Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1885-07-13
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 juillet 1885 13 juillet 1885
Description : 1885/07/13 (N5603). 1885/07/13 (N5603).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/11/2012
tî * 5603 •• Lundi t8 Juillet 4885
X*e numéro s £ Oc. — Hép&ptements 1 19 e.
25 Wessldor an 93 — N. 5033
ADMINISTRATION 1.
43, JUJE DE VALOIS. lt
ABONNEMENTS
fcAKS
ÎRoïs mois. 10 il
Six mois.20 »
DÉPARTEMENTS'
Trois mois. 1350
Six mois. si M
- e
Adresser lettres et mandats m
AM. ERNEST LEFÈVRE : *
^ABMOTSTRAXErai' GEBAUX
RÉDACTION
ftfcesser au. Secrétaire de la Rédaction
De & à 6 heures du soir
iB, HUB DE VALOIS, 11
LES manuscrits non insérés ne seront pas rend~
ANNONCES
M. Ch. IAGRANGE, CERF et ce
^*|»3ace del&Boorsef6'
M STATUE DE GBÍGOIII
'En 1819, la Chambre des députés
discutait un des nouveaux élus du dé-
partement de l'Isère. Le rapporteur,
M. Becquey, concluait à l'invalidation.
5*» Oui, et pour cause d'indignité! s'é-
cria M. Lainé. La discussion devint
tempétueuse, au point que le président,
M. Anglès, dut se couvrir et suspendre
la séance pendant une heure. A la re-
prise, la tempête recommença. M. Laîné
développa son cri. Benjamin Constant
tépondit. M. de La Bourdonnaye se
mit avec M. Laîné, et Manuel se mit
avec Benjamin Constant. M. de Mar-
bellus dit que l'élection était un scan-
dale et M. de Corbière qu'elle était un
outrage à la royauté. — Que ceux qui
sont pour l'invalidation lèvent la main!
Se fut une levée en masse. — Vive le
*oi ! cria la Chambre.
A cet homme rejeté comme indigne,
Dn élève une statue. L'inauguration se
fait aujourd'hui. Le ministre de l'inté-
rieur y représente le gouvernement.
On comprend la fureur de la Cham-
bre royaliste. L'homme qu'elle repous-
sait avec cette violence était celui qui,
le 21 septembre 1792, à la première
séance de la Convention, l'abolition de
la royauté étant proposée et un mem-
bre demandant qu'on ne votât pas sans
discussion, avait prononcé ces pa-
roles :
— « Eh! qu'est-il besoin de discuter
quand tout le monde est d'accord? Les
rois sont dans l'ordre moral ce que les
tnonstres sont dans l'ordre physique.
Les cours sont l'atelier des crimes et la
tanière des tyrans. L'histoire des rois
est le martyrologe des nations. Dès que
tous sommes également pénétrés de
cette vérité, qu'est-il besoin de déli-
bérer? »
Grégoire avait-il voté la mort la
mort de Louis XVI ? Il l'a nié. Il était
à Chambéry avec ses collègues Hé-
rault-Séchelles, Jagot et Simon, lors-
que le procès eut lieu. Ils ne voulurent
pas profiter de leur absence pour se
dérober, et ils écrivirent la lettre sui-
- vante ;
— « Nous apprenons par les papiers
publics que la Convention doit pro-
noncer demain sur Louis Capet. Privés
de prendre part à vos délibérations,
mais instruits par la lecture réfléchie
des pièces du procès et par la connais-
sance que chacun de nous avait acquise
depuis longtemps des trahisons non-
interrompues de ce roi parjure, nous
croyons que c'est un devoir pour tous
les députés d'annoncer leur opinion
publiquement, et que ce serait une lâ-
cheté de profiter de notre éloigne-
ment pour nous soustraire à cette
obligation. Nous déclarons donc que
notre vœu est pour la condamnation
de Louis Capet par la Convention, sans
appel au peuple. Nous proférons ce
vœu dans la plus intime conviction, à
cette distance des agitations où la vé-
rité se montre sans mélange. »
Condamnation. A quoi? Les trois
collègues de Grégoire voulaient que la
lettre dît : à mort. Il refusa de signer
ces deux mots, affirme-t-il dans ses
Mémoires, et les fit rayer. Son affirma-
mation a pour elle ce passage d'un dis-
cours prononcé par lui à la Convention
le 15 novembre 1792 :
— « Je repousse la peine de mort,
et, je l'espère, ce reste de barbarie dis-
paraîtra de nos lois. Il suffit à la so-
ciété que le coupable ne puisse plus
nuire. Assimilé en tout aux autres cri-
minels, Louis Capet partagera les bé-
néfices de la loi si vous abrogez la
peine de mort. Vous le condamnerez
alors à l'existence, afin que l'horreur de
ses forfaits l'assiège sans cesse et le
poursuive dans le silence de la soli-
tude. »
Ce n'est pas seulement sur la ques-
tion de la peine de mort que Grégoire
a dépassé son temps. Il fut un des
membres les plus actifs et le président
de la société les Amis des noirs, où figu-
raient Condorcet, Lafayette, Péthion,
Robespierre, La Rochefoucauld, Bris-
sot et Clavière. Il multiplia les rapports
et les écrits pour cette généreuse cause.
II obtint de la Convention, en juillet
1793, la suppression de la prime accor-
dée pour la traite et, en février 1794,
l'abolition complète de l'esclavage co-
lonial, qui fut plus tard rétabli par Na-
poléon. L'émancipation des nègres fut
la préoccupation de toute sa vie, et
on peut dire de son agonie. Sa der-
nière parole fut : — Pauvres Haïtiens !
C'est par lui, catholique convaincu,
que les juifs ont été élevés à la dignité
de citoyens.
C'est à lui qu'est due la première
idée d'une confédération internatio-
nale des écrivains. Il fut un des fonda-
teurs de l'Institut, du Conservatoire
des arts et métiers et du Bureau des
longitudes. Il fut un infatigable propa-
gateur de l'enseignement public. Il prit
la défense des bibliothèques et des
monuments. Il fit, lui aussi, sa « guerre
aux démolisseurs ».
Voici des phrases d'un de ses dis-
cours ! — « Les peuples trouveront
toujours en nous appui et fraternité.
Tous les gouvernements sont nos en-
nemis, tous les peuples sont nos amis.
Nous serons détruits ou ils seront libres.
Ils le seront 1 »
Dans sa mission en Savoie, son sou-
per (deux oranges) coûtait deux sous à
la République. Il rapporta dans son
mouchoir et versa au Trésor une somme
qu'il avait économisée sur ses frais de
voyage.
Il n'y a pas de vie si grande qui n'ait
ses petitesses. Il n'y a pas de caractère
si entier qui n'ait sa fêlure. Le destruc-
teur de la royauté accepta de l'empire
le sénat, le titre de comte et la croix.
Que celui qui est sans péché lui jette la
première pierre ! Pour nous, lorsqu'un
homme a rendu à sa patrie et à l'hu-
manité les services que leur a rendus
Grégoire, il peut, dans une longue
existence de lutte et d'héroïsme, avoir
une heure de défaillance, nous n'avons
de pierres que pour son piédestal.
AUGUSTE VACQUERIE.
Le ministre de la guerre a reçu trois
dépêches du général de Courcy.
La première a trait uniquement à des
renseignements et à des demandes de
personnel et de matériel pour la marine.
Le deuxième contient la liste des récom-
penses demandées.
Le troisième annonce le commence-
ment de l'arrivée à Hué des renforts de-
mandés au Tonkin. -
Le bataillon de chasseurs à pied, arrivé
au complet, forme régiment avec le 3e
zouaves et garde la citadelle.
Quelques bandes de pillards sont tou-
jours signalées dans les environs de la
ville.
On a trouvé un nouveau trésor. Les
zouaves gardent maintenant environ dix
millions.
Le roi est en arrière de Cam-Lo, pri-
sonnier de Thu-Yet.
La reine-mère, les oncles du roi et les
princes de la famille royale demandent à
revenir avec nombre de mandarins.
COULISSES DES CHAMBRES
Le comité électoral des gauches des
deux Chambres s'est réuni hier. Il a cons-
titué une commission chargée de recueil-
lir dans les deux Chambres les adhésions
au manifeste adopté la veille.
Cette commission se compose du bu-
reau du comité, de trois sénateurs et de
trois députés.
Les membres du bureau sont M. Carnot,
président; MM. Lelièvre et Jules Develle,
vice-présidents ; MM. Hurard et de Verni-
nac, secrétaires. Les trois députés sont MM.
Devès, Ranc et Ferdinand Dreyfus ; les
trois sénateurs sont MM. Humbert, Le-
noël et Scheurer-Kestner.
Le manifeste ne sera publié que quand
on aura recueilli les signatures de tous les
adhérents.
Le comité a décidé, en principe, de s'ad-
joindre pour toutes ses opérations ulté-
rieures des représentants de la presse ré-
publicaine.
-0-
La commission des finances du Sénat
continue à examiner avec activité les bud-
gets des dépenses des ministères, que la
Chambre vient de voter.
Jusqu'à ce jour, elle n'a apporté qu'une"
seule modification aux décisions de la
Chambre. Elle a repoussé la disposition
introduite par la Chambre dans le budget
de l'instruction publique, et tendant a;
faire revivre sous certaines conditions lai
loi de nivôse an XIII. Cette disposition,
on s'en souvient, avait pour objet d'ad-
corder une bourse dans un établissement
public d'enseignement à l'aîné de sept'
enfants, lorsque la famille ne se trouve
pas dans une situation de fortune suffi-
sante.
—o—
M. de Marcère a lu hier à la commis-
sion et déposé sur le bureau du Sénat
son rapport sur le traité franco-chinois.
Le Sénat a fixé à jeudi prochain la dis-
cussion de ce traité.
Les ministres se sont réunis hier matin
à l'Elysée, sous la présidence de M. Jules
Grévy.
Ils se sont surtout occupés de la discus-
sion du budget. ,
M. Allain-Targé a lu les rapports des
préfets sur la situation politique.
Le ministre de l'intérieur ira représen-
ter le gouvernement à l'inauguration de la
statue de l'abbé Grégoire.
Il a dû partir hier soir et coucher à
Nancy.
Il arrivera à Lunéville aujourd'hui à
midi.
A CA CHAMBRE
Comme toujours, à la fin des ses-
sions, la Chambre essaie de réparer le
temps perdu dans le courant de l'an-
née, en siégeant jusqu'à des heures ri-
diculement tardives, et certains mem-
bres font du zèle en réclamant deux
séances par jour. Ces procédés, qui ne
feront illusion à personne, nous obli-
gent à résumer, d'une façon beaucoup
trop rapide, la discussion importante qui
a rempli la journée et qui a roulé, d'un
bout à l'autre, sur les mérites de la po-
litique de déficit et d'aventure dont le
dernier cabinet et la majorité tonki-
noise se partagent la responsabilité.
Cette politique coloniale, que Mj
Jules Ferry avait renoncé à défendre,
M. Rouvier, plus confiant dans SAS fnr-
ces et dans les ressources de son argu-
mentation, a essayé de la justifier en
demandant au moins pour elle les cir-
constances atténuantes. M. Rouvier n'a
pas réussi dans cette tentative, où il a
été, en général, inférieur à lui-même.
Son échec à peu près absolu prouve que
la cause qu'il soutenait n'était pas dé-
fendable, et que, en somme, M. Ferry,
en se taisant, avait fait pour lui et pour
ses amis tout ce qu'il y avait à faire.
M. Rouvier, répondant à de précé-
dents orateurs, à M. Germain notam-
ment, a d'abord cherché à nier les irré-
gularités signalées dans l'établissement
des divers budgets. Les caisses ne l'é-
pouvantent pas et, en passant, il trouve
moyen de prendre parti pour l'empire
contre M. Thiers, qui faisait, paraît-il,
une opposition trop systématique. M.
Thiers, en effet, critiquait fort la mul-
tiplicité des budgets, les budgets-allèges,
comme il les appelait, et les budgets-
allèges ressemblent à s'y tromper aux
caisses auxiliaires dont M. Rouvier en-
treprend la justification contre M. Ger-
main.
Mais il est permis de croire que la
discussion budgétaire proprement dite
n'était pour M. Rouvier, qu'un pré-
texte devant le conduire à l'apologie de
la grande politique coloniale lâchée
avec tant de désinvolture par M. Jules
Ferry. Eti abordant cette apologie, la
voix a failli manquer à l'orateur et il a
avoué que le sujet lui semblait un peu
scabreux. Que nous sommes loin des
Carmagnoles d'autrefois, à propos de
la moindre tonkinerie ! Et non seule-
ment M. Rouvier baisse la voix, mais il
fait petite, toute petite, la fameuse po-
litique coloniale. Qui a jamais parlé
de conquêtes? Personne. Des débou-
chés commerciaux à la bonne heure.
La vraie, la seule politique coloniale
qui ne soit pas au coin du quai, c'est la
politique de la mission Brazza. M. Rou-
vier n'a jamais voulu autre chose et
tous les crédits tonkinois et autres votés
par la Chambre ont été détournés, par
la force des choses et la malice des
hommes de leur destination véritable :
Brazza ; rien que Brazza ; Brazza for
ever. La majorité, que le vulgaire igno-
rant croyait tonkinoise, était unique-
ment préoccupée de Brazza. M. Ferry et
ses collègues, en demandant de l'argent
pour Formose et le Tonkin, n'ont jamais
détourné leurs yeux du Congo où la
colonisation se fait sans dépense et
sans coups de fusil. Voilà la vérité
qu'il était temps de rétablir à la tri-
bune et maintenant, si l'on interroge
un député sortant, si on lui demande
d'expliquer la politique d'aventure, de
dire pourquoi on a jeté à l'eau cinq
cents millions, il répondra, avec M.
Rouvier, qu'il ne sait pas ce qu'on
veut dire et que la majorité n'a jamais
favorisé que les entreprises peu rui-
neuses de M. Brazza.
Cette explication, déjà assez heu-
reuse, n'est pas la seule que M. Rou-
vier ait hasardée à la tribune. Compre-
nant qu'il serait difficile de tout mettre
sur le compte de la mission Brazza et
d'imputer d'énormes dépenses à une
entreprise quasi-gratuite, M. Rouvier
a admis généreusement qu'on avait
bien employé quelques millions, au
Tonkin et ailleurs. Mais croit-on qu'il
s'agisse de conquêtes? croit-on qu'on
ait été là avec un plan prémédité,
ayant bien pesé le pour et le contre ?
Quelle erreur! M. Rouvier, qui connaît
son monde, affirme que, ni dans la
majorité, ni dans le cabinet dont il fai-
sait partie, il ne s'est trouvé un homme
politique pour voir les choses de si loin
et prendre ces précautions élémentai-
res. Nous - nous - en -- rapportons à ce ju-
gement et nous le retenons. On parfait
de la politique d'aventure; le mot de-
vrait être modifié, car la politique
qu'on suivait était une politique à l'a-
venture. On allait sans plan, au petit
bonheur, au jour le jour. C'est le com-
ble de l'opportunisme.
La majorité tonkinoise sera-t-elle
bien aise d'avoir été ainsi défendue?
Sera-t-elle bien fière d'être représentée
comme inconsciente et irréfléchie ?
Nous ne savons. En tout cas, ce n'est
pas sur un pareil terrain, ce n'est pas
sur un programme où les réformes
brillent par leur absence qee le parti
républicain peut chercher à s'unir. La
réplique de M. Pelletan, dont nous al-
lons maintenant dire un mot, a été, à
cet égard, décisive et triomphante.
S*
* *
Après un discours de M. Raoul Du-
val établissant le bilan de nos colonies
et montrant, par l'exemple de la Plata
et de l'Egypte, ce que pourrait être la
colonisation commerciale, M. Pelletan
a demandé le renvoi à lundi, et n'ayant
pu l'obtenir, il a pris la parole malgré
l'heure avancée.
M. Camille Pellletan, ayant en face
de lui le rapporteur des conventions et
1 apologiste de la politique coloniale, a
naturellement fait porter sur ces deux
questions tout l'effort de sa discus-
sion. En ce qui touche les conventions,
il a facilement démontré que la si-
tuation de l'Etat était moins bonne vis-
à-vis des compagnies sous l'empire
des nouveaux .traités qu'elle ne l'était
avant. Ceci est certainement la faute
des négociateurs et on peut en dire au-
tant des retards apportés à la réduction
des tarifs. Il y a plus de deux ans que
ces réductions sont proposées et, avec
un peu de zèle de la part des bureaux,
un peu de fermeté de la part des mi-
nistres, tout serait fini depuis long-
temps, au grand profit de tout le monde.
M. Pelletan, qui a terminé son discours
par un grand éloge de l'industrie pri-
vée, concilierait difficilement cette doc-
trine avec le système du réseau d'Etat
dont il se déclare partisan et que nous
jugeons dangereux et funeste. Mais
cette inconséquence n'empêche pas
d'être exactes la plupart des criti-
ques adressées par l'orateur aux con-
ventions. Nous 1 avons dit alors qu'on
les discutait : leur plus grand tort
était d'être inutiles ; les conven-
tions en vigueur suffisaient, avec l'ap-
plication vigilante du cahier des
charges, pour obtenir à moins de frais
tout ce qu'on pouvait exiger utilement
des compagnies. Mais on ne l'a pas
fait et, en outre, pour faire voter les
conventions, M. Raynal a fait briller
aux yeux de la Chambre des résultats
auxquels il ne pouvait guère croire lui-
même et qui rendent plus cruelle la
déception actuelle. M. Pelletan a donc
raison de mettre ce vote au passif de la
majorité et du précédent cabinet.
La politique coloniale prête à de bien
autres critiques, et c'est avec une gran-
de force que l'orateur a montré cette
politique naissant non d'un plan pré-
conçu, mais de la nécessité où l'on
s'était mis d'éluder le programme des
réformes.
Tant que la République a suivi sa
voie, personne n'a pensé à la prétendue
politique de débouchés commerciaux
ou à la politique de conquête. Le jour
où une fraction du parti républicain,
celle qui gouverne depuis deux ans, a
résolu de faire échec à toute tentative
de réforme, il a bien fallu occuper l'opi-
nion publique.
La Tunisie et le Tonkin, Madagascar
et le reste sont la rançon singulière-
ment coûteuse du programme démo-
cratique, de ce programme rejeté bien
loin, comme irréalisable, lors du dis-
cours du Havre. Quand M. Jules Ferry
creusait ce large fossé entre lui et les
radicaux, quand il disait qu'entre nous
et lui la trève était rompue, quand oa
faisait un pas en arrière, un pas vers la
politique monarchique par conséquent,
n'était-il pas naturel qu'on en revînt
aux fautes de la monarchie, à ses p6-
chés d'habitude, au déficit, aux aven.
tures? C'est cette démonstration qui a
été faite par M. Pelletan avec un talent
supérieur et avec le plus vif et le plus
légitime succès.
A. GAULIBa.
Note de l'agence Havas :
Quelques journaux signalent la dualité de
direction qui existerait dans l'action française
Feuilleton du RAPPEL
DU 13 JUILLET
- 1
LA BANDE
DES
COPURCHICS
t\OMAN PARISIEN
~.<
I
les Copurehtaff
Penche sur le De iure belli et pacis de
l'illustre Grotius, lequel étant nourri au
petit pot de faïence de Delft écrivait déjà
des vers latins, Guibolmar, qui n'aimait
dans le droit que la politique, releva la
lôte et remarqua que le soleil indiquait
l'heure de la faim.
• - C'est le moment, dit-il, où la pha-
lène sambucaire sur le tronc rugueux ap-
pelle aux amours.
Il ouvrit sa fenêtre et frappa trois coups
Sur un gong pris dans une jonque de pi-
tates barbares par des marins civilisés.
Guibolmar frappa trois autres coups,
puis trois autres encore, total : neuf.
Aussitôt toutes les fenêtres du quatrième
étage, à côté de la sienne, et des mansar-
des d au-dessus, s'entrebâillèrent, une tôte
passa par chacune de ces fenêtres, les
bouches de toutes ces têtes s'ouvrirent à
ftepftfucUon igfôrdftt. - .-
la fois, et de toutes ces bouches sortit le
même cri :
- Joie t
Et ces fenêtres se refermèrent, les bou-
ches aussi.
Le phalanstère s'éveillait.
Guibolmar, seigneur de Finboulet, tirait
son premier nom de guibolle qui vient de
gamba tout aussi droit que jambe, et de
mar ou mer, en latin mare, ce qui signi-
fiait qu'il avait des jambes à enjamber la
nier. Pour le second nom, il lui venait
d'une terre qui allait par les apophyses de
la bosse nasale à la courbe occipitale, et
c'était de cette terre cultivée avec soin
qu'il tirait sa noblesse.
Guibolmar était plus long que jour sans
pain, et ses amis disaient d'habitude qu'il
recevait la pluie cinq minutes avant les
autres. Il était aussi fort que grand, et,
un jour qu'il avait laissé son poing tom-
ber du haut de son bras sur la tête d'un
sergent de ville, celui-ci n'avait vu sans
trente-six chandelles que deux heures
après.
La chambre où se trouvait Guibolmar,
et qui était la sienne, ne possédait pas
une quantité très considérable de meu-
bles. Un lit en fer, une table en chêne
sculpté, une bibliothèque en sapin suffi-
samment garnie de livres — poésie, bro-
chures politiques, et quelques volumes
de droit, — une table de nuit, un fau-
teuil, trois chaises et un tabouret, c'était
absolument tout. Quelques tableaux pen-
daient le long des murs, Minna et Brenda,
gravure en noir sur un sujet de Walter
Scott ; l'Indiscret, une gravure du dix-hui-
tième siècle avec une femme en agréable
posture pour M. Fleurant; une Adoration
des Mages, de la fin de l'an de grâce 1599 ;
une sanguine, les Présents réciproques, et
plusieurs dessous qui a laissaient riçjj à,
désirer, ni pour le sujet de la composi-
tion, ni pour les inscriptions qui s'éta-
laient au-dessus.
Cette décoration modeste était complé-
tée par une énorme araignée verdâtre,
dont les pattes velues s'étendaient dans le
plafond, ce qui prouvait surabondamment
que Guibolmar en avait une. Guibolmar
l'avait peinte lui-même, mais un peintre
par aventure, quand il cessait d'être étu-
diant, l'avait aidé pour les poils de sa
brosse et de la bête.
Guibolmar avait mis son chapeau.
— Pieça, que je t'attends, dit-il au ca-
marade qui entra.
Celui-là était Maillochon, seigneur de
Lavaloir, ainsi nommé de la solidité de
sa tête et de la commodité de son gosier.
Après entrèrent :
1° Coqsigno de Vinces, dont le nom ve-
nait de l'empereur Constantin, lequel,
commejon sait, était de Chlore bien avant
que Lavoisier eût découvert ce parfum, et
lequel empereur avait assassiné à l'aide
d'une croix, sur des couplets de Clairville,
Son père et sa mère et ses trois enfants,
Sans compter les gens
Qu'il avait dans l'temps
Occis bien avant d'occir' ses parents;
Ainsi Coqsigno avait vaincu, et tou jours
était vainqueur, non par la croix, mais
par le signe du coq qu'il portait apparem-
ment en lui.
2e Pictonnez de Barbafoin, lequel tirait
de sa barbe couleur de foin la faculté de
se piquer le nez chez tous les mastroquets
du quartier.
3° Enfin Peinturlure de Crôùtonniaque,
qui cessait volontiers ses études véritables
afin de montrer son talent particulier pour
les potages aux croûtons et les soupes à
l'oseille servie sur de la toile 18-22, en
qualité de nature morte.
Ainsi réunis, et d'ailleurs tous étudiants
en droit, ils formaient la tant connue, tant
aimable et tant célèbre bande des Copur-
chics, nom qui-venait de pur, grand cha-
peau de feutre inventé par Rubens et fort
cher aux étudiants, et de chic, qui aurait
pu être abréviatif de chicane, finesses de
procédure, parce que ces étudiants étaient
généralement approchant de basoche ;
mais chic qu'il fallait entendre comme un
synonyme de l'élégance des habits et des
manières des membres de la bande, élé-
gance dépendante de leur chapeau, ainsi
que l'indiquait le préfixe en sens copüia-
tif co, de cum, avec, comme si on avait dit
que ceux de la bande étaient purs avec chic
ou étaient doués d'un chic pur.
Et, pour êîr® pleinement renseigné sur
la tenue des célébrés Copùrchics, il suffit
de citer les vers que Guibolmar de Fin-
boulet avait faits pour se peindre lui-
même, un jour qu'il sortait d'entendre
une leçon de Valette, professeur éminent
qui avait raté sa profession de chanteur
d'opéra malgré ses études préfacultuelles.
Voici quels étaient les vers dépeignant
le costume bien peigné de ces étudiants :
Coiffé d'un feutre, je portais
Va long habit fort excentrique,
Je maniais, quand je sortais,
Dans ma main une énorme trique,
Dans l'étoffe de mon collet
On eùt pu tailler des culottes
A l'Ogre du Petit Poucet
Dont j'avais dérobé les boUel.
Et de fait, quand on voyait sortir de
chez eux les cinq Copurchics, pareille-
ment accoutrés, les passants qui étaient
accoutumés de vivre loin des terres du
Latium ouvraient les portières de leur,
regard aussi grandement ique les portes
porchères de Notre-Dame âlé* Paris, dont
Victor Hugo a relié son plus uameux ro-
man.
C'est qu'il faisait beau voir les Copur-
chies se prendre le bras aussitôt sortis de
leur phalanstère, et, très profondément,
s'incliner devant le Panthéon, en révé-
rence des grands hommes que les curés
en avaient chassés en l'impériale année
186., où se passe cette véridique histoire.
Et ayant tiré leur révérence au Pan-
théon, les Copufchics se retournaient
pour faire la niquenette à Rougelanterne,
car c'était ainsi qu'ils nommaient ïâTpt>-
lice, disant l'avoir plus bas que reins, et
se déclarant furieux de voir un dépotoir
de sergents de ville juste en face de l'Ecole
de droit où Vatrin démontrait profess ora-
lement que le droit pouvait être tortu.
Les Copurchics prirent la rue Soufflot.
— Savez-vous pourquoi, demanda Coq-
signo, dans cette rue-ci.
— Coqsigno, dit sévèrement Maillochon,
nous sommes en France.
— J'entends, dit Coqsigno, mais je vous
demande pourquoi, dans cette rue Souf-
flot, toujours le vent souffle au.
— Dosi
— Oui.
mm C'est pour mieux marcher, mon
mignon, dit Maillochon, car pour faire
aller leur navire nous voyons les nauton-
niers présenter leur voile au vent.
— Et les pâtissiers y mettre des que-
nelles.
— Prends garde aux querelles, si tu les
fais comme ça, Coqsigno.
Ils étaient arrivés devant une vieille
brehaigne, qui, dans le renfoncement de
la rue, tenait un commerce de fleurs.
— Il ne faut pas oublier, dit Peinturlure
de Croûtonniaque, que nous devons souhai-
ter aujourd'hui la fête de notre gargotière,
Mme Bonbail, qui n'en a pas fait un avec
les amours, malgré ses prétentions.
Chacun des étudiants acheta, moyen-j
nant quinze sous de monnaie en moyenne,
un pot de fleurs plus ou moins odorantes
qu'il mit sous son bras. L'un avait de
l'héliotrope, l'autre du réséda, le troi-
sième une amaranthe, le quatrième un
fuchsia, et le cinquième une giroflée.
Ils entrèrent dans leur restaurant à la file.
— Bonjour, Astasie, dit le premier, qui
était Guibolmar.
— Bonjour, Astasie, dit le second, qui
était PÎCÎ02UÇZ.
Les autres continuèrent et, se trouvant
tous les cinq autour de la mère Bonbail,
ils entonnèrent en chœur :
Chère Astasie, aujourd'hui c'est ta fête,
Rien ne m'a dit que tu n'y étais pas,
Voici des fleurs pour couronner ta tète,
Avec un pot pour orner tes appas.
- Merci, merci, mes enfants, dit Mm.
Bonbail.
Les étudiants lui mirent les pots de
fleurs dans les mains, sur les bras, et il
entra de nouveaux clients qui, eux aussi,
plantèrent leurs pots et leurs bouquets
sur la brave femme.
— Ah ! ça, qu'est-ce que vous voulez
que je fasse de ça? s'écria-t-elle en ou-
vrant les bras.
L'échafaudage chut à terre, les bou-
quets s'écrasant, les pots se cassant, les
pétales s'éparpillant.
— Traiter ainsi nos fleurs 1 s'écrièrent
les clients.
Et ils se précipitèrent dans la cuisine.
saisirent des casseroles qu'ils métamor-
phosèrent en jardinières, des carafes dont
ils firent des porte-bouquets, des sou-*
pières dont ils créèrent des vases, et dl
dressèrent sur le comptoir toute une expf?;
sition florale.
POUMHWI».
14 OMWX4
X*e numéro s £ Oc. — Hép&ptements 1 19 e.
25 Wessldor an 93 — N. 5033
ADMINISTRATION 1.
43, JUJE DE VALOIS. lt
ABONNEMENTS
fcAKS
ÎRoïs mois. 10 il
Six mois.20 »
DÉPARTEMENTS'
Trois mois. 1350
Six mois. si M
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Adresser lettres et mandats m
AM. ERNEST LEFÈVRE : *
^ABMOTSTRAXErai' GEBAUX
RÉDACTION
ftfcesser au. Secrétaire de la Rédaction
De & à 6 heures du soir
iB, HUB DE VALOIS, 11
LES manuscrits non insérés ne seront pas rend~
ANNONCES
M. Ch. IAGRANGE, CERF et ce
^*|»3ace del&Boorsef6'
M STATUE DE GBÍGOIII
'En 1819, la Chambre des députés
discutait un des nouveaux élus du dé-
partement de l'Isère. Le rapporteur,
M. Becquey, concluait à l'invalidation.
5*» Oui, et pour cause d'indignité! s'é-
cria M. Lainé. La discussion devint
tempétueuse, au point que le président,
M. Anglès, dut se couvrir et suspendre
la séance pendant une heure. A la re-
prise, la tempête recommença. M. Laîné
développa son cri. Benjamin Constant
tépondit. M. de La Bourdonnaye se
mit avec M. Laîné, et Manuel se mit
avec Benjamin Constant. M. de Mar-
bellus dit que l'élection était un scan-
dale et M. de Corbière qu'elle était un
outrage à la royauté. — Que ceux qui
sont pour l'invalidation lèvent la main!
Se fut une levée en masse. — Vive le
*oi ! cria la Chambre.
A cet homme rejeté comme indigne,
Dn élève une statue. L'inauguration se
fait aujourd'hui. Le ministre de l'inté-
rieur y représente le gouvernement.
On comprend la fureur de la Cham-
bre royaliste. L'homme qu'elle repous-
sait avec cette violence était celui qui,
le 21 septembre 1792, à la première
séance de la Convention, l'abolition de
la royauté étant proposée et un mem-
bre demandant qu'on ne votât pas sans
discussion, avait prononcé ces pa-
roles :
— « Eh! qu'est-il besoin de discuter
quand tout le monde est d'accord? Les
rois sont dans l'ordre moral ce que les
tnonstres sont dans l'ordre physique.
Les cours sont l'atelier des crimes et la
tanière des tyrans. L'histoire des rois
est le martyrologe des nations. Dès que
tous sommes également pénétrés de
cette vérité, qu'est-il besoin de déli-
bérer? »
Grégoire avait-il voté la mort la
mort de Louis XVI ? Il l'a nié. Il était
à Chambéry avec ses collègues Hé-
rault-Séchelles, Jagot et Simon, lors-
que le procès eut lieu. Ils ne voulurent
pas profiter de leur absence pour se
dérober, et ils écrivirent la lettre sui-
- vante ;
— « Nous apprenons par les papiers
publics que la Convention doit pro-
noncer demain sur Louis Capet. Privés
de prendre part à vos délibérations,
mais instruits par la lecture réfléchie
des pièces du procès et par la connais-
sance que chacun de nous avait acquise
depuis longtemps des trahisons non-
interrompues de ce roi parjure, nous
croyons que c'est un devoir pour tous
les députés d'annoncer leur opinion
publiquement, et que ce serait une lâ-
cheté de profiter de notre éloigne-
ment pour nous soustraire à cette
obligation. Nous déclarons donc que
notre vœu est pour la condamnation
de Louis Capet par la Convention, sans
appel au peuple. Nous proférons ce
vœu dans la plus intime conviction, à
cette distance des agitations où la vé-
rité se montre sans mélange. »
Condamnation. A quoi? Les trois
collègues de Grégoire voulaient que la
lettre dît : à mort. Il refusa de signer
ces deux mots, affirme-t-il dans ses
Mémoires, et les fit rayer. Son affirma-
mation a pour elle ce passage d'un dis-
cours prononcé par lui à la Convention
le 15 novembre 1792 :
— « Je repousse la peine de mort,
et, je l'espère, ce reste de barbarie dis-
paraîtra de nos lois. Il suffit à la so-
ciété que le coupable ne puisse plus
nuire. Assimilé en tout aux autres cri-
minels, Louis Capet partagera les bé-
néfices de la loi si vous abrogez la
peine de mort. Vous le condamnerez
alors à l'existence, afin que l'horreur de
ses forfaits l'assiège sans cesse et le
poursuive dans le silence de la soli-
tude. »
Ce n'est pas seulement sur la ques-
tion de la peine de mort que Grégoire
a dépassé son temps. Il fut un des
membres les plus actifs et le président
de la société les Amis des noirs, où figu-
raient Condorcet, Lafayette, Péthion,
Robespierre, La Rochefoucauld, Bris-
sot et Clavière. Il multiplia les rapports
et les écrits pour cette généreuse cause.
II obtint de la Convention, en juillet
1793, la suppression de la prime accor-
dée pour la traite et, en février 1794,
l'abolition complète de l'esclavage co-
lonial, qui fut plus tard rétabli par Na-
poléon. L'émancipation des nègres fut
la préoccupation de toute sa vie, et
on peut dire de son agonie. Sa der-
nière parole fut : — Pauvres Haïtiens !
C'est par lui, catholique convaincu,
que les juifs ont été élevés à la dignité
de citoyens.
C'est à lui qu'est due la première
idée d'une confédération internatio-
nale des écrivains. Il fut un des fonda-
teurs de l'Institut, du Conservatoire
des arts et métiers et du Bureau des
longitudes. Il fut un infatigable propa-
gateur de l'enseignement public. Il prit
la défense des bibliothèques et des
monuments. Il fit, lui aussi, sa « guerre
aux démolisseurs ».
Voici des phrases d'un de ses dis-
cours ! — « Les peuples trouveront
toujours en nous appui et fraternité.
Tous les gouvernements sont nos en-
nemis, tous les peuples sont nos amis.
Nous serons détruits ou ils seront libres.
Ils le seront 1 »
Dans sa mission en Savoie, son sou-
per (deux oranges) coûtait deux sous à
la République. Il rapporta dans son
mouchoir et versa au Trésor une somme
qu'il avait économisée sur ses frais de
voyage.
Il n'y a pas de vie si grande qui n'ait
ses petitesses. Il n'y a pas de caractère
si entier qui n'ait sa fêlure. Le destruc-
teur de la royauté accepta de l'empire
le sénat, le titre de comte et la croix.
Que celui qui est sans péché lui jette la
première pierre ! Pour nous, lorsqu'un
homme a rendu à sa patrie et à l'hu-
manité les services que leur a rendus
Grégoire, il peut, dans une longue
existence de lutte et d'héroïsme, avoir
une heure de défaillance, nous n'avons
de pierres que pour son piédestal.
AUGUSTE VACQUERIE.
Le ministre de la guerre a reçu trois
dépêches du général de Courcy.
La première a trait uniquement à des
renseignements et à des demandes de
personnel et de matériel pour la marine.
Le deuxième contient la liste des récom-
penses demandées.
Le troisième annonce le commence-
ment de l'arrivée à Hué des renforts de-
mandés au Tonkin. -
Le bataillon de chasseurs à pied, arrivé
au complet, forme régiment avec le 3e
zouaves et garde la citadelle.
Quelques bandes de pillards sont tou-
jours signalées dans les environs de la
ville.
On a trouvé un nouveau trésor. Les
zouaves gardent maintenant environ dix
millions.
Le roi est en arrière de Cam-Lo, pri-
sonnier de Thu-Yet.
La reine-mère, les oncles du roi et les
princes de la famille royale demandent à
revenir avec nombre de mandarins.
COULISSES DES CHAMBRES
Le comité électoral des gauches des
deux Chambres s'est réuni hier. Il a cons-
titué une commission chargée de recueil-
lir dans les deux Chambres les adhésions
au manifeste adopté la veille.
Cette commission se compose du bu-
reau du comité, de trois sénateurs et de
trois députés.
Les membres du bureau sont M. Carnot,
président; MM. Lelièvre et Jules Develle,
vice-présidents ; MM. Hurard et de Verni-
nac, secrétaires. Les trois députés sont MM.
Devès, Ranc et Ferdinand Dreyfus ; les
trois sénateurs sont MM. Humbert, Le-
noël et Scheurer-Kestner.
Le manifeste ne sera publié que quand
on aura recueilli les signatures de tous les
adhérents.
Le comité a décidé, en principe, de s'ad-
joindre pour toutes ses opérations ulté-
rieures des représentants de la presse ré-
publicaine.
-0-
La commission des finances du Sénat
continue à examiner avec activité les bud-
gets des dépenses des ministères, que la
Chambre vient de voter.
Jusqu'à ce jour, elle n'a apporté qu'une"
seule modification aux décisions de la
Chambre. Elle a repoussé la disposition
introduite par la Chambre dans le budget
de l'instruction publique, et tendant a;
faire revivre sous certaines conditions lai
loi de nivôse an XIII. Cette disposition,
on s'en souvient, avait pour objet d'ad-
corder une bourse dans un établissement
public d'enseignement à l'aîné de sept'
enfants, lorsque la famille ne se trouve
pas dans une situation de fortune suffi-
sante.
—o—
M. de Marcère a lu hier à la commis-
sion et déposé sur le bureau du Sénat
son rapport sur le traité franco-chinois.
Le Sénat a fixé à jeudi prochain la dis-
cussion de ce traité.
Les ministres se sont réunis hier matin
à l'Elysée, sous la présidence de M. Jules
Grévy.
Ils se sont surtout occupés de la discus-
sion du budget. ,
M. Allain-Targé a lu les rapports des
préfets sur la situation politique.
Le ministre de l'intérieur ira représen-
ter le gouvernement à l'inauguration de la
statue de l'abbé Grégoire.
Il a dû partir hier soir et coucher à
Nancy.
Il arrivera à Lunéville aujourd'hui à
midi.
A CA CHAMBRE
Comme toujours, à la fin des ses-
sions, la Chambre essaie de réparer le
temps perdu dans le courant de l'an-
née, en siégeant jusqu'à des heures ri-
diculement tardives, et certains mem-
bres font du zèle en réclamant deux
séances par jour. Ces procédés, qui ne
feront illusion à personne, nous obli-
gent à résumer, d'une façon beaucoup
trop rapide, la discussion importante qui
a rempli la journée et qui a roulé, d'un
bout à l'autre, sur les mérites de la po-
litique de déficit et d'aventure dont le
dernier cabinet et la majorité tonki-
noise se partagent la responsabilité.
Cette politique coloniale, que Mj
Jules Ferry avait renoncé à défendre,
M. Rouvier, plus confiant dans SAS fnr-
ces et dans les ressources de son argu-
mentation, a essayé de la justifier en
demandant au moins pour elle les cir-
constances atténuantes. M. Rouvier n'a
pas réussi dans cette tentative, où il a
été, en général, inférieur à lui-même.
Son échec à peu près absolu prouve que
la cause qu'il soutenait n'était pas dé-
fendable, et que, en somme, M. Ferry,
en se taisant, avait fait pour lui et pour
ses amis tout ce qu'il y avait à faire.
M. Rouvier, répondant à de précé-
dents orateurs, à M. Germain notam-
ment, a d'abord cherché à nier les irré-
gularités signalées dans l'établissement
des divers budgets. Les caisses ne l'é-
pouvantent pas et, en passant, il trouve
moyen de prendre parti pour l'empire
contre M. Thiers, qui faisait, paraît-il,
une opposition trop systématique. M.
Thiers, en effet, critiquait fort la mul-
tiplicité des budgets, les budgets-allèges,
comme il les appelait, et les budgets-
allèges ressemblent à s'y tromper aux
caisses auxiliaires dont M. Rouvier en-
treprend la justification contre M. Ger-
main.
Mais il est permis de croire que la
discussion budgétaire proprement dite
n'était pour M. Rouvier, qu'un pré-
texte devant le conduire à l'apologie de
la grande politique coloniale lâchée
avec tant de désinvolture par M. Jules
Ferry. Eti abordant cette apologie, la
voix a failli manquer à l'orateur et il a
avoué que le sujet lui semblait un peu
scabreux. Que nous sommes loin des
Carmagnoles d'autrefois, à propos de
la moindre tonkinerie ! Et non seule-
ment M. Rouvier baisse la voix, mais il
fait petite, toute petite, la fameuse po-
litique coloniale. Qui a jamais parlé
de conquêtes? Personne. Des débou-
chés commerciaux à la bonne heure.
La vraie, la seule politique coloniale
qui ne soit pas au coin du quai, c'est la
politique de la mission Brazza. M. Rou-
vier n'a jamais voulu autre chose et
tous les crédits tonkinois et autres votés
par la Chambre ont été détournés, par
la force des choses et la malice des
hommes de leur destination véritable :
Brazza ; rien que Brazza ; Brazza for
ever. La majorité, que le vulgaire igno-
rant croyait tonkinoise, était unique-
ment préoccupée de Brazza. M. Ferry et
ses collègues, en demandant de l'argent
pour Formose et le Tonkin, n'ont jamais
détourné leurs yeux du Congo où la
colonisation se fait sans dépense et
sans coups de fusil. Voilà la vérité
qu'il était temps de rétablir à la tri-
bune et maintenant, si l'on interroge
un député sortant, si on lui demande
d'expliquer la politique d'aventure, de
dire pourquoi on a jeté à l'eau cinq
cents millions, il répondra, avec M.
Rouvier, qu'il ne sait pas ce qu'on
veut dire et que la majorité n'a jamais
favorisé que les entreprises peu rui-
neuses de M. Brazza.
Cette explication, déjà assez heu-
reuse, n'est pas la seule que M. Rou-
vier ait hasardée à la tribune. Compre-
nant qu'il serait difficile de tout mettre
sur le compte de la mission Brazza et
d'imputer d'énormes dépenses à une
entreprise quasi-gratuite, M. Rouvier
a admis généreusement qu'on avait
bien employé quelques millions, au
Tonkin et ailleurs. Mais croit-on qu'il
s'agisse de conquêtes? croit-on qu'on
ait été là avec un plan prémédité,
ayant bien pesé le pour et le contre ?
Quelle erreur! M. Rouvier, qui connaît
son monde, affirme que, ni dans la
majorité, ni dans le cabinet dont il fai-
sait partie, il ne s'est trouvé un homme
politique pour voir les choses de si loin
et prendre ces précautions élémentai-
res. Nous - nous - en -- rapportons à ce ju-
gement et nous le retenons. On parfait
de la politique d'aventure; le mot de-
vrait être modifié, car la politique
qu'on suivait était une politique à l'a-
venture. On allait sans plan, au petit
bonheur, au jour le jour. C'est le com-
ble de l'opportunisme.
La majorité tonkinoise sera-t-elle
bien aise d'avoir été ainsi défendue?
Sera-t-elle bien fière d'être représentée
comme inconsciente et irréfléchie ?
Nous ne savons. En tout cas, ce n'est
pas sur un pareil terrain, ce n'est pas
sur un programme où les réformes
brillent par leur absence qee le parti
républicain peut chercher à s'unir. La
réplique de M. Pelletan, dont nous al-
lons maintenant dire un mot, a été, à
cet égard, décisive et triomphante.
S*
* *
Après un discours de M. Raoul Du-
val établissant le bilan de nos colonies
et montrant, par l'exemple de la Plata
et de l'Egypte, ce que pourrait être la
colonisation commerciale, M. Pelletan
a demandé le renvoi à lundi, et n'ayant
pu l'obtenir, il a pris la parole malgré
l'heure avancée.
M. Camille Pellletan, ayant en face
de lui le rapporteur des conventions et
1 apologiste de la politique coloniale, a
naturellement fait porter sur ces deux
questions tout l'effort de sa discus-
sion. En ce qui touche les conventions,
il a facilement démontré que la si-
tuation de l'Etat était moins bonne vis-
à-vis des compagnies sous l'empire
des nouveaux .traités qu'elle ne l'était
avant. Ceci est certainement la faute
des négociateurs et on peut en dire au-
tant des retards apportés à la réduction
des tarifs. Il y a plus de deux ans que
ces réductions sont proposées et, avec
un peu de zèle de la part des bureaux,
un peu de fermeté de la part des mi-
nistres, tout serait fini depuis long-
temps, au grand profit de tout le monde.
M. Pelletan, qui a terminé son discours
par un grand éloge de l'industrie pri-
vée, concilierait difficilement cette doc-
trine avec le système du réseau d'Etat
dont il se déclare partisan et que nous
jugeons dangereux et funeste. Mais
cette inconséquence n'empêche pas
d'être exactes la plupart des criti-
ques adressées par l'orateur aux con-
ventions. Nous 1 avons dit alors qu'on
les discutait : leur plus grand tort
était d'être inutiles ; les conven-
tions en vigueur suffisaient, avec l'ap-
plication vigilante du cahier des
charges, pour obtenir à moins de frais
tout ce qu'on pouvait exiger utilement
des compagnies. Mais on ne l'a pas
fait et, en outre, pour faire voter les
conventions, M. Raynal a fait briller
aux yeux de la Chambre des résultats
auxquels il ne pouvait guère croire lui-
même et qui rendent plus cruelle la
déception actuelle. M. Pelletan a donc
raison de mettre ce vote au passif de la
majorité et du précédent cabinet.
La politique coloniale prête à de bien
autres critiques, et c'est avec une gran-
de force que l'orateur a montré cette
politique naissant non d'un plan pré-
conçu, mais de la nécessité où l'on
s'était mis d'éluder le programme des
réformes.
Tant que la République a suivi sa
voie, personne n'a pensé à la prétendue
politique de débouchés commerciaux
ou à la politique de conquête. Le jour
où une fraction du parti républicain,
celle qui gouverne depuis deux ans, a
résolu de faire échec à toute tentative
de réforme, il a bien fallu occuper l'opi-
nion publique.
La Tunisie et le Tonkin, Madagascar
et le reste sont la rançon singulière-
ment coûteuse du programme démo-
cratique, de ce programme rejeté bien
loin, comme irréalisable, lors du dis-
cours du Havre. Quand M. Jules Ferry
creusait ce large fossé entre lui et les
radicaux, quand il disait qu'entre nous
et lui la trève était rompue, quand oa
faisait un pas en arrière, un pas vers la
politique monarchique par conséquent,
n'était-il pas naturel qu'on en revînt
aux fautes de la monarchie, à ses p6-
chés d'habitude, au déficit, aux aven.
tures? C'est cette démonstration qui a
été faite par M. Pelletan avec un talent
supérieur et avec le plus vif et le plus
légitime succès.
A. GAULIBa.
Note de l'agence Havas :
Quelques journaux signalent la dualité de
direction qui existerait dans l'action française
Feuilleton du RAPPEL
DU 13 JUILLET
- 1
LA BANDE
DES
COPURCHICS
t\OMAN PARISIEN
~.<
I
les Copurehtaff
Penche sur le De iure belli et pacis de
l'illustre Grotius, lequel étant nourri au
petit pot de faïence de Delft écrivait déjà
des vers latins, Guibolmar, qui n'aimait
dans le droit que la politique, releva la
lôte et remarqua que le soleil indiquait
l'heure de la faim.
• - C'est le moment, dit-il, où la pha-
lène sambucaire sur le tronc rugueux ap-
pelle aux amours.
Il ouvrit sa fenêtre et frappa trois coups
Sur un gong pris dans une jonque de pi-
tates barbares par des marins civilisés.
Guibolmar frappa trois autres coups,
puis trois autres encore, total : neuf.
Aussitôt toutes les fenêtres du quatrième
étage, à côté de la sienne, et des mansar-
des d au-dessus, s'entrebâillèrent, une tôte
passa par chacune de ces fenêtres, les
bouches de toutes ces têtes s'ouvrirent à
ftepftfucUon igfôrdftt. - .-
la fois, et de toutes ces bouches sortit le
même cri :
- Joie t
Et ces fenêtres se refermèrent, les bou-
ches aussi.
Le phalanstère s'éveillait.
Guibolmar, seigneur de Finboulet, tirait
son premier nom de guibolle qui vient de
gamba tout aussi droit que jambe, et de
mar ou mer, en latin mare, ce qui signi-
fiait qu'il avait des jambes à enjamber la
nier. Pour le second nom, il lui venait
d'une terre qui allait par les apophyses de
la bosse nasale à la courbe occipitale, et
c'était de cette terre cultivée avec soin
qu'il tirait sa noblesse.
Guibolmar était plus long que jour sans
pain, et ses amis disaient d'habitude qu'il
recevait la pluie cinq minutes avant les
autres. Il était aussi fort que grand, et,
un jour qu'il avait laissé son poing tom-
ber du haut de son bras sur la tête d'un
sergent de ville, celui-ci n'avait vu sans
trente-six chandelles que deux heures
après.
La chambre où se trouvait Guibolmar,
et qui était la sienne, ne possédait pas
une quantité très considérable de meu-
bles. Un lit en fer, une table en chêne
sculpté, une bibliothèque en sapin suffi-
samment garnie de livres — poésie, bro-
chures politiques, et quelques volumes
de droit, — une table de nuit, un fau-
teuil, trois chaises et un tabouret, c'était
absolument tout. Quelques tableaux pen-
daient le long des murs, Minna et Brenda,
gravure en noir sur un sujet de Walter
Scott ; l'Indiscret, une gravure du dix-hui-
tième siècle avec une femme en agréable
posture pour M. Fleurant; une Adoration
des Mages, de la fin de l'an de grâce 1599 ;
une sanguine, les Présents réciproques, et
plusieurs dessous qui a laissaient riçjj à,
désirer, ni pour le sujet de la composi-
tion, ni pour les inscriptions qui s'éta-
laient au-dessus.
Cette décoration modeste était complé-
tée par une énorme araignée verdâtre,
dont les pattes velues s'étendaient dans le
plafond, ce qui prouvait surabondamment
que Guibolmar en avait une. Guibolmar
l'avait peinte lui-même, mais un peintre
par aventure, quand il cessait d'être étu-
diant, l'avait aidé pour les poils de sa
brosse et de la bête.
Guibolmar avait mis son chapeau.
— Pieça, que je t'attends, dit-il au ca-
marade qui entra.
Celui-là était Maillochon, seigneur de
Lavaloir, ainsi nommé de la solidité de
sa tête et de la commodité de son gosier.
Après entrèrent :
1° Coqsigno de Vinces, dont le nom ve-
nait de l'empereur Constantin, lequel,
commejon sait, était de Chlore bien avant
que Lavoisier eût découvert ce parfum, et
lequel empereur avait assassiné à l'aide
d'une croix, sur des couplets de Clairville,
Son père et sa mère et ses trois enfants,
Sans compter les gens
Qu'il avait dans l'temps
Occis bien avant d'occir' ses parents;
Ainsi Coqsigno avait vaincu, et tou jours
était vainqueur, non par la croix, mais
par le signe du coq qu'il portait apparem-
ment en lui.
2e Pictonnez de Barbafoin, lequel tirait
de sa barbe couleur de foin la faculté de
se piquer le nez chez tous les mastroquets
du quartier.
3° Enfin Peinturlure de Crôùtonniaque,
qui cessait volontiers ses études véritables
afin de montrer son talent particulier pour
les potages aux croûtons et les soupes à
l'oseille servie sur de la toile 18-22, en
qualité de nature morte.
Ainsi réunis, et d'ailleurs tous étudiants
en droit, ils formaient la tant connue, tant
aimable et tant célèbre bande des Copur-
chics, nom qui-venait de pur, grand cha-
peau de feutre inventé par Rubens et fort
cher aux étudiants, et de chic, qui aurait
pu être abréviatif de chicane, finesses de
procédure, parce que ces étudiants étaient
généralement approchant de basoche ;
mais chic qu'il fallait entendre comme un
synonyme de l'élégance des habits et des
manières des membres de la bande, élé-
gance dépendante de leur chapeau, ainsi
que l'indiquait le préfixe en sens copüia-
tif co, de cum, avec, comme si on avait dit
que ceux de la bande étaient purs avec chic
ou étaient doués d'un chic pur.
Et, pour êîr® pleinement renseigné sur
la tenue des célébrés Copùrchics, il suffit
de citer les vers que Guibolmar de Fin-
boulet avait faits pour se peindre lui-
même, un jour qu'il sortait d'entendre
une leçon de Valette, professeur éminent
qui avait raté sa profession de chanteur
d'opéra malgré ses études préfacultuelles.
Voici quels étaient les vers dépeignant
le costume bien peigné de ces étudiants :
Coiffé d'un feutre, je portais
Va long habit fort excentrique,
Je maniais, quand je sortais,
Dans ma main une énorme trique,
Dans l'étoffe de mon collet
On eùt pu tailler des culottes
A l'Ogre du Petit Poucet
Dont j'avais dérobé les boUel.
Et de fait, quand on voyait sortir de
chez eux les cinq Copurchics, pareille-
ment accoutrés, les passants qui étaient
accoutumés de vivre loin des terres du
Latium ouvraient les portières de leur,
regard aussi grandement ique les portes
porchères de Notre-Dame âlé* Paris, dont
Victor Hugo a relié son plus uameux ro-
man.
C'est qu'il faisait beau voir les Copur-
chies se prendre le bras aussitôt sortis de
leur phalanstère, et, très profondément,
s'incliner devant le Panthéon, en révé-
rence des grands hommes que les curés
en avaient chassés en l'impériale année
186., où se passe cette véridique histoire.
Et ayant tiré leur révérence au Pan-
théon, les Copufchics se retournaient
pour faire la niquenette à Rougelanterne,
car c'était ainsi qu'ils nommaient ïâTpt>-
lice, disant l'avoir plus bas que reins, et
se déclarant furieux de voir un dépotoir
de sergents de ville juste en face de l'Ecole
de droit où Vatrin démontrait profess ora-
lement que le droit pouvait être tortu.
Les Copurchics prirent la rue Soufflot.
— Savez-vous pourquoi, demanda Coq-
signo, dans cette rue-ci.
— Coqsigno, dit sévèrement Maillochon,
nous sommes en France.
— J'entends, dit Coqsigno, mais je vous
demande pourquoi, dans cette rue Souf-
flot, toujours le vent souffle au.
— Dosi
— Oui.
mm C'est pour mieux marcher, mon
mignon, dit Maillochon, car pour faire
aller leur navire nous voyons les nauton-
niers présenter leur voile au vent.
— Et les pâtissiers y mettre des que-
nelles.
— Prends garde aux querelles, si tu les
fais comme ça, Coqsigno.
Ils étaient arrivés devant une vieille
brehaigne, qui, dans le renfoncement de
la rue, tenait un commerce de fleurs.
— Il ne faut pas oublier, dit Peinturlure
de Croûtonniaque, que nous devons souhai-
ter aujourd'hui la fête de notre gargotière,
Mme Bonbail, qui n'en a pas fait un avec
les amours, malgré ses prétentions.
Chacun des étudiants acheta, moyen-j
nant quinze sous de monnaie en moyenne,
un pot de fleurs plus ou moins odorantes
qu'il mit sous son bras. L'un avait de
l'héliotrope, l'autre du réséda, le troi-
sième une amaranthe, le quatrième un
fuchsia, et le cinquième une giroflée.
Ils entrèrent dans leur restaurant à la file.
— Bonjour, Astasie, dit le premier, qui
était Guibolmar.
— Bonjour, Astasie, dit le second, qui
était PÎCÎ02UÇZ.
Les autres continuèrent et, se trouvant
tous les cinq autour de la mère Bonbail,
ils entonnèrent en chœur :
Chère Astasie, aujourd'hui c'est ta fête,
Rien ne m'a dit que tu n'y étais pas,
Voici des fleurs pour couronner ta tète,
Avec un pot pour orner tes appas.
- Merci, merci, mes enfants, dit Mm.
Bonbail.
Les étudiants lui mirent les pots de
fleurs dans les mains, sur les bras, et il
entra de nouveaux clients qui, eux aussi,
plantèrent leurs pots et leurs bouquets
sur la brave femme.
— Ah ! ça, qu'est-ce que vous voulez
que je fasse de ça? s'écria-t-elle en ou-
vrant les bras.
L'échafaudage chut à terre, les bou-
quets s'écrasant, les pots se cassant, les
pétales s'éparpillant.
— Traiter ainsi nos fleurs 1 s'écrièrent
les clients.
Et ils se précipitèrent dans la cuisine.
saisirent des casseroles qu'ils métamor-
phosèrent en jardinières, des carafes dont
ils firent des porte-bouquets, des sou-*
pières dont ils créèrent des vases, et dl
dressèrent sur le comptoir toute une expf?;
sition florale.
POUMHWI».
14 OMWX4
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