Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1881-11-24
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 24 novembre 1881 24 novembre 1881
Description : 1881/11/24 (N4276). 1881/11/24 (N4276).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7534096k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/09/2012
•' • -> ;;r -- f
Jeudi 24 Novembre 1881 le numéroV lOe." — Dégarfcaiïenfiit 18 «. Pemaire an 00 lqd 42
ADMINISTRATI0N
'U, RUE SB VALOIS, 16
ABOII1IBB1IVI
PARIS, 1 DÉPlRTBMEftTf
Trois mois 10 Trois mois Utt
six mois. 29 »! Six mois. 21 i
Adresser lettres et mandadts
A to. àfîNBsi LBFêj&B
MKlNISTBA.XEOB-G^lOT^
- - ;
", RÉDACTION -' , ,.
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
/te 4 A 6 heures du soir
11, m DE TALOW. it
,Les manuscrits non Insérés ne seront pas rendit
i ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C*
6, place de la Bourse, S
L'ÉLECTION DES DÉLÉGUÉS
C'est dimanche prochain que les
conseils municipaux élisent les délé-
gués du renouvellement sénatorial.
tous ceux qui veulent la paix et la
stabilité éliront des délégués révision-
nistes. ,\
• Une des nombreuses supériorités de
Ja Constitution républicaine sur les
Constitutions monarchiques, c'est
qu'elle est perfectible. Les Consti-
tutions monarchiques expriment gé-
néralement leur opinion sur elles-
mêmes sous une de ces formes : - « Je
fuis la perfection. — Je suis le dernier
mot du progrès humain. — Après moi,
il n'y a plus qu'à tirer l'échelle. — Je
juis bâtie à chaux et à ciment in sœcula
yœculoram amen. » Et autres métaphores
terriblement usées, mais qui se sont
usées moins vite que les Constitutions
Auxquelles elles promettaient l'éternité.
La solidité des monarchies françaises
n'a pas été sans quelque ressemblance
avec celle des capucins de cartes : on
a vu, en moins d'un siècle, Napoléon-
premier tomber sur Louis XVI, Char-
ges X dégringoler sur Napoléon-pre-
)nier, Louis-Philippe s'abattre sur
Charles X, Napoléon-dernier s'aplatir
sur Louis-Philippe. Qui pourrait me
donner des nouvelles de la Charte,
pour laquelle on a fait une révolution ?
Elle n'est pins guère connue que par le
vers malpropre des écoliers : « Si.
velis, Chartam portare memento. C'est à
ee « trône » qu'aboutissent les Cons-
titutions parfaites.
La Constitution républicaine a ce
premier mérite d'être plus modeste.
jElle dit: - Je suis ce que j'ai pu;
'damé ! j'ai eu pour mère l'Assemblée
du jour de malheur; si l'on vous di-
sait qu'une ânesse vient de mettre bas
une antilope, ça vous causerait quelque
étonnement; il ne serait pas moins
étonnant qu'une Assemblée comme
celle dont l'invasion nous a gratifiés,
eût accouché d'une Constitution radi-
cale. Dieu a fait l'homme à son image,
disent les catholiques, ce qui, entre
parenthèses, ne semble pas démontrer
que le Dieu des catholiques soit très
toli; moi, j'ai été faite à l'image de M.
Buffet. Je n'en éprouve aucune fatuité,
mon nez ne m'inspire aucune espèce
d'enthousiasme, et je ne demande pas
mieux que d'être retouchée.
Tu le seras, aimable fille de l'Assem-
blée dite nationale parce qu'elle a si-
gné le démembrement de la nation. Et
ce sera une nouvelle preuve de cette
vérité que souvent, ce qu'on fait contre
les autres, on le fait contre soi. Quand
l'Assemblée de 1871, condamnée par
la force des choses à constituer la Ré-
publique, a cru s'en venger en intro-
duisant dans la Constitution la clause
de revision, nous l'avons prévenue
/charitablement que ce qu'elle croyait
faire pour elle, elle le faisait pour nous.
L'Assemblée dont M. Numa Baragnon
:4t8it l'-Ëgérie a haussé ses honorbles
épaules. Et, pendant des années, c'a
été une des plaisanteries les plus heu-
reuses des réactionnaires, toutes les
fois qu'on prononçait devant eux le
nom de la République, d'aj outer : ré-
visable. Ces plaisanteries sont la con-
solation des partis vaincus. On ne sait
pas, par exemple, combien de bona-
partistes ont encore une illusion de
joie lorsque leurs journaux appellent
la République : la R. F.
Donc, la République revisable !
revisable ! revisable ! tel était le cri
quotidien des ennemis de la Répu-
blique. Nous reviserons! disaient,
tous les matins et tous les soirs, leurs
journaux avec un doux ricanement.
Ah! vous croyez que, parce que vous
nous avez arraché cette infâme Cons-
titution, vous la possédez? Nous vous
la reprendrons ! Laissez passer seu-
lement trois ans, et vous verrez ce
qu'il vous en restera !
Six ans ont passé, et aujourd'hui,
toutes les fois qu'on prononce le nom
de la République, des voix ajoutent :
revisable! revisable! revisable! Mais
ce ne sont plus les mêmes voix qu'en
1877.
Ah ! comme, si c'était à refaire, les
ennemis de la République se prive-
raient de mettre dans la Constitution
cette clause dont ils étaient si fiers!
Comme ils se repentent! Trop tard. Ils
ont demandé la revision, ils l'auront.
Ils seront exaucés. Tu l'as voulu, Geor-
ges Dandin! Ils comprennent mainte-
nant pourquoi, lorsqu'ils nous ont dit
avec triomphe et menace : C'est voté !
nous leur avons répondu : Merci. Le mal
qu'ils ont cru faire à la République est
le plus grand service qu'ils aient pu lui
rendre. Si la Constitution actuelle ne
pouvait pas être révisée, il n'y aurait
qu'un moyen de la corriger : une révo-
lution. Il suffit d'un vote.
Les conseillers municipaux qui ne
veulent pas de révolution nouvelle, les
bons citoyens qui. veulent que le pro-
grès se fasse pacifiquement, choisiront,
dimanche prochain, des délégués par-
tisans de la revision.
AUGUSTE VACQUERIB,
hl.
POLITIQUE A SUIVRE
On annonce une réunion de la majo-
rité : réunion extra-parlementaire. Je
n'en vois pas l'utilité ; mais cela re-
garde les organisateurs et les adhé-
rents. Sont-ils disposés à soutenir le
gouvernement quand même? Veulent-
ils lui imposer une ligne. de conduite ?
Et, dans ce dernier cas, laquelle?
Je crains bien, pour ma part, que la
réunion ne se divise eh deux le pre-
mier jour. Ceux qui veulent le statu quo
et la continuation de la politique suh
vie jusqu'à présent iront à droite ;
ceux qui souhaitent la marche en
avant iront à gauche. De la sorte, au
moment même où le groupe se réu-
nira, il n'y aura plus de groupe.
C'est qu'en effet, nous l'avons déjà
dit, deux politiques diamétralement op-
posées ..-.1ft'fh-.' Lir f>dMttique
dite modérée et la politique dite radi-
cale. Vouloir les faire vivre ensemble
est déraisonnable. L'une ou l'autre doit
l'emporter. C'est au gouvernement à
prendre un parti.
Sans doute, s'il se résout à adopter
l'une ou l'autre, sa majorité sera moins
considérable. Mais aussi elle sera plus
forte. Qu'il suive les traditions du mi-
nistère Ferry, il perdra, plus vite que
celui-ci encore, l'appui de la fraction
avancée de la Chambre. Qu'il se rallie,
au contraire, aux solutions radicales,
il perdra ce qui reste du centre gauche
et au moins la moitié de la gauche.
Que voulez-vous? Il faut se résigner aux
pertes. La compensation est dans l'as-
surance qu'on acquiert d'être plus vi-
goureusement et plus franchement
soutenue - -.. -
Quand on flotte entre deux politi-
ques, on obtient, pendant un temps,
l'approbation de la presqu'unanimité
de la Chambre. Tous les partis vous
soutiennent, espérant, plus tard, vous
attirer à eux. Mais un jour vient, im-
manquablement, où la confiance se dé-
traque. Ce jour-là, sans s'en douter,
tout à coup, on est par terre.
Il n'y a pas trois façons de gouver-
ner, il y en a deux : celle de droite et
celle de gauche. Et, comme dit La-
bruyère, il faut opter. Si le gouverne-
ment opte pour celle de droite, il trou-
vera tous les amis de M. Ferry auprès
de lui pour le défendre. S'il opte pour
celle de gauche, il trouvera toute la
fraction avancée du parti républicain,
sans distinction de nuances. Mais le
moment est venu de se prononcer.
Sa déclaration n'est pas une déci-
sion. Il parle, il est vrai, de « revision
restreinte», mais la façon dont le Sénat
l'a reçu doit modifier ses idées singu-
lièrement à ce sujet; il parle de « main-
tien du Concordat », mais la plupart
des ministres, et parmi eux les plus
influents, ont voté la « séparation de
l'Eglise et de l'Etat. Il est donc très
facile, encore, d'adopter le programme
radical. ,.'
Pour moi, je n'accuserai jamais les
gens avant qu'ils aient agi. C'est, je
trouve, un mauvais système et qui finit
toujours par coûter cher à ceux qui
l'emploient. Quand M. Waddington est
arrivé au pouvoir, je ne lui ai pas dé-
claré la guerre; je lui ai conseillé de
faire l'amnistie; quand M. de Freyci-
net est arrivé au pouvoir, je lui ai de-
mandé le service de trois ans et la ré-
forme de la magistrature; quand M.
Ferry est arrivé au pouvoir, je lui ai1
demandé la séparation de l'Eglise et
de l'Etat. Aujourd'hui M. Gambetta est
au pouvoir : je lui demande la sépara-
ti on de l'Etat et de l'Egliso et la ré-
forme radicale de la Constitution.
Aucun des ministres qui ont précédé
M. Gambetta n'ont su avoir une politi-
que franche et nette. Quelquefois ils
ont été à gauche ; plus souvent ils ont
été à droite. Aucun n'a eu de majorité
dans le vrai sens du mot. Et pourquoi?
C'est que les députés votaient pour des
personnes et jamais pour des program-
mes; c'est qu'ils ne se demandaient
pas si telle ou telle proposition parle-
mentaire était ou non conforme à leurs
idées, mais si elle était agréable ou
désagréable au cabinet.
Eh bien ! j'espère, je tiens absolu-
ment à espérer que le ministère actuel,
instruit par six ans d'expérience, ne
-i*l - -
v6Mm pas imiter ses prédécesseurs.
Je veux espérer qu'il comprendra la
nécessité de gouverner d'après des
principes bien clairs et bien compré-
hensibles pour tous : qu'il fera cesser
le piétinement sur place et qu'il mettra
fin à l'équivoque. J'espère encore que
c'est le programme de gauche qu'il
adoptera. Ah ! s'il n'y vient Ipas cette
fois-ci, après le vole du Sénat et l'apo-
théose de M. de Voisins-Lavernière, il
faudra désespérer de la clairvoyance
des hommes politiques !
EDOUARD LOCKROY.
r 4>
AU SENAT
Le Sénat ne veut rien avoir à envier
à la Chambre. Au palais Bourbon, on
avait validé, par erreur, M. Soubeyran.
Au Sénat, il paraît que c'est également
par erreur qu'on a nommé M. Voisins-
Lavernière. La majorité d'une voix,
qui avait fait un législateur à vie de ce
sénateur qui n'aurait jamais été réélu
de sa vie par ses commettants; cette
maiorité qui a fait scandale n'existe
pas, à ce qu'on vient de découvrir.
M. Voisins-Lavernière a bien eu la
majorité des suffrages exprimés, dé-
duction faite des bulletins blancs, mais
c'est justement cette , déduction que
l'on ne devait pas opérer puisque le
règlement porte que l'élection a lieu à
la majorité des votants. Or, celui qui
dépose un bulletin blanc est bien un
votant.
Il n'en est pas de même pour les
élections de sénateurs dans les collè-
ges départementaux. Là, il faut la ma-
jorité des votes exprimés, et c'est cette
règle qu'on à appliquée, à tort, au cas
de M. Lavernière.
L'irrégularité de l'élection a été ex-
posée au Sénat, dans la séance d'hier,
par l'honorable M. Griffe, et il n'est pas
besoin de dire que la question ainsi
soulevée a causé quelque émotion. Il
n'a pas été possible toutefois de la dis-
cuter immédiatement, parce que la
proclamation du résultat n'a lieu qu'a-
près trois jours francs et que, à ce mo-
ment seulement, les réclamations ten-
dant a-Ia nullité du vote pourront être
présentées. Les chiffres apportés par
M. Griffe ne laissent d'ailleurs pas place
au doute.
Le nombre des votants a été de 250;
donc la majorité absolue était de 126,
c'est-à-dire deux voix de plus que n'en
a obtenu M. Voisins-Lavernière. Par
conséquent, à moins que le Sénat ne
tinnne absolument à passer par dessus
son règlement, de peur d'avoir la mau-
vaise fortune de perdre l'ami de M. Si-
mon, l'élection do M. Voisins sera an-
nulée, et peut-être alors ceux qui l'a-
vaient envoyé au Luxembourg retrou-
veront-ils l'occasion inespérée de lui
faire comprendre ce qu'ils pensent de
sa conduite depuis trois ans et de sa
façon de fuir devant le jugement pu-
blic.
C'est jeudi que la question sera tran-
chée.
A. GAULIER.
1
Aucun fait intéressant à signaler aujour-
d'hui erçpoce en Tunisie. Un chef insurgé,
Ali-ben-Ayar, qui avait tenté de réveiller
l'agitation dans le nord de la régence, est
en fuite avec quelques-uns de ses der-
niers adhérents, les faibles contingents
qu'il avait pu réunir n'eyant osé engager
le combat, bloqués qu'ils étaient dans
Jeurs montagnes par les colonnes d'Aubi-
gny, Laroque et Philibert.
La fuite d'Ali-ben-Ayar aura pour ré-
sultat probable de déterminer la soumis-1
sion de la tribu des Ouled-Ayars, qui jus-
qu'à présent était restée sous les armes.
Le général d'Aubigny a déjà reçu des. in-
structions, en vue de régler les conditions
de l'aman avec cette tribu.
Une dépêche d'Alger annonce que « Si-
Sliman a été vivement poursuivi jusqu'à la
frontière M. Ce que nous voyons de plus
clair dans cette note, qui a sans doute
pour but d'établir que tout le possible a
été fait contre Si-Sliman, c'est que Si-
Sliman a, comme nous le disions l'autre
jour, trouvé le moyen de quitter le terri-
toire, en dépit des poursuites dont.il a été
l'objet.
Les opérations continuent vigoureuse-
ment dans l'extrême Sud oranais. Quel-
ques tribus commencent à offrir leur
soumission. On fouille les montagnes et
on impose pour conditions de l'aman aux
tribus de descendre dans la plaine, afin
d'y demeurer sous la surveillance de nos
troupes. Le général Delebecque a organisé
des colonnes légères qui poursuivent
l'ennemi dans tous les sens.
*
COULISSES DES CHAMBRES
M. Gambetta, président du conseil, s'est
rendu/hier à la commission de la Cham-
bre chargée d'examiner le projet de loi
ouvrant des crédits supplémentaires pour
l'expédition de Tunisje.
M. Gambetta était accompagné par M.
Allain-Targé, ministre des financés ; M.
de Roussy, directeur de la comptabilité
aux finances; Blandin, sous-secrétaire d'E-
tat à la guerre, et de Pananeu, directeur
du contrôla au ministère de 4a guerre.
La conférence, commencée à 2 heures,
s'est terminée à 3 heures et demie; après
le départ des membres du gouvernement,
la commission a continué à siègerjusqu'à
5 heures et demie.
E le a décidé de garder le secret le plus
absolu sur ses délibérations et, en consé-
quence, elle a communiqué à la presse le
procès-verbal officiel suivant : -
Le président du conseil, accompagné du
ministre des finances et du sous-secrétaire
d'Etat à la guerre, s'est rendu à deux heures
à la commission des crédits relatifs à la
Tunisie.
Interrogé par divers membres sur la poli-
tique quci le gouvernement comptait suivre
en Tunisie, M. le président du conseil a dé-
claré :
Qu'il prenait pour point de départ de sa po-
litique l'ordre du jour voté par la Chambre
dans sa séance du 9 novembre ; il a ajouté
que toutes les mesures à prendre seraient ul-
térieurement soumises à l'examen préalable
du Parlement.
Diverses explications ont été ensuite four-
nies par M. le ministre des finances, M. le di-
recteur de la comptabilité générale et par M.
le directeur du contrôla au ministère de la
guerre.
La commission, après avoir délibéré et dis-
cuté jusqu'à cinq heures et demie, a nommé
M. Goblet, rapporteur.
Sans manquer à la discrétion* obligée
sur certains points en pareille matière,
nous pouvons cependant ajouter quelques
détails qui compléteront utilement ce
procès-verbal un peu trop sommaire.
Nous pouvons dire d'abord que, sur la
question tunisienne en elle-même, M.
Gambetta a été d'une réserve très grande.
Le procès-verbal, sur ce point, est fidèle;
la déclaration qu'il attribue au président
du conseil représente à peu près tout ce
que ce dernier a dit d'explicite. On pourra
d'ailleurs s'en convaincre bientôt, la com-
mission ayant résolu d'insérer dans son
rapport les déclarations du chef du ca-
binet.
M. Gambetta a répété à plusieurs re-
prises que le point de départ de sa politi-
que en Tunisie serait l'ordre du jour du
9 novembre par lequel la Chambre a for-
mulé sa volonté de voir appliquer inté-
gralement le traité du Bardo.
L'entretien de M. Gambetta avec la
commission a porté presque exclusive-
ment sur la question financière, c'est-à-
dire sur le procédé de comptabilité appli-
qué par le cabinet précédent et qui a sou-
levé de nombreuses et vives critiques dans
la Chambre. Ce système est celui des im-
putations provisoires dont nous avoM
expliqué hier l'économie générale.
M. Gambetta considère que ce système
n'est pas irrégulier, mais qu'il constitue
l'extrême limite de la légalité. Ses explU)
cations, qui ont paru dénoter une très'
grande connaissance de la question, ap- !
puyées par celles des directeurs généraux
qui étaient présents, ont amené la com-
mission à se convaincre que ce procédé,
était inévitable.
Toute la question revenait dès lors à
chercher comment, étant donnée une
pareille nécessité, on pourrait assurer
plus efficacement le contrôle parlemen-
taire, non-seulement pour le passé, mais
pour l'avenir.
M. Gambetta a promis que le gouver-
nement ferait tous ses efforts pour attein-
dre ce but. Afin de bien comprendre ce
qui a été décidé, nous rappelons en quoi
consiste le système des imputations pro-
visoires.
Il consiste à solder les dépenses de lex-
pédition, à l'aide des crédits normaux ou-
verts au budget annuel de la guerre, et à
.reconstituer ultérieurement ces crédits
dans leur intégralité primitive, à l'aide
des crédits supplémentaires qu'on vient
demander aux Chambres lorsque les dé-
penses sont effectuées. En d'autres termes.
on paye une dépense exceptionnelle avec
un crédit accordé pour un service annuel
et régulier; mais on vient restituer ultéè
rieurement la somme absorbée, de ma-
nière à ce que le service normal ne soit
pas entravé.
Le contrôle qu'exige la commission, au
nom de la Chambre, est celui des dépenses
exceptionnelles. Elle veut constater par
des états fidèles l'emploi qui a été fait des
crédits alloués.
Enie a demandé, en conséquence, qu'on
lui communiquât tous ces états dès qu'ils
seraient prêts. En tenant compte des dé-
lais nécessaires à la comptabilité mili-
taire, il faut un délai de trois mois pour
que ces pièces puissent être dressées.
M. Gambetta a promis qu'au 1er avril pro-
chain, la Chambre recevrait communica-
tion de tous les états de dépenses con-
cernant la période de l'expédition tuni-
sienne comprise entre l'origine et le
31 décembre 1881.
Les crédits qu'il s'agit d'accorder au-
jourd'hui doivent couvrir les dépenses
jusqu'au 31 décembre prochain. Mais la
commission a été amenée à s'occuper de
ce qui pourrait être nécessaire au-delà de
cette date, de façon à éviter le renouvel-
lement de ce qui s'est passé pendant les
vacances dernières, où le gouvernement
a dépassé les limites assignées par les
Chambres.
On a suggéré l'idée que le gouverne-
ment devrait, avant la clôture de la ses-
sion actuelle, présenter ses demandes de
crédit pour le mois de janvier, avec les
justifications à l'appui. Une objection a
été faite par certains membres, qui con-
sidéraient comme anormal d'ouvrir des
crédits supplémentaires sur un exercice
financier comme celui de 1882, qui n'est
pas encore ouvert. Mais on a répondu à
cela qu'il n'était pas plus anormal d'agir
ainsi que de voter le budget ordinaire un
an d'avance, comme cela se fait réguliè-
rement à chaque session.
Cette observation a levé tous les scru-
pules, et M. Gambetta a promis de dépo-
ser, sous peu de jours, une demande de
crédits supplémentaires pour l'expédition
tunisienne pendant le mois de janvier.
Sous le bénéfice de ces promesses, la
commission a voté les 29 millions deman-
dés pour la période écoulée et pour celle
restant à courir jusqu'au 31 décembre
prochain.
Mais elle a adopté, sur la proposition de
M. Ribot, une formule qui établit nette-
ment que les crédits supplémentaires sont
votés à la condition que les états de dé-
penses devront être communiqués à la
Chambre en avril 1882, de manière à ce
que les imputations provisoires puissent
être remplacées au budget normal par
des réimputations absolument exactes,
a M. Goblet a été nommé iapporteur et,
selon toutes probabilités, il pourra lire
son rapport à la commission et le déposer
ensuite sur le bureau de la Chambre à la
séance de demain jeudi.
Ajoutons comme dernier détail que M.
Gambetta, avant son départ, a été ques-
reuilleton du RAPPEL
DU 24 NOVEMBRE -
———— —— -
-.
; n
i
SON ALTlfSE
&.. -
III (suite),,
- Ah ! çi, me prend-on pour un imbé-
Jile ?
Le prince poursuivit en (s'animant :
Messieurs du ministère paternel ont à
coeur de déconsidérer à mesure le souve-
rain, de l'humilier, de le réduire à la con-
dition la plus méprisée. Que mon père
ait la faiblesse de supporter ces vilenies,
c'eft affaire à lui. Nous verrons jusqu'où
Voir le Rappsel du 7 a-i 23 novembre.
ira sa patience. Mais, quant à moi, je ne
suis encore rien dans l'Etat. Que ces mes-
sieurs se contentant de s'en féliciter, et,
attendant que je leur montre que le pro-
verbe « tel père tel fils » ne se vérifie pas
toujours, j'entends qu'ils me f.ichent la
paix.
Le docteur laissa passer l'éclat de co-
lère tle son filleul.
Puis, avec la même tranquillité :
..;.; Mon cher ami, répondit-il, tu dis
des enfantillages. Quand tu tiendras la
quéue de la poêle, tu verras qu'elle est
•fort difficile à manier. Tu reconnaîtras
surtout que tu accuses injustement ton
père. Ton père est un homme de haute
probité, qui tient à honneur d'observer
une constitution librement acceptée et
sanctionnée par lui. Cette constitution lui
donne des ministres qui lui déplaisent as-
sez souvent, impriment aux affaires pu-
bliques une direction qu'il n'approuve
pas toujours ; mais, monarque irrespon-
sable, il se borne à suivre attentivement
les résultats.de leur politique, prêt à in-
tervenir de toute sa haute autorité, s'il
en naissait un danger pour la patrie.
Voilà quelle est la véritable attitude de
ton père, et ce n'est pas à toi qu'il sied
d'y trouver à reprendre.
Et, après un silence, Berlave conclut :
— Quant à supposer que le cabinet ac-
tuel entreprenne de te molestçr, en exi-
geant ton retour, tu te trompes. Si je te
dis que le gouvernement français souhaite
ton éloignement momentané, c'est que je
suis en mesure de te le prouver.
Le dpcteur tira une sotte de dossier de
sa poche, et en mit les pièces - sous les
yeux du jeune homme.
C'étaient des rapports conftdentiels de
l'ambassadeur au chef du cabinet du
grand duché. Ils relataient des conversa-
tions officieuses, provoquées par le mi-
nistre des affaires étrangères de France ;
conversations d'où il ressortait qu'on avait
tout fait pour étouffer le scandale dont
le sénateur baron Maurlex menaçât sa
femme.
On n'avait réussi qu'à moitié. Celle-ci
était définitivement assignée au tribunal
civil pour s'entendre condamner à la sépa-
ration de corps ; d'où suit que les débats
promettaient, disaient les journaux, des
révélations piquantes.
Déjà le président succombait sous les
demandes de places réservées à l'audience.
Grandes dames, fonctionnaires, gens du
high-lzïe, députés et collègues du plai-
gnant, avec deux pu trois auteurs drama-
tiques, en quête de péripéties naturalistes,
sollicitaient éperdûment des entrées de
faveur, qui les missent au moins sur le
pied des reporters.
Cependant on soupçonnait que la cu-
riosité de raudiLojrê.serni t déçue sur çer-„
tains points délicats. Le ministre, assu-
rait-on, entendait que, non-seulement le
nom du prince ne fût pas prononcé, de
part ou d'autre (les avocats s'ibclinant
devant les hautes convenances s'y étaient
engagés), mais encore que le procureur
de la République s'évertuât à donner le
change, en entrâînant l'attention sur une
autre piste.
Seulement, aux affaires étrangères, on
croyait utile, qu'au moment du procès,
Son Altesse le prince Fréder ne se mon-
trât pas en plein Paris.
Malgré toutes précautions et ententes
préalables, tel incident d'audience pou-
vait soulever un coin du voile, faire glisser
les masques. Il n'eût pas convenu qu'après
quelque article de journal trop transpa-
rent, Fréder se trouvàt le point de mire
d'une salle de spectacle, par exemple.
Tant et si bien que le gouvernement
français insistait, respectueusement bien
entendu, pour que Son Altesse prit un
peu de large, en attendant que l'affaire
entrât dans le domaine de ces vieilleries,
dont les Parisiens, trop occupés par le
scandale du jour, ne se souviennent que
vaguement la semaiae d'après.
A lire ces papiers, Fréder passait de la
colère à la consternation.
Songez donc, aussi! c'était demain soir
que miss Lélé allait devenir — enfin!—
abordable pour lui !
, Et puis vraiment, les ministres de son
père le prenaient sur un ton, et avec un
sans-gêne à révolter t Atiiant les hommes
d'Etat français entouraient de sucre les
paroles rapportées par l'ambassadeur,
autant ceux de là-bas traitaient la ques-
tion sans précaution ;
« Donnez l'assurance à Son Excellence,
disaient-ils, que le prince recevra l'in-
jonction de rentrer dans sa famille. »
- «L'injonction! » ces IjbérAtres, ces mé-
chants députés, qu'une majorité de quel-
ques voix gratifiait de portefeuilles, se
permettaient de parler d'injonction. In-
jonction à qui? à lui, le prince-héritier,
une altesse, encore une fois ! Sentez-vous
bien l'inconvénient, bon lecteur ?
Une «altesse! » Il y paraissait, ma foi!
Pas à une ligne, le mot n'était écrit dans
ces dépêches ministérielles, lancées au
chef de la légation. Oh ! la gangrène révo-
lutionnaire 1 Conçoit-on cela !
De chétifs bourgeois, affranchis d'hier,
puant encore la glèbe, gardant leurs
pattes massives comme stigmates indé-1
lébiles de leur antique serlage, se pas-'
saient l'impudence de:parler d'un prince-,
héritier, sans lui donner son titre d'al-
tesse! Où allons-nous, mon Dieu t
Ah ! cette France ! Oh ! ce Paris! — où
l'on s'amuse tant, il est vrai l — la bouel
de ses pavés imprime au talon de qui les
foule un ferment de révolte irr -C.
tueuse, qui germe jusque dans les neiges
moscovites.
Oh ! ce peuple français, que rien n'é-
crase, qui rebondit sous l'effort des bar-
bares les plus sauvages, et insulte, sans
même y tâcher, par sa sève native, par sa
prospérité incarnée, à la misère de ses
vainqueurs, p!us misérables après qu'a.
vant leur triomphe illusoire, en ne le sup-
primera donc jamais radicalement! Une
se trouvera donc pas une race assez puis-
sante pour assajétir ces Gaulois qui, de-
puis quç le monde est monde, ont absorbé,
ont conquis leurs conquérants, romains, ou
francs, ou saxons, leur insufflant à tous
un esprit révolutionnaire qui a boulever.
sé les deux hémisphères I
EDOUARD CADOL.
(Ailggfc}
Jeudi 24 Novembre 1881 le numéroV lOe." — Dégarfcaiïenfiit 18 «. Pemaire an 00 lqd 42
ADMINISTRATI0N
'U, RUE SB VALOIS, 16
ABOII1IBB1IVI
PARIS, 1 DÉPlRTBMEftTf
Trois mois 10 Trois mois Utt
six mois. 29 »! Six mois. 21 i
Adresser lettres et mandadts
A to. àfîNBsi LBFêj&B
MKlNISTBA.XEOB-G^lOT^
- - ;
", RÉDACTION -' , ,.
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
/te 4 A 6 heures du soir
11, m DE TALOW. it
,Les manuscrits non Insérés ne seront pas rendit
i ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C*
6, place de la Bourse, S
L'ÉLECTION DES DÉLÉGUÉS
C'est dimanche prochain que les
conseils municipaux élisent les délé-
gués du renouvellement sénatorial.
tous ceux qui veulent la paix et la
stabilité éliront des délégués révision-
nistes. ,\
• Une des nombreuses supériorités de
Ja Constitution républicaine sur les
Constitutions monarchiques, c'est
qu'elle est perfectible. Les Consti-
tutions monarchiques expriment gé-
néralement leur opinion sur elles-
mêmes sous une de ces formes : - « Je
fuis la perfection. — Je suis le dernier
mot du progrès humain. — Après moi,
il n'y a plus qu'à tirer l'échelle. — Je
juis bâtie à chaux et à ciment in sœcula
yœculoram amen. » Et autres métaphores
terriblement usées, mais qui se sont
usées moins vite que les Constitutions
Auxquelles elles promettaient l'éternité.
La solidité des monarchies françaises
n'a pas été sans quelque ressemblance
avec celle des capucins de cartes : on
a vu, en moins d'un siècle, Napoléon-
premier tomber sur Louis XVI, Char-
ges X dégringoler sur Napoléon-pre-
)nier, Louis-Philippe s'abattre sur
Charles X, Napoléon-dernier s'aplatir
sur Louis-Philippe. Qui pourrait me
donner des nouvelles de la Charte,
pour laquelle on a fait une révolution ?
Elle n'est pins guère connue que par le
vers malpropre des écoliers : « Si.
velis, Chartam portare memento. C'est à
ee « trône » qu'aboutissent les Cons-
titutions parfaites.
La Constitution républicaine a ce
premier mérite d'être plus modeste.
jElle dit: - Je suis ce que j'ai pu;
'damé ! j'ai eu pour mère l'Assemblée
du jour de malheur; si l'on vous di-
sait qu'une ânesse vient de mettre bas
une antilope, ça vous causerait quelque
étonnement; il ne serait pas moins
étonnant qu'une Assemblée comme
celle dont l'invasion nous a gratifiés,
eût accouché d'une Constitution radi-
cale. Dieu a fait l'homme à son image,
disent les catholiques, ce qui, entre
parenthèses, ne semble pas démontrer
que le Dieu des catholiques soit très
toli; moi, j'ai été faite à l'image de M.
Buffet. Je n'en éprouve aucune fatuité,
mon nez ne m'inspire aucune espèce
d'enthousiasme, et je ne demande pas
mieux que d'être retouchée.
Tu le seras, aimable fille de l'Assem-
blée dite nationale parce qu'elle a si-
gné le démembrement de la nation. Et
ce sera une nouvelle preuve de cette
vérité que souvent, ce qu'on fait contre
les autres, on le fait contre soi. Quand
l'Assemblée de 1871, condamnée par
la force des choses à constituer la Ré-
publique, a cru s'en venger en intro-
duisant dans la Constitution la clause
de revision, nous l'avons prévenue
/charitablement que ce qu'elle croyait
faire pour elle, elle le faisait pour nous.
L'Assemblée dont M. Numa Baragnon
:4t8it l'-Ëgérie a haussé ses honorbles
épaules. Et, pendant des années, c'a
été une des plaisanteries les plus heu-
reuses des réactionnaires, toutes les
fois qu'on prononçait devant eux le
nom de la République, d'aj outer : ré-
visable. Ces plaisanteries sont la con-
solation des partis vaincus. On ne sait
pas, par exemple, combien de bona-
partistes ont encore une illusion de
joie lorsque leurs journaux appellent
la République : la R. F.
Donc, la République revisable !
revisable ! revisable ! tel était le cri
quotidien des ennemis de la Répu-
blique. Nous reviserons! disaient,
tous les matins et tous les soirs, leurs
journaux avec un doux ricanement.
Ah! vous croyez que, parce que vous
nous avez arraché cette infâme Cons-
titution, vous la possédez? Nous vous
la reprendrons ! Laissez passer seu-
lement trois ans, et vous verrez ce
qu'il vous en restera !
Six ans ont passé, et aujourd'hui,
toutes les fois qu'on prononce le nom
de la République, des voix ajoutent :
revisable! revisable! revisable! Mais
ce ne sont plus les mêmes voix qu'en
1877.
Ah ! comme, si c'était à refaire, les
ennemis de la République se prive-
raient de mettre dans la Constitution
cette clause dont ils étaient si fiers!
Comme ils se repentent! Trop tard. Ils
ont demandé la revision, ils l'auront.
Ils seront exaucés. Tu l'as voulu, Geor-
ges Dandin! Ils comprennent mainte-
nant pourquoi, lorsqu'ils nous ont dit
avec triomphe et menace : C'est voté !
nous leur avons répondu : Merci. Le mal
qu'ils ont cru faire à la République est
le plus grand service qu'ils aient pu lui
rendre. Si la Constitution actuelle ne
pouvait pas être révisée, il n'y aurait
qu'un moyen de la corriger : une révo-
lution. Il suffit d'un vote.
Les conseillers municipaux qui ne
veulent pas de révolution nouvelle, les
bons citoyens qui. veulent que le pro-
grès se fasse pacifiquement, choisiront,
dimanche prochain, des délégués par-
tisans de la revision.
AUGUSTE VACQUERIB,
hl.
POLITIQUE A SUIVRE
On annonce une réunion de la majo-
rité : réunion extra-parlementaire. Je
n'en vois pas l'utilité ; mais cela re-
garde les organisateurs et les adhé-
rents. Sont-ils disposés à soutenir le
gouvernement quand même? Veulent-
ils lui imposer une ligne. de conduite ?
Et, dans ce dernier cas, laquelle?
Je crains bien, pour ma part, que la
réunion ne se divise eh deux le pre-
mier jour. Ceux qui veulent le statu quo
et la continuation de la politique suh
vie jusqu'à présent iront à droite ;
ceux qui souhaitent la marche en
avant iront à gauche. De la sorte, au
moment même où le groupe se réu-
nira, il n'y aura plus de groupe.
C'est qu'en effet, nous l'avons déjà
dit, deux politiques diamétralement op-
posées ..-.1ft'fh-.' Lir f>dMttique
dite modérée et la politique dite radi-
cale. Vouloir les faire vivre ensemble
est déraisonnable. L'une ou l'autre doit
l'emporter. C'est au gouvernement à
prendre un parti.
Sans doute, s'il se résout à adopter
l'une ou l'autre, sa majorité sera moins
considérable. Mais aussi elle sera plus
forte. Qu'il suive les traditions du mi-
nistère Ferry, il perdra, plus vite que
celui-ci encore, l'appui de la fraction
avancée de la Chambre. Qu'il se rallie,
au contraire, aux solutions radicales,
il perdra ce qui reste du centre gauche
et au moins la moitié de la gauche.
Que voulez-vous? Il faut se résigner aux
pertes. La compensation est dans l'as-
surance qu'on acquiert d'être plus vi-
goureusement et plus franchement
soutenue - -.. -
Quand on flotte entre deux politi-
ques, on obtient, pendant un temps,
l'approbation de la presqu'unanimité
de la Chambre. Tous les partis vous
soutiennent, espérant, plus tard, vous
attirer à eux. Mais un jour vient, im-
manquablement, où la confiance se dé-
traque. Ce jour-là, sans s'en douter,
tout à coup, on est par terre.
Il n'y a pas trois façons de gouver-
ner, il y en a deux : celle de droite et
celle de gauche. Et, comme dit La-
bruyère, il faut opter. Si le gouverne-
ment opte pour celle de droite, il trou-
vera tous les amis de M. Ferry auprès
de lui pour le défendre. S'il opte pour
celle de gauche, il trouvera toute la
fraction avancée du parti républicain,
sans distinction de nuances. Mais le
moment est venu de se prononcer.
Sa déclaration n'est pas une déci-
sion. Il parle, il est vrai, de « revision
restreinte», mais la façon dont le Sénat
l'a reçu doit modifier ses idées singu-
lièrement à ce sujet; il parle de « main-
tien du Concordat », mais la plupart
des ministres, et parmi eux les plus
influents, ont voté la « séparation de
l'Eglise et de l'Etat. Il est donc très
facile, encore, d'adopter le programme
radical. ,.'
Pour moi, je n'accuserai jamais les
gens avant qu'ils aient agi. C'est, je
trouve, un mauvais système et qui finit
toujours par coûter cher à ceux qui
l'emploient. Quand M. Waddington est
arrivé au pouvoir, je ne lui ai pas dé-
claré la guerre; je lui ai conseillé de
faire l'amnistie; quand M. de Freyci-
net est arrivé au pouvoir, je lui ai de-
mandé le service de trois ans et la ré-
forme de la magistrature; quand M.
Ferry est arrivé au pouvoir, je lui ai1
demandé la séparation de l'Eglise et
de l'Etat. Aujourd'hui M. Gambetta est
au pouvoir : je lui demande la sépara-
ti on de l'Etat et de l'Egliso et la ré-
forme radicale de la Constitution.
Aucun des ministres qui ont précédé
M. Gambetta n'ont su avoir une politi-
que franche et nette. Quelquefois ils
ont été à gauche ; plus souvent ils ont
été à droite. Aucun n'a eu de majorité
dans le vrai sens du mot. Et pourquoi?
C'est que les députés votaient pour des
personnes et jamais pour des program-
mes; c'est qu'ils ne se demandaient
pas si telle ou telle proposition parle-
mentaire était ou non conforme à leurs
idées, mais si elle était agréable ou
désagréable au cabinet.
Eh bien ! j'espère, je tiens absolu-
ment à espérer que le ministère actuel,
instruit par six ans d'expérience, ne
-i*l - -
v6Mm pas imiter ses prédécesseurs.
Je veux espérer qu'il comprendra la
nécessité de gouverner d'après des
principes bien clairs et bien compré-
hensibles pour tous : qu'il fera cesser
le piétinement sur place et qu'il mettra
fin à l'équivoque. J'espère encore que
c'est le programme de gauche qu'il
adoptera. Ah ! s'il n'y vient Ipas cette
fois-ci, après le vole du Sénat et l'apo-
théose de M. de Voisins-Lavernière, il
faudra désespérer de la clairvoyance
des hommes politiques !
EDOUARD LOCKROY.
r 4>
AU SENAT
Le Sénat ne veut rien avoir à envier
à la Chambre. Au palais Bourbon, on
avait validé, par erreur, M. Soubeyran.
Au Sénat, il paraît que c'est également
par erreur qu'on a nommé M. Voisins-
Lavernière. La majorité d'une voix,
qui avait fait un législateur à vie de ce
sénateur qui n'aurait jamais été réélu
de sa vie par ses commettants; cette
maiorité qui a fait scandale n'existe
pas, à ce qu'on vient de découvrir.
M. Voisins-Lavernière a bien eu la
majorité des suffrages exprimés, dé-
duction faite des bulletins blancs, mais
c'est justement cette , déduction que
l'on ne devait pas opérer puisque le
règlement porte que l'élection a lieu à
la majorité des votants. Or, celui qui
dépose un bulletin blanc est bien un
votant.
Il n'en est pas de même pour les
élections de sénateurs dans les collè-
ges départementaux. Là, il faut la ma-
jorité des votes exprimés, et c'est cette
règle qu'on à appliquée, à tort, au cas
de M. Lavernière.
L'irrégularité de l'élection a été ex-
posée au Sénat, dans la séance d'hier,
par l'honorable M. Griffe, et il n'est pas
besoin de dire que la question ainsi
soulevée a causé quelque émotion. Il
n'a pas été possible toutefois de la dis-
cuter immédiatement, parce que la
proclamation du résultat n'a lieu qu'a-
près trois jours francs et que, à ce mo-
ment seulement, les réclamations ten-
dant a-Ia nullité du vote pourront être
présentées. Les chiffres apportés par
M. Griffe ne laissent d'ailleurs pas place
au doute.
Le nombre des votants a été de 250;
donc la majorité absolue était de 126,
c'est-à-dire deux voix de plus que n'en
a obtenu M. Voisins-Lavernière. Par
conséquent, à moins que le Sénat ne
tinnne absolument à passer par dessus
son règlement, de peur d'avoir la mau-
vaise fortune de perdre l'ami de M. Si-
mon, l'élection do M. Voisins sera an-
nulée, et peut-être alors ceux qui l'a-
vaient envoyé au Luxembourg retrou-
veront-ils l'occasion inespérée de lui
faire comprendre ce qu'ils pensent de
sa conduite depuis trois ans et de sa
façon de fuir devant le jugement pu-
blic.
C'est jeudi que la question sera tran-
chée.
A. GAULIER.
1
Aucun fait intéressant à signaler aujour-
d'hui erçpoce en Tunisie. Un chef insurgé,
Ali-ben-Ayar, qui avait tenté de réveiller
l'agitation dans le nord de la régence, est
en fuite avec quelques-uns de ses der-
niers adhérents, les faibles contingents
qu'il avait pu réunir n'eyant osé engager
le combat, bloqués qu'ils étaient dans
Jeurs montagnes par les colonnes d'Aubi-
gny, Laroque et Philibert.
La fuite d'Ali-ben-Ayar aura pour ré-
sultat probable de déterminer la soumis-1
sion de la tribu des Ouled-Ayars, qui jus-
qu'à présent était restée sous les armes.
Le général d'Aubigny a déjà reçu des. in-
structions, en vue de régler les conditions
de l'aman avec cette tribu.
Une dépêche d'Alger annonce que « Si-
Sliman a été vivement poursuivi jusqu'à la
frontière M. Ce que nous voyons de plus
clair dans cette note, qui a sans doute
pour but d'établir que tout le possible a
été fait contre Si-Sliman, c'est que Si-
Sliman a, comme nous le disions l'autre
jour, trouvé le moyen de quitter le terri-
toire, en dépit des poursuites dont.il a été
l'objet.
Les opérations continuent vigoureuse-
ment dans l'extrême Sud oranais. Quel-
ques tribus commencent à offrir leur
soumission. On fouille les montagnes et
on impose pour conditions de l'aman aux
tribus de descendre dans la plaine, afin
d'y demeurer sous la surveillance de nos
troupes. Le général Delebecque a organisé
des colonnes légères qui poursuivent
l'ennemi dans tous les sens.
*
COULISSES DES CHAMBRES
M. Gambetta, président du conseil, s'est
rendu/hier à la commission de la Cham-
bre chargée d'examiner le projet de loi
ouvrant des crédits supplémentaires pour
l'expédition de Tunisje.
M. Gambetta était accompagné par M.
Allain-Targé, ministre des financés ; M.
de Roussy, directeur de la comptabilité
aux finances; Blandin, sous-secrétaire d'E-
tat à la guerre, et de Pananeu, directeur
du contrôla au ministère de 4a guerre.
La conférence, commencée à 2 heures,
s'est terminée à 3 heures et demie; après
le départ des membres du gouvernement,
la commission a continué à siègerjusqu'à
5 heures et demie.
E le a décidé de garder le secret le plus
absolu sur ses délibérations et, en consé-
quence, elle a communiqué à la presse le
procès-verbal officiel suivant : -
Le président du conseil, accompagné du
ministre des finances et du sous-secrétaire
d'Etat à la guerre, s'est rendu à deux heures
à la commission des crédits relatifs à la
Tunisie.
Interrogé par divers membres sur la poli-
tique quci le gouvernement comptait suivre
en Tunisie, M. le président du conseil a dé-
claré :
Qu'il prenait pour point de départ de sa po-
litique l'ordre du jour voté par la Chambre
dans sa séance du 9 novembre ; il a ajouté
que toutes les mesures à prendre seraient ul-
térieurement soumises à l'examen préalable
du Parlement.
Diverses explications ont été ensuite four-
nies par M. le ministre des finances, M. le di-
recteur de la comptabilité générale et par M.
le directeur du contrôla au ministère de la
guerre.
La commission, après avoir délibéré et dis-
cuté jusqu'à cinq heures et demie, a nommé
M. Goblet, rapporteur.
Sans manquer à la discrétion* obligée
sur certains points en pareille matière,
nous pouvons cependant ajouter quelques
détails qui compléteront utilement ce
procès-verbal un peu trop sommaire.
Nous pouvons dire d'abord que, sur la
question tunisienne en elle-même, M.
Gambetta a été d'une réserve très grande.
Le procès-verbal, sur ce point, est fidèle;
la déclaration qu'il attribue au président
du conseil représente à peu près tout ce
que ce dernier a dit d'explicite. On pourra
d'ailleurs s'en convaincre bientôt, la com-
mission ayant résolu d'insérer dans son
rapport les déclarations du chef du ca-
binet.
M. Gambetta a répété à plusieurs re-
prises que le point de départ de sa politi-
que en Tunisie serait l'ordre du jour du
9 novembre par lequel la Chambre a for-
mulé sa volonté de voir appliquer inté-
gralement le traité du Bardo.
L'entretien de M. Gambetta avec la
commission a porté presque exclusive-
ment sur la question financière, c'est-à-
dire sur le procédé de comptabilité appli-
qué par le cabinet précédent et qui a sou-
levé de nombreuses et vives critiques dans
la Chambre. Ce système est celui des im-
putations provisoires dont nous avoM
expliqué hier l'économie générale.
M. Gambetta considère que ce système
n'est pas irrégulier, mais qu'il constitue
l'extrême limite de la légalité. Ses explU)
cations, qui ont paru dénoter une très'
grande connaissance de la question, ap- !
puyées par celles des directeurs généraux
qui étaient présents, ont amené la com-
mission à se convaincre que ce procédé,
était inévitable.
Toute la question revenait dès lors à
chercher comment, étant donnée une
pareille nécessité, on pourrait assurer
plus efficacement le contrôle parlemen-
taire, non-seulement pour le passé, mais
pour l'avenir.
M. Gambetta a promis que le gouver-
nement ferait tous ses efforts pour attein-
dre ce but. Afin de bien comprendre ce
qui a été décidé, nous rappelons en quoi
consiste le système des imputations pro-
visoires.
Il consiste à solder les dépenses de lex-
pédition, à l'aide des crédits normaux ou-
verts au budget annuel de la guerre, et à
.reconstituer ultérieurement ces crédits
dans leur intégralité primitive, à l'aide
des crédits supplémentaires qu'on vient
demander aux Chambres lorsque les dé-
penses sont effectuées. En d'autres termes.
on paye une dépense exceptionnelle avec
un crédit accordé pour un service annuel
et régulier; mais on vient restituer ultéè
rieurement la somme absorbée, de ma-
nière à ce que le service normal ne soit
pas entravé.
Le contrôle qu'exige la commission, au
nom de la Chambre, est celui des dépenses
exceptionnelles. Elle veut constater par
des états fidèles l'emploi qui a été fait des
crédits alloués.
Enie a demandé, en conséquence, qu'on
lui communiquât tous ces états dès qu'ils
seraient prêts. En tenant compte des dé-
lais nécessaires à la comptabilité mili-
taire, il faut un délai de trois mois pour
que ces pièces puissent être dressées.
M. Gambetta a promis qu'au 1er avril pro-
chain, la Chambre recevrait communica-
tion de tous les états de dépenses con-
cernant la période de l'expédition tuni-
sienne comprise entre l'origine et le
31 décembre 1881.
Les crédits qu'il s'agit d'accorder au-
jourd'hui doivent couvrir les dépenses
jusqu'au 31 décembre prochain. Mais la
commission a été amenée à s'occuper de
ce qui pourrait être nécessaire au-delà de
cette date, de façon à éviter le renouvel-
lement de ce qui s'est passé pendant les
vacances dernières, où le gouvernement
a dépassé les limites assignées par les
Chambres.
On a suggéré l'idée que le gouverne-
ment devrait, avant la clôture de la ses-
sion actuelle, présenter ses demandes de
crédit pour le mois de janvier, avec les
justifications à l'appui. Une objection a
été faite par certains membres, qui con-
sidéraient comme anormal d'ouvrir des
crédits supplémentaires sur un exercice
financier comme celui de 1882, qui n'est
pas encore ouvert. Mais on a répondu à
cela qu'il n'était pas plus anormal d'agir
ainsi que de voter le budget ordinaire un
an d'avance, comme cela se fait réguliè-
rement à chaque session.
Cette observation a levé tous les scru-
pules, et M. Gambetta a promis de dépo-
ser, sous peu de jours, une demande de
crédits supplémentaires pour l'expédition
tunisienne pendant le mois de janvier.
Sous le bénéfice de ces promesses, la
commission a voté les 29 millions deman-
dés pour la période écoulée et pour celle
restant à courir jusqu'au 31 décembre
prochain.
Mais elle a adopté, sur la proposition de
M. Ribot, une formule qui établit nette-
ment que les crédits supplémentaires sont
votés à la condition que les états de dé-
penses devront être communiqués à la
Chambre en avril 1882, de manière à ce
que les imputations provisoires puissent
être remplacées au budget normal par
des réimputations absolument exactes,
a M. Goblet a été nommé iapporteur et,
selon toutes probabilités, il pourra lire
son rapport à la commission et le déposer
ensuite sur le bureau de la Chambre à la
séance de demain jeudi.
Ajoutons comme dernier détail que M.
Gambetta, avant son départ, a été ques-
reuilleton du RAPPEL
DU 24 NOVEMBRE -
———— —— -
-.
; n
i
SON ALTlfSE
&.. -
III (suite),,
- Ah ! çi, me prend-on pour un imbé-
Jile ?
Le prince poursuivit en (s'animant :
Messieurs du ministère paternel ont à
coeur de déconsidérer à mesure le souve-
rain, de l'humilier, de le réduire à la con-
dition la plus méprisée. Que mon père
ait la faiblesse de supporter ces vilenies,
c'eft affaire à lui. Nous verrons jusqu'où
Voir le Rappsel du 7 a-i 23 novembre.
ira sa patience. Mais, quant à moi, je ne
suis encore rien dans l'Etat. Que ces mes-
sieurs se contentant de s'en féliciter, et,
attendant que je leur montre que le pro-
verbe « tel père tel fils » ne se vérifie pas
toujours, j'entends qu'ils me f.ichent la
paix.
Le docteur laissa passer l'éclat de co-
lère tle son filleul.
Puis, avec la même tranquillité :
..;.; Mon cher ami, répondit-il, tu dis
des enfantillages. Quand tu tiendras la
quéue de la poêle, tu verras qu'elle est
•fort difficile à manier. Tu reconnaîtras
surtout que tu accuses injustement ton
père. Ton père est un homme de haute
probité, qui tient à honneur d'observer
une constitution librement acceptée et
sanctionnée par lui. Cette constitution lui
donne des ministres qui lui déplaisent as-
sez souvent, impriment aux affaires pu-
bliques une direction qu'il n'approuve
pas toujours ; mais, monarque irrespon-
sable, il se borne à suivre attentivement
les résultats.de leur politique, prêt à in-
tervenir de toute sa haute autorité, s'il
en naissait un danger pour la patrie.
Voilà quelle est la véritable attitude de
ton père, et ce n'est pas à toi qu'il sied
d'y trouver à reprendre.
Et, après un silence, Berlave conclut :
— Quant à supposer que le cabinet ac-
tuel entreprenne de te molestçr, en exi-
geant ton retour, tu te trompes. Si je te
dis que le gouvernement français souhaite
ton éloignement momentané, c'est que je
suis en mesure de te le prouver.
Le dpcteur tira une sotte de dossier de
sa poche, et en mit les pièces - sous les
yeux du jeune homme.
C'étaient des rapports conftdentiels de
l'ambassadeur au chef du cabinet du
grand duché. Ils relataient des conversa-
tions officieuses, provoquées par le mi-
nistre des affaires étrangères de France ;
conversations d'où il ressortait qu'on avait
tout fait pour étouffer le scandale dont
le sénateur baron Maurlex menaçât sa
femme.
On n'avait réussi qu'à moitié. Celle-ci
était définitivement assignée au tribunal
civil pour s'entendre condamner à la sépa-
ration de corps ; d'où suit que les débats
promettaient, disaient les journaux, des
révélations piquantes.
Déjà le président succombait sous les
demandes de places réservées à l'audience.
Grandes dames, fonctionnaires, gens du
high-lzïe, députés et collègues du plai-
gnant, avec deux pu trois auteurs drama-
tiques, en quête de péripéties naturalistes,
sollicitaient éperdûment des entrées de
faveur, qui les missent au moins sur le
pied des reporters.
Cependant on soupçonnait que la cu-
riosité de raudiLojrê.serni t déçue sur çer-„
tains points délicats. Le ministre, assu-
rait-on, entendait que, non-seulement le
nom du prince ne fût pas prononcé, de
part ou d'autre (les avocats s'ibclinant
devant les hautes convenances s'y étaient
engagés), mais encore que le procureur
de la République s'évertuât à donner le
change, en entrâînant l'attention sur une
autre piste.
Seulement, aux affaires étrangères, on
croyait utile, qu'au moment du procès,
Son Altesse le prince Fréder ne se mon-
trât pas en plein Paris.
Malgré toutes précautions et ententes
préalables, tel incident d'audience pou-
vait soulever un coin du voile, faire glisser
les masques. Il n'eût pas convenu qu'après
quelque article de journal trop transpa-
rent, Fréder se trouvàt le point de mire
d'une salle de spectacle, par exemple.
Tant et si bien que le gouvernement
français insistait, respectueusement bien
entendu, pour que Son Altesse prit un
peu de large, en attendant que l'affaire
entrât dans le domaine de ces vieilleries,
dont les Parisiens, trop occupés par le
scandale du jour, ne se souviennent que
vaguement la semaiae d'après.
A lire ces papiers, Fréder passait de la
colère à la consternation.
Songez donc, aussi! c'était demain soir
que miss Lélé allait devenir — enfin!—
abordable pour lui !
, Et puis vraiment, les ministres de son
père le prenaient sur un ton, et avec un
sans-gêne à révolter t Atiiant les hommes
d'Etat français entouraient de sucre les
paroles rapportées par l'ambassadeur,
autant ceux de là-bas traitaient la ques-
tion sans précaution ;
« Donnez l'assurance à Son Excellence,
disaient-ils, que le prince recevra l'in-
jonction de rentrer dans sa famille. »
- «L'injonction! » ces IjbérAtres, ces mé-
chants députés, qu'une majorité de quel-
ques voix gratifiait de portefeuilles, se
permettaient de parler d'injonction. In-
jonction à qui? à lui, le prince-héritier,
une altesse, encore une fois ! Sentez-vous
bien l'inconvénient, bon lecteur ?
Une «altesse! » Il y paraissait, ma foi!
Pas à une ligne, le mot n'était écrit dans
ces dépêches ministérielles, lancées au
chef de la légation. Oh ! la gangrène révo-
lutionnaire 1 Conçoit-on cela !
De chétifs bourgeois, affranchis d'hier,
puant encore la glèbe, gardant leurs
pattes massives comme stigmates indé-1
lébiles de leur antique serlage, se pas-'
saient l'impudence de:parler d'un prince-,
héritier, sans lui donner son titre d'al-
tesse! Où allons-nous, mon Dieu t
Ah ! cette France ! Oh ! ce Paris! — où
l'on s'amuse tant, il est vrai l — la bouel
de ses pavés imprime au talon de qui les
foule un ferment de révolte irr -C.
tueuse, qui germe jusque dans les neiges
moscovites.
Oh ! ce peuple français, que rien n'é-
crase, qui rebondit sous l'effort des bar-
bares les plus sauvages, et insulte, sans
même y tâcher, par sa sève native, par sa
prospérité incarnée, à la misère de ses
vainqueurs, p!us misérables après qu'a.
vant leur triomphe illusoire, en ne le sup-
primera donc jamais radicalement! Une
se trouvera donc pas une race assez puis-
sante pour assajétir ces Gaulois qui, de-
puis quç le monde est monde, ont absorbé,
ont conquis leurs conquérants, romains, ou
francs, ou saxons, leur insufflant à tous
un esprit révolutionnaire qui a boulever.
sé les deux hémisphères I
EDOUARD CADOL.
(Ailggfc}
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Collections numériques similaires Eusèbe de Verceil Eusèbe de Verceil /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Eusèbe de Verceil" or dc.contributor adj "Eusèbe de Verceil")Firmicus Maternus Julius Firmicus Maternus Julius /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmicus Maternus Julius" or dc.contributor adj "Firmicus Maternus Julius")
- Auteurs similaires Eusèbe de Verceil Eusèbe de Verceil /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Eusèbe de Verceil" or dc.contributor adj "Eusèbe de Verceil")Firmicus Maternus Julius Firmicus Maternus Julius /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Firmicus Maternus Julius" or dc.contributor adj "Firmicus Maternus Julius")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7534096k/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7534096k/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7534096k/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7534096k/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7534096k
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7534096k
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7534096k/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest