Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1887-06-05
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 05 juin 1887 05 juin 1887
Description : 1887/06/05 (N6295). 1887/06/05 (N6295).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7539960m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/11/2012
FrCZ83 - Dimanche 5 Juin 1887 fcs ~Tï~èr~T~ t ""if 5 e. 47 Prairial an 95 - Ne 6295
ZBMrarsTiiÂnc:: ■
18, RUE DE VAEOIS, iS -
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PARIS
Trois mois 10 »
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Sixmois. 27 a
Adresser lettres et mandats
À. M. ERNEST LEFÈVRE ?
AD:MINIS'rRA.TEtJl\.GÉRAN'r
-"
REDACTION.,
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction.
; r De 4 a 6 heures du soir
r Î8, RUE PE VAIiOTS, 18 ",
» -
Les ir, ainiscrits non iuscres tic seront pas relHiuc
-ANLI ONCES ;
fif. Ch. LAGRANGE, CERF et Co:
6, place de la Bourse, 6
tA CLOTURE DE LA SESSION
La Paix conseille au gouvernement
- de prononcer, aussitôt que l'expiration
du délai fixé par la Constitution va le
lui permettre, la clôture de la session
actuelle des Chambres. Et je ne saurais
me dissimuler que cette intervention
de notre honorable et très circonspect
confrère donne à cette mesure, à la-
quelle j'entendais déjà faire des allu-
sions que je ne voulais pas croire sé-
rieuses, un caractère très menaçant de
probabilité.
Je n'ai rien à dire sur la question de
légalité. Il est malheureusement trop
vrai que la loi du 16 juillet 1875 sur
les rapports des pouvoirs publics porte
que les deux Chambres doivent être
réunies au moins cinq mois chaque an-
née, et ne leur donne pas droit à un
jour de plus. La session ayant été ou-
verte le 11 janvier, les cinq mois seront
complets dans huit jours.
Je rends en outre cette justice à la
Paix que, dans sa pensée, cette clôture
prématurée de la session actuelle serait
compensée par l'avancement de la ses-
sion d'automne.
Les raisons qu'elle donne, c'est que
de nouveaux ministres ont besoin de
quelque temps pour prendre pleine
possession des affaires de leurs dépar-
tements, pour préparer les projets qu'ils
auront à déposer, pour faire connais-
sance avec leur personnel administratif
et étudier le fonctionnement des ser-
vices, etc. A son avis, la réforme bud-
gétaire et la recherche des économies,
qui doivent être l'objet surtout de la
aollicitude du cabinet, ne peuvent guère
être poursuivies avec toute la vigilance
qu'elles réclament si les ministres sont
obligés de passer leur temps à la
Chambre et si leur attention est cons-
tamment détournée vers le palais
Bourbon.
Mais la Paix oublie les dangers, bien
supérieurs à ces légers inconvénients,
qu'entraînerait la mesure qu'elle de-
mande.
D'abord, la loi militaire va commen-
cer à être discutée aujourd'hui ou, au
plus tard, lundi. Veut-elle que, à peine
àbordée, on la remette à l'automne?
Croit-elle que le pays accepterait d'un
eœur tranquille un pareil manque-
ment à la parole qu'a déjà, par
deux fois, donnée le gouvernement?
Autant aurait valu, alors, adopter la
motion de M. Freppel. — Mais, dit
notre confrère, la discussion traînera
en longueur et ne pourra, en aucun
cas, être terminée avant les vacances.
— Qu'en sait-il? D'ailleurs, plus elle
sera longue, plus ce serait une raison
pour l'avancer le plus possible avant la
séparation; car, à l'automne, on sera
accaparé par le budget, et tout ce qui
ne sera pas question financière sera
impitoyablement écarté.
Quant au budget, l'argument est bien
plus fort encore. S'il n'était présenté
qu'à la rentrée, quand la commission
l'étudierait-elle? C'est justement à cause
de lui qu'il faut que la Chambre ne se
sépare pas, de façon qu'elle puisse en
être saisie dès cette session et que la
commission puisse travailler pendant
les mois de vacances. On objecte que le
gouvernement a besoin de quiétude
pour chercher ses économies ? Je ré-
ponds que puisqu'il s'est engagé à en
faire pour au moins soixante millions,
c'est qu'apparemment il sait déjà où
il ira les prendre.
Je laisse de côté d'autres questions,
non dénuées de gravité pourtant. Par
exemple, le Métropolitain. A quand se-
rait-il remis, si la session était close?
Son exécution, qui doit être accomplie
pour l'Exposition, ne serait-elle pas
évidemment compromise? Que devrait
penser la population parisienne d'un
gouvernement qui, la blessant à la fois
dans ses intérêts moraux et dans ses
intérêts matériels, viendrait do faire
ajourner au Sénat la loi départemen-
tale et empêcherait de venir devant la
Chambre le vote des grands travaux ?
Par dessus tout, une considération
politique domine.
On comprendrait qu'un cabinet,
accueilli par une explosion de satis-
faction, demandât à la Chambre le
crédit de quelques jours de recueille-
ment. Alors il demeurerait, devant le
pays, fort de la confiance qu'elle lui
aurait accordée, et la séparation mo-
mentanée du Parlement ne serait qu'un
signe de plus de l'entente qui existe.
rait entre lui et le gouvernement.
Mais ce n'est pas le cas présent. Ce
n'est pas avec des cris d'enthousiasme
que le cabinet actuel a été reçu. Il n'a
réuni tout juste que la moitié de la ma-
jorité républicaine. Sa situation est une
des plus précaires qu'on ait vues. Il a
contre lui des préventions qu'il doit
mettre son honneur à dissiper, mais
qui sont encore dans toute leur force.
Dans ces conditions, la clôture- im-
posée — de la session ne serait qu'un
moyen de se débarrasser des Chambre?.
Elle aurait beau être légale, elle n'en se
rait pas moins illégitime. Ce serait une
véritable usurpation sur le droit des
représentants du pays. Ce serait la
condamnation morale du pouvoir qui
y aurait recours.
ERNEST LEFÈVRB.
COULISSES DES CHAMBRES
Le nouveau ministre de la guerre s'est
rendu hier à la commission de l'armée
pour donner son avis sur le projet mi-
litaire qui va venir en discussion devant
la Chambre.
Le général Ferron a fait une brève
déclaration sur les deux premiers titres
du projet, ceux qui figurent à l'ordre du
jour actuel de la Chambre, le titre Ier re-
latif au recrutement et le titre II relatif à
l'état des sous-officiers.
D'une manière générale le ministre ac-
cepte les dispositions de ces deux titres.
Incidemment à propos de l'article 17 re-
latif aux dispensés à titre de soutiens de
famille, le ministre a annoncé qu'il allait
demander à la Chambre l'autorisation
d'appeler pour quelques jours sous les
drapeaux les dispensés de cet ordre au
nombre de 250,000, pour leur donner
l'instruction militaire. L'appel se fera eh
deux fois par séries de 125,000 hommes.
Un crédit devra être demandé pour cou-
vrir la dépense résultant de cet appel.
Le ministre a répété d'autre part ce
qu'il avait dit à la tribune, le jour de
l'entrée en fonctions du nouveau cabinet,
à savoir qu'il était depuis longtemps par-
tisan du service de trois ans et que, sans
le dépôt du projet de loi, il l'aurait réalisé
par voie administrative.
Sur la question des sous-officiers, le
ministre a présenté quelques observations
intéressantes. Le projet a pour but d'a-
méliorer la condition des sous-officiers
surtout en leur assurant des avantages
pécuniaires. Le ministre ne croit pas que
ce soit par des mesures de cet ordre qu'il
faille agir. Selon lui, la loi de 1881 a déjà
fait beaucoup au point de vue pécuniaire.
Ce qu'il faut, c'est relever la situation
matérielle et morale des sous-officiers.
En ce qui le concerne personnellement,
le général Ferron a l'intention de deman-
der immédiatement à la commission du
budget les moyens de donner aux sous-
officiers une tenue de ville en drap d'offi-
cier avec l'épée. Il va s'occuper des
moyens d'organiser dans chaque régiment
des mess de sous-officiers; enfin il va
étudier les modifications qu'il sera néces-
saire d'apporter aux règlements militaires
en ce qui concerne le droit de punir les
sous-officiers.
Le ministre s'est expliqué- enfin sur le
titre III, dont la commission n'a pas
achevé l'examen. C'est sur cette partie
du projet de son prédécesseur qu'il a plus
particulièrement formulé des objections,
notamment en ce qui concerne les nou-
velles formations projetées.
On sait que le projet du général Bou -
langer n'avait pas été soumis préalable-
ment par son auteur au conseil supérieur
de guerre.
Un membre a demandé si le général
Ferron ne pourrait pas soumettre le
titre III de ce projet au conseil supérieur,
puisque ce titre n'a pas encore fait l'ob-
jet d'un rapport à la Chambre.
Le ministre a répondu qu'il ne pouvait
pas donner satisfaction à cette demande,
parce qu'il serait obligé de retirer le pro-
jet et qu'il ne voulait pas effectuer ce
retrait.
Enfin, le ministre a été consultétsur le
point de savoir si le gouvernement s'op-
poserait ou non à la déclaration d'urgence
du projet qui sera demandée à la Cham-
bre dans le but de supprimer l'obligation
d'une seconde délibération.
Le ministre a dit qu'il ne pouvait pas
donner de réponse sur ce point, cette
question étant d'ordre gouvernemental,
et d'ailleurs le conseil des ministres de-
vant en délibérer aujourd'hui même.
—o—
MM. Girault, Peaudecerf et Pauliat, sé-
nateurs du Cher, M. Lesage, député du
même département, et M. Ducoudray,
député de la Nièvre, se sont rendus hier
chez le ministre de l'agriculture pour
l'entretenir d'une question dont ils l'a-
vaient déjà saisi par une lettre collective
signée par tous les représentants de ces
deux départements.
Ces députés et sénateurs venaient de-
mander au ministre d'appliquer la dispo-
sition de la nouvelle loi sur la surtaxe
des céréales qui permet au gouvernement
de suspendre l'effet de cette loi dans le
cas où une crise menacerait l'alimentation
publique.
Ils ont fait valoir que depuis l'établis-
sement de la nouvelle surtaxe sur les cé-
réales, une hausse de 18 0,0 s'était pro-
duite sur le prix des blés dans la région
du centre. Ils ont ajouté qu'au moment
du vote de la surtaxe les blés étaient
entre les mains du commerce qui les
avait accumulés dans un but de spécula-
tion et que par suite les propriétaires et
fermiers n'avaient tiré aucun bénéfice de
cette loi qui cependant avait été faite pour
eux.
Le ministre a reconnu que la question
méritait un sérieux examen, mais a ajouté
qu'elle ne pouvait être résolue à l'impro-
viste. Il a pris l'engagement de la sou-
mettre au conseil des ministres dans sa
plus prochaine séance.
L'URGENCE
C'est très vraisemblablement aujour-
d'hui que la Chambre commencera l'exa-
men des titres 1 et Il du projet de loi
organique militaire. On sait que la décla-
ration d'urgence sera demandée par la
commission, soit avant, soit après la
discussion générale. Nous ferons observer
ceci : l'urgence a été votée hier.
Elle l'a été implicitement. Le rejet, à
la presque unanimité, de la ridicule mo-
tion de M. Freppel, est-il autre chose
qu'une belle et bonne déclaration d'ur-
gence? Si, cette question étant posée :
Faut-il discuter tout de suite la loi mili-
taire? il s'est trouvé 446 députés pour
répondre oui, soixante seulement pour
répondre non, cela ne prouve-t-il pas
qu'au sein du Parlement, comme
dans le pays tout entier, le besoin est
ressenti impérieusement de donner sans
nouveaux retards au grave problème de
la refonte de nos institutions militaires
une solution ? Est-il question de prendre
une décision hâtive, sans laisser aux con-
victions le temps de se former, sans se
permettre les réflexions nécessaires ? Pas
le moins du monde. La déclaration d'ur-
gence aura pour seul effet de supprimer
la nécessité de la double délibération à la
Chambre, avant l'envoi au Sénat. Mais
elle n'empêchera ni l'examen approfondi
de la Chambre haute, ni la nouvelle dis-
cussion, à la Chambre, quand la loi re-
viendra du Luxembourg. Nous sommes
donc, avec l'urgence déclarée, assurés
d'au moins trois ou quatre délibérations
à de plus ou moins longs intervalles.
Voilà, sans doute, de quoi tranquilliser
tout le monde.
Et puis, peut-on dire que la question
soit nouvelle? C'est le 3 avril i884 que,
devant la Chambre précédente, a com-
mencé l'étude, en séance publique, du
projet de loi de réorganisation militaire.
Assurément, ce projet n'était pas en tout
semblable au projet actuel, mais tous
deux ont de commun ces deux disposi-
tions principales qui sont le principe
même et l'essence de la loi : réduction
du service militaire à trois ans, suppres-
sion du volontariat d'un an. La discussion
d'il y a trois ans a été longue, sérieuse,
intéressante, au palais Bourbon, et la Joi
était soumise aux délibérations du Sénat,
quand le général Boulanger l'a retirée
pour lui substituer son propre projet.
Mais ce projet ne peut, au point de vue
de la discussion, être considéré comme
créant une situation nouvelle. Il y a eu
une interruption du travail parlementaire,
rien de plus. Mais la question n'a pas
cessé de figurer à l'ordre du jour du pu-
blic, de la presse. Toutes les professions
de foi, les affiches électorales en ont
parlé. Quel député pourrait se dire
« point suffisamment préparé »? Est-ce
que, sauf sur certains détails, l'opinion
de la grande majorité n'est pas faite? —
L'urgence s'impose.
Il y a urgence : parce que le pays est
las du régime bâtard, hybride, hypocrite,
établi par la loi de 1872 ; parce que, s'il
est vrai — et cela est vrai, certes ! — que
notre armée est aujourd'hui forte, nom-
breuse, bien armée, prête à toutes les
éventualités, elle peut être meilleure
encore, et que le mieux doit toujours être
cherché ; parce qu'il existe, dans cette loi
de 1872, certains dispositifs qui consti-
tuent pour notre armée autant de causes
de faiblesse qu'il importe de faire dispa-
raître ; parce que le partage, au moyen
du tirage au sort, du contingent annuel
en deux portions dont l'une reste un an,
l'autre quatre ans sous les drapeaux, crée
dans l'armée, au point de vue strictement
militaire, des inégalités éminemment pré-
judiciables à l'unité d'action; parce qu'une
autre inégalité est due à l'institution aris-
tocratique du volontariat d'un an ; parce
que la loi de 1872 a volontairement laissé
en dehors du droit commun certaines
catégories de-citoyens dont l'exception
constitue un abu.:. — Et il est assez
bouffon, l'argument qui consiste à dire :
« Prenez garde 1 peut-être aurez-vous,
plutôt que vous ne le pensez, à vous
servir de l'instrument tel qu'il existe
actuellement. ? Est-ce une raison pour
ne pas songer, dès aujourd'hui, à le per-
fectionner? N'a-t on pas entrepris, sans
savoir si on ne serait pas surpris par la
guerre, avant d'avoir achevé, la transror.
malion du matériel militaire? Le présent
appartient aux évènements, soit ; l'avenir
est à nous. Préparons-le, et préparons-le
avec autant de rapidité que cela sera
possible. Que l'attente où nous sommes,
l'attente de l'inconnu, ne soit pas stérile.
Que chaque jour gagné soit un jour au
travail. — Les ministres donneront la
mesure de leur dévouement à la patrie
et à la République, en appuyant, avec
toute l'autorité que la haute situation
qu'ils occupent leur confère, la demande
de déclaration d'urgence formulée par la
commission.
LUCIEN VICTOR-MBUXIBR.
»
LËS REMÈDES
N'y a-t-il pas de remède contre le pro-
digieux accroissement des naissances illé-
gitimes à Paris et les abandons d'enfants
qui en sont la conséquence? M. d'Haus-
sonville ne le croit pas -et il en cite trois,
parmi lesquels deux peuvent être acceptés
de tous. Je laisse de côté, en effet, les
œuvres qui, comme la société de Saint-
François-Régis, les conférences de Saint-
Vincent de Paul, l'asile de Sainte-Made-
leine, etc., ont un caractère clérical,
lequel suffirait à les rendre suspectes à
la grande majorité des travailleurs pari-
siens. Aussi bien l'initiative individuelle,
ce qu'on appelle la charité privée sont
absolument impuissantes en ces matières;
il y faut l'intervention de l'Etat, -- de la - loi.
Une première atténuation résulterait
sans aucun doute d'une simplification du
Code civil. Nous avons vu de quel luxe de
formalités la plupart du temps inutiles
(témoin l'affaire du bigame d'Alfortville
et bien d'autres encore), le législateur a
cru devoir entourer le mariage. En mul-
tipliant les précautions contre les unions
clandestines qui sont l'exception, il a ren-
du singulièrement difficile le mariage au
grand jour qui est la règle. M. d'Hausson-
ville, d'accord avec un savant juriscon-
sulte belge. M. Laurent, auteur d'un pro-
jet de loi actuellement pendant devant la
Chambre de son pays, estime qu'il n'y
aurait aucun péril à réduire d'une bonne
moitié toute cette paperasserie. La publi-
cation à la seule résidence des deux con-
tractants suffirait dans la grande majo-
rité des cas. Pourquoi d'autre part, alors
qu'à partir de vingt et un ans le Code
laisse à un jeune homme et à une jeune
fille le droit de commettre toutes les sot-
tises qui leur passeront par la tête, leur
refuse-t-il celui d'accomplir un acte qui
peut être lui aussi une folie, mais une
folie généreuse et profitable à la so-
ciété ?
Le second remède est la responsabilité
du père. M. d'Haussonville n'est point
partisan de la recherche de la paternité ;
il craint les dangers du scandale et il
n'est pas convaincu que l'on rendît à l'en-
fant naturel un grand service en le do-
tant d'un père récalcitrant et d'une fa-
mille hostile. Et cependant notre vieux
juriste Loysel l'a dit dans son langage
un peu cru mais d'une brutalité si fran-
che : « Qui fait l'enfant le doit nourrir ».
Mais pour cela il n#est aucunement besoin
de supprimer l'article 340 du code civil;
il suffit, comme certains tribunaux ont
r commencé déjà à le faire, d'admettre que
la séduction suivie de grossesse (M;
d'Haussonville ajoute et précédée aunl
promesse de morir. ge, ; mais je ne vois pai
bien l'utilité de cette addition) peut donnez
ouverture à une demande d'aliments en
faveur de l'enfant. Sans doute il y aurait
bien des cas où la preuve serait malaisée.
bien des imputations mensongères, bien
des procès scandaleux; mais, outre que
la loi pourrait prendre ses garanties con"':
tre les faux témoignages et le chantage,
de même que, comme le dit très bien
M. d'Haussonville, le danger de voir des
fils de famille épouser des danseuses ne
vaut pas l'inconvénient de rendre le ma-
riage trop difficile aux gens qui n'ont ni
argent ni loisir, de même l'inconvénient
d'exposer quelques débauchés, jeunes on.
vieux, à des accusations calomnieuses,,
ne vaut pas celui d'encourager l'égoïsme..
l'abandon, la misère et la prostitution.
FRÉDÉRIC MONTARGIST
0.
LA FÊTE DES FLEURS
Rappelons à nos lecteurs que c'est au-
jourd'hui qu'a lieu au bois de Boulogne-
la fête des Fleurs donnée par la presse
parisienne au profit des victimes du De-
voir et des victimes de l'incendie de
l'Opéra-Comique.
Toutes les dispositions sont prises pour
que la bataille des fleurs se produise sur
toute la longueur du lac et que la fête-
du soir, comprenant l'illumination dit
bois, l'embrasement des lacs, le feu d'ar-
tifice, la retraite aux flambeaux, ait un
éclat inaccoutumé.
De nombreux objets d'art ont été déjà
envoyés pour la vente de charité qui aura
lieu à huit heures et demie sur la pelouse
de la Muette, par les soins de plusieurs
de nos premières artistes.
Le prix des cartes de voiture et des;
tickets reste ainsi fixé :
Cartes de voitures à 4 chevaux. 40 fr..
— — 2 chevaux. 20 fr4
— — 1 cheval.. 15 fr.
Carte de cavalier 10 fiv
Ticket d'entrée le 4 juin. 2 fr.
— — le 5 juin 1 fiv
Le comité a décidé que, dans le cas où
la fête ne pourrait pas avoir lieu par suite
de pluie persistante, le public en serait
prévenu par voie d'affiches sur les co-
lonnes Morris.
-
Le vicomte GrenuIhe, président. des-
Guides, a invité tous les propriétaires de
mails à se trouver aujourd'hui samedi, k
cinq heures, à la grille de Bagatelle, pour
se rendre à la fête des Fleurs, où una
ligne leur sera réseryée.
On compte sur la présence de plus do7
vingt mails.
LES ON-DIT
Le sculpteur Carrier-Belleuse est mori
hier matin à la manufacture de Sèvres,
où il était directeur des travaux d'art.
Albert-Ernest Carrier-Belleuse était né
à Anisy-le-Châleau (Aisne), le 12 juin 1824*
Il fut élève de David d'Angers et débuta
au Salon en 1851 par deux médaillons en
bronze. On lé retrouve ensuite, après une
interruption de six années, dans lë cata-
logue de 1857, où figurent un groupe en
bronze, VAmour et tAmilié, et divers por..
traits signés de lui.
Parmi ses œuvres, nous signalerons une
Bacchante (i863), le Messie (1867), Entrt
deux amoUi s (1867), Hébé endormie (1869),
Psyché abandonnée (1872), une statue de
Camille Desmoulins et un grand nombre
de bustes, entre autres ceux de MM.
Renan, Delacroix, Thiere, Mme Viardot,.
Mlle Croizette, etc., etc.
Carrier-Belleuse est également l'auteur
des cariatides du théâtre de la Renais-
sance et des groupes qui servent de tor-
chères au bas de l'escalier de l'Opéra; en
Feuilleton du RAPPEL
DU 5 JUIN
SwA.i,
u
^E - DIS NON
LIVRE CINQUIÈME
AU COTTAGE
CHAPITRE PREMIER
ÉnaSly gouffre. — (Su'te)
En rentrant au salon, Emily aperçut le
portrait de son père suspendu par miss
tétitia au-dessus de la cheminée. Elle
tomba épuisée sur le canapé et enfouit sa
lêt-; dans les coussins, sans lutter plus
longiemps contre ses larmes.
— Oh mon pèrel mon cher, bon, ten-
Ire père! mon premier, mon meilleur
Reproduction jnlerdi'e.
Vo'.r le Rappel du 5 mars au 3 win.
ami! Assassiné 1. Oh! Dieu, où était vo-
tre justice quand vous avez laissé com-
mettre un tel crime?
Une main se posa sur son épaule, une
voix dit : — Taisez-vous, enfant, Dieu sait
ce qu'il fait.
Emily leva la tête, mistress Ellmother
l'avait suivie, et se tenait debout devant
elle.
— Ah ! ma pauvre bonne, dit la jeune
fille dont le cœur se fondait, pardonnez-
moi, je vous ai effrayée tout à l'heure. -
— C'est passé, ma chère miss. Je suis
vieille et ma vie a été rude. Une vie rude
vous en apprend long. Aussi je ne me
plains pas de la mienne. — Tout à coup
le frisson la reprit. — Me croirez-vous ?
J'ai prévenu ma défunte maîtresse de ce
qui arrive aujourd'hui. Oui, devant le
cercueil de votre père, je l'ai prévenue.-
Cachez la vérité si ça vous est possible,
que je lui ai dit; mais un jour notre en-
fant saura que nous l'avons trompée.
L'une de nous vivra assez pour voir ce
jour-là.- Et c'est moi qui ai vécu ! je n'ai
pas pu me sauver dans la tombe !
Des larmes lentes coulaient sur ses
joues.
Emily lui prit affectueusement les
mains : — Remettez-vous, lui disait-elle
avec douceur. ,.,.
Mistress Ellmother s'apaisa, en effet,
peu à peu.
— Si j'osais vous demander?.. reprit-
elle timidement. Comment donc avez-vous
fait la terrible découverte? Est-ce le ha-
sard? ou si quelqu'un vous a dit?..
Mais déjà la pensée d'Emily était loin
de mistress Ellmother. Elle quitta le ca-
napé, pressant de la main son cœur, qui
battait à coups violents et douloureux.
— Le premier devoir de ma vie! dit-
elle; je pense au premier devoir de ma
vie 1 Je suis calmée à présent, je suis
résignée. Mais, hélas, jamais, jamais plus,
la mémoire de mon bien aimé père ne
pourra être ce qu'elle a été jusqu'ici !
Désormais, ce qui dominera tout, c'est
l'atroce souvenir d'un crime. Ce crime
n'a pas été puni ! l'homme a échappé aux
juges 1 — Ah! si j'avais su! il ne m'aurait
pas échappé, à moi! il ne m'échappera
pas!
Elle s'interrompit; ses yeux s'arrêtèrent
sur la vieille servante :
— Que me disiez-vous donc ? Ah 1 vous
vouliez savoir comment j'ai tout appris.
Ceci me ramène à Netherwoods. M. Alban
Morris.
Mistress Ellmother se recula effarée.
- Oh 1 vous n'allez pas dire du mal de
lui ! de lui qui a été si bon pour moi ! le
meilleur des hommes !.
— Je le croyais tel, je ne le crois plus!
— C'est vous qui dites une pareille
chose 1 vous !
— Oui, moi. 11 avait toute mon affec-
tion, et il s'est associé au mensonge, et de
quelle faç >n? dans quel moment?. Il
m'a entendu parler avec insouciance d'un
journal qui racontait le meurtre de mon
père, et il n'a pas ouvert la bouche pour
arrêter celte profanation ! Tenez, ne par-
lons plus de cela ! Je voudrais ne le re-
voir jamais ! — Revenons, revenons par
la pensée à Netherwoods. Un soir, Fran-
cine de Sor vous a effrayée par je ne sais
quel récit, et vous vous êtes enfuie
au jardin. — Tenez-vous donc tran-
quille! A votre âge, faut-il que je vous
donne l'exemple du sang-froid ?
— C'est que. pardon, miss! je vou-
drais vous demander.où se trouve-t-elle,
en ce moment, Francine de Sor?
— Elle est encore à la villa que je viens
de quitter.
— Et où ira-t-elle ensuite? Est-ce
qu'elle retournera chez miss Ladd ?
— Je le suppose. Mais quel intérêt peut
avoir po:ir vous ce que fait ou ne fait pas
miss de Sor?
— Je ne vous interromprai plus, misJ.
- C'est vrai, ce soir-là, je m'étais sauvée
dans le jardin. Et, sans doute, elle nous
y aura découverts, M. Morris et moi. Dans
l'obscurité, comment a-t-elle pu faire ?
— Elle a été guidée par l'odeur de la
fumée de tabac ; elle connaissait le fu.
meur; elle l'avait vu le matin même cau-
ser avec vous.Et tout ce que vous vous êtes
dit, elle me l'a répété !—Ah! n'est-il pas bien
cruel de devoir à la méchanceté d'une
fille haineuse ces révélations sur la mort
de mon père, alors que vous, ma viei le
amie, et l'homme qui prétendait m'ai-
mer, vous étiez d'accord pour me laisser
dans l'ignorance ?
— Ce sont la des paroles bien arrières,
miss!
- Ce sont des paroles justes.
- Non. Eiles ne doivent pas être justes
pour M. Morris. Elles ne sont pas justes
pour moi. Dieu sait que si votre tante
m'avait écoulée, vous auriez tout su. Je
l'ai priée, supplice, je me suis mise à
genoux, je l'ai avertie, comne je vous
disais tout à l'heure, que ça finirait m il.
Rien n'y a fait. Est-il besoin de vous rap-
peler à quel point miss Lélitia était vo-
lontaire et opiniâtre. Elle m'a donné le
choix entre mon congé immédiat et
définitif et le silence. J'ai cédé. Pas une
autre femme qu'ol e n'aurait pu me faire
plier. Je suis obstinée au^si. miss. vous <
me l'avez dit souvent ; mais l'obstination
de votre tante l'a emporté sur la mienne.
Je l'aimais trop, je ne pouvais pas lui dire
non. D'ailleurs, si vous me demandez à
qui revient la première idée d'un men-
songe, je vous dirai que ce n'est pis à
votre tante ; on l'y a poussée en l'effrayant
à votre sujet.
— Qui cela?
- Votre parrain, le grand chirurgien de
Londres, qui venait si souvent chez votre:
père.
— Sir Richard?
— Sir Richard, c'est bien ça. Il a dé-
claré qu'avec votre santé chancelante, il
ne répondait pas des suites d'une telle:
secousse pour vous. Dès lors il a fait
tout ce qu'il a voulu. Après avoir gagné.
miss Létitia qu'il accompagnait à l'en-
quête, il a g gné le coroner et les jour-
nalistes; il a veillé à ce que le nom de
votre ta-ile ne parût point dans les jour*
naux; il s'est chargé du cercueil, de l'en-
terremenl, il a écrit le certificat. Il n'y
avait que lui, lui! Tout le monde obéis-
sait au doigt et à l'œ:1. Pensez donc ! le
fameux méiecin !
WILKllS CO .MN3.
(A SUHI7H.)
ZBMrarsTiiÂnc:: ■
18, RUE DE VAEOIS, iS -
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois 10 »
Six mois 20 »
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 13 50
Sixmois. 27 a
Adresser lettres et mandats
À. M. ERNEST LEFÈVRE ?
AD:MINIS'rRA.TEtJl\.GÉRAN'r
-"
REDACTION.,
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction.
; r De 4 a 6 heures du soir
r Î8, RUE PE VAIiOTS, 18 ",
» -
Les ir, ainiscrits non iuscres tic seront pas relHiuc
-ANLI ONCES ;
fif. Ch. LAGRANGE, CERF et Co:
6, place de la Bourse, 6
tA CLOTURE DE LA SESSION
La Paix conseille au gouvernement
- de prononcer, aussitôt que l'expiration
du délai fixé par la Constitution va le
lui permettre, la clôture de la session
actuelle des Chambres. Et je ne saurais
me dissimuler que cette intervention
de notre honorable et très circonspect
confrère donne à cette mesure, à la-
quelle j'entendais déjà faire des allu-
sions que je ne voulais pas croire sé-
rieuses, un caractère très menaçant de
probabilité.
Je n'ai rien à dire sur la question de
légalité. Il est malheureusement trop
vrai que la loi du 16 juillet 1875 sur
les rapports des pouvoirs publics porte
que les deux Chambres doivent être
réunies au moins cinq mois chaque an-
née, et ne leur donne pas droit à un
jour de plus. La session ayant été ou-
verte le 11 janvier, les cinq mois seront
complets dans huit jours.
Je rends en outre cette justice à la
Paix que, dans sa pensée, cette clôture
prématurée de la session actuelle serait
compensée par l'avancement de la ses-
sion d'automne.
Les raisons qu'elle donne, c'est que
de nouveaux ministres ont besoin de
quelque temps pour prendre pleine
possession des affaires de leurs dépar-
tements, pour préparer les projets qu'ils
auront à déposer, pour faire connais-
sance avec leur personnel administratif
et étudier le fonctionnement des ser-
vices, etc. A son avis, la réforme bud-
gétaire et la recherche des économies,
qui doivent être l'objet surtout de la
aollicitude du cabinet, ne peuvent guère
être poursuivies avec toute la vigilance
qu'elles réclament si les ministres sont
obligés de passer leur temps à la
Chambre et si leur attention est cons-
tamment détournée vers le palais
Bourbon.
Mais la Paix oublie les dangers, bien
supérieurs à ces légers inconvénients,
qu'entraînerait la mesure qu'elle de-
mande.
D'abord, la loi militaire va commen-
cer à être discutée aujourd'hui ou, au
plus tard, lundi. Veut-elle que, à peine
àbordée, on la remette à l'automne?
Croit-elle que le pays accepterait d'un
eœur tranquille un pareil manque-
ment à la parole qu'a déjà, par
deux fois, donnée le gouvernement?
Autant aurait valu, alors, adopter la
motion de M. Freppel. — Mais, dit
notre confrère, la discussion traînera
en longueur et ne pourra, en aucun
cas, être terminée avant les vacances.
— Qu'en sait-il? D'ailleurs, plus elle
sera longue, plus ce serait une raison
pour l'avancer le plus possible avant la
séparation; car, à l'automne, on sera
accaparé par le budget, et tout ce qui
ne sera pas question financière sera
impitoyablement écarté.
Quant au budget, l'argument est bien
plus fort encore. S'il n'était présenté
qu'à la rentrée, quand la commission
l'étudierait-elle? C'est justement à cause
de lui qu'il faut que la Chambre ne se
sépare pas, de façon qu'elle puisse en
être saisie dès cette session et que la
commission puisse travailler pendant
les mois de vacances. On objecte que le
gouvernement a besoin de quiétude
pour chercher ses économies ? Je ré-
ponds que puisqu'il s'est engagé à en
faire pour au moins soixante millions,
c'est qu'apparemment il sait déjà où
il ira les prendre.
Je laisse de côté d'autres questions,
non dénuées de gravité pourtant. Par
exemple, le Métropolitain. A quand se-
rait-il remis, si la session était close?
Son exécution, qui doit être accomplie
pour l'Exposition, ne serait-elle pas
évidemment compromise? Que devrait
penser la population parisienne d'un
gouvernement qui, la blessant à la fois
dans ses intérêts moraux et dans ses
intérêts matériels, viendrait do faire
ajourner au Sénat la loi départemen-
tale et empêcherait de venir devant la
Chambre le vote des grands travaux ?
Par dessus tout, une considération
politique domine.
On comprendrait qu'un cabinet,
accueilli par une explosion de satis-
faction, demandât à la Chambre le
crédit de quelques jours de recueille-
ment. Alors il demeurerait, devant le
pays, fort de la confiance qu'elle lui
aurait accordée, et la séparation mo-
mentanée du Parlement ne serait qu'un
signe de plus de l'entente qui existe.
rait entre lui et le gouvernement.
Mais ce n'est pas le cas présent. Ce
n'est pas avec des cris d'enthousiasme
que le cabinet actuel a été reçu. Il n'a
réuni tout juste que la moitié de la ma-
jorité républicaine. Sa situation est une
des plus précaires qu'on ait vues. Il a
contre lui des préventions qu'il doit
mettre son honneur à dissiper, mais
qui sont encore dans toute leur force.
Dans ces conditions, la clôture- im-
posée — de la session ne serait qu'un
moyen de se débarrasser des Chambre?.
Elle aurait beau être légale, elle n'en se
rait pas moins illégitime. Ce serait une
véritable usurpation sur le droit des
représentants du pays. Ce serait la
condamnation morale du pouvoir qui
y aurait recours.
ERNEST LEFÈVRB.
COULISSES DES CHAMBRES
Le nouveau ministre de la guerre s'est
rendu hier à la commission de l'armée
pour donner son avis sur le projet mi-
litaire qui va venir en discussion devant
la Chambre.
Le général Ferron a fait une brève
déclaration sur les deux premiers titres
du projet, ceux qui figurent à l'ordre du
jour actuel de la Chambre, le titre Ier re-
latif au recrutement et le titre II relatif à
l'état des sous-officiers.
D'une manière générale le ministre ac-
cepte les dispositions de ces deux titres.
Incidemment à propos de l'article 17 re-
latif aux dispensés à titre de soutiens de
famille, le ministre a annoncé qu'il allait
demander à la Chambre l'autorisation
d'appeler pour quelques jours sous les
drapeaux les dispensés de cet ordre au
nombre de 250,000, pour leur donner
l'instruction militaire. L'appel se fera eh
deux fois par séries de 125,000 hommes.
Un crédit devra être demandé pour cou-
vrir la dépense résultant de cet appel.
Le ministre a répété d'autre part ce
qu'il avait dit à la tribune, le jour de
l'entrée en fonctions du nouveau cabinet,
à savoir qu'il était depuis longtemps par-
tisan du service de trois ans et que, sans
le dépôt du projet de loi, il l'aurait réalisé
par voie administrative.
Sur la question des sous-officiers, le
ministre a présenté quelques observations
intéressantes. Le projet a pour but d'a-
méliorer la condition des sous-officiers
surtout en leur assurant des avantages
pécuniaires. Le ministre ne croit pas que
ce soit par des mesures de cet ordre qu'il
faille agir. Selon lui, la loi de 1881 a déjà
fait beaucoup au point de vue pécuniaire.
Ce qu'il faut, c'est relever la situation
matérielle et morale des sous-officiers.
En ce qui le concerne personnellement,
le général Ferron a l'intention de deman-
der immédiatement à la commission du
budget les moyens de donner aux sous-
officiers une tenue de ville en drap d'offi-
cier avec l'épée. Il va s'occuper des
moyens d'organiser dans chaque régiment
des mess de sous-officiers; enfin il va
étudier les modifications qu'il sera néces-
saire d'apporter aux règlements militaires
en ce qui concerne le droit de punir les
sous-officiers.
Le ministre s'est expliqué- enfin sur le
titre III, dont la commission n'a pas
achevé l'examen. C'est sur cette partie
du projet de son prédécesseur qu'il a plus
particulièrement formulé des objections,
notamment en ce qui concerne les nou-
velles formations projetées.
On sait que le projet du général Bou -
langer n'avait pas été soumis préalable-
ment par son auteur au conseil supérieur
de guerre.
Un membre a demandé si le général
Ferron ne pourrait pas soumettre le
titre III de ce projet au conseil supérieur,
puisque ce titre n'a pas encore fait l'ob-
jet d'un rapport à la Chambre.
Le ministre a répondu qu'il ne pouvait
pas donner satisfaction à cette demande,
parce qu'il serait obligé de retirer le pro-
jet et qu'il ne voulait pas effectuer ce
retrait.
Enfin, le ministre a été consultétsur le
point de savoir si le gouvernement s'op-
poserait ou non à la déclaration d'urgence
du projet qui sera demandée à la Cham-
bre dans le but de supprimer l'obligation
d'une seconde délibération.
Le ministre a dit qu'il ne pouvait pas
donner de réponse sur ce point, cette
question étant d'ordre gouvernemental,
et d'ailleurs le conseil des ministres de-
vant en délibérer aujourd'hui même.
—o—
MM. Girault, Peaudecerf et Pauliat, sé-
nateurs du Cher, M. Lesage, député du
même département, et M. Ducoudray,
député de la Nièvre, se sont rendus hier
chez le ministre de l'agriculture pour
l'entretenir d'une question dont ils l'a-
vaient déjà saisi par une lettre collective
signée par tous les représentants de ces
deux départements.
Ces députés et sénateurs venaient de-
mander au ministre d'appliquer la dispo-
sition de la nouvelle loi sur la surtaxe
des céréales qui permet au gouvernement
de suspendre l'effet de cette loi dans le
cas où une crise menacerait l'alimentation
publique.
Ils ont fait valoir que depuis l'établis-
sement de la nouvelle surtaxe sur les cé-
réales, une hausse de 18 0,0 s'était pro-
duite sur le prix des blés dans la région
du centre. Ils ont ajouté qu'au moment
du vote de la surtaxe les blés étaient
entre les mains du commerce qui les
avait accumulés dans un but de spécula-
tion et que par suite les propriétaires et
fermiers n'avaient tiré aucun bénéfice de
cette loi qui cependant avait été faite pour
eux.
Le ministre a reconnu que la question
méritait un sérieux examen, mais a ajouté
qu'elle ne pouvait être résolue à l'impro-
viste. Il a pris l'engagement de la sou-
mettre au conseil des ministres dans sa
plus prochaine séance.
L'URGENCE
C'est très vraisemblablement aujour-
d'hui que la Chambre commencera l'exa-
men des titres 1 et Il du projet de loi
organique militaire. On sait que la décla-
ration d'urgence sera demandée par la
commission, soit avant, soit après la
discussion générale. Nous ferons observer
ceci : l'urgence a été votée hier.
Elle l'a été implicitement. Le rejet, à
la presque unanimité, de la ridicule mo-
tion de M. Freppel, est-il autre chose
qu'une belle et bonne déclaration d'ur-
gence? Si, cette question étant posée :
Faut-il discuter tout de suite la loi mili-
taire? il s'est trouvé 446 députés pour
répondre oui, soixante seulement pour
répondre non, cela ne prouve-t-il pas
qu'au sein du Parlement, comme
dans le pays tout entier, le besoin est
ressenti impérieusement de donner sans
nouveaux retards au grave problème de
la refonte de nos institutions militaires
une solution ? Est-il question de prendre
une décision hâtive, sans laisser aux con-
victions le temps de se former, sans se
permettre les réflexions nécessaires ? Pas
le moins du monde. La déclaration d'ur-
gence aura pour seul effet de supprimer
la nécessité de la double délibération à la
Chambre, avant l'envoi au Sénat. Mais
elle n'empêchera ni l'examen approfondi
de la Chambre haute, ni la nouvelle dis-
cussion, à la Chambre, quand la loi re-
viendra du Luxembourg. Nous sommes
donc, avec l'urgence déclarée, assurés
d'au moins trois ou quatre délibérations
à de plus ou moins longs intervalles.
Voilà, sans doute, de quoi tranquilliser
tout le monde.
Et puis, peut-on dire que la question
soit nouvelle? C'est le 3 avril i884 que,
devant la Chambre précédente, a com-
mencé l'étude, en séance publique, du
projet de loi de réorganisation militaire.
Assurément, ce projet n'était pas en tout
semblable au projet actuel, mais tous
deux ont de commun ces deux disposi-
tions principales qui sont le principe
même et l'essence de la loi : réduction
du service militaire à trois ans, suppres-
sion du volontariat d'un an. La discussion
d'il y a trois ans a été longue, sérieuse,
intéressante, au palais Bourbon, et la Joi
était soumise aux délibérations du Sénat,
quand le général Boulanger l'a retirée
pour lui substituer son propre projet.
Mais ce projet ne peut, au point de vue
de la discussion, être considéré comme
créant une situation nouvelle. Il y a eu
une interruption du travail parlementaire,
rien de plus. Mais la question n'a pas
cessé de figurer à l'ordre du jour du pu-
blic, de la presse. Toutes les professions
de foi, les affiches électorales en ont
parlé. Quel député pourrait se dire
« point suffisamment préparé »? Est-ce
que, sauf sur certains détails, l'opinion
de la grande majorité n'est pas faite? —
L'urgence s'impose.
Il y a urgence : parce que le pays est
las du régime bâtard, hybride, hypocrite,
établi par la loi de 1872 ; parce que, s'il
est vrai — et cela est vrai, certes ! — que
notre armée est aujourd'hui forte, nom-
breuse, bien armée, prête à toutes les
éventualités, elle peut être meilleure
encore, et que le mieux doit toujours être
cherché ; parce qu'il existe, dans cette loi
de 1872, certains dispositifs qui consti-
tuent pour notre armée autant de causes
de faiblesse qu'il importe de faire dispa-
raître ; parce que le partage, au moyen
du tirage au sort, du contingent annuel
en deux portions dont l'une reste un an,
l'autre quatre ans sous les drapeaux, crée
dans l'armée, au point de vue strictement
militaire, des inégalités éminemment pré-
judiciables à l'unité d'action; parce qu'une
autre inégalité est due à l'institution aris-
tocratique du volontariat d'un an ; parce
que la loi de 1872 a volontairement laissé
en dehors du droit commun certaines
catégories de-citoyens dont l'exception
constitue un abu.:. — Et il est assez
bouffon, l'argument qui consiste à dire :
« Prenez garde 1 peut-être aurez-vous,
plutôt que vous ne le pensez, à vous
servir de l'instrument tel qu'il existe
actuellement. ? Est-ce une raison pour
ne pas songer, dès aujourd'hui, à le per-
fectionner? N'a-t on pas entrepris, sans
savoir si on ne serait pas surpris par la
guerre, avant d'avoir achevé, la transror.
malion du matériel militaire? Le présent
appartient aux évènements, soit ; l'avenir
est à nous. Préparons-le, et préparons-le
avec autant de rapidité que cela sera
possible. Que l'attente où nous sommes,
l'attente de l'inconnu, ne soit pas stérile.
Que chaque jour gagné soit un jour au
travail. — Les ministres donneront la
mesure de leur dévouement à la patrie
et à la République, en appuyant, avec
toute l'autorité que la haute situation
qu'ils occupent leur confère, la demande
de déclaration d'urgence formulée par la
commission.
LUCIEN VICTOR-MBUXIBR.
»
LËS REMÈDES
N'y a-t-il pas de remède contre le pro-
digieux accroissement des naissances illé-
gitimes à Paris et les abandons d'enfants
qui en sont la conséquence? M. d'Haus-
sonville ne le croit pas -et il en cite trois,
parmi lesquels deux peuvent être acceptés
de tous. Je laisse de côté, en effet, les
œuvres qui, comme la société de Saint-
François-Régis, les conférences de Saint-
Vincent de Paul, l'asile de Sainte-Made-
leine, etc., ont un caractère clérical,
lequel suffirait à les rendre suspectes à
la grande majorité des travailleurs pari-
siens. Aussi bien l'initiative individuelle,
ce qu'on appelle la charité privée sont
absolument impuissantes en ces matières;
il y faut l'intervention de l'Etat, -- de la - loi.
Une première atténuation résulterait
sans aucun doute d'une simplification du
Code civil. Nous avons vu de quel luxe de
formalités la plupart du temps inutiles
(témoin l'affaire du bigame d'Alfortville
et bien d'autres encore), le législateur a
cru devoir entourer le mariage. En mul-
tipliant les précautions contre les unions
clandestines qui sont l'exception, il a ren-
du singulièrement difficile le mariage au
grand jour qui est la règle. M. d'Hausson-
ville, d'accord avec un savant juriscon-
sulte belge. M. Laurent, auteur d'un pro-
jet de loi actuellement pendant devant la
Chambre de son pays, estime qu'il n'y
aurait aucun péril à réduire d'une bonne
moitié toute cette paperasserie. La publi-
cation à la seule résidence des deux con-
tractants suffirait dans la grande majo-
rité des cas. Pourquoi d'autre part, alors
qu'à partir de vingt et un ans le Code
laisse à un jeune homme et à une jeune
fille le droit de commettre toutes les sot-
tises qui leur passeront par la tête, leur
refuse-t-il celui d'accomplir un acte qui
peut être lui aussi une folie, mais une
folie généreuse et profitable à la so-
ciété ?
Le second remède est la responsabilité
du père. M. d'Haussonville n'est point
partisan de la recherche de la paternité ;
il craint les dangers du scandale et il
n'est pas convaincu que l'on rendît à l'en-
fant naturel un grand service en le do-
tant d'un père récalcitrant et d'une fa-
mille hostile. Et cependant notre vieux
juriste Loysel l'a dit dans son langage
un peu cru mais d'une brutalité si fran-
che : « Qui fait l'enfant le doit nourrir ».
Mais pour cela il n#est aucunement besoin
de supprimer l'article 340 du code civil;
il suffit, comme certains tribunaux ont
r commencé déjà à le faire, d'admettre que
la séduction suivie de grossesse (M;
d'Haussonville ajoute et précédée aunl
promesse de morir. ge, ; mais je ne vois pai
bien l'utilité de cette addition) peut donnez
ouverture à une demande d'aliments en
faveur de l'enfant. Sans doute il y aurait
bien des cas où la preuve serait malaisée.
bien des imputations mensongères, bien
des procès scandaleux; mais, outre que
la loi pourrait prendre ses garanties con"':
tre les faux témoignages et le chantage,
de même que, comme le dit très bien
M. d'Haussonville, le danger de voir des
fils de famille épouser des danseuses ne
vaut pas l'inconvénient de rendre le ma-
riage trop difficile aux gens qui n'ont ni
argent ni loisir, de même l'inconvénient
d'exposer quelques débauchés, jeunes on.
vieux, à des accusations calomnieuses,,
ne vaut pas celui d'encourager l'égoïsme..
l'abandon, la misère et la prostitution.
FRÉDÉRIC MONTARGIST
0.
LA FÊTE DES FLEURS
Rappelons à nos lecteurs que c'est au-
jourd'hui qu'a lieu au bois de Boulogne-
la fête des Fleurs donnée par la presse
parisienne au profit des victimes du De-
voir et des victimes de l'incendie de
l'Opéra-Comique.
Toutes les dispositions sont prises pour
que la bataille des fleurs se produise sur
toute la longueur du lac et que la fête-
du soir, comprenant l'illumination dit
bois, l'embrasement des lacs, le feu d'ar-
tifice, la retraite aux flambeaux, ait un
éclat inaccoutumé.
De nombreux objets d'art ont été déjà
envoyés pour la vente de charité qui aura
lieu à huit heures et demie sur la pelouse
de la Muette, par les soins de plusieurs
de nos premières artistes.
Le prix des cartes de voiture et des;
tickets reste ainsi fixé :
Cartes de voitures à 4 chevaux. 40 fr..
— — 2 chevaux. 20 fr4
— — 1 cheval.. 15 fr.
Carte de cavalier 10 fiv
Ticket d'entrée le 4 juin. 2 fr.
— — le 5 juin 1 fiv
Le comité a décidé que, dans le cas où
la fête ne pourrait pas avoir lieu par suite
de pluie persistante, le public en serait
prévenu par voie d'affiches sur les co-
lonnes Morris.
-
Le vicomte GrenuIhe, président. des-
Guides, a invité tous les propriétaires de
mails à se trouver aujourd'hui samedi, k
cinq heures, à la grille de Bagatelle, pour
se rendre à la fête des Fleurs, où una
ligne leur sera réseryée.
On compte sur la présence de plus do7
vingt mails.
LES ON-DIT
Le sculpteur Carrier-Belleuse est mori
hier matin à la manufacture de Sèvres,
où il était directeur des travaux d'art.
Albert-Ernest Carrier-Belleuse était né
à Anisy-le-Châleau (Aisne), le 12 juin 1824*
Il fut élève de David d'Angers et débuta
au Salon en 1851 par deux médaillons en
bronze. On lé retrouve ensuite, après une
interruption de six années, dans lë cata-
logue de 1857, où figurent un groupe en
bronze, VAmour et tAmilié, et divers por..
traits signés de lui.
Parmi ses œuvres, nous signalerons une
Bacchante (i863), le Messie (1867), Entrt
deux amoUi s (1867), Hébé endormie (1869),
Psyché abandonnée (1872), une statue de
Camille Desmoulins et un grand nombre
de bustes, entre autres ceux de MM.
Renan, Delacroix, Thiere, Mme Viardot,.
Mlle Croizette, etc., etc.
Carrier-Belleuse est également l'auteur
des cariatides du théâtre de la Renais-
sance et des groupes qui servent de tor-
chères au bas de l'escalier de l'Opéra; en
Feuilleton du RAPPEL
DU 5 JUIN
SwA.i,
u
^E - DIS NON
LIVRE CINQUIÈME
AU COTTAGE
CHAPITRE PREMIER
ÉnaSly gouffre. — (Su'te)
En rentrant au salon, Emily aperçut le
portrait de son père suspendu par miss
tétitia au-dessus de la cheminée. Elle
tomba épuisée sur le canapé et enfouit sa
lêt-; dans les coussins, sans lutter plus
longiemps contre ses larmes.
— Oh mon pèrel mon cher, bon, ten-
Ire père! mon premier, mon meilleur
Reproduction jnlerdi'e.
Vo'.r le Rappel du 5 mars au 3 win.
ami! Assassiné 1. Oh! Dieu, où était vo-
tre justice quand vous avez laissé com-
mettre un tel crime?
Une main se posa sur son épaule, une
voix dit : — Taisez-vous, enfant, Dieu sait
ce qu'il fait.
Emily leva la tête, mistress Ellmother
l'avait suivie, et se tenait debout devant
elle.
— Ah ! ma pauvre bonne, dit la jeune
fille dont le cœur se fondait, pardonnez-
moi, je vous ai effrayée tout à l'heure. -
— C'est passé, ma chère miss. Je suis
vieille et ma vie a été rude. Une vie rude
vous en apprend long. Aussi je ne me
plains pas de la mienne. — Tout à coup
le frisson la reprit. — Me croirez-vous ?
J'ai prévenu ma défunte maîtresse de ce
qui arrive aujourd'hui. Oui, devant le
cercueil de votre père, je l'ai prévenue.-
Cachez la vérité si ça vous est possible,
que je lui ai dit; mais un jour notre en-
fant saura que nous l'avons trompée.
L'une de nous vivra assez pour voir ce
jour-là.- Et c'est moi qui ai vécu ! je n'ai
pas pu me sauver dans la tombe !
Des larmes lentes coulaient sur ses
joues.
Emily lui prit affectueusement les
mains : — Remettez-vous, lui disait-elle
avec douceur. ,.,.
Mistress Ellmother s'apaisa, en effet,
peu à peu.
— Si j'osais vous demander?.. reprit-
elle timidement. Comment donc avez-vous
fait la terrible découverte? Est-ce le ha-
sard? ou si quelqu'un vous a dit?..
Mais déjà la pensée d'Emily était loin
de mistress Ellmother. Elle quitta le ca-
napé, pressant de la main son cœur, qui
battait à coups violents et douloureux.
— Le premier devoir de ma vie! dit-
elle; je pense au premier devoir de ma
vie 1 Je suis calmée à présent, je suis
résignée. Mais, hélas, jamais, jamais plus,
la mémoire de mon bien aimé père ne
pourra être ce qu'elle a été jusqu'ici !
Désormais, ce qui dominera tout, c'est
l'atroce souvenir d'un crime. Ce crime
n'a pas été puni ! l'homme a échappé aux
juges 1 — Ah! si j'avais su! il ne m'aurait
pas échappé, à moi! il ne m'échappera
pas!
Elle s'interrompit; ses yeux s'arrêtèrent
sur la vieille servante :
— Que me disiez-vous donc ? Ah 1 vous
vouliez savoir comment j'ai tout appris.
Ceci me ramène à Netherwoods. M. Alban
Morris.
Mistress Ellmother se recula effarée.
- Oh 1 vous n'allez pas dire du mal de
lui ! de lui qui a été si bon pour moi ! le
meilleur des hommes !.
— Je le croyais tel, je ne le crois plus!
— C'est vous qui dites une pareille
chose 1 vous !
— Oui, moi. 11 avait toute mon affec-
tion, et il s'est associé au mensonge, et de
quelle faç >n? dans quel moment?. Il
m'a entendu parler avec insouciance d'un
journal qui racontait le meurtre de mon
père, et il n'a pas ouvert la bouche pour
arrêter celte profanation ! Tenez, ne par-
lons plus de cela ! Je voudrais ne le re-
voir jamais ! — Revenons, revenons par
la pensée à Netherwoods. Un soir, Fran-
cine de Sor vous a effrayée par je ne sais
quel récit, et vous vous êtes enfuie
au jardin. — Tenez-vous donc tran-
quille! A votre âge, faut-il que je vous
donne l'exemple du sang-froid ?
— C'est que. pardon, miss! je vou-
drais vous demander.où se trouve-t-elle,
en ce moment, Francine de Sor?
— Elle est encore à la villa que je viens
de quitter.
— Et où ira-t-elle ensuite? Est-ce
qu'elle retournera chez miss Ladd ?
— Je le suppose. Mais quel intérêt peut
avoir po:ir vous ce que fait ou ne fait pas
miss de Sor?
— Je ne vous interromprai plus, misJ.
- C'est vrai, ce soir-là, je m'étais sauvée
dans le jardin. Et, sans doute, elle nous
y aura découverts, M. Morris et moi. Dans
l'obscurité, comment a-t-elle pu faire ?
— Elle a été guidée par l'odeur de la
fumée de tabac ; elle connaissait le fu.
meur; elle l'avait vu le matin même cau-
ser avec vous.Et tout ce que vous vous êtes
dit, elle me l'a répété !—Ah! n'est-il pas bien
cruel de devoir à la méchanceté d'une
fille haineuse ces révélations sur la mort
de mon père, alors que vous, ma viei le
amie, et l'homme qui prétendait m'ai-
mer, vous étiez d'accord pour me laisser
dans l'ignorance ?
— Ce sont la des paroles bien arrières,
miss!
- Ce sont des paroles justes.
- Non. Eiles ne doivent pas être justes
pour M. Morris. Elles ne sont pas justes
pour moi. Dieu sait que si votre tante
m'avait écoulée, vous auriez tout su. Je
l'ai priée, supplice, je me suis mise à
genoux, je l'ai avertie, comne je vous
disais tout à l'heure, que ça finirait m il.
Rien n'y a fait. Est-il besoin de vous rap-
peler à quel point miss Lélitia était vo-
lontaire et opiniâtre. Elle m'a donné le
choix entre mon congé immédiat et
définitif et le silence. J'ai cédé. Pas une
autre femme qu'ol e n'aurait pu me faire
plier. Je suis obstinée au^si. miss. vous <
me l'avez dit souvent ; mais l'obstination
de votre tante l'a emporté sur la mienne.
Je l'aimais trop, je ne pouvais pas lui dire
non. D'ailleurs, si vous me demandez à
qui revient la première idée d'un men-
songe, je vous dirai que ce n'est pis à
votre tante ; on l'y a poussée en l'effrayant
à votre sujet.
— Qui cela?
- Votre parrain, le grand chirurgien de
Londres, qui venait si souvent chez votre:
père.
— Sir Richard?
— Sir Richard, c'est bien ça. Il a dé-
claré qu'avec votre santé chancelante, il
ne répondait pas des suites d'une telle:
secousse pour vous. Dès lors il a fait
tout ce qu'il a voulu. Après avoir gagné.
miss Létitia qu'il accompagnait à l'en-
quête, il a g gné le coroner et les jour-
nalistes; il a veillé à ce que le nom de
votre ta-ile ne parût point dans les jour*
naux; il s'est chargé du cercueil, de l'en-
terremenl, il a écrit le certificat. Il n'y
avait que lui, lui! Tout le monde obéis-
sait au doigt et à l'œ:1. Pensez donc ! le
fameux méiecin !
WILKllS CO .MN3.
(A SUHI7H.)
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