Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-11-19
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 19 novembre 1896 19 novembre 1896
Description : 1896/11/19 (N9750). 1896/11/19 (N9750).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7541767m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 17/12/2012
CïINQ CENTIMES le - PARIS ET DÉPARTEMENTS Lé Nù-meros CINQ CSNTÎMËS
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE
v - ■ f-
ABONNEMENTS
ls Doit Trois mals Six otit h M
?arls. 2 fr. 5fr. 9fr. 18 fr.
bépartements 2 - 6— 11 - 20-
7nion Postale 8 - fi— 16— 32 -
FTHIDATEUR : AUGUSTE VACQUERIE
1
i
ANNONCES
MM Ch. LAGRANGE, CERF & CM
6, Place de la Bourse, 6
et AUX BUREAUX DU JOURNAL
- RÉDACTION: 131, rue Montmartre, 131
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
W- 9750. — Jeudi 19 Novembre 1896
29 BRUMAIRE AN 105
ADMINISTRATION : 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à Y Administrateur
Avis à nos abonnésl
Nous rappelons à nos abonnés qu'ils
doivent joindre 60 centimes à toutes
leurs demandes de changements d'a-
dresses, ceci pour la confection de nou-
velles bandes.
NOS LEADERS
Une Singulière arithmétique
M. Barthou est-il donc condamné à
plaider toutes les mauvaises causes?
fi vient de défendre à la tribune le
scrutin sénatorial.
Il l'a piètrement défendu, en avocat
de mur mitoyen et non en homme po-
litique. Il s'est bien gardé de dire qu'il
fallait garder ce système baroque,
-soit parce qu'il était utile, soit pour ne
point mécontenter le Sénat. Non ; il
ç'est réfugié dans de misérables argu-
ties de détail. La seule raison qu'il ait
donné, c'est que si le scrutin sénato-
rial n'était pas exactement propor-
tionnel, il n'était pas le seul. Témoin,
le scrutin d'arrondissement, qui donne
x la sous-préfecture d'Embrun, par
exemple, un député pour 27,000 habi-
tants, tandis qu'ailleurs, il peut n'y
avoir qu'un représentant pour 99,000.
Le fait est exact, et on peut en tirer
on gros argument contre le scrutin
d'arrondissement. Oui, telle popula-
tion peut être quatre fois plus repré-
sentée à la Chambre que telle autre
population égale. Oui, bien que de
telles inégalités soient rares, cela pour-
rait, à la rigueur, dans un vate parti-
culier , faire que la majorne de la
Chambre n'ait été élue que par la plus
petite partie du pays. Mais est-il sé-
rieux , est-il sensé de comparer de
telles anomalies avec celles qui dis-
tinguent le scrutin sénatorial ? Voyons
an peu.
**#
D'abord, examinons le chiffre des
représentants. C'est l'inégalité perpé-
tuelle. Ii y a, par exemple, un séna-
teur pour 50 ou 60,000 habitants dans
les Hautes-Alpes, pour 130,000 dans les
Alpes-Maritimes, pour 175,000 dans le
Pas-de-Calais, pour 400,000 dans la
Seine. La différence est quelque peu
plus forte que pour les députés! Un
habitant de Gap est deux fois plus re-
présenté qu'un habitant de Grasse,
trois fois plus qu'un habitant d'Arras,
sept fois plus qu'un habitant de Paris.
Sept fois au lieu d'une : première
inégalité; mais, bien entendu, c'est la
moindre, et elle peut passer pour ab-
solument insignifiante, si on la com-
pare aux autres absurdités de ce mode
de scrutin.
Dans l'intérieur de chaque départe-
ment, comment se comptent les voix?
On sait qu'au début chaque conseil
municipal nommait un délégué. Peu
importait qu'il s'agit d'une capitale de
trois millions d'habitants ou d'un ha-
meau de vingt personnes. On a, dit-on,
rétabli la proportionnalité. Gomment?
Le voici.
Tout d'abord, toutes les communes
uu-dessous de' 500 âmes nomment un
délégué. Peu importe leur importance :
Dn ne fait pas de différence. Un de mes
amis me citait, dans sa circonscrip-
tion, quelques communes qui ont dix-
sept, vingt, vingt-cinq habitants Elles
sont donc vingt à trente fois privilé-
giées sur les plus grosses de cette caté-
gorie, au point de vue de l'élection
sénatoriale. Assurément de telles com-
munes sont peu nombreuses : mais
celles qui ont en moyenne une popula-
tion de cent habitants atteignent un
chiffre considérable. Elles vont donc
avoir un droit de vote deux fois, trois
fois, cinq fois supérieur à celui des
plus fortes communes rurales de cette
première classe. Alors même que l'on
n'appellerait au vote que des villages,
comment une telle inégalité, s'éten-
nant sur tout le collège électoral, ne vi-
cierait-elle pas absolument le résultat?
Mais on ne s'arrête pas là, et à me-
Bure que la population monte à 1,500,
2,500, 3,500, 10,000 têtes, Je chiffre
des habitants représentés par un délé-
gué s'élève à 750, puis à 1,100. Pour
les villes de 10,000 à 60,000 âmes, il
oscille entre 2,500 et 3,000. C'est-à-
dire que la population de ces villes
est vingt-cinq ou trente fois moins re-
présentée que celle des villages de peu
d'importance ; cinq et six fois plus
que celle des villages les plus impor-
tants. Quant aux très grands centres,
c'est bien autre chose. Il faut 17,000
Marseillais ou 17,000 Lyonnais pour
contre-balancer le vote de 100 habi-
tants de hameau. Le droit politique
est cent soixante-dix fois plus consi-
dérable pour l'habitant d'un groupe
de maisons au fond des campagnes
que pour celui de la Cannebière ou de
la Croix-Rousse. Toutes les villes au-
dessus de 60,000 âmes ayant le même
chiffre de délégués, il s'ensuit natu-
rellement que de grandes inégalités
existent entre elles, et que telle grande
cité a encore. DroDorUonneîleiûent à*
sa population, six fois plus de délégués
que telle autre.
Pour Paris, c'est plus fort. Il y a à
Paris un délégué pour quatrevingt
mille habitants! En sorte qu'il faudrait
800 Parisiens pour valoir, au point de
vue du scrutin sénatorial, le curé
d'une petite paroisse rurale.
.*
Mais je rappelle que ce n'est là
qu'une des deux inégalités du système:
l'autre consistant dans le nombre de
sénateurs du département tout en-
tier. Il faut évidemment, pour con-
naître toute la réalité, multiplier l'une
de ces inégalités par l'autre. On a vu
que, dans l'ensemble, la Seine est sept
fois moins représentée que les
Bassses-Alpes. C'est-à-dire que l'élec-
teur d'une commune de cent habi-
tants dans la banlieue, s'il y en
a (je crois qu'il n'en existe plus)
serait sept fois moins représenté que
celui d'une commune égale dans les
montagnes de la frontière italienne.
D'autre part, dans le collège sénato-
rial de la Seine, un électeur parisien
aurait huit cents fois moins d'influence
sur l'élection que celui de la petite
commune. Il en ressort avec une évi-
dence mathématique, qu'au point de
vuede la constitution du Sénat, chaque
habitant des montagnes d'Embrun,
quand il nomme un conseil municipal,
pèse autant que cinq mille six cents
Parisiens.
Et puis on dit : « C'est le suffrage
universel à plusieurs degrés ! » Oui,
c'est le suffrage universel, compté de
telle façon que dans le plateau de la
balance, le bulletin de l'un a le poids
d'un fétu de paille, et celui de l'autre
le poids d'une masse de plomb.
Notez que ces inégalités du suffrage
sénatorial, affectent, non tel ou tel
collège, ni tel ou tel élément de cha-
que collège ; mais qu'elles se retrou-
vent partout. C'est à peine si l'on
trouve de loin en loin deux commu-
nes, dont les délégués représentent la
même population. L'absurdité du sys-
tème employé vicie, en quelque sorte,
les résultats de l'urne, bulletin par
bulletin. Ce n'est pas seulement le pri-
vilège donné d'une façon générale à
telle portion de la population sur telle
autre, aux campagnes sur les villes.
Non dans chaque catégorie de com-
munes, un caprice insensé abaisse,
élève la proportion de Français repré-
senté par chaque électeur sénato-
rial, et finalement par chaque élu.
Ce système a ceci de monstrueux
et d'intolérable, qu'il ne correspond à
aucun principe, à aucune conception
politique, vraie ou fausse. On a voulu
méconnaître, annuler les volontés de
la majorité du pays, au nom de la
naissance ou de la fortune. Ceux qui
soutenaient les régimes fondés sur de
tels privilèges, pouvaient le défendre
et alléguer leur sincérité, parce qu'ils
croyaient sincèrement que le pouvoir
politique était susceptible d'un droit
héréditaire, et que la capacité politi-
que était inséparable de la richesse.
Quand il s'agissait des droits abusifs
de la noblesse, du clergé, de la grosse
bourgeoisie, il y avait une idée der-
rière l'abus; et l'on pouvait de bonne
foi le croire légitime.
Ici rien de pareil. Tout le scrutin
sénatorial repose, en quelque sorte,
sur des inexactitudes d'arithmétique,
sur des fautes d'addition, sur des
équations de ce genre : 1 villageois
des Hautes-Alpes = 5,600 Parisiens.
Notez bien qu'on ne prétend pas pour
cela qu'un Parisien ait moins de droits
que l'autre. Non, on accepte l'égalité
politique comme le principe de gou-
vernement. Seulement, quand il s'agit
de faire élire les sénateurs, on se
trompe systématiquement. C'est la
bévue dans le calcul électoral —
bévue de quelle énormité! — installée
tranquillement dans la législation.
e*
Devant le bon sens public, aucun
droit véritable ne peut manifestement
sortir de cette révoltante absurdité. Le
Sénat est à ce point de vue un élément
invraisemblable de désordre. Son pou-
voir a un caractère de légalité ; il n'a
aucun'pouvoir de légitimité, je ne dis
pas au point de vue de nos principes,
mais au point de vue des principes de
n'importe quel parti. Les auteurs du
système pratiqué n'oseraient pas soute-
nir eux-mêmes qu'il eût le sens com-
mun. L'existence du Sénat est un fait ;
elle ne peut pis être un droit. Cha-
que fois qu'il vote, il commet une
usurpation légale, mais certaine. Si
l'on ne veut pas le jeter à la porte du
Luxembourg, ou par les fenêtres, ce
n'est point un tort qu'il ait un titre
quelconque à être où il est : c'est uni-
quement à cause du grave péril qu'il y
a à introduire ce genre d'action dans
les événements du jour. L'intérêt im-
périeux qu'un pays a au respect de la
légalité, couvre seul ces hommes qui
se permettent de voter au nom de la
France, sans avoir été élus par elle.
Mais s'ils, se refusaient obstinément
à corriger en quoi que ce soit les fautes
i d'arithmétiçruô auxquelles ils doivent
leurs mandats viciés dès l'origine, il
est manifeste qu'ils se dénonceraient
eux-mêmes à la légitime condamna-
tion du pays ; et qui sait ? Les électeurs
sénatoriaux eux-mêmes châtieraient
peut-être, dans plus d'un collège, cette
obstination sans excuse.
CAMILLE PELLETAN.
Nous publierons demain un article
de M. J.-I. de Lanessan
NOTRE PROCÈS
Plusieurs messieurs Harmel (Frères,
Albert, Maurice, Félix), nous font un
procès, et font un procès à notre colla-
borateur Camille Pelletan, à. propos de
ce qui a été dit ici, de la réunion de
Warmériviile, réunion que des bandes
cléricales ont troublée et ont fait suivre
d'assommades.
Tous ces messieurs Harmel (Frères,
Albert, Maurice, Félix) nous assignent
devant MM. les président et juges du
tribunal de Reims, et réclament de
nous, ainsi que de la Petite République,
de la Lanterne, du Franc Parleur (de
la Marne), de M. Camille Pelletan, de
M. Chauvière, de M. Foulon -et de M.
Dubreuil les satisfactions dont voici
l'énumération :
15,000 fr. pour M. Harmel (Frères) ;
5.003 fr. pour M. Harmel (Albert);
5,000 fr. pour M. Harmel (Maurice);
5,000 fr. pour M. Harmel (Félix);
L'insertion du jugement en première
page et in-extenso ;
L'insertion in-extenso du même juge-
ment dans tous les journaux de Reims,
dans dix journaux de Paris et dans
deux journaux par chaque départe-
ment (la France possède, rappelons-le,
86 départements, plus le territoire de
Belfort). »
Les dépens du procès.
Les nombreux MM. Harmel qui nous
demandent tant d'argent, tant d'inser-
tions et tant de dépens peuvent comp-
ter que nous serons exacts au rendez-
vous qu'ils veulent bien nous donner
devant les magistrats de Reims.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Colombes.
— Fête des fripiers, marchands d'habits.
— Durée du jour : ïo h. 12 m.
>.,!,..f-., ji.?_-~~
La Chambre est en train de fortifier
la triste idée que le pays s'est faite du
parlementarisme. Chaque jour, elle
change d'avis sur chaque question.
Avant-hier, par exemple, elle décidait
de continuer la discussion du projet de
loi sur les élections sénatoriales et hier,
elle votait le projet, mais refusait d'o-
bliger le ministère à le soutenir immé-
diatement devant le Sénat.
Même majorité dans les deux sens,
70 voix environ.
Je sais bien, qu'une fois de plus, la
droite vient de sauver M. Méline; je
sais bien aussi qu'il y a dans la Cham-
bre une cinquantaine de députés qui se
tiennent du côté du manche pour avoir
des bureaux de tabac et toutes sortes
de faveurs. Mais c'est justement ce qui
est affligeant. Les républicains ne com-
prennent pas qu'un cabinet qui se dit
républicain accepte aussi ouvertement
l'appui de la droite ; ils ne peuvent s'ex-
pliquer également, la Chambrè étant
divisée en deux parties d'égale force à
peu près, le mouvement de bascule
qu'opèrent les cinquante députés dont
je viens de parler.
Ceux-là ont soutenu tour à tour les
ministères Dupuy, Ribot, Bourgeois,
c'est-à-dire des opportunistes et des
radicaux. Voilà maintenant qu'ils sont
avec les réactionnaires et M. Méline,
toujours dans un intérêt électoral. Leur
courage, comme on le voit, est à la hau-
teur de leurs convictions.
Il est tout de même triste que la Cham-
bre se soit déjugée sur une question
politique aussi importante que celle des
élections sénatoriales. Ses variations
successives l'ont discréditée à peu près.
Le pays ne s'occupe plus d'elle. Encore
quelques séances comme celle d'hier et
j'imagine que le pays se fâchera. Ce ne
serait pas trop tôt.
CHEZ NOUS
- C'est ce soir mercredi, à huit neures
et demie, qu'aura lieu au Grand-Véfour le
punch offert à M. Goblet par le comité
radical socialiste du ICI" arrondissement.
Une trentaine de sénateurs et de dé-
putés y assisteront; nous citerons notam-
ment : MM. Barodet, Destieux-Junca, A.
Lefèvre, de Verninac, sénateurs ; Doumer,
Lockroy, Guieysse, Mesureur, anciens mi-
nistres; Pelletan, Millerand, Jullien, Ba-
zille, Berteaux, Sembat, Merlou, Pétrot,
députés.
- Les matrices des rôles des patentes
de la ville de Paris, pour l'année 1897, se-
ront déposées au secrétariat de la mairie
de chaque arrondissement du 10 au 19 dé-
cembre prochain.
Les contribuables qui désireront en pren-
dre connaissance devront se présenter aux
mairies, de une heure à quatre heures.
- En présence de la nécessité de
pourvoir immédiatement à de nombreuses
demandes de billon, l'autorisation a été
donnée aux comptables, dans certains. dé-
partements où le billon français existe en
surabondance, de le recevoir à l'échange,
à tiîice exce^tioiiael et transitoic: r „
Des sommes importantes, s'élevant déjà
à près de 100,000 fr., ont été recueillies de
cette manière dans la région du centre,
notamment dans la Sarthe, le Loiret et le
Loir-et-Cher, Elles sont expédiées au furet
à mesure des retraits et concurremment
avec les sous neufs fabriqués par la Mon-
naie, sur les points où le refus du billon
étranger par le commerce a déterminé de
nombreuses demandes de monnaies de
bronze nationales.
- A la suite d'une adjudication pu-
blique, qui a eu lieu hier à la direction des
chemins de fer de l'Etat, l'éditeur Flamma-
rion a enlevé à la maison Hachette le pri-
vilège de la location des bibliothèques dans
les gares du réseau de l'Etat.
Il avait soumissionné au prix de 15,100
francs. Il avait pour concurrents, outre les
éditeurs Hachette, MM. Delagrave et Fas-
quelle.
Hier a eu lieu également au siège de la
Compagnie des chemins de fer de cein-
ture, en prévision de la fin de bail de la
maison Hachette, non l'adjudication pu-
blique, mais le dépôt, sous pli cacheté, des
soumissions.
Aucune réponse n'est encore parvenue
aux soumissionnaires.
- L'exploration de la haute atmos-
phère :
On sait que MM. Georges Besançon et
Gustave Hermitte avaient lancé un ballon,
rAérophile, ballon sans passagers, n'em-
portant que des appareils enregistreurs, et
dont la mission scientifique était de mon-
ter aussi haut que possible, afin de rap-
porter des altitudes où on l'aventurait des
documents précis sur les pressions et les
températures des successives couches de
l'atmosphère.
L'Aérophile est retombé en Belgique, à
Graide, à quelques lieues de Dinant. Il s'est
élevé à une hauteur de 15,000 mètres et a
éprouvé un froid de 63 degrés.
Le matériel est complètement détruit,
l'enveloppe crevée, le filet déchiré, mais
les diagrammes sont intacts.
-—— M. Aurélien Scholla adressé sa dé-
mission de président du comité du monu-
ment de Paul de Koch.
On sait que ce monument doit être érigé
aux Lilas. Le conseil municipal de cette
commune a chargé le maire, M. Segaux,
de faire des démarches auprès de plusieurs
hommes de lettres pour pourvoir au rem-
placement de 1.1. Aurélien Scholl comme
président du comité.
- Tout le monde, dans le 7e arron-
dissement, connaissait Kirsch, le plus gros
cocher de Paris, le cocher du commis-
saire. Kirsch, en effet, pesait la bagatelle
de 280 livres et atteignait une hauteur de
deux mètres. De plus, sa spécialité était de
ne marcher qu'à l'heure et pour un seul
client, le commissaire de police du quar-
tier Saint-Thomas-d'Aquin, qu'il accom-
pagnait pour toutes les perquisitions né-
cessitées par les vols dans les magasins de
nouveautés. Pendant seize ans il a succes-
sivement conduit MM. Guénin, Prélat et
Belouino, les trois derniers commissaires
titulaires.
Un grand nombre de cochers, montés
sur leur voiture, ont suivi le char qui em-
portait leur collègue au cimetière et sur
lequel on remarquait une couronne offerte
par le commissariat de Saint-Thomas-
d'Aquin et une autre par les magasins de
nouveautés du quartier.
Le Passant.
LE MILITARISME AU REICHSTAG
Le Reichstag a eu hier encore une discus-
sion fort mouvementée.
Il s'agissait de deux interpellations, l'une
ayanr, trait à l'abus du duel et l'autre au
meurtre commis dans de si abominables
conditions par le fameux lieutenant Bruso-
witz qui, il y a quelque temps, plongeait
son sabre dans la poitrine d'un malheureux
jeune homme nommé Siepmann, sous pré-
texte qu'il ne lui avait pas montré assez 40
déférence et de respect.
L'interpellateur, M. Munckel, n'a pas eu
de peine à montrer les dangers que faisait
courir à la société un militarisme aussi
odieux. Mais le nouveau ministre de la
guerre, M. de Gossler, a tenu à faire du
zèle et pour cela, il n'a rien trouvé de mieux
que de se répandre en éloges sur le compte
de Brüsewitz et d'insulter à la mémoire de
son innocente victime :
« Le respect dû à l'uniforme du roi et au
drapeau, s'est-il écrié, est un sentiment qui
est inséparable de nous-mêmes. Il ne faut
pas enlever aux officiers le droit à la dé-
fense personnelle. »
Le Reichstag n'a pas ménagé son indi-
gnation au ministre de la guerre, dont le
cynisme révoltant a indigné tout le monde.
Le président n'a même pas hésité à le rap-
peler à l'ordre.
M. Bebel a alors pris la parole et rappe-
lant les paroles adressées par l'empereur
aux recrues lorsqu'il adéclaré que les insultes
faites à son uniforme sont des insultes au
roi : « Les temps ne sont plus cependant,
s'est-il écrié, ou Caligula faisait adorer son
cheval et Gessler son chapeau. »
Héias ! les Allemands voient qu'il n'en est
rien et que les crimes de Rome trouvent en-
core des apologistes à Berlin !
-
UN DRAME A NICE
Mme S., qui était en instance de divorce
contre son mari, était venue à Monaco avec
son amant, le comte de M., dont elle avait
fait la connaissance dans les stations où la
menait son mari. Apprenant l'arrivée pro-
chaine de celui-ci à Monaco, elle partit pour
Nice, en laissant toutefois l'indication de son
adresse.
Dimanche dernier, son mari se présenta à
l'hôtel de Milan où elle était descendue.
Elle le reçut dans le salon, près de sa cham-
bre. Une discussion s'engagea entre eux,
qui fut bientôt accompagnée d'injures et
suivie de voies de fait.
Le comto de M., qui entendait tout de la
chambre de sa maîtresse, ne put se conte-
nir. Il entra dans le salon et une lutte s'en-
gagea entre les deux hommes.
Le comte ayait réussi à rejeter S.., clans
un fauteuil quand celui-ci, sortant un re-
volver, fit feu sur son adversaire, qu'il
atteignit au côté gauche de l'abdomen.
Le comte de M. est un Bavarois âgé de
trente ans. Il a été transpor.é à l'hôpital de
Nice. La balle, logée dans les tissus, n'a pu
être extraite, mais l étal du blessé n'est pas
inquiétant.
Le mari, sujet autrichien, est âgé de
trente-trois ans. Il a été interrogé par le
juge d'instruction.
•— - ■ ^- ■ i. --- —-
L'INTERPELLATION D'AUJOURD'HUI
Le traître Dreyfus
La Chambre siège aujourd'hui mercredi,'
exceptionnellement, pour discuter une inter-
pellation qui flJt déposée par M. Castelin le
jour môme de la reprise des travaux parle-
mentaires.
On sait que cette interpellation vise les
incidents relatifs à l'affaire du traitre Drey-
fus. M. Castelin veut, en effet, rechercher
dans quelles conditions il a été annoncé que
l'ex-capitaine s'était évadé de l'île du Salut.
Il veut aussi examiner si toutes les mesures
do sécurité sont bien prises pour qu'on n'ait
pas à redouter une fuite du traitre.
Enfin l'interpellateur doit s'occuper des
manœuvres d'un soi-disant syndicat « de
défense », dont les actes se trouveraient
révélés par la campagne faite en vue d'éta-
blir un doute sur la culpabilité du traître.
On ne prévoit pas qu'une pareille discus-
sion puisse être longue, mais on croit qu'elle
sera particulièrement intéressante.
LA TRACTION MÉCANIQUE
UN NOUVEL ESSAI
De la Bastille à Charenton
Traction électrique
Pendant que l'on discute au sein d'une
commission spéciale le rapport de M. Ber-
thelot sur un métropolitain problématique,
la question des transports en commun est
très suivie et activement étudiée à l'Hôtel
de Ville, et il est presque certain que sous
une autre forme, mais heureusement pas
souterraine, Paris sera pourvu de moyens
de locomotion nombreux, pratiques et éco-
nomiques avant peu. Il s'agit du dévelop-
pement de la traction mécanique et de la
créa ion de lignes nombreuses. Il y a quel-
ques jours, j'ai donné ici la nomenclature de
trente lignes nouvelles à créer « à traction
mécanique », disait, le rapport introduit, sans
toutefois fixer le genre de traction.
Or, aujourd'hui, après que nous avons
déjà la traction à vapeur, à air comprimé, à
vapeur surchauffée, à accumulateurs électri-
ques, et à prise électrique souterraine, on
vient proposer à la Ville l'essai d'une trac-
tion électrique en prise souterraine et
aérienne par trolley.
Le trolley fonctionne déjà dans plusieurs
villes de France, notamment à Marseille,
Lyon, le Havre, Bordeaux, etc., et a déjà fait
son apparition à Paris en 1884 à l'exposition
d'électricité, au palais de l'Industrie. Cette
ligne de tramway qui, en somme faisait par-
tie de l'exposition, partait de la place de la
Concorde et suivait l'avenue parallèle à la
Seine qui conduit à la porte du côté droit du
palais où il avait sa station terminus. Le
parcours était seulement de quelques cen-
taines de mètres, mais l'installation intéres-
sait énormément les passants.
On sait que la traction par trolley consiste
en une prise de courant sur ligne aérienne.
Ce mode de traction est très économique
et d'une installation peu coûteuse, mais il
donne aux rues dans lesquelles il passe,
disent certains, un aspect désagréable par
sa ligne aérienne, semblable aux lignes té-
légraphiques qui courent le long des voies
de chemins de fer, c'est du reste une des
raisons qui ont fait repousser son applica-
tion jusqu'à ce jour.
Quoi qu'il en soit, après que la compagnie
des Tramways-Sud eut formulé en juillet
1896 une demande de substitution de la trac-
tion mécanique à la traction animale sur
toutes les lignes de son réseau, M. Puech a
été chargé d'étudier la question et il a con-
clu « à autoriser, à titre d'exp.-rience et d'es-
sai, la compagnie des Tramways-Sud à
substituer à ses frais, risques et périls, la
traction par l'électricité à la traction animale
sur la ligne de tramway de la place de la
Bastille à Charenton ».
La première commission a conclu favora-
blement, ainsi que la sous-commission mixte
des omnibus et tramways, et il est certain
qu'il en sera do môme aujourd'hui à la com-
mission mixte des omnibus et tramways,
après quoi, probablement même cet après-
midi, la question sera soumise au conseil
général, car la ligne Bastilie-Charenton est
une ligne départementale sur laquelle le
conseil général est appelé à statuer.
Il n'est pas douteux que le rapport pro-
posé sera accepté.
Il porte que la traction se fera tour à tour
par fil aérien et par prise souterraine. Ce
dernier mode de .raction devra être em-
ployé sur les places, carrefours, etc. Ainsi,
place de la Bastille et rue de Lyon, c'est la
prise souterraine qui sera employée, tandis
qu'avenue Daumesnil et dans le bois de
Vincennes, c'est au fil aérien qu'on aura re-
cours.
Cette autorisation est essentiellement pré-
caire, et s'il est établi que l'essai ne donne
pas les résultats désirés, la compagnie devra
rétablir dans les six mois les choses en l état
actuel, à ses frais, risques et périls, et cela
sous peine de 500 lr. d'amende par jour de
retard.
Telles sont les grandes lignes de cette au-
torisation; mais la première commission du
conseil n'a pas oublié 1 intérêt public et,
dans son traité, elle a lixé ainsi le prix des
places pour les voyageurs n'usant pas de la
correspondance, avec promesse de réduction
lorsque l'autorisation précaire deviendra dé-
finitive:
Dans Paris : le classe, 20 centimes; 2e
classe, 15 centimes. Hors Paris : lr" classe,
15 cenâmes; 2e classo, 1U cen imes; mais ce
dernier parcours se divisera en deux sec-
tions : des fortifications à Saint-Man iéet de
Saint-Mandé au point terminus de la ligne,
lesquels ne seront que de 5 centimes et
1Q centimes.
Par deuxième classe il ne faut pas en-
tendre impériale, ces tramways n'en étant
pas pourvus, mais bien plate-formes cou-
vertes. C'est donc déjà une réduction sen-
sible sur le prix des transposts.
De plus, la compagnie,, conformément aux
indications données par l'antorité ùéparte-
mentale, devra disposer son horaiie et le
nombre de ses voitures de manière à sup-
primer toute attente du public sur la sta-
tion de la ligne. ,.
Enfin la compagnie dçvra assurer par son
installation l'éclairage électrique de l'avcnue
Daumesnil.
Les critiques ne vont pas manquer d'af-
fluer, on parlera de l'aspect de Paris, c'est
certain, ce n est pourtant pas que la mono-
tonie des constructions modernes soit inté-
ressante , enfin chaque chose a ses parti-
sans ! Mais ce qui est intéressant pour tous,
c'est la diminution du prix des places, l'aug-
mentation du nombre de véhicules et l'éclai-
rage électrique d'une voie parisienne.
L'essai en prouvera ou non l'utilité.
ÉMILE WILLÈME.
L'ARMÉE COLONIALE
La commission do l'armée a fixé au mer-
credi 25 novembre l'audition des ministres
de la guerre, de la marine et des colonies,
au sujet de l'armée coloniale.
TABLETTES DU PROGRES
Par GEORGES VITOUX
LA QUESTION DU CORSET
Mon très informé collaborateur « le
Passant » signalait l'autre jour dans
ses « On-dit » le cas singulièrement
suggestif d'une pauvre fille, domesti-
que chez de braves bourgeois london-
niens, miss Florence Kate Donnett,
morte prématurément pour s'être trop
fort sanglé la taille dans un corset im-
pitoyable.
Une telle fin lamentable, assurément,
a dù paraître fantaisiste à plus d'une
personne. Songez donc, mourir tuée
par son corset!. Est-ce que ces choses-
là arrivent?
Hélas 1 oui, de tels accidents sont
possibles et surviennent, et c'est mi-
racle vraiment si les journaux n'ont
point à chaque instant à en signaler de
semblables. La mode, en effet, ayant
décrété que pour être belle l'on doit
avoir la taille fuie, l'habitude de se
serrer est devenue à peu près générale-
parmi la foule des élégantes, si bien
qu'actuellement le même danger me-
nace sans cesse chacune de celles qui,
sacrifiant au dieu de la coquetterie,,
raccourcissent sans raison d'un cran
la longueur de leur ceinture.
Assurément, toutes n'en meurent
point, mais, assurément aussi, toutes
en souffrent plus ou moins.
En semblable état de choses, comme
l'on voit, l'on ne saurait donc contes-
ter. si imprévu que cela puisse paraître, -
qu'il existe aujourd'hui une « question
du corset n, question tout à fait sé-
rieuse et méritant au premier chef d'at-
tirer l'attention. 1
Dans l'espèce, en effet, ce n'est pas
seulement l'hygiène individuelle qui est
en jeu; le grave problème de la dépo-
pulation, qui préoccupe si fort présen-
tement les meilleurs esprits d'entre
nous, — est-il besoin de rappeler ici la
vaillante campagne menée dans nos
colonnes par notre collaborateur André
Honnorat — se trouve aussi intéressé.
La chose est toute simple. En se ser-
rant à l'excès dans un corset meurtrier
à l'exemple de la malheureuse dont je
rappelais tout à l'heure la déplorable
aventure, la femme tout en courant le
risque de ruiner sa santé menace en-
core de compromettre l'existence même
de son enfant si elle doit être mère.
Les médecins, au reste, savent tous
combien de délivrances prématurées1
sont dues à cette unique cause.
Mais, sans nous étendre ici sur ce
point partiouiier de la question, voyons
quel est l'état précis de l'affaire.
Tout d'abord, il est à remarquer que
le danger du corset a été signalé de-
puis beau temps par les hygiénistes,
dès le lendemain môme de l'introduc-
tion du « buse » métallique en France,
sous Catherine de Médicis.
Depuis, à de nombreuses reprises,
les médecins protcstèront, toujours
vainement, du reste, contre l'instru-
ment meurtrier, et tout dernièrement
encore, l'Académie de médecine, à deux
reprises différentes, par M. le docteur
Poncet (de Cluny) et surtout par Mme
Gaches-Sarrautè, l'une de nos docto-
resses les plus en vue, voyait son at-
tention appelée sur les inconvénients
graves du corset. - -
Hélas, la chose est regrettable à cons-
tater, tous ces* efforts, jusqu'ici, sont
tous sans exception, demeurés stériles
ou à peu près. On ne lutte pas avec la
mode.
Cependant, puisque l'on ne peut son-
ger, étant donné les habitudes et les
mœurs de nos femmes modernes, à
supprimer le corset, malgré ses incon-
vénients reconnus par tous, n'y aurait-
il pas moyen de transformer cet acces-
soire de la toilette de telle manière
qu'il cessât d'être un danger permanent
pour la santé ?
Tel est le problème que s'est posé
Mme la doctoresse Gac.hes-SarrauLe,qui
l'a d'ailleurs résolu avec un réel bon-
heur.
Les principaux méfaits du corset
actuel sont de déformer la région lom-
baire, de s'opposer au libre développe-
ment de la cage thoracique, de nuire à
la souplesse du buste, de déplacer sur-
tout les organes internes et les viscè-
res. ce qui provoque des maladies du
ioic," de l'estomac, les abaissements du
rein, etc., etc.
Mme Gaches-Sarraute, au reste, a
montré d'une façon saisissante, dans
un très intéressant mémoire publié pai
l'excellente revue le dénie moderne, les
modifications lâcheuses amenées chez
la femme par le port du corset habituel.,
Examinez, dit-elle, une femme ayant les
bras en l'air, une femme qui ae peigne avec
ou sans corset.
Lorsqu'elle n'a pas de corset, vous verrez
quo le bassin reste fixe et fournit un point
d'appui au thorax qui se redresse sous l'ac-
tion intégrale de la colonne vertébrale et
des muscles dorso -lombaires. Avec te car*
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE
v - ■ f-
ABONNEMENTS
ls Doit Trois mals Six otit h M
?arls. 2 fr. 5fr. 9fr. 18 fr.
bépartements 2 - 6— 11 - 20-
7nion Postale 8 - fi— 16— 32 -
FTHIDATEUR : AUGUSTE VACQUERIE
1
i
ANNONCES
MM Ch. LAGRANGE, CERF & CM
6, Place de la Bourse, 6
et AUX BUREAUX DU JOURNAL
- RÉDACTION: 131, rue Montmartre, 131
De 4 à 8 heures du soir et de 10 heures du soir à 1 heure du matin
W- 9750. — Jeudi 19 Novembre 1896
29 BRUMAIRE AN 105
ADMINISTRATION : 131, rue Montmartre, 131
Adresser lettres et mandats à Y Administrateur
Avis à nos abonnésl
Nous rappelons à nos abonnés qu'ils
doivent joindre 60 centimes à toutes
leurs demandes de changements d'a-
dresses, ceci pour la confection de nou-
velles bandes.
NOS LEADERS
Une Singulière arithmétique
M. Barthou est-il donc condamné à
plaider toutes les mauvaises causes?
fi vient de défendre à la tribune le
scrutin sénatorial.
Il l'a piètrement défendu, en avocat
de mur mitoyen et non en homme po-
litique. Il s'est bien gardé de dire qu'il
fallait garder ce système baroque,
-soit parce qu'il était utile, soit pour ne
point mécontenter le Sénat. Non ; il
ç'est réfugié dans de misérables argu-
ties de détail. La seule raison qu'il ait
donné, c'est que si le scrutin sénato-
rial n'était pas exactement propor-
tionnel, il n'était pas le seul. Témoin,
le scrutin d'arrondissement, qui donne
x la sous-préfecture d'Embrun, par
exemple, un député pour 27,000 habi-
tants, tandis qu'ailleurs, il peut n'y
avoir qu'un représentant pour 99,000.
Le fait est exact, et on peut en tirer
on gros argument contre le scrutin
d'arrondissement. Oui, telle popula-
tion peut être quatre fois plus repré-
sentée à la Chambre que telle autre
population égale. Oui, bien que de
telles inégalités soient rares, cela pour-
rait, à la rigueur, dans un vate parti-
culier , faire que la majorne de la
Chambre n'ait été élue que par la plus
petite partie du pays. Mais est-il sé-
rieux , est-il sensé de comparer de
telles anomalies avec celles qui dis-
tinguent le scrutin sénatorial ? Voyons
an peu.
**#
D'abord, examinons le chiffre des
représentants. C'est l'inégalité perpé-
tuelle. Ii y a, par exemple, un séna-
teur pour 50 ou 60,000 habitants dans
les Hautes-Alpes, pour 130,000 dans les
Alpes-Maritimes, pour 175,000 dans le
Pas-de-Calais, pour 400,000 dans la
Seine. La différence est quelque peu
plus forte que pour les députés! Un
habitant de Gap est deux fois plus re-
présenté qu'un habitant de Grasse,
trois fois plus qu'un habitant d'Arras,
sept fois plus qu'un habitant de Paris.
Sept fois au lieu d'une : première
inégalité; mais, bien entendu, c'est la
moindre, et elle peut passer pour ab-
solument insignifiante, si on la com-
pare aux autres absurdités de ce mode
de scrutin.
Dans l'intérieur de chaque départe-
ment, comment se comptent les voix?
On sait qu'au début chaque conseil
municipal nommait un délégué. Peu
importait qu'il s'agit d'une capitale de
trois millions d'habitants ou d'un ha-
meau de vingt personnes. On a, dit-on,
rétabli la proportionnalité. Gomment?
Le voici.
Tout d'abord, toutes les communes
uu-dessous de' 500 âmes nomment un
délégué. Peu importe leur importance :
Dn ne fait pas de différence. Un de mes
amis me citait, dans sa circonscrip-
tion, quelques communes qui ont dix-
sept, vingt, vingt-cinq habitants Elles
sont donc vingt à trente fois privilé-
giées sur les plus grosses de cette caté-
gorie, au point de vue de l'élection
sénatoriale. Assurément de telles com-
munes sont peu nombreuses : mais
celles qui ont en moyenne une popula-
tion de cent habitants atteignent un
chiffre considérable. Elles vont donc
avoir un droit de vote deux fois, trois
fois, cinq fois supérieur à celui des
plus fortes communes rurales de cette
première classe. Alors même que l'on
n'appellerait au vote que des villages,
comment une telle inégalité, s'éten-
nant sur tout le collège électoral, ne vi-
cierait-elle pas absolument le résultat?
Mais on ne s'arrête pas là, et à me-
Bure que la population monte à 1,500,
2,500, 3,500, 10,000 têtes, Je chiffre
des habitants représentés par un délé-
gué s'élève à 750, puis à 1,100. Pour
les villes de 10,000 à 60,000 âmes, il
oscille entre 2,500 et 3,000. C'est-à-
dire que la population de ces villes
est vingt-cinq ou trente fois moins re-
présentée que celle des villages de peu
d'importance ; cinq et six fois plus
que celle des villages les plus impor-
tants. Quant aux très grands centres,
c'est bien autre chose. Il faut 17,000
Marseillais ou 17,000 Lyonnais pour
contre-balancer le vote de 100 habi-
tants de hameau. Le droit politique
est cent soixante-dix fois plus consi-
dérable pour l'habitant d'un groupe
de maisons au fond des campagnes
que pour celui de la Cannebière ou de
la Croix-Rousse. Toutes les villes au-
dessus de 60,000 âmes ayant le même
chiffre de délégués, il s'ensuit natu-
rellement que de grandes inégalités
existent entre elles, et que telle grande
cité a encore. DroDorUonneîleiûent à*
sa population, six fois plus de délégués
que telle autre.
Pour Paris, c'est plus fort. Il y a à
Paris un délégué pour quatrevingt
mille habitants! En sorte qu'il faudrait
800 Parisiens pour valoir, au point de
vue du scrutin sénatorial, le curé
d'une petite paroisse rurale.
.*
Mais je rappelle que ce n'est là
qu'une des deux inégalités du système:
l'autre consistant dans le nombre de
sénateurs du département tout en-
tier. Il faut évidemment, pour con-
naître toute la réalité, multiplier l'une
de ces inégalités par l'autre. On a vu
que, dans l'ensemble, la Seine est sept
fois moins représentée que les
Bassses-Alpes. C'est-à-dire que l'élec-
teur d'une commune de cent habi-
tants dans la banlieue, s'il y en
a (je crois qu'il n'en existe plus)
serait sept fois moins représenté que
celui d'une commune égale dans les
montagnes de la frontière italienne.
D'autre part, dans le collège sénato-
rial de la Seine, un électeur parisien
aurait huit cents fois moins d'influence
sur l'élection que celui de la petite
commune. Il en ressort avec une évi-
dence mathématique, qu'au point de
vuede la constitution du Sénat, chaque
habitant des montagnes d'Embrun,
quand il nomme un conseil municipal,
pèse autant que cinq mille six cents
Parisiens.
Et puis on dit : « C'est le suffrage
universel à plusieurs degrés ! » Oui,
c'est le suffrage universel, compté de
telle façon que dans le plateau de la
balance, le bulletin de l'un a le poids
d'un fétu de paille, et celui de l'autre
le poids d'une masse de plomb.
Notez que ces inégalités du suffrage
sénatorial, affectent, non tel ou tel
collège, ni tel ou tel élément de cha-
que collège ; mais qu'elles se retrou-
vent partout. C'est à peine si l'on
trouve de loin en loin deux commu-
nes, dont les délégués représentent la
même population. L'absurdité du sys-
tème employé vicie, en quelque sorte,
les résultats de l'urne, bulletin par
bulletin. Ce n'est pas seulement le pri-
vilège donné d'une façon générale à
telle portion de la population sur telle
autre, aux campagnes sur les villes.
Non dans chaque catégorie de com-
munes, un caprice insensé abaisse,
élève la proportion de Français repré-
senté par chaque électeur sénato-
rial, et finalement par chaque élu.
Ce système a ceci de monstrueux
et d'intolérable, qu'il ne correspond à
aucun principe, à aucune conception
politique, vraie ou fausse. On a voulu
méconnaître, annuler les volontés de
la majorité du pays, au nom de la
naissance ou de la fortune. Ceux qui
soutenaient les régimes fondés sur de
tels privilèges, pouvaient le défendre
et alléguer leur sincérité, parce qu'ils
croyaient sincèrement que le pouvoir
politique était susceptible d'un droit
héréditaire, et que la capacité politi-
que était inséparable de la richesse.
Quand il s'agissait des droits abusifs
de la noblesse, du clergé, de la grosse
bourgeoisie, il y avait une idée der-
rière l'abus; et l'on pouvait de bonne
foi le croire légitime.
Ici rien de pareil. Tout le scrutin
sénatorial repose, en quelque sorte,
sur des inexactitudes d'arithmétique,
sur des fautes d'addition, sur des
équations de ce genre : 1 villageois
des Hautes-Alpes = 5,600 Parisiens.
Notez bien qu'on ne prétend pas pour
cela qu'un Parisien ait moins de droits
que l'autre. Non, on accepte l'égalité
politique comme le principe de gou-
vernement. Seulement, quand il s'agit
de faire élire les sénateurs, on se
trompe systématiquement. C'est la
bévue dans le calcul électoral —
bévue de quelle énormité! — installée
tranquillement dans la législation.
e*
Devant le bon sens public, aucun
droit véritable ne peut manifestement
sortir de cette révoltante absurdité. Le
Sénat est à ce point de vue un élément
invraisemblable de désordre. Son pou-
voir a un caractère de légalité ; il n'a
aucun'pouvoir de légitimité, je ne dis
pas au point de vue de nos principes,
mais au point de vue des principes de
n'importe quel parti. Les auteurs du
système pratiqué n'oseraient pas soute-
nir eux-mêmes qu'il eût le sens com-
mun. L'existence du Sénat est un fait ;
elle ne peut pis être un droit. Cha-
que fois qu'il vote, il commet une
usurpation légale, mais certaine. Si
l'on ne veut pas le jeter à la porte du
Luxembourg, ou par les fenêtres, ce
n'est point un tort qu'il ait un titre
quelconque à être où il est : c'est uni-
quement à cause du grave péril qu'il y
a à introduire ce genre d'action dans
les événements du jour. L'intérêt im-
périeux qu'un pays a au respect de la
légalité, couvre seul ces hommes qui
se permettent de voter au nom de la
France, sans avoir été élus par elle.
Mais s'ils, se refusaient obstinément
à corriger en quoi que ce soit les fautes
i d'arithmétiçruô auxquelles ils doivent
leurs mandats viciés dès l'origine, il
est manifeste qu'ils se dénonceraient
eux-mêmes à la légitime condamna-
tion du pays ; et qui sait ? Les électeurs
sénatoriaux eux-mêmes châtieraient
peut-être, dans plus d'un collège, cette
obstination sans excuse.
CAMILLE PELLETAN.
Nous publierons demain un article
de M. J.-I. de Lanessan
NOTRE PROCÈS
Plusieurs messieurs Harmel (Frères,
Albert, Maurice, Félix), nous font un
procès, et font un procès à notre colla-
borateur Camille Pelletan, à. propos de
ce qui a été dit ici, de la réunion de
Warmériviile, réunion que des bandes
cléricales ont troublée et ont fait suivre
d'assommades.
Tous ces messieurs Harmel (Frères,
Albert, Maurice, Félix) nous assignent
devant MM. les président et juges du
tribunal de Reims, et réclament de
nous, ainsi que de la Petite République,
de la Lanterne, du Franc Parleur (de
la Marne), de M. Camille Pelletan, de
M. Chauvière, de M. Foulon -et de M.
Dubreuil les satisfactions dont voici
l'énumération :
15,000 fr. pour M. Harmel (Frères) ;
5.003 fr. pour M. Harmel (Albert);
5,000 fr. pour M. Harmel (Maurice);
5,000 fr. pour M. Harmel (Félix);
L'insertion du jugement en première
page et in-extenso ;
L'insertion in-extenso du même juge-
ment dans tous les journaux de Reims,
dans dix journaux de Paris et dans
deux journaux par chaque départe-
ment (la France possède, rappelons-le,
86 départements, plus le territoire de
Belfort). »
Les dépens du procès.
Les nombreux MM. Harmel qui nous
demandent tant d'argent, tant d'inser-
tions et tant de dépens peuvent comp-
ter que nous serons exacts au rendez-
vous qu'ils veulent bien nous donner
devant les magistrats de Reims.
LES ON-DIT
CARNET QUOTIDIEN:
Les courses : A Colombes.
— Fête des fripiers, marchands d'habits.
— Durée du jour : ïo h. 12 m.
>.,!,..f-., ji.?_-~~
La Chambre est en train de fortifier
la triste idée que le pays s'est faite du
parlementarisme. Chaque jour, elle
change d'avis sur chaque question.
Avant-hier, par exemple, elle décidait
de continuer la discussion du projet de
loi sur les élections sénatoriales et hier,
elle votait le projet, mais refusait d'o-
bliger le ministère à le soutenir immé-
diatement devant le Sénat.
Même majorité dans les deux sens,
70 voix environ.
Je sais bien, qu'une fois de plus, la
droite vient de sauver M. Méline; je
sais bien aussi qu'il y a dans la Cham-
bre une cinquantaine de députés qui se
tiennent du côté du manche pour avoir
des bureaux de tabac et toutes sortes
de faveurs. Mais c'est justement ce qui
est affligeant. Les républicains ne com-
prennent pas qu'un cabinet qui se dit
républicain accepte aussi ouvertement
l'appui de la droite ; ils ne peuvent s'ex-
pliquer également, la Chambrè étant
divisée en deux parties d'égale force à
peu près, le mouvement de bascule
qu'opèrent les cinquante députés dont
je viens de parler.
Ceux-là ont soutenu tour à tour les
ministères Dupuy, Ribot, Bourgeois,
c'est-à-dire des opportunistes et des
radicaux. Voilà maintenant qu'ils sont
avec les réactionnaires et M. Méline,
toujours dans un intérêt électoral. Leur
courage, comme on le voit, est à la hau-
teur de leurs convictions.
Il est tout de même triste que la Cham-
bre se soit déjugée sur une question
politique aussi importante que celle des
élections sénatoriales. Ses variations
successives l'ont discréditée à peu près.
Le pays ne s'occupe plus d'elle. Encore
quelques séances comme celle d'hier et
j'imagine que le pays se fâchera. Ce ne
serait pas trop tôt.
CHEZ NOUS
- C'est ce soir mercredi, à huit neures
et demie, qu'aura lieu au Grand-Véfour le
punch offert à M. Goblet par le comité
radical socialiste du ICI" arrondissement.
Une trentaine de sénateurs et de dé-
putés y assisteront; nous citerons notam-
ment : MM. Barodet, Destieux-Junca, A.
Lefèvre, de Verninac, sénateurs ; Doumer,
Lockroy, Guieysse, Mesureur, anciens mi-
nistres; Pelletan, Millerand, Jullien, Ba-
zille, Berteaux, Sembat, Merlou, Pétrot,
députés.
- Les matrices des rôles des patentes
de la ville de Paris, pour l'année 1897, se-
ront déposées au secrétariat de la mairie
de chaque arrondissement du 10 au 19 dé-
cembre prochain.
Les contribuables qui désireront en pren-
dre connaissance devront se présenter aux
mairies, de une heure à quatre heures.
- En présence de la nécessité de
pourvoir immédiatement à de nombreuses
demandes de billon, l'autorisation a été
donnée aux comptables, dans certains. dé-
partements où le billon français existe en
surabondance, de le recevoir à l'échange,
à tiîice exce^tioiiael et transitoic: r „
Des sommes importantes, s'élevant déjà
à près de 100,000 fr., ont été recueillies de
cette manière dans la région du centre,
notamment dans la Sarthe, le Loiret et le
Loir-et-Cher, Elles sont expédiées au furet
à mesure des retraits et concurremment
avec les sous neufs fabriqués par la Mon-
naie, sur les points où le refus du billon
étranger par le commerce a déterminé de
nombreuses demandes de monnaies de
bronze nationales.
- A la suite d'une adjudication pu-
blique, qui a eu lieu hier à la direction des
chemins de fer de l'Etat, l'éditeur Flamma-
rion a enlevé à la maison Hachette le pri-
vilège de la location des bibliothèques dans
les gares du réseau de l'Etat.
Il avait soumissionné au prix de 15,100
francs. Il avait pour concurrents, outre les
éditeurs Hachette, MM. Delagrave et Fas-
quelle.
Hier a eu lieu également au siège de la
Compagnie des chemins de fer de cein-
ture, en prévision de la fin de bail de la
maison Hachette, non l'adjudication pu-
blique, mais le dépôt, sous pli cacheté, des
soumissions.
Aucune réponse n'est encore parvenue
aux soumissionnaires.
- L'exploration de la haute atmos-
phère :
On sait que MM. Georges Besançon et
Gustave Hermitte avaient lancé un ballon,
rAérophile, ballon sans passagers, n'em-
portant que des appareils enregistreurs, et
dont la mission scientifique était de mon-
ter aussi haut que possible, afin de rap-
porter des altitudes où on l'aventurait des
documents précis sur les pressions et les
températures des successives couches de
l'atmosphère.
L'Aérophile est retombé en Belgique, à
Graide, à quelques lieues de Dinant. Il s'est
élevé à une hauteur de 15,000 mètres et a
éprouvé un froid de 63 degrés.
Le matériel est complètement détruit,
l'enveloppe crevée, le filet déchiré, mais
les diagrammes sont intacts.
-—— M. Aurélien Scholla adressé sa dé-
mission de président du comité du monu-
ment de Paul de Koch.
On sait que ce monument doit être érigé
aux Lilas. Le conseil municipal de cette
commune a chargé le maire, M. Segaux,
de faire des démarches auprès de plusieurs
hommes de lettres pour pourvoir au rem-
placement de 1.1. Aurélien Scholl comme
président du comité.
- Tout le monde, dans le 7e arron-
dissement, connaissait Kirsch, le plus gros
cocher de Paris, le cocher du commis-
saire. Kirsch, en effet, pesait la bagatelle
de 280 livres et atteignait une hauteur de
deux mètres. De plus, sa spécialité était de
ne marcher qu'à l'heure et pour un seul
client, le commissaire de police du quar-
tier Saint-Thomas-d'Aquin, qu'il accom-
pagnait pour toutes les perquisitions né-
cessitées par les vols dans les magasins de
nouveautés. Pendant seize ans il a succes-
sivement conduit MM. Guénin, Prélat et
Belouino, les trois derniers commissaires
titulaires.
Un grand nombre de cochers, montés
sur leur voiture, ont suivi le char qui em-
portait leur collègue au cimetière et sur
lequel on remarquait une couronne offerte
par le commissariat de Saint-Thomas-
d'Aquin et une autre par les magasins de
nouveautés du quartier.
Le Passant.
LE MILITARISME AU REICHSTAG
Le Reichstag a eu hier encore une discus-
sion fort mouvementée.
Il s'agissait de deux interpellations, l'une
ayanr, trait à l'abus du duel et l'autre au
meurtre commis dans de si abominables
conditions par le fameux lieutenant Bruso-
witz qui, il y a quelque temps, plongeait
son sabre dans la poitrine d'un malheureux
jeune homme nommé Siepmann, sous pré-
texte qu'il ne lui avait pas montré assez 40
déférence et de respect.
L'interpellateur, M. Munckel, n'a pas eu
de peine à montrer les dangers que faisait
courir à la société un militarisme aussi
odieux. Mais le nouveau ministre de la
guerre, M. de Gossler, a tenu à faire du
zèle et pour cela, il n'a rien trouvé de mieux
que de se répandre en éloges sur le compte
de Brüsewitz et d'insulter à la mémoire de
son innocente victime :
« Le respect dû à l'uniforme du roi et au
drapeau, s'est-il écrié, est un sentiment qui
est inséparable de nous-mêmes. Il ne faut
pas enlever aux officiers le droit à la dé-
fense personnelle. »
Le Reichstag n'a pas ménagé son indi-
gnation au ministre de la guerre, dont le
cynisme révoltant a indigné tout le monde.
Le président n'a même pas hésité à le rap-
peler à l'ordre.
M. Bebel a alors pris la parole et rappe-
lant les paroles adressées par l'empereur
aux recrues lorsqu'il adéclaré que les insultes
faites à son uniforme sont des insultes au
roi : « Les temps ne sont plus cependant,
s'est-il écrié, ou Caligula faisait adorer son
cheval et Gessler son chapeau. »
Héias ! les Allemands voient qu'il n'en est
rien et que les crimes de Rome trouvent en-
core des apologistes à Berlin !
-
UN DRAME A NICE
Mme S., qui était en instance de divorce
contre son mari, était venue à Monaco avec
son amant, le comte de M., dont elle avait
fait la connaissance dans les stations où la
menait son mari. Apprenant l'arrivée pro-
chaine de celui-ci à Monaco, elle partit pour
Nice, en laissant toutefois l'indication de son
adresse.
Dimanche dernier, son mari se présenta à
l'hôtel de Milan où elle était descendue.
Elle le reçut dans le salon, près de sa cham-
bre. Une discussion s'engagea entre eux,
qui fut bientôt accompagnée d'injures et
suivie de voies de fait.
Le comto de M., qui entendait tout de la
chambre de sa maîtresse, ne put se conte-
nir. Il entra dans le salon et une lutte s'en-
gagea entre les deux hommes.
Le comte ayait réussi à rejeter S.., clans
un fauteuil quand celui-ci, sortant un re-
volver, fit feu sur son adversaire, qu'il
atteignit au côté gauche de l'abdomen.
Le comte de M. est un Bavarois âgé de
trente ans. Il a été transpor.é à l'hôpital de
Nice. La balle, logée dans les tissus, n'a pu
être extraite, mais l étal du blessé n'est pas
inquiétant.
Le mari, sujet autrichien, est âgé de
trente-trois ans. Il a été interrogé par le
juge d'instruction.
•— - ■ ^- ■ i. --- —-
L'INTERPELLATION D'AUJOURD'HUI
Le traître Dreyfus
La Chambre siège aujourd'hui mercredi,'
exceptionnellement, pour discuter une inter-
pellation qui flJt déposée par M. Castelin le
jour môme de la reprise des travaux parle-
mentaires.
On sait que cette interpellation vise les
incidents relatifs à l'affaire du traitre Drey-
fus. M. Castelin veut, en effet, rechercher
dans quelles conditions il a été annoncé que
l'ex-capitaine s'était évadé de l'île du Salut.
Il veut aussi examiner si toutes les mesures
do sécurité sont bien prises pour qu'on n'ait
pas à redouter une fuite du traitre.
Enfin l'interpellateur doit s'occuper des
manœuvres d'un soi-disant syndicat « de
défense », dont les actes se trouveraient
révélés par la campagne faite en vue d'éta-
blir un doute sur la culpabilité du traître.
On ne prévoit pas qu'une pareille discus-
sion puisse être longue, mais on croit qu'elle
sera particulièrement intéressante.
LA TRACTION MÉCANIQUE
UN NOUVEL ESSAI
De la Bastille à Charenton
Traction électrique
Pendant que l'on discute au sein d'une
commission spéciale le rapport de M. Ber-
thelot sur un métropolitain problématique,
la question des transports en commun est
très suivie et activement étudiée à l'Hôtel
de Ville, et il est presque certain que sous
une autre forme, mais heureusement pas
souterraine, Paris sera pourvu de moyens
de locomotion nombreux, pratiques et éco-
nomiques avant peu. Il s'agit du dévelop-
pement de la traction mécanique et de la
créa ion de lignes nombreuses. Il y a quel-
ques jours, j'ai donné ici la nomenclature de
trente lignes nouvelles à créer « à traction
mécanique », disait, le rapport introduit, sans
toutefois fixer le genre de traction.
Or, aujourd'hui, après que nous avons
déjà la traction à vapeur, à air comprimé, à
vapeur surchauffée, à accumulateurs électri-
ques, et à prise électrique souterraine, on
vient proposer à la Ville l'essai d'une trac-
tion électrique en prise souterraine et
aérienne par trolley.
Le trolley fonctionne déjà dans plusieurs
villes de France, notamment à Marseille,
Lyon, le Havre, Bordeaux, etc., et a déjà fait
son apparition à Paris en 1884 à l'exposition
d'électricité, au palais de l'Industrie. Cette
ligne de tramway qui, en somme faisait par-
tie de l'exposition, partait de la place de la
Concorde et suivait l'avenue parallèle à la
Seine qui conduit à la porte du côté droit du
palais où il avait sa station terminus. Le
parcours était seulement de quelques cen-
taines de mètres, mais l'installation intéres-
sait énormément les passants.
On sait que la traction par trolley consiste
en une prise de courant sur ligne aérienne.
Ce mode de traction est très économique
et d'une installation peu coûteuse, mais il
donne aux rues dans lesquelles il passe,
disent certains, un aspect désagréable par
sa ligne aérienne, semblable aux lignes té-
légraphiques qui courent le long des voies
de chemins de fer, c'est du reste une des
raisons qui ont fait repousser son applica-
tion jusqu'à ce jour.
Quoi qu'il en soit, après que la compagnie
des Tramways-Sud eut formulé en juillet
1896 une demande de substitution de la trac-
tion mécanique à la traction animale sur
toutes les lignes de son réseau, M. Puech a
été chargé d'étudier la question et il a con-
clu « à autoriser, à titre d'exp.-rience et d'es-
sai, la compagnie des Tramways-Sud à
substituer à ses frais, risques et périls, la
traction par l'électricité à la traction animale
sur la ligne de tramway de la place de la
Bastille à Charenton ».
La première commission a conclu favora-
blement, ainsi que la sous-commission mixte
des omnibus et tramways, et il est certain
qu'il en sera do môme aujourd'hui à la com-
mission mixte des omnibus et tramways,
après quoi, probablement même cet après-
midi, la question sera soumise au conseil
général, car la ligne Bastilie-Charenton est
une ligne départementale sur laquelle le
conseil général est appelé à statuer.
Il n'est pas douteux que le rapport pro-
posé sera accepté.
Il porte que la traction se fera tour à tour
par fil aérien et par prise souterraine. Ce
dernier mode de .raction devra être em-
ployé sur les places, carrefours, etc. Ainsi,
place de la Bastille et rue de Lyon, c'est la
prise souterraine qui sera employée, tandis
qu'avenue Daumesnil et dans le bois de
Vincennes, c'est au fil aérien qu'on aura re-
cours.
Cette autorisation est essentiellement pré-
caire, et s'il est établi que l'essai ne donne
pas les résultats désirés, la compagnie devra
rétablir dans les six mois les choses en l état
actuel, à ses frais, risques et périls, et cela
sous peine de 500 lr. d'amende par jour de
retard.
Telles sont les grandes lignes de cette au-
torisation; mais la première commission du
conseil n'a pas oublié 1 intérêt public et,
dans son traité, elle a lixé ainsi le prix des
places pour les voyageurs n'usant pas de la
correspondance, avec promesse de réduction
lorsque l'autorisation précaire deviendra dé-
finitive:
Dans Paris : le classe, 20 centimes; 2e
classe, 15 centimes. Hors Paris : lr" classe,
15 cenâmes; 2e classo, 1U cen imes; mais ce
dernier parcours se divisera en deux sec-
tions : des fortifications à Saint-Man iéet de
Saint-Mandé au point terminus de la ligne,
lesquels ne seront que de 5 centimes et
1Q centimes.
Par deuxième classe il ne faut pas en-
tendre impériale, ces tramways n'en étant
pas pourvus, mais bien plate-formes cou-
vertes. C'est donc déjà une réduction sen-
sible sur le prix des transposts.
De plus, la compagnie,, conformément aux
indications données par l'antorité ùéparte-
mentale, devra disposer son horaiie et le
nombre de ses voitures de manière à sup-
primer toute attente du public sur la sta-
tion de la ligne. ,.
Enfin la compagnie dçvra assurer par son
installation l'éclairage électrique de l'avcnue
Daumesnil.
Les critiques ne vont pas manquer d'af-
fluer, on parlera de l'aspect de Paris, c'est
certain, ce n est pourtant pas que la mono-
tonie des constructions modernes soit inté-
ressante , enfin chaque chose a ses parti-
sans ! Mais ce qui est intéressant pour tous,
c'est la diminution du prix des places, l'aug-
mentation du nombre de véhicules et l'éclai-
rage électrique d'une voie parisienne.
L'essai en prouvera ou non l'utilité.
ÉMILE WILLÈME.
L'ARMÉE COLONIALE
La commission do l'armée a fixé au mer-
credi 25 novembre l'audition des ministres
de la guerre, de la marine et des colonies,
au sujet de l'armée coloniale.
TABLETTES DU PROGRES
Par GEORGES VITOUX
LA QUESTION DU CORSET
Mon très informé collaborateur « le
Passant » signalait l'autre jour dans
ses « On-dit » le cas singulièrement
suggestif d'une pauvre fille, domesti-
que chez de braves bourgeois london-
niens, miss Florence Kate Donnett,
morte prématurément pour s'être trop
fort sanglé la taille dans un corset im-
pitoyable.
Une telle fin lamentable, assurément,
a dù paraître fantaisiste à plus d'une
personne. Songez donc, mourir tuée
par son corset!. Est-ce que ces choses-
là arrivent?
Hélas 1 oui, de tels accidents sont
possibles et surviennent, et c'est mi-
racle vraiment si les journaux n'ont
point à chaque instant à en signaler de
semblables. La mode, en effet, ayant
décrété que pour être belle l'on doit
avoir la taille fuie, l'habitude de se
serrer est devenue à peu près générale-
parmi la foule des élégantes, si bien
qu'actuellement le même danger me-
nace sans cesse chacune de celles qui,
sacrifiant au dieu de la coquetterie,,
raccourcissent sans raison d'un cran
la longueur de leur ceinture.
Assurément, toutes n'en meurent
point, mais, assurément aussi, toutes
en souffrent plus ou moins.
En semblable état de choses, comme
l'on voit, l'on ne saurait donc contes-
ter. si imprévu que cela puisse paraître, -
qu'il existe aujourd'hui une « question
du corset n, question tout à fait sé-
rieuse et méritant au premier chef d'at-
tirer l'attention. 1
Dans l'espèce, en effet, ce n'est pas
seulement l'hygiène individuelle qui est
en jeu; le grave problème de la dépo-
pulation, qui préoccupe si fort présen-
tement les meilleurs esprits d'entre
nous, — est-il besoin de rappeler ici la
vaillante campagne menée dans nos
colonnes par notre collaborateur André
Honnorat — se trouve aussi intéressé.
La chose est toute simple. En se ser-
rant à l'excès dans un corset meurtrier
à l'exemple de la malheureuse dont je
rappelais tout à l'heure la déplorable
aventure, la femme tout en courant le
risque de ruiner sa santé menace en-
core de compromettre l'existence même
de son enfant si elle doit être mère.
Les médecins, au reste, savent tous
combien de délivrances prématurées1
sont dues à cette unique cause.
Mais, sans nous étendre ici sur ce
point partiouiier de la question, voyons
quel est l'état précis de l'affaire.
Tout d'abord, il est à remarquer que
le danger du corset a été signalé de-
puis beau temps par les hygiénistes,
dès le lendemain môme de l'introduc-
tion du « buse » métallique en France,
sous Catherine de Médicis.
Depuis, à de nombreuses reprises,
les médecins protcstèront, toujours
vainement, du reste, contre l'instru-
ment meurtrier, et tout dernièrement
encore, l'Académie de médecine, à deux
reprises différentes, par M. le docteur
Poncet (de Cluny) et surtout par Mme
Gaches-Sarrautè, l'une de nos docto-
resses les plus en vue, voyait son at-
tention appelée sur les inconvénients
graves du corset. - -
Hélas, la chose est regrettable à cons-
tater, tous ces* efforts, jusqu'ici, sont
tous sans exception, demeurés stériles
ou à peu près. On ne lutte pas avec la
mode.
Cependant, puisque l'on ne peut son-
ger, étant donné les habitudes et les
mœurs de nos femmes modernes, à
supprimer le corset, malgré ses incon-
vénients reconnus par tous, n'y aurait-
il pas moyen de transformer cet acces-
soire de la toilette de telle manière
qu'il cessât d'être un danger permanent
pour la santé ?
Tel est le problème que s'est posé
Mme la doctoresse Gac.hes-SarrauLe,qui
l'a d'ailleurs résolu avec un réel bon-
heur.
Les principaux méfaits du corset
actuel sont de déformer la région lom-
baire, de s'opposer au libre développe-
ment de la cage thoracique, de nuire à
la souplesse du buste, de déplacer sur-
tout les organes internes et les viscè-
res. ce qui provoque des maladies du
ioic," de l'estomac, les abaissements du
rein, etc., etc.
Mme Gaches-Sarraute, au reste, a
montré d'une façon saisissante, dans
un très intéressant mémoire publié pai
l'excellente revue le dénie moderne, les
modifications lâcheuses amenées chez
la femme par le port du corset habituel.,
Examinez, dit-elle, une femme ayant les
bras en l'air, une femme qui ae peigne avec
ou sans corset.
Lorsqu'elle n'a pas de corset, vous verrez
quo le bassin reste fixe et fournit un point
d'appui au thorax qui se redresse sous l'ac-
tion intégrale de la colonne vertébrale et
des muscles dorso -lombaires. Avec te car*
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.06%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.06%.
- Collections numériques similaires Lettre Lettre /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Lettre "Collection MARGRY, relative à l'histoire des Colonies et de la Marine françaises. AFRIQUE ET ASIE. Siam, Chine, Tonkin, Japon ; établissements et missions. /ark:/12148/btv1b532780516.highres Recueil de pièces originales provenant de la Chambre des comptes, de copies, d'extraits et de dessins formé par Gaignières et concernant les maisons royales de France, les princes du sang, etc. Rois et reines, fils et filles de France, etc. IV. /ark:/12148/btv1b10782947z.highresLettres Lettres /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Lettres " Alexis Édouard Dom Alexis Édouard Dom /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Alexis Édouard Dom " Alliot Dom Hyacinthe Alliot Dom Hyacinthe /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Alliot Dom Hyacinthe "
- Auteurs similaires Lettre Lettre /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Lettre "Collection MARGRY, relative à l'histoire des Colonies et de la Marine françaises. AFRIQUE ET ASIE. Siam, Chine, Tonkin, Japon ; établissements et missions. /ark:/12148/btv1b532780516.highres Recueil de pièces originales provenant de la Chambre des comptes, de copies, d'extraits et de dessins formé par Gaignières et concernant les maisons royales de France, les princes du sang, etc. Rois et reines, fils et filles de France, etc. IV. /ark:/12148/btv1b10782947z.highresLettres Lettres /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Lettres " Alexis Édouard Dom Alexis Édouard Dom /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Alexis Édouard Dom " Alliot Dom Hyacinthe Alliot Dom Hyacinthe /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=dc.subject adj "Alliot Dom Hyacinthe "
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7541767m/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7541767m/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7541767m/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7541767m/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7541767m
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7541767m
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7541767m/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest