Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1881-03-13
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 mars 1881 13 mars 1881
Description : 1881/03/13 (N4020). 1881/03/13 (N4020).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75344232
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/09/2012
K* 4020 — Dimanche 1 a Mars 1881 le numéro : Iftc. — Bépav^eiiaeBte : c* 28 Ventôse an 89 — N® 4020
ADMINISTRATION
Î3, lŒE DE VALOIS, 11
ABONNEMENTS
PARIS
frois mois. 10 1)
£ uc mois. 20 -- »
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 13 SO
six moi 27 a
-
Adresser Ici Ires et naaâais
A M. ERNEST LEFÈVRS
,
LE RAPPEL
RÉDACTION
S^cfresse? au Secrétaire ae la Rédaction
De & à 6 heures du soir
18, HUE DE VALOIS, 18
Les manuscrits non insères ne seront pas rua.,
ANNONCES
mL Ch. IAGBANGE, CES? et GD
6, plaee de la Bourse, 6
DEMI-JOIES
Quand on a peu de joies, on s'en fait
avec n'importe quoi. Ce sont des joies
moàestes. Ce n'est peut-être pas le cas
de dire, comme le marquis de Mascarille
au vicomte de Jodelet : « Que veux-tu
dire avec ta demi-lune? c'était bien
une lune tout entière. » C'est plutôt
- Que veux-tu dire avec ta joie tout
entière? c'est une demi-joie. Donc, les
journaux réactionnaires sont en train
de se faire une demi-joie avec J'entre-
vue des deux présidents, vous savez,
cette entrevue que le président de la
Chambre avait eu la candeur de de-
mander au président de la République
et où M. Grévy a si joliment blackboulé
M. Gambetta.
Que M. Gambetta ait été joliment
blackboulé par M. Grévy, vous n'en
doutez pas, puisque c'est le Petit Jour-
nal qui le dit. Vous me demandez
qui l'a dit au Petit Journal? Je vous
accorde que ce n'est pas M. Gambetta;
il est rare qu'on se précipite dans les
bureaux d'un journal pour le supplier
d'apprendre à l'univers qu'on vient d'ê-
tre blackboulé, même joliment. Le
blackboulé de l'Elysée a dû naturelle-
ment garder le secret de cette entrevue
qu'il s'est repenti d'avoir sollicitée
et, quand on lui en a parlé, affecter
une physionomie de satisfaction et de
triomphe. Celui qui a raconté la chose
ne peut donc être que M. Grévy. Je ne
me figurais pas M. Grévy sous l'aspect
d'un homme qui n'a rien de plus pressé
que d'aller raconter les affaires de
l'Etat au Petit Journal. On le repré-
sentait plutôt jusqu'à iprésent comme
poussant jusqu'à l'avarice l'économie
de ses paroles. Il paraît qu'on change
à tout âge. Hier il était muet, aujour-
d'hui il est bavard. Métamorphose de
poisson en pie.
Soit, le président de la République
a passé du genre aquatique au gen-
re volatile. Soit, le président de la
Chambre a été blackboulé joliment.
Non-seulement, c'est le Petit Journal
qui le dit, mais encore c'est la France
qui le répète. Pour en douter, il fau-
drait ne pas croire à l'infaillibilité de
M. de Girardin. Nous n'en doutons
donc pas. Et nous comprenons parfai-
tement la demi-joie des journaux réac-
tionnaires. Blackboulé à l'Elysée, M.
Gambetta sera blackboulé à la Chambre :
le scrutin d'arrondissement, appuyé par
le successeur de M. de Mac-Mahon,
dira : J'y suis, j'y reste! Alors, « M.
Gambetta, qui a joué sa royauté sur
cette carte, tombe de ce faîte sublime
où l'ont porté la bassesse, la lâcheté et
l'impuissance d'une majorité la plus
nulle et la plus incapable qui fut jamais ».
C'est le premier vœu des journaux réac-
tionnaires , et une maj orité serait bien
extraordinaire de ne pas exaucer les
vœux de gens qui l'y invitent avec ces
compliments. Le scrutin de liste rejeté,
c'est M. Gambetta tombé du quatrième
étage de sa royauté et cassé en mor-
ceaux. Les réactionnaires se frottent
les mains.
Oui, mais si la majorité, malgré
l'Elysée et le Petit Journal, est pour le
scrutin de liste? alors, au lieu de
« tomber de son faîte sublime M, le
président de la Chambre ajoute à sa
royauté un étage. Eh bien, en ce cas,
c'est le président de la République qui
tombe. Le vote le frappe au cœur.Ce n'est
plus seulement le président de la Cham-
bre qui lui fait la guerre, c'est la
Chambre même. Nous revenons au
temps où M. Thiers était en querelle
avec l'Assemblée nationale. Et les
ennemis de la République se plaisent
à entrevoir dans un avenir prochain
une résurrection du Vingt-quatre Mai.
Ainsi, dans les deux cas, dispute,
conflit, bataille, républicains contre ré-
publicains, tous les coups blessant la
République. tel est le rêve des réac-
tionnaires. Réveillons-les.
Leur illusion est de se croire toujours
sous le régime du gouvernement per-
sonnel. Nous ne voulons pas dire qu'un
dissentiment qui s'accentuerait entre
M. Jules Grévy et M. Gambetta n'aurait
aucune importance ; mais au-dessus des
deux présidents il y a les Chambres,
et au-dessus des Chambres il y a le
pays. Les ennemis de la République
négligent ce tout petit détail : la
France.
Ce serait trop de répondre à ceux qui
se plaisent à espérer que les deux pré-
sidents vont en venir aux mains :
Qu'ils s'accordent entre eux ou se gourment, qu'importe?
Les deux présidents ne se gourme-
ront pas, mais ils-se gourmeraient qu'il
n'en résulterait pas les choses que
les Perrettes de la réaction voient dans
leur pot au lait.
On peut différer sur la question de
scrutin sans être à couteaux tirés, mê-
me à la Chambre, où les couteaux sont
des couteaux de bois. Celui des deux
présidents qui n'obtiendra pas le
scrutin de ses rêves, se consolera.
Il pourra, si ça le soulage, aller
verser ses peines dans le sein du
Petit Journal. Quant à la Républi-
que, nous en sommes fâchés pour ses
ennemis, elle ne court pas le moindre
risque, même d'être égratignée. Si le
scrutin d'arrondissement est mainte-
nu, elle aura la même Chambre; si le
scrutin de liste est adopté, elle en
aura une meilleure. Elle ne peut donc
que gagner. Si ce sont là les demi-joies
des monarchistes, nous leur souhaitons
des joies tout entières.
AUGUSTE VACQUBaIB.
LEURS lN QUI El UDES
Comme le faisait hier remarquer no-
tre collaborateur et ami Edouard Loc-
kroy, les partisans du scrutin d'arron-
dissement ne sont plus le moins du
monde pressés de livrer cette bataille
qu'ils se prétendent si sûrs de gagner.
Non-seulement ils ne sont pas pressés
de la livrer, mais ils voudraient bien ne
pas la livrer du tout. Ah ! s'écrie naïve-
ment l'un d'eux, ah ! si M. Bardoux re-
tirait sa proposition, comme toutes les
inquiétudes seraient dissipées! Mais
quoi ! vous avez donc des inquiétudes ?
Puisque la victoire est sûre, d'où vous
viennent tant de soucis? ;<
H, C'est par patriotisme, nous répondent
les avocats du scrutin minuscule; c'est
pour éviter des déchirements funestes
que nous voudrions supprimer le débat
et enterrer la question.
Eh bien, l'intention est bonne assu-
rément, mais l'excellence des inten-
tions ne peut suffire en politique. Il
faut, quand on souhaite sérieusement
le maintien de l'union entre les divers
groupes républicains, ne pas s'écarter
obstinément, et sans nécessité, de ce
qui a toujours été le programme répu-
blicain. En 1875, il a bien fallu subir
le scrutin uninominal, mais, personne
n'osera nous démentir sur ce point,
c'était avec la résolution formelle de
s'en débarrasser au plus vite. Aujour-
d'hui les républicains sont maîtres du
terrain; la loi électorale sera ce qu'ils
voudront la faire. Ne seraient-ils pas
inexcusables si, par leur complicité in-
téressée, cette loi restait en contradic-
tion formelle avec les principes qu'ils
ont toujours défendus, aussi bien qu'a-
vec le sens commun et l'honnêteté po-
litique?
Quand on nous parle d'union, d'a-
paisement, qu'on ne cherche donc pas
à obtenir ces heureux résultats en obli-
geant la moitié de la majorité à renier
ses convictions et ses principes. En
présence de la coalition monarchique
armée de toutes pièces, lorsqu'il s'agis-
sait, pour la République, d'arracher
quelques garanties légales à nos adver-
saires, les plus fermes ont compris la
nécessité des sacrifices et dps conces-
sions. Mais s'imagine-t-oa qu'au nom
des « inquiétudes » qu'on avoue, au
nom de l'intérêt personnelde quelques
effarés, on va faire fléchir, sans néces-
sité et sans dignité, des hommes qui
pensent à la France avant de penser à
leur réélection? Il faut être pins que
naïf pour le croire et nous ne pensons
pas que jamais les intérêts individuels
égarés aient élevé plus ridicule et plus
cynique prétention. f
En somme, tous les députés de la
majorité actuelle ont la même origine;
tous sortent du scrutin d'arrondisse-
ment. Ceux qui proposent de revenir
au scrutin politique courent, comme
ceux qui préfèrent le scrutin des
bourgs pourris, la chance que com-
porte tout changement de ce genre.
Seulement, on ne peut pas accuser les
premiers d'agir par calcul, car ils res-
tent simplement fidèles aux traditions
invariables du parti; quant aux autres,
alors même que leur - changement d'o-
pinion ne serait pas dicté par des con-
sidérations personnelles, ne sentent-
ils pas combien il prête à la suspicion ?
Que proposent-ils doiic à nos amis ? de
renier avec eux et pour eux ce qu'ils
ont dit et écrit pendant toute leur vie?
C'est 14 ce qu'ils appellent « l'union »
et c'est sur ce terrain qu'ils déclarent
les attendre. Ils les y attendront en
vain, car ce qui n'est à cette heure que
la faiblesse de quelques-uns devien-
drait alors le déshonneur commun.
A. GAULIER.
——.-————— —————————
Une feuille spéciale, dont les informa-
tions nous inspirent toute confiance, le
Journal du Lundi, assure que l'attention
du ministre de la guerre a été appelée sur
la cession des moulins Darblay à une so-
ciété dont l'un des principaux intéressés
serait un banquier allemand qui passe
pour avoir coopéré efficacement, en 1870,
au ravitaillement des armées assiégeant
Paris. Ces moulins, qui devaient être dé-
truits et qu'on oublia, rendirent de grands
services à l'ennemi. Le Journal du Lundi
croit savoir que l'administration du génie
militaire a préparé d'avance tous les
moyens de destruction nécessaires pour
que la même négligence ne se reproduise
pas.
A. G.
COULISSES DES CHAMERES
Ainsi qu'elle l'avait décidé mardi der-
nier, la commission du scrutin de liste
s'est réunie hier pour commencer à en-
tendre les auteurs de contre-projets ou
d'amendements.
Le premier membre entendu a été M.
Cantagrel, qui a développé un système
bizarre, absolument inintelligible, qu'il
qualifie de scrutin de ralliement et qui n'a
été considéré par la commission que
comme une fantaisie personnelle.
Les auditions sérieuses n'ont commencé
qu'avec les autres orateurs : MM. Marion,
Peulevey et Desseaux ont développé trois
amendements à peu prè§ identiques ten-
dant tous au scrutin de liste par arrondis-
sement.
Nous avons déjà indiqué en quoi consis-
tait ce système : il maintient le scrutin
uninominal pour tous les arrondissements
qui n'ont qu'un représentant; quant à
ceux qui ont deux députés au moins, ils
les élisent au scrutin de liste.
Sur 362 arrondissements, il y en a 236
n'ayant qu'un député, et par suite con-
servant le scrutin uninominal ; il y en a
126 ayant 2 députés ou plus et auxquels
s'appliquerait le scrutin de liste.
M. Marion, député de l'Isère, a déclaré]
qu'en principe il inclinerait plutôt pour le
scrutin de liâte : mais qu'en fait il jugeait
ce mode de votation dangereux, comme'
se prêtant trop aux manœuvres brusques
et irréfléchies de l'opinion publique. Il a
ajouté qu'il, présentait le scrutin de liste
par arrondissement comme un moyen de
transaction.
Quant à MM. Peulevey et Desseaux, ils
sont absolument opposés au scrutin de
liste ; mais c'est aussi par esprit de conci-
liation qu'ils proposent le scrutin de liste
par arrondissement.
La commission n'a pas statué ; elle con-
tinuera donc à entendre les auteurs des
autres amendements, dans sa prochaine
séance qui aura lieu mercredi 16 mars.
Le garde des sceaux et le ministre du
commerce ont été entendus hier par la
commission chargée du projet de loi sur
les syndicats professionnels. Ainsi que
nous l'avions fait prévoir, MM. Gazot et
Tirard ont accepté toutes les modifica-
tions libérales — sauf deux — apportées
par la commission au projet du gouver-
nement.
Les deux seuls points qui soulèvent des
objections de la part du garde des sceaux]
sont ceux relatifs à l'union des syndicats
entre eux et à la suppression du droit de
dissolution conféré aux tribunaux en cas
d'infraction grave à lê.loi.
Mais l'accord se fera entre le gouverne-
ment et la commission, moyennant quel-
ques modifications que celle-ci va appor-
ter à sa rédaction.
Ainsi la, commission limitera la person-
nalité civilê rést?eintè aux syndicats agis-
sant isolémefit et la refuserâ^^ix unions
de syndicats:
Quant au droit de dissolution, la com-
mission juge qu'il est inutile. Elle fait
observer, en effet, que l'article 1er du pro-
jet énumère limitativement les objets
pour lesquels les syndicats professionnels
pourront fonctionner librement. Si ces
syndicats s'écartent de leur but précis,
ils deviendront des associations illicites
et tomberont ipso facto sous le coup du
droit commun.
Le rapport de M. Allain-Targé sera dé-
posé mardi sur le bureau de la Chambre,
et cette dernière pourra discuter le pro-
jet de loi dans quelques jours de manière
à le renvoyer le plus tôt possible au Sé-
nat.
—o—
Les deux commissions nommées jeudi
pour examiner les propositions Raspail et
Chevandier se sont réunies hier et ont pu
achever leurs travaux dans cette unique
séance. Les deux propositions ont été
adoptées à l'unanimité, et on a nommé
pour rapporteurs leurs auteurs respec-
tifs.
Nous rappelons que la proposition Ras-
paii a pour but la laïcisation du Panthéon
et la suppression des chapelains de Sainte-
Geneviève, qui forment le clergé de cette
église. Quant à la proposition Chevan-
dier, elle a pour but d'assimiler les en-
terrements civils aux obsèques ordinaires
au point de vue des honneurs funèbres
prescrits par le décret de messidor an XII.
La Chambre va donc être appelée à vo-
ter les deux propositions dans quelques
jours.
——————— ———————
Au moment où la question de la révi-
sion de la Constitution est à l'ordre du
jour de la presse et va être prochaine-
ment à l'ordre du jour de la Chambre,
nous sommes heureux d'annoncer à nos
lecteurs que le Rappel a obtenu de Louis
Blanc une Histoire de la Constitution.
Nous commencerons ces jours-ci Ila pu-
blication de cette histoire, tout à fait di-
gne, par son importance et par son intérêt,
du grand historien de Dix ans.
—————
t SOUSCRIPTION
EN FAVEUR DES
VICTIMES DE L'INCENDIE DU PRINTEMPS
-
(Première liste)
Le R tppel 1.000 »
Victor Hugo ^>00 »
Louis Blanc 20 »
E. Joussen, directeur de la com-
pagnie (c Linoleum », 21, boulevard
Haussmann 100 »
Collecte faite entre dix employés
de la maison Lagorce et Prudhom-
me, 12, rue Feu trier 8 50
P. Borel 2 »
Mme Duval, 2ti, boulevard Or-
nano 5 »
Henri Bachelier, fabricant de bou-
tons, 19, rue Pierre-Levée i »
A. M. 2 50
Dupré, 79, rue Saint-Sauveur 2 »
Un commissionnaire médaillé,
112, rue de Provence 5 »
Mme H. Le Roux 2 »
i Total de la lre liste 1.637 »
LA MORALE INDEPENDANTE
A la religion soyez toujours fidèle,
Les mœurs ni la vertu ne sauvent pas sans elle.
Tels sont les vers remarquables qu'on
trouve inscrits sur les murs des écoles
congréganistes, pour servir de texte aux
leçons religieuses des bons frères et des
bonnes sœurs. C'est la doctrine exprimée
partout : à l'école, en chaire, dans les
journaux pieux, dans les livres dévots.
« Hors de l'Eglise, point de salut. »
A Dieu ne plaise que je discute une
parole des ministres du Seigneur; l'esprit
saint n'a-t-il pas inspiré les pères de l'E-
glise? Un concile n'a-t-il pas déclaré le
pape infaillible?
- Inclinons-nous donc devant ces êtres
supérieurs qui ne peuvent ni se tromper
ni nous tromper. Ils ont raison, hors de
l'Eglise, point de salut!
Vous êtes un homme de bien, humain
et charitable, vous secourez les malheu-
reux, vous mettez votre force au service
de la justice, et vous ne faites jamais rien
qui puisse nuire à vos semblables, mais
vous ne croyez pas que le démon caché
sous la figure d'un serpent ait séduit ma-
dame Eve et que, par cela, nous soyons
tous coupables en naissant : votre arrêt
est prononcé ; il y a quelque part un im-
mense four où flambe un feu éternel. Allez
rôtir! Hors de l'Eglise, point de salut 1
Vous, vous avez aimé votre famille,
vous avez fidèlement travaillé pour votre
femme et vos enfants, vous vous êtes dé-
voué à leur bonheur, vous avez été « bon
père et bon époux », mais vous avez fait
gras le vendredi, vous n'êtes pas allé vous
confesser « à tout le moins une fois
l'an » : au feu! Hors de l'Eglise, point do
salut! •
Vous, qui avez donné vos travaux et vos
veilles au progrès, qui avez parlé aux
hommes de leurs devoirs, qui leur aveif
enseigné les vertus civiques, vous no:
croyez pas qu'un homme, avec quelques
mots de latin, fasse descendre Dieu dans*
un morceau d'hostie : au feu, misérable f
au feu éternel l i
Et toi, Socrate, qui as prêché le bien ét
le beau, toi qui es mort pour la vérité et
pour la justice, parce que tu as vécu bien?
avant que la colombe soit venue du cieF:
pour opérer le mystère de l'incarnation
pans le sein d'une vierge, tu es condam-
né, c'est l'arrêt de l'Eglise. Amen l
Voilà qui est parfait. Seulement, je me
permets de trouver que dans les deux
vers que j'ai cités plus haut, il y a une6,
concession fâcheuse à laquelle l'Eglise ne,
devrait pas souscrire. Si j'étais l'Eglise, je!
dirais d'une façon absolue, avec l'autorit
indiscutable de quelqu'un qui parle aui
nom du ciel, que non-seulement il n'y ai
pas de salut hors de l'Eglise, mais qi^il;
ne peut pas y avoir de mœurs et de vertu
hors d'elle. Non ! personne n'a des mœurS#
s'il ne croit pas qu'une femme puisse être
vierge et mère tout ensemble, personnel
n'a de vertu s'il n'est pas persuadé qui
y a trois dieux qui n'en font qu'un ; per-j
sonne n'a des mœurs s'il ne croit pas aux;
miracles, personne n'a de vertu s'il n'ad^-j
met pas que le culte catholique apostbli-;
que et romain soit le seul vrai, le seul di-,
vin.
Et qu'est-ce que vient nous chanter le
« poète », que les mœurs et la vertu ne
sauvent pas sans la religion ? lorsque tout
le monde sait bien que sans la confession,
la communion, le jeûne et la foi à Notre'
Dame de Lourdes, il ne peut y avoir nf.:
vertu ni mœurs. Je dénonce donc aux
prêtres et aux évêques le distique subver-
sif qui s'étale ainsi sur les murs des écoles
congréganistes, il tend simplement à cor-
rompre l'intelligence des enfants, il pour-
rait leur inspirer cette pensée satanique
qu'il peut y avoir une morale indépen-
dante de la religion ; qu'on peut être
juste, humain et bon, qu'on peut remplie
ses devoirs sociaux, ses devoirs civiques;,
être un honnête homme enfin, même si
on n'est pas catholique, ce qui serait uns
premier pas vers la plus coupable des-,
hérésies.
Partant de là, en effet, les esprits qui
ont le malheur de raisonner pourraient se
dire : Eh quoi ! l'Eglise condamne au feu
éternel les gens qui ont des mœurs et de
la vertu 1
GUSTAVE RIVET, i
LES OBSÈQUES D'AVAUR
Hier, à onze heures et demie, ont eu
lieu, au Val-de-Grâce, les obsèques du
pompier Avaur, victime de son dévoue-
ment dans l'incendie des magasins du
Printemps. '*
Dès dix heures et demie, la foule se
pressait devant la grille. La cour se rem-
plit bientôt. Des pompiers de toutes les
casernes, en grande tenue, arrivent, ainsi
que des délégations des gardiens de 1^-
paix.
Puis, le colonel Paris et MM. Côn&tans^
ministre de l'intérieur ; Hérold, préfet dq
la Seine ; Andrieux, préfet de police ;^le
général Lambert, commandant de la placer
de Paris ; Vergniaud, secrétaire .général 4.
la préfecture de la Seine ; Bailly, cbefr
adjoint du cabinet du préfet de police
Caubet, chef de la police municipale ; des?
représentants des ministres de la guerre
et de la marine ; Sigismond Lacroix, pLiiw- ï
sident du conseil municipal ; un certain
nombre de conseillers municipaux.
Les camarades du malheureux flwftP;
appartenant à la caserne de la rue Blan-f
che vont chercher le corps, déposé dansï
l'amphithéâtre. Le cercueil, couvert-d'uni
drap mortuaire brodé d'argent, est placjf:'
sur un brancard recouvert de drap fiolrï
Huit hommes le placent sur leurs épaulesr
et le portent à l'église, où les pompiers
Feuilleton du RAPPEL
DU 13 MARS
7 r
MONSIEUR CLEO
PREMIÈRE PARTIE
LE TESTAMENT IMPRÉVU
CHAPITRE IV
Leu- Bous eondition
( Suite)
t Un long silence succéda à cette lec-
t ture.
Laure, suffoquée de surprise et d'em-
barras, se leva, sembla vouloir parler,
frolesterj Mais les mots expirèrent sur ses
lèvre% tremblantes. Elle ^inclina, sans
Jgtffesser son salut à personne en kartig>
Voir le Iicppel du 7 m i% aaarg^ -
",àr
lier, et sortit avec la dignité qui lui était
comme naturelle, sans prononcer une pa-
role.
Les étrangers présents se retirèrent,
pressés sans doute d'échanger au dehors
leurs commentaires. Les gens du château
les suivirent. Il ne resta dans le salon que
le notaire et le vicaire avec Maurice in-
terdit.
Ce fut le notaire qui prit le premier la
parole.
— Permettez-moi de vous féliciter,
monsieur Treverton, dit-il, en se rappro-
chant du jeune homme, qui restait immo-
bile sur sa chaise, vous allez être un des
propriétaires les plus riches de ce pays.
Maurice secoua lentement la tête à plu-
sieurs reprises.
— Ce n'est là qu'un peut-être, monsieur
Sampson, dit-il enfin. Un an se passera,
dans tous les cas, avant que cela soit.
Et cela sera-t-il? Que de queslious à se
poser, que de questions à résoudre pour
sortir de cette situation étrange! Les obs-
tacles, chose bizarre, peuvent venir de l'une
ou de l'autre des deux parties qui semble-
raient intéressées à ce"qu'il n'y eût point
d'obstacle. Mlle Malcolm et moi, nous dé.
pendons l'un de l'autre. Un non d'elle ou
de moi peut déchirer et annuler le sin-
gulier testament que vous venez de nous
lire.
— Ce refus, de qui viendrait-il? de-
manda le notaire. Il me .semble que ce lie
peut être de vous. Laure Malcolm est bêiTh
«i çbamaûlveieljj cjU» PU» tare « ls
plus irréprochable jeune fille. On ne peut
vous soupçonner de l'avoir épousée par
cupidité et pour vous assurer cette fortune
princière.
— Sans doute, répondit Maurice, son-
geur. Mais elle?.
Le vicaire prit la parole :
— Je connais Laure Malcolm, dit-il ;
je connais sa piété filiale envers ce-
lui qui fut son bienfaiteur. Il est peu pro-
bable qu'elle refuse d'accéder a1 dernier
désir, à la volonté suprême de son père
adoptif.
Maurice ne répondit point d'abord ;
mais, après un silence :
— N'importe ! dit-il, je ne voudrais pas
paraître ingral envers mon cousin Gas-
pard, de qui je ne comptais certainement
pas, il y a quelques jours, avoir rien à es-
pérer jamais ; mais je ne puis m'empê-
cher de dire qu'il eût mieux fait de parta-
ger sa fortune entre Mlle Malcolm et moi,
en nous laissant libres de nous marier se-
lon notre choix.
Il parlait lentement et d'un air pensif;
il était très pâle et il était loin d'avoir
l'air conquérant ou heureux ; son expres-
sion était celle d'un profond décourage-
ment, d'une douloureuse angoisse, et les
traits de son beau visage étaient tout al-
térés.
M. Sampson reprit avec quelque éton-
nement :
•i Je ne connais cas beaucoup d'hom-
mes qui crafcldérfiraienfT'k clause d'épou-
ser Jbaure Malcolm comme une condition
dure ou difficile. Je crois, monsieur Tre-
vertoD, que vous serez plus heureux en
possédant une telle femme qu'en deve-
nant maître de toute 11 fortune de votre
cousin.
— Oui, oui, fit Maurice d'un air d'impa-
tience et de doute; — mais toujours au
cas où elle voudra bien m'accepter pour
époux !
— Vous avez douze longs mois pour
gagner son consentement, reprit le vi-
caire, et vous n'auriez vraiment pas de
chance si, pendant ce temps, vous ne
réussissiez pas à vous faire agréer par
elle. Je crois pouvoir vous assurer que
Mlle Malcolm n'a jusqu'ici aucun engage-
ment. Ainsi que vous, elle a dû naturel-
lement être surprise de l'étrangeté de
cette condition du testament. Mais, lais-
sez-moi vous le dire, la situation est, en
vérité, plus embarrassante pour elle que
pour vous.
Maurice, debout, accoudé à la cheminée,
garda encore le silence, et son visage ex-
primait toujours la contrariété et le dés-
appointement.
Le vicaire et le notaire se regardaient,
de plus en plus surpris.
Maurice s'en aperçut sans doute et re-
prit :
— Est-ce que vous pensez, messieurs,
que Mlle Malcolm ne continuera pas à
habiter ce château ?
— Je ne saurais vous dire ses intentions
sur ce point, répondif M. Clare, mais je
ci ois qu'jl serait coilvenable de laisser
cette demeure à sa disposition, et j'estime,'
qu'en notre qualité d'exécuteurs testa-
mentaires, nous pouvons, M. Sampson et
moi, lui faire cette proposition, si toute-
fois vous n'y voyez aucun inconvé-
nient.
— Je serais très heureux, au contraire,
de tout ce qui pourra être agréable à
Mlle Malcolm, répondit Maurice. Mais ma
présence, à moi, dans ces premiers mo-
ments, pourrait être une gêne pour elle.
Ét, comme rien ne me retient plus ici, je
retournerai à Londres dès demain. Cela
ne vous paraît-il pas dans les conve-
nances ?
— Fort bien, dit le vicaire en s'incli-
nant.
— Toutefois, reprit le notaire, ne vous
plairait-il pas, avant votre départ, de vi-
siter les propriétés? Il serait peut-être
bon que vous pussiez juger de ce que
sont des biens qui doivent presque sûre-
ment vous appartenir. Si vous vouliez,
sans façon, accepter mon offre, vous
passeriez une semaine ou deux chez moi.
Personne, aussi bien que moi, ne connaît
les biens et les terres, et je vous les
montrerais dans leurs moindres dé-
tails.
— Vous êtes trop bon, monsieur, dit
Maurice, et je serai heureux de profiter
de votre gracieuse invitation.
— A la bonne heure 1 et voilà qui est
dit. — Quand viendrez-vous à la maison?
Nous dînons tous içi, je crois^ ce
8jpirJ : ';, -/ !
Pourquoi ne partiriez-vous pas avec mo
après le dîner?
- Volontiers, monsieur. Ma présence
ici, je le sens, ne peut qu'importuner,
Mlle Malcolm.
Il fut donc convenu qu'on partirait pout
les Lauriers — c'était la maison du no";
taire — le jour même, après le repas. -
Mais, avant de quitter le château, il
fallait nécessairement que Maurice prie:
congé de Mlle Malcolm, et cette idée lui
causait un pénible embarras. j
Il n'y avait pourtant pas moyen d'élu-
der cette nécessité, et cette visite ne
pouvait pas même être retardée.
Maurice fit donc demander à Mlle Mat,
colm si elle voulait bien le recevoir avant
le dîner. 1--
Elle fit répondre qu'elle attendrait
M. Maurice Trevertons
MISS BftADDON*
>
(A suivre.) - - - ..1 «.
ADMINISTRATION
Î3, lŒE DE VALOIS, 11
ABONNEMENTS
PARIS
frois mois. 10 1)
£ uc mois. 20 -- »
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 13 SO
six moi 27 a
-
Adresser Ici Ires et naaâais
A M. ERNEST LEFÈVRS
,
LE RAPPEL
RÉDACTION
S^cfresse? au Secrétaire ae la Rédaction
De & à 6 heures du soir
18, HUE DE VALOIS, 18
Les manuscrits non insères ne seront pas rua.,
ANNONCES
mL Ch. IAGBANGE, CES? et GD
6, plaee de la Bourse, 6
DEMI-JOIES
Quand on a peu de joies, on s'en fait
avec n'importe quoi. Ce sont des joies
moàestes. Ce n'est peut-être pas le cas
de dire, comme le marquis de Mascarille
au vicomte de Jodelet : « Que veux-tu
dire avec ta demi-lune? c'était bien
une lune tout entière. » C'est plutôt
- Que veux-tu dire avec ta joie tout
entière? c'est une demi-joie. Donc, les
journaux réactionnaires sont en train
de se faire une demi-joie avec J'entre-
vue des deux présidents, vous savez,
cette entrevue que le président de la
Chambre avait eu la candeur de de-
mander au président de la République
et où M. Grévy a si joliment blackboulé
M. Gambetta.
Que M. Gambetta ait été joliment
blackboulé par M. Grévy, vous n'en
doutez pas, puisque c'est le Petit Jour-
nal qui le dit. Vous me demandez
qui l'a dit au Petit Journal? Je vous
accorde que ce n'est pas M. Gambetta;
il est rare qu'on se précipite dans les
bureaux d'un journal pour le supplier
d'apprendre à l'univers qu'on vient d'ê-
tre blackboulé, même joliment. Le
blackboulé de l'Elysée a dû naturelle-
ment garder le secret de cette entrevue
qu'il s'est repenti d'avoir sollicitée
et, quand on lui en a parlé, affecter
une physionomie de satisfaction et de
triomphe. Celui qui a raconté la chose
ne peut donc être que M. Grévy. Je ne
me figurais pas M. Grévy sous l'aspect
d'un homme qui n'a rien de plus pressé
que d'aller raconter les affaires de
l'Etat au Petit Journal. On le repré-
sentait plutôt jusqu'à iprésent comme
poussant jusqu'à l'avarice l'économie
de ses paroles. Il paraît qu'on change
à tout âge. Hier il était muet, aujour-
d'hui il est bavard. Métamorphose de
poisson en pie.
Soit, le président de la République
a passé du genre aquatique au gen-
re volatile. Soit, le président de la
Chambre a été blackboulé joliment.
Non-seulement, c'est le Petit Journal
qui le dit, mais encore c'est la France
qui le répète. Pour en douter, il fau-
drait ne pas croire à l'infaillibilité de
M. de Girardin. Nous n'en doutons
donc pas. Et nous comprenons parfai-
tement la demi-joie des journaux réac-
tionnaires. Blackboulé à l'Elysée, M.
Gambetta sera blackboulé à la Chambre :
le scrutin d'arrondissement, appuyé par
le successeur de M. de Mac-Mahon,
dira : J'y suis, j'y reste! Alors, « M.
Gambetta, qui a joué sa royauté sur
cette carte, tombe de ce faîte sublime
où l'ont porté la bassesse, la lâcheté et
l'impuissance d'une majorité la plus
nulle et la plus incapable qui fut jamais ».
C'est le premier vœu des journaux réac-
tionnaires , et une maj orité serait bien
extraordinaire de ne pas exaucer les
vœux de gens qui l'y invitent avec ces
compliments. Le scrutin de liste rejeté,
c'est M. Gambetta tombé du quatrième
étage de sa royauté et cassé en mor-
ceaux. Les réactionnaires se frottent
les mains.
Oui, mais si la majorité, malgré
l'Elysée et le Petit Journal, est pour le
scrutin de liste? alors, au lieu de
« tomber de son faîte sublime M, le
président de la Chambre ajoute à sa
royauté un étage. Eh bien, en ce cas,
c'est le président de la République qui
tombe. Le vote le frappe au cœur.Ce n'est
plus seulement le président de la Cham-
bre qui lui fait la guerre, c'est la
Chambre même. Nous revenons au
temps où M. Thiers était en querelle
avec l'Assemblée nationale. Et les
ennemis de la République se plaisent
à entrevoir dans un avenir prochain
une résurrection du Vingt-quatre Mai.
Ainsi, dans les deux cas, dispute,
conflit, bataille, républicains contre ré-
publicains, tous les coups blessant la
République. tel est le rêve des réac-
tionnaires. Réveillons-les.
Leur illusion est de se croire toujours
sous le régime du gouvernement per-
sonnel. Nous ne voulons pas dire qu'un
dissentiment qui s'accentuerait entre
M. Jules Grévy et M. Gambetta n'aurait
aucune importance ; mais au-dessus des
deux présidents il y a les Chambres,
et au-dessus des Chambres il y a le
pays. Les ennemis de la République
négligent ce tout petit détail : la
France.
Ce serait trop de répondre à ceux qui
se plaisent à espérer que les deux pré-
sidents vont en venir aux mains :
Qu'ils s'accordent entre eux ou se gourment, qu'importe?
Les deux présidents ne se gourme-
ront pas, mais ils-se gourmeraient qu'il
n'en résulterait pas les choses que
les Perrettes de la réaction voient dans
leur pot au lait.
On peut différer sur la question de
scrutin sans être à couteaux tirés, mê-
me à la Chambre, où les couteaux sont
des couteaux de bois. Celui des deux
présidents qui n'obtiendra pas le
scrutin de ses rêves, se consolera.
Il pourra, si ça le soulage, aller
verser ses peines dans le sein du
Petit Journal. Quant à la Républi-
que, nous en sommes fâchés pour ses
ennemis, elle ne court pas le moindre
risque, même d'être égratignée. Si le
scrutin d'arrondissement est mainte-
nu, elle aura la même Chambre; si le
scrutin de liste est adopté, elle en
aura une meilleure. Elle ne peut donc
que gagner. Si ce sont là les demi-joies
des monarchistes, nous leur souhaitons
des joies tout entières.
AUGUSTE VACQUBaIB.
LEURS lN QUI El UDES
Comme le faisait hier remarquer no-
tre collaborateur et ami Edouard Loc-
kroy, les partisans du scrutin d'arron-
dissement ne sont plus le moins du
monde pressés de livrer cette bataille
qu'ils se prétendent si sûrs de gagner.
Non-seulement ils ne sont pas pressés
de la livrer, mais ils voudraient bien ne
pas la livrer du tout. Ah ! s'écrie naïve-
ment l'un d'eux, ah ! si M. Bardoux re-
tirait sa proposition, comme toutes les
inquiétudes seraient dissipées! Mais
quoi ! vous avez donc des inquiétudes ?
Puisque la victoire est sûre, d'où vous
viennent tant de soucis? ;<
H, C'est par patriotisme, nous répondent
les avocats du scrutin minuscule; c'est
pour éviter des déchirements funestes
que nous voudrions supprimer le débat
et enterrer la question.
Eh bien, l'intention est bonne assu-
rément, mais l'excellence des inten-
tions ne peut suffire en politique. Il
faut, quand on souhaite sérieusement
le maintien de l'union entre les divers
groupes républicains, ne pas s'écarter
obstinément, et sans nécessité, de ce
qui a toujours été le programme répu-
blicain. En 1875, il a bien fallu subir
le scrutin uninominal, mais, personne
n'osera nous démentir sur ce point,
c'était avec la résolution formelle de
s'en débarrasser au plus vite. Aujour-
d'hui les républicains sont maîtres du
terrain; la loi électorale sera ce qu'ils
voudront la faire. Ne seraient-ils pas
inexcusables si, par leur complicité in-
téressée, cette loi restait en contradic-
tion formelle avec les principes qu'ils
ont toujours défendus, aussi bien qu'a-
vec le sens commun et l'honnêteté po-
litique?
Quand on nous parle d'union, d'a-
paisement, qu'on ne cherche donc pas
à obtenir ces heureux résultats en obli-
geant la moitié de la majorité à renier
ses convictions et ses principes. En
présence de la coalition monarchique
armée de toutes pièces, lorsqu'il s'agis-
sait, pour la République, d'arracher
quelques garanties légales à nos adver-
saires, les plus fermes ont compris la
nécessité des sacrifices et dps conces-
sions. Mais s'imagine-t-oa qu'au nom
des « inquiétudes » qu'on avoue, au
nom de l'intérêt personnelde quelques
effarés, on va faire fléchir, sans néces-
sité et sans dignité, des hommes qui
pensent à la France avant de penser à
leur réélection? Il faut être pins que
naïf pour le croire et nous ne pensons
pas que jamais les intérêts individuels
égarés aient élevé plus ridicule et plus
cynique prétention. f
En somme, tous les députés de la
majorité actuelle ont la même origine;
tous sortent du scrutin d'arrondisse-
ment. Ceux qui proposent de revenir
au scrutin politique courent, comme
ceux qui préfèrent le scrutin des
bourgs pourris, la chance que com-
porte tout changement de ce genre.
Seulement, on ne peut pas accuser les
premiers d'agir par calcul, car ils res-
tent simplement fidèles aux traditions
invariables du parti; quant aux autres,
alors même que leur - changement d'o-
pinion ne serait pas dicté par des con-
sidérations personnelles, ne sentent-
ils pas combien il prête à la suspicion ?
Que proposent-ils doiic à nos amis ? de
renier avec eux et pour eux ce qu'ils
ont dit et écrit pendant toute leur vie?
C'est 14 ce qu'ils appellent « l'union »
et c'est sur ce terrain qu'ils déclarent
les attendre. Ils les y attendront en
vain, car ce qui n'est à cette heure que
la faiblesse de quelques-uns devien-
drait alors le déshonneur commun.
A. GAULIER.
——.-————— —————————
Une feuille spéciale, dont les informa-
tions nous inspirent toute confiance, le
Journal du Lundi, assure que l'attention
du ministre de la guerre a été appelée sur
la cession des moulins Darblay à une so-
ciété dont l'un des principaux intéressés
serait un banquier allemand qui passe
pour avoir coopéré efficacement, en 1870,
au ravitaillement des armées assiégeant
Paris. Ces moulins, qui devaient être dé-
truits et qu'on oublia, rendirent de grands
services à l'ennemi. Le Journal du Lundi
croit savoir que l'administration du génie
militaire a préparé d'avance tous les
moyens de destruction nécessaires pour
que la même négligence ne se reproduise
pas.
A. G.
COULISSES DES CHAMERES
Ainsi qu'elle l'avait décidé mardi der-
nier, la commission du scrutin de liste
s'est réunie hier pour commencer à en-
tendre les auteurs de contre-projets ou
d'amendements.
Le premier membre entendu a été M.
Cantagrel, qui a développé un système
bizarre, absolument inintelligible, qu'il
qualifie de scrutin de ralliement et qui n'a
été considéré par la commission que
comme une fantaisie personnelle.
Les auditions sérieuses n'ont commencé
qu'avec les autres orateurs : MM. Marion,
Peulevey et Desseaux ont développé trois
amendements à peu prè§ identiques ten-
dant tous au scrutin de liste par arrondis-
sement.
Nous avons déjà indiqué en quoi consis-
tait ce système : il maintient le scrutin
uninominal pour tous les arrondissements
qui n'ont qu'un représentant; quant à
ceux qui ont deux députés au moins, ils
les élisent au scrutin de liste.
Sur 362 arrondissements, il y en a 236
n'ayant qu'un député, et par suite con-
servant le scrutin uninominal ; il y en a
126 ayant 2 députés ou plus et auxquels
s'appliquerait le scrutin de liste.
M. Marion, député de l'Isère, a déclaré]
qu'en principe il inclinerait plutôt pour le
scrutin de liâte : mais qu'en fait il jugeait
ce mode de votation dangereux, comme'
se prêtant trop aux manœuvres brusques
et irréfléchies de l'opinion publique. Il a
ajouté qu'il, présentait le scrutin de liste
par arrondissement comme un moyen de
transaction.
Quant à MM. Peulevey et Desseaux, ils
sont absolument opposés au scrutin de
liste ; mais c'est aussi par esprit de conci-
liation qu'ils proposent le scrutin de liste
par arrondissement.
La commission n'a pas statué ; elle con-
tinuera donc à entendre les auteurs des
autres amendements, dans sa prochaine
séance qui aura lieu mercredi 16 mars.
Le garde des sceaux et le ministre du
commerce ont été entendus hier par la
commission chargée du projet de loi sur
les syndicats professionnels. Ainsi que
nous l'avions fait prévoir, MM. Gazot et
Tirard ont accepté toutes les modifica-
tions libérales — sauf deux — apportées
par la commission au projet du gouver-
nement.
Les deux seuls points qui soulèvent des
objections de la part du garde des sceaux]
sont ceux relatifs à l'union des syndicats
entre eux et à la suppression du droit de
dissolution conféré aux tribunaux en cas
d'infraction grave à lê.loi.
Mais l'accord se fera entre le gouverne-
ment et la commission, moyennant quel-
ques modifications que celle-ci va appor-
ter à sa rédaction.
Ainsi la, commission limitera la person-
nalité civilê rést?eintè aux syndicats agis-
sant isolémefit et la refuserâ^^ix unions
de syndicats:
Quant au droit de dissolution, la com-
mission juge qu'il est inutile. Elle fait
observer, en effet, que l'article 1er du pro-
jet énumère limitativement les objets
pour lesquels les syndicats professionnels
pourront fonctionner librement. Si ces
syndicats s'écartent de leur but précis,
ils deviendront des associations illicites
et tomberont ipso facto sous le coup du
droit commun.
Le rapport de M. Allain-Targé sera dé-
posé mardi sur le bureau de la Chambre,
et cette dernière pourra discuter le pro-
jet de loi dans quelques jours de manière
à le renvoyer le plus tôt possible au Sé-
nat.
—o—
Les deux commissions nommées jeudi
pour examiner les propositions Raspail et
Chevandier se sont réunies hier et ont pu
achever leurs travaux dans cette unique
séance. Les deux propositions ont été
adoptées à l'unanimité, et on a nommé
pour rapporteurs leurs auteurs respec-
tifs.
Nous rappelons que la proposition Ras-
paii a pour but la laïcisation du Panthéon
et la suppression des chapelains de Sainte-
Geneviève, qui forment le clergé de cette
église. Quant à la proposition Chevan-
dier, elle a pour but d'assimiler les en-
terrements civils aux obsèques ordinaires
au point de vue des honneurs funèbres
prescrits par le décret de messidor an XII.
La Chambre va donc être appelée à vo-
ter les deux propositions dans quelques
jours.
——————— ———————
Au moment où la question de la révi-
sion de la Constitution est à l'ordre du
jour de la presse et va être prochaine-
ment à l'ordre du jour de la Chambre,
nous sommes heureux d'annoncer à nos
lecteurs que le Rappel a obtenu de Louis
Blanc une Histoire de la Constitution.
Nous commencerons ces jours-ci Ila pu-
blication de cette histoire, tout à fait di-
gne, par son importance et par son intérêt,
du grand historien de Dix ans.
—————
t SOUSCRIPTION
EN FAVEUR DES
VICTIMES DE L'INCENDIE DU PRINTEMPS
-
(Première liste)
Le R tppel 1.000 »
Victor Hugo ^>00 »
Louis Blanc 20 »
E. Joussen, directeur de la com-
pagnie (c Linoleum », 21, boulevard
Haussmann 100 »
Collecte faite entre dix employés
de la maison Lagorce et Prudhom-
me, 12, rue Feu trier 8 50
P. Borel 2 »
Mme Duval, 2ti, boulevard Or-
nano 5 »
Henri Bachelier, fabricant de bou-
tons, 19, rue Pierre-Levée i »
A. M. 2 50
Dupré, 79, rue Saint-Sauveur 2 »
Un commissionnaire médaillé,
112, rue de Provence 5 »
Mme H. Le Roux 2 »
i Total de la lre liste 1.637 »
LA MORALE INDEPENDANTE
A la religion soyez toujours fidèle,
Les mœurs ni la vertu ne sauvent pas sans elle.
Tels sont les vers remarquables qu'on
trouve inscrits sur les murs des écoles
congréganistes, pour servir de texte aux
leçons religieuses des bons frères et des
bonnes sœurs. C'est la doctrine exprimée
partout : à l'école, en chaire, dans les
journaux pieux, dans les livres dévots.
« Hors de l'Eglise, point de salut. »
A Dieu ne plaise que je discute une
parole des ministres du Seigneur; l'esprit
saint n'a-t-il pas inspiré les pères de l'E-
glise? Un concile n'a-t-il pas déclaré le
pape infaillible?
- Inclinons-nous donc devant ces êtres
supérieurs qui ne peuvent ni se tromper
ni nous tromper. Ils ont raison, hors de
l'Eglise, point de salut!
Vous êtes un homme de bien, humain
et charitable, vous secourez les malheu-
reux, vous mettez votre force au service
de la justice, et vous ne faites jamais rien
qui puisse nuire à vos semblables, mais
vous ne croyez pas que le démon caché
sous la figure d'un serpent ait séduit ma-
dame Eve et que, par cela, nous soyons
tous coupables en naissant : votre arrêt
est prononcé ; il y a quelque part un im-
mense four où flambe un feu éternel. Allez
rôtir! Hors de l'Eglise, point de salut 1
Vous, vous avez aimé votre famille,
vous avez fidèlement travaillé pour votre
femme et vos enfants, vous vous êtes dé-
voué à leur bonheur, vous avez été « bon
père et bon époux », mais vous avez fait
gras le vendredi, vous n'êtes pas allé vous
confesser « à tout le moins une fois
l'an » : au feu! Hors de l'Eglise, point do
salut! •
Vous, qui avez donné vos travaux et vos
veilles au progrès, qui avez parlé aux
hommes de leurs devoirs, qui leur aveif
enseigné les vertus civiques, vous no:
croyez pas qu'un homme, avec quelques
mots de latin, fasse descendre Dieu dans*
un morceau d'hostie : au feu, misérable f
au feu éternel l i
Et toi, Socrate, qui as prêché le bien ét
le beau, toi qui es mort pour la vérité et
pour la justice, parce que tu as vécu bien?
avant que la colombe soit venue du cieF:
pour opérer le mystère de l'incarnation
pans le sein d'une vierge, tu es condam-
né, c'est l'arrêt de l'Eglise. Amen l
Voilà qui est parfait. Seulement, je me
permets de trouver que dans les deux
vers que j'ai cités plus haut, il y a une6,
concession fâcheuse à laquelle l'Eglise ne,
devrait pas souscrire. Si j'étais l'Eglise, je!
dirais d'une façon absolue, avec l'autorit
indiscutable de quelqu'un qui parle aui
nom du ciel, que non-seulement il n'y ai
pas de salut hors de l'Eglise, mais qi^il;
ne peut pas y avoir de mœurs et de vertu
hors d'elle. Non ! personne n'a des mœurS#
s'il ne croit pas qu'une femme puisse être
vierge et mère tout ensemble, personnel
n'a de vertu s'il n'est pas persuadé qui
y a trois dieux qui n'en font qu'un ; per-j
sonne n'a des mœurs s'il ne croit pas aux;
miracles, personne n'a de vertu s'il n'ad^-j
met pas que le culte catholique apostbli-;
que et romain soit le seul vrai, le seul di-,
vin.
Et qu'est-ce que vient nous chanter le
« poète », que les mœurs et la vertu ne
sauvent pas sans la religion ? lorsque tout
le monde sait bien que sans la confession,
la communion, le jeûne et la foi à Notre'
Dame de Lourdes, il ne peut y avoir nf.:
vertu ni mœurs. Je dénonce donc aux
prêtres et aux évêques le distique subver-
sif qui s'étale ainsi sur les murs des écoles
congréganistes, il tend simplement à cor-
rompre l'intelligence des enfants, il pour-
rait leur inspirer cette pensée satanique
qu'il peut y avoir une morale indépen-
dante de la religion ; qu'on peut être
juste, humain et bon, qu'on peut remplie
ses devoirs sociaux, ses devoirs civiques;,
être un honnête homme enfin, même si
on n'est pas catholique, ce qui serait uns
premier pas vers la plus coupable des-,
hérésies.
Partant de là, en effet, les esprits qui
ont le malheur de raisonner pourraient se
dire : Eh quoi ! l'Eglise condamne au feu
éternel les gens qui ont des mœurs et de
la vertu 1
GUSTAVE RIVET, i
LES OBSÈQUES D'AVAUR
Hier, à onze heures et demie, ont eu
lieu, au Val-de-Grâce, les obsèques du
pompier Avaur, victime de son dévoue-
ment dans l'incendie des magasins du
Printemps. '*
Dès dix heures et demie, la foule se
pressait devant la grille. La cour se rem-
plit bientôt. Des pompiers de toutes les
casernes, en grande tenue, arrivent, ainsi
que des délégations des gardiens de 1^-
paix.
Puis, le colonel Paris et MM. Côn&tans^
ministre de l'intérieur ; Hérold, préfet dq
la Seine ; Andrieux, préfet de police ;^le
général Lambert, commandant de la placer
de Paris ; Vergniaud, secrétaire .général 4.
la préfecture de la Seine ; Bailly, cbefr
adjoint du cabinet du préfet de police
Caubet, chef de la police municipale ; des?
représentants des ministres de la guerre
et de la marine ; Sigismond Lacroix, pLiiw- ï
sident du conseil municipal ; un certain
nombre de conseillers municipaux.
Les camarades du malheureux flwftP;
appartenant à la caserne de la rue Blan-f
che vont chercher le corps, déposé dansï
l'amphithéâtre. Le cercueil, couvert-d'uni
drap mortuaire brodé d'argent, est placjf:'
sur un brancard recouvert de drap fiolrï
Huit hommes le placent sur leurs épaulesr
et le portent à l'église, où les pompiers
Feuilleton du RAPPEL
DU 13 MARS
7 r
MONSIEUR CLEO
PREMIÈRE PARTIE
LE TESTAMENT IMPRÉVU
CHAPITRE IV
Leu- Bous eondition
( Suite)
t Un long silence succéda à cette lec-
t ture.
Laure, suffoquée de surprise et d'em-
barras, se leva, sembla vouloir parler,
frolesterj Mais les mots expirèrent sur ses
lèvre% tremblantes. Elle ^inclina, sans
Jgtffesser son salut à personne en kartig>
Voir le Iicppel du 7 m i% aaarg^ -
",àr
lier, et sortit avec la dignité qui lui était
comme naturelle, sans prononcer une pa-
role.
Les étrangers présents se retirèrent,
pressés sans doute d'échanger au dehors
leurs commentaires. Les gens du château
les suivirent. Il ne resta dans le salon que
le notaire et le vicaire avec Maurice in-
terdit.
Ce fut le notaire qui prit le premier la
parole.
— Permettez-moi de vous féliciter,
monsieur Treverton, dit-il, en se rappro-
chant du jeune homme, qui restait immo-
bile sur sa chaise, vous allez être un des
propriétaires les plus riches de ce pays.
Maurice secoua lentement la tête à plu-
sieurs reprises.
— Ce n'est là qu'un peut-être, monsieur
Sampson, dit-il enfin. Un an se passera,
dans tous les cas, avant que cela soit.
Et cela sera-t-il? Que de queslious à se
poser, que de questions à résoudre pour
sortir de cette situation étrange! Les obs-
tacles, chose bizarre, peuvent venir de l'une
ou de l'autre des deux parties qui semble-
raient intéressées à ce"qu'il n'y eût point
d'obstacle. Mlle Malcolm et moi, nous dé.
pendons l'un de l'autre. Un non d'elle ou
de moi peut déchirer et annuler le sin-
gulier testament que vous venez de nous
lire.
— Ce refus, de qui viendrait-il? de-
manda le notaire. Il me .semble que ce lie
peut être de vous. Laure Malcolm est bêiTh
«i çbamaûlveieljj cjU» PU» tare « ls
plus irréprochable jeune fille. On ne peut
vous soupçonner de l'avoir épousée par
cupidité et pour vous assurer cette fortune
princière.
— Sans doute, répondit Maurice, son-
geur. Mais elle?.
Le vicaire prit la parole :
— Je connais Laure Malcolm, dit-il ;
je connais sa piété filiale envers ce-
lui qui fut son bienfaiteur. Il est peu pro-
bable qu'elle refuse d'accéder a1 dernier
désir, à la volonté suprême de son père
adoptif.
Maurice ne répondit point d'abord ;
mais, après un silence :
— N'importe ! dit-il, je ne voudrais pas
paraître ingral envers mon cousin Gas-
pard, de qui je ne comptais certainement
pas, il y a quelques jours, avoir rien à es-
pérer jamais ; mais je ne puis m'empê-
cher de dire qu'il eût mieux fait de parta-
ger sa fortune entre Mlle Malcolm et moi,
en nous laissant libres de nous marier se-
lon notre choix.
Il parlait lentement et d'un air pensif;
il était très pâle et il était loin d'avoir
l'air conquérant ou heureux ; son expres-
sion était celle d'un profond décourage-
ment, d'une douloureuse angoisse, et les
traits de son beau visage étaient tout al-
térés.
M. Sampson reprit avec quelque éton-
nement :
•i Je ne connais cas beaucoup d'hom-
mes qui crafcldérfiraienfT'k clause d'épou-
ser Jbaure Malcolm comme une condition
dure ou difficile. Je crois, monsieur Tre-
vertoD, que vous serez plus heureux en
possédant une telle femme qu'en deve-
nant maître de toute 11 fortune de votre
cousin.
— Oui, oui, fit Maurice d'un air d'impa-
tience et de doute; — mais toujours au
cas où elle voudra bien m'accepter pour
époux !
— Vous avez douze longs mois pour
gagner son consentement, reprit le vi-
caire, et vous n'auriez vraiment pas de
chance si, pendant ce temps, vous ne
réussissiez pas à vous faire agréer par
elle. Je crois pouvoir vous assurer que
Mlle Malcolm n'a jusqu'ici aucun engage-
ment. Ainsi que vous, elle a dû naturel-
lement être surprise de l'étrangeté de
cette condition du testament. Mais, lais-
sez-moi vous le dire, la situation est, en
vérité, plus embarrassante pour elle que
pour vous.
Maurice, debout, accoudé à la cheminée,
garda encore le silence, et son visage ex-
primait toujours la contrariété et le dés-
appointement.
Le vicaire et le notaire se regardaient,
de plus en plus surpris.
Maurice s'en aperçut sans doute et re-
prit :
— Est-ce que vous pensez, messieurs,
que Mlle Malcolm ne continuera pas à
habiter ce château ?
— Je ne saurais vous dire ses intentions
sur ce point, répondif M. Clare, mais je
ci ois qu'jl serait coilvenable de laisser
cette demeure à sa disposition, et j'estime,'
qu'en notre qualité d'exécuteurs testa-
mentaires, nous pouvons, M. Sampson et
moi, lui faire cette proposition, si toute-
fois vous n'y voyez aucun inconvé-
nient.
— Je serais très heureux, au contraire,
de tout ce qui pourra être agréable à
Mlle Malcolm, répondit Maurice. Mais ma
présence, à moi, dans ces premiers mo-
ments, pourrait être une gêne pour elle.
Ét, comme rien ne me retient plus ici, je
retournerai à Londres dès demain. Cela
ne vous paraît-il pas dans les conve-
nances ?
— Fort bien, dit le vicaire en s'incli-
nant.
— Toutefois, reprit le notaire, ne vous
plairait-il pas, avant votre départ, de vi-
siter les propriétés? Il serait peut-être
bon que vous pussiez juger de ce que
sont des biens qui doivent presque sûre-
ment vous appartenir. Si vous vouliez,
sans façon, accepter mon offre, vous
passeriez une semaine ou deux chez moi.
Personne, aussi bien que moi, ne connaît
les biens et les terres, et je vous les
montrerais dans leurs moindres dé-
tails.
— Vous êtes trop bon, monsieur, dit
Maurice, et je serai heureux de profiter
de votre gracieuse invitation.
— A la bonne heure 1 et voilà qui est
dit. — Quand viendrez-vous à la maison?
Nous dînons tous içi, je crois^ ce
8jpirJ : ';, -/ !
Pourquoi ne partiriez-vous pas avec mo
après le dîner?
- Volontiers, monsieur. Ma présence
ici, je le sens, ne peut qu'importuner,
Mlle Malcolm.
Il fut donc convenu qu'on partirait pout
les Lauriers — c'était la maison du no";
taire — le jour même, après le repas. -
Mais, avant de quitter le château, il
fallait nécessairement que Maurice prie:
congé de Mlle Malcolm, et cette idée lui
causait un pénible embarras. j
Il n'y avait pourtant pas moyen d'élu-
der cette nécessité, et cette visite ne
pouvait pas même être retardée.
Maurice fit donc demander à Mlle Mat,
colm si elle voulait bien le recevoir avant
le dîner. 1--
Elle fit répondre qu'elle attendrait
M. Maurice Trevertons
MISS BftADDON*
>
(A suivre.) - - - ..1 «.
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