Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-05-11
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 11 mai 1885 11 mai 1885
Description : 1885/05/11 (N5540). 1885/05/11 (N5540).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/12/2012
Uf • 5540 — Lundi il Mai 1885 - - lie numéro: lOc. — Départements 1 it à; c. 22 Floréal an 93 — N8 5540 -
ADMINISTRATION
£ 8, RUE DE VALOIS, 18
ABONNEMENTS
fAHIS
"ois mois. () )}
1;1x mois. 20 »
DEPARTEMENTS
Trois mois. 13 50
Sixmois. 27 a
Adresser lettres et mandais
A M. ERNEST LEFÈVRE -
.ADMINIS'!:BA:rE11R..GÉP
r —.B.-..-——-,..-
_,_
r
REDACTION
S'adresser au. Secrétaire de la Réaacfio1.
De 4 à 6 heures dit soir
2.8f RUE DE -VALOIS, 13
Les manuscrits noninséres ne seront])as reniai
ANNONCES
3QL Ch. IAGRANGE, CERF et ce
C, ace de la Bourse, 6
LA CHAMBRE DE LEURS RÊVES
Savez-vous la peur des monarchistes?
C'est que la prochaine Chambre ne soit
pionarchiste.
Ça vous étonne? Un de leurs jour-
naux va vous dire leurs raisons.
Si la Chambre prochaine est monar-
chiste qu'arrivera-t-il? Il arrivera que le
président de la République et le Sénat ,
qui sont républicains, la mettront à la
porte. Ceci n'est rien : le pays la ren-
verra.
Il est de fait qu'un pays qui, vou-
lant la République, comme il l'a prouvé
sans se démentir un seul jour dans tou-
tes les élections depuis quatorze ans,
nommerait une majorité monarchiste,
serait capable de la renommer.
En ce cas, voyez la suite.
« La Chambre serait réélue cette
fois avec le mandat impératif de pro-
clamer la monarchie, et elle la pro-
clamerait tout de suite. » Comment
le président de la République com-
ment le Sénat, comment Paris, pren-
draient cette proclamation, le Gau-
lois ne s'en inquiète pas. Quantités né-
gligeables. Philippe VII s'installerait
à l'Elysée, en attendant qu'on lui eût
rebâti les Tuileries. Alors, monar-
chistes, pleurez.
Que les monarchistes pleurent? Mais
ce serait aux républicains à pleurer. Ce
serait aux monarchistes à rire.
Non pas. C'est les monarchistes qu'il
faudrait plaindre si le comte de Paris
héritait du trône de son grand-père.
,« C'est le propre de la monarchie héré-
ditaire que le roi soit obligé de rallier
ses ennemis pour assurer la couronne
,à son héritier naturel : aussi, bien qu'il
soit le roi de tous, se sent-il davantage
le roi de ceux qui ne lo reconnaissent
pas. » Davantage, pauvres monarchis-
tes. Philippe VII serait moins à vous
qu'aux républicains. « Rien ne lui coû-
terait pour les gagner à sa cause. »
Pour eux les avances, les faveurs, les
places. « En se refusant à venger les
injures du duc d'Orléans, Louis XII se
dispensait de récompenser ses servi-
teurs. » Philippe VII ne vous récom-
penserait pas, monarchistes! Pleurez.
Ceux qui composeront la cour de Phi-
lippe VII « disentdéjàauxmonarchistos:
Vous n'avez pas été fonctionnaires de
la République, vous n'avez même pas
été républicains, votre cas est grave.
La monarchie ne sera pas votre chose.»
fet ce qu'il y aurait de plus dur pour les
monarchistes , c'est qu'ils n'auraient
même pas la satisfaction de leurs ran-
cunes. « Ils ne pourraient pas exercer
de représailles contre les républicains ;
le roi serait le protecteur-né de la paix
sociale et Philippe VII voudrait mettre
fin aux divisions dissolvantes, il le vou-
drait, fût-ce contre le pays lui-même.
Les républicains n'auraient donc pas à
trembler. » Les républicains n'auraient
pas à trembler ? Monarchistes, san-
glotez.
yoilà ce que ferait des monarchistes
une Chambre monarchiste. Voilà pour-
quoi les monarchistes en ont peur.
Supposez, au contraire, une Chambre
qui serait monarchiste sans l'être, une
Chambre « conservatrice et libérale »
où les monarchistes entreraient « avec
le concours et le programme du centre
gauche », et voyez la différence. « Même
dans les républiques où il n'y a que des
républicains, comme celle des Etats-
Unis, le parti qui arrive au pouvoir
traite l'autre en ennemi, à la florentine,
à l'athénienne, destituant tous les fonc-
tionnaires, agents et employés de l'Etat,
plaçant partout ses créatures, pour ser-
vir ses vengeances et ses intérêts ».
Hein, monarchistes, est-ce que l'eau ne
vous en vient pas aux lèvres? Traiter
les républicains à la florentine! Vous
venger à votre soif! Vous placer à votre
faim!
Mais ce centre gauche avec le pro-
gramme et le concours duquel les mo-
narchistes auraient été élus ne gêne-
rait-il pas les monarchistes dans leur
faim et dans leur soif? Bah! il se passe-
rait en 1885 ce qui s'est passé en 1877.
« Le centre gauche a été un moment au
pouvoir sous la présidence républicaine
de M. Grévy, mais il n'y est pas resté
longtemps ; c'est peut-être bien encore
le centre gauche qui serait d'abord au
pouvoir sous la future présidence con-
servatrice, mais il n'y resterait pas da-
vantage. » Les monarchistes le remer-
cieraient bientôt de son concours en
le jetant par terre et en déchirant son
programme ; dès lors, ils seraient les
maîtres ; « ils se souviendraient des in-
validations, des révocations, des persé-
cutions, et ils rendraient œil pour œil
et dent pour dent » ; ils feraient une
« Convention conservatrice »; ils au-
raient dans la Chambre « un incompa-
rable instrument d'écrasement » ; cc
serait « la réaction sans frein ». Mo-
narchistes, dansez !
La situation serait si agréable pour
les monarchistes qu'ils n'éprouveraient
aucun besoin d'y rien changer. « Si la
Chambre était pressée de négocier avec
Monsieur le comte de Paris, elle ferait
comme l'Assemblée de 1871 avec Mon-
sieur le comte de Chambord, elle négo-
cierait de manière à ne pas réussir. »
Il y a bien des choses drôles là-de-
dans. Il y a cette Chambre royaliste qui
négocie avec le comte de Paris de ma-
nière à ne pas réussir et qui fait de son
roi un jocrisse. Il y a ces monarchistes
qui demandent le concours du centre
gauche pour lui prendre ses porte-
feuilles. Mais la chose la plus drôle,
c'est la peur que le suffrage universel
ne donne à la Chambre prochaine « le
mandat impératif de proclamer la mo-
narchie »!
AUGUSTE VACQUERIB.
— — "■ ■— 1
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil à l'Elysée, sous la présidence
de M. Grévy.
Ils se sont occupés de la nomination
des délégués français au congrès-sanitaire
de Rome, mais n'ont pas arrêté définitive-
ment leur choix.
Le général Campenon a donné au con-
seil des renseignements sur le dernier
courrier arrivé hier de Chine. Les docu-
ments que renferme ce courrier ont prin-
cipalement trait aux actions qui ont eu
lieu en avant de Lang-Son, à Dong-Daùg
et à Bang-Bo. Ils seront prochainement
publiés au Journal officiel.
Incidemment, le ministre de la guerre
a démenti de nouveau le bruit d'après
lequel le général Brière de l'Isle revien-
drait en France. Il a rappelé la nomina-
tion du général Brière de l'Isle au com-
mandement de la première division du
corps du Tonkin et les termes patrioti-
ques de la dépêche par laquelle le général
acceptait ce commandement.
COULISSES DES CHAMBRES
4,"
L'extrême gauche de la Chambre s'est
réunie, hier, et a décidé que M. Clo-
vis Hugues déposerait sur le bureau
de la Chambre la proposition d'amnistie
que tous les membres du groupe ont signée.
En même temps la réunion a chargé le
député des Bouches-du-Rhône de conférer
avec le ministre de l'intérieur pour lui an-
noncer le dépôt de cette proposition et
connaître son avis au sujet de la déclaration
d'urgence et de l'époque de la discussion.
Dans l'après-midi, M. Clovis Hugues
s'est entretenu à ce sujet avec M. Allain-
Targé. Celui-ci, après en avoir conféré
avec ses collègues du cabinet présents à
la Chambre, a répondu qu'il accepterait
la déclaration d'urgence et la discussion
immédiate de la proposition d'amnistie.
Le ministre n'a pas fait connaître son
sentiment sur le fond même de la propo-
sition, le conseil n'en ayant pas encore
délibéré ; mais il résulte des impressions
recueillies hier à la Chambre que le gou-
vernement repoussera la proposition au
fond, en déclarant qu'il se réservait de
faire appel ultérieurement au président
de la République pour lui demander de
prendre des mesures de clémence en
vertu de sa prérogative constitutionnelle.
-n-
Le ministre de l'intérieur a fait remettre
à M. Bozérian, rapporteur de la commis-
sion sénatoriale du scrutin de lister les
statistiques correspondant aux modifica-
tions que cette commission se propose
d'apporter au projet voté par la Chambre.
On sait que la préoccupation essentielle
qu'a eue cette commission a été de ré-
duire le nombre des députés qu'elle trouve
trop considérable dans le projet voté par
la Chambre. Pour cela, elle veut avoir re-
cours à deux moyens : d'abord, défa!quer
du chiflre de la population le nombre des
étrangers pour la détermination du nom-
bre des députés; ensuite, fixer une limite
minima pour la fraction de la base élec-
torale qui donnera droit à un député en
plus par département.
Il résulte des statistiques dressées par
le ministère de l'intérieur et communi-
quées à la commission que la défalcation
de l'élément étranger du chiffre de la po-
pulation diminuerait de 12 le nombre des
députés.
Si l'on fixe à 35,000 la limite minima de
la fraction de la base électorale donnant
droit à un député de plus, comme cela est
proposé à la commission sénatoriale, ,on
diminuerait de 44 le nombre des députés.
Quarante-quatre départements perdraient
chacun un député, si cette mesure était
adoptée. Ces départements sont les sui-
vants :
Ain, Alpes-Maritimes, Ardèche, Ariège,
Belfot, Bouches-du-Rhône, Calvados, Can-
tal, Charente, Cher, Côte-d'Or, Dordogne,
Doubs, Drôme, Eure, Eure-et-Loir, Gers,
Hérault, Indre, Isère, Jura, Landes, Loi-
ret, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Marne,
Meuse, Morbihan, Orne, Puy-de-Dôme,
Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Haute-
Saône, Sarthe, Seine-et-Oise, Deux-Sèvres,
Tarn, Tarn-et-Garonne, Var, Vaucluse,
Vendée et Yonne.
La Chambre avait, on s'en souvient,
décidé qu'il y aurait un député par 70,000
habitants et un député par chaque fraction
de 70,000, quel qu'en soit le chiffre. Dans
ce système, le nombre des députés serait
de 596, supérieur de 39 au chiffre actuel
qui est, on le sait, de 557.
Si les deux mesures proposées par la
commission sénatoriale étaient votées si-
multanément, le nombre des députés se-
rait réduit de 44 d'une part et de 12 de
l'autre, soit de 56 en tout; il serait donc
ramené à 540, c'est-à-dire qu'il serait in-
férieur de 17 au chiffre actuel.
Le ministre fait observer à ce propos
que, même si le scrutin d'arrondissement
était maintenu dans les conditions ac-
tuelles, le chiffre des députés, par le seul
fait de l'accroissement normal de la popu-
lation, devrait être augmenté de 14. L'aug-
mentation n'est donc (ijls la conséquence
du scrutin de liste exclusivement.
Le gouvernement, d'ailleurs, se réserve
de combattre énergiquement, devant le
Sénat, les propositions de la commission
et d'insister pour l'adoption du texte voté
par la Chambre.
La commission du budget a discuté hier
le budget des beaux-arts sur le rapport de
M. Antonin Proust. Voici quelques détails
curieux sur les renseignements donnés à
la commission et sur les décisions prises
par celle-ci.
En ce qui concerne les quatre théâtres
subventionnés, les résultats communiqués
font constater que la situation, à l'excep-
tion du Théâtre-Français, n'est pas favo-
rable. L'Opéra a subi une perte de 150,000
francs depuis 1 entrée en fonctiens de la
nouvelle direction, c'est-à-dire du 1er no-
vembre dernier à fin mars.
Durant la même période, l'exercice de
l'Odéon se traduit par une perte finale de
10,000 fr.
L'Opéra-Comique, pendant le même
laps de temps, n'a réalisé qu'un bénéfice
de 2,000 fr.
Quant au Theâtre-Français, les résul-
tats constatés durant cette période font
préMiP fi lw pwf de sociétaires seront
sensiblement égales aux chiffres de l'exer-
cice précédent.
La commission a émis le vœu que l'O-
péra donnât des représentations à prix
réduit. Elle a également émis le vœu que
les décors, qui sont la propriété de l'Etat,
fussent conservés et non transformés. La
direction actuelle a transformé les décors
de Polyeucie et de la Source pour les
approprier à la mise en scène de Sigurd,
l'opéra de Reyer que l'on monte actuelle-
ment.
La commission s'est prononcée à l'una-
nimité contre l'ouverture en 18S6 du Sa-
lon triennal organisé par l'Etat, et a de-
mandé que ce Salon soit reporté à 1889.
En outre, elle a émis le vœu que le palais
de l'Industrie continuât d'être mis à la
disposition des artistes à l'époque de leur
Salon annuel.
A propos des musées, la commission a
demandé que l'on procédât à une nouvelle
classification des peintures au musée du
Louvre, de façon à donner une meilleure
place à l'école française, qui est complè-
tement sacrifiée.
Enfin, la commission a pris quelques
décisions intéressantes au sujet des bâti-
monts civils.
Elle a décidé d'affecter à l'installation
de l'Institut agronomique, dans les bâti-
ments de l'ancienne Ecole de pharmacie,
le crédit de 200,000 francs qui était de-
mandé pour la restauration de la manu-
facture des Gobëlins.
De même elle a décidé d'attribuer à la
construction de l'Ecole des arts et métiers
de Lille le crédit de 200,000 francs destiné
aux bâtiments des dépôts d'étalons.
Enfin, la commission a émis le vœu que
la surveillance du Palais-Royal soit mieux
organisée, dans l'intérêt des nombreux
commerçants qui y résident.
■ I M ■ ■ ■—
Il parait qu'il en est des familles beyli-
cales comme des familles royales, où les
cadets font volontiers quelque opposition
à leurs aînés.
On nous avait affirmé que la paix était si-
gnée entre le prince Taïeb et son frère le bey
de Tunis. On nous avait dit aussi que le
bey avait gracieusement accordé à Taïeb
la permission de faire à Paris un voyage
qui semble lui tenir singulièrement à
cœur, pour des raisons qu'on néglige de
nous faire savoir, et qui, du reste, nous
seraient très probablement indifférentes.
Mais le représentant à Paris du prince
Taïeb-Bey communique à l'agence Havas
une dépêche de Taïeb, de laquelle il ré-
sulte que c'est par erreur qu'on a annoncé
qu'il aurait fait des excuses au bey et se
se serait engagé à ne pas quitter la Tuni-
sie sans l'autorisation de son frère.
Taïeb-Bey affirme dans ce télégramme
qu'il n'a signé aucune déclaration relative
à un arrangement ou à une soumission
quelconque. Il ajoute qu'il persiste à vouloir
partir pour Paris.
Des dépêches importantes de Saint-Pé-
tersbourg auraient été reçues à Londres
hier matin au sujet de l'incident de Penj-
deh; lord Granville a en outre reçu une
communication de M. de Staal relative au
projet d'arbitrage.
Le bruit courait hier à Londres que, bien
que la Russie n'ait pas renoncé au projet
d'arbitrage, un certain délai s'écoulera
probablement avant que les détails tech-
niques puissent être soumis à un arbitre.
D'ailleurs, les nouvelles restent paci-
fiques.
Un conseil de cabinet, qui a duré plu-
sieurs heures, a eu lieu dans l'après-midi.
L'amirauté a reçu hier l'ordre d'annuler
les arrangements pour le transport de
2,000 hommes de troupes anglaises dans
l'Inde. Ces troupes devaient s'embarquer
le 14 mai.
■■ ■ I—.. M ■■ M
A LA CHAMBRE
L'autre jour, à propos de ce traité de
Hué qui était censé fonctionner depuis
plus d'un- an bien qu'il n'eût jamais
reçu l'approbation du Parlement et
qu'il ne méritât nullement de la rece-
voir, M. de Freycinet disait : « Ratifiez-
le, non pour ce qu'il vaut, mais parce
que c'est l'unique moyen d'en avoir
un autre. »
Hier à l'occasion de la loi des récidi-
vistes, cette œuvre maîtresse de M. Wal-
deck-Rousseau, qui depuis deux ans
reçoit, dans l'une et l'autre Chambre,
tous les horions dont elle est digne,
M. Allain-Targé disait mélancolique-
ment : « Nous savons tous que le projet
est détestable, mais au point où en sont
les choses, après tant de discussions et
de temps perdu, il faut se résigner à en
faire l'expérience sur une petite échelle
et en donnant à l'administration un
large droit de réglementation. »
On le voit, l'héritage du cabinet
Ferry-Waldeck est de ceux qu'on ne
doit accepter que sous bénéfice d'in-
ventaire. Il est même permis de se de-
mander si, en ce qui concerne la loi
sur les récidivistes, l'honorable M.
Allain-Targé n'aurait pas agi sagement
en refusant absolument la succession de
son prédécesseur.
Pour jeter au panier cette loi ridi-
cule, inapplicable, que personne n'ose
plus défendre, sauf M. Gerville-Réache,
le nouveau cabinet avait, à ce qu'il
semble, une raison décisive. On sait
que M. Waldeck-Rousseau, ayant peut-
être lui-même des doutes sur ce beau
chef-d'œuvre législatif, avait envoyé en
mission M. Léveillé, pour étudier, sur
les lieux mêmes destinés à la reléga-
tion, le fonctionnement de la loi future.
M. Léveillé est revenu, et il est revenu
convaincu que le projet était déplora-
ble. Ses conclusions sont connues et
vont être l'objet d'un rapport. Dans de
telles conditions, il est difficile de com-
prendre comment on ne tient pas plus
compte de l'opinion de cet enquêteur
officiel. Faut-il croire que M. Waldeck-
Rousseau avait envoyé en mission
à la Guyane un homme de la valeur de
M. Léveillé pour prendre le contre-pied
de ses conclusions? Fait-on ces dé-
penses, aux frais du budget, pour le
plaisir ae raIre voyager un cnminanste,
sans même se donner la peine d'enten-
dre ce qu'il a à dire? C'est impossible à
supposer. Donc, alors même que M.
Waldeck serait encore ministre de l'in-
térieur, il serait obligé de s'incliner,
dans une large mesure, devant les ré-
sultats d'une enquête provoquée par
lui. Pourquoi l'honorable M. Allain-
Targé, beaucoup moins engagé dans
cette sotte question que son prédéces-
seur, ne se retrancherait-il pas, lui
aussi, derrière les conclusions de cette
enquête?
Le sentiment que nous exprimons
ici pourrait bien être celui de la Cham-
bre qui, en renvoyant à lundi la suite
du débat, a paru indiquer qu'elle dési-
rait un supplément d'information. Tout
le monde comprend que le voyage du
M. Léveillé doit servir à quelque chose;
autrement il eût mieux valu que M.
Waldeck laissât dans sa chaire l'émi-
nent professeur de la faculté de droit.
Nous disions plus haut que personne
n'avait défendu ce projet, dont M. Wal-
deck est le père, et que de nombreux
amendements ont un peu amélioré, en
le laissant encore fort imparfait. Si les
apologistes ont fait défaut, les criti-
ques ont abondé. A droite comme à
gauche, on signale les impossibilités
du projet. D'abord, M. Nadaud proteste,
avec son énergie ordinaire, contre une
législation qu'il qualifie de honteuse.
M. Freppel fait de la charité à bon maiv
ché en démontrant que le projet con-
fond de petits coupables et de grands
criminels. M. Amouroux, qui parlait
pour la première fois et qui parle fort
bien, sur le ton d'un homme énergique
et convaincu, M. Amouroux a traité la
question spéciale à la Nouvelle-Calé-
donie et prouvé péremptoirement qu'on
n'avait plus de terres à donner aux
transportés. Si on veut en trouver, il
faut encore dépouiller les Canaques,
comme déjà on l'a fait, au profit des
congrégations religieuses, et provoquer
de redoutables insurrections, exposer
la colonie à de nouveaux massacres.
M. Amouroux a donc établi qu'on ne
pouvait rien espérer d'une transporta-
tion en Calédonie. La même démons-
tration a été reprise pour la Guyane par
les députés dej ce pays. C'est pourtant
là que M. le ministre de l'intérieur
espère pouvoir envoyer un certain
nombre de déportés. En lui répondant,
M. Georges Perin s'est moqué avec es-
prit des craintes un peu pusillanimes
de la plupart des partisans de la loi et
il a prouvé que, telle qu'elle était faite,
elle était absolument inapplicable. M.
Perin regrette de voir l'honorable mi-
nistre de l'intérieur se charger de faire
fonctionner une loi de cette nature, et il
constate que son prédécesseur n'avait
pas eu le même courage puisqu'il reje-
tait le fardeau sur la marine.
M. de Lanessan enfin, dans un petit
discours très logique et très serré, est
venu diriger contre l'économie du pro-.
jet les objections les plus fortes. Corn,
parant la situation des condamnés ordi-
naires avec celle des relégués, M. de
Lanessan a prouvé que ceux-ci, bien
que moins -coupables au point de vue -
de la loi, étaient plus punis. On leur
impose quoi? le travail forcé, sous un
climat où l'Européen ne peut pas tra-
vailler. En admettant que les travaux
forcés ne soient pas la mort pour eux,
on conviendra que' c'est tout au moins
une peine ajoutée à une autre peine.
Le législateur peut le dire et cela sera ;
mais il ne peut pas faire que cela
soit s'il ne consent pas à le dire. L'im-
pression produite par les paroles de
M. de Lanessan pourrait faire croira
que les partisans et les auteurs du pro-,
jet n'avaient pas beaucoup réfléchi à ce
côté de la question. Mais sur quoi ont-
ils réfléchi, puisqu'ils n'ont jamais pu
dire ce que leur loi coûterait ; puisqu'ils
ont flotté jusqu'au dernier moment
entre le système de la transportation
libre et le système de la transportation
avec obligation de travail et nourriture,
garantie?
La discussion continuera lundi.
A. GAULIER.
——————————
Le ministre des finances a soumis hiet
à ses collègues, réunis en conseil à l'Ely-
sée, les modifications de détail qu'il se
propose d'apporter au projet de budget
pour 1886, dressé par son prédécesseur.
Comme nous l'avions déjà fait prévoir,
M. Sadi-Carnot juge exagérée l'évaluation
.Feuilleton du RAPPEL
DU 11 MAI
c 1 r » ———————-
u
JEUNESSE BBISEE
PREMIÈRE PARTIE
SEULE AU MONDE
VI
Une histoire de jenaessc
( Suite)
, Noémi regardait fixement le magistrat.
J1 se mordit les lèvres et reprit, d'une voix
,tpt'il s'efforçait vainement d'assurer :
- Je n'ai qu'un mot à dire. Il y a dix-
gfept ans de tout cela, et c'est après dix-sept
4- ———
Voir le Rappel du 27 avril au 10 mah
iRscroimuQBinterdita^ t
ans que la jeune fille vient me rappeler
son existence et les obligations que je
pouvais avoir envers l'enfant !
- Ah 1 monsieur, s'écria Noémi, c'est
qu'un homme s'est présenté, qui n'appar-
tenait pas aux classes élevées, lui ; c'é-
tait un simple ouvrier. Ma mère, qui
était restée fidèle à votre souvenir, était si
misérable alors qu'elle s'arrachait de la
bouche le dernier morceau de pain pour
me faire vivre. Cet homme simple et bon
lui porta secours, il la mit à même de
gagner quelques sous. Il me sauva, moi.
Puis, s'attachant à la femme et à l'en-
fant, jetant un voite sur un passé qu'il
voulait ignorer, il s'oflrit d'être le protec-
teur des deux abandonnées.
— C'est toujours ainsi que cela se passe.
- Monsieur, c'était un mari qui se pré-
sentait.
— Cependant, le mariage n'a jamais eu
lieu.
— Et qui vous dit, monsieur, que ma
mère se souvenant, ne se croyait pas in-
digne d'être la femme légitime d'un hon-
nête homme?
— Somme toute, sa conduite ne nje
X.il?:.ud.e nas^dit le magistraj^i repjÇE&it
peu à peu son aplomb. Maintenant veuillez
me dire ce que vous voulez de moi, pour-
quoi vous êtes venue à moi.
— Jb suis venue d'abord pour ce digne
et malheureux homme à qui je dois d'être
en vie. Vous pouvez voir à présent qu'il
n'est pas indigne de quelque indulgence,
j'oserai même dire de quelque estime. Ne
pouvez-vous rien, sinon pour faire lever,
au moins pour faire atténuer la peine si
dure à laquelle vous l'avez fait condam-
ner ?
— Je verrai ; mais je ne promets rien.
En tout cas, ce serait seulement la perpé-
tuité qui pourrait être effacée. Ce sera à
lui de mériter par sa bonne conduite que
sa peine soit ensuite plus ou moins abrégée.
Pour le moment.
— Pour le moment, reprit Noémi, ceux
qu'il laisse après lui sont dans une situa-
tion désespérée. Ce malheureux a eu des
enfants. Deux sont morts, mais il en reite
un troisième, tout jeune et qu'on a dû
mettre à la charge de la charité publi-
que.
— Je n'ai pas à m'occuper de l'enfant
de ce maçon.
..,-,Sj.le mtcsft avait dit : Je n'ai pas à
m'occuper de l'enfant de cet étudiant ! —
J'arrive à ma mère. Elle était malade de-
puis deux ans. La misère, "les terreurs,
les douleurs ont troublé sa raison. Il y a
deux mois, elle a eu un accès de délire.
On l'a conduite à l'hôpital. Elle est folle.
— Elle pourra donc être admise à Sainte-
Anne ou à la Salpêtrière.
-- C'est juste, et là, elle ne coûtera
rien, n'est-ce pas?
— Venons à vous, je vous prie, made-
moiselle. Avez-vous quelques ressources ?
•— Moi, j'ai pu travailler, suivre des
cours gratuits, j'ai passé mes examens. Je
pourrais donner des leçons pour vivre.
Mais je suis bien jeune, bien pauvre, mal
vêtue. Je ne connais personne.
- Je comprends, et vous veniez?..
— Je venais, monsieur, conduite par je
ne sais quelle illusion, par je ne sais
quelle espérance, je rêvais que je pourrais
trouver près de vous quelque protection,
un peu d'intérêt. Je ne vous aurais pas
demandé de l'affection, — vous ne me
connaissez pas, — mais uno émotion, un
mouvement de pitié, peut-être, un appui,
peut être simplement un çoiiseilj
M. de la Thibaudière se redressa.
- Ilademoiselle, j'occupe des fonctions
qui m'imposent des devoirs particuliers.
Il ne sied pas que celui qui représente la
justice, la morale et la loi, laisse planer
sur sa personne et sur sa vie une ombre
de soupçon et de scandale. La société, la
nécessité exigent que vous restiez tou-
jours pour moi une étrangère.
— Oh ! s'écria Noémi, ce n'est pas un
homme qui me parle 1
— Non, diL M. de la Thibaudière, c'est
un magistrat. Quant à l'homme, il sera
plus humain. Si, pour attendre des jours
meilleurs, pour vous donner le temps de
trouver des leçons, si vous venez me de-
mander un secours.
Tout en parlant, il avait ouvert le tiroir
de sa table et il avait pris dans un porte-
feuille un billet de mille francs.
Il le mit sous une enveloppe.
NoéiCi lui arrêta le bras.
— Vous vous méprenez, monsieur, ce
n'est pas du tout de l'argent que je venais
vous demander.
j+sjQus.me iitjs lue vous en.
avez grandement besoin. Allons, je ne
veux pas que vous emportiez de moi un
mauvais souvenir. Je ne suis pas très
riche. Mais si la somme vous paraissait
insuffisante.
Il prit un secondfbillet de mille francs
l'ajouta dans l'enveloppe et tendit le tout
à Noémi.
Elle repoussa sa main avec une fierté
calme et digne.
— Monsieur Quesnel de la Thibaudière,
dit-elle, que vous avais-je fait pour que
vous soyez si cruel ?
-
- Cruel! moi ! — Eh mais.
- [Je me trompe, en effet; vous êtes
généreux, très généreux; car enfin, vous
avez raison, je suis une étrangère. Mon-
sieur le procureur de la République, vous
n'êtes pas mon père. Je suis la fille de cet
assassin que vous avez condamné. Adieu i
EUGENE MORET.
1 - (.il!!ieJ
ADMINISTRATION
£ 8, RUE DE VALOIS, 18
ABONNEMENTS
fAHIS
"ois mois. () )}
1;1x mois. 20 »
DEPARTEMENTS
Trois mois. 13 50
Sixmois. 27 a
Adresser lettres et mandais
A M. ERNEST LEFÈVRE -
.ADMINIS'!:BA:rE11R..GÉP
r —.B.-..-——-,..-
_,_
r
REDACTION
S'adresser au. Secrétaire de la Réaacfio1.
De 4 à 6 heures dit soir
2.8f RUE DE -VALOIS, 13
Les manuscrits noninséres ne seront])as reniai
ANNONCES
3QL Ch. IAGRANGE, CERF et ce
C, ace de la Bourse, 6
LA CHAMBRE DE LEURS RÊVES
Savez-vous la peur des monarchistes?
C'est que la prochaine Chambre ne soit
pionarchiste.
Ça vous étonne? Un de leurs jour-
naux va vous dire leurs raisons.
Si la Chambre prochaine est monar-
chiste qu'arrivera-t-il? Il arrivera que le
président de la République et le Sénat ,
qui sont républicains, la mettront à la
porte. Ceci n'est rien : le pays la ren-
verra.
Il est de fait qu'un pays qui, vou-
lant la République, comme il l'a prouvé
sans se démentir un seul jour dans tou-
tes les élections depuis quatorze ans,
nommerait une majorité monarchiste,
serait capable de la renommer.
En ce cas, voyez la suite.
« La Chambre serait réélue cette
fois avec le mandat impératif de pro-
clamer la monarchie, et elle la pro-
clamerait tout de suite. » Comment
le président de la République com-
ment le Sénat, comment Paris, pren-
draient cette proclamation, le Gau-
lois ne s'en inquiète pas. Quantités né-
gligeables. Philippe VII s'installerait
à l'Elysée, en attendant qu'on lui eût
rebâti les Tuileries. Alors, monar-
chistes, pleurez.
Que les monarchistes pleurent? Mais
ce serait aux républicains à pleurer. Ce
serait aux monarchistes à rire.
Non pas. C'est les monarchistes qu'il
faudrait plaindre si le comte de Paris
héritait du trône de son grand-père.
,« C'est le propre de la monarchie héré-
ditaire que le roi soit obligé de rallier
ses ennemis pour assurer la couronne
,à son héritier naturel : aussi, bien qu'il
soit le roi de tous, se sent-il davantage
le roi de ceux qui ne lo reconnaissent
pas. » Davantage, pauvres monarchis-
tes. Philippe VII serait moins à vous
qu'aux républicains. « Rien ne lui coû-
terait pour les gagner à sa cause. »
Pour eux les avances, les faveurs, les
places. « En se refusant à venger les
injures du duc d'Orléans, Louis XII se
dispensait de récompenser ses servi-
teurs. » Philippe VII ne vous récom-
penserait pas, monarchistes! Pleurez.
Ceux qui composeront la cour de Phi-
lippe VII « disentdéjàauxmonarchistos:
Vous n'avez pas été fonctionnaires de
la République, vous n'avez même pas
été républicains, votre cas est grave.
La monarchie ne sera pas votre chose.»
fet ce qu'il y aurait de plus dur pour les
monarchistes , c'est qu'ils n'auraient
même pas la satisfaction de leurs ran-
cunes. « Ils ne pourraient pas exercer
de représailles contre les républicains ;
le roi serait le protecteur-né de la paix
sociale et Philippe VII voudrait mettre
fin aux divisions dissolvantes, il le vou-
drait, fût-ce contre le pays lui-même.
Les républicains n'auraient donc pas à
trembler. » Les républicains n'auraient
pas à trembler ? Monarchistes, san-
glotez.
yoilà ce que ferait des monarchistes
une Chambre monarchiste. Voilà pour-
quoi les monarchistes en ont peur.
Supposez, au contraire, une Chambre
qui serait monarchiste sans l'être, une
Chambre « conservatrice et libérale »
où les monarchistes entreraient « avec
le concours et le programme du centre
gauche », et voyez la différence. « Même
dans les républiques où il n'y a que des
républicains, comme celle des Etats-
Unis, le parti qui arrive au pouvoir
traite l'autre en ennemi, à la florentine,
à l'athénienne, destituant tous les fonc-
tionnaires, agents et employés de l'Etat,
plaçant partout ses créatures, pour ser-
vir ses vengeances et ses intérêts ».
Hein, monarchistes, est-ce que l'eau ne
vous en vient pas aux lèvres? Traiter
les républicains à la florentine! Vous
venger à votre soif! Vous placer à votre
faim!
Mais ce centre gauche avec le pro-
gramme et le concours duquel les mo-
narchistes auraient été élus ne gêne-
rait-il pas les monarchistes dans leur
faim et dans leur soif? Bah! il se passe-
rait en 1885 ce qui s'est passé en 1877.
« Le centre gauche a été un moment au
pouvoir sous la présidence républicaine
de M. Grévy, mais il n'y est pas resté
longtemps ; c'est peut-être bien encore
le centre gauche qui serait d'abord au
pouvoir sous la future présidence con-
servatrice, mais il n'y resterait pas da-
vantage. » Les monarchistes le remer-
cieraient bientôt de son concours en
le jetant par terre et en déchirant son
programme ; dès lors, ils seraient les
maîtres ; « ils se souviendraient des in-
validations, des révocations, des persé-
cutions, et ils rendraient œil pour œil
et dent pour dent » ; ils feraient une
« Convention conservatrice »; ils au-
raient dans la Chambre « un incompa-
rable instrument d'écrasement » ; cc
serait « la réaction sans frein ». Mo-
narchistes, dansez !
La situation serait si agréable pour
les monarchistes qu'ils n'éprouveraient
aucun besoin d'y rien changer. « Si la
Chambre était pressée de négocier avec
Monsieur le comte de Paris, elle ferait
comme l'Assemblée de 1871 avec Mon-
sieur le comte de Chambord, elle négo-
cierait de manière à ne pas réussir. »
Il y a bien des choses drôles là-de-
dans. Il y a cette Chambre royaliste qui
négocie avec le comte de Paris de ma-
nière à ne pas réussir et qui fait de son
roi un jocrisse. Il y a ces monarchistes
qui demandent le concours du centre
gauche pour lui prendre ses porte-
feuilles. Mais la chose la plus drôle,
c'est la peur que le suffrage universel
ne donne à la Chambre prochaine « le
mandat impératif de proclamer la mo-
narchie »!
AUGUSTE VACQUERIB.
— — "■ ■— 1
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil à l'Elysée, sous la présidence
de M. Grévy.
Ils se sont occupés de la nomination
des délégués français au congrès-sanitaire
de Rome, mais n'ont pas arrêté définitive-
ment leur choix.
Le général Campenon a donné au con-
seil des renseignements sur le dernier
courrier arrivé hier de Chine. Les docu-
ments que renferme ce courrier ont prin-
cipalement trait aux actions qui ont eu
lieu en avant de Lang-Son, à Dong-Daùg
et à Bang-Bo. Ils seront prochainement
publiés au Journal officiel.
Incidemment, le ministre de la guerre
a démenti de nouveau le bruit d'après
lequel le général Brière de l'Isle revien-
drait en France. Il a rappelé la nomina-
tion du général Brière de l'Isle au com-
mandement de la première division du
corps du Tonkin et les termes patrioti-
ques de la dépêche par laquelle le général
acceptait ce commandement.
COULISSES DES CHAMBRES
4,"
L'extrême gauche de la Chambre s'est
réunie, hier, et a décidé que M. Clo-
vis Hugues déposerait sur le bureau
de la Chambre la proposition d'amnistie
que tous les membres du groupe ont signée.
En même temps la réunion a chargé le
député des Bouches-du-Rhône de conférer
avec le ministre de l'intérieur pour lui an-
noncer le dépôt de cette proposition et
connaître son avis au sujet de la déclaration
d'urgence et de l'époque de la discussion.
Dans l'après-midi, M. Clovis Hugues
s'est entretenu à ce sujet avec M. Allain-
Targé. Celui-ci, après en avoir conféré
avec ses collègues du cabinet présents à
la Chambre, a répondu qu'il accepterait
la déclaration d'urgence et la discussion
immédiate de la proposition d'amnistie.
Le ministre n'a pas fait connaître son
sentiment sur le fond même de la propo-
sition, le conseil n'en ayant pas encore
délibéré ; mais il résulte des impressions
recueillies hier à la Chambre que le gou-
vernement repoussera la proposition au
fond, en déclarant qu'il se réservait de
faire appel ultérieurement au président
de la République pour lui demander de
prendre des mesures de clémence en
vertu de sa prérogative constitutionnelle.
-n-
Le ministre de l'intérieur a fait remettre
à M. Bozérian, rapporteur de la commis-
sion sénatoriale du scrutin de lister les
statistiques correspondant aux modifica-
tions que cette commission se propose
d'apporter au projet voté par la Chambre.
On sait que la préoccupation essentielle
qu'a eue cette commission a été de ré-
duire le nombre des députés qu'elle trouve
trop considérable dans le projet voté par
la Chambre. Pour cela, elle veut avoir re-
cours à deux moyens : d'abord, défa!quer
du chiflre de la population le nombre des
étrangers pour la détermination du nom-
bre des députés; ensuite, fixer une limite
minima pour la fraction de la base élec-
torale qui donnera droit à un député en
plus par département.
Il résulte des statistiques dressées par
le ministère de l'intérieur et communi-
quées à la commission que la défalcation
de l'élément étranger du chiffre de la po-
pulation diminuerait de 12 le nombre des
députés.
Si l'on fixe à 35,000 la limite minima de
la fraction de la base électorale donnant
droit à un député de plus, comme cela est
proposé à la commission sénatoriale, ,on
diminuerait de 44 le nombre des députés.
Quarante-quatre départements perdraient
chacun un député, si cette mesure était
adoptée. Ces départements sont les sui-
vants :
Ain, Alpes-Maritimes, Ardèche, Ariège,
Belfot, Bouches-du-Rhône, Calvados, Can-
tal, Charente, Cher, Côte-d'Or, Dordogne,
Doubs, Drôme, Eure, Eure-et-Loir, Gers,
Hérault, Indre, Isère, Jura, Landes, Loi-
ret, Lot-et-Garonne, Maine-et-Loire, Marne,
Meuse, Morbihan, Orne, Puy-de-Dôme,
Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Haute-
Saône, Sarthe, Seine-et-Oise, Deux-Sèvres,
Tarn, Tarn-et-Garonne, Var, Vaucluse,
Vendée et Yonne.
La Chambre avait, on s'en souvient,
décidé qu'il y aurait un député par 70,000
habitants et un député par chaque fraction
de 70,000, quel qu'en soit le chiffre. Dans
ce système, le nombre des députés serait
de 596, supérieur de 39 au chiffre actuel
qui est, on le sait, de 557.
Si les deux mesures proposées par la
commission sénatoriale étaient votées si-
multanément, le nombre des députés se-
rait réduit de 44 d'une part et de 12 de
l'autre, soit de 56 en tout; il serait donc
ramené à 540, c'est-à-dire qu'il serait in-
férieur de 17 au chiffre actuel.
Le ministre fait observer à ce propos
que, même si le scrutin d'arrondissement
était maintenu dans les conditions ac-
tuelles, le chiffre des députés, par le seul
fait de l'accroissement normal de la popu-
lation, devrait être augmenté de 14. L'aug-
mentation n'est donc (ijls la conséquence
du scrutin de liste exclusivement.
Le gouvernement, d'ailleurs, se réserve
de combattre énergiquement, devant le
Sénat, les propositions de la commission
et d'insister pour l'adoption du texte voté
par la Chambre.
La commission du budget a discuté hier
le budget des beaux-arts sur le rapport de
M. Antonin Proust. Voici quelques détails
curieux sur les renseignements donnés à
la commission et sur les décisions prises
par celle-ci.
En ce qui concerne les quatre théâtres
subventionnés, les résultats communiqués
font constater que la situation, à l'excep-
tion du Théâtre-Français, n'est pas favo-
rable. L'Opéra a subi une perte de 150,000
francs depuis 1 entrée en fonctiens de la
nouvelle direction, c'est-à-dire du 1er no-
vembre dernier à fin mars.
Durant la même période, l'exercice de
l'Odéon se traduit par une perte finale de
10,000 fr.
L'Opéra-Comique, pendant le même
laps de temps, n'a réalisé qu'un bénéfice
de 2,000 fr.
Quant au Theâtre-Français, les résul-
tats constatés durant cette période font
préMiP fi lw pwf de sociétaires seront
sensiblement égales aux chiffres de l'exer-
cice précédent.
La commission a émis le vœu que l'O-
péra donnât des représentations à prix
réduit. Elle a également émis le vœu que
les décors, qui sont la propriété de l'Etat,
fussent conservés et non transformés. La
direction actuelle a transformé les décors
de Polyeucie et de la Source pour les
approprier à la mise en scène de Sigurd,
l'opéra de Reyer que l'on monte actuelle-
ment.
La commission s'est prononcée à l'una-
nimité contre l'ouverture en 18S6 du Sa-
lon triennal organisé par l'Etat, et a de-
mandé que ce Salon soit reporté à 1889.
En outre, elle a émis le vœu que le palais
de l'Industrie continuât d'être mis à la
disposition des artistes à l'époque de leur
Salon annuel.
A propos des musées, la commission a
demandé que l'on procédât à une nouvelle
classification des peintures au musée du
Louvre, de façon à donner une meilleure
place à l'école française, qui est complè-
tement sacrifiée.
Enfin, la commission a pris quelques
décisions intéressantes au sujet des bâti-
monts civils.
Elle a décidé d'affecter à l'installation
de l'Institut agronomique, dans les bâti-
ments de l'ancienne Ecole de pharmacie,
le crédit de 200,000 francs qui était de-
mandé pour la restauration de la manu-
facture des Gobëlins.
De même elle a décidé d'attribuer à la
construction de l'Ecole des arts et métiers
de Lille le crédit de 200,000 francs destiné
aux bâtiments des dépôts d'étalons.
Enfin, la commission a émis le vœu que
la surveillance du Palais-Royal soit mieux
organisée, dans l'intérêt des nombreux
commerçants qui y résident.
■ I M ■ ■ ■—
Il parait qu'il en est des familles beyli-
cales comme des familles royales, où les
cadets font volontiers quelque opposition
à leurs aînés.
On nous avait affirmé que la paix était si-
gnée entre le prince Taïeb et son frère le bey
de Tunis. On nous avait dit aussi que le
bey avait gracieusement accordé à Taïeb
la permission de faire à Paris un voyage
qui semble lui tenir singulièrement à
cœur, pour des raisons qu'on néglige de
nous faire savoir, et qui, du reste, nous
seraient très probablement indifférentes.
Mais le représentant à Paris du prince
Taïeb-Bey communique à l'agence Havas
une dépêche de Taïeb, de laquelle il ré-
sulte que c'est par erreur qu'on a annoncé
qu'il aurait fait des excuses au bey et se
se serait engagé à ne pas quitter la Tuni-
sie sans l'autorisation de son frère.
Taïeb-Bey affirme dans ce télégramme
qu'il n'a signé aucune déclaration relative
à un arrangement ou à une soumission
quelconque. Il ajoute qu'il persiste à vouloir
partir pour Paris.
Des dépêches importantes de Saint-Pé-
tersbourg auraient été reçues à Londres
hier matin au sujet de l'incident de Penj-
deh; lord Granville a en outre reçu une
communication de M. de Staal relative au
projet d'arbitrage.
Le bruit courait hier à Londres que, bien
que la Russie n'ait pas renoncé au projet
d'arbitrage, un certain délai s'écoulera
probablement avant que les détails tech-
niques puissent être soumis à un arbitre.
D'ailleurs, les nouvelles restent paci-
fiques.
Un conseil de cabinet, qui a duré plu-
sieurs heures, a eu lieu dans l'après-midi.
L'amirauté a reçu hier l'ordre d'annuler
les arrangements pour le transport de
2,000 hommes de troupes anglaises dans
l'Inde. Ces troupes devaient s'embarquer
le 14 mai.
■■ ■ I—.. M ■■ M
A LA CHAMBRE
L'autre jour, à propos de ce traité de
Hué qui était censé fonctionner depuis
plus d'un- an bien qu'il n'eût jamais
reçu l'approbation du Parlement et
qu'il ne méritât nullement de la rece-
voir, M. de Freycinet disait : « Ratifiez-
le, non pour ce qu'il vaut, mais parce
que c'est l'unique moyen d'en avoir
un autre. »
Hier à l'occasion de la loi des récidi-
vistes, cette œuvre maîtresse de M. Wal-
deck-Rousseau, qui depuis deux ans
reçoit, dans l'une et l'autre Chambre,
tous les horions dont elle est digne,
M. Allain-Targé disait mélancolique-
ment : « Nous savons tous que le projet
est détestable, mais au point où en sont
les choses, après tant de discussions et
de temps perdu, il faut se résigner à en
faire l'expérience sur une petite échelle
et en donnant à l'administration un
large droit de réglementation. »
On le voit, l'héritage du cabinet
Ferry-Waldeck est de ceux qu'on ne
doit accepter que sous bénéfice d'in-
ventaire. Il est même permis de se de-
mander si, en ce qui concerne la loi
sur les récidivistes, l'honorable M.
Allain-Targé n'aurait pas agi sagement
en refusant absolument la succession de
son prédécesseur.
Pour jeter au panier cette loi ridi-
cule, inapplicable, que personne n'ose
plus défendre, sauf M. Gerville-Réache,
le nouveau cabinet avait, à ce qu'il
semble, une raison décisive. On sait
que M. Waldeck-Rousseau, ayant peut-
être lui-même des doutes sur ce beau
chef-d'œuvre législatif, avait envoyé en
mission M. Léveillé, pour étudier, sur
les lieux mêmes destinés à la reléga-
tion, le fonctionnement de la loi future.
M. Léveillé est revenu, et il est revenu
convaincu que le projet était déplora-
ble. Ses conclusions sont connues et
vont être l'objet d'un rapport. Dans de
telles conditions, il est difficile de com-
prendre comment on ne tient pas plus
compte de l'opinion de cet enquêteur
officiel. Faut-il croire que M. Waldeck-
Rousseau avait envoyé en mission
à la Guyane un homme de la valeur de
M. Léveillé pour prendre le contre-pied
de ses conclusions? Fait-on ces dé-
penses, aux frais du budget, pour le
plaisir ae raIre voyager un cnminanste,
sans même se donner la peine d'enten-
dre ce qu'il a à dire? C'est impossible à
supposer. Donc, alors même que M.
Waldeck serait encore ministre de l'in-
térieur, il serait obligé de s'incliner,
dans une large mesure, devant les ré-
sultats d'une enquête provoquée par
lui. Pourquoi l'honorable M. Allain-
Targé, beaucoup moins engagé dans
cette sotte question que son prédéces-
seur, ne se retrancherait-il pas, lui
aussi, derrière les conclusions de cette
enquête?
Le sentiment que nous exprimons
ici pourrait bien être celui de la Cham-
bre qui, en renvoyant à lundi la suite
du débat, a paru indiquer qu'elle dési-
rait un supplément d'information. Tout
le monde comprend que le voyage du
M. Léveillé doit servir à quelque chose;
autrement il eût mieux valu que M.
Waldeck laissât dans sa chaire l'émi-
nent professeur de la faculté de droit.
Nous disions plus haut que personne
n'avait défendu ce projet, dont M. Wal-
deck est le père, et que de nombreux
amendements ont un peu amélioré, en
le laissant encore fort imparfait. Si les
apologistes ont fait défaut, les criti-
ques ont abondé. A droite comme à
gauche, on signale les impossibilités
du projet. D'abord, M. Nadaud proteste,
avec son énergie ordinaire, contre une
législation qu'il qualifie de honteuse.
M. Freppel fait de la charité à bon maiv
ché en démontrant que le projet con-
fond de petits coupables et de grands
criminels. M. Amouroux, qui parlait
pour la première fois et qui parle fort
bien, sur le ton d'un homme énergique
et convaincu, M. Amouroux a traité la
question spéciale à la Nouvelle-Calé-
donie et prouvé péremptoirement qu'on
n'avait plus de terres à donner aux
transportés. Si on veut en trouver, il
faut encore dépouiller les Canaques,
comme déjà on l'a fait, au profit des
congrégations religieuses, et provoquer
de redoutables insurrections, exposer
la colonie à de nouveaux massacres.
M. Amouroux a donc établi qu'on ne
pouvait rien espérer d'une transporta-
tion en Calédonie. La même démons-
tration a été reprise pour la Guyane par
les députés dej ce pays. C'est pourtant
là que M. le ministre de l'intérieur
espère pouvoir envoyer un certain
nombre de déportés. En lui répondant,
M. Georges Perin s'est moqué avec es-
prit des craintes un peu pusillanimes
de la plupart des partisans de la loi et
il a prouvé que, telle qu'elle était faite,
elle était absolument inapplicable. M.
Perin regrette de voir l'honorable mi-
nistre de l'intérieur se charger de faire
fonctionner une loi de cette nature, et il
constate que son prédécesseur n'avait
pas eu le même courage puisqu'il reje-
tait le fardeau sur la marine.
M. de Lanessan enfin, dans un petit
discours très logique et très serré, est
venu diriger contre l'économie du pro-.
jet les objections les plus fortes. Corn,
parant la situation des condamnés ordi-
naires avec celle des relégués, M. de
Lanessan a prouvé que ceux-ci, bien
que moins -coupables au point de vue -
de la loi, étaient plus punis. On leur
impose quoi? le travail forcé, sous un
climat où l'Européen ne peut pas tra-
vailler. En admettant que les travaux
forcés ne soient pas la mort pour eux,
on conviendra que' c'est tout au moins
une peine ajoutée à une autre peine.
Le législateur peut le dire et cela sera ;
mais il ne peut pas faire que cela
soit s'il ne consent pas à le dire. L'im-
pression produite par les paroles de
M. de Lanessan pourrait faire croira
que les partisans et les auteurs du pro-,
jet n'avaient pas beaucoup réfléchi à ce
côté de la question. Mais sur quoi ont-
ils réfléchi, puisqu'ils n'ont jamais pu
dire ce que leur loi coûterait ; puisqu'ils
ont flotté jusqu'au dernier moment
entre le système de la transportation
libre et le système de la transportation
avec obligation de travail et nourriture,
garantie?
La discussion continuera lundi.
A. GAULIER.
——————————
Le ministre des finances a soumis hiet
à ses collègues, réunis en conseil à l'Ely-
sée, les modifications de détail qu'il se
propose d'apporter au projet de budget
pour 1886, dressé par son prédécesseur.
Comme nous l'avions déjà fait prévoir,
M. Sadi-Carnot juge exagérée l'évaluation
.Feuilleton du RAPPEL
DU 11 MAI
c 1 r » ———————-
u
JEUNESSE BBISEE
PREMIÈRE PARTIE
SEULE AU MONDE
VI
Une histoire de jenaessc
( Suite)
, Noémi regardait fixement le magistrat.
J1 se mordit les lèvres et reprit, d'une voix
,tpt'il s'efforçait vainement d'assurer :
- Je n'ai qu'un mot à dire. Il y a dix-
gfept ans de tout cela, et c'est après dix-sept
4- ———
Voir le Rappel du 27 avril au 10 mah
iRscroimuQBinterdita^ t
ans que la jeune fille vient me rappeler
son existence et les obligations que je
pouvais avoir envers l'enfant !
- Ah 1 monsieur, s'écria Noémi, c'est
qu'un homme s'est présenté, qui n'appar-
tenait pas aux classes élevées, lui ; c'é-
tait un simple ouvrier. Ma mère, qui
était restée fidèle à votre souvenir, était si
misérable alors qu'elle s'arrachait de la
bouche le dernier morceau de pain pour
me faire vivre. Cet homme simple et bon
lui porta secours, il la mit à même de
gagner quelques sous. Il me sauva, moi.
Puis, s'attachant à la femme et à l'en-
fant, jetant un voite sur un passé qu'il
voulait ignorer, il s'oflrit d'être le protec-
teur des deux abandonnées.
— C'est toujours ainsi que cela se passe.
- Monsieur, c'était un mari qui se pré-
sentait.
— Cependant, le mariage n'a jamais eu
lieu.
— Et qui vous dit, monsieur, que ma
mère se souvenant, ne se croyait pas in-
digne d'être la femme légitime d'un hon-
nête homme?
— Somme toute, sa conduite ne nje
X.il?:.ud.e nas^dit le magistraj^i repjÇE&it
peu à peu son aplomb. Maintenant veuillez
me dire ce que vous voulez de moi, pour-
quoi vous êtes venue à moi.
— Jb suis venue d'abord pour ce digne
et malheureux homme à qui je dois d'être
en vie. Vous pouvez voir à présent qu'il
n'est pas indigne de quelque indulgence,
j'oserai même dire de quelque estime. Ne
pouvez-vous rien, sinon pour faire lever,
au moins pour faire atténuer la peine si
dure à laquelle vous l'avez fait condam-
ner ?
— Je verrai ; mais je ne promets rien.
En tout cas, ce serait seulement la perpé-
tuité qui pourrait être effacée. Ce sera à
lui de mériter par sa bonne conduite que
sa peine soit ensuite plus ou moins abrégée.
Pour le moment.
— Pour le moment, reprit Noémi, ceux
qu'il laisse après lui sont dans une situa-
tion désespérée. Ce malheureux a eu des
enfants. Deux sont morts, mais il en reite
un troisième, tout jeune et qu'on a dû
mettre à la charge de la charité publi-
que.
— Je n'ai pas à m'occuper de l'enfant
de ce maçon.
..,-,Sj.le mtcsft avait dit : Je n'ai pas à
m'occuper de l'enfant de cet étudiant ! —
J'arrive à ma mère. Elle était malade de-
puis deux ans. La misère, "les terreurs,
les douleurs ont troublé sa raison. Il y a
deux mois, elle a eu un accès de délire.
On l'a conduite à l'hôpital. Elle est folle.
— Elle pourra donc être admise à Sainte-
Anne ou à la Salpêtrière.
-- C'est juste, et là, elle ne coûtera
rien, n'est-ce pas?
— Venons à vous, je vous prie, made-
moiselle. Avez-vous quelques ressources ?
•— Moi, j'ai pu travailler, suivre des
cours gratuits, j'ai passé mes examens. Je
pourrais donner des leçons pour vivre.
Mais je suis bien jeune, bien pauvre, mal
vêtue. Je ne connais personne.
- Je comprends, et vous veniez?..
— Je venais, monsieur, conduite par je
ne sais quelle illusion, par je ne sais
quelle espérance, je rêvais que je pourrais
trouver près de vous quelque protection,
un peu d'intérêt. Je ne vous aurais pas
demandé de l'affection, — vous ne me
connaissez pas, — mais uno émotion, un
mouvement de pitié, peut-être, un appui,
peut être simplement un çoiiseilj
M. de la Thibaudière se redressa.
- Ilademoiselle, j'occupe des fonctions
qui m'imposent des devoirs particuliers.
Il ne sied pas que celui qui représente la
justice, la morale et la loi, laisse planer
sur sa personne et sur sa vie une ombre
de soupçon et de scandale. La société, la
nécessité exigent que vous restiez tou-
jours pour moi une étrangère.
— Oh ! s'écria Noémi, ce n'est pas un
homme qui me parle 1
— Non, diL M. de la Thibaudière, c'est
un magistrat. Quant à l'homme, il sera
plus humain. Si, pour attendre des jours
meilleurs, pour vous donner le temps de
trouver des leçons, si vous venez me de-
mander un secours.
Tout en parlant, il avait ouvert le tiroir
de sa table et il avait pris dans un porte-
feuille un billet de mille francs.
Il le mit sous une enveloppe.
NoéiCi lui arrêta le bras.
— Vous vous méprenez, monsieur, ce
n'est pas du tout de l'argent que je venais
vous demander.
j+sjQus.me iitjs lue vous en.
avez grandement besoin. Allons, je ne
veux pas que vous emportiez de moi un
mauvais souvenir. Je ne suis pas très
riche. Mais si la somme vous paraissait
insuffisante.
Il prit un secondfbillet de mille francs
l'ajouta dans l'enveloppe et tendit le tout
à Noémi.
Elle repoussa sa main avec une fierté
calme et digne.
— Monsieur Quesnel de la Thibaudière,
dit-elle, que vous avais-je fait pour que
vous soyez si cruel ?
-
- Cruel! moi ! — Eh mais.
- [Je me trompe, en effet; vous êtes
généreux, très généreux; car enfin, vous
avez raison, je suis une étrangère. Mon-
sieur le procureur de la République, vous
n'êtes pas mon père. Je suis la fille de cet
assassin que vous avez condamné. Adieu i
EUGENE MORET.
1 - (.il!!ieJ
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