Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1884-11-14
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 14 novembre 1884 14 novembre 1884
Description : 1884/11/14 (N5362). 1884/11/14 (N5362).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75403067
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
fï* 6362 — Vendredi 14 Novembre 1884 Xe numéro: iOfe. — Départements s 1S» c. 24 Brumaire an 93 - N. 5362
.ADMINISTRATION !
!8, RUE DE VALOISJ .fa g
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ABONNEMENTS
ÏAEIS
rro'l's mois in 1)
iXJûûis. 20 »
DEPARTEMENTS1 *
Trois mois. 13 50. ,*■
SIX MOI S. 22YJ|
A3RESSER LETTRES et MANDAIS :
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A M. ERNEST LEFÈVRS;
ADMIMSTEAIEIIR.GÉRAOT 1
4.
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HEDAGTIOIT
] ^'adresser «LU Secrétaire ae la Rétlaciiatt,
He & à 6 heures du soir
- 18, HUE DE VALOIS» 18
les HUffiiiscriis non insérés ne seront jas pcsdiig
ANNONCES
aH, Ch. IAGRANGE, CERF et ce
6, race de la Bourse, 6
LA JUSTICE
La justice est boiteuse, elle vient à pas lents,
Mais elle vient.
Soit; mais si, quand elle arrive, ceux
qui l'attendaient ont eu le temps de
courir?
Savez-vous combien, dans la der-
rière année judiciaire, du 1" septem-
bre 1883 au 30 août 1884, il a été ins-
crit d'affaires au rôle de première ins-
tance? 139,624. Et savez-vous combien
il a été rendu de jugements? 71,300.
C'est donc 68,324 affaires qui sont res-
tées en souffrance, c'est-à-dire une sur
deux.
i6,340 affaires sont allées en appel.
Les cours ont rendu 9,159 arrêts. L'ar-
riéré est donc de 7,181 procès. Encore
la moitié.
Les tribunaux ne jugent et ne peu-
vent juger chaque année que la moitié
des différends qui leur sont soumis, il
en résulte, fait justement observer
M. Pierre Aubry, que tout plaideur,
quels que soient l'urgence et l'intérêt de
sa cause, devra d'abord attendre un an
avant que son affaire sorte du rôle
et soit classée, "que c'est seulement au
cours de la seconde année qu'il lui sera
loisible de prendre rang, que son tour
arrivera donc après dix-huit ou vingt
mois d'attente, et qu'avec autant de
délais en appel, sa patience aura à
- - -
s'épuiser pendant trois ou quatre ans.
Que faire? La solution semble fa-
cile : si la moitié seulement des procès
peuvent être jugés dans l'année, c'est
qu'il n'y a que la moitié des juges et
des tribunaux nécessaires ; on n'a donc
qu'à doubler le nombre des tribunaux
et des juges.
Voici la réponse : la loi du 30 août
1883 a supprimé neuf cours d'appel,
cent quatrevingt-dix-huit conseillers et
deux cent vingt juges, - et quelle a été
la conséquence de cette suppression?
c'est que non-seulement le nombre des
arriérés a cessé de s'accroître, mais
qu'il a légèrement diminué.
La conclusion logique serait donc
qu'au lieu de doubler le nombre des
tribunaux et des juges, il faut le ré-
duire encore.
Mais cette conclusion serait nisquée.
Dans la nouveauté de la réforme ju-
diciaire, les juges, moins nombreux,
nt eu plus d'activité, et l'arriéré s'est
amoindri de quelques milliers de causes.
Mais c'est un médiocre progrès que de
n'avoir plus que 68,324 procès à faire
le pied de grue. Et n'est-il pas à crain-
dre que, lorsqu'ils ne seront plus sous
le coup de fouet de la réforme et dans
l'ardeur du premier mouvement, lors-
que, malgré leur zèle, ils se verront
débordés par la mer montante des dos-
siers, les magistrats nouveaux ou re-
nouvelés se découragent, qu'on re-
tombe dans la résignation et l'inertie
d'auparavant, et que l'arriéré recom-
mence à croître et à enlaidir? Alors,
moins il y aurait de tribunaux et de
juges, plus il y aurait de décourage-
ment.
r La solution n'est donc pas plus dans
la diminution des juges et des tribunaux
que dans leur augmentation.
Un des moyens d'atténuer, sinon de
supprimer l'arriéré, ce serait de faire
ce qui avait été proposé en 1881 : d'é-
tendre la compétence des juges de paix.
Les tribunaux se déchargeraient sur
eux de milliers de petites causes qui
les alourdissent et les ralentissent. Que
de misérables chicanes pour lesquelles
il faut entendre des douzaines de té-
moins, et qui traînent après elles des
enquêtes, contre-enquêtes, expertises,
etc.! Débarrassés de ces procès misé-
rables, les tribunaux auraient du temps
pour les procès sérieux.
Si l'extension de la justice de paix ne
suffit pas, si l'on veut pas des assises
correctionnelles, également proposées
il y a trois ans, qu'on fasse autre chose,
mais qu'on fasse quelque chose. Il faut
en finir avec cet arriéré qui déshonore
la justice et qui est un double attentat
à l'égalité et à l'humanité.
Attentat à l'égalité, Car quelle éga-
lité y a-t-il entre les plaideurs riches
qui peuvent patienter trois ou quatre
ans sans retrancher un plat de leur dî-
ner — et les pauvres gens qui atten-
dent du gain de leur procès leur bouchée
de pain?
Attentat à l'humanité. Supposez un
ouvrier qui plaide contre un patron ou
contre une compagnie pour une blessure
qui l'a mis dans l'incapacité de gagner
sa vie. Quatre ans, c'est sa mort de
faim et celle de ses enfants.
AUGUSTE VACQUERIE.
COULISSES DES CHAMBRES
* La discussion du budget de 1885 doit
s'ouvrir aujourd'hui devant la Chambre.
La commission, suivant l'usage, a arrêté
l'ordre qu'elle proposerait à la Chambre
de suivre pour ce débat. Après la discus -
sion générale, les budgets des ministères
seront examinés dans l'ordre suivant ;
1° Agriculture.
2° Forêts.
3° Justice.
4° Cultes.
5° Légion d'honneur.
6° Guerre.
7° Marine.
8° Travaux publics.
9° Chemins de fer de l'Etat.
10° Etudes et travaux de chemins de
fer.
11" Postes et télégraphes.
12° Instruction publique.
13° Beaux-arts.
14° Intérieur.
15° Gouvernement de l'Algérie.
16° Affaires étrangères.
17° Commerce.
18° Colonies.
190 Finances.
20° Invalides de la marine.
21° Imprimerie nationale.
Après cette série, on terminera par la
discussion du budget des recettes et par
l'examen du budget sur ressources extra-
ordinaires.
La discussion durera environ trois se-
maines et en outre il faut prévoir qu'elle
sera interrompue la semaine prochaine
par le débat sur les crédits du Tonkin et
par l'interpellation de M. Tony Révillon
sur les moyens de remédier à la crise
parisienne. En outre, si elle n'est pas ter-
minée au moment du dépôt du rapport
sur la réforme électorale du Sénat, elle
devra nécessairement être suspendue à
cette époque pour permettre de voter cette
réforme de manière à pouvoir l'appliquer
lors du renouvellement sénatorial du mois
de janvier prochain. 1
Le nombre des orateurs inscrits pour la
discussion générale du budget est très
considérable. La liste ne renferme pas
moins de quinze noms, parmi lesquels,
dans l'ordre d'inscription : MM. Loubet,
Amagat, Daynaud, Hérault, Ribot, de
Soubeyran,. Wilson, d'Aillières, Raoul
Duval.
Nous avons dit que la commission du
budget était saisie d'une question assez
grave : la régularisation des dépenses ef-
fectuées par le ministère de la guerre en
1882, sous l'administration du général
Billot, et dépassant les crédits correspon-
dants inscrits au budget.
Ces excédents de dépenses s'élèvent à
cinq millions et sont afférents, pour la
majeure partie, au payement de la solde
et aux frais d'opérations en Algérie. M.
Casimir-Perier, sous-secrétaire d'Etat à la
guerre, a été entendu hier à ce sujet par
la commission du budget. L'administra-
tion actuelle étant étrangère à ces irrégu-
larités, il ne s'agissait pas de mettre en
jeu sa responsabilité, mais d'obtenir des
explications rétrospectives, qui permissent
à la commission de se prononcer en con-
naissance de cause. Le sous-secrétaire
d'Etat a reconnu l'irrégularité da procédé
financier, mais a plaidé les circonstances
atténuantes en faveur de l'administration
de 1882.
Mais la commission, sur la proposition
de MM. Ballue et Wilson, a, par 6 voix
contre 4, refusé de régulariser les dépen-
ses en question. Elle proposera à la Cham-
bre de rejeter la demande de 5 millions.
La question va revenir naturellement
devant la cour des comptes. Mais il im-
porte de faire observer que les dépenses
ont été régulièrement payées par les
comptables du Trésor, qui ont versé les
sommes demandées sur réquisition, com-
me cela se pratique normalement. La cour
des comptes ne pourra que critiquer le
procédé financier consistant à dépasser
les crédits accordés par la loi, c'est-à-dire
blâmer la conduite de celui qui a ordon-
nancé la dénense.
La question reviendra une dernière fois
devant la Chambre lors de la vérification
des comptes de l'exercice 1882. La Cham-
bre aura alors à décider si elle régularise
après coup les dépenses, ou si elle les
laisse à la charge du général Billot, le mi-
nistre responsable de l'irrégularité.
Le projet de loi sur la réforme électo-
rale du Sénat, voté au Luxembourg, a
été déposé hier sur le bureau de la Cham-
bre par le ministre de l'intérieur. La com-
mission chargée d'examiner ce projet sera
nommée samedi prochain.
Deux amendements sont déjà déposés,
l'un par M. Maxime Lecomte (du Nord) et
l'autre par M. Joseph Fabre.
L'amendement de M. Fabre s'applique
exclusivement à l'échelle de proportion-
nalité.des délégués; il porte que les con-
seils municipaux éliront :
1 délégué dans les communes de 2,000
habitants et au-dessous ;
2 délégués dans les communes de 2,001
à 4,000 habitants ;
Et ainsi de suite avec addition de 1 dé-
légué par 2,000 ou fraction de 2,000 habi-
tants jusqu'au chiffre de 20,000 habitants.
A partir de 20,000 habitants, l'augmen-
tation sera de 1 délégué par 5,000 habi-
tants en plus ou fraction de 5,000 jus-
qu'au chiffre de 50,000.
A partir de 50,000, l'augmentation sera
de 1 délégué par 10,000 habitants en plus
ou fraction de 10,000, jusqu'au chiffre de
100,000.
A partir de 100,000, l'augmentation sera
de 1 délégué par 50,000 habitants en p'us
ou fraction de 50,000.
Dans ce système, Paris aurait 63 délé-
gués, Lyon et Marseille 27, Bordeaux 24,
Lille 23, Toulouse, Nantes, Saint-Etienne,
Rouen et le Havre 22, etc.
---
Li agence tlavas nous annonce aujour-
d'hui que les Chinois ont attaqué nos po-
sitions à Kélung et qu'ils ont été repoussés
avec des pertes considérables; mais l'a-
gence Havas ajoute qu'elle n'est pas en
mesure de dire si cette nouvelle n'est pas
une simple confirmation de l'attaque ten-
tée par les Chinois le 7 de ce mois ; at-
taque que nous avons déjà racontée.
"'-
,. <1-
Le Times publie une correspondance de
Fou-Tchéou, dont on trouvera plus loin
d'intéressants extraits. Il paraît que, dans
cette ville, les rapports sont très tendus
entre la population civile et les milices
chinoises, des rixes éclatent à chaque
instant. De plus, le gouvernement chinois
parait être fort embarrassé pour se pro-
curer de l'argent, « la population lui est
hostile, ajoute le correspondant anglais,
et la levée des impôts s'effectue à grand'-
peine. »
Toutes ces raisons contribuent à expli-
quer les bruits de paix prochaine qui ont
pris tant de consistance depuis quelques
jours. A
rwi lu. 1 » ,. ■ 11^ — iwjwi■ L !■
Il est facile de constater que l'épidémie
cholérique qui est venue nous visiter de-
puis peu de jours est, dès à présent,
entrée dans sa période de décroissance.
Les chiffres officiels annoncent pour la
journée du mardi 11 novembre un total
de 89 décès cholériques, ce qui est, re-
marquons-le encore une fois en passant,
un nombre infinitésimal, eu égard à la
population de Paris, qui est de 2 millions
200,000 habitants.
Pour la journée d'hier, mercredi 12 no-
vembre, les chiffres officiels qui nous par-
viennent indiquent, de minuit à six heures
du soir (soit 18 heures ou trois quarts de
journée) 43 décès cholériques. Augmen-
tons ce total de son tiers pour avoir la
moyenne de la journée, nous obtenons ce
résultat : 57 décès.
La mortalité cholérique a donc baissé
de plus d'un tiers dans l'espace d'une
seule journée, ce qui est énorme et pré-
sage la fin très prochaine de l'épidémie.
——————— ———————.
, A LA CHAMBRE
Séance d'affaires en attendant l'in-
terpellation annoncée sur la Réunion
et une autre, devenue indispensable,
sur les mandats fictifs. C'est du vinage
que l'on parle t aujourd'hui, et, malgré
le talent incontestable du ministre du
commerce, la Chambre a repoussé le
projet autorisant l'addition de l'alcool
jusqu'à 15 degrés. En fait, c'est inex-
plicable, puisque les traités conclus
avec l'étranger autorisent l'importation
de vins ainsi remontés par des alcools
allemands. La Chambre, qui obéit ici
à son instinct protectionniste, fait donc
de la protection à rebours. C'est l'étran-
ger qu'elle protège, et M. Rouvier l'a
démontré.
En résumé, d'ailleurs, et si les traités
n'existaient pas, il est certain qu'il se-
rait inutile d'autoriser le vinage au-delà
de 12 degrés, nos vins de France n'at-
teignant cette richesse alcoolique que
très exceptionnellement. Mais tant que
des vins survinés nous arriveront par
nos frontières, il faut au moins pouvoir
leur faire concurrence, et c'est ce que la
Chambre n'a pas compris.
A. GAULIER.
— ♦ ■-
LA LIGUE DE L'EST
Je commence par déclarer que mon
opinion n'est pas faite sur l'emplacement
de la future exposition universelle. Pour
ma commodité personnelle, je préférerais
qu'elle se fît place Blanche ou place Pi-
galle, mais ces hypothèses n'ayant pas
même été discutées, je suis prêt à me ral-
lier à tel autre quartier présentant les con-
ditions requises. Une ligue s'est formée
sous le nom de Ligue des intérêts de
l'Est, dans le but de faire adopter le bois
de Saint-Mandé; ses adhérents se sont
réunis en une séance où M. de Ménorval,
conseiller municipal, a prononcé un dis-
cours fort applaudi. On annonce d'autres
conférences, l'une notamment au Cirque-
d'Hiver, sous la présidence de noms con-
nus. Bref, l'Est prêche avec éloquence et
conviction pour son saint, et notre impar-
tialité nous ifait un devoir de reproduire
au moins ses arguments.
L'Est allègue d'abord, par la bouche de
M. de Ménorval, des raisons topographi-
ques. D'après lui, les voies d'accès sont
plus nombreuses dans cette partie de
Paris que partout ailleurs. Ce sont d'abord
les chemins de fer : Vincennes, Paris-
Lyon, Orléans, l'Est, puis Il métropolitain
dont une ligne déjà concédée peut amener
tous les voyageurs de l'ouest et du centre
à Reuilly, c'est-à-dire à 900 mètres au
plus de l'entrée de l'exposition ; puis les
grandes voies carrossables de l'avenue Dau-
mesnil, du faubourg Saint-Antoine, les
boulevards extérieurs, le boulevard Vol-
taire, enfin la Seine qui offrirait le moyen
de transport le plus économique, les ba-
teaux-mouches et les Hirondelles avec pon-
tons de débarquement à la porte de Cha-
renton.
Nous arrivons au terrain même de l'ex-
position. M. de Ménorval le déclare admi-
rable; en quoi je me garderai bien de le
contredire, vu que je ne le connais point.
A ces raisons pratiques la Ligue ajoute
des motifs de l'ordre moral. D'abord une
raison de justice et d'équilibre. Tout est
pour l'Ouest depuis quelque temps; les
fêtes, les revues ont lieu au bois de Bou-
logne; le Marais, le faubourg Antoine, si
florissants au dix-huitième siècle, sont
sacrifiés.
Puis une raison historique. f L'expo-
sition du centenaire doit être marquée
d'un caractère particulier; elle doit avoir
pour théâtre les lieux mêmes où s'est faite
la Révolution. Enfin, dernière considéra-
tion, il serait d'une bonne politique de
montrer à l'Europe, qui n'a vu en 1878
que le Paris riche et fastueux, le Paris
laborieux, le Paris qui peine et produit,
de réunir dans le même lieu l'œuvre et
l'ouvrier, et de tenir les grandes assises
du travail dans le quartier même du tra-
vail.
J'ai essayé de résumer avec le plus
d'exactitude possible les arguments de la
Ligue de l'Est. Ils sont très spécieux, mais
il me semble que l'importance pour elle
n'est pas de prouver que le parc de Saint-
Mandé est un bon emplacement ; il fau-
drait aussi établir qu'il est le meilleur de
tous. Cette critique contradictoire me pa-
rait le point faible du discours de M. de
Ménorval. L'honorable conseiller énu-
mère les divers emplacements propo-
sés jusqu'à ce jour, plaine Saint-Denis,
Gentilly, Tuileries, Champ de Mars, Au-
teuil, Longchamp, Gennevilliers, Courbe-
voie. Peut-être a-t-il fait de vive voix une
démonstration absolument convaincante,
mais le compte-rendu analytique de son
discours contient ces simples mots :
« Tous ces projets sont facilement dé-
montrés impraticables par l'orateur. »
Comme réfutation, c'est peut-être un peu
insuffisant.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
S'il faut en croire une dépêche du Caire,
des nouvelles reçues de Massaouah et de
deux autres points, portent non-seulement
que Khartoum est tombé au pouvoir des
insurgés, mais aussi que Gordon est mort
et non prisonnier.
Ces nouvelles, ajoute la dépêche en
question, « semblent provenir de source
sérieuse N.
Nous nous contentons d'enregistrer ces
renseignements que nous ne sommes pas
actuellement en mesure de contrôler.
-
La Gazette de VAllemagne du Nord publie
une correspondance, datée de Brunswick,
rendant compte d'une conversation privée
que l'empereur eL le chancelier auraient
eue avec deux membres du conseil de
régence. Ceux-ci auraient reçu l'assurance
que le duché de Brunswick serait main-
tenu à l'état de duché et conserverait son
autonomie. L'empereur et le chancelier
auraient ajouté qu'ils ne savaient pas en-
core quel serait le futur due de Bruns-
wick..
Si nous ne vivions pas à une époque ob
les monarchistes eux-mêmes ont perdu H
sens de la monarchie, l'empereur et le
chancelier sauraient, sans se tromper,
quel est le nouveau duc de Bruswick.
puisque le prince légitime est le duc de
Cumberland, dont ils n'ignorent pas l'exis-
tence. Mais la monarchie est si bien une
institution morte que ses partisans sont, à
1 occasionnes premiers à se moquer de ses
lois toutes les fois que leur exécution se-
rait de nature à gêner leurs combinai-
sons.
i. ■
LES ON-DIT
Le départ des volontaires d'un an a eu
lieu hier dans un ordre bruyant — mais
parfait. Pendant toute la journée, les di-
verses gares de la capitale étaient bondées
de voyageurs, accompagnés de leurs pa-
rents, de leurs amis.
Tous les volontaires ont répondu à l'ap-
pel. D'ailleurs, le règlement est des plus
sévères, comme le prouve l'article ci-des-
sous : « Tout homme qui, sans cause lé-
gitime, n'aura pas rejoint, dans le délai
prescrit, la partie du corps auquel il ap*
partient, sera conduit, par la gendarme.
rie, de brigade en brigade. »
A la gare de Lyon, une ovation a été faite
à un élève d'une des écoles supérieures,
qui vient de passer, avec distinction, sa
licence ès lettres. Au moment de partir,
ses camarades ont exécuté le Chant du
Départ, qui a été salué d'une salve de ;
Vzve la Républiquel
S¡i
-S « £
Hier, le comité de direction de l'Exposi-
tion des arts décoratifs a été officiellement
avisé que la clôture de cette exposition,
qui devait avoir lieu le 21 novembre, serait
prorogée au 30 du même mois. Cette nou-
velle a été accueillis par les exposants
d'autant plus favorablement que, la liste
des récompenses étant aujourd'hui con-
nue, les exposants peuvent indiquer, au
moyen de pancartes, les récompenses qui
leur ont été décernées. r
A moins de contre-ordre, la distribution
des récompenses aux lauréats aura lieu le
29 novembre. Cette cérémonie sera bril-
lamment célébrée dans un local approprié
à cet elret au premier étage du palais de
l'Industrie et sera présidée, soit par M. Rou-
vier, ministre. du commerce, t soit par
M. Antonin Proust.
*
# «
Les obsèques de M. Guichard se feront
demain vendredi, à neuf heures. Le corps
sera dirigé de la rue de Suresnes sur la
gare de Lyon, où des discours seront pro-
noncés par MM. Brisson et Paul Bert. L'in-
humation aura lieu à Sens.
fIf'
-*'*'
Le jury de l'Ecole des beaux-arts a dé-
cerné hier les récompenses suivantes :
Concours de médailles antiques (figure
modèle). — 2e médaille : M. Lefebvre,
élève de M. Cavelier; 3e médaille : M. Der-
chen, élève de MM. Cavelier et Millet;
i ro mention : M. Pelgrin; 2e mention :
M. Perroste ; 3° mention : M. Deschamps.
«
& &
L'assemblée générale des membres de
la Société des artistes français aura lieu le
mardi 25 novembre prochain, à une heure,
au palais des Champs-Elysées, salle Saint-
Jean (pavillon Nord-Est), porte 5.
Le renouvellement du comité des qua-
trevingt-dix aura lieu le dimanche 30 no-
vembre, toujours au palais des Champs-
Elysées, salle Saint-Jean, de neuf heures à
quatre heures.
a
Une association d'artistes vient de se
fonder sous le nom de : « Compagnie du
nouveau Salon français ».
Ont seuls droit d'en faire partie les ar-
tistes de nationalité française.
Feuilleton du RAPPEL
DU 14 NOVEMBRE
121
LE
SOI DES MENDIANTS
DEUXIÈME PARTIR
LA MERE
XXXII
.,i t..,
Le eonp droit
Rochegrise resta assis%
Inès le regarda avPJc surprise. -
- Excusez-moi., chère madame, reprit-
il fort doucen^,.^ Mais notre conversa-
tion est loir d'être terminée. Elle com-
mence ^julcment. -,
Reproduction interdite.
Voirîç Rappel da 9 iujUct au 13 nombre.
—Ah! fit Mme Liébert, dont les prunelles
s'allumèrent d'un éclair de colère conte-
nue, après avoir exprimé l'ironie pendant
toute la fin de la scène précédente.
— Je vous serai donc très obligé de vou-
loir bien m'accorder encore quelques mi-
nutes d'attention.
— Soit, monsieur.
Mme Liébert se rassit d'un mouvement
saccadé.
— Toutefois, reprit-elle, je vous serai
obligé d'abréger. j'ai à sortir.
— Excusez-moi, chère madame. Je
sais que j'abuse. mais la question est
plus importante que vous ne semblez vous
en douter. et, d'ailleurs, cette seconde
partie de notre entretien ne durera que
juste autant que vous voudrez. En deux
mots, nous pouvons tomber d'accord, et
je suis certain que cela sera.
— Je vous écoute, monsieur, répliqua
la femme du docteur, d'un air de résigna-
tion polie que démentait l'éclat de son
regard.
Rochegrise prit un temps.
— Madame, continua-t-il enfift d'une
voix très lente, mais très ferme, j'ai com-
mencé par vous prier de m'aider à faire le
bonheur de mon fils en amenant Mlle
Blanche à consent à son mariage avec
Hector, et votre refus me prouve que vous
n'avez pas bien compris jusqu'à quel point
je tenais à ce mariage. Il faut qu'il ait
lieu, je le veux, et ce que je veux se réa-
lise toujours.
- Eh bien, monsieur, agissez. Je ne
vous en empêche pas.
- Si je vais trouver Mlle Blanche, elle
refusera.
- Je le crois.
- Et il ne faut pas qu'elle refuse!
Mme Liébert se tut, supportant le re-
gard du baron.
— D'un mot, vous pouvez la décider.
— Voulez-vous le lui dire?
— Quel mot? Je n'en vois pas qui l'em-
pêcherait de me répondre : « J'aime
Adrien qui m'aime. Notre mariage est con-
venu, et je n'en épouserai pas un autre. »
— Même si vous lui disiez : « Ma chère
enfant, il y va de l'honneur, de l'existence
entière de votre mère. »
— Sa mère?. répéta Mme Liébert, avec
un rire strident.
— Oh ! je ne parle point de Mme veuve
Beithier. dont elle n'est point la IUle.
— Vous savez cela?
— Je sais tout ce qui concerne cette
jeune fille.
r— Le mystère n'est pas grand, répliqua
Inès, toujours du même accent coupant.
Et tout le monde le saura avant peu.
Blanche est une enfant trouvée. qui ne
connaît point ses parents. Cela sera dé-
voilé nécessairement d'ici quelques jours.
- Ses parents.d'autres les connaissent.
-Qui?
- Vous. et moi!
Mme Liébert haussa les épaules.
— Quel est ce logogriphe? fit-elle avec
une énergie que rien ne semblait devoir
démonter.
- C'est toute une histoire.
— Eh bien, contez-la, monsieur le ba-
ron, puisque, d'ailleurs, vous n'êtes venu
ici, aujourd'hui, que pour cela. — Cartes
sur table, voulez-vous? Voici assez long-
temps que nous jouons aux propos inter-
rompus. Je vous écoute.
— J'abats mon jeu! répliqua le baron en
s'inclinant avec une exquise politesse.
Cependant, il eut une imperceptible hé-
sitation de quelques secondes avant d'en-
tamer directement la lutte avec cette
femme, dont le sang-froid terrible, l'habi-
leté profonde connue de lui et la haute
position lui inspiraient une cerîaine ap-
préhension, quoi qu'il en eût et quelles
que fussent son audace et sa résolution
personnels, habituées à braver et à tour-
ner les difficultés qui eussent arrêté tout
autre.
L'homme le plus courageux, le plus sûr
de sa main, ne se trouve pas sur le terrain,
en face de son adversaire, sans ressentir
un peu de froid courir sous sa peau et, au
moment où l'acier des épées se croise, il
y a toujours un petit temps d'arrêt dans le
battement du cœur.
Mme Liébert ne le quittait pas du re-
gard, attendant ce qu'il allait dire, prête
évidemment à la riposte.
— Mlle Blanche, commença-t-il enfin,
d'une voix néanmoins fort calme en ap-
parence, n'a pas d'état civil, cela est vrai,
mais il serait facile de le reconstituer, puis-
que son père et sa mère existent encore.
Mme Liébert ne bougea pas.
On eût juré qu'elle était de pierre.
— Blanche, poursuivit le baron, est la
fille naturelle, — reconnue par son père,
d'ailleurs, — d'une femme appartenant
aux plus hautes classes de la société, par
sa naissance et par son mariage, et d'un
homme, d'un artiste d'une réelle valeur,
à qui la passion insensée qu'il eut jadis
pour une jeune personne, appartenant à
la noblesse espagnole, coûta plus que la
vie, puisqu'il lui dut d'être renfermé pen-
dant vinat ans, et torturé comme fou.
Il s'arrêta; il attendait une réponse,
une manifestation quelconque de celle à
qui il s'adressait, et qu'il désignait si clai-
rement.
La réponse ne se fit pas attendre.
- Inutile d'aller plus loin, monsieur le
baron, répliqua Inès de la voix dure et
légèrement stridente qui sortait de ses
lèvres quand la colère, la haine ou la ter-
reur agitait son âme. Je puis terminer,'
pour vous, ce récit qui vous embarrasse
fort.
— C'est que vous m'avez compris alors.
— Parfaitement compris. et, depuis
hier, je m'attendais à cette explication.
bien que, croyant avoir affaire à un galant
homme, à un homme du monde, à un ami,
du docteur Liébert, je sois fort surprise,,
je l'avoue, que vous osiez tenir un pareil
langage et aborder un pareil sujet avec
une femme telle que moi. que sa vie
entière devrait mettre à l'abri des odieux
soupçons dont vous vous faites, dans un
but que je ne m'explique pas, le complai-
sant porte-voix.
À.MATTUBY*
•{A suivre,) r f
.ADMINISTRATION !
!8, RUE DE VALOISJ .fa g
-
ABONNEMENTS
ÏAEIS
rro'l's mois in 1)
iXJûûis. 20 »
DEPARTEMENTS1 *
Trois mois. 13 50. ,*■
SIX MOI S. 22YJ|
A3RESSER LETTRES et MANDAIS :
., f
A M. ERNEST LEFÈVRS;
ADMIMSTEAIEIIR.GÉRAOT 1
4.
j. e~~-~
- »
HEDAGTIOIT
] ^'adresser «LU Secrétaire ae la Rétlaciiatt,
He & à 6 heures du soir
- 18, HUE DE VALOIS» 18
les HUffiiiscriis non insérés ne seront jas pcsdiig
ANNONCES
aH, Ch. IAGRANGE, CERF et ce
6, race de la Bourse, 6
LA JUSTICE
La justice est boiteuse, elle vient à pas lents,
Mais elle vient.
Soit; mais si, quand elle arrive, ceux
qui l'attendaient ont eu le temps de
courir?
Savez-vous combien, dans la der-
rière année judiciaire, du 1" septem-
bre 1883 au 30 août 1884, il a été ins-
crit d'affaires au rôle de première ins-
tance? 139,624. Et savez-vous combien
il a été rendu de jugements? 71,300.
C'est donc 68,324 affaires qui sont res-
tées en souffrance, c'est-à-dire une sur
deux.
i6,340 affaires sont allées en appel.
Les cours ont rendu 9,159 arrêts. L'ar-
riéré est donc de 7,181 procès. Encore
la moitié.
Les tribunaux ne jugent et ne peu-
vent juger chaque année que la moitié
des différends qui leur sont soumis, il
en résulte, fait justement observer
M. Pierre Aubry, que tout plaideur,
quels que soient l'urgence et l'intérêt de
sa cause, devra d'abord attendre un an
avant que son affaire sorte du rôle
et soit classée, "que c'est seulement au
cours de la seconde année qu'il lui sera
loisible de prendre rang, que son tour
arrivera donc après dix-huit ou vingt
mois d'attente, et qu'avec autant de
délais en appel, sa patience aura à
- - -
s'épuiser pendant trois ou quatre ans.
Que faire? La solution semble fa-
cile : si la moitié seulement des procès
peuvent être jugés dans l'année, c'est
qu'il n'y a que la moitié des juges et
des tribunaux nécessaires ; on n'a donc
qu'à doubler le nombre des tribunaux
et des juges.
Voici la réponse : la loi du 30 août
1883 a supprimé neuf cours d'appel,
cent quatrevingt-dix-huit conseillers et
deux cent vingt juges, - et quelle a été
la conséquence de cette suppression?
c'est que non-seulement le nombre des
arriérés a cessé de s'accroître, mais
qu'il a légèrement diminué.
La conclusion logique serait donc
qu'au lieu de doubler le nombre des
tribunaux et des juges, il faut le ré-
duire encore.
Mais cette conclusion serait nisquée.
Dans la nouveauté de la réforme ju-
diciaire, les juges, moins nombreux,
nt eu plus d'activité, et l'arriéré s'est
amoindri de quelques milliers de causes.
Mais c'est un médiocre progrès que de
n'avoir plus que 68,324 procès à faire
le pied de grue. Et n'est-il pas à crain-
dre que, lorsqu'ils ne seront plus sous
le coup de fouet de la réforme et dans
l'ardeur du premier mouvement, lors-
que, malgré leur zèle, ils se verront
débordés par la mer montante des dos-
siers, les magistrats nouveaux ou re-
nouvelés se découragent, qu'on re-
tombe dans la résignation et l'inertie
d'auparavant, et que l'arriéré recom-
mence à croître et à enlaidir? Alors,
moins il y aurait de tribunaux et de
juges, plus il y aurait de décourage-
ment.
r La solution n'est donc pas plus dans
la diminution des juges et des tribunaux
que dans leur augmentation.
Un des moyens d'atténuer, sinon de
supprimer l'arriéré, ce serait de faire
ce qui avait été proposé en 1881 : d'é-
tendre la compétence des juges de paix.
Les tribunaux se déchargeraient sur
eux de milliers de petites causes qui
les alourdissent et les ralentissent. Que
de misérables chicanes pour lesquelles
il faut entendre des douzaines de té-
moins, et qui traînent après elles des
enquêtes, contre-enquêtes, expertises,
etc.! Débarrassés de ces procès misé-
rables, les tribunaux auraient du temps
pour les procès sérieux.
Si l'extension de la justice de paix ne
suffit pas, si l'on veut pas des assises
correctionnelles, également proposées
il y a trois ans, qu'on fasse autre chose,
mais qu'on fasse quelque chose. Il faut
en finir avec cet arriéré qui déshonore
la justice et qui est un double attentat
à l'égalité et à l'humanité.
Attentat à l'égalité, Car quelle éga-
lité y a-t-il entre les plaideurs riches
qui peuvent patienter trois ou quatre
ans sans retrancher un plat de leur dî-
ner — et les pauvres gens qui atten-
dent du gain de leur procès leur bouchée
de pain?
Attentat à l'humanité. Supposez un
ouvrier qui plaide contre un patron ou
contre une compagnie pour une blessure
qui l'a mis dans l'incapacité de gagner
sa vie. Quatre ans, c'est sa mort de
faim et celle de ses enfants.
AUGUSTE VACQUERIE.
COULISSES DES CHAMBRES
* La discussion du budget de 1885 doit
s'ouvrir aujourd'hui devant la Chambre.
La commission, suivant l'usage, a arrêté
l'ordre qu'elle proposerait à la Chambre
de suivre pour ce débat. Après la discus -
sion générale, les budgets des ministères
seront examinés dans l'ordre suivant ;
1° Agriculture.
2° Forêts.
3° Justice.
4° Cultes.
5° Légion d'honneur.
6° Guerre.
7° Marine.
8° Travaux publics.
9° Chemins de fer de l'Etat.
10° Etudes et travaux de chemins de
fer.
11" Postes et télégraphes.
12° Instruction publique.
13° Beaux-arts.
14° Intérieur.
15° Gouvernement de l'Algérie.
16° Affaires étrangères.
17° Commerce.
18° Colonies.
190 Finances.
20° Invalides de la marine.
21° Imprimerie nationale.
Après cette série, on terminera par la
discussion du budget des recettes et par
l'examen du budget sur ressources extra-
ordinaires.
La discussion durera environ trois se-
maines et en outre il faut prévoir qu'elle
sera interrompue la semaine prochaine
par le débat sur les crédits du Tonkin et
par l'interpellation de M. Tony Révillon
sur les moyens de remédier à la crise
parisienne. En outre, si elle n'est pas ter-
minée au moment du dépôt du rapport
sur la réforme électorale du Sénat, elle
devra nécessairement être suspendue à
cette époque pour permettre de voter cette
réforme de manière à pouvoir l'appliquer
lors du renouvellement sénatorial du mois
de janvier prochain. 1
Le nombre des orateurs inscrits pour la
discussion générale du budget est très
considérable. La liste ne renferme pas
moins de quinze noms, parmi lesquels,
dans l'ordre d'inscription : MM. Loubet,
Amagat, Daynaud, Hérault, Ribot, de
Soubeyran,. Wilson, d'Aillières, Raoul
Duval.
Nous avons dit que la commission du
budget était saisie d'une question assez
grave : la régularisation des dépenses ef-
fectuées par le ministère de la guerre en
1882, sous l'administration du général
Billot, et dépassant les crédits correspon-
dants inscrits au budget.
Ces excédents de dépenses s'élèvent à
cinq millions et sont afférents, pour la
majeure partie, au payement de la solde
et aux frais d'opérations en Algérie. M.
Casimir-Perier, sous-secrétaire d'Etat à la
guerre, a été entendu hier à ce sujet par
la commission du budget. L'administra-
tion actuelle étant étrangère à ces irrégu-
larités, il ne s'agissait pas de mettre en
jeu sa responsabilité, mais d'obtenir des
explications rétrospectives, qui permissent
à la commission de se prononcer en con-
naissance de cause. Le sous-secrétaire
d'Etat a reconnu l'irrégularité da procédé
financier, mais a plaidé les circonstances
atténuantes en faveur de l'administration
de 1882.
Mais la commission, sur la proposition
de MM. Ballue et Wilson, a, par 6 voix
contre 4, refusé de régulariser les dépen-
ses en question. Elle proposera à la Cham-
bre de rejeter la demande de 5 millions.
La question va revenir naturellement
devant la cour des comptes. Mais il im-
porte de faire observer que les dépenses
ont été régulièrement payées par les
comptables du Trésor, qui ont versé les
sommes demandées sur réquisition, com-
me cela se pratique normalement. La cour
des comptes ne pourra que critiquer le
procédé financier consistant à dépasser
les crédits accordés par la loi, c'est-à-dire
blâmer la conduite de celui qui a ordon-
nancé la dénense.
La question reviendra une dernière fois
devant la Chambre lors de la vérification
des comptes de l'exercice 1882. La Cham-
bre aura alors à décider si elle régularise
après coup les dépenses, ou si elle les
laisse à la charge du général Billot, le mi-
nistre responsable de l'irrégularité.
Le projet de loi sur la réforme électo-
rale du Sénat, voté au Luxembourg, a
été déposé hier sur le bureau de la Cham-
bre par le ministre de l'intérieur. La com-
mission chargée d'examiner ce projet sera
nommée samedi prochain.
Deux amendements sont déjà déposés,
l'un par M. Maxime Lecomte (du Nord) et
l'autre par M. Joseph Fabre.
L'amendement de M. Fabre s'applique
exclusivement à l'échelle de proportion-
nalité.des délégués; il porte que les con-
seils municipaux éliront :
1 délégué dans les communes de 2,000
habitants et au-dessous ;
2 délégués dans les communes de 2,001
à 4,000 habitants ;
Et ainsi de suite avec addition de 1 dé-
légué par 2,000 ou fraction de 2,000 habi-
tants jusqu'au chiffre de 20,000 habitants.
A partir de 20,000 habitants, l'augmen-
tation sera de 1 délégué par 5,000 habi-
tants en plus ou fraction de 5,000 jus-
qu'au chiffre de 50,000.
A partir de 50,000, l'augmentation sera
de 1 délégué par 10,000 habitants en plus
ou fraction de 10,000, jusqu'au chiffre de
100,000.
A partir de 100,000, l'augmentation sera
de 1 délégué par 50,000 habitants en p'us
ou fraction de 50,000.
Dans ce système, Paris aurait 63 délé-
gués, Lyon et Marseille 27, Bordeaux 24,
Lille 23, Toulouse, Nantes, Saint-Etienne,
Rouen et le Havre 22, etc.
---
Li agence tlavas nous annonce aujour-
d'hui que les Chinois ont attaqué nos po-
sitions à Kélung et qu'ils ont été repoussés
avec des pertes considérables; mais l'a-
gence Havas ajoute qu'elle n'est pas en
mesure de dire si cette nouvelle n'est pas
une simple confirmation de l'attaque ten-
tée par les Chinois le 7 de ce mois ; at-
taque que nous avons déjà racontée.
"'-
,. <1-
Le Times publie une correspondance de
Fou-Tchéou, dont on trouvera plus loin
d'intéressants extraits. Il paraît que, dans
cette ville, les rapports sont très tendus
entre la population civile et les milices
chinoises, des rixes éclatent à chaque
instant. De plus, le gouvernement chinois
parait être fort embarrassé pour se pro-
curer de l'argent, « la population lui est
hostile, ajoute le correspondant anglais,
et la levée des impôts s'effectue à grand'-
peine. »
Toutes ces raisons contribuent à expli-
quer les bruits de paix prochaine qui ont
pris tant de consistance depuis quelques
jours. A
rwi lu. 1 » ,. ■ 11^ — iwjwi■ L !■
Il est facile de constater que l'épidémie
cholérique qui est venue nous visiter de-
puis peu de jours est, dès à présent,
entrée dans sa période de décroissance.
Les chiffres officiels annoncent pour la
journée du mardi 11 novembre un total
de 89 décès cholériques, ce qui est, re-
marquons-le encore une fois en passant,
un nombre infinitésimal, eu égard à la
population de Paris, qui est de 2 millions
200,000 habitants.
Pour la journée d'hier, mercredi 12 no-
vembre, les chiffres officiels qui nous par-
viennent indiquent, de minuit à six heures
du soir (soit 18 heures ou trois quarts de
journée) 43 décès cholériques. Augmen-
tons ce total de son tiers pour avoir la
moyenne de la journée, nous obtenons ce
résultat : 57 décès.
La mortalité cholérique a donc baissé
de plus d'un tiers dans l'espace d'une
seule journée, ce qui est énorme et pré-
sage la fin très prochaine de l'épidémie.
——————— ———————.
, A LA CHAMBRE
Séance d'affaires en attendant l'in-
terpellation annoncée sur la Réunion
et une autre, devenue indispensable,
sur les mandats fictifs. C'est du vinage
que l'on parle t aujourd'hui, et, malgré
le talent incontestable du ministre du
commerce, la Chambre a repoussé le
projet autorisant l'addition de l'alcool
jusqu'à 15 degrés. En fait, c'est inex-
plicable, puisque les traités conclus
avec l'étranger autorisent l'importation
de vins ainsi remontés par des alcools
allemands. La Chambre, qui obéit ici
à son instinct protectionniste, fait donc
de la protection à rebours. C'est l'étran-
ger qu'elle protège, et M. Rouvier l'a
démontré.
En résumé, d'ailleurs, et si les traités
n'existaient pas, il est certain qu'il se-
rait inutile d'autoriser le vinage au-delà
de 12 degrés, nos vins de France n'at-
teignant cette richesse alcoolique que
très exceptionnellement. Mais tant que
des vins survinés nous arriveront par
nos frontières, il faut au moins pouvoir
leur faire concurrence, et c'est ce que la
Chambre n'a pas compris.
A. GAULIER.
— ♦ ■-
LA LIGUE DE L'EST
Je commence par déclarer que mon
opinion n'est pas faite sur l'emplacement
de la future exposition universelle. Pour
ma commodité personnelle, je préférerais
qu'elle se fît place Blanche ou place Pi-
galle, mais ces hypothèses n'ayant pas
même été discutées, je suis prêt à me ral-
lier à tel autre quartier présentant les con-
ditions requises. Une ligue s'est formée
sous le nom de Ligue des intérêts de
l'Est, dans le but de faire adopter le bois
de Saint-Mandé; ses adhérents se sont
réunis en une séance où M. de Ménorval,
conseiller municipal, a prononcé un dis-
cours fort applaudi. On annonce d'autres
conférences, l'une notamment au Cirque-
d'Hiver, sous la présidence de noms con-
nus. Bref, l'Est prêche avec éloquence et
conviction pour son saint, et notre impar-
tialité nous ifait un devoir de reproduire
au moins ses arguments.
L'Est allègue d'abord, par la bouche de
M. de Ménorval, des raisons topographi-
ques. D'après lui, les voies d'accès sont
plus nombreuses dans cette partie de
Paris que partout ailleurs. Ce sont d'abord
les chemins de fer : Vincennes, Paris-
Lyon, Orléans, l'Est, puis Il métropolitain
dont une ligne déjà concédée peut amener
tous les voyageurs de l'ouest et du centre
à Reuilly, c'est-à-dire à 900 mètres au
plus de l'entrée de l'exposition ; puis les
grandes voies carrossables de l'avenue Dau-
mesnil, du faubourg Saint-Antoine, les
boulevards extérieurs, le boulevard Vol-
taire, enfin la Seine qui offrirait le moyen
de transport le plus économique, les ba-
teaux-mouches et les Hirondelles avec pon-
tons de débarquement à la porte de Cha-
renton.
Nous arrivons au terrain même de l'ex-
position. M. de Ménorval le déclare admi-
rable; en quoi je me garderai bien de le
contredire, vu que je ne le connais point.
A ces raisons pratiques la Ligue ajoute
des motifs de l'ordre moral. D'abord une
raison de justice et d'équilibre. Tout est
pour l'Ouest depuis quelque temps; les
fêtes, les revues ont lieu au bois de Bou-
logne; le Marais, le faubourg Antoine, si
florissants au dix-huitième siècle, sont
sacrifiés.
Puis une raison historique. f L'expo-
sition du centenaire doit être marquée
d'un caractère particulier; elle doit avoir
pour théâtre les lieux mêmes où s'est faite
la Révolution. Enfin, dernière considéra-
tion, il serait d'une bonne politique de
montrer à l'Europe, qui n'a vu en 1878
que le Paris riche et fastueux, le Paris
laborieux, le Paris qui peine et produit,
de réunir dans le même lieu l'œuvre et
l'ouvrier, et de tenir les grandes assises
du travail dans le quartier même du tra-
vail.
J'ai essayé de résumer avec le plus
d'exactitude possible les arguments de la
Ligue de l'Est. Ils sont très spécieux, mais
il me semble que l'importance pour elle
n'est pas de prouver que le parc de Saint-
Mandé est un bon emplacement ; il fau-
drait aussi établir qu'il est le meilleur de
tous. Cette critique contradictoire me pa-
rait le point faible du discours de M. de
Ménorval. L'honorable conseiller énu-
mère les divers emplacements propo-
sés jusqu'à ce jour, plaine Saint-Denis,
Gentilly, Tuileries, Champ de Mars, Au-
teuil, Longchamp, Gennevilliers, Courbe-
voie. Peut-être a-t-il fait de vive voix une
démonstration absolument convaincante,
mais le compte-rendu analytique de son
discours contient ces simples mots :
« Tous ces projets sont facilement dé-
montrés impraticables par l'orateur. »
Comme réfutation, c'est peut-être un peu
insuffisant.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
S'il faut en croire une dépêche du Caire,
des nouvelles reçues de Massaouah et de
deux autres points, portent non-seulement
que Khartoum est tombé au pouvoir des
insurgés, mais aussi que Gordon est mort
et non prisonnier.
Ces nouvelles, ajoute la dépêche en
question, « semblent provenir de source
sérieuse N.
Nous nous contentons d'enregistrer ces
renseignements que nous ne sommes pas
actuellement en mesure de contrôler.
-
La Gazette de VAllemagne du Nord publie
une correspondance, datée de Brunswick,
rendant compte d'une conversation privée
que l'empereur eL le chancelier auraient
eue avec deux membres du conseil de
régence. Ceux-ci auraient reçu l'assurance
que le duché de Brunswick serait main-
tenu à l'état de duché et conserverait son
autonomie. L'empereur et le chancelier
auraient ajouté qu'ils ne savaient pas en-
core quel serait le futur due de Bruns-
wick..
Si nous ne vivions pas à une époque ob
les monarchistes eux-mêmes ont perdu H
sens de la monarchie, l'empereur et le
chancelier sauraient, sans se tromper,
quel est le nouveau duc de Bruswick.
puisque le prince légitime est le duc de
Cumberland, dont ils n'ignorent pas l'exis-
tence. Mais la monarchie est si bien une
institution morte que ses partisans sont, à
1 occasionnes premiers à se moquer de ses
lois toutes les fois que leur exécution se-
rait de nature à gêner leurs combinai-
sons.
i. ■
LES ON-DIT
Le départ des volontaires d'un an a eu
lieu hier dans un ordre bruyant — mais
parfait. Pendant toute la journée, les di-
verses gares de la capitale étaient bondées
de voyageurs, accompagnés de leurs pa-
rents, de leurs amis.
Tous les volontaires ont répondu à l'ap-
pel. D'ailleurs, le règlement est des plus
sévères, comme le prouve l'article ci-des-
sous : « Tout homme qui, sans cause lé-
gitime, n'aura pas rejoint, dans le délai
prescrit, la partie du corps auquel il ap*
partient, sera conduit, par la gendarme.
rie, de brigade en brigade. »
A la gare de Lyon, une ovation a été faite
à un élève d'une des écoles supérieures,
qui vient de passer, avec distinction, sa
licence ès lettres. Au moment de partir,
ses camarades ont exécuté le Chant du
Départ, qui a été salué d'une salve de ;
Vzve la Républiquel
S¡i
-S « £
Hier, le comité de direction de l'Exposi-
tion des arts décoratifs a été officiellement
avisé que la clôture de cette exposition,
qui devait avoir lieu le 21 novembre, serait
prorogée au 30 du même mois. Cette nou-
velle a été accueillis par les exposants
d'autant plus favorablement que, la liste
des récompenses étant aujourd'hui con-
nue, les exposants peuvent indiquer, au
moyen de pancartes, les récompenses qui
leur ont été décernées. r
A moins de contre-ordre, la distribution
des récompenses aux lauréats aura lieu le
29 novembre. Cette cérémonie sera bril-
lamment célébrée dans un local approprié
à cet elret au premier étage du palais de
l'Industrie et sera présidée, soit par M. Rou-
vier, ministre. du commerce, t soit par
M. Antonin Proust.
*
# «
Les obsèques de M. Guichard se feront
demain vendredi, à neuf heures. Le corps
sera dirigé de la rue de Suresnes sur la
gare de Lyon, où des discours seront pro-
noncés par MM. Brisson et Paul Bert. L'in-
humation aura lieu à Sens.
fIf'
-*'*'
Le jury de l'Ecole des beaux-arts a dé-
cerné hier les récompenses suivantes :
Concours de médailles antiques (figure
modèle). — 2e médaille : M. Lefebvre,
élève de M. Cavelier; 3e médaille : M. Der-
chen, élève de MM. Cavelier et Millet;
i ro mention : M. Pelgrin; 2e mention :
M. Perroste ; 3° mention : M. Deschamps.
«
& &
L'assemblée générale des membres de
la Société des artistes français aura lieu le
mardi 25 novembre prochain, à une heure,
au palais des Champs-Elysées, salle Saint-
Jean (pavillon Nord-Est), porte 5.
Le renouvellement du comité des qua-
trevingt-dix aura lieu le dimanche 30 no-
vembre, toujours au palais des Champs-
Elysées, salle Saint-Jean, de neuf heures à
quatre heures.
a
Une association d'artistes vient de se
fonder sous le nom de : « Compagnie du
nouveau Salon français ».
Ont seuls droit d'en faire partie les ar-
tistes de nationalité française.
Feuilleton du RAPPEL
DU 14 NOVEMBRE
121
LE
SOI DES MENDIANTS
DEUXIÈME PARTIR
LA MERE
XXXII
.,i t..,
Le eonp droit
Rochegrise resta assis%
Inès le regarda avPJc surprise. -
- Excusez-moi., chère madame, reprit-
il fort doucen^,.^ Mais notre conversa-
tion est loir d'être terminée. Elle com-
mence ^julcment. -,
Reproduction interdite.
Voirîç Rappel da 9 iujUct au 13 nombre.
—Ah! fit Mme Liébert, dont les prunelles
s'allumèrent d'un éclair de colère conte-
nue, après avoir exprimé l'ironie pendant
toute la fin de la scène précédente.
— Je vous serai donc très obligé de vou-
loir bien m'accorder encore quelques mi-
nutes d'attention.
— Soit, monsieur.
Mme Liébert se rassit d'un mouvement
saccadé.
— Toutefois, reprit-elle, je vous serai
obligé d'abréger. j'ai à sortir.
— Excusez-moi, chère madame. Je
sais que j'abuse. mais la question est
plus importante que vous ne semblez vous
en douter. et, d'ailleurs, cette seconde
partie de notre entretien ne durera que
juste autant que vous voudrez. En deux
mots, nous pouvons tomber d'accord, et
je suis certain que cela sera.
— Je vous écoute, monsieur, répliqua
la femme du docteur, d'un air de résigna-
tion polie que démentait l'éclat de son
regard.
Rochegrise prit un temps.
— Madame, continua-t-il enfift d'une
voix très lente, mais très ferme, j'ai com-
mencé par vous prier de m'aider à faire le
bonheur de mon fils en amenant Mlle
Blanche à consent à son mariage avec
Hector, et votre refus me prouve que vous
n'avez pas bien compris jusqu'à quel point
je tenais à ce mariage. Il faut qu'il ait
lieu, je le veux, et ce que je veux se réa-
lise toujours.
- Eh bien, monsieur, agissez. Je ne
vous en empêche pas.
- Si je vais trouver Mlle Blanche, elle
refusera.
- Je le crois.
- Et il ne faut pas qu'elle refuse!
Mme Liébert se tut, supportant le re-
gard du baron.
— D'un mot, vous pouvez la décider.
— Voulez-vous le lui dire?
— Quel mot? Je n'en vois pas qui l'em-
pêcherait de me répondre : « J'aime
Adrien qui m'aime. Notre mariage est con-
venu, et je n'en épouserai pas un autre. »
— Même si vous lui disiez : « Ma chère
enfant, il y va de l'honneur, de l'existence
entière de votre mère. »
— Sa mère?. répéta Mme Liébert, avec
un rire strident.
— Oh ! je ne parle point de Mme veuve
Beithier. dont elle n'est point la IUle.
— Vous savez cela?
— Je sais tout ce qui concerne cette
jeune fille.
r— Le mystère n'est pas grand, répliqua
Inès, toujours du même accent coupant.
Et tout le monde le saura avant peu.
Blanche est une enfant trouvée. qui ne
connaît point ses parents. Cela sera dé-
voilé nécessairement d'ici quelques jours.
- Ses parents.d'autres les connaissent.
-Qui?
- Vous. et moi!
Mme Liébert haussa les épaules.
— Quel est ce logogriphe? fit-elle avec
une énergie que rien ne semblait devoir
démonter.
- C'est toute une histoire.
— Eh bien, contez-la, monsieur le ba-
ron, puisque, d'ailleurs, vous n'êtes venu
ici, aujourd'hui, que pour cela. — Cartes
sur table, voulez-vous? Voici assez long-
temps que nous jouons aux propos inter-
rompus. Je vous écoute.
— J'abats mon jeu! répliqua le baron en
s'inclinant avec une exquise politesse.
Cependant, il eut une imperceptible hé-
sitation de quelques secondes avant d'en-
tamer directement la lutte avec cette
femme, dont le sang-froid terrible, l'habi-
leté profonde connue de lui et la haute
position lui inspiraient une cerîaine ap-
préhension, quoi qu'il en eût et quelles
que fussent son audace et sa résolution
personnels, habituées à braver et à tour-
ner les difficultés qui eussent arrêté tout
autre.
L'homme le plus courageux, le plus sûr
de sa main, ne se trouve pas sur le terrain,
en face de son adversaire, sans ressentir
un peu de froid courir sous sa peau et, au
moment où l'acier des épées se croise, il
y a toujours un petit temps d'arrêt dans le
battement du cœur.
Mme Liébert ne le quittait pas du re-
gard, attendant ce qu'il allait dire, prête
évidemment à la riposte.
— Mlle Blanche, commença-t-il enfin,
d'une voix néanmoins fort calme en ap-
parence, n'a pas d'état civil, cela est vrai,
mais il serait facile de le reconstituer, puis-
que son père et sa mère existent encore.
Mme Liébert ne bougea pas.
On eût juré qu'elle était de pierre.
— Blanche, poursuivit le baron, est la
fille naturelle, — reconnue par son père,
d'ailleurs, — d'une femme appartenant
aux plus hautes classes de la société, par
sa naissance et par son mariage, et d'un
homme, d'un artiste d'une réelle valeur,
à qui la passion insensée qu'il eut jadis
pour une jeune personne, appartenant à
la noblesse espagnole, coûta plus que la
vie, puisqu'il lui dut d'être renfermé pen-
dant vinat ans, et torturé comme fou.
Il s'arrêta; il attendait une réponse,
une manifestation quelconque de celle à
qui il s'adressait, et qu'il désignait si clai-
rement.
La réponse ne se fit pas attendre.
- Inutile d'aller plus loin, monsieur le
baron, répliqua Inès de la voix dure et
légèrement stridente qui sortait de ses
lèvres quand la colère, la haine ou la ter-
reur agitait son âme. Je puis terminer,'
pour vous, ce récit qui vous embarrasse
fort.
— C'est que vous m'avez compris alors.
— Parfaitement compris. et, depuis
hier, je m'attendais à cette explication.
bien que, croyant avoir affaire à un galant
homme, à un homme du monde, à un ami,
du docteur Liébert, je sois fort surprise,,
je l'avoue, que vous osiez tenir un pareil
langage et aborder un pareil sujet avec
une femme telle que moi. que sa vie
entière devrait mettre à l'abri des odieux
soupçons dont vous vous faites, dans un
but que je ne m'explique pas, le complai-
sant porte-voix.
À.MATTUBY*
•{A suivre,) r f
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