Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-07-18
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 18 juillet 1885 18 juillet 1885
Description : 1885/07/18 (N5608). 1885/07/18 (N5608).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7539272d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/11/2012
Ne 5608 — Samedi 18 Juillet 1885 - Xe numéro t lOc. — Départements : iS c. 30 Messidor an 93 — N* 5608
ADMINISTRATIOîT
-
.:m, RUE DE V.ALOIS..fa
ABOIEMENTS
PARIS
Trois mois.10 I)
iii 'js 20 ))
BÉPARTEHENTS1
Trois mois 13 50
Six moi s. 27 il
Aùxesser lettres et mandats
A M. ERNEST LEFÈVRE '- *
«ADMINISTRATEUR GÉRAK2
- lui J
REDACTION"
S'adresser au Secrétaire ae la Réaactio.
De 4 à 6 heures du «tir
38 f HUE DE VAX OIS, la
EfiS manuscrits 11031 insères ne seroniDas l'enila
ANNONCES
3W. Ch. 1AGRANGE, CERF et C.
j>Jace de la Bourse, 6
LA FETE ET LA RÉACTION
Extrait d'un journal royaliste :
— « Dans la plupart des quartiers
les rues étaient à peu près désertes, et
sans quelques milliers de provinciaux
qui profitaient de la circonstance pour
visiter Paris à prix réduits, la capitale
aurait présenté l'aspect désolé d'une
cité ravagée par quelque fléau. C'était
lugubre; les bals publics râlaient; les
badauds, se souvenant des splendeurs
du temps passé, cherchaient les féeri-
ques décorations et les illuminations
grandioses d'autrefois; nulle gaieté;
l'indifférence a succédé à l'enthou-
siasme. Quelle débâcle ! On a d'autres
soucis que d'allumer des lampions. On
conçoit que les Français éprouvent un
médiocre besoin de folâtrer. »
Extrait d'un journal royaliste :
— « La fête du 14 juillet a été hier
ce qu'elle était les autres années. Mêmes
déploiements de drapeaux, mêmes ré-
jouissances, mêmes danses et mêmes
lampions. La fête, favorisée par un
temps superbe, ne le cédait pas de beau-
coup comme animation à ses aînées.
Hier comme les années précédentes, la
population parisienne a prouvé qu'elle
était trop amie des plaisirs pour né-
gliger une occasion de s'amuser. »
— Eh bien, soit, convient un troi-
sième journal royaliste, clérical celui-
!à, Y Univers, puisqu'il faut l'appeler par
son nom ; eh bien, soit, « la fête d'hier
a présenté le même aspect que celles
des autres années » ; mais quel était cet
aspect ? « l'aspect d'une immense foire ».
De qui se composait la foule ? de « ba-
dauds » et d' « énergumènes ». C'est
vrai, « les carrefours grands ou petits
étaient transformés en bals publics »,
mais « on s'y trémoussait au son d'une
musique discordante ». Et qui est-ce qui
dansait? « les amateurs ordinaires des
bals de barrière ; ils avaient pris pos-
session de toutes les rues ; la débauche
s'étalait en souveraine ; les prostituées
bousculaient les jeunes filles et les
femmes promenées au milieu des guin-
guettes par des pères et des maris im-
bécilles » Mais un simple fait va vous
dire à quel point la fête a été ratée :
pas un député, pas un homme, per-
sonne! n'a eu seulement l'idée de se
f tire tuer sur la barricade de Baudin !
Vous vous demandez pourquoi diable
une fête nationale n'est réussie que si
on se fait tuer sur une barricade?
>»» ue me charge pas de vous l'expli-
quer. Je me borne à copier :
« Rue du Faubourg-Saint-Antoine,
151, à côté de la plaque commémora-
live rappelant la mort de Baudin, on
voit un grand tableau représentant le
député un drapeau tricolore à la main
et monté sur une barricade. Au-des-
sous, cette inscription : Vous allez voir
comment on meurt pour 25 francs. Il
paraît que ce propos est sublime. Mais
hier personne parmi les admirateurs
n'a eu l'idée de le mettre en pratique.»
Le Français essaye de se consoler du
déploiement de drapeaux, des illumi-
nations et de la gaieté qu'il n'a pas osé
nier en insinuant que c'a été la même
chose « sous tous les régimes », que
« c'est l'honneur de la population pari-
sienne de se plaire à tous les spectacles
et de saisir avec empressement toute
occasion de se distraire et de se ré-
jouir » ; donc la République n'a pas le
droit de s'approprier l'éclatante mani-
festation de mardi. Le journal roya-
liste espère que « ni les pétards
qu'on a tirés, ni les drapeaux qu'on a
déployés, ni les lampions qu'on a allu-
més ne donneront un jour de plus
d'existence à la troisième République,
destinée, par une loi de nature, au sort
de ses aînées».
Le sort des aînées de la troisième
République a été d'être assassinées
par des Bonaparte que l'assassinat
a faits empereurs. D'où il suit que
le journal royaliste espère l'empire.
11 y a peut-être quelque modestie de
la part des royalistes à menacer la
République de l'empire, mais il y aurait
pour eux quelque ridicule à la menacer
de la royauté.Ils savent comme nous que
jamais la royauté n'a rien pu contre la
République. Elle a eu beau en 1792
avoir l'Europe avec elle, la République
les a vigoureusement « reconduites ».
En 1814 et en 1815, ce n'est pas à la
République que l'Europe et elle ont eu
affaire. Pas plus en 1851 qu'en 1799, ce
n'est la royauté qui a tué la Républi-
que. L'empire seul a opéré ce meurtre,
— dans des conditions qui ne se renou-
velleront pas.
La première condition pour ces be-
sognes-là, c'est un Bonaparte; la se-
conde, c'est un Bonaparte victorieux ou
président. S'il existe quelque part un
Bonaparte qui revienne d'Arcole et des
Pyramides, qui ait été contemplé par
quarante siècles, dont l'épée semble un
rayon de soleil, la République doit
s'inquiéter. Elle doit trembler si elle a
pour président depuis trois ans un Bo-
naparte. Mais le président de la Répu-
blique s'appelle Grévy, et, en fait de
victorieux, je ne vois que deux Bona-
parte dont l'un n'a pas même vaincu
son père et dont l'autre n'a pas même
vaincu son fils. Le Français en sera
pour son espérance : la troisième Ré-
publique n'aura pas le sort de ses
aînées.
La morale de tout cela, c'est que la
fête nationale n'est pas la fête des réac-
tionnaires, c'est-à-dire que la réaction
est le contraire de la nation. Les jour-
naux royalistes ont éprouvé le besoin
de le démontrer une fois de plu s.C'était
inutile, on le savait de reste.
AUGUSTE VACQUERIE.
~m~
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil de cabinet au ministère de la
justice, sous la présidence de M. Brisson.
Le ministre de la guerre a communiqué
au conseil la dépêche rassurante qu'il
vient de recevoir du général de Courcy et
que nous publions ci-dessous.
M. Allain-Targé a transmis les rensei-
gnements qui lui sont parvenus des dépar-
tements sur la fête du 14 juillet, qui a
été célébrée partout avec éclat et sans
incident.
Le ministre des affaires étrangères a en-
tretenu ses collègues du projet de loi ten-
dant à imposer jusqu'à 50 010 de leur
valeur les produits roumains à leur entrée
en France. Il a insisté sur la nécessité de
voter promptement cette loi, qui va d'ail-
leurs venir en discussion à la Chambre
aussitôt après le budget.
Enfin l'amiral Galiber a fait part des
dernières nouvelles qu'il a reçues sur les
incidents du Cambodge.
-, ——————— -———————.
COULISSES DES CHAMBRES
Les discussions économiques vont suc-
céder aux discussions financières. Immé-
diatement après le budget, la Chambre va
aborder l'interpellation de M. Ballue sur
l'admission temporaire des filés de coton.
Comme remède à la crise qui sévit ac-
tuellement à Lyon, M. Ballue demande
que le gouvernement use de la faculté
que lui donne la loi de 18;<6 et autorise
l'admission temporaire des filés de coton
étrangers propres à la fabrication de tis-
sus mélangés de manière a permettre aux
fabricants lyonnais de lutter contre la
concurrence étrangère.
Cette interpellation va se doubler d'une
autre en sens contraire dont M. Mézières
a pris l'initiative hier.
Le député de Meurthe-et-Moselle demande
qu'on modifie les dispositions du décret de
1870 qui a autorisé l'admission temp.-
raire des fontes étrangères qui viennent se
faire ouvrir en France. Il veut supprimer
le trafic des acquits-à-caution qui résulte
de l'application de ce décret.
Le ministre du commerce se trouve
donc placé au point de vue du principe
entre deux demandes contradictoires.
Nous croyons savoir que M. Pierre Le-
grand, qui doit répondre aux deux inter-
pellations, opposera une égale fin de non-
recevoir à M. Ballue et à M. Mézières.
Le ministre du commerce pense qu'il
n'est pas possible de trancher ainsi une
aussi grave question que cetle de l'admis-
sion temporaire. La commiss on des 44
nommée par la Chambre pour faire une
enquête industrielle a délégué plusieurs
de ses membres pour faire une enquête
particulière sur l'admission temporaire,et
cette enquête n'a pas encore abouti. En
l'absence de conclusions, le gouvernement
ne se croit pas tenu d'improviser une so-
lution dans une question aussi considé-
rable.
Le gouvernement pense, d'ailleurs, qu'il
n'est pas opportun à la veille des élec-
tions de provoquer une agitation sur cette
question dans laquelle sont engagés des
intérêts considérables et contradictoires.
L'admission temporaire réclamée par cer-
tains industriels du Rhône, de la Loire et
de l'Isère est, en effet, combattue non
moins énergiquement par les industriels
du Nord et de l'Est. En cet état, le gou-
vernement se prononce pour le maintien
du statu quo.
-o-
Le comité électoral des gauches des
deux Chambres est convoqué en séance
plénière pour aujourd'hui. Il doit statuer
sur les moyens de recueillir des adhésions
au manifeste qu'il a élaboré. Des exem-
plaires du manifeste seront distribués aux
présidents des groupes représentés dans
le comité, et les présidents recueilleront
eux-mêmes des signatures dans leurs
groupes respectifs.
Le manifeste sera publié dès que le
gouvernement aura arrêté la date des
élections.
Disons, à ce-propos, qu'il est à peu prèS
certain aujourd'hui que c'est la date du
27 septembre qui sera choisie pour les
élections.
-o-
Le président et le rapporteur de la
commission des crédits de Madagascar
demanderont que la discussion de la de-
mande de crédits soit fixée à lundi pro-
chain 27 juillet.
-o-
Le ministre de la guerre demandera à
la Chamb e de voter en deuxième délibé-
ration, avant l'expiration de la législature,
le projet de loi sur l'organisation de l'ar-
mée coloniale.
De la sorte, ce projet pourra être porté
au Sénat et voté par lui, même après
l'expiration du mandat de la Ch tmbre ac-
tuelle. Ce projet, en effet, émane de l'ini-
1 tiative du gouvernement et à ce titre il ne
disparaîtra pas avec la Chambre qui l'a
voté la première.
- 4>
Le ministre de la guerre a reçu du généra]
de Courcy la dépêche. suivante : r -
,.. Hué, 15 juillet.
Je suis heureux de vous faire connaître
que tous les princes du sang sont rentrés
et réunis à la légation de France. La fa-
m lie royale a désigné comme seul régent
jusqu'au retour du roi, Thox-Uan, oncle
du roi Tu-Duc.
Les princes vont s'installer dans leurs
propriétés particulières, et la reine-mère,
qui rentre demain avec les reines, va ha-
biter le palais du Tombeau de Tu-Duc.
Le cc-mat a été réformé avec ceux des
ministres qui ne nous sont pas hostiles,
auxquels ont été adjoints un certain nom-
bre de hauts fonctionnaires pris parmi nos
partisans.
Le ministère de la guerre, remis entre
mes mains, a été confié par moi à M. de
Champeaux, notre résident à Hué.
Une proclamation sera lancée demain
par le nouveap régent. Elle prescrira à
tous les fonctionnaires en Annam et au
Tonkin d'avoir à rétablir la tranquillité,
punir les pillards et rebelles et aider l'ar-
mée française par tous les moyens.
Thu-Yet est à la citadelle de Cam-Lo. Il
n'a plus que 1,500 hommes avec lui.
L'état sanitaire est excellent. Les trou-
pes se refont de leurs fatigues.
AU SÉNAT
H ne manquait plus que cela, aux
aventures lointaines, que d'être glori-
fiées par le Sénat ; ou, si l'on veut. il
ne manquait plus au Sénat que de glo-
rifier ces aventures 1 C'est complet
maintenant, et il faut avouer que les
élus du petit suffrage, ces législateurs
irresponsables, ces mandataires sans
mandants dont la comédie révision-
niste de M. Ferry a augmenté les pou-
voirs, ne se montrent pas ingrats pour
l'inventeur du congrès à secret.
Aussi l'ex-président du conseil qui a
gardé, à la Chambre, un silence si pru-
dent pendant la discussion du traité de
paix, s'est-il ménagé hier, pondant ce
même débat an Luxembourg, un triom-
phe éclatant. par procureur. M.
Peyron, M. Tirard sont résolument
montés au Capitule aux applaudisse-
ments de la gauche sénaluriale. M.
Tirard et M. Peyron ont proclamé la
parfaite innocence de leur chef, la leur
par conséquent. Ils nous ont raconté,
pour la première fois, que la Chine
n'avait jamais offert d'indemnité, pas
même trois millions. C'est pourtant
M. Jules Ferry, c'est-à-dire la vérité
faite homme, qui nous avait informés
de cette offre , confirmée d'ailleurs
par une dépèche du Livre Jaune. N'im-
porte ! il est commode aujourd'hui de
nier cette proposition puisqu'on a eu le
tort de la repousser. Et, pourquoi se
gênerait-on? On est devant le Sénat
c'est-à-dire devant l'Assemblée qui doit
tout à M. Ferry; devant l'Assemblée à
laquelle M. Wasdeck et ses préfets de-
vaient donner la direction suprême du
suffrage universel 1 Les Luxembour-
geois ne sont pas ingrats et ils le prou-
vent. Ils applaudissent toutes les décla-
rations de M. Peyron et de M. Tirard ;
ils murmurent quand on parle des
fautes inexpiables de ce cabinet et
quand on dit qu'il est tombé « aux ap-
plaudissements du pays ».
Mais alors, contre qui murmurent ces
Tonkinois, d'autant plus impénitents
qu'ils sont irresponsables? Contre la
Chambre évidemment, contre le suf-
frage universel qu'elle représente.
De leur part, cette conduite est natu-
relle ; elle est logique. Ne sont-ils pas
en révolte contre le pays, contre le suf-
frage universel qu'ils voient se dresser
mdigne et menaçant? Avec un minis-
tère complice, c'était commode, c'était
simple : les caporaux du petit suffrage,
guidés par les sénateurs, commandaient
au suffrage universel le vote de la liste
en douze temps. Le suffrage universel
n'avait ni le temps ni les moyens de se
défendre. Le tour était joué et le Sénat
l'emportait. La future Chambre, nom-
mée selon le bon plaisir des Luxem-
bourgeois, était à leur discrétion. Les
députés, n'ayant plus à compter avec
l'opinion publique, étaient. plus
>énateurs que les sénateurs eux-mê-
mes. Ce* beaux rêves du ministère
Ferry-Waldeck sont évanouis. La
France ent ère a l'œil fixé sur le Sénat
et sur ses agents. Pendant deux mois,
quiconque tient à la République, au
suffrage universel, quiconque ne veut
pas livrer à une coterie, au pays légal,
le sort de la démocratie, va signaler le
Sénat et ses courtiers électoraux à la
défiance des électeurs.
Le coup est manqué, le truc est dé-
biné, tout le monde en a vu les ficelles,
et partout conseillers généraux et au-
tres caporaux du petit suffrage battent
en retraite. Le Sénat ne peut se con-
soler de la partie qui lui échappe, du
coup de fortune que les combinaisons
de M. Jules Ferry avaient mises en sa
main. Nous ne pouvons eompâtir à. sa
douleur, mais elle s'explique suffisam-
ment. Le ministère Ferry-Peyron-Wal-
deck-Rouvier marchait à l'aventure ou
aux aveniures comme on voudra, sui-
vant qu'où interprétera l'aveu d'un de
ses membres. Mais qu'est-ce que cela
peut faire aux éius ou suffrage pour
rire, qu'est-ce que cola peut faire au
Sénat qu'un ministère risque la fortune
de la Fi auce et de la République ? Sous
ce ministère, si tout allait de mai en
pis, les affaires des Luxembourgeois
prospéra eut à vue d'œil. N'est-ce pas
là le prillcipal1
A. GAULIBH.
A une majorité énorme, la Chambre a
supprimé un des i : pôts de la guerre,
l'impôt s r le papier, et a décidé que les
cigates et le tabac de luxe paieraient les
frais de cette réduction.
La combinaison ne nous paraît pas
mauvaise, puisqu'on frappe une consom-
mation nuisible et qu'on dégrève une ma-
tiere qui n'aurait jamais dû être taxée.
1 avait été aussi question de la sup-
pression de l'impôt sur le sel, qui est
également fort condamnable. La majorité
a repoussé cet amendement.
Le budget extraordinaire est en partie
vOlé. - A. G.
UNE REVOLUiM ECONOMIQUE
Les papiers-nouvelles annoncent la pro-
chaine arrivée à Paris d'une tête jadis
couronnée dout le porteur répond au nom
de Repoutyombo. Ce Répoutyombo ré-
gnait en Sénégambie; la France l'a dépos-
sédé et a i slallé la République dans ses
Etats moye nant une indemnité consis-
tant en un certain nombre de vieux sha-
kos, caleçons de bain, médailles de co-
mices agricoles et de concours orphéoni-
ques donnés une fois pour toutes, et une
rente annuelle de huit cent francs. Les
shakos, caleçons, médailles, etc. ont été
livrés; mais, quand il s'est agi de payer la
rente, il parait que la République fran-
çaise s'est fait tirer l'oreille. Là-dessus,
l'ex-roi Repoutyombo a pris le paquebot
et avant peu MOUS le verrons courir les
ministères comme un simple sous-préfet
en disponibilité.
Ce que c'est que de nous ! et comme
les institutions les plus respectables s'é-
branlent au vent des passions révolution-
naires! Se représente-t-on cet oint du
Seigneur faisant antichambre côte à côte
avec les quémandeurs du Mérite agricole et
de bureaux de tabai*, exposé aux rebuffades
des huissiers, éconduit par les sous-
chefs, bafoué par les commis princi-
paux ? On dira que ce roi est un roi séné-
galais. L'objection n'a aucune valeur. Un
roi est un roi, commt> un noble est un -
noble. En bon droit féodal, le plus mince
écuyer est l'égal du roi de France ; le plus
petit roitelet dit à l'empereur : Mon cou-
sin. On dira que ce roi sénégalais est un
roi nègre. Qu'est-ce que cela peut faire l'
1 affaire? Le droit divin n'a nas de cou*
leur. --- ---
Je me hâte de reconnaître que la con-
duite de la République française est digne
de blâme. Du moment qu'elle a signé un
contrat avec Répoutyombo, elle doit le
tenir. Engagée au Tonkm, à Madagascar,
elle n'a pas voulu se lancer au Sénégal
dans une nouvelle aventure ; elle a pré-
féré traiter à l'amiable avt-'C Répoutyombo.
Rapontyombn, de son côté, s'est dit que,
par le temps qui court, une inscription
au grand-livre valait uien un diadème
vraisemblablement en cI, -ysocale. Nous
lui avons acheté sa couronne à fonds
perdu ; il ne nous reste plus qu'à nous
exécuter.
A la vérité, 800 fr. par an cela fait une
so'i me et le vent est présentement aux
économies. Les réactionnaires coalisés
crient-à tout propos au déficit; que di-
ront-ils si l'on impose au budget des dé-
penses une nouvelle charg- de quarante
louis? M. Raoul Duval interpellera M.
Sadi-Caraot; M. Daynaud refera une fois
de plus le discours que feu M. Haentjens
a prononcé tant de fois; mais, à mon sens.
il est une considération qui doit primee
toutes les autres. Une parole a été don-
née, elle doit être t nue. Le crédit d'un
Etat dépend de la façon dont il fait face 1
ses promesses.
Et vraiment on ne s'explique point les
atermoiements du ministère quand on
jette un coup d'œii ..ur notre histoire de-
puis cent ans. Songez à ce qu'il nous a
fallu pour nous débarrasser de Louis XVI?
Il a fallu les journées des 5 et 6 octobre,
du 10 août ; il a fallu metti e sur pied qua-
torze armées, abatte je ue sais combien
de têtes, reprendre Lyon, la Vendée à la ,
réaction et Toulon aux Anglais. La chute
de l'empire nous a coûté notre frontière,
celle de la Restauration, les trois glorieu-
ses. Pour avoir raison de la monarchie
tricolore une i évolution a été nécessaire, -
et le second empire n'a quitté notre ter-
ritoire qu'après y avoir aupelé l'ennemi.
Une occasion *e présente de détruire
quelque part la monarchie pour 800 fr.;
ne la laissons pas échapper.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
LES ON-DIT
Hier, à quatre heures, M. Beurdeley.
adjoint au maire du 88 arrondissement, a
prononcé le divorce de M. le marquis de
Caux et de Mme Adeliua Patti.
Les témoins de la cantatrice divorcée
étaient MM. Pierre Véron et Francis Malo
gnard.
«
& »
Les étudiants ont décidé de fêter cette
année avec un grand éclat l'anniversaire
de la naissance de M. Cuevreul, qui entré
dans sa centième année le 31 août pro-
chain.
Cette fête aura lieu le 5 août, la jeu-
nesse des Ecoles étant en vacances à la
fin du mois.
M. Chevreul fait partie de l'administra-
tion du Muséum depuis 1810. En 1826, il
a été nommé membre de l'Académie des
sciences en remplacement de M. Proust,
dont il avait été le concurrent en 1816. Il
fait donc partie de l'Institut depuis cin-
quante-neuf an". Ce cas est très rare dans'
les annales de la docte compagnie.
Le marechal de Richelieu, admis S
vingt-quatre ans, resta pendant soixante-
Feuilleton du RAPPEL
DU 18 JUILLET
6
LA BANDE
DES
COPURCHICS
ROMAN PARISIEN
n
cambouliveo. - (Suite)
Comboulives dînait chez M. Blériotte,
3on honorable correspondant, celui qui
devait veiller sur sa vertu et qui lui ver-
sait la pension octroyée par la munin-
uence de sa famille.
M. Blériotte était un personnage d'une
Reproduction interdite.
Voir le Rappel du 13 au 17 niiKeV
gravité suffisante, bourgeois de caractère
et d'état. Il possédait une fabrique de sa-
vons fins. Il avait la spécialité du savon
au lait d'eucalyptus et de la pâte manilac-
tée au korohoponox du Japon. Ses pro-
duits, lancés par une réclame adroite,
faisaient florès, et il gagnait beaucoup
d'argent.
Quand il se trouvait en famille, c'est-à-
dire entre sa femme et sa fille, M. Blé-
riotte s'épanchait.
— Je suis riche, disait-il, vous êtes ri-
ches. C'est parce que je suis habile.
Quelle est mon habileté ? La réclame
d'abord. Ah ! c'est que je sais m'y pren-
dre 1 Ensuite le génie commercial. J'ai in-
venté des odeurs. J'ai fait éclore de mon
cerveau le korohoponox du Japon. Per-
sonne ne connaissait le korohoponox, na-
turellement, tout le monde en a voulu,
et il n'y a plus que moi pour ne pas savoir
ce que c'est. Très curieux. Ne parlez
jamais de ça, vous autres. Voyez-vous, le
plus fin, le meilleur savon du monde ne
peut revenir au delà de quarante centimes
le pain, et on le vend trois francs cin-
quante, quatre francs, cinq francs môme,
quand il est an lait d'eucalyptus. Encore
une bonne blague ! Mais l'espèce humaine
est si bête t Quand on connaît un peu les
hommes, il n'est pas difficile de les pren-
dre; mais où on mesure véritablement
le malin, c'est à la façon dont il évite
qu'on le mette dedans plutôt qu'à la ma-
nière dont il enfonce les autres. J'étais
fait pour réussir parce que je suis du
Midi, d'Arles, de la belle et bonne ville
d'Arles, le pays des Vénus, et que cepen-
dant je suis un homme du Nord, parce
que mon grand-père était de Normandie.
Il se nommait BlériOt. Dans le Midi, on
a fait de Blériot Blériotte, par prononcia-
tion. Le commis de l'état civil s'est trompé
en rédigeant mon acte de naissance. J'au-f
rais pu le faire rectifier, je ne l'ai pas voulu
parce que, à Arles, tout le monde dit Blé-
riotte, et qu'il y a moins de Blériotte qu'il
n'y a de Blériot dans le commerce. Je suis
peut-être même le seul au monde, car il
n'y a que moi de Blériotte dans le Bottin.
Mme Blériotte était née Clazoménopou-
los. Son père, gree d'origine, établi dans
la cité phocéenne, comme il convient à
un Grec devenu Marseillais, était mort
après avoir fait de sa fille Lucrèce l'épouse
de M. Blériotte. Lucrèce était un nom
romain enté sur une famille grecque;
la mère de Mme Blériotte était de Rome.
Lucrèce Blériotte, née d'un père grec,
d'une mère romaine, élevée à Marseille
dans la plus sainte des ignorances, et
mariée à un Arlésien, tirait de cet alual.
game étrange un caractère qui ne l'était
pas moins.
- Tél disait-elle à son mari, tu es le
seul au monde 1 Que je le crois que tu es
le seul! Lequel autre serait toi? Je n'ai
pas épousé deux hommes et mon mari est
mon mari, té I qu'il ne ressemble en rien
à un autre. Et sans doute que nous som-
mes riches et que nous le deviendrons
encore davantage. Té ? la belle affaire 1 Tu
m'as, je t'ai; nous avons l'esprit du com-
merce, et toujours nous gagnerons de l'ar-
'gent gros comme nous. C'est Elvire qui
sera riche ! et té 1 la petite I
En disant ce mot, Mme Blériotte donna
une tape sur l'épaule de sa fille.
- Fais donc attention, maman, dit El-
vire, tu me fais mal.
— Té 1 là I la voilà qui se plaint, pour
une chiquenaude ! Je t'en ai bien donné
d'autres, q and tu étais plus petite, car tu
avais joliment besoin d'être fouettée. Il
faut corriger les enfants, ça fait circuler
le sang. Tu ne penses pas à quoi je
pense, Blériotte ?
- Hé, quoi ? - -
- Je pense que nous avons eu tort de
donner à notre fille un nom de M. de La-
martine.
— Pourauoi?
- Ça l'influence, té !
— Tu crois ?
- Ça la fait manquer de caractère.
- Oh ! tu crois., parce qu'elle neparle
pas beaucoup.
— C'est qu'elle devrait parler, té 1 Sa
langue est dans sa bouche exprès pour ça.
Elle rêvasse, cette petite.
— C'est toi qui as choisi son nom.
— Té, je le sais. Je lisais ce M. de La-
martine, et je me disais : té, quelqu'un
qui aimerait comme ça, ce serait chatouil-
lant.
— Mais il me semble que tu dois savoir,
ma chère Lucrèce, ce que c'est que d'être
aimée.
— Par toi?
— Sans doute, par moi.
— Oh 1 que ce n'est pas du tout la même
chose 1 Oh ! non, ce M. de Lamartine, té,
c'est. c'est. je ne puis pas t'expliquer la
manière dont il aime, mais il vous pousse
des soupirs longs comme de Paris à Mar-
seille. C'est de la lune, tu comprends ?
- Pas du tout.
- Enfin, ce n'est pas comme toi, c'est
même le contraire; et té, ao fait, c'est
peut-être le meilleur, Blériotte, ta ma-
nière?
— Ce doit être le meilleur.
- Aussi j'ai eu tort de nommer notre
fille Elvire pour qu'on lui parle tout le
temps à la clarté des étoiles.
- Les étoiles, s'écria une voix, c'est les
veilleuses de l'amour.
— Té 1 s'écria Mme Blériotte, c'est l'ami
Camboulives. -
- Tu viens dîner? demanda Blériott?.,'
— Oui, dit Camboulives.
— Assieds-toi.
— Bonsoir, ma petite Elvire, dit Caffl*
boulives.
— Bonsoir, Elie, dit Mlle Blériotte,
— Ah ! si vous saviez quelles aventures
il m'est arrivé depuis huit jours que je ne
vous ai vu- 1 s'écria Camboulives.
- Racontez-nous ça, Elie, dit Elvirel
- Pas devant les dames, dit Blériotte
Elie n'est qu'un polisson et.
— Té, il peut dire ce qu'il a fait, dMf
Mme Blériotte.
— Ça peut se raconter, effectivement^
dit Camboulives.
EDGAR MONTEIL.
(A suivre.)
ADMINISTRATIOîT
-
.:m, RUE DE V.ALOIS..fa
ABOIEMENTS
PARIS
Trois mois.10 I)
iii 'js 20 ))
BÉPARTEHENTS1
Trois mois 13 50
Six moi s. 27 il
Aùxesser lettres et mandats
A M. ERNEST LEFÈVRE '- *
«ADMINISTRATEUR GÉRAK2
- lui J
REDACTION"
S'adresser au Secrétaire ae la Réaactio.
De 4 à 6 heures du «tir
38 f HUE DE VAX OIS, la
EfiS manuscrits 11031 insères ne seroniDas l'enila
ANNONCES
3W. Ch. 1AGRANGE, CERF et C.
j>Jace de la Bourse, 6
LA FETE ET LA RÉACTION
Extrait d'un journal royaliste :
— « Dans la plupart des quartiers
les rues étaient à peu près désertes, et
sans quelques milliers de provinciaux
qui profitaient de la circonstance pour
visiter Paris à prix réduits, la capitale
aurait présenté l'aspect désolé d'une
cité ravagée par quelque fléau. C'était
lugubre; les bals publics râlaient; les
badauds, se souvenant des splendeurs
du temps passé, cherchaient les féeri-
ques décorations et les illuminations
grandioses d'autrefois; nulle gaieté;
l'indifférence a succédé à l'enthou-
siasme. Quelle débâcle ! On a d'autres
soucis que d'allumer des lampions. On
conçoit que les Français éprouvent un
médiocre besoin de folâtrer. »
Extrait d'un journal royaliste :
— « La fête du 14 juillet a été hier
ce qu'elle était les autres années. Mêmes
déploiements de drapeaux, mêmes ré-
jouissances, mêmes danses et mêmes
lampions. La fête, favorisée par un
temps superbe, ne le cédait pas de beau-
coup comme animation à ses aînées.
Hier comme les années précédentes, la
population parisienne a prouvé qu'elle
était trop amie des plaisirs pour né-
gliger une occasion de s'amuser. »
— Eh bien, soit, convient un troi-
sième journal royaliste, clérical celui-
!à, Y Univers, puisqu'il faut l'appeler par
son nom ; eh bien, soit, « la fête d'hier
a présenté le même aspect que celles
des autres années » ; mais quel était cet
aspect ? « l'aspect d'une immense foire ».
De qui se composait la foule ? de « ba-
dauds » et d' « énergumènes ». C'est
vrai, « les carrefours grands ou petits
étaient transformés en bals publics »,
mais « on s'y trémoussait au son d'une
musique discordante ». Et qui est-ce qui
dansait? « les amateurs ordinaires des
bals de barrière ; ils avaient pris pos-
session de toutes les rues ; la débauche
s'étalait en souveraine ; les prostituées
bousculaient les jeunes filles et les
femmes promenées au milieu des guin-
guettes par des pères et des maris im-
bécilles » Mais un simple fait va vous
dire à quel point la fête a été ratée :
pas un député, pas un homme, per-
sonne! n'a eu seulement l'idée de se
f tire tuer sur la barricade de Baudin !
Vous vous demandez pourquoi diable
une fête nationale n'est réussie que si
on se fait tuer sur une barricade?
>»» ue me charge pas de vous l'expli-
quer. Je me borne à copier :
« Rue du Faubourg-Saint-Antoine,
151, à côté de la plaque commémora-
live rappelant la mort de Baudin, on
voit un grand tableau représentant le
député un drapeau tricolore à la main
et monté sur une barricade. Au-des-
sous, cette inscription : Vous allez voir
comment on meurt pour 25 francs. Il
paraît que ce propos est sublime. Mais
hier personne parmi les admirateurs
n'a eu l'idée de le mettre en pratique.»
Le Français essaye de se consoler du
déploiement de drapeaux, des illumi-
nations et de la gaieté qu'il n'a pas osé
nier en insinuant que c'a été la même
chose « sous tous les régimes », que
« c'est l'honneur de la population pari-
sienne de se plaire à tous les spectacles
et de saisir avec empressement toute
occasion de se distraire et de se ré-
jouir » ; donc la République n'a pas le
droit de s'approprier l'éclatante mani-
festation de mardi. Le journal roya-
liste espère que « ni les pétards
qu'on a tirés, ni les drapeaux qu'on a
déployés, ni les lampions qu'on a allu-
més ne donneront un jour de plus
d'existence à la troisième République,
destinée, par une loi de nature, au sort
de ses aînées».
Le sort des aînées de la troisième
République a été d'être assassinées
par des Bonaparte que l'assassinat
a faits empereurs. D'où il suit que
le journal royaliste espère l'empire.
11 y a peut-être quelque modestie de
la part des royalistes à menacer la
République de l'empire, mais il y aurait
pour eux quelque ridicule à la menacer
de la royauté.Ils savent comme nous que
jamais la royauté n'a rien pu contre la
République. Elle a eu beau en 1792
avoir l'Europe avec elle, la République
les a vigoureusement « reconduites ».
En 1814 et en 1815, ce n'est pas à la
République que l'Europe et elle ont eu
affaire. Pas plus en 1851 qu'en 1799, ce
n'est la royauté qui a tué la Républi-
que. L'empire seul a opéré ce meurtre,
— dans des conditions qui ne se renou-
velleront pas.
La première condition pour ces be-
sognes-là, c'est un Bonaparte; la se-
conde, c'est un Bonaparte victorieux ou
président. S'il existe quelque part un
Bonaparte qui revienne d'Arcole et des
Pyramides, qui ait été contemplé par
quarante siècles, dont l'épée semble un
rayon de soleil, la République doit
s'inquiéter. Elle doit trembler si elle a
pour président depuis trois ans un Bo-
naparte. Mais le président de la Répu-
blique s'appelle Grévy, et, en fait de
victorieux, je ne vois que deux Bona-
parte dont l'un n'a pas même vaincu
son père et dont l'autre n'a pas même
vaincu son fils. Le Français en sera
pour son espérance : la troisième Ré-
publique n'aura pas le sort de ses
aînées.
La morale de tout cela, c'est que la
fête nationale n'est pas la fête des réac-
tionnaires, c'est-à-dire que la réaction
est le contraire de la nation. Les jour-
naux royalistes ont éprouvé le besoin
de le démontrer une fois de plu s.C'était
inutile, on le savait de reste.
AUGUSTE VACQUERIE.
~m~
Les ministres se sont réunis hier matin
en conseil de cabinet au ministère de la
justice, sous la présidence de M. Brisson.
Le ministre de la guerre a communiqué
au conseil la dépêche rassurante qu'il
vient de recevoir du général de Courcy et
que nous publions ci-dessous.
M. Allain-Targé a transmis les rensei-
gnements qui lui sont parvenus des dépar-
tements sur la fête du 14 juillet, qui a
été célébrée partout avec éclat et sans
incident.
Le ministre des affaires étrangères a en-
tretenu ses collègues du projet de loi ten-
dant à imposer jusqu'à 50 010 de leur
valeur les produits roumains à leur entrée
en France. Il a insisté sur la nécessité de
voter promptement cette loi, qui va d'ail-
leurs venir en discussion à la Chambre
aussitôt après le budget.
Enfin l'amiral Galiber a fait part des
dernières nouvelles qu'il a reçues sur les
incidents du Cambodge.
-, ——————— -———————.
COULISSES DES CHAMBRES
Les discussions économiques vont suc-
céder aux discussions financières. Immé-
diatement après le budget, la Chambre va
aborder l'interpellation de M. Ballue sur
l'admission temporaire des filés de coton.
Comme remède à la crise qui sévit ac-
tuellement à Lyon, M. Ballue demande
que le gouvernement use de la faculté
que lui donne la loi de 18;<6 et autorise
l'admission temporaire des filés de coton
étrangers propres à la fabrication de tis-
sus mélangés de manière a permettre aux
fabricants lyonnais de lutter contre la
concurrence étrangère.
Cette interpellation va se doubler d'une
autre en sens contraire dont M. Mézières
a pris l'initiative hier.
Le député de Meurthe-et-Moselle demande
qu'on modifie les dispositions du décret de
1870 qui a autorisé l'admission temp.-
raire des fontes étrangères qui viennent se
faire ouvrir en France. Il veut supprimer
le trafic des acquits-à-caution qui résulte
de l'application de ce décret.
Le ministre du commerce se trouve
donc placé au point de vue du principe
entre deux demandes contradictoires.
Nous croyons savoir que M. Pierre Le-
grand, qui doit répondre aux deux inter-
pellations, opposera une égale fin de non-
recevoir à M. Ballue et à M. Mézières.
Le ministre du commerce pense qu'il
n'est pas possible de trancher ainsi une
aussi grave question que cetle de l'admis-
sion temporaire. La commiss on des 44
nommée par la Chambre pour faire une
enquête industrielle a délégué plusieurs
de ses membres pour faire une enquête
particulière sur l'admission temporaire,et
cette enquête n'a pas encore abouti. En
l'absence de conclusions, le gouvernement
ne se croit pas tenu d'improviser une so-
lution dans une question aussi considé-
rable.
Le gouvernement pense, d'ailleurs, qu'il
n'est pas opportun à la veille des élec-
tions de provoquer une agitation sur cette
question dans laquelle sont engagés des
intérêts considérables et contradictoires.
L'admission temporaire réclamée par cer-
tains industriels du Rhône, de la Loire et
de l'Isère est, en effet, combattue non
moins énergiquement par les industriels
du Nord et de l'Est. En cet état, le gou-
vernement se prononce pour le maintien
du statu quo.
-o-
Le comité électoral des gauches des
deux Chambres est convoqué en séance
plénière pour aujourd'hui. Il doit statuer
sur les moyens de recueillir des adhésions
au manifeste qu'il a élaboré. Des exem-
plaires du manifeste seront distribués aux
présidents des groupes représentés dans
le comité, et les présidents recueilleront
eux-mêmes des signatures dans leurs
groupes respectifs.
Le manifeste sera publié dès que le
gouvernement aura arrêté la date des
élections.
Disons, à ce-propos, qu'il est à peu prèS
certain aujourd'hui que c'est la date du
27 septembre qui sera choisie pour les
élections.
-o-
Le président et le rapporteur de la
commission des crédits de Madagascar
demanderont que la discussion de la de-
mande de crédits soit fixée à lundi pro-
chain 27 juillet.
-o-
Le ministre de la guerre demandera à
la Chamb e de voter en deuxième délibé-
ration, avant l'expiration de la législature,
le projet de loi sur l'organisation de l'ar-
mée coloniale.
De la sorte, ce projet pourra être porté
au Sénat et voté par lui, même après
l'expiration du mandat de la Ch tmbre ac-
tuelle. Ce projet, en effet, émane de l'ini-
1 tiative du gouvernement et à ce titre il ne
disparaîtra pas avec la Chambre qui l'a
voté la première.
- 4>
Le ministre de la guerre a reçu du généra]
de Courcy la dépêche. suivante : r -
,.. Hué, 15 juillet.
Je suis heureux de vous faire connaître
que tous les princes du sang sont rentrés
et réunis à la légation de France. La fa-
m lie royale a désigné comme seul régent
jusqu'au retour du roi, Thox-Uan, oncle
du roi Tu-Duc.
Les princes vont s'installer dans leurs
propriétés particulières, et la reine-mère,
qui rentre demain avec les reines, va ha-
biter le palais du Tombeau de Tu-Duc.
Le cc-mat a été réformé avec ceux des
ministres qui ne nous sont pas hostiles,
auxquels ont été adjoints un certain nom-
bre de hauts fonctionnaires pris parmi nos
partisans.
Le ministère de la guerre, remis entre
mes mains, a été confié par moi à M. de
Champeaux, notre résident à Hué.
Une proclamation sera lancée demain
par le nouveap régent. Elle prescrira à
tous les fonctionnaires en Annam et au
Tonkin d'avoir à rétablir la tranquillité,
punir les pillards et rebelles et aider l'ar-
mée française par tous les moyens.
Thu-Yet est à la citadelle de Cam-Lo. Il
n'a plus que 1,500 hommes avec lui.
L'état sanitaire est excellent. Les trou-
pes se refont de leurs fatigues.
AU SÉNAT
H ne manquait plus que cela, aux
aventures lointaines, que d'être glori-
fiées par le Sénat ; ou, si l'on veut. il
ne manquait plus au Sénat que de glo-
rifier ces aventures 1 C'est complet
maintenant, et il faut avouer que les
élus du petit suffrage, ces législateurs
irresponsables, ces mandataires sans
mandants dont la comédie révision-
niste de M. Ferry a augmenté les pou-
voirs, ne se montrent pas ingrats pour
l'inventeur du congrès à secret.
Aussi l'ex-président du conseil qui a
gardé, à la Chambre, un silence si pru-
dent pendant la discussion du traité de
paix, s'est-il ménagé hier, pondant ce
même débat an Luxembourg, un triom-
phe éclatant. par procureur. M.
Peyron, M. Tirard sont résolument
montés au Capitule aux applaudisse-
ments de la gauche sénaluriale. M.
Tirard et M. Peyron ont proclamé la
parfaite innocence de leur chef, la leur
par conséquent. Ils nous ont raconté,
pour la première fois, que la Chine
n'avait jamais offert d'indemnité, pas
même trois millions. C'est pourtant
M. Jules Ferry, c'est-à-dire la vérité
faite homme, qui nous avait informés
de cette offre , confirmée d'ailleurs
par une dépèche du Livre Jaune. N'im-
porte ! il est commode aujourd'hui de
nier cette proposition puisqu'on a eu le
tort de la repousser. Et, pourquoi se
gênerait-on? On est devant le Sénat
c'est-à-dire devant l'Assemblée qui doit
tout à M. Ferry; devant l'Assemblée à
laquelle M. Wasdeck et ses préfets de-
vaient donner la direction suprême du
suffrage universel 1 Les Luxembour-
geois ne sont pas ingrats et ils le prou-
vent. Ils applaudissent toutes les décla-
rations de M. Peyron et de M. Tirard ;
ils murmurent quand on parle des
fautes inexpiables de ce cabinet et
quand on dit qu'il est tombé « aux ap-
plaudissements du pays ».
Mais alors, contre qui murmurent ces
Tonkinois, d'autant plus impénitents
qu'ils sont irresponsables? Contre la
Chambre évidemment, contre le suf-
frage universel qu'elle représente.
De leur part, cette conduite est natu-
relle ; elle est logique. Ne sont-ils pas
en révolte contre le pays, contre le suf-
frage universel qu'ils voient se dresser
mdigne et menaçant? Avec un minis-
tère complice, c'était commode, c'était
simple : les caporaux du petit suffrage,
guidés par les sénateurs, commandaient
au suffrage universel le vote de la liste
en douze temps. Le suffrage universel
n'avait ni le temps ni les moyens de se
défendre. Le tour était joué et le Sénat
l'emportait. La future Chambre, nom-
mée selon le bon plaisir des Luxem-
bourgeois, était à leur discrétion. Les
députés, n'ayant plus à compter avec
l'opinion publique, étaient. plus
>énateurs que les sénateurs eux-mê-
mes. Ce* beaux rêves du ministère
Ferry-Waldeck sont évanouis. La
France ent ère a l'œil fixé sur le Sénat
et sur ses agents. Pendant deux mois,
quiconque tient à la République, au
suffrage universel, quiconque ne veut
pas livrer à une coterie, au pays légal,
le sort de la démocratie, va signaler le
Sénat et ses courtiers électoraux à la
défiance des électeurs.
Le coup est manqué, le truc est dé-
biné, tout le monde en a vu les ficelles,
et partout conseillers généraux et au-
tres caporaux du petit suffrage battent
en retraite. Le Sénat ne peut se con-
soler de la partie qui lui échappe, du
coup de fortune que les combinaisons
de M. Jules Ferry avaient mises en sa
main. Nous ne pouvons eompâtir à. sa
douleur, mais elle s'explique suffisam-
ment. Le ministère Ferry-Peyron-Wal-
deck-Rouvier marchait à l'aventure ou
aux aveniures comme on voudra, sui-
vant qu'où interprétera l'aveu d'un de
ses membres. Mais qu'est-ce que cela
peut faire aux éius ou suffrage pour
rire, qu'est-ce que cola peut faire au
Sénat qu'un ministère risque la fortune
de la Fi auce et de la République ? Sous
ce ministère, si tout allait de mai en
pis, les affaires des Luxembourgeois
prospéra eut à vue d'œil. N'est-ce pas
là le prillcipal1
A. GAULIBH.
A une majorité énorme, la Chambre a
supprimé un des i : pôts de la guerre,
l'impôt s r le papier, et a décidé que les
cigates et le tabac de luxe paieraient les
frais de cette réduction.
La combinaison ne nous paraît pas
mauvaise, puisqu'on frappe une consom-
mation nuisible et qu'on dégrève une ma-
tiere qui n'aurait jamais dû être taxée.
1 avait été aussi question de la sup-
pression de l'impôt sur le sel, qui est
également fort condamnable. La majorité
a repoussé cet amendement.
Le budget extraordinaire est en partie
vOlé. - A. G.
UNE REVOLUiM ECONOMIQUE
Les papiers-nouvelles annoncent la pro-
chaine arrivée à Paris d'une tête jadis
couronnée dout le porteur répond au nom
de Repoutyombo. Ce Répoutyombo ré-
gnait en Sénégambie; la France l'a dépos-
sédé et a i slallé la République dans ses
Etats moye nant une indemnité consis-
tant en un certain nombre de vieux sha-
kos, caleçons de bain, médailles de co-
mices agricoles et de concours orphéoni-
ques donnés une fois pour toutes, et une
rente annuelle de huit cent francs. Les
shakos, caleçons, médailles, etc. ont été
livrés; mais, quand il s'est agi de payer la
rente, il parait que la République fran-
çaise s'est fait tirer l'oreille. Là-dessus,
l'ex-roi Repoutyombo a pris le paquebot
et avant peu MOUS le verrons courir les
ministères comme un simple sous-préfet
en disponibilité.
Ce que c'est que de nous ! et comme
les institutions les plus respectables s'é-
branlent au vent des passions révolution-
naires! Se représente-t-on cet oint du
Seigneur faisant antichambre côte à côte
avec les quémandeurs du Mérite agricole et
de bureaux de tabai*, exposé aux rebuffades
des huissiers, éconduit par les sous-
chefs, bafoué par les commis princi-
paux ? On dira que ce roi est un roi séné-
galais. L'objection n'a aucune valeur. Un
roi est un roi, commt> un noble est un -
noble. En bon droit féodal, le plus mince
écuyer est l'égal du roi de France ; le plus
petit roitelet dit à l'empereur : Mon cou-
sin. On dira que ce roi sénégalais est un
roi nègre. Qu'est-ce que cela peut faire l'
1 affaire? Le droit divin n'a nas de cou*
leur. --- ---
Je me hâte de reconnaître que la con-
duite de la République française est digne
de blâme. Du moment qu'elle a signé un
contrat avec Répoutyombo, elle doit le
tenir. Engagée au Tonkm, à Madagascar,
elle n'a pas voulu se lancer au Sénégal
dans une nouvelle aventure ; elle a pré-
féré traiter à l'amiable avt-'C Répoutyombo.
Rapontyombn, de son côté, s'est dit que,
par le temps qui court, une inscription
au grand-livre valait uien un diadème
vraisemblablement en cI, -ysocale. Nous
lui avons acheté sa couronne à fonds
perdu ; il ne nous reste plus qu'à nous
exécuter.
A la vérité, 800 fr. par an cela fait une
so'i me et le vent est présentement aux
économies. Les réactionnaires coalisés
crient-à tout propos au déficit; que di-
ront-ils si l'on impose au budget des dé-
penses une nouvelle charg- de quarante
louis? M. Raoul Duval interpellera M.
Sadi-Caraot; M. Daynaud refera une fois
de plus le discours que feu M. Haentjens
a prononcé tant de fois; mais, à mon sens.
il est une considération qui doit primee
toutes les autres. Une parole a été don-
née, elle doit être t nue. Le crédit d'un
Etat dépend de la façon dont il fait face 1
ses promesses.
Et vraiment on ne s'explique point les
atermoiements du ministère quand on
jette un coup d'œii ..ur notre histoire de-
puis cent ans. Songez à ce qu'il nous a
fallu pour nous débarrasser de Louis XVI?
Il a fallu les journées des 5 et 6 octobre,
du 10 août ; il a fallu metti e sur pied qua-
torze armées, abatte je ue sais combien
de têtes, reprendre Lyon, la Vendée à la ,
réaction et Toulon aux Anglais. La chute
de l'empire nous a coûté notre frontière,
celle de la Restauration, les trois glorieu-
ses. Pour avoir raison de la monarchie
tricolore une i évolution a été nécessaire, -
et le second empire n'a quitté notre ter-
ritoire qu'après y avoir aupelé l'ennemi.
Une occasion *e présente de détruire
quelque part la monarchie pour 800 fr.;
ne la laissons pas échapper.
FRÉDÉRIC MONTARGIS.
LES ON-DIT
Hier, à quatre heures, M. Beurdeley.
adjoint au maire du 88 arrondissement, a
prononcé le divorce de M. le marquis de
Caux et de Mme Adeliua Patti.
Les témoins de la cantatrice divorcée
étaient MM. Pierre Véron et Francis Malo
gnard.
«
& »
Les étudiants ont décidé de fêter cette
année avec un grand éclat l'anniversaire
de la naissance de M. Cuevreul, qui entré
dans sa centième année le 31 août pro-
chain.
Cette fête aura lieu le 5 août, la jeu-
nesse des Ecoles étant en vacances à la
fin du mois.
M. Chevreul fait partie de l'administra-
tion du Muséum depuis 1810. En 1826, il
a été nommé membre de l'Académie des
sciences en remplacement de M. Proust,
dont il avait été le concurrent en 1816. Il
fait donc partie de l'Institut depuis cin-
quante-neuf an". Ce cas est très rare dans'
les annales de la docte compagnie.
Le marechal de Richelieu, admis S
vingt-quatre ans, resta pendant soixante-
Feuilleton du RAPPEL
DU 18 JUILLET
6
LA BANDE
DES
COPURCHICS
ROMAN PARISIEN
n
cambouliveo. - (Suite)
Comboulives dînait chez M. Blériotte,
3on honorable correspondant, celui qui
devait veiller sur sa vertu et qui lui ver-
sait la pension octroyée par la munin-
uence de sa famille.
M. Blériotte était un personnage d'une
Reproduction interdite.
Voir le Rappel du 13 au 17 niiKeV
gravité suffisante, bourgeois de caractère
et d'état. Il possédait une fabrique de sa-
vons fins. Il avait la spécialité du savon
au lait d'eucalyptus et de la pâte manilac-
tée au korohoponox du Japon. Ses pro-
duits, lancés par une réclame adroite,
faisaient florès, et il gagnait beaucoup
d'argent.
Quand il se trouvait en famille, c'est-à-
dire entre sa femme et sa fille, M. Blé-
riotte s'épanchait.
— Je suis riche, disait-il, vous êtes ri-
ches. C'est parce que je suis habile.
Quelle est mon habileté ? La réclame
d'abord. Ah ! c'est que je sais m'y pren-
dre 1 Ensuite le génie commercial. J'ai in-
venté des odeurs. J'ai fait éclore de mon
cerveau le korohoponox du Japon. Per-
sonne ne connaissait le korohoponox, na-
turellement, tout le monde en a voulu,
et il n'y a plus que moi pour ne pas savoir
ce que c'est. Très curieux. Ne parlez
jamais de ça, vous autres. Voyez-vous, le
plus fin, le meilleur savon du monde ne
peut revenir au delà de quarante centimes
le pain, et on le vend trois francs cin-
quante, quatre francs, cinq francs môme,
quand il est an lait d'eucalyptus. Encore
une bonne blague ! Mais l'espèce humaine
est si bête t Quand on connaît un peu les
hommes, il n'est pas difficile de les pren-
dre; mais où on mesure véritablement
le malin, c'est à la façon dont il évite
qu'on le mette dedans plutôt qu'à la ma-
nière dont il enfonce les autres. J'étais
fait pour réussir parce que je suis du
Midi, d'Arles, de la belle et bonne ville
d'Arles, le pays des Vénus, et que cepen-
dant je suis un homme du Nord, parce
que mon grand-père était de Normandie.
Il se nommait BlériOt. Dans le Midi, on
a fait de Blériot Blériotte, par prononcia-
tion. Le commis de l'état civil s'est trompé
en rédigeant mon acte de naissance. J'au-f
rais pu le faire rectifier, je ne l'ai pas voulu
parce que, à Arles, tout le monde dit Blé-
riotte, et qu'il y a moins de Blériotte qu'il
n'y a de Blériot dans le commerce. Je suis
peut-être même le seul au monde, car il
n'y a que moi de Blériotte dans le Bottin.
Mme Blériotte était née Clazoménopou-
los. Son père, gree d'origine, établi dans
la cité phocéenne, comme il convient à
un Grec devenu Marseillais, était mort
après avoir fait de sa fille Lucrèce l'épouse
de M. Blériotte. Lucrèce était un nom
romain enté sur une famille grecque;
la mère de Mme Blériotte était de Rome.
Lucrèce Blériotte, née d'un père grec,
d'une mère romaine, élevée à Marseille
dans la plus sainte des ignorances, et
mariée à un Arlésien, tirait de cet alual.
game étrange un caractère qui ne l'était
pas moins.
- Tél disait-elle à son mari, tu es le
seul au monde 1 Que je le crois que tu es
le seul! Lequel autre serait toi? Je n'ai
pas épousé deux hommes et mon mari est
mon mari, té I qu'il ne ressemble en rien
à un autre. Et sans doute que nous som-
mes riches et que nous le deviendrons
encore davantage. Té ? la belle affaire 1 Tu
m'as, je t'ai; nous avons l'esprit du com-
merce, et toujours nous gagnerons de l'ar-
'gent gros comme nous. C'est Elvire qui
sera riche ! et té 1 la petite I
En disant ce mot, Mme Blériotte donna
une tape sur l'épaule de sa fille.
- Fais donc attention, maman, dit El-
vire, tu me fais mal.
— Té 1 là I la voilà qui se plaint, pour
une chiquenaude ! Je t'en ai bien donné
d'autres, q and tu étais plus petite, car tu
avais joliment besoin d'être fouettée. Il
faut corriger les enfants, ça fait circuler
le sang. Tu ne penses pas à quoi je
pense, Blériotte ?
- Hé, quoi ? - -
- Je pense que nous avons eu tort de
donner à notre fille un nom de M. de La-
martine.
— Pourauoi?
- Ça l'influence, té !
— Tu crois ?
- Ça la fait manquer de caractère.
- Oh ! tu crois., parce qu'elle neparle
pas beaucoup.
— C'est qu'elle devrait parler, té 1 Sa
langue est dans sa bouche exprès pour ça.
Elle rêvasse, cette petite.
— C'est toi qui as choisi son nom.
— Té, je le sais. Je lisais ce M. de La-
martine, et je me disais : té, quelqu'un
qui aimerait comme ça, ce serait chatouil-
lant.
— Mais il me semble que tu dois savoir,
ma chère Lucrèce, ce que c'est que d'être
aimée.
— Par toi?
— Sans doute, par moi.
— Oh 1 que ce n'est pas du tout la même
chose 1 Oh ! non, ce M. de Lamartine, té,
c'est. c'est. je ne puis pas t'expliquer la
manière dont il aime, mais il vous pousse
des soupirs longs comme de Paris à Mar-
seille. C'est de la lune, tu comprends ?
- Pas du tout.
- Enfin, ce n'est pas comme toi, c'est
même le contraire; et té, ao fait, c'est
peut-être le meilleur, Blériotte, ta ma-
nière?
— Ce doit être le meilleur.
- Aussi j'ai eu tort de nommer notre
fille Elvire pour qu'on lui parle tout le
temps à la clarté des étoiles.
- Les étoiles, s'écria une voix, c'est les
veilleuses de l'amour.
— Té 1 s'écria Mme Blériotte, c'est l'ami
Camboulives. -
- Tu viens dîner? demanda Blériott?.,'
— Oui, dit Camboulives.
— Assieds-toi.
— Bonsoir, ma petite Elvire, dit Caffl*
boulives.
— Bonsoir, Elie, dit Mlle Blériotte,
— Ah ! si vous saviez quelles aventures
il m'est arrivé depuis huit jours que je ne
vous ai vu- 1 s'écria Camboulives.
- Racontez-nous ça, Elie, dit Elvirel
- Pas devant les dames, dit Blériotte
Elie n'est qu'un polisson et.
— Té, il peut dire ce qu'il a fait, dMf
Mme Blériotte.
— Ça peut se raconter, effectivement^
dit Camboulives.
EDGAR MONTEIL.
(A suivre.)
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.4%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.4%.
- Collections numériques similaires Presl Karel Borivoj Presl Karel Borivoj /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Presl Karel Borivoj" or dc.contributor adj "Presl Karel Borivoj")Supplementum Tentaminis pteridographiae : continens genera et species ordinum dictorum marattiaceae, ophioglossaceae, osmundaceae, schizaeaceae et lygodiaceae ([Reprod.]) / auctore Carolo B. Presl,... /ark:/12148/bpt6k973935.highres Symbolae botanicae sive Descriptiones et icones plantarum novarum aut minus cognitarum. Volumen 1 / auctore Carolo Borziwogo Presl,... /ark:/12148/bpt6k966823.highres
- Auteurs similaires Presl Karel Borivoj Presl Karel Borivoj /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Presl Karel Borivoj" or dc.contributor adj "Presl Karel Borivoj")Supplementum Tentaminis pteridographiae : continens genera et species ordinum dictorum marattiaceae, ophioglossaceae, osmundaceae, schizaeaceae et lygodiaceae ([Reprod.]) / auctore Carolo B. Presl,... /ark:/12148/bpt6k973935.highres Symbolae botanicae sive Descriptiones et icones plantarum novarum aut minus cognitarum. Volumen 1 / auctore Carolo Borziwogo Presl,... /ark:/12148/bpt6k966823.highres
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7539272d/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7539272d/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7539272d/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7539272d/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7539272d
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7539272d
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7539272d/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest