Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-03-28
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 28 mars 1885 28 mars 1885
Description : 1885/03/28 (N5496). 1885/03/28 (N5496).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7542444w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/12/2012
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ABONNEMENTS
SUBIS
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DÉPARTEMENTS 1
Troismois.-- 1350
Sixmois. 22 à
Adresser lettres et maniais
JL M. ERNEST LEFÈVRE
«ADMJNISTKAïEtlVGÉBAHX
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BEDACTION
S'adresser au Secrétaire de la RéaactioD.
3>e 4 à 6 heures du soir
18, aun DE VALOXS, 1&
les manuscrits non insérés ne serontpasrenèn
ANNONCES
tttf. Ch. IAGRANGE, CERF et ce
6, eace de la Bourse, 6
ilS ELECTIONS GÉMULES
: Il est naturel que les royalistes et les
impérialistes aient voté le scrutin de
Déiste. Quand on est malade, on ne se
trouve bien couché sur aucun côté et
Uton se tourne perpétuellement du gau-
che sur le droit et du droit sur le
gauche.
En 1875, il y avait quatre ans que
toutes les élections partielles étaient
républicaines. C'est la faute du scrutin
de liste, se sont dit les ennemis de la
République; essayons du scrutin uni-
nominal. Les élections ont été encore
plus républicaine,. Et dans quelles
conditions! En 1877, la réaction était
maîtresse du Sénat et du président de
la République. Elle avait à elle toute
l'administration du haut en bas. Les
évêques collaborai-nt avec ses gardes
champêtres. Elle avait fait du maréchal
- 4e Mac-Mahon un commis-voyageur
électoral. Elle avait enrôlé le pape.
Résultat : son expulsion, d'abord de la
Chambre, ensuite de la présidence de
la Républi ue.
Il y avait là, certes, de quoi la dé-
goûter du scrutin d'arrondissement.
Ressayons du scrutin de liste! s'est-elle
dit avec résignation.
Un de ses journaux affecte une noble
foi dans le scrutin qu'elle a rejeté en
4875 : - « C'est aux monarchistes que
doit profiter exclusivement le scrutin
de liste, lequel est le vrai scrutin de
l'opposition. Il se prête aux grands cou-
tants d'opinion. Il provoque les grands
coups de vent, déchaîne les passions
soudaines et invite aux surprises. Par
lui, la Répnblique peut être balayée en
un jour. » Mais les autres journaux de
la réaction ont de la méfiance.
En voici un qui déclare mélancoli-
quement que, scrutin d'arrondissement
ou scrutin départemental, c'est pour
les conservateurs bonnet blanc ou
blanc bonnet, et que la monarchie
n'aura chance de revivre que si l'on
tue le suffrage universel : — « Ce
qu'il faudrait réformer, c'est l'absurde
système électoral qui permet à dix im-
béciles ma honnêtes d'empêcher neuf
hommes probes et intelligents d'être re-
présentés au Parlement. » Il faudra que
le pays choisisse entre le suffrage uni-
versel et la monarchie. Il nous semblait
qu'il avait choisi depuis longtemps.
Un journal orléaniste ne trouve pas
que les deux scrutins soit la même
chose. Il compte ce que vont coûter au
budget les trente-neuf députés que la
loi nouvelle ajoute aux cinq cent cin-
quante-sept actuels. Et puis, intervient
un journal du même coq, « voilà en-
core, sur les chemins de fer, trente-
neuf cartes gratuites à donner ! » Les
grandes compagnies sont ruinées du
coup.
Etece n'est pas seulement au point
de vue financier que la loi nouvelle
(sera terrible. « Elle aura, au point de
vue politique, un résultat fatal. Elle
troublera profondément r équilibre do1
la représentation entre les départe-
ments. » Et quelle Chambre cela va
nous faire! « Trente-neuf politiques,
trente-neuf avocats de plus, pourquoi?
Est-ce qu'il n'y en avait pas assez?
Quelle utilité voyez-vous à élargir la
carrière parlementaire et à y appeler
une réserve de petits intrigants de pro-
vince qui n'aspirent qu'à faire de la po-
litique leur métier? Le besoin de ce
stock ne se faisait pas sentir. » Ces in-
jures prodiguées à la loi nouvelle ne
prouvent pas que la réaction en espère
un succès triomphal.
Un journal bonapartiste ne cache pas
aux ennemis de la République que leur
seul moyen d'obtenir des voix serait de
mettre leur drapeau dans leur poche :
« N'oublions pas qu'on sera battu dans
tous les départements où l'on aura le
malheur de placer la question dynas-
tique avant la délivrance, avantloialut
de la France conservatrice et chré-
tienne. » C'est un journal bonapartiste
qui se charge de la réponse : « La cam-
pagne royaliste-impérialiste conservera
cette originalité qu'il y sera question de
tout, sauf de la royauté et de l'empire ;
l'empire et la royauté y subiront cette
humiliation que pas un de leurs parti-
sans n'osera les présenter au pays. Et
désormais il demeurera bien établi qu'il
suffit de supposer à un candidat des
arrière-pensé s de cet ordre pour que
le suffrage universel lui témoigne un
invincible éloignement. » Et le même
journal ajoute que cette « prudence »
des royalistes déguisés en conservateurs
et des bonapartistes masqués en chré-
tiens ne dupera pas le suffrage uni-
versel : « Le pays ménage à la coali-
tion monarchique une écrasante dé-
faite » Pis qu'écrasante, honteuse :
« Après un pareil échec subi dans de
telles conditions, qui donc oserait con-
tester que les partis monarchiques
aient donné la mesure de leur irré-
parable impuissance? Ce sera bien
la fin de la fin. On pouvait espérer
qu'elle serait plus digne et plus fière. »
Nous voilà un peu loin du grand
coup de vent qui, d'après la Patrie,
allait balayer la République en un jour.
Il y aura, nous le croyons aussi, un
grand coup de balai. Mais cette fois-ci
les bonapartistes ne seront pas du côté
du manche.
AUGUSTE VACQUERIE.
.————————— --
Le ministre de la guerre a reçu du gé-
néral Brière de l'Isle, en date d'Hanoï, 25
mars, communication du télégramme sui-
vant que le commandant en chef des trou-
pes du Tonkin avait reçu du général Né-
grier en date de Dong-Dang, 24 mars, onze
heures du soir :
L'ennemi a attaqué le poste de Dong-Dang
le 22, à deu\ heures du matin. J'ai dû me
porter en avant pour me donner de l'air. Le
2,i, j'ai pu m'emparer de la première ligne
des forts du camp retranché de Bang-Bo.
Le 24, mes efforts ont échoué devant une
supériorité numérique considérable.
Vers deux heures, l'artillerie n'ayant plus
de munitions, j'ai dû rompre le combat.
Je suis rentré à Dong-Dang à sept heures du
soir.
Tous les blessés ont été reportés sur Lang-
Son. Nos pertes sont d'environ 200 hommes
tués ou blessés.
Les renforts arrivés de France pour la 2'
brigade ont commencé à arriver le 24 mars.
La Nièvre est arivée le 21.
LA DÉPÊCHE D'HIER
Il y a trois mois que je n'ouvrais
pas un journal du matin ou du soir
sans un tremblement particulier. Je
craignais toujours d'y trouver la nou-
velle d'un désastre. Ge n'est pas un dé-
sastre, cette fois ; mais c'est un éckec
et une retraite. Le général de Négrier
n'avait ni assez d'hommes, ni assez de
munitions. Il a dû reculer devant
l'ennemi, rentrer dans ses lignes,
rompre, comme il le dit, le combat.
Il a trouvé, sans doute, en face de
lui, cette armée de cinquante mille
hommes, dont le Temps parlait dans
ses 'dernières dépêches, il y a quel-
ques jours. L'héroïsme ne peut rien
contre le nombre. La tactique non plus.
Il faut céder.
Maintenant, nous cache-t-on encore
quelque chose? Y a-t-il quelque part
un autre Tuyen-Quan? Les renforts qui
ne sont arrivés que depuis peu de jours
auront-ils le temps de rejoindre le gé-
néral de Négrier avant le 15 avril et lui
permettront-ils de reprendre l'offen-
sive avant les chaleurs? Et, en admet-
tant une victoire prochaine, où cette
victoire nous co duira-t-elle?
La situation n'était qu'inquiétante
auparavant, aujourd'hui elle est grave.
Nous savons moins que jamais où nous
allons. Les espérances de paix ont dis
paru. L'armée chinoise, commandée
par des Allemands, est devenue disci-
plinée; elle a des canons Krupp et des
fusils Remington. Nous lui avons appris
à se battre. Nos soldats sont en petit
nombre; le pays à garder est immense.
Et cette quantité négligeable, composée
de quatre cent millions d'hommes,
pèse de tout son poids sur notre fron-
tière tonkinoise et la fait craquer.
ÈDOUABD LOCItROY.
COULISSES DES CHAMBRES
La loi sur le scrutin de liste a été portée
hier au Sénat qui a décidé, sur la demande
du ministre de l'intérieur, de nommer la
commission chargée de l'examiner.
Lette commission délibérera immédiate-
ment et déposera son rapport lundi. Le
gouvernement demandera la discussion
pour le jourmême afin d'obtenir le vote dé-
finitif de la loi, si c'est possible, avant les
vacances de Pâques. Ce n'est qu'au cas où
ce résultat ne pourrait pas être obtenu,
que le gouvernement demanderait la dis-
jonction et le vote immédiat de l'article
supprimant les élections partielles.
Mais on prévoit aujourd'hui qu'il ne sera
pas nécessaire de recourir à cet expédient.
Le Sénat, en effet, qui n'est pas directe-
ment intéressé dans la réforme électorale
de la Chambre, votera le scrutin de liste,
sans grands débats. Il se pourrait même
qu'une seule séance suffit pour achever
cette discussion.
-0-
On pense généralement que les Cham-
bres se sépareront mardi soir 31 mars,
pour les vacances de Pâques. La rentrée
s effectuera du 20 au 30 avril, à raison des
nombreux travaux que la Chambre a en-
core à accomplir avant l'expiration de son
mandat.
La session des conseils généraux s'ou-
vrira le lundi 13 avril ; mais comme elle
ne doit durer, suivant l'usage, que quatre
ou cinq jours, les députés et sénateurs qui
font partie de ces assemblées départemen-
tales seront libres à partir du 20 et pour-
ront reprendre leurs travaux parlementai-
res.
—o—
L'extrême gauche s'est réunie hier et a
approuvé une proposition d'amnistie dont
M. Clovis Hugues a pris l'initiative et qui
s'applique à tous les crimes et délits politi-
ques et faits connexes.
Tous les membres présents ont signé la
proposition.
—o—
Les bureaux du Sénat ont élu hier la
commission des finances pour l'année
1885. Cette commission joue au Sénat le
rôle de la commission du budget à la
Chambre; mais à la différence de cette
dernière, sa nomination n'est pas subor-
donnée au dépôt du budget. Elle est, en
effet, élue au début et pour toute la durée
de l'année, avec mission d'examiner non-
senlement le budget lorsqu'il revient de la
Chambre, mais tons les projets financiers
dont le Sénat est saisi.
Les membres élus hier sont MM. Merlin,
Goulay, F ye, Albert Grévy, le général
Campenon, Claude des Vosges, Millaud,
Lenoël, Roger-Marvaise, Scheurer Kest-
ner, Dauphin, Léon Renault, de Freycinet,
Cuvinot, de Rémusat, Gouin, Clamageran
et Parent.
Neuf d'entre eux faisaient déjà partie
de la commission de 1884. Les 18 élus
comprennent 7 membres de l'union répu-
blicaine, 7 de la gauche et 4 du centre
gauche. ,.
Le président sortant, M. Calmon, avait
décliné toute candidature. Par contre, le
rapporteur général de 1884, M. Dauphin,
est au nombre des membres réélus."
A LA CHAMBRE
On apprenait, en arrivant à la Cham-
bre, que le géuéral Négrier s'étant
trouvé, vers la porte de Chine, en
présence de forces très supérieures en
nombre, avait dû battre en retraite,
avec des pertes évaluées à deux cents
hommes.
Nous ne mesurons pas, nous le di-
sions hier, la responsabilité du gouver-
nement sur les chances heureuses ou
malheureuses que peut successivement
présenter l'aventure où il a engagé nos
soldats. Un succès de nos troupes ne
l'amnistierait pas, à nos yeux, et, après
un insuccès, il ne nous semble pas plus
coupable qu'il ne l'était la veille. Nous
ne saurions cependant nous étonner
que M. Delafosse, l'un des membres de
la minorité qui se s nt le plus énergi-
quement opposés à cette entreprise la-
mentable, ait cru devoir provoquer, de
la part du gouvernement, des explica-
tions immédiates. Nous ne saurions
nous étonner davantage de la façon
sévère dont l'orateur a qualifié la poli-
tique suivie, dans cette affaire, par le
gouvernement, et ce qui pourrait plu-
tôt nous surprendre c'est que M. Flo-
quet, qui tenait le fauteuil de la prési-
dence, ait paru, un moment, douter du
droit évident de l'orateur à s'exprimer
comme il venait de le faire.
Le ton de M. Jules Ferry, dans les
quelques mots d'explication qu'il a
apportés à la tribune, en réponse à
M. Delafosse, semble prouver que M.
le président du conseil continue à
porter d'un cœur assez léger, trop lé-
ger assurément, sa lourde responsabi-
lité. Il a lu la dépêche qu'il venait de
recevoir et qui, sauf la perte de l'ar-
tillerie, confirme les nouvelles arrivées
par une autre voie. Il a ajouté que,
précisément vingt quatre heures après
les événements, les nouveaux renforts
venaient d'arriver en ligne. Si ces
informations sont exactes, elles peuvent
nous rassurer sur la situation du corps
engagé qui pourra tenir tête aux
Chinois, mais il n'y a pas à attendre,
de ses efforts, de bien grands résultats.
Ces efforts semblent justement dignes
de nos grandes époques militaires et la
reconnaissance de la patrie ne fera pas
défaut à ces victimes du devoir, tom-
bées loin du sol natal, qu'elles auraient
si bien défendu. Selon sa coutume, qui
commence à lasser même cette Cham-
bre, M. Jules Ferry a essayé de se cou-
vrir de la gloire de nos soldats et
il a demandé à ses interrupteurs s'ils
n'avaient pas confiance dans leur hé-
roïsme. M. Delafosse a répondu aux
applaudissements répétés de ses amis :
Nous avons confiance én eux ; pas en
vous t
M. Delafosse, en descendant de la
tribune, avait déclaré qu'il reprendrait
le débat au moment où viendrait à
l'ordre du jour l'interpellation de M.
Granet. Ce dernier a précisément de-
mandé la parole, mais, à la surprise
générale, au lieu de réclamer la fixa-
tion d'un jour prochain ou la discussion
immédiate, il est - venu annoncer à la
Chambre que M. le président du conseil
refusait d'accepter l'interpellation avant
les vacances. Ce point étant acquis, on
ne voit pas bien pourquoi M. Granet a
consenti à remettre à samedi le débat
qui doit s'engager sur ce refus. Déjà
on a attendu, et nous savons à quoi
cela a servi, la publication du fameux
Livre jaune. M. Granet accorde encore
à M. le ministre des affaires étrangères
un nouveau délai dont l'utilité nous
semble encore plus douteuse. On Pùt
compris cette condescendance si M.
Jules Ferry avait demandé à réfléchir.
Mais, dès qu'il est certain qu'il refuse
de répondre, c'est sur ce silence même
qu'une opposition résolue aurait ouvert
le débat, - sans une minute de délai.
C'est une grave faute qut a été com-
mise, et M. Jules Ferry est assez habi e
comme tacticien parlementaire pour
qu'elle soit difficilement réparable.
Nous avouons sincèrement que le
reste de la séance ne nous paraît pas
présenter le moindre intérêt. Quand
nos ressources militaires et financières
se perdent dans le gouffre ouvert par
une majorité aveugle, complice d'un
ministère à la fois téméraire et impré-
voyant, nous n'avons pas le courage de
parler d'autre chose.
A. GACLIER.
AU SÉNAT
Toujours les céréales. L'honorable mem-
bre de la Commune, qui répond au nom
de M. Méline, a répété à la tribune du
Luxembourg ce qu'il avait dit au palais
Bourbon. Inutile d'insister sur les redites
du chef des affameurs.
Après lui, un membre nouveau, M. Vel-
ten, sénateur de Marseille, a fait son début
en combattant l'exécrable projet. M. Velten,
qui doit avoir au moins quarante ans,
puisqu'il siège au Sénat, nous paraît en-
core bien naïf. N'a-t-il pas parlé du pro-
gramme républicain, toujours favorable à
la liberté du commerce ! Les programmes !
Qu'est-ce que c'est que cela et quelle lan-
gue parle le nouvel élu ! Il y a longtemps,
ici, que les vieilleries sont abandonnées
par les sages et il faut arriver de la Canne-
bière, en ligne directe, pour oser, dans
une assemblée d'hommes politiques, invo-
quer le respect des programmes et des
principes. M. Velten ne gardera pas long-
temps ce défaut-là ; il est en trop bonne
compagnie, au Sénat, pour ne pas prendre
le ton du jour, et il y a deux cent quatre-
vingt-dix Luxembourgeois, au moins, qui
ne demandent qu'à faire son éducation.
Un des grands meneurs de la campa-
gne protectionniste et le lieutenant de
M. Méline dans l'armée des affameurs, M.
de Saint-Vallier a essayé de répondre à
M. Léon Say qui, l'autre jour, avait fait
justice de ses exagérations sur la situation
du département de l'Aisne. On continue
d'ailleurs à demander à M. de Saint-
Vallier, sans obtenir de réponse, quelles
sont les fermes de ce département qu'on
donne, pour rien, au premier occupant.
Nos concitoyens pauvres coloniseraient le
département de l'Aisne, au moins aussi
aisément que le Tonkin. Pourquoi M. de
Saint-Vallier ne précise-t-il pas pour appe.
1er les colons?
La discussion générale a été close.
A. G.
————————- 4> -
LA MOTION RIVIÈRE
Un député essaie, dans un projet de loi,
de réaliser une réforme utile, sensée, ac-
certée, réclamée même par l'opinion. Il
s'agit des enfants moralement abandonnés,
ou de la péréquation de l'impôt foncier,
de la transformation des collèges commu-
naux, du crédit agricole, de telle mesure
qui n'exige pas impérieusement l'urgence.
Son projet est imprimé et d stribué; une
commission e..t nommée dans les bureaux,
le rapporteur dépose son rapport. Cela
prend bien un an en moyenne. Le rap-
port déposé, il faut attendre que la dis-
cussion vienne à l'ordre du jour. II y a
trois délib rations, deux tout au moins.
Le projet est accepté.
De la Chambre il va au Sénat ; deux ou
trois années se sont écoulées. Le Sénat a
mille qualités, mais la célérité n'est pas
son fort. Le plus souvent il laisse dormir
la loi dans ses cartons; s'il la discute,
c'est généralement pour la modifier, dans
ce cas, il faut qu'elle revienne devant la
Chambre des députés. Pendant ce temps,
la Chambre arrive au terme de son man-
dat et son œuvre périt avec elle. Tout le
travail législatif qu'elle a accompli est en
pure perte, les lois qu'elle a votées de-
viennent caduques, les décisions qu'elle a
prises sont comme si elles n'étaient pas.
Tout est à recommencer. C'est ce que
nous appelons le parlementarisme.
Ce système ingénieux a deux consé-
quences. D'abord il favorise la noncha-
lance de nos représentants. A quoi bon se
donner du mal, déployer de l'activité,
puisque ce que l'on fera ou rien est exac-
tement la même chose? Votons le budget,
écoutons de temps à autre une interpella-
tion, établissons quelque nouvel impôt, et
puis le reste du temps courons les minis-
tères et préparons notre réélection.
Si d'autre part, par extraordinaire, un
ou deux projets réformateurs parviennent
au Sénat, ce grand corps n'est pas embar-
rassé le moins du monde. 11 le serait s'il
était obligé de dire non; cette opposition
porterait atteinte à sa popularité ; en ou*
tre quand on refuse il est décent de don-
ner des raisons. Grâce à sa pratique ac-
tuelle, le Sénat peut s'éviter cet ennui. Il
suffit que M. Le Royer ne mette pas à l'or-
dre du jour les lois que lui envoie M.
Brisson, ce qui n'empêchera nullement les
sénateurs de s'écrier quand le mandat de
la Chambre touchera à sa fin : « Quel
dommage que de nouvelles élections soient
imminentes, nous allions justement voter
l'impôt sur le revenu et le service de trois
ans ! »
M. Rivière a dû présenter aujourd'hui
une proposition tendant à remédier à ce
mal. Désormais les lois votées par une
Chambre lui survivraient en quelque sorte
devant le Sénat. Cette mesure appelait un
tempérament ; il y avait certaines précau-
tions à prendre pour l'hypothèse où les
élections nous donneraient une Chambre
animée d'un esprit absolument différent
de celui de sa devancière. Supposons que
le scrutin de liste (le champ des conjectu-
res ert illimité) nous envoie un Parlement
libre-échangiste. Se figure-t-on le Sénat
votant des taxes en alléguant le vœu du
pays ?
Mais il suffirait que par cette simple
mesure de procédure la Chambre nou-
velle pût retirer les projets qui n'ont pas
son assentiment, faculté que possède déjà
le gouvernement. C'est ce que propose
M. Rivière et nous ne doutons pas du suc-
cès de la motion ainsi amendée.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
feuilleton du :RAPPEL
DU 28 MARS
- - M ————————————
LE »
SANG BLEU
nOISIÈMB PABTIII
1
«K. 1
1
Lé lendemain matin, à neuf heures, les
magistrats de Condé arrivaient au châ-
teau : le procureur de la République Ba-
licle, le juge d'instruction Legrain, un
greffier et le docteur Evette, un brigadier
et deux gendarmes à cheval.
Ce fut Mme de Colbosc qui les reçut et
(Traduction interdite; reproduction auto-
risée pour les journaux qui ont un traité avec
la Société des gens de lettres, mais après la
fin de la publication en feuilleton dans le
aappl.)
Voir le Rappel du 2 janvier au ZO mars.
leur raconta brièvement ce qu'elle savait.
A chaque mot, le procureur approuvait
par un mot toujouifc le même : « Très
bien ! madame la marquise », qu'il mur-
murait d'un ton de respectueuse compas-
sion. Il attendit qu'elle fût arrivée au bout
de son récit pour la questionner.
— Avez-vous, madame la marquise,
quelques indices si légers qu'ils soient
qui permettent d'admettre l'idée d'un sui-
cide?
— Un suicide ! Mais M. Guillaumanche
était l'homme le plus heureux du monde :
il avait tout, la fortune, une situation po-
litique. qui ne lui donnait que des sa-
tisfactions, une famille qu'il adorait.
— Croyez-vous à un accident?
— Je ne crois à rien, je ne sais que ce
que M. de la Senevière m'a rapporté.
— Pouvons-nous voir M. le comte de
la Senevière ?
— Je vais l'envoyer chercher.
— Nous vous en serons reconnaissants.
En attendant qu'il arrive, nous avons un
devoir douloureux à remplir, celui de faire
la visite du corps. et l'autopsie.
— Mais ma fille est auprès du cadavre
et elle a avec elle la fille de son mari,
s'écria Mme de Colbosc.
Evette intervint ;
— Il faudrait prier Mme et Mlle Guillau-
manche de se retirer, dit-il.
— Si madame la marquise veut bien se
charger de cette pénible mission? de-
manda le procureur.
Mme de Colbosc ne pouvait pas refuser.
— Messieurs, veuillez m'attendre, dit-
elle.
Depuis que le corps de Guillaumanche
avait été rapporté au château, Hériberte
et Nicole n'avaient pas quitté les côtés du
lit sur lequel on l'avait déposé; elles
étaient restées là toute la nuit, l'une à
droite, l'autre à gauche : la femme plon-
gée dans un désespoir morne, la fille pas-
sant d'une crise de larmes et de suffoca-
tions à la prostration et à l'anéantisse-
ment, pour revenir aux larmes. Depuis
qu'Hériberte connaissait Nicole, elle ne
l'avait jamais entendue parler de sa mère,
à ce point qu'on pouvait se demander si
elle en avait gardé le souvenir; au con-
traire, dans cette nuit de veillée, à cha-
que instant elle s'écriait au milieu de ses
sanglots.
- Maman, je savais; mais lui si bien
portant l Hériberte, qui l'a tué?
Hériberte frissonnait et ne répondait pas;
carsi elle ne la criait pas cette question que
la douleur d'enfant de Nicole laissait échap-
per franchement, tout bas elle se la po-
sait avec d'horribles angoisses. — Qui
l'avait tué, cet homme si bon, qui n'avait
fait que du bien à tous? Pourquoi l'avait
on tué ? Un seul homme pouvait avoir un
intérêt de jalousie, de vengeance, d'espé-
rance à commettre ce crime, et cet homme,
c'était La Senevière; mais la façon dont elle
l'avait accueilli avait-elle pu lui inspirer une
espérance quelconque, et était-ce possi-
ble, que si bas qu'il fût tombé, il en fût
arrivé à se venger d'un refus d'argent,
par un assassinat? Elle s'arrêtait, épou-
vantée, dans ses réflexions, se disant que
ce n'était pas dans une situation comme la
sienne, alors que par la douleur elle était
jetée hors d'elle-même, qu'elle pouvait les
examiner. Un La Senevière coupable d'un
assassinat 1 Dans quel but? A quelle ins-
tigation? Et quand elle voulait écarter
ces pensées, le cri de Nicole toujours le
même : « Hériberte qui l'a tué ? les lui
imposait malgré tout.
Bien que catholique fervente, Mme de
Colbosc avait horreur de la mort, ou plus
justement des morts, aussi n'avait-elle pas
voulu voir Guillaumanche lorsqu'on l'avait
rapporté, et ne voulut-elle pas davantago
entrer dans la chambre où il était exposé;
elle fit avertir Hériberte par une domesti-
que qu'elle avait à lui parler.
— Les magistrats sont arrivés.
— Recevez les. je vousprie; donnez-leur
»
toutes les explications qu'ils demanderont ;
vous en savez autant que moi.
— Ils ont besoin d'entrer dans la
chambre.
Elle ne prononça pas le mot « du
mort », mais de la main elle la montra.
— Il faut que vous vous reliriez et que
vous emmeniez avec vous cette petite,
dont la place n'est vraiment pas ici.
— Puis-je ne pas la laisser auprès de
son père ?
— Voulez-vous qu'elle assiste aux opé-
rations du médecin?
Le médecin ( Elle n'avait pas pensé au
médecin, pas plus qu'aux opérations dont
parlait sa mère; les magistrats, elle les
attendait, mais cette arrivée du médecin
lui inspira un sentiment d'horreur.
Comme elle ne répondait pas, Mme de
Colbosc insista :
— Ils attendent.
Son mari n'était même plus à elle, il
appartenait à la justice.
Elle rentra dans la chamb:\ ;-t, allant à
Nicole, elle l'embrassa t
— Il faut nous retirer, mon enfant,
— Pourquoi ?
— Les magistrats sont arrivés 1 ils ont
besoin dans cette chambre, nous ne pou-
vons pas rester avec eux
Nicole la regarda avec surprise, ne
comprenant pas pourquoi elle ne pouvait
pas rester.
— Tu vas leur parler, dit-elle, il faut
qu'ils trouvent qui l'a tué.
Hériberte voulut l'entraîner, mais Nt-
cole résista :
— Laisse-moi le regarder encore, dit-
elle. Oh ! papa, cher papa l
— Viens, viens !
Comme elles arrivaient à la porte, elle
s'ouvrit, et elles se trouvèrent en face des
quatre hommes qui les croyaient sorties
de la chambre ; ils s'effacèrent en saluant
pour les laisser passer. Nicole, qui mar-
chait les yeux noyés de larmes sans rien
voir, se heurta contre une boite que por-
tait le docteur Evette. Elle regarda et
reconnul le médecin.
— Mon Dieu, dit-elle à Hériberte, que
vont-ils lui faire?
— Viens, viens, dit Hériberte en vou-
lant l'entraîner; mais Nicole résista.
— Tu ne leur parles pas ? dit-elle.
Et comme Hériberte ne lui répondait
pas, elle se tourna vers les magistrats avec
un mouvement suppliant :
- Oh 1 messieurs, trouvez qui l'a tué.
HECTOR MALOT.
, ("illre..1
j , , J&inKISTRATOH J* ,
58, HUE DE VALOIS, fS
ABONNEMENTS
SUBIS
'iEj'aïsmMs. iO »
Six dois 20 »
DÉPARTEMENTS 1
Troismois.-- 1350
Sixmois. 22 à
Adresser lettres et maniais
JL M. ERNEST LEFÈVRE
«ADMJNISTKAïEtlVGÉBAHX
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i ; ; ',.. ¡
BEDACTION
S'adresser au Secrétaire de la RéaactioD.
3>e 4 à 6 heures du soir
18, aun DE VALOXS, 1&
les manuscrits non insérés ne serontpasrenèn
ANNONCES
tttf. Ch. IAGRANGE, CERF et ce
6, eace de la Bourse, 6
ilS ELECTIONS GÉMULES
: Il est naturel que les royalistes et les
impérialistes aient voté le scrutin de
Déiste. Quand on est malade, on ne se
trouve bien couché sur aucun côté et
Uton se tourne perpétuellement du gau-
che sur le droit et du droit sur le
gauche.
En 1875, il y avait quatre ans que
toutes les élections partielles étaient
républicaines. C'est la faute du scrutin
de liste, se sont dit les ennemis de la
République; essayons du scrutin uni-
nominal. Les élections ont été encore
plus républicaine,. Et dans quelles
conditions! En 1877, la réaction était
maîtresse du Sénat et du président de
la République. Elle avait à elle toute
l'administration du haut en bas. Les
évêques collaborai-nt avec ses gardes
champêtres. Elle avait fait du maréchal
- 4e Mac-Mahon un commis-voyageur
électoral. Elle avait enrôlé le pape.
Résultat : son expulsion, d'abord de la
Chambre, ensuite de la présidence de
la Républi ue.
Il y avait là, certes, de quoi la dé-
goûter du scrutin d'arrondissement.
Ressayons du scrutin de liste! s'est-elle
dit avec résignation.
Un de ses journaux affecte une noble
foi dans le scrutin qu'elle a rejeté en
4875 : - « C'est aux monarchistes que
doit profiter exclusivement le scrutin
de liste, lequel est le vrai scrutin de
l'opposition. Il se prête aux grands cou-
tants d'opinion. Il provoque les grands
coups de vent, déchaîne les passions
soudaines et invite aux surprises. Par
lui, la Répnblique peut être balayée en
un jour. » Mais les autres journaux de
la réaction ont de la méfiance.
En voici un qui déclare mélancoli-
quement que, scrutin d'arrondissement
ou scrutin départemental, c'est pour
les conservateurs bonnet blanc ou
blanc bonnet, et que la monarchie
n'aura chance de revivre que si l'on
tue le suffrage universel : — « Ce
qu'il faudrait réformer, c'est l'absurde
système électoral qui permet à dix im-
béciles ma honnêtes d'empêcher neuf
hommes probes et intelligents d'être re-
présentés au Parlement. » Il faudra que
le pays choisisse entre le suffrage uni-
versel et la monarchie. Il nous semblait
qu'il avait choisi depuis longtemps.
Un journal orléaniste ne trouve pas
que les deux scrutins soit la même
chose. Il compte ce que vont coûter au
budget les trente-neuf députés que la
loi nouvelle ajoute aux cinq cent cin-
quante-sept actuels. Et puis, intervient
un journal du même coq, « voilà en-
core, sur les chemins de fer, trente-
neuf cartes gratuites à donner ! » Les
grandes compagnies sont ruinées du
coup.
Etece n'est pas seulement au point
de vue financier que la loi nouvelle
(sera terrible. « Elle aura, au point de
vue politique, un résultat fatal. Elle
troublera profondément r équilibre do1
la représentation entre les départe-
ments. » Et quelle Chambre cela va
nous faire! « Trente-neuf politiques,
trente-neuf avocats de plus, pourquoi?
Est-ce qu'il n'y en avait pas assez?
Quelle utilité voyez-vous à élargir la
carrière parlementaire et à y appeler
une réserve de petits intrigants de pro-
vince qui n'aspirent qu'à faire de la po-
litique leur métier? Le besoin de ce
stock ne se faisait pas sentir. » Ces in-
jures prodiguées à la loi nouvelle ne
prouvent pas que la réaction en espère
un succès triomphal.
Un journal bonapartiste ne cache pas
aux ennemis de la République que leur
seul moyen d'obtenir des voix serait de
mettre leur drapeau dans leur poche :
« N'oublions pas qu'on sera battu dans
tous les départements où l'on aura le
malheur de placer la question dynas-
tique avant la délivrance, avantloialut
de la France conservatrice et chré-
tienne. » C'est un journal bonapartiste
qui se charge de la réponse : « La cam-
pagne royaliste-impérialiste conservera
cette originalité qu'il y sera question de
tout, sauf de la royauté et de l'empire ;
l'empire et la royauté y subiront cette
humiliation que pas un de leurs parti-
sans n'osera les présenter au pays. Et
désormais il demeurera bien établi qu'il
suffit de supposer à un candidat des
arrière-pensé s de cet ordre pour que
le suffrage universel lui témoigne un
invincible éloignement. » Et le même
journal ajoute que cette « prudence »
des royalistes déguisés en conservateurs
et des bonapartistes masqués en chré-
tiens ne dupera pas le suffrage uni-
versel : « Le pays ménage à la coali-
tion monarchique une écrasante dé-
faite » Pis qu'écrasante, honteuse :
« Après un pareil échec subi dans de
telles conditions, qui donc oserait con-
tester que les partis monarchiques
aient donné la mesure de leur irré-
parable impuissance? Ce sera bien
la fin de la fin. On pouvait espérer
qu'elle serait plus digne et plus fière. »
Nous voilà un peu loin du grand
coup de vent qui, d'après la Patrie,
allait balayer la République en un jour.
Il y aura, nous le croyons aussi, un
grand coup de balai. Mais cette fois-ci
les bonapartistes ne seront pas du côté
du manche.
AUGUSTE VACQUERIE.
.————————— --
Le ministre de la guerre a reçu du gé-
néral Brière de l'Isle, en date d'Hanoï, 25
mars, communication du télégramme sui-
vant que le commandant en chef des trou-
pes du Tonkin avait reçu du général Né-
grier en date de Dong-Dang, 24 mars, onze
heures du soir :
L'ennemi a attaqué le poste de Dong-Dang
le 22, à deu\ heures du matin. J'ai dû me
porter en avant pour me donner de l'air. Le
2,i, j'ai pu m'emparer de la première ligne
des forts du camp retranché de Bang-Bo.
Le 24, mes efforts ont échoué devant une
supériorité numérique considérable.
Vers deux heures, l'artillerie n'ayant plus
de munitions, j'ai dû rompre le combat.
Je suis rentré à Dong-Dang à sept heures du
soir.
Tous les blessés ont été reportés sur Lang-
Son. Nos pertes sont d'environ 200 hommes
tués ou blessés.
Les renforts arrivés de France pour la 2'
brigade ont commencé à arriver le 24 mars.
La Nièvre est arivée le 21.
LA DÉPÊCHE D'HIER
Il y a trois mois que je n'ouvrais
pas un journal du matin ou du soir
sans un tremblement particulier. Je
craignais toujours d'y trouver la nou-
velle d'un désastre. Ge n'est pas un dé-
sastre, cette fois ; mais c'est un éckec
et une retraite. Le général de Négrier
n'avait ni assez d'hommes, ni assez de
munitions. Il a dû reculer devant
l'ennemi, rentrer dans ses lignes,
rompre, comme il le dit, le combat.
Il a trouvé, sans doute, en face de
lui, cette armée de cinquante mille
hommes, dont le Temps parlait dans
ses 'dernières dépêches, il y a quel-
ques jours. L'héroïsme ne peut rien
contre le nombre. La tactique non plus.
Il faut céder.
Maintenant, nous cache-t-on encore
quelque chose? Y a-t-il quelque part
un autre Tuyen-Quan? Les renforts qui
ne sont arrivés que depuis peu de jours
auront-ils le temps de rejoindre le gé-
néral de Négrier avant le 15 avril et lui
permettront-ils de reprendre l'offen-
sive avant les chaleurs? Et, en admet-
tant une victoire prochaine, où cette
victoire nous co duira-t-elle?
La situation n'était qu'inquiétante
auparavant, aujourd'hui elle est grave.
Nous savons moins que jamais où nous
allons. Les espérances de paix ont dis
paru. L'armée chinoise, commandée
par des Allemands, est devenue disci-
plinée; elle a des canons Krupp et des
fusils Remington. Nous lui avons appris
à se battre. Nos soldats sont en petit
nombre; le pays à garder est immense.
Et cette quantité négligeable, composée
de quatre cent millions d'hommes,
pèse de tout son poids sur notre fron-
tière tonkinoise et la fait craquer.
ÈDOUABD LOCItROY.
COULISSES DES CHAMBRES
La loi sur le scrutin de liste a été portée
hier au Sénat qui a décidé, sur la demande
du ministre de l'intérieur, de nommer la
commission chargée de l'examiner.
Lette commission délibérera immédiate-
ment et déposera son rapport lundi. Le
gouvernement demandera la discussion
pour le jourmême afin d'obtenir le vote dé-
finitif de la loi, si c'est possible, avant les
vacances de Pâques. Ce n'est qu'au cas où
ce résultat ne pourrait pas être obtenu,
que le gouvernement demanderait la dis-
jonction et le vote immédiat de l'article
supprimant les élections partielles.
Mais on prévoit aujourd'hui qu'il ne sera
pas nécessaire de recourir à cet expédient.
Le Sénat, en effet, qui n'est pas directe-
ment intéressé dans la réforme électorale
de la Chambre, votera le scrutin de liste,
sans grands débats. Il se pourrait même
qu'une seule séance suffit pour achever
cette discussion.
-0-
On pense généralement que les Cham-
bres se sépareront mardi soir 31 mars,
pour les vacances de Pâques. La rentrée
s effectuera du 20 au 30 avril, à raison des
nombreux travaux que la Chambre a en-
core à accomplir avant l'expiration de son
mandat.
La session des conseils généraux s'ou-
vrira le lundi 13 avril ; mais comme elle
ne doit durer, suivant l'usage, que quatre
ou cinq jours, les députés et sénateurs qui
font partie de ces assemblées départemen-
tales seront libres à partir du 20 et pour-
ront reprendre leurs travaux parlementai-
res.
—o—
L'extrême gauche s'est réunie hier et a
approuvé une proposition d'amnistie dont
M. Clovis Hugues a pris l'initiative et qui
s'applique à tous les crimes et délits politi-
ques et faits connexes.
Tous les membres présents ont signé la
proposition.
—o—
Les bureaux du Sénat ont élu hier la
commission des finances pour l'année
1885. Cette commission joue au Sénat le
rôle de la commission du budget à la
Chambre; mais à la différence de cette
dernière, sa nomination n'est pas subor-
donnée au dépôt du budget. Elle est, en
effet, élue au début et pour toute la durée
de l'année, avec mission d'examiner non-
senlement le budget lorsqu'il revient de la
Chambre, mais tons les projets financiers
dont le Sénat est saisi.
Les membres élus hier sont MM. Merlin,
Goulay, F ye, Albert Grévy, le général
Campenon, Claude des Vosges, Millaud,
Lenoël, Roger-Marvaise, Scheurer Kest-
ner, Dauphin, Léon Renault, de Freycinet,
Cuvinot, de Rémusat, Gouin, Clamageran
et Parent.
Neuf d'entre eux faisaient déjà partie
de la commission de 1884. Les 18 élus
comprennent 7 membres de l'union répu-
blicaine, 7 de la gauche et 4 du centre
gauche. ,.
Le président sortant, M. Calmon, avait
décliné toute candidature. Par contre, le
rapporteur général de 1884, M. Dauphin,
est au nombre des membres réélus."
A LA CHAMBRE
On apprenait, en arrivant à la Cham-
bre, que le géuéral Négrier s'étant
trouvé, vers la porte de Chine, en
présence de forces très supérieures en
nombre, avait dû battre en retraite,
avec des pertes évaluées à deux cents
hommes.
Nous ne mesurons pas, nous le di-
sions hier, la responsabilité du gouver-
nement sur les chances heureuses ou
malheureuses que peut successivement
présenter l'aventure où il a engagé nos
soldats. Un succès de nos troupes ne
l'amnistierait pas, à nos yeux, et, après
un insuccès, il ne nous semble pas plus
coupable qu'il ne l'était la veille. Nous
ne saurions cependant nous étonner
que M. Delafosse, l'un des membres de
la minorité qui se s nt le plus énergi-
quement opposés à cette entreprise la-
mentable, ait cru devoir provoquer, de
la part du gouvernement, des explica-
tions immédiates. Nous ne saurions
nous étonner davantage de la façon
sévère dont l'orateur a qualifié la poli-
tique suivie, dans cette affaire, par le
gouvernement, et ce qui pourrait plu-
tôt nous surprendre c'est que M. Flo-
quet, qui tenait le fauteuil de la prési-
dence, ait paru, un moment, douter du
droit évident de l'orateur à s'exprimer
comme il venait de le faire.
Le ton de M. Jules Ferry, dans les
quelques mots d'explication qu'il a
apportés à la tribune, en réponse à
M. Delafosse, semble prouver que M.
le président du conseil continue à
porter d'un cœur assez léger, trop lé-
ger assurément, sa lourde responsabi-
lité. Il a lu la dépêche qu'il venait de
recevoir et qui, sauf la perte de l'ar-
tillerie, confirme les nouvelles arrivées
par une autre voie. Il a ajouté que,
précisément vingt quatre heures après
les événements, les nouveaux renforts
venaient d'arriver en ligne. Si ces
informations sont exactes, elles peuvent
nous rassurer sur la situation du corps
engagé qui pourra tenir tête aux
Chinois, mais il n'y a pas à attendre,
de ses efforts, de bien grands résultats.
Ces efforts semblent justement dignes
de nos grandes époques militaires et la
reconnaissance de la patrie ne fera pas
défaut à ces victimes du devoir, tom-
bées loin du sol natal, qu'elles auraient
si bien défendu. Selon sa coutume, qui
commence à lasser même cette Cham-
bre, M. Jules Ferry a essayé de se cou-
vrir de la gloire de nos soldats et
il a demandé à ses interrupteurs s'ils
n'avaient pas confiance dans leur hé-
roïsme. M. Delafosse a répondu aux
applaudissements répétés de ses amis :
Nous avons confiance én eux ; pas en
vous t
M. Delafosse, en descendant de la
tribune, avait déclaré qu'il reprendrait
le débat au moment où viendrait à
l'ordre du jour l'interpellation de M.
Granet. Ce dernier a précisément de-
mandé la parole, mais, à la surprise
générale, au lieu de réclamer la fixa-
tion d'un jour prochain ou la discussion
immédiate, il est - venu annoncer à la
Chambre que M. le président du conseil
refusait d'accepter l'interpellation avant
les vacances. Ce point étant acquis, on
ne voit pas bien pourquoi M. Granet a
consenti à remettre à samedi le débat
qui doit s'engager sur ce refus. Déjà
on a attendu, et nous savons à quoi
cela a servi, la publication du fameux
Livre jaune. M. Granet accorde encore
à M. le ministre des affaires étrangères
un nouveau délai dont l'utilité nous
semble encore plus douteuse. On Pùt
compris cette condescendance si M.
Jules Ferry avait demandé à réfléchir.
Mais, dès qu'il est certain qu'il refuse
de répondre, c'est sur ce silence même
qu'une opposition résolue aurait ouvert
le débat, - sans une minute de délai.
C'est une grave faute qut a été com-
mise, et M. Jules Ferry est assez habi e
comme tacticien parlementaire pour
qu'elle soit difficilement réparable.
Nous avouons sincèrement que le
reste de la séance ne nous paraît pas
présenter le moindre intérêt. Quand
nos ressources militaires et financières
se perdent dans le gouffre ouvert par
une majorité aveugle, complice d'un
ministère à la fois téméraire et impré-
voyant, nous n'avons pas le courage de
parler d'autre chose.
A. GACLIER.
AU SÉNAT
Toujours les céréales. L'honorable mem-
bre de la Commune, qui répond au nom
de M. Méline, a répété à la tribune du
Luxembourg ce qu'il avait dit au palais
Bourbon. Inutile d'insister sur les redites
du chef des affameurs.
Après lui, un membre nouveau, M. Vel-
ten, sénateur de Marseille, a fait son début
en combattant l'exécrable projet. M. Velten,
qui doit avoir au moins quarante ans,
puisqu'il siège au Sénat, nous paraît en-
core bien naïf. N'a-t-il pas parlé du pro-
gramme républicain, toujours favorable à
la liberté du commerce ! Les programmes !
Qu'est-ce que c'est que cela et quelle lan-
gue parle le nouvel élu ! Il y a longtemps,
ici, que les vieilleries sont abandonnées
par les sages et il faut arriver de la Canne-
bière, en ligne directe, pour oser, dans
une assemblée d'hommes politiques, invo-
quer le respect des programmes et des
principes. M. Velten ne gardera pas long-
temps ce défaut-là ; il est en trop bonne
compagnie, au Sénat, pour ne pas prendre
le ton du jour, et il y a deux cent quatre-
vingt-dix Luxembourgeois, au moins, qui
ne demandent qu'à faire son éducation.
Un des grands meneurs de la campa-
gne protectionniste et le lieutenant de
M. Méline dans l'armée des affameurs, M.
de Saint-Vallier a essayé de répondre à
M. Léon Say qui, l'autre jour, avait fait
justice de ses exagérations sur la situation
du département de l'Aisne. On continue
d'ailleurs à demander à M. de Saint-
Vallier, sans obtenir de réponse, quelles
sont les fermes de ce département qu'on
donne, pour rien, au premier occupant.
Nos concitoyens pauvres coloniseraient le
département de l'Aisne, au moins aussi
aisément que le Tonkin. Pourquoi M. de
Saint-Vallier ne précise-t-il pas pour appe.
1er les colons?
La discussion générale a été close.
A. G.
————————- 4> -
LA MOTION RIVIÈRE
Un député essaie, dans un projet de loi,
de réaliser une réforme utile, sensée, ac-
certée, réclamée même par l'opinion. Il
s'agit des enfants moralement abandonnés,
ou de la péréquation de l'impôt foncier,
de la transformation des collèges commu-
naux, du crédit agricole, de telle mesure
qui n'exige pas impérieusement l'urgence.
Son projet est imprimé et d stribué; une
commission e..t nommée dans les bureaux,
le rapporteur dépose son rapport. Cela
prend bien un an en moyenne. Le rap-
port déposé, il faut attendre que la dis-
cussion vienne à l'ordre du jour. II y a
trois délib rations, deux tout au moins.
Le projet est accepté.
De la Chambre il va au Sénat ; deux ou
trois années se sont écoulées. Le Sénat a
mille qualités, mais la célérité n'est pas
son fort. Le plus souvent il laisse dormir
la loi dans ses cartons; s'il la discute,
c'est généralement pour la modifier, dans
ce cas, il faut qu'elle revienne devant la
Chambre des députés. Pendant ce temps,
la Chambre arrive au terme de son man-
dat et son œuvre périt avec elle. Tout le
travail législatif qu'elle a accompli est en
pure perte, les lois qu'elle a votées de-
viennent caduques, les décisions qu'elle a
prises sont comme si elles n'étaient pas.
Tout est à recommencer. C'est ce que
nous appelons le parlementarisme.
Ce système ingénieux a deux consé-
quences. D'abord il favorise la noncha-
lance de nos représentants. A quoi bon se
donner du mal, déployer de l'activité,
puisque ce que l'on fera ou rien est exac-
tement la même chose? Votons le budget,
écoutons de temps à autre une interpella-
tion, établissons quelque nouvel impôt, et
puis le reste du temps courons les minis-
tères et préparons notre réélection.
Si d'autre part, par extraordinaire, un
ou deux projets réformateurs parviennent
au Sénat, ce grand corps n'est pas embar-
rassé le moins du monde. 11 le serait s'il
était obligé de dire non; cette opposition
porterait atteinte à sa popularité ; en ou*
tre quand on refuse il est décent de don-
ner des raisons. Grâce à sa pratique ac-
tuelle, le Sénat peut s'éviter cet ennui. Il
suffit que M. Le Royer ne mette pas à l'or-
dre du jour les lois que lui envoie M.
Brisson, ce qui n'empêchera nullement les
sénateurs de s'écrier quand le mandat de
la Chambre touchera à sa fin : « Quel
dommage que de nouvelles élections soient
imminentes, nous allions justement voter
l'impôt sur le revenu et le service de trois
ans ! »
M. Rivière a dû présenter aujourd'hui
une proposition tendant à remédier à ce
mal. Désormais les lois votées par une
Chambre lui survivraient en quelque sorte
devant le Sénat. Cette mesure appelait un
tempérament ; il y avait certaines précau-
tions à prendre pour l'hypothèse où les
élections nous donneraient une Chambre
animée d'un esprit absolument différent
de celui de sa devancière. Supposons que
le scrutin de liste (le champ des conjectu-
res ert illimité) nous envoie un Parlement
libre-échangiste. Se figure-t-on le Sénat
votant des taxes en alléguant le vœu du
pays ?
Mais il suffirait que par cette simple
mesure de procédure la Chambre nou-
velle pût retirer les projets qui n'ont pas
son assentiment, faculté que possède déjà
le gouvernement. C'est ce que propose
M. Rivière et nous ne doutons pas du suc-
cès de la motion ainsi amendée.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
feuilleton du :RAPPEL
DU 28 MARS
- - M ————————————
LE »
SANG BLEU
nOISIÈMB PABTIII
1
«K. 1
1
Lé lendemain matin, à neuf heures, les
magistrats de Condé arrivaient au châ-
teau : le procureur de la République Ba-
licle, le juge d'instruction Legrain, un
greffier et le docteur Evette, un brigadier
et deux gendarmes à cheval.
Ce fut Mme de Colbosc qui les reçut et
(Traduction interdite; reproduction auto-
risée pour les journaux qui ont un traité avec
la Société des gens de lettres, mais après la
fin de la publication en feuilleton dans le
aappl.)
Voir le Rappel du 2 janvier au ZO mars.
leur raconta brièvement ce qu'elle savait.
A chaque mot, le procureur approuvait
par un mot toujouifc le même : « Très
bien ! madame la marquise », qu'il mur-
murait d'un ton de respectueuse compas-
sion. Il attendit qu'elle fût arrivée au bout
de son récit pour la questionner.
— Avez-vous, madame la marquise,
quelques indices si légers qu'ils soient
qui permettent d'admettre l'idée d'un sui-
cide?
— Un suicide ! Mais M. Guillaumanche
était l'homme le plus heureux du monde :
il avait tout, la fortune, une situation po-
litique. qui ne lui donnait que des sa-
tisfactions, une famille qu'il adorait.
— Croyez-vous à un accident?
— Je ne crois à rien, je ne sais que ce
que M. de la Senevière m'a rapporté.
— Pouvons-nous voir M. le comte de
la Senevière ?
— Je vais l'envoyer chercher.
— Nous vous en serons reconnaissants.
En attendant qu'il arrive, nous avons un
devoir douloureux à remplir, celui de faire
la visite du corps. et l'autopsie.
— Mais ma fille est auprès du cadavre
et elle a avec elle la fille de son mari,
s'écria Mme de Colbosc.
Evette intervint ;
— Il faudrait prier Mme et Mlle Guillau-
manche de se retirer, dit-il.
— Si madame la marquise veut bien se
charger de cette pénible mission? de-
manda le procureur.
Mme de Colbosc ne pouvait pas refuser.
— Messieurs, veuillez m'attendre, dit-
elle.
Depuis que le corps de Guillaumanche
avait été rapporté au château, Hériberte
et Nicole n'avaient pas quitté les côtés du
lit sur lequel on l'avait déposé; elles
étaient restées là toute la nuit, l'une à
droite, l'autre à gauche : la femme plon-
gée dans un désespoir morne, la fille pas-
sant d'une crise de larmes et de suffoca-
tions à la prostration et à l'anéantisse-
ment, pour revenir aux larmes. Depuis
qu'Hériberte connaissait Nicole, elle ne
l'avait jamais entendue parler de sa mère,
à ce point qu'on pouvait se demander si
elle en avait gardé le souvenir; au con-
traire, dans cette nuit de veillée, à cha-
que instant elle s'écriait au milieu de ses
sanglots.
- Maman, je savais; mais lui si bien
portant l Hériberte, qui l'a tué?
Hériberte frissonnait et ne répondait pas;
carsi elle ne la criait pas cette question que
la douleur d'enfant de Nicole laissait échap-
per franchement, tout bas elle se la po-
sait avec d'horribles angoisses. — Qui
l'avait tué, cet homme si bon, qui n'avait
fait que du bien à tous? Pourquoi l'avait
on tué ? Un seul homme pouvait avoir un
intérêt de jalousie, de vengeance, d'espé-
rance à commettre ce crime, et cet homme,
c'était La Senevière; mais la façon dont elle
l'avait accueilli avait-elle pu lui inspirer une
espérance quelconque, et était-ce possi-
ble, que si bas qu'il fût tombé, il en fût
arrivé à se venger d'un refus d'argent,
par un assassinat? Elle s'arrêtait, épou-
vantée, dans ses réflexions, se disant que
ce n'était pas dans une situation comme la
sienne, alors que par la douleur elle était
jetée hors d'elle-même, qu'elle pouvait les
examiner. Un La Senevière coupable d'un
assassinat 1 Dans quel but? A quelle ins-
tigation? Et quand elle voulait écarter
ces pensées, le cri de Nicole toujours le
même : « Hériberte qui l'a tué ? les lui
imposait malgré tout.
Bien que catholique fervente, Mme de
Colbosc avait horreur de la mort, ou plus
justement des morts, aussi n'avait-elle pas
voulu voir Guillaumanche lorsqu'on l'avait
rapporté, et ne voulut-elle pas davantago
entrer dans la chambre où il était exposé;
elle fit avertir Hériberte par une domesti-
que qu'elle avait à lui parler.
— Les magistrats sont arrivés.
— Recevez les. je vousprie; donnez-leur
»
toutes les explications qu'ils demanderont ;
vous en savez autant que moi.
— Ils ont besoin d'entrer dans la
chambre.
Elle ne prononça pas le mot « du
mort », mais de la main elle la montra.
— Il faut que vous vous reliriez et que
vous emmeniez avec vous cette petite,
dont la place n'est vraiment pas ici.
— Puis-je ne pas la laisser auprès de
son père ?
— Voulez-vous qu'elle assiste aux opé-
rations du médecin?
Le médecin ( Elle n'avait pas pensé au
médecin, pas plus qu'aux opérations dont
parlait sa mère; les magistrats, elle les
attendait, mais cette arrivée du médecin
lui inspira un sentiment d'horreur.
Comme elle ne répondait pas, Mme de
Colbosc insista :
— Ils attendent.
Son mari n'était même plus à elle, il
appartenait à la justice.
Elle rentra dans la chamb:\ ;-t, allant à
Nicole, elle l'embrassa t
— Il faut nous retirer, mon enfant,
— Pourquoi ?
— Les magistrats sont arrivés 1 ils ont
besoin dans cette chambre, nous ne pou-
vons pas rester avec eux
Nicole la regarda avec surprise, ne
comprenant pas pourquoi elle ne pouvait
pas rester.
— Tu vas leur parler, dit-elle, il faut
qu'ils trouvent qui l'a tué.
Hériberte voulut l'entraîner, mais Nt-
cole résista :
— Laisse-moi le regarder encore, dit-
elle. Oh ! papa, cher papa l
— Viens, viens !
Comme elles arrivaient à la porte, elle
s'ouvrit, et elles se trouvèrent en face des
quatre hommes qui les croyaient sorties
de la chambre ; ils s'effacèrent en saluant
pour les laisser passer. Nicole, qui mar-
chait les yeux noyés de larmes sans rien
voir, se heurta contre une boite que por-
tait le docteur Evette. Elle regarda et
reconnul le médecin.
— Mon Dieu, dit-elle à Hériberte, que
vont-ils lui faire?
— Viens, viens, dit Hériberte en vou-
lant l'entraîner; mais Nicole résista.
— Tu ne leur parles pas ? dit-elle.
Et comme Hériberte ne lui répondait
pas, elle se tourna vers les magistrats avec
un mouvement suppliant :
- Oh 1 messieurs, trouvez qui l'a tué.
HECTOR MALOT.
, ("illre..1
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