui compte une dizaine
de fonctionnaires attendant depuis fort
longtemps leur élévation au grade supé-
rieur.
Quelles sont les causes mystérieuses de
la persistante faveur dont jouit M. de Se-
vin ? -
Est-ce parce qu'il combat ouvertement
les institutions républicaines ?
Ou plutôt est-ce parce qu'il est originaire
du département du ministre de l'agricultu-
re, avec lequel sa famille et lui ont d'excel-
lentes relations ?
Les fonctionnaires dont les intérêts sont
lésés par cette nomination estiment, avec
raison, que ces deux titres ne justifient pas
les avancements scandaleux dont bénéficie
M. de Sevin.
- «
Triste Supériorité
.---,
Nous recevons la lettre suivante s
Monsieur le directeur,
Dans le numéro du Rappel portant la date du
mercredi 8 juin, je lis à la première page, sous
le titre : « Supériorité » :
« L'Administration de la marine serait bien
( inspirée en surveillant ses communiqués.
« Coupé, dit-elle, .par un navire abordeur, le
« Pluviôse a coudé de sa voie d'eau, il a coulé
a comme l'eussent fait à sa place un voilier ou
« un torpilleur. Dans les mêmes circonstances,
« on n'eût pas tenté de relever ni un torpilleur
« ni un voilier et c'est une supériorité du Plu-
« viôse que d'avoir été, après huit jours, arra
« ché du fond de la mer, où tout autre navire
a serait éternellement demeuré. 1)
On reste stupéfait devant l'imbécillité d'un tel
communiqué ; l'amiral Bellme lui-même n'eût
pas été capable de transmettre à la presse une
note pareille. D'abord, ni un torpilleur ni un
voilier n'eûssent subi le sort du Pluviôse dans
les mêmes conditions ; il est probable que tout
l'équipage, la plus grande majorité tout au
moins, se fut sauvé du sinistre. En outre, on ne
voit pas très bien la différence qu'il peut y
avoir à soulever du fond de la mer un sous-
marin crevé ou un torpilleur coulé. Il s'agit de
soude ver un poids déterminé, égal au tonnage
du bâtiment, et le nom que porte ce bâtiment
(qu'il s'appelle submersible, voilier ou chalutier)
n'influe en rien sur la difficulté de l'arracher
du fond. Je répète : si un torpilleur de 450 ton-
nes eût été coulé dans les mêmes conditions
que le Pluviôse, tout l'équipage eût eu le temps
de se sauver et la coque du bâtiment eût pu
être tirée du fond dans les mêmes conditions
que le Pluviôse.
Alors, en quoi consiste la supériorité ?
Recevez, monsieur, l'assurance de mes senti-
ments distingués.
R. V.
Lieutenant de vaisseau,
Ancien commandant de sous-marin.
TRIBUNE CORPORATIVE
a
Il xe Cifis il r Aiatln
nraI Is Aunt ta P.T.T.
■ ■ —— » » ■ ■ ■
e notre envoyé spécial)
MarseiHe, 15 juin.,
S'il est une administration de l'Etat où
les aspirations démocratiques du person-
nel devaient témoigner d'une impatience
parfois un peu vive, c'est bien celle des
P. T. T. Et on le conçoit d'autant mieux
après qu'on a pu la comparer à l'adminis-
tration des contributions indirectes dont à
cette même place nous avons récemment
esquissé les .tendances actuelles.
Ici, les textes législatifs issus des, séances
du Parlement sont souvent si imparfaits et
si difficilement applicables que l'agent des
contributions indirectes est, dans une cer-
taine mesure, maître d'en déterminer l'ap-
plication. Ce n'est pas une prescription iL
laquelle il doive aveuglément et ponctuelle-
ment se soumettre ; entre le texte sans vie,
et la réalité il est l'interprète dont l'initia-
tive précieuse et indispensable assure, fi
l'Etat, l'exploitation d'une part considéra-
ble des ressources du pays ; par le défaut
même du travail parlementaire, il est
moins un agent exécuteur, qu'un collabo-
rateur des services financiers de l'Etat.
Rien de semblable chez les P. T. T. Il
y a encore très peu de temps on les con-
sidérait, volontiers, comme des agents
chargés d'exécuter, vaille que vaille, les
circulaires impératives et quelquefois con-
tradictoires, qu'en ces trente dernières
années, l'Administration centrale, dans sa
fécondité un peu désordonnée, a accumu-
lées sur eux.
Aussi, tandis que les agents des contri-
butions indirectes ont plus vite jugé quels
efforts leur étaient nécessaires pour se fai-
re accepter comme des collaborateurs, les
agents des P. T. T. ont dû, pour viser à
n'erre plus des subordonnés, s'attaquer à
de pesantes et inextricables traditions. Et
c'est un point de vue qui éclaire singuliè-
rement l'histoire de leur mouvement vers
une organisation vraiment démocratique
de leur administration, explique les colères
passées et les incertitudes présentes, très
légères, il faut bien le dire.
Il faut résolument s'y placer si l'on veut
bien comprendre le sens des travaux aux-
quels se livrera le X* Congrès de l'Associa-
tion générale des agents, dont la séance
d'ouverture 4 lieu ce matin.
LE CONFLIT
En fait c'est du conflit qui mettaient aux
prises les deux mentalités, celle de l'admi-
nistration centrale, faite d'implacable auto-
ritarisme, et celle des agents des P. T. T.,
avide de discipline librement consentie,
qu'est sortie l'Association générale.
Un rapport du Conseil d'Administration
le note très nettement dès 1903 ; c'est un
document de premiey ordre :
« H y a au fond conflit entre deux ten-
dances.
ci Par instinct de conservation en haut,
par atavisme ou par habitude, en bas,
d'aucuns professent que la discipline im-
posée est la seule garantie de l'ordre pu-
:blic comme de la bonne exécution des ser-
vices.
« Pour ces camarades, courbés dès long-
temps, pour la plupart, sous le poids des
errements .anciens et fidèles à une tradi-
tionnelle erreur, l'autorité d'un chef se
confond avec sa poigne et se manifeste par
elle.
a On ne peut, conséquemment, accepter
que la voix du subordonné parvienne, par
le canal de notre Association générale, di-
rectement aux pouvoirs pubHcs, sans pas-
ser par la filière hiérarchique. De parti
pris on veut considérer notre action com-
me portant atteinte au principe d'auto-
rité.
« Pour nous, l'autorité d'un chef procède
uniquement de sa dignité, de sa valeur
personnelle, de son expérience, "de la droitu-
re de son jugement, de sa paternelle bonté.
Pénétrés que 'la discipline est nécessaire à
la bonne marche des services, nous som-
mes convaincus qu'une conception auto-
cratique de l'organisation est la négation
de toute dignité, de toute conscience chez Je
personnel d'exécution, comme aussi de
tout progrès.
(t Aussi revendiquons-nous hautement le
droit de libre examen et de libre discus-
sion, et tenons-nous à honneur de colla-
borer avec l'Administration supérieure à
l'organisation du service et à l'améliora-
tion de notre condition.
« Par le libre exércice d'un droit nou-
veau. nar le merfectionnement individuel de
chacun d'entre nous, nous aspirons à une
discipline raisonnée, librement consentie
dans la parfaite conscience de nos droits
et de nos devoirs. Seule compatible avec
les plus nobles sentiments humains, la dis-
cipline consentie est aussi la seule qui
puisse inspirer au subordonné l'estime et
le respect de lui-même.
« Nos supérieurs hiérarchiques doivent
s'honorer de ne pas être à la tête d'un
troupeau aveugle ; leur autorité ne saurait
être menacée : bien au contraire, leur
rôle est ennobli et leur prestige grandi par
notre émancipation. »
On sait qu'ayant à dénouer ce conflit,
entre deux tendances, le Ministère Cle-
menceau-Simyan se prononça pour le
principe d'autorité contre les principes dé-
mocratiques.
VERS LE DENOUEMENT
Sans aucun doute le conflit n'est pas en-
core apaisé ; des malentendus subsistent
qu'il faudra dissiper ; mais, enfin, il faut
reconnaître que, soit dans l'Administration
centrale, sous l'impulsion d'une action
d'origine parlementaire, avisée et oppor-
tune, soit dans le personnel des agents des
P. T. T., par l'effet d'une clairvoyance de
plus en plus grande, de ses intérêts, de
ses droits et de ses devoirs, l'Association
général se trouve engagée dans une vois
nouvelle.
Ce n'est pas encore entre t'A. G. et
l'Administration centrale la confiance ab-
solue ; mais ce n'est plus la défiance.
De récentes mesures prises par le Minis-
tère des Postes et Télégraphes ont évidem-
ment préparé ce terrain de transition; c'est
ainsi qu'en acceptant La collaboration -
(d ailleurs facultative pour le Ministre) -
des délégués des P. T. T. dans un domaine
très restreint de l'Administration, le Minis-
tère a admis le principe même de la co4«
taboration. Mais ce premier essai a, d'au-
tre part, été préconisé et élaboré en de-
hors de la volonté de l'A. G. A la satisfac-
tion qui devrait en résulter pour elle se
mêle une vague inquiétude ; et c'est cet
état d'esprit qui explique les préoccupa-
tions du Congrès de cette année.
Et c'est d'abord sur cette question des
délégués que porteront les débats. La qua-
trième commission est chargée, en effet,
de tout ce qui concerne la collaixvmtion dix
personnel avec l'Administration. Ses tra-
vaux porteront sur : le décret du 19 janvier
1910 (relatif aux délégués), l'avancement
de grade et les commissions d'avance-
ment, les conseils de discipiine, les comi.
tés teohniques, le conseil d'administration
des P. T. T. et les comités mixtes locaux
et le conseil supérieur des P. T. T.
Mais pour triompher il faut être unis et
forts. C'est à quoi tendra la Fédération na-
tionale de l'A. G., du Syndicat des ou-
vriers des lignes, et du Syndicat des sous-
agents lorsqu'elles sera vraiment fondée
conformément au principe admis l'an der-
nier par le Congrès de Paris. C'est ce qui
fera l'objet des travaux de la 6' commis-
sion, qui devra en outre étudier quelle
forme, syndicale ou association, permet-
tra à l'A. G. l'action la plus efficace.
SEANCE D'OUVERTURE
Ce matin, ces diverses préoccupations
n'ont pas encore eu l'ocasion de se mani-
fester.
La séance a été consacrée A la vérifica-
tion des pouvoirs, sous la présidence de
M. Quilici, récemment réintégré.
Auparavant, M. Julien, du groupe de
Marseille, a souhaité la bienvenue aux cent
cinquante congressistes, venus de tous les
points-de la France, et aux délégués des
Associations postales, télégraphiques et Lê-
léphoniques d'Angleterre, de Suisse et de
Bie.
Une seule chose est à retenir : c'est la
tendance que révèle le rapport de M, Pro-
vost, secrétaire général de l'A. G. On y
découvre une horreur des formules, doc-
trines et théories d'ordre politique ou so-
cial, et une inclination très marquée à étu-
dietr les problèmes qui se posent au sein
de l'A. G. avec le seul souci de les résou-
dre par eux-mêmes et en eux-mêmes sans
puiser des armes dans l'arsenal philoso-
phico-social ou politique, dont ont tén-
dance à abuser nombre d'associations cor-
poratives. Le ferme propos de rechercher
des solutions réalisables, des conclusions
précises et claires et un instinctif besoin
de réalisation, c'est ce qui fait la partie
vraiment Intéressante de ce rapport : elle
reflète d'ailleurs un état d'espnt que l'on
retrouve également chez M. Brangé, lequel
a fait sur la question des retraites des
fonctionnaires un livre remarquable par
la netteté des vues et la mesure.
Enfin, dans le même ordre d'idées et 1
des degrés divers, il semble que l'A. G.
soit vraiment disposée à discuter avec la
haute administration en dépit d'une dé-
fiance qui s'éteindra difficilement et qui
s'explique d'ailleurs fort bien.
Notons enfin que, successivement, M.
Rooca, au nom de ['U. C. des contribu-
tions indirectes ; Vergés, délégué de l'U. C.
des douanes; Poron, délégué des ouvriers
des lignes ; le délégué des sous-agents des
Postes sont venus témoigner de la solidari-
té qui unit et doit unir les fonctionnaires
dans leurs revendications.
La conception d'une Fédération natio-
nale de plus en plus cohérente des asso-
ciations de fonctionnaires paraît se déga-
ger de tous les discours prononcés. Elle
témoigne surtout que les droits des fonc-
tionnàres gagnent en précision chaque
jour, puisqu'ils tendent à revêtir une forme
juridique et abstraite dépouillée de toutes
les contingences.
C'est un fait nouveau.
ROBERT ROUSSEAU.
1 Coulisses des Chambres
LES ÉLECTIONS CONTESTÉES
Charente. — Le 2* bureau a entendu hier,
M. Poitou-Duplessis, député de la 20 cir-
conscription d'Angoulême, et son concur-
rent aux dernières élection6, M. Nulac, dé-
puté sortant.
M. Nulac demande — on le sait — l'inva-
lidation de M. Poitou-Duplessis en se ba-
sant sur l'engagement pris par ce dernier,
au cours de la campagne électorale, de
distribuer aux bureaux de bienfaisance de
l'arrondissement la somme équivalant &
l'augmentation de l'indemnité législative.
Le bureau s'est trouvé d'ans l'impossibi-
lité de statuer pour on contre l'invalida-
tion. Après avoir repoussé une demande
d'enquêtè par 14 voix contre 6, le bureau
s'est partagé pour l'invalidation en deux
fractions numériquement égaies. Au scru-
tin public l'invalidation a recueilli 11 voix
contre 11 ; au scrutin secret 13 contre 13.
Finalement, le bureau a chargé M. Théo.
dore Reinach de faire un rapport exposant
simplement les faits et laissant à la Chaim-
N6 14707. = 2 MESSIDOR, Mi Itfc IIRO" CENTIMES LE - VENDREDI 17 *JUIN 1910. — fl- 14707.
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AUGUSTE VACQUERIÊ ,-
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L - ", -
TRIBUNE LIBRB; A
L-JLiXr-»
Les Idées de M. Ajam
■ flIHM
Du haut de la tribune de
la Chambre, M. Maurice Ajam
a déclaré la guerre aux mo-
nopoles. Mais, hélas ! ce sont
les monopoles d'Etat qu'il dé-
nonce.
Il n'a pas eu, et cela est fait pour
ëtonner de la part du ferme républi-
cain qu'il est, un mot de désavœu à
l'adresse des monopoleurs de l'indus-
trie privée. Il n'a pas dénoncé le péril
'évident résultant de l'accaparement des
richesses nationales par une féodalité
financière.
Economiste trop averti pour ignorer
le mouvement ascendant des trusts et
des cartels, il ne semble pas qu'il songe
à lui barrer la route.
Aussi bien, il s'est nettement affirmé
fcômme l'adversaire de l'intervention de
l'Etat en matière économique. Et c'est
toute notre législation de protectionnis-
me social qu'il a remise en question,
lorsqu'il a reproché au législateur de
tenir en tutelle « l'ouvrier majeur ».
Non-intervention. Moindre effort en
matière économique tet sociale. Voilà
les idées directrices de la politique dont
il se réclame.
C'est là, a-t-il déclaré, la politique
3u parti anti-étatiste qui s'affirme, du
parti individualiste qui s'annonce.
Individualiste ? Est-ce bien là l'épi-
thète qui convient ? J'en demande par-
don à M. Ajam, pour la science et la
conscience duquel j'ai infiniment d'es-
time, mais ce n'est là qu'un individua-
lisme d'apparence et de surface.
« Libéralisme »,conviendrait beaucoup
mieux. Et derrière ce libéralisme appa-
rait la formule classique de l'égoïste
.« laisser faire et laisser passer ».
Et pourtant, l'honorable député de la
Sarthe n'admet pas, avec l'économie
classique, que tout est pour le mieux
dans le meilleur des mondes.
Il est républicain. Il est démocrate. Il
est peuple, comme il le dit très bien, et
il s'est penché sur les misères du peu-
ple. Mais alors, que propose-t-il pour
les soulager ?
Dénoncer l'interventionnisme ; s'op-
poser aux conquêtes de l'industrialisme
cl'Etat, c'est bientôt dit. Et si l'on con-
sidère que ce remède est pire que le
mal, il faudrait au moins offrir à la
soif de justice de la démocratie politi-
que quelque panacée sociale.
t'impôt progressif sur le revenu, et
par lui la justice fiscale ? Soit. Ce n'est
pas nous qui y contredirons. Et nous
'applaudissons des deux mains lorsque
- M. Ajam déclare qu'il faudra y venir
et qu'aussi bien, quant à lui, il l'ac-
cepte avec toutes ses conséquences.
Mais tout n'est pas dit du même coup.
Et, alors même que l'on aurait établi,
par la refonte totale de notre système
d'impôt, la vérité fiscale, il n'en demeu-
rerait pas moins que la question sociale
n'aurait pas fait un pas.
A l'heure actuelle, ce qui se pose,
c'est tout le problème de la production
et de la répartition des richesses.
Production déréglée et anarchique ;
répartition faussée par le manque de
ressources de la grosse masse des con-
sommateurs, voilà le problème dans
- toute son ampleur.
Que l'ouvrier soit libéré de l'impôt,
en sera-t-il moins un prolétaire dépour-
vu et misérable ?
Que le petit fermier ou le petit com-
merçant voient diminuer leur part de
cHirges fiscales, en seront-ils moins, ce-
lui-ci la victime du grand magasin ac-
capareur, celui-là le tributaire du gros
propriétaire terrien ?
Nous disons, nous, que c'est le devoir
(Je l'Etat « d'intervenir » pour entrer
en possession de grands services indus-
triels qui exercent une influence décisive
sur la production et la richesse du pays;
pour prévenir les dangers que présente
la constitution d'une féodalité capita-
liste rançonnant travailleurs et consom-
mateurs ; pour trouver dans le bénéfice
que ces monopoles peuvent fournir rfes
ressources, soit pour le soulagement des
contribuables, soit pour la réalisation
des réformes sociales.
Voilà la doctrine sociale du parti,
telle que la rappelait avant-hier Ferdi-
nand Buisson, telle qu'elle a été consa-
crée par huit congrès successifs.
C'est l'étatisme qui monte, dira M.
1
Ajam. Et lorsque vous aurez successi-
vement repris tous les monopoles, il se-
ra trop tard pour résister au collecti-
visme, car votre socialisme d'Etat vous
aura mené au bord de l'abîme.
Pardon. L'étatisme n'est pas pour les
radicaux le but définitif. Nous sommes
des individualistes, autant et plus que
les libéraux de l'économie classique.
Les régies d'Etat, comme les régies
communales, sont nécessaires. Elles ne.
seront pas éternelles. Quand le proléta-
riat administratif, groupé dans ses syn-
dicats, aura fortifié son éducation tech-
nique et acquis le sens de ses responsa-
bilités collectives, on ne voit pas ce qui
empêchera l'Etat futur de lui déléguer
la gestion des grands services publics.
Mais, tout d'abord, il convient d'en!
chasser les accapareurs qui échafaudent
de scandaleuses fortunes au détriment,
des travailleurs et du public. Encore une
fois, l'étatisme n'est pas le but. Mais il
-est l'indispensable levier 'de la transfor-
mation sociale-
Emile DESVAUX,
tonseiUer municipal de Paris.
*
LA POLITIQUE
..-
LE PACTE HONTEUX
L'autre jour, tandis que M.
Brizon, nouvel élu socialiste,
•faisait retentir la tribune des
éclats d'une éloquence originale
—qui partait du cœur, mais qui
sortait du nez, — M. Jules JJeiahaye, le
fougueux monarchiste, l'interrompit
avec une rudesse hautaine et lui dit en
propres termes : « N'oublies pas que j'ai-
voté et fait voter pour vous, parte que
vous vous êtes engagé à ne plus manger.
de curé ! j): -
Surpris et penaud, M. Brizon dut aus-
sitôt confesser qu'il avait, en effet, dé-
claré aux électeurs que « la religion au
point de vue socialiste était une affaire
privée >1.
Sur ces entrefaites, le Temps se saisit
de l'incident pour accabler. les radi-
caux J
Sk M. Brizon, dit natre éminent confrè-
re, a fait preuve en matière religieuse
d'un large libéralisme »; et il ajoute :
« les radicaux dont l'anticléricalisme
constitue à peu près tout le programme
feraient bien de méditer la leçon ».
Ils la méditent en effet. Avec tous les
républicains d'esprit laïque demeurés fi-
dèles à l'œuvre essentielle de sécularisa-
tion de la République, ils déplorent ces
pactes honteux entre ceux qui se disent
les fils et les continuateurs de la Révo-
lution française, et les irréductibles dé-
fenseurs de ce régime théocratique qui
demeure l'éternelle école de contre-révo-
lution.
On nous la baille belle en vérité !
'« Affaire privée » l'admirable lutte en-
treprise par la société moderne contre
l'Eglise romaine; « affaire privée », le
magnifique effort de laïcité et d'émanci-
pation morale; « affaire privée », le geste
libérateur de la Séparation !
Vraiment, cette ignorance systématique
du mouvement glorieux de la pensée li-
bre n'est point à l'honneur de M. Brizon,
et le certificat de libéralisme décerné par
le Temp s nous surprend et nous peine.
Quelle puérilité que cette confusion
volontaire entre la question purement
confessionnelle et le problème essentiel
de l'éducation nationale et de l'unité mo-
rale du pays !
On nous recommande l'abandon de la
lutte anticléricale; on nous incite à l'a-
paisement; on nous objecte la nécessité
de consacrer tout notre effort à la réa-
lisation de la « démocratie sociale ».
Mais la « démocratie sociale » doit-
elle reposer sur l'abdication de l'œuvre
d'émancipation laïque à peine accom-
plie ?
La tâche qui commence implique-t-elle
l'abandon du labeur à peine achevé ?
L'apaisement qu'on nous demande,
nos adversaires l'ont-ils consenti ?
N'apparaît-il pas, au contraire, que
l'Eglise romaine se dresse plus que ja-
mais intransigeante et ultramontaine sur 1
le monde entier, et sa tactique en France,
pour être plus hypocrite, plus envelop-
pante, plus perfide, est-elle moins agis-
sante et moins dangereuse ?
Le combat éternel entre l'esprit laïque
et l'esprit théocratique reste donc enga-
gé. Aussi tous ceux qui procèdent réel-
lement de la Révolution française, tous
ceux qui ont recueilli son héritage, tous
ceux qui révèrent ses principes et qui se
consacrent à son service, tous ceux qui
'croient que nous avons de grands de-
voirs vis-à-vis des générations qui nous
ont précédés comme vis-à-vis des généra-
tions futures, estimeront que le premier
de ces devoirs est d'arracher aux con-
tempteurs de la société moderne, de l'or-
dre social et politique dans lequel nous
vivons, l'âme de la jeunesse française.
LES ON-DIT
gel
'Aujourd'hui jeudi :
Lever du soleil à 3 h. 58 du matin ;
Coucher à 8 h. 3 du soir.
Lever de la lune à 1 h. 41 du soir;
Coucher à 1 h. 4 du matin..
Courses à Paris.
AUTREFOIS
Le Rappel, frappé d'interdiction par le
gouvernement de t'Ordre moral, au nom
de la liberté, ne parait pas le 17 juin 1874.
A des cheveux blancs
Le duc de Nivernais, en ce XVIIIe siècle,
où tout le monde avait de l'esprit, répon-
dait à Mme de Mirepoix CI qui lui avait en-
voyé de ses cheveux blancs » :
Quoi ! Vous parlez de cheveux blancs I
Laissons, laissons courir le temps ;
Que vous importe son ravage ?
Les Amours sont toujours enfants
Et les Grâces sont de tout âge.
Pour moi, Thémise, je le sens,
Je suis toujours dans mon printemps
Quand je vous offre mon hommage ;
Si je n'avais que dix-huit ans,
Je pourrais aimer plus longtemps,
Mais non pas aimer davantage (
I
Le dernier Uniforme
'A son uniforme de général en chef des
flics, à son casque de pompier amateur, à
,son dolman de dompteur de chiens, à son
portefeuille d'administrateur de la Compa-
gnie de Suez et à oon flacon de morphine,
M. Lépine entend ajouter un aut're attri-
but.
Un communiqué - émanent évidemment
de la Préfecture de poli-ce — annonce que
« l'éventualité de la grâce de Liabeuf a pro-
voqué urne émotion générale dans le ner-
Bonnel de la Préfecture de police, et l'on
parle, au cas où la pression des révolution-
naires influerait sur la désision de M. Fal-
tières, de démissions sensationnelles. »
Et certains de nos confrères précisent en
affirmant que la plus « sensationnelle » de
ces démissions serait celle de M. Lépine.
Soit. Que M. Lépine s'en aille et qu'on lui
permette de troquer son uniforme de pré-
quelle contre il la redingote du bourreau à la-
quelle il aspire.
A moins toutefois qu'elle n'ait été réser-
vée à ceux de nos confrères qui ont cru
devoir se faire, contre Liabeuf et au profit
de M. Lépine, les pourvoyeurs de la guil-
lotine.
— »
L'Organisation
Cléricale
.4
La faction romaine reprend avec une
particulière âpreté, nous l'avons montré, la
lutte contre l'école laïque.
Son organisation est plus puissante que
jamais.
Notre ami Robelin a pu se procurer, à
cet égard, le rapport général présenté par
le directeur de l'enseignement primaire
privé et qui a été' envoyé à tous les évê-
ques et archevêques de France.
On y voit les résultats obtenus par les
cléricaux.
Tout y est relaté, dit M. Robelin : statistiques
des écoles, formation morale des instituteurs
et des institutrices, placement des maîtres, ré-
sultats de l'enseignement donné, diplômes con-
quis dans les examens. Rien n'y manque, abso-
lument rien.
D'abord, un peu de statistique diocésaine:
« L'enseignement primaire est actuellement
donné par 137 écoles de garçons, 298 écoles de
filles et 15 écoles maternelles ; 18 écoles sont
encore confiées à des congréganistes. que, pouz
cette fois, le vent de la persécution a épargnés; Il
On croit généralement que le parti clérical
ne peut pas mettre debout des écoles norma-
les privées ; la. chose n'est pourtant pas Lm-
possible, puisque nous trouvons dans le rapport
général ces lignes
« Une école normale diocésaine vient d'être
créée ; une trentaine d'élèves en marquent les
débuts ; elles y ont été admises au concours et
confiées à des maîtresses de choix, recrutées
avec la haute approbation épiscopale. n
Le rapporteur général souligne d'une façon
tout à fait précise l'esprit spécial qu'on cher-
che a maintenir parmi le personnel privé. II est
absolument nécessaire, en effet, que les institu-
teurs et institutrices privées restent bien dans
la main des évêques et des curés. Il faut qu'ils
soient soumis, dociles, disciplinés et qu'ils s'en-
traînent les uns les autres dans une gymnasti-
que morale vraiment ascétique. Au surplus, Ji-
sez :
S Le bon esprit qui anime nos instituteurs
s'est affirmé une fois de plus par le chiffre de
ceux qui ont suivi les exercices de nos retrai-
tes de fin d'année.
« Ces retraites ont groupé 380 instituteurs sur
470, auxquels il convient d'ajouter une ving.
taine autorisés à suivre des retraites spéciales.
« Quant aux institutrices, on peut évaluer à
neuf sur dix la proportion de celles qui ont
suivi l'une des nombreuses retraites organisées
a leur intention. Il
D'après ce 'rapport, il n'est pas témê.
raire d'affirmer que sur cent écoles pri-
vées, plus de quatre-vingts sont de vérita-
bles écoles congréganistes soumises à la
direction et au contrôle romains.
En face de cette organisation redoutable,
le -parti républicain a, plus que jamais, le,
devoir impérieux de prendre d'urgence les
mesures qui s'imposent ipour défendre no-
tre enseignement national.
Ci va pial)o.
- ,. ---<'
On reproche souvent au Sénat de « se hâ-
ter lentement » dans l'examen des projets
de loi qui lui -sont soumis par la Chamire.
Il semble bien que ce grief contre la vé-
nérable Haute Assemblée n'est pas tout à
fait déipourvu de fondement.
Le président du Sénat a, en effet, trans-
iflllÏJS hier au Palais-Bourbon toute une série
de propositions dont tes feuillets doivent
être considérablement jaunis.
Citons un projet de loi concernant les
trésoriers-payeurs généraux, qui date de
1890 — vingt ans ! une proposition de loi
sur les dépenses de la police dans la Ville
de Paris qui remonte à 1888 ; une propo-
teition portant aggravation de la peine des
travaux forcés à perpétuité au cai3 où elle
est substituée à la peine de mort, qui date
de 1888 ; une proposition sur La chasse de
de 1888 ; une proposition sur la chasse, de
a vingt-sept ans ! — sur les Ecoles pody-
technique, Saint-Cyr et navale ; une autre
sur la prestation de serment devant les
tribunaux, de 1883 également.
Et, enfin, un projet tendant à compléter
l'article 80 du Code d'instruction crimi-
nelle, daté du 6 mars 1893 et signé de. Ju-
les Ferry.
La justice du Sénat serait-elle lenoore
plus boiteuse que celle des prétoires ?
Les Porte-coton
de M. Ruau
.+:--
Tout comme la te Grande Catherine », ja-
dis, M. Ruau a sa cour.
Elle est avantageusement composée de
porte-coton dont la noblesse du nom le diiJ-
tpuie au mérite.
Et comme M. Ruau est un homme ai-
mable, il a toutes les tendresses pour ses
favoris.
C'est ainsi que M. de Pardieu, devenant
directeur général des haras, M. le ministre
de l'agriculture a désigné pNz le rempla-
cer M. de Sevin, qui ne semble pas avoir
les titres ni la compétence qui s'attachent à
cette haute fonction.
M. de Sevin qui a six ans de grade de
directeur — et n'a cependant jamais dirigé
de dépôt — a été tout récemment promu
à la première classe et inscrit sur le ta-
bleau d'avancement qui compte une dizaine
de fonctionnaires attendant depuis fort
longtemps leur élévation au grade supé-
rieur.
Quelles sont les causes mystérieuses de
la persistante faveur dont jouit M. de Se-
vin ? -
Est-ce parce qu'il combat ouvertement
les institutions républicaines ?
Ou plutôt est-ce parce qu'il est originaire
du département du ministre de l'agricultu-
re, avec lequel sa famille et lui ont d'excel-
lentes relations ?
Les fonctionnaires dont les intérêts sont
lésés par cette nomination estiment, avec
raison, que ces deux titres ne justifient pas
les avancements scandaleux dont bénéficie
M. de Sevin.
- «
Triste Supériorité
.---,
Nous recevons la lettre suivante s
Monsieur le directeur,
Dans le numéro du Rappel portant la date du
mercredi 8 juin, je lis à la première page, sous
le titre : « Supériorité » :
« L'Administration de la marine serait bien
( inspirée en surveillant ses communiqués.
« Coupé, dit-elle, .par un navire abordeur, le
« Pluviôse a coudé de sa voie d'eau, il a coulé
a comme l'eussent fait à sa place un voilier ou
« un torpilleur. Dans les mêmes circonstances,
« on n'eût pas tenté de relever ni un torpilleur
« ni un voilier et c'est une supériorité du Plu-
« viôse que d'avoir été, après huit jours, arra
« ché du fond de la mer, où tout autre navire
a serait éternellement demeuré. 1)
On reste stupéfait devant l'imbécillité d'un tel
communiqué ; l'amiral Bellme lui-même n'eût
pas été capable de transmettre à la presse une
note pareille. D'abord, ni un torpilleur ni un
voilier n'eûssent subi le sort du Pluviôse dans
les mêmes conditions ; il est probable que tout
l'équipage, la plus grande majorité tout au
moins, se fut sauvé du sinistre. En outre, on ne
voit pas très bien la différence qu'il peut y
avoir à soulever du fond de la mer un sous-
marin crevé ou un torpilleur coulé. Il s'agit de
soude ver un poids déterminé, égal au tonnage
du bâtiment, et le nom que porte ce bâtiment
(qu'il s'appelle submersible, voilier ou chalutier)
n'influe en rien sur la difficulté de l'arracher
du fond. Je répète : si un torpilleur de 450 ton-
nes eût été coulé dans les mêmes conditions
que le Pluviôse, tout l'équipage eût eu le temps
de se sauver et la coque du bâtiment eût pu
être tirée du fond dans les mêmes conditions
que le Pluviôse.
Alors, en quoi consiste la supériorité ?
Recevez, monsieur, l'assurance de mes senti-
ments distingués.
R. V.
Lieutenant de vaisseau,
Ancien commandant de sous-marin.
TRIBUNE CORPORATIVE
a
Il xe Cifis il r Aiatln
nraI Is Aunt ta P.T.T.
■ ■ —— » » ■ ■ ■
e notre envoyé spécial)
MarseiHe, 15 juin.,
S'il est une administration de l'Etat où
les aspirations démocratiques du person-
nel devaient témoigner d'une impatience
parfois un peu vive, c'est bien celle des
P. T. T. Et on le conçoit d'autant mieux
après qu'on a pu la comparer à l'adminis-
tration des contributions indirectes dont à
cette même place nous avons récemment
esquissé les .tendances actuelles.
Ici, les textes législatifs issus des, séances
du Parlement sont souvent si imparfaits et
si difficilement applicables que l'agent des
contributions indirectes est, dans une cer-
taine mesure, maître d'en déterminer l'ap-
plication. Ce n'est pas une prescription iL
laquelle il doive aveuglément et ponctuelle-
ment se soumettre ; entre le texte sans vie,
et la réalité il est l'interprète dont l'initia-
tive précieuse et indispensable assure, fi
l'Etat, l'exploitation d'une part considéra-
ble des ressources du pays ; par le défaut
même du travail parlementaire, il est
moins un agent exécuteur, qu'un collabo-
rateur des services financiers de l'Etat.
Rien de semblable chez les P. T. T. Il
y a encore très peu de temps on les con-
sidérait, volontiers, comme des agents
chargés d'exécuter, vaille que vaille, les
circulaires impératives et quelquefois con-
tradictoires, qu'en ces trente dernières
années, l'Administration centrale, dans sa
fécondité un peu désordonnée, a accumu-
lées sur eux.
Aussi, tandis que les agents des contri-
butions indirectes ont plus vite jugé quels
efforts leur étaient nécessaires pour se fai-
re accepter comme des collaborateurs, les
agents des P. T. T. ont dû, pour viser à
n'erre plus des subordonnés, s'attaquer à
de pesantes et inextricables traditions. Et
c'est un point de vue qui éclaire singuliè-
rement l'histoire de leur mouvement vers
une organisation vraiment démocratique
de leur administration, explique les colères
passées et les incertitudes présentes, très
légères, il faut bien le dire.
Il faut résolument s'y placer si l'on veut
bien comprendre le sens des travaux aux-
quels se livrera le X* Congrès de l'Associa-
tion générale des agents, dont la séance
d'ouverture 4 lieu ce matin.
LE CONFLIT
En fait c'est du conflit qui mettaient aux
prises les deux mentalités, celle de l'admi-
nistration centrale, faite d'implacable auto-
ritarisme, et celle des agents des P. T. T.,
avide de discipline librement consentie,
qu'est sortie l'Association générale.
Un rapport du Conseil d'Administration
le note très nettement dès 1903 ; c'est un
document de premiey ordre :
« H y a au fond conflit entre deux ten-
dances.
ci Par instinct de conservation en haut,
par atavisme ou par habitude, en bas,
d'aucuns professent que la discipline im-
posée est la seule garantie de l'ordre pu-
:blic comme de la bonne exécution des ser-
vices.
« Pour ces camarades, courbés dès long-
temps, pour la plupart, sous le poids des
errements .anciens et fidèles à une tradi-
tionnelle erreur, l'autorité d'un chef se
confond avec sa poigne et se manifeste par
elle.
a On ne peut, conséquemment, accepter
que la voix du subordonné parvienne, par
le canal de notre Association générale, di-
rectement aux pouvoirs pubHcs, sans pas-
ser par la filière hiérarchique. De parti
pris on veut considérer notre action com-
me portant atteinte au principe d'auto-
rité.
« Pour nous, l'autorité d'un chef procède
uniquement de sa dignité, de sa valeur
personnelle, de son expérience, "de la droitu-
re de son jugement, de sa paternelle bonté.
Pénétrés que 'la discipline est nécessaire à
la bonne marche des services, nous som-
mes convaincus qu'une conception auto-
cratique de l'organisation est la négation
de toute dignité, de toute conscience chez Je
personnel d'exécution, comme aussi de
tout progrès.
(t Aussi revendiquons-nous hautement le
droit de libre examen et de libre discus-
sion, et tenons-nous à honneur de colla-
borer avec l'Administration supérieure à
l'organisation du service et à l'améliora-
tion de notre condition.
« Par le libre exércice d'un droit nou-
veau. nar le merfectionnement individuel de
chacun d'entre nous, nous aspirons à une
discipline raisonnée, librement consentie
dans la parfaite conscience de nos droits
et de nos devoirs. Seule compatible avec
les plus nobles sentiments humains, la dis-
cipline consentie est aussi la seule qui
puisse inspirer au subordonné l'estime et
le respect de lui-même.
« Nos supérieurs hiérarchiques doivent
s'honorer de ne pas être à la tête d'un
troupeau aveugle ; leur autorité ne saurait
être menacée : bien au contraire, leur
rôle est ennobli et leur prestige grandi par
notre émancipation. »
On sait qu'ayant à dénouer ce conflit,
entre deux tendances, le Ministère Cle-
menceau-Simyan se prononça pour le
principe d'autorité contre les principes dé-
mocratiques.
VERS LE DENOUEMENT
Sans aucun doute le conflit n'est pas en-
core apaisé ; des malentendus subsistent
qu'il faudra dissiper ; mais, enfin, il faut
reconnaître que, soit dans l'Administration
centrale, sous l'impulsion d'une action
d'origine parlementaire, avisée et oppor-
tune, soit dans le personnel des agents des
P. T. T., par l'effet d'une clairvoyance de
plus en plus grande, de ses intérêts, de
ses droits et de ses devoirs, l'Association
général se trouve engagée dans une vois
nouvelle.
Ce n'est pas encore entre t'A. G. et
l'Administration centrale la confiance ab-
solue ; mais ce n'est plus la défiance.
De récentes mesures prises par le Minis-
tère des Postes et Télégraphes ont évidem-
ment préparé ce terrain de transition; c'est
ainsi qu'en acceptant La collaboration -
(d ailleurs facultative pour le Ministre) -
des délégués des P. T. T. dans un domaine
très restreint de l'Administration, le Minis-
tère a admis le principe même de la co4«
taboration. Mais ce premier essai a, d'au-
tre part, été préconisé et élaboré en de-
hors de la volonté de l'A. G. A la satisfac-
tion qui devrait en résulter pour elle se
mêle une vague inquiétude ; et c'est cet
état d'esprit qui explique les préoccupa-
tions du Congrès de cette année.
Et c'est d'abord sur cette question des
délégués que porteront les débats. La qua-
trième commission est chargée, en effet,
de tout ce qui concerne la collaixvmtion dix
personnel avec l'Administration. Ses tra-
vaux porteront sur : le décret du 19 janvier
1910 (relatif aux délégués), l'avancement
de grade et les commissions d'avance-
ment, les conseils de discipiine, les comi.
tés teohniques, le conseil d'administration
des P. T. T. et les comités mixtes locaux
et le conseil supérieur des P. T. T.
Mais pour triompher il faut être unis et
forts. C'est à quoi tendra la Fédération na-
tionale de l'A. G., du Syndicat des ou-
vriers des lignes, et du Syndicat des sous-
agents lorsqu'elles sera vraiment fondée
conformément au principe admis l'an der-
nier par le Congrès de Paris. C'est ce qui
fera l'objet des travaux de la 6' commis-
sion, qui devra en outre étudier quelle
forme, syndicale ou association, permet-
tra à l'A. G. l'action la plus efficace.
SEANCE D'OUVERTURE
Ce matin, ces diverses préoccupations
n'ont pas encore eu l'ocasion de se mani-
fester.
La séance a été consacrée A la vérifica-
tion des pouvoirs, sous la présidence de
M. Quilici, récemment réintégré.
Auparavant, M. Julien, du groupe de
Marseille, a souhaité la bienvenue aux cent
cinquante congressistes, venus de tous les
points-de la France, et aux délégués des
Associations postales, télégraphiques et Lê-
léphoniques d'Angleterre, de Suisse et de
Bie.
Une seule chose est à retenir : c'est la
tendance que révèle le rapport de M, Pro-
vost, secrétaire général de l'A. G. On y
découvre une horreur des formules, doc-
trines et théories d'ordre politique ou so-
cial, et une inclination très marquée à étu-
dietr les problèmes qui se posent au sein
de l'A. G. avec le seul souci de les résou-
dre par eux-mêmes et en eux-mêmes sans
puiser des armes dans l'arsenal philoso-
phico-social ou politique, dont ont tén-
dance à abuser nombre d'associations cor-
poratives. Le ferme propos de rechercher
des solutions réalisables, des conclusions
précises et claires et un instinctif besoin
de réalisation, c'est ce qui fait la partie
vraiment Intéressante de ce rapport : elle
reflète d'ailleurs un état d'espnt que l'on
retrouve également chez M. Brangé, lequel
a fait sur la question des retraites des
fonctionnaires un livre remarquable par
la netteté des vues et la mesure.
Enfin, dans le même ordre d'idées et 1
des degrés divers, il semble que l'A. G.
soit vraiment disposée à discuter avec la
haute administration en dépit d'une dé-
fiance qui s'éteindra difficilement et qui
s'explique d'ailleurs fort bien.
Notons enfin que, successivement, M.
Rooca, au nom de ['U. C. des contribu-
tions indirectes ; Vergés, délégué de l'U. C.
des douanes; Poron, délégué des ouvriers
des lignes ; le délégué des sous-agents des
Postes sont venus témoigner de la solidari-
té qui unit et doit unir les fonctionnaires
dans leurs revendications.
La conception d'une Fédération natio-
nale de plus en plus cohérente des asso-
ciations de fonctionnaires paraît se déga-
ger de tous les discours prononcés. Elle
témoigne surtout que les droits des fonc-
tionnàres gagnent en précision chaque
jour, puisqu'ils tendent à revêtir une forme
juridique et abstraite dépouillée de toutes
les contingences.
C'est un fait nouveau.
ROBERT ROUSSEAU.
1 Coulisses des Chambres
LES ÉLECTIONS CONTESTÉES
Charente. — Le 2* bureau a entendu hier,
M. Poitou-Duplessis, député de la 20 cir-
conscription d'Angoulême, et son concur-
rent aux dernières élection6, M. Nulac, dé-
puté sortant.
M. Nulac demande — on le sait — l'inva-
lidation de M. Poitou-Duplessis en se ba-
sant sur l'engagement pris par ce dernier,
au cours de la campagne électorale, de
distribuer aux bureaux de bienfaisance de
l'arrondissement la somme équivalant &
l'augmentation de l'indemnité législative.
Le bureau s'est trouvé d'ans l'impossibi-
lité de statuer pour on contre l'invalida-
tion. Après avoir repoussé une demande
d'enquêtè par 14 voix contre 6, le bureau
s'est partagé pour l'invalidation en deux
fractions numériquement égaies. Au scru-
tin public l'invalidation a recueilli 11 voix
contre 11 ; au scrutin secret 13 contre 13.
Finalement, le bureau a chargé M. Théo.
dore Reinach de faire un rapport exposant
simplement les faits et laissant à la Chaim-
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