Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1888-10-28
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 28 octobre 1888 28 octobre 1888
Description : 1888/10/28 (N6806). 1888/10/28 (N6806).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75431994
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/12/2012
1T 6806 — Dimanche 28 Octobre 1888
1 Brumaire an 97 —• PT 680ar
CINQ centimes le numéro
RÉDACTION
18, BUE DE VALOIS, 18
J'ADRISSIR AU SECRÉTAIRE DI LA RÉDACTION
De 4 à 6 heures du soir
Et de 9 heures du soir à minuit
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ÉJES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NB SERONT PAS RBNDtII
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ADMINISTRATION
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f Adresser lettres et manda"
"^1 L'ADMINISTRATEUR-GÉRANS
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ANNONCES f
I 101. Ch. LAGRANGE, CERF et e-
I 6, place de la Bourse, 6
ABONNEMENTS
PARIS
VN MOIS 2 FR.
TROIS MOIS. 5 —
SIX MOIS. 9FR.
UN AN is-
Rédacteur es chef: AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS
ION MOIS 2 FR.
TROIS mois e -
six MOIS il rm.
UN il'(. 20 —
AVIS
Nous prions ceux de nos lecteurs dont
rabonnement expire le 31 octobre de
ne pas attendre les derniers jours pour le
renouveler, afin d'éviter une interruption
dans la réception du journal.
Les abonnements sont reçus dans tous
les bureaux de poste de France et d'Al-
gérie.
Joindre une des dernières bandes à
chaque renouvellement.
LE 19e CORPS
Je lis dans le rapport de M. Camille
Sabatier, député d'Oran et rapporteur
du budget de l'Algérie, les lignes sui-
vantes :
« Il est manifeste que la raison d'être
du 19° corps n'est pas la garde de l'Al-
gérie. Partie intégrante de l'ensemble
des forces nationales, le 19° corps aura,
en cas de guerre européenne, un rôle
tout aussi actif que tout autre corps
d'armée. La France n'aurait pas un sol-
dat de moins quand même elle n'occu-
perait pas l'Algérie. Qu'un certain nom-
bre de ses soldats soient casernés sur le
sol africain, qu'importe ? Ne sont-ils
pas prêts à accourir où que ce soit, au
moindre appel ? »
C'est au point de vue financier que
M. Sabatier s'exprime ainsi. Son but
est de démontrer que l'on voudrait à
tort considérer l'entretien du 19e corps
comme une dépense causée par l'Al-
gérie. Je ne veux pas, pour aujour-
d'hui, entamer de discussion sur cette
question de comptabilité budgétaire. Il
en est une plus haute que soulèvent les
observations de M. Sabatier, et qui est
celle-ci : — Quel pourra être, en cas
de guerre, le rôle du 19° corps ?
M.Sabatier n'est pas enlbarrassé. Il le
voit prêt (je répète ses paroles) à accou-
rir « où que ce soit, au moindre appel».
Est-ce bien sûr?
D'abord, il n'accourrait pas tout en-
tier. « Il est vrai, est obligé d'avouer
M. Sabatier, qu'une partie des troupes
serait vraisemblablement laissée en Al-
gérie pour tenir les indigènes en res-
pect. » Mais, selon lui, « il est certain
que cette portion indisponible est au-
jourd'hui extrêmement restreinte ».
« Nous pouvons, continue-t-il, être très
affirmatif sur ce point que nous aurions
besoin, pour assurer la paix en Algérie,
de moins de troupes encore qu'il ne
nous en a été laissé en 1870. »
Il est clair que, quand un député de
l'Algérie parle dans ces termes absolus ;
« Il est certain. Nous pouvons être très
affirmatifs. » j'aurais mauvaise grâce
à douter de ce qu'il dit. Je tiens donc
provisoirement pour entendu qu'à une
très faible fraction près, Farmée d'Afri-
que est inutile en Algérie. — Alors,
demanderai-je, pourquoi l'y laisse-t-on?
"-.-'Qu'importe? répond M. Sabatier,
puisque, encore une fois, elle est tou-
jours prête à accourir où que ce soit.
Ne nous payons pas de mots, s'il vous
plaît. Il est vrai qu'il y a eu un temps où
l'armée d'Afrique était vraiment à la
disposition de la France. Dans. ce temps-
là nous n'avions pas d'hostilités à crain-
dre dans la Méditerranée. Peu importait
alors que le nombre des troupes d'Algérie
fut plus considérable qu'il n'était néces-
saire; on pouvait même considérer qu'on
avait là un excellent camp d'instruction
par lequel il y avait avantage à faire
passer le plus d'hommes possible. Que
la guerre vînt, et, avec les lenteurs des
mobilisations d'alors, on avait tout le
loisir de les faire revenir.
Mais nous n'en sommes plus là au-
jourd'hui. Je ne veux toucher qu'avec
ménagement à un sujet nécessairement
délicat, mais je peux pourtant bien dire
qu'actuellement, avec les dispositions
que nous montre manifestement l'Italie,
avec celles que l'on peut soupçonner
chez l'Angleterre, la prétention d'être
le maître assez incontesté de la mer
pour pouvoir ramener à travers elle,
sans dangers majeurs, un corps d'ar-
mée tout entier, cette prétention-là ne
peut pas être accueillie comme une cer-
titude, ni même comme une probabi-
lité.
Et c'est pour cela qu'au lieu d'écouter
les exagérations intéressées des Algé-
riens, je voudrais qu'on examinât la
question en face.
Les Algériens sont-ils, comme ils pa-
raissent le prétendre, en mesure de se
suffire presque à eux-mêmes? Est-il
vrai qu'un faible appoint de nos troupes
les mettrait à l'abri des attaques, soit du
dedans, soit — ce qui est à considérer
aussi — du dehors? Peut-on compter
suffisamment pour cela, je ne dis pas
sur le dévouement, mais sur la force de
« ces contingents de la jeunesse algé-
rienne » dont parle M. Sabatier, et qui,
selon lui, depuis dix-huit ans bientôt
qu'ils sont appelés sous les drapeaux,
constituent déjà « une forte réserve »?
S'il en est ainsi, je n'ai qu'à m'en féli-
citer, et à demander qu'on se préoccupe,
d'organiser en force locale , un peu
plus énergiquement qu'on ne me paraît
l'avoir fait, ces futurs défenseurs du
territoire algérien.
Mais je crains, pour parler franc, que
le tableau vrai ne soit moins agréable.
A supposer qu'il ne fallût se préoccuper
que des dangers intérieurs, je n'oublie
pas que l'insurrection de 1871 aurait été
autrement dangereuse si elle avait éclaté
à un autre moment. Et puis, il y a, je le
répète, le danger du dehors, d'une en-
treprise possible de la part d'un ennemi
européen C'est pour un semblable cas
qu'on ne pourrait trop regretter la poli-
tique contestable que l'Algérie se plaît à
suivre vis-à-vis des indigènes. Avec le
concours assuré des indigènes, l'Al-
gérie serait pour la France une force,
tandis qu'actuellement elle court le
risque d'être tout le contraire.
Enfin, ce risque, quel qu'il soit, il
faudrait le mesurer. Qu'on laisse en Al-
gérie les troupes qu'il faut pour parer
à toutes les éventualités, je suis le pre-
mier à déclarer que c'est nécessaire.
Mais pourquoi ne pas ramener le sur-
plus en France? Au lieu d'attendre que
ce surplus inutile là-bas revienne « peut-
être » si la guerre éclatait, n'est-il pas
infiniment plus sûr de le rappeler
tandis qu'on peut le faire à coup
sûr? Est-ce que les hommes qui
en font partie ne s'instruiront pas
aussi bien en France que dans les
villes du littoral de l'Algérie (car c'est
là qu'ils sont pour la plus grande par-
tie)? Puisque c'est en France qu'ils sont
destinés à combattre, pourquoi ne leur
y donre-t-on pas immédiatement leur
place de bataille? A quoi bon maintenir
là-bas des garnisons qui sont déclarées
inutiles par ceux-là mêmes qu'elles enri-
chissent, alors qu'au jour du danger el-
les peuvent manquer cruellement à la
mère-patrie ?
ERNEST LEFÈVRE
——————————
PATRIOTISME ROYALISTE
Une discussion est engagée entre deux
journaux royalistes, le Gaulois et la Ga-
zette de France.
Le Gaulois racontait hier matin une dé-
marche qui aurait été faite, le 27 mai de
l'année dernière, à l'Elysée par M. de
Mackau délégué des droites de la Cham-
bre. M. de Mackau était chargé d'exprimer
au président de la République les « anxié-
tés patriotiques » de ses amis au sujet de
certaines éventualités, notamment du
maintien du général Boulanger au minis-
tère de la guerre. Les royalistes voyaient
dans ce maintien la certitude de la guerre
avec l'Allemagne, et « obéissant à un sen-
timent de patriotisme très élevé », ils
offraient de modérer leur opposition si
M. Boulanger était exclu du cabinet qui
se "formait en ce moment.
« C'est ainsi, affirme le Gaulois, qui a
fait vérifier sa version par qui de droit,
c'est ainsi que Boulanger a été écarté ab-
solument du pouvoir. C'est par ce sacrifice
fait à la patrie que l'on a pu éviter un con-
flit avec l'Allemagne et ses alliés. »
Et les mêmes royalistes qui, il y a dix-
huit mois, déclaraient que le patriotisme
faisait une loi d'écarter M. Boulanger du
pouvoir, veulent aujourd'hui donner à M.
Boulanger un bien autre pouvoir qu'un
ministère! « C'est à celui qu'ils ont eux-
mêmes appelé l'homme péril qu'ils enten-
dent confier la dictature suprême, les des-
tinées de la France! »
Les royalistes commencent par bien
établir que le général Boulanger mettrait
le pays en danger de mort, et ils con-
cluent : Alors, il est notre homme 1 C'est
leur patriotisme. Nous le leur laissons.
A. V.
LA QUESTION DE L'OPÉRA-COMIQUE
On a manqué le coche. — C'était au
lendemain même de l'incendie, quand
l'émotion était si universelle que la sous-
cription pour les victimes produisaitprès
d'un million, c'était tout de suite qu'il
fallait demander à la Chambre l'argent
nécessaire. Si provinciale qu'elle soit,
elle ne l'aurait pas refusé à un théâtre
aussi cher à la province qu'à Paris. On a
attendu, l'émotion s'est affaiblie, et main-
tenant il sera dur d'arracher sept ou huit
millions à une Chambre dont presque tous
les membres sont hostiles à Paris et di-
raient volontiers du musée du Louvre :
- C'est un musée parisien; eh bien, ça
regarde les Parisiens !
Pour l'Opéra-Comique, il y a deux so-
lutions.
Celle que nous préférerions serait qu'on
achevât le boulevard Haussmann et que
le théâtre fût rebâti à l'angle des deux
boulevards. Il faudrait obtenir de la ville
qu'elle donnât le terrain, et alors la Cham-
bre ne pourrait pas refuser la bâtisse. On
aurait ainsi un beau théâtre, isolé de tous
côtés, bien en vue, digne de la grande
cité.
Sinon, il ne reste plus que la recon-
struction sur la place vide, avec expro-
priation des maisons en façade. Ce sera
un théâtre de travers, mais ça n'empê-
chera pas d'y revenir.
Quelle que soit celle de ces deux solu-
tions qui soit choisie, qu'on se hâte. On a
jdéjà perdu trop de temps. Il est triste
qu'un théâtre qui aurait dû être fini pour
l'Expdsition ne soit pas même commencé.
A. V.
■ !■ 1 ■ — ■ ■■ -'
COULISSES DES CHAMBRES
LE SCRUTIN D'ARROND ISSEMENT
Les propositions de rétablissement du
scrutin d'arrondissement, soit scrutin uni-
nominal, soit scrutin de liste par arron-
dissement, déposées au début de la ses-
sion actuelle par MM. Boysset, Ribot,
Maxime Lecomte, Hubbard, Antide Boyer,
et divers autres députés ont été examinées
hier par la commission d'initiative.
Les partisans du maintien du scrutin de
liste se trouvaient hier en majorité dans
la commission. Néanmoins celle-ci a dé-
cidé à l'unanimité de prendre les propo-
sitions en considération, estimant qu'elles
étaient assez importantes pour être sou-
mises à une délibération devant la Cham-
bre. Ma;s cette décision ne préjuge pas
le vote au fond qui reste réservé.
M. Maurice Faure a été nommé rappor-
teur.
-
LA RECONSTRUCTION DE L'OPUA- COMIQUE
M. Lockroy, ministre des beaux-arts, a
été entendu hier par la commission char-
gée du projet de loi relatif à la reconstruc-
tion de l'Opéra-Comique.
Il a déclaré qu'il maintenait sa demande
de crédit de 6 millions et demi et le plan
dressé par la direction des bâtiments
civils. Il a invité la commission à déli-
bérer sur ce projet et ce plan, déclarant
d'avance qu'il se refusait à prendre l'ini-
tiative d'une combinaison financière quel-
conque, laissant à la commission le soin
d'en proposer une, si elle le juge conve-
nable.
La commission, après le départ du mi-
nistre, a délibéré et maintenu à peu de
de choses près, ses décisions antérieures.
Elle ne veut pas plus que le ministre
prendre l'initiative d'une combinaison fi-
nancière, car ce n'est pas son rôle. Elle
proposera à la Chambre d'ouvrir un con-
cours qui portera non. seulement sur le
plan du théâtre, mais sur la combinaison
financière destinée à en assurer la réali-
sation.
M. Steenackers, maintenu comme rap-
porteur, déposera aujourd'hui. son nou-
veau rapport.
----
CONSEIL GÉNÉRAL DE LA SEINE
La dernière session du conseil général
de la Seine devant s'ouvrir lundi prochain
29 courant, le groupe radical s'est réuni
hier vendredi, à deux heures, sous la pré-
sidence de M. Chautemps.
Il a été décidé que le bureau et les
commissions seraient maintenus.
4> ————————
BATAILLE A LA SALLE WAGRAM
Une épouvantable bagarre, une vérita-
ble bataille a signalé la réunion que vien-
nent d'essayer de tenir les boulangistes à
la salle Wagram, hier soir vendredi.
Celte réunion était organisée par le
« comité révisionniste de la Seine ». Il y
avait environ 500 assistants.
M. Vergoin, le député boulangiste, qui
présidait, a voulu prendre la parole; aussi-
tôt d'effroyables rumeurs couvrent sa
voix. Dans le tumulte croissant, il cède la
présidence à M. de Ménorval, conseiller
municipal boulangiste. -
Ce dernier n'est pas plus heureux ; à
peine a-t-il ouvert la bouche que les cris
de : A bas Boulanger! à bas le dictateur!
éclatent avec une énergie furieuse.
C'est à ce moment que commence la ba-
garre ; les assistants se ruent les uns sur
les autres, boulangistes et anti-boulan-
gistes en viennent aux mains. Les bancs,
les chaises, les tables servent de projec-
tiles. Tout est brisé.
Le gaz est éteint.
Cet incident n'arrête pas le combat; la
lutte continue dans l'obscurité. On ne voit
plus rien, mais on entend les,cris et les
imprécations des combattants.
Le gaz ayant été rallumé, on peut se
rendre compte de la situation. Il est évi-
dent qu'il n'y a plus, pour les boulan-
gistes, à songer à parler d'ordre du jour,
ni même à tenir une réunion quelconque.
Les anti-boulangistes sont maîtres incon-
testés du terrain. La lutte qui n'a pas été
interrompue par l'extinction du gaz, ne
l'est pas davantage par la réapparition de
la lumière.
Un dernier incident dramatique termine
cette rude soirée. M. Lullier, qui est
dans la salle, vient, dit-on, de recevoir un
coup de couteau au sein gauche. Le coup
a, ajoute-t-on, été atténué par un porte-
feuille. La lame n'a pas blessé M. Lullier.
En même temps quatre coups de revolver
sont tirés. Ils n'atteignent d'ailleurs per-
sonne. Qui a tiré ? Les uns prétendent que
c'est M. Lullier, les autres déclarent le
contraire.
Quoi qu'il en soit de ce détail, les ad-
versaires de M. Lullier se jettent sur lui,
le renversent. Il est longuement piétiné
par ses assaillants.
La sortie a lieu après ce terrible épi-
sode. Ceux qui sont restés dans la salle
relèvent M. Lullier, le transportent dans
une pharmacie, où les premiers soins lui
sont donnés. Enfin M. Lullier est recon-
duit en voiture à son domicile.
-
On annonce pour ce soir, à la même
salle Wagram, un banquet boulangiste,
dans lequel M. Boulanger compte prendra
la parole.
---. -
LA DERNIERE MALADIE,
DE FRÉDÉRIC III
PAR
le docteur MACKENZIE
CHAPITRE PREMIER
MA PREMIÈRE VISITE A BERLIN
(Suite)
Premier rapport de Virchow
On attendait naturellement avec la plus
vive anxiété le rapport du professeur Vir-
chow, qui devait décider de la marche âi
suivre. Deux jours après l'ablation du
fragment, j'appris par le docteur Wegner
que le grand pathologiste n'avait décou-
vért aucune trace d'affection maligne,
mais qu'il désirait examiner un autre
fragment. Le docteur Wegner me dit plus
tard que Virchow était parfaitement satis-
fait du résultat de son examen et qu'il ne
demandait pas un autre morceau de la tu-
meur.
Peu après, on reçut du professeur
Virchow un rapport dans lequel il décla-
rait que le fragment qui lui avait été sou-
mis était d'une nature bénigne. Il expli-
quait que les cellules épithéliales étaient
plus nombreuses. et plus grandes, et il
ajoutait que, comme la section avait pé-
nétré à travers toute l'épaisseur de la
tumeur jusqu'au tissu de la corde vocale
(ainsi que le prouvait la présence de filan-
dres élastiques longitudinales), il n'y avait
aucune raison de supposer que le reste da
la tumeur fût d'une. formation diffénta
du fragnjent qui avait été examiné.
Ce rapport n'est malheureusement pas
publié dans le pamphlet allemand, bien'
qu'il soit déposé parmi les « sources offi-
cielles » sur lesquelles ce document est,
dit-on, basé. Je remarquerai ici que je me
suis adressé au Haus-Ministerium, par l'en-
tremise du comte Radolinsky, en décem-
bre 1887, pour obtenir les copies des di-
vers documents relatifs à la maladie dix
prince et déposés aux archives de l'Etat;
mais ma demande a été positivement re<
poussée, sans que je puisse en compren'
dre la raison.
Ce rapport prouve d'une façon concluant
te que, quelle que fût la maladie dont
souffrait le prince, le tissu que j'avais en-
levé n'était pas un tissu sain, comme ou
l'a insinué, mais un tissu présentant UR
caractère verruqueux. Il ne serait pas con"
cevable que le plus grand anotomo-patho-
logiste du monde se fût trompé à propos
d'un tissu sain ou morbide, et il serait in-
croyable qu'un tel homme se fût prêté,
n'importe dans quelles circonstances, it
formuler de propos délibéré des conclu-
sions pouvant conduire à une interpréta-
tion erronée.
Ma seconde opération
Le 23 mai, en présence da professeur
Gerhardt et du docteur Wegner, j'essayai
Feuilleton du RAPPEL
DU 28 OCTOBRE
188
LES
MISÉRABLES
TROISIEME PARTIE
US A Xr& X U S
LIVRE HUITIÈME
LE MAUVAIS PAUVRE
X
Tarif desr eabrlolets de régie s
deux francs l'heure
* Suite -
Parvenu à l'angle du boulevard, Marius
revit le fiacre qui descendait rapidement
ta rue Mouffetard ; le fiacre était déjà très
loin, aucun moyen de le rejoindre ; quoi?
eotfrir après? impossible; et d'ailleurs de
la voiture on remarquerait certainement
un individu courant à toutes jambes à la
poursuite du fiacre, et le père le recon-
naîtrait.
En ce moment, hasard inouï et merveil-
leux, Marius aperçut un cabriolet de régie
qui passait à-vide sur le boulevard.
Il n'y avait qu'un parti à prendre, mon-
lteproduction interdite.
Voir le Rappel du 23 avril au 27 octobre
ter dans ce cabriolet et suivre le fiacre.
Cela était sûr, efficace et sans danger.
Marius fit signe au cocher d'arrêter et
lui cria :
— A l'heure 1
Marius était sans cravate, il avait son
vieil habit de travail auquel des boudons
manquaient, sa chemise était déchirée à
l'un des plis de la poitrine.
Le cocher s'arrêta, cligna de l'œH, et
étendit vers Marius sa main gauche en
frottant doucement son index avec son
pouce.
— Quoi? dit Marius.
— Payez d'avance, dit le cocher.
Marius se souvint qu'il n'avait sur lui
que seize sous.
Combien? demanda-t-il.
i-— Quarante sous.
— Je payerai en revenant. -*'1 -
Le cocher, pour toute réponse, siffla
l'air de La Palisse et fouetta son cheval.
-Marius regarda le cabriolet s'éloigner
d'un air égaré. Pour vingt-quatre-sous qui
lui manquaient, il perdait sa joie, son
bonheur, son amour J il retombait dans la
nuit! il avait vu et il redevenait aveugle.
Il songea amèrement et, il faut bien le
dire, avec un regret profond, aux cinq
francs qu'il avait donnés le matin même à
cette misérable fille.
S'il avait eu ces cinq francs, il était
sauvé, il renaissait, il sortait des limbes et
des ténèbres, il sortait de l'isolement, du
spleen, du veuvage ; il renouait le fil noir
de sa destinée à ce beau fil d'or qui venait
de flotter devant ses yeux et de se casser
encore une fois ! Il rentra dans la masure
désespéré.
Il aurait pu se dire que M. Leblanc avait
promis de revenir le soir, et qu'il n'y au-
rait qu'à s'y mieux prendre cette fois pour
le suivre ; mais dans sa contemplation,
c'est à peine s'il avait entendu.
Au moment de monter l'escalier, il
aperçut de l'autre côté du boulevard, le
long du mur désert de la rue de la Bar-
rière-des-Gobelins, Jondrette enveloppé
du pardessus du « philanthrope », qui
parlait à un de ces hommes de mine in-
quiétante qu'on est convenu d'appeler rô-
deurs de barrières ; gens à figures équi-
voques, à monologues suspects, qui ont
un air de mauvaise pensée, et qui dorment
assez habituellement le jour, ce qui fait
supposer qu'ils travaillent la nuit..
Ces deux hommes, causant immobiles
sous la neige qui tombait par tourbillons,
faisaient un groupe qu'un sergent de ville
eût à coup sûr observé, mais que Marius
remarqua à peine.
Cependant, quelle que fût sa préoccu-
pation douloureuse, il ne put s'empêcher
de se dire que ce rôdeur de barrière à qui
Jondrette parlait ressemblait à un certain
Panchaud, dit Printanier, dit Bigrenaille,
que Courfeyrac lui avait montré une fois,
et qui passait dans le quartier pour un
promeneur nocturne assez dangereux. On
a vu, dans le livre précédent, le nom de
cet homme.
Ce Panchaud, dit Printanier, dit Bigre-
naille, a figuré plus tard dans plusieurs
procès criminels et est devenu depuis un
coquin célèbre. Il n'était encore alors
qu'un fameux coquin. Aujourd'hui, il est
à l'état de tradition parmi les bandits et
les escarpes. Il faisait école vers la fin du
dernier règne. Et le soir, à la nuit tom-
bante, à l'heure où les groupes se forment
et se parlent bas, on en causait à la Force
dans la Fosse-aux-Liona.
On pouvait même, dans cette prison,
précisément à l'endroit où passait sous le
chemin de ronde ce canal des latrines qui
servit à la fuite inouïe en plein jour de
trente détenus en 1843, on pouvait, au-
dessus de la dalle de ces latrines, lire son
nom, PANCHAUD, audacieusement gravé
par lui sur le mur de ronde dans une de
ses tentatives d'évasion. En 1832, la police
le surveillait déjà, mais il n'avait pas en-
core sérieusement débuté.
XI
Offres de service de la nslsère
à la douSecsr
Marius monta l'escalier de la mastire à
pas lents; à l'instant où il allait rentrer
dans sa cellule, il aperçut derrière lui
dans le corridor la Jondrette aînée qui le
suivait. Cette fille lui fut odieuse à voir,
c'était elle qui avait ses cinq francs, il
était trop tard pour les lui redemander,
le cabriolet n'était plus là, le fiacre était
bien loin. D'ailleurs elle ne les lui ren-
drait pas. Quant à la questionner sur la
demeure des gens qui étaient venus tout
à l'heure, cela était inutile, il était évi-
dent qu'elle ne la savait point, puisque
la lettre signée Fabantou était adressée
au monsieur bienfaisant dé l'église Saint-
Jacqucs-du-Haut-Pas.
Marius entra dans sa chambre et poussa
sa porte derrière lui.
Elle ne se ferma pas ; il se retourna et vit
une main qui retenait la porte entr'ouverte.
— Qu'est-ce que c'est? demanda-t-il,
qui est là?
C'était la fille Jondrette.
— C'est vous? reprit Marius presque
durement, toujours vous, donc! que me
voulez-vous?
:me semblait pensive et BG regardait
pas. Elle n'avait plus son assurance du
matin. Elle n'était pas entrée et se tenait
dans l'ombre du corridor, où Marius l'a-
percevait par la porte entrebâillée.
— Ah çà, répondrez-vous? fit Marius.
Qu'est-ce que vous me voulez?
Elle leva sur lui son œil morne où une
espèce de clarté semblait s'allumer va-
guement, et lui dit :
— Monsieur Marius, vous avez l'air
triste. Qu'est-ce que vous avez ?
— Moi I dit Marius.
— Oui, vous.
— Je n'ai rien.
— Si!
— Non.
— Je vous dis que si !
— Laissez-moi tranquille !
Marius poussa de nouveau la porte, elle
continua de la retenir.
- Tenez, dit-elle, vous avez tort. Quoi-
que vous ne soyez pas riche, vous avez
été bon ce matin. Soyez-le encore à pré-
sent. Vous m'avez donné de quoi manger,
dites-moi maintenant ce que vous avez.
Vous avez du chagrin, cela se voit. Je ne
voudrais pas que vous eussiez du chagrin.
Qu'est-ce qu'il faut faire pour cela? Puis-
je servir à quelque chose? Employez-moi.
Je ne vous demande pas vos secrets;
vous n'aurez pas besoin de me les dire;
mais enfin je peux être utile. Je puis bien
vous aider, piiisque j'aide mon père.
Quand il faut porter des lettres, aller dans
les maisons, demander de porte en porte,
trouver une adresse, suivre quelqu'un,
moi je sers à ça. Eh bien, vous pouvez
bien me dire ce que vous avez, j'irai par-
leivaux personnes; quelquefois quelqu'un
qui parle aux personnes, ça suffit pour
qu'on sache les choses, et tout s'arrange.
Servez-vous de moi.
Une idée traversa l'esprit de Marius.
Quelle branche dédaigne-t-on quand on se
sent tomber? « <
Il s'approcha de la Jondrette.
— Ecoute., lui dit-il.
Elle l'interrompit avec un éclair de joie
dans les yeux.
- Oh oui, tutoyez-moi! j'aime mieux
cela.
— Eh bien, reprit-il, tu as amené ici ce
vieux monsieur avec sa fille 1
- Oui. 0-
— Sais-tu leur adresse?
-Non.
Trouve-la-moi.
L'œil de la Jondrette, de morne, était
devenu joyeux, de joyeux il devint sombre,
— C'est là ce que vous voulez? deman-
da-t-elle.
- Oui.
— Est-ce que vous les connaissez?
- Non.
— C'est-à-dire, reprit-elle vivement
vous ne la connaissez pas, mais vous vou-
lez la connaître.
Ce les qui était devenu la avait je ne sais
quoi de significatif et d'amer.
— Enfin, peux-tu? dit Marius.
— Vous aurez l'adresse de la belle de-
moiselle.
Il y avait encore dans ces mots « la belle
demoiselle » une nuance qui importuna
Marius. Il reprit :
— Enfin n'importe ! l'adresse du père et
de la fille. Leur adresse, quoi !
Elle le regarda fixement.
— Qu'est-ce que vous me donnerez'
— Tout ce que tu voudras !
— Tout ce que je voudrai ?
— Oui.
— Vous aurez l'adresse.
Elle baissa la tête, puis, d'un mouvez
ment brusque, elle tira la porte qui se re-
ferma.
VICTOR HUGQJ
(A wiwé!,) >
1 Brumaire an 97 —• PT 680ar
CINQ centimes le numéro
RÉDACTION
18, BUE DE VALOIS, 18
J'ADRISSIR AU SECRÉTAIRE DI LA RÉDACTION
De 4 à 6 heures du soir
Et de 9 heures du soir à minuit
WWWWV»
*
ÉJES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NB SERONT PAS RBNDtII
LIT ÏÏIPPFT
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ADMINISTRATION
18, BUB DE VALOIS, fa
f Adresser lettres et manda"
"^1 L'ADMINISTRATEUR-GÉRANS
* "-
ANNONCES f
I 101. Ch. LAGRANGE, CERF et e-
I 6, place de la Bourse, 6
ABONNEMENTS
PARIS
VN MOIS 2 FR.
TROIS MOIS. 5 —
SIX MOIS. 9FR.
UN AN is-
Rédacteur es chef: AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS
ION MOIS 2 FR.
TROIS mois e -
six MOIS il rm.
UN il'(. 20 —
AVIS
Nous prions ceux de nos lecteurs dont
rabonnement expire le 31 octobre de
ne pas attendre les derniers jours pour le
renouveler, afin d'éviter une interruption
dans la réception du journal.
Les abonnements sont reçus dans tous
les bureaux de poste de France et d'Al-
gérie.
Joindre une des dernières bandes à
chaque renouvellement.
LE 19e CORPS
Je lis dans le rapport de M. Camille
Sabatier, député d'Oran et rapporteur
du budget de l'Algérie, les lignes sui-
vantes :
« Il est manifeste que la raison d'être
du 19° corps n'est pas la garde de l'Al-
gérie. Partie intégrante de l'ensemble
des forces nationales, le 19° corps aura,
en cas de guerre européenne, un rôle
tout aussi actif que tout autre corps
d'armée. La France n'aurait pas un sol-
dat de moins quand même elle n'occu-
perait pas l'Algérie. Qu'un certain nom-
bre de ses soldats soient casernés sur le
sol africain, qu'importe ? Ne sont-ils
pas prêts à accourir où que ce soit, au
moindre appel ? »
C'est au point de vue financier que
M. Sabatier s'exprime ainsi. Son but
est de démontrer que l'on voudrait à
tort considérer l'entretien du 19e corps
comme une dépense causée par l'Al-
gérie. Je ne veux pas, pour aujour-
d'hui, entamer de discussion sur cette
question de comptabilité budgétaire. Il
en est une plus haute que soulèvent les
observations de M. Sabatier, et qui est
celle-ci : — Quel pourra être, en cas
de guerre, le rôle du 19° corps ?
M.Sabatier n'est pas enlbarrassé. Il le
voit prêt (je répète ses paroles) à accou-
rir « où que ce soit, au moindre appel».
Est-ce bien sûr?
D'abord, il n'accourrait pas tout en-
tier. « Il est vrai, est obligé d'avouer
M. Sabatier, qu'une partie des troupes
serait vraisemblablement laissée en Al-
gérie pour tenir les indigènes en res-
pect. » Mais, selon lui, « il est certain
que cette portion indisponible est au-
jourd'hui extrêmement restreinte ».
« Nous pouvons, continue-t-il, être très
affirmatif sur ce point que nous aurions
besoin, pour assurer la paix en Algérie,
de moins de troupes encore qu'il ne
nous en a été laissé en 1870. »
Il est clair que, quand un député de
l'Algérie parle dans ces termes absolus ;
« Il est certain. Nous pouvons être très
affirmatifs. » j'aurais mauvaise grâce
à douter de ce qu'il dit. Je tiens donc
provisoirement pour entendu qu'à une
très faible fraction près, Farmée d'Afri-
que est inutile en Algérie. — Alors,
demanderai-je, pourquoi l'y laisse-t-on?
"-.-'Qu'importe? répond M. Sabatier,
puisque, encore une fois, elle est tou-
jours prête à accourir où que ce soit.
Ne nous payons pas de mots, s'il vous
plaît. Il est vrai qu'il y a eu un temps où
l'armée d'Afrique était vraiment à la
disposition de la France. Dans. ce temps-
là nous n'avions pas d'hostilités à crain-
dre dans la Méditerranée. Peu importait
alors que le nombre des troupes d'Algérie
fut plus considérable qu'il n'était néces-
saire; on pouvait même considérer qu'on
avait là un excellent camp d'instruction
par lequel il y avait avantage à faire
passer le plus d'hommes possible. Que
la guerre vînt, et, avec les lenteurs des
mobilisations d'alors, on avait tout le
loisir de les faire revenir.
Mais nous n'en sommes plus là au-
jourd'hui. Je ne veux toucher qu'avec
ménagement à un sujet nécessairement
délicat, mais je peux pourtant bien dire
qu'actuellement, avec les dispositions
que nous montre manifestement l'Italie,
avec celles que l'on peut soupçonner
chez l'Angleterre, la prétention d'être
le maître assez incontesté de la mer
pour pouvoir ramener à travers elle,
sans dangers majeurs, un corps d'ar-
mée tout entier, cette prétention-là ne
peut pas être accueillie comme une cer-
titude, ni même comme une probabi-
lité.
Et c'est pour cela qu'au lieu d'écouter
les exagérations intéressées des Algé-
riens, je voudrais qu'on examinât la
question en face.
Les Algériens sont-ils, comme ils pa-
raissent le prétendre, en mesure de se
suffire presque à eux-mêmes? Est-il
vrai qu'un faible appoint de nos troupes
les mettrait à l'abri des attaques, soit du
dedans, soit — ce qui est à considérer
aussi — du dehors? Peut-on compter
suffisamment pour cela, je ne dis pas
sur le dévouement, mais sur la force de
« ces contingents de la jeunesse algé-
rienne » dont parle M. Sabatier, et qui,
selon lui, depuis dix-huit ans bientôt
qu'ils sont appelés sous les drapeaux,
constituent déjà « une forte réserve »?
S'il en est ainsi, je n'ai qu'à m'en féli-
citer, et à demander qu'on se préoccupe,
d'organiser en force locale , un peu
plus énergiquement qu'on ne me paraît
l'avoir fait, ces futurs défenseurs du
territoire algérien.
Mais je crains, pour parler franc, que
le tableau vrai ne soit moins agréable.
A supposer qu'il ne fallût se préoccuper
que des dangers intérieurs, je n'oublie
pas que l'insurrection de 1871 aurait été
autrement dangereuse si elle avait éclaté
à un autre moment. Et puis, il y a, je le
répète, le danger du dehors, d'une en-
treprise possible de la part d'un ennemi
européen C'est pour un semblable cas
qu'on ne pourrait trop regretter la poli-
tique contestable que l'Algérie se plaît à
suivre vis-à-vis des indigènes. Avec le
concours assuré des indigènes, l'Al-
gérie serait pour la France une force,
tandis qu'actuellement elle court le
risque d'être tout le contraire.
Enfin, ce risque, quel qu'il soit, il
faudrait le mesurer. Qu'on laisse en Al-
gérie les troupes qu'il faut pour parer
à toutes les éventualités, je suis le pre-
mier à déclarer que c'est nécessaire.
Mais pourquoi ne pas ramener le sur-
plus en France? Au lieu d'attendre que
ce surplus inutile là-bas revienne « peut-
être » si la guerre éclatait, n'est-il pas
infiniment plus sûr de le rappeler
tandis qu'on peut le faire à coup
sûr? Est-ce que les hommes qui
en font partie ne s'instruiront pas
aussi bien en France que dans les
villes du littoral de l'Algérie (car c'est
là qu'ils sont pour la plus grande par-
tie)? Puisque c'est en France qu'ils sont
destinés à combattre, pourquoi ne leur
y donre-t-on pas immédiatement leur
place de bataille? A quoi bon maintenir
là-bas des garnisons qui sont déclarées
inutiles par ceux-là mêmes qu'elles enri-
chissent, alors qu'au jour du danger el-
les peuvent manquer cruellement à la
mère-patrie ?
ERNEST LEFÈVRE
——————————
PATRIOTISME ROYALISTE
Une discussion est engagée entre deux
journaux royalistes, le Gaulois et la Ga-
zette de France.
Le Gaulois racontait hier matin une dé-
marche qui aurait été faite, le 27 mai de
l'année dernière, à l'Elysée par M. de
Mackau délégué des droites de la Cham-
bre. M. de Mackau était chargé d'exprimer
au président de la République les « anxié-
tés patriotiques » de ses amis au sujet de
certaines éventualités, notamment du
maintien du général Boulanger au minis-
tère de la guerre. Les royalistes voyaient
dans ce maintien la certitude de la guerre
avec l'Allemagne, et « obéissant à un sen-
timent de patriotisme très élevé », ils
offraient de modérer leur opposition si
M. Boulanger était exclu du cabinet qui
se "formait en ce moment.
« C'est ainsi, affirme le Gaulois, qui a
fait vérifier sa version par qui de droit,
c'est ainsi que Boulanger a été écarté ab-
solument du pouvoir. C'est par ce sacrifice
fait à la patrie que l'on a pu éviter un con-
flit avec l'Allemagne et ses alliés. »
Et les mêmes royalistes qui, il y a dix-
huit mois, déclaraient que le patriotisme
faisait une loi d'écarter M. Boulanger du
pouvoir, veulent aujourd'hui donner à M.
Boulanger un bien autre pouvoir qu'un
ministère! « C'est à celui qu'ils ont eux-
mêmes appelé l'homme péril qu'ils enten-
dent confier la dictature suprême, les des-
tinées de la France! »
Les royalistes commencent par bien
établir que le général Boulanger mettrait
le pays en danger de mort, et ils con-
cluent : Alors, il est notre homme 1 C'est
leur patriotisme. Nous le leur laissons.
A. V.
LA QUESTION DE L'OPÉRA-COMIQUE
On a manqué le coche. — C'était au
lendemain même de l'incendie, quand
l'émotion était si universelle que la sous-
cription pour les victimes produisaitprès
d'un million, c'était tout de suite qu'il
fallait demander à la Chambre l'argent
nécessaire. Si provinciale qu'elle soit,
elle ne l'aurait pas refusé à un théâtre
aussi cher à la province qu'à Paris. On a
attendu, l'émotion s'est affaiblie, et main-
tenant il sera dur d'arracher sept ou huit
millions à une Chambre dont presque tous
les membres sont hostiles à Paris et di-
raient volontiers du musée du Louvre :
- C'est un musée parisien; eh bien, ça
regarde les Parisiens !
Pour l'Opéra-Comique, il y a deux so-
lutions.
Celle que nous préférerions serait qu'on
achevât le boulevard Haussmann et que
le théâtre fût rebâti à l'angle des deux
boulevards. Il faudrait obtenir de la ville
qu'elle donnât le terrain, et alors la Cham-
bre ne pourrait pas refuser la bâtisse. On
aurait ainsi un beau théâtre, isolé de tous
côtés, bien en vue, digne de la grande
cité.
Sinon, il ne reste plus que la recon-
struction sur la place vide, avec expro-
priation des maisons en façade. Ce sera
un théâtre de travers, mais ça n'empê-
chera pas d'y revenir.
Quelle que soit celle de ces deux solu-
tions qui soit choisie, qu'on se hâte. On a
jdéjà perdu trop de temps. Il est triste
qu'un théâtre qui aurait dû être fini pour
l'Expdsition ne soit pas même commencé.
A. V.
■ !■ 1 ■ — ■ ■■ -'
COULISSES DES CHAMBRES
LE SCRUTIN D'ARROND ISSEMENT
Les propositions de rétablissement du
scrutin d'arrondissement, soit scrutin uni-
nominal, soit scrutin de liste par arron-
dissement, déposées au début de la ses-
sion actuelle par MM. Boysset, Ribot,
Maxime Lecomte, Hubbard, Antide Boyer,
et divers autres députés ont été examinées
hier par la commission d'initiative.
Les partisans du maintien du scrutin de
liste se trouvaient hier en majorité dans
la commission. Néanmoins celle-ci a dé-
cidé à l'unanimité de prendre les propo-
sitions en considération, estimant qu'elles
étaient assez importantes pour être sou-
mises à une délibération devant la Cham-
bre. Ma;s cette décision ne préjuge pas
le vote au fond qui reste réservé.
M. Maurice Faure a été nommé rappor-
teur.
-
LA RECONSTRUCTION DE L'OPUA- COMIQUE
M. Lockroy, ministre des beaux-arts, a
été entendu hier par la commission char-
gée du projet de loi relatif à la reconstruc-
tion de l'Opéra-Comique.
Il a déclaré qu'il maintenait sa demande
de crédit de 6 millions et demi et le plan
dressé par la direction des bâtiments
civils. Il a invité la commission à déli-
bérer sur ce projet et ce plan, déclarant
d'avance qu'il se refusait à prendre l'ini-
tiative d'une combinaison financière quel-
conque, laissant à la commission le soin
d'en proposer une, si elle le juge conve-
nable.
La commission, après le départ du mi-
nistre, a délibéré et maintenu à peu de
de choses près, ses décisions antérieures.
Elle ne veut pas plus que le ministre
prendre l'initiative d'une combinaison fi-
nancière, car ce n'est pas son rôle. Elle
proposera à la Chambre d'ouvrir un con-
cours qui portera non. seulement sur le
plan du théâtre, mais sur la combinaison
financière destinée à en assurer la réali-
sation.
M. Steenackers, maintenu comme rap-
porteur, déposera aujourd'hui. son nou-
veau rapport.
----
CONSEIL GÉNÉRAL DE LA SEINE
La dernière session du conseil général
de la Seine devant s'ouvrir lundi prochain
29 courant, le groupe radical s'est réuni
hier vendredi, à deux heures, sous la pré-
sidence de M. Chautemps.
Il a été décidé que le bureau et les
commissions seraient maintenus.
4> ————————
BATAILLE A LA SALLE WAGRAM
Une épouvantable bagarre, une vérita-
ble bataille a signalé la réunion que vien-
nent d'essayer de tenir les boulangistes à
la salle Wagram, hier soir vendredi.
Celte réunion était organisée par le
« comité révisionniste de la Seine ». Il y
avait environ 500 assistants.
M. Vergoin, le député boulangiste, qui
présidait, a voulu prendre la parole; aussi-
tôt d'effroyables rumeurs couvrent sa
voix. Dans le tumulte croissant, il cède la
présidence à M. de Ménorval, conseiller
municipal boulangiste. -
Ce dernier n'est pas plus heureux ; à
peine a-t-il ouvert la bouche que les cris
de : A bas Boulanger! à bas le dictateur!
éclatent avec une énergie furieuse.
C'est à ce moment que commence la ba-
garre ; les assistants se ruent les uns sur
les autres, boulangistes et anti-boulan-
gistes en viennent aux mains. Les bancs,
les chaises, les tables servent de projec-
tiles. Tout est brisé.
Le gaz est éteint.
Cet incident n'arrête pas le combat; la
lutte continue dans l'obscurité. On ne voit
plus rien, mais on entend les,cris et les
imprécations des combattants.
Le gaz ayant été rallumé, on peut se
rendre compte de la situation. Il est évi-
dent qu'il n'y a plus, pour les boulan-
gistes, à songer à parler d'ordre du jour,
ni même à tenir une réunion quelconque.
Les anti-boulangistes sont maîtres incon-
testés du terrain. La lutte qui n'a pas été
interrompue par l'extinction du gaz, ne
l'est pas davantage par la réapparition de
la lumière.
Un dernier incident dramatique termine
cette rude soirée. M. Lullier, qui est
dans la salle, vient, dit-on, de recevoir un
coup de couteau au sein gauche. Le coup
a, ajoute-t-on, été atténué par un porte-
feuille. La lame n'a pas blessé M. Lullier.
En même temps quatre coups de revolver
sont tirés. Ils n'atteignent d'ailleurs per-
sonne. Qui a tiré ? Les uns prétendent que
c'est M. Lullier, les autres déclarent le
contraire.
Quoi qu'il en soit de ce détail, les ad-
versaires de M. Lullier se jettent sur lui,
le renversent. Il est longuement piétiné
par ses assaillants.
La sortie a lieu après ce terrible épi-
sode. Ceux qui sont restés dans la salle
relèvent M. Lullier, le transportent dans
une pharmacie, où les premiers soins lui
sont donnés. Enfin M. Lullier est recon-
duit en voiture à son domicile.
-
On annonce pour ce soir, à la même
salle Wagram, un banquet boulangiste,
dans lequel M. Boulanger compte prendra
la parole.
---. -
LA DERNIERE MALADIE,
DE FRÉDÉRIC III
PAR
le docteur MACKENZIE
CHAPITRE PREMIER
MA PREMIÈRE VISITE A BERLIN
(Suite)
Premier rapport de Virchow
On attendait naturellement avec la plus
vive anxiété le rapport du professeur Vir-
chow, qui devait décider de la marche âi
suivre. Deux jours après l'ablation du
fragment, j'appris par le docteur Wegner
que le grand pathologiste n'avait décou-
vért aucune trace d'affection maligne,
mais qu'il désirait examiner un autre
fragment. Le docteur Wegner me dit plus
tard que Virchow était parfaitement satis-
fait du résultat de son examen et qu'il ne
demandait pas un autre morceau de la tu-
meur.
Peu après, on reçut du professeur
Virchow un rapport dans lequel il décla-
rait que le fragment qui lui avait été sou-
mis était d'une nature bénigne. Il expli-
quait que les cellules épithéliales étaient
plus nombreuses. et plus grandes, et il
ajoutait que, comme la section avait pé-
nétré à travers toute l'épaisseur de la
tumeur jusqu'au tissu de la corde vocale
(ainsi que le prouvait la présence de filan-
dres élastiques longitudinales), il n'y avait
aucune raison de supposer que le reste da
la tumeur fût d'une. formation diffénta
du fragnjent qui avait été examiné.
Ce rapport n'est malheureusement pas
publié dans le pamphlet allemand, bien'
qu'il soit déposé parmi les « sources offi-
cielles » sur lesquelles ce document est,
dit-on, basé. Je remarquerai ici que je me
suis adressé au Haus-Ministerium, par l'en-
tremise du comte Radolinsky, en décem-
bre 1887, pour obtenir les copies des di-
vers documents relatifs à la maladie dix
prince et déposés aux archives de l'Etat;
mais ma demande a été positivement re<
poussée, sans que je puisse en compren'
dre la raison.
Ce rapport prouve d'une façon concluant
te que, quelle que fût la maladie dont
souffrait le prince, le tissu que j'avais en-
levé n'était pas un tissu sain, comme ou
l'a insinué, mais un tissu présentant UR
caractère verruqueux. Il ne serait pas con"
cevable que le plus grand anotomo-patho-
logiste du monde se fût trompé à propos
d'un tissu sain ou morbide, et il serait in-
croyable qu'un tel homme se fût prêté,
n'importe dans quelles circonstances, it
formuler de propos délibéré des conclu-
sions pouvant conduire à une interpréta-
tion erronée.
Ma seconde opération
Le 23 mai, en présence da professeur
Gerhardt et du docteur Wegner, j'essayai
Feuilleton du RAPPEL
DU 28 OCTOBRE
188
LES
MISÉRABLES
TROISIEME PARTIE
US A Xr& X U S
LIVRE HUITIÈME
LE MAUVAIS PAUVRE
X
Tarif desr eabrlolets de régie s
deux francs l'heure
* Suite -
Parvenu à l'angle du boulevard, Marius
revit le fiacre qui descendait rapidement
ta rue Mouffetard ; le fiacre était déjà très
loin, aucun moyen de le rejoindre ; quoi?
eotfrir après? impossible; et d'ailleurs de
la voiture on remarquerait certainement
un individu courant à toutes jambes à la
poursuite du fiacre, et le père le recon-
naîtrait.
En ce moment, hasard inouï et merveil-
leux, Marius aperçut un cabriolet de régie
qui passait à-vide sur le boulevard.
Il n'y avait qu'un parti à prendre, mon-
lteproduction interdite.
Voir le Rappel du 23 avril au 27 octobre
ter dans ce cabriolet et suivre le fiacre.
Cela était sûr, efficace et sans danger.
Marius fit signe au cocher d'arrêter et
lui cria :
— A l'heure 1
Marius était sans cravate, il avait son
vieil habit de travail auquel des boudons
manquaient, sa chemise était déchirée à
l'un des plis de la poitrine.
Le cocher s'arrêta, cligna de l'œH, et
étendit vers Marius sa main gauche en
frottant doucement son index avec son
pouce.
— Quoi? dit Marius.
— Payez d'avance, dit le cocher.
Marius se souvint qu'il n'avait sur lui
que seize sous.
Combien? demanda-t-il.
i-— Quarante sous.
— Je payerai en revenant. -*'1 -
Le cocher, pour toute réponse, siffla
l'air de La Palisse et fouetta son cheval.
-Marius regarda le cabriolet s'éloigner
d'un air égaré. Pour vingt-quatre-sous qui
lui manquaient, il perdait sa joie, son
bonheur, son amour J il retombait dans la
nuit! il avait vu et il redevenait aveugle.
Il songea amèrement et, il faut bien le
dire, avec un regret profond, aux cinq
francs qu'il avait donnés le matin même à
cette misérable fille.
S'il avait eu ces cinq francs, il était
sauvé, il renaissait, il sortait des limbes et
des ténèbres, il sortait de l'isolement, du
spleen, du veuvage ; il renouait le fil noir
de sa destinée à ce beau fil d'or qui venait
de flotter devant ses yeux et de se casser
encore une fois ! Il rentra dans la masure
désespéré.
Il aurait pu se dire que M. Leblanc avait
promis de revenir le soir, et qu'il n'y au-
rait qu'à s'y mieux prendre cette fois pour
le suivre ; mais dans sa contemplation,
c'est à peine s'il avait entendu.
Au moment de monter l'escalier, il
aperçut de l'autre côté du boulevard, le
long du mur désert de la rue de la Bar-
rière-des-Gobelins, Jondrette enveloppé
du pardessus du « philanthrope », qui
parlait à un de ces hommes de mine in-
quiétante qu'on est convenu d'appeler rô-
deurs de barrières ; gens à figures équi-
voques, à monologues suspects, qui ont
un air de mauvaise pensée, et qui dorment
assez habituellement le jour, ce qui fait
supposer qu'ils travaillent la nuit..
Ces deux hommes, causant immobiles
sous la neige qui tombait par tourbillons,
faisaient un groupe qu'un sergent de ville
eût à coup sûr observé, mais que Marius
remarqua à peine.
Cependant, quelle que fût sa préoccu-
pation douloureuse, il ne put s'empêcher
de se dire que ce rôdeur de barrière à qui
Jondrette parlait ressemblait à un certain
Panchaud, dit Printanier, dit Bigrenaille,
que Courfeyrac lui avait montré une fois,
et qui passait dans le quartier pour un
promeneur nocturne assez dangereux. On
a vu, dans le livre précédent, le nom de
cet homme.
Ce Panchaud, dit Printanier, dit Bigre-
naille, a figuré plus tard dans plusieurs
procès criminels et est devenu depuis un
coquin célèbre. Il n'était encore alors
qu'un fameux coquin. Aujourd'hui, il est
à l'état de tradition parmi les bandits et
les escarpes. Il faisait école vers la fin du
dernier règne. Et le soir, à la nuit tom-
bante, à l'heure où les groupes se forment
et se parlent bas, on en causait à la Force
dans la Fosse-aux-Liona.
On pouvait même, dans cette prison,
précisément à l'endroit où passait sous le
chemin de ronde ce canal des latrines qui
servit à la fuite inouïe en plein jour de
trente détenus en 1843, on pouvait, au-
dessus de la dalle de ces latrines, lire son
nom, PANCHAUD, audacieusement gravé
par lui sur le mur de ronde dans une de
ses tentatives d'évasion. En 1832, la police
le surveillait déjà, mais il n'avait pas en-
core sérieusement débuté.
XI
Offres de service de la nslsère
à la douSecsr
Marius monta l'escalier de la mastire à
pas lents; à l'instant où il allait rentrer
dans sa cellule, il aperçut derrière lui
dans le corridor la Jondrette aînée qui le
suivait. Cette fille lui fut odieuse à voir,
c'était elle qui avait ses cinq francs, il
était trop tard pour les lui redemander,
le cabriolet n'était plus là, le fiacre était
bien loin. D'ailleurs elle ne les lui ren-
drait pas. Quant à la questionner sur la
demeure des gens qui étaient venus tout
à l'heure, cela était inutile, il était évi-
dent qu'elle ne la savait point, puisque
la lettre signée Fabantou était adressée
au monsieur bienfaisant dé l'église Saint-
Jacqucs-du-Haut-Pas.
Marius entra dans sa chambre et poussa
sa porte derrière lui.
Elle ne se ferma pas ; il se retourna et vit
une main qui retenait la porte entr'ouverte.
— Qu'est-ce que c'est? demanda-t-il,
qui est là?
C'était la fille Jondrette.
— C'est vous? reprit Marius presque
durement, toujours vous, donc! que me
voulez-vous?
:me semblait pensive et BG regardait
pas. Elle n'avait plus son assurance du
matin. Elle n'était pas entrée et se tenait
dans l'ombre du corridor, où Marius l'a-
percevait par la porte entrebâillée.
— Ah çà, répondrez-vous? fit Marius.
Qu'est-ce que vous me voulez?
Elle leva sur lui son œil morne où une
espèce de clarté semblait s'allumer va-
guement, et lui dit :
— Monsieur Marius, vous avez l'air
triste. Qu'est-ce que vous avez ?
— Moi I dit Marius.
— Oui, vous.
— Je n'ai rien.
— Si!
— Non.
— Je vous dis que si !
— Laissez-moi tranquille !
Marius poussa de nouveau la porte, elle
continua de la retenir.
- Tenez, dit-elle, vous avez tort. Quoi-
que vous ne soyez pas riche, vous avez
été bon ce matin. Soyez-le encore à pré-
sent. Vous m'avez donné de quoi manger,
dites-moi maintenant ce que vous avez.
Vous avez du chagrin, cela se voit. Je ne
voudrais pas que vous eussiez du chagrin.
Qu'est-ce qu'il faut faire pour cela? Puis-
je servir à quelque chose? Employez-moi.
Je ne vous demande pas vos secrets;
vous n'aurez pas besoin de me les dire;
mais enfin je peux être utile. Je puis bien
vous aider, piiisque j'aide mon père.
Quand il faut porter des lettres, aller dans
les maisons, demander de porte en porte,
trouver une adresse, suivre quelqu'un,
moi je sers à ça. Eh bien, vous pouvez
bien me dire ce que vous avez, j'irai par-
leivaux personnes; quelquefois quelqu'un
qui parle aux personnes, ça suffit pour
qu'on sache les choses, et tout s'arrange.
Servez-vous de moi.
Une idée traversa l'esprit de Marius.
Quelle branche dédaigne-t-on quand on se
sent tomber? « <
Il s'approcha de la Jondrette.
— Ecoute., lui dit-il.
Elle l'interrompit avec un éclair de joie
dans les yeux.
- Oh oui, tutoyez-moi! j'aime mieux
cela.
— Eh bien, reprit-il, tu as amené ici ce
vieux monsieur avec sa fille 1
- Oui. 0-
— Sais-tu leur adresse?
-Non.
Trouve-la-moi.
L'œil de la Jondrette, de morne, était
devenu joyeux, de joyeux il devint sombre,
— C'est là ce que vous voulez? deman-
da-t-elle.
- Oui.
— Est-ce que vous les connaissez?
- Non.
— C'est-à-dire, reprit-elle vivement
vous ne la connaissez pas, mais vous vou-
lez la connaître.
Ce les qui était devenu la avait je ne sais
quoi de significatif et d'amer.
— Enfin, peux-tu? dit Marius.
— Vous aurez l'adresse de la belle de-
moiselle.
Il y avait encore dans ces mots « la belle
demoiselle » une nuance qui importuna
Marius. Il reprit :
— Enfin n'importe ! l'adresse du père et
de la fille. Leur adresse, quoi !
Elle le regarda fixement.
— Qu'est-ce que vous me donnerez'
— Tout ce que tu voudras !
— Tout ce que je voudrai ?
— Oui.
— Vous aurez l'adresse.
Elle baissa la tête, puis, d'un mouvez
ment brusque, elle tira la porte qui se re-
ferma.
VICTOR HUGQJ
(A wiwé!,) >
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