Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1875-11-20
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 novembre 1875 20 novembre 1875
Description : 1875/11/20 (N2080). 1875/11/20 (N2080).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7532677p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/09/2012
30,,Brumaire on 84 *m N - 2 ID s~~ ç~ ;.À ,!,, , "r
X* 2080 rn Sâ!ffif3î ~ôV~5~ 1875 ~.e numétte : 10 c. a* Départements : f 5 el. 30 Brumaire en 84 #* N4 -
RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
De 4 à 6 heures du soir
18, RUE DE VALOIS, 18
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
HU. Ch. LAGRANGE, CERF et qt
6, place de la Bourse, 6,
.,
ÂD M lîîl S T R AT 1011
M, 1rntt trB tAtoiBj if 4,
ABONNEMENTS
PARIA
trois mois. Ift »
Six mois. 2p »
DÉPARTEMENTS
Trois mois.13 50
Six mois.27 *,
» s
Adresser lettres et mandala '---
è. Mi ERNEST LEFÈ^gJp/i
v àDMINISTI||tSra*ÇfTttàNf 'C
LE DIMES SE M; BARBOill
Nous publions plus loin le discours
que M. Bardoux vient d'adresser au
centre gauche en prenant possession de
la présidence qui luit été votée à l'una-
nimité. Ce discours est, naturellement,
un éloge du centre gauche. Et il est cer-
tain que, sans être éperdu du centre
gauche, on peut trouver que le centre
gauche est un joli centre, quand on le
compare au centre droit.
Le centre gauche mériterait d'être
loué, ne fût-ce que pour avoir fait, et à
l'unanimité, M. Bardoux son président
le lendemain du jour où M. Bardoux
donnait sa démission de-sous-secrétaire
d'Etat au ministère de la justice, et pro-
testait ainsi publiquement et énergique-
ment contre la politique du cabinet
Buffaure. Par là le centre gauche s'est
approprié l'honneur de cette - protesta-
tion. M. Buffet avait signifiée au centre
gauche qu'il ne l'accepterait jamais pour
allié. La nomination de M. Bardoux a
été laréponse du centre gauche au mot
que M. Buffet avait dit à M. Christophle.
Ce dont l'ex-secrétaire d'Etat loue le
centre gauche, c'est, d'abord, d'avoir
été assez patriote et assez intelligent
pour comprendre et pour accepter, dès
les premiers jours, la nécessité de "la
République. « Vous êtes de ceux que le
patriotisme et la raison amenèrent, dès
les premiers jours de leur élection, à
reconnaître que la République était le
seul gouvernement possible et réalif
sable. » C'est ensuite de s'être « attaché
à la politique d'apaisement et de libé-
ration du territoire ». Le nouveau pré-
sident du centre gauche rappelle que
tout le monde n'a pas fait de même, et,
sans nommer la politique do combat,
il ne promet pas les applaudissements
de « l'équitable histoire » aux partis
qui « se sont réveillés » et qui n'ont,
pas voulu voir qu' « un gouvernement,
bien défini pourrait seul permettre le
relèvement e.
et vis-à-vis des étrangers M. Il félicite le
centre g~tMh~ée~M~
tion dans la revanche que le 25 février
a prise sur le 24 mai, et, il affirme que
le pays est 0t sera avec hemtlent le respect et raffranchissement des
institutions républicaines.
Le céfttrè^ga$$iô^ àpr
plaudi le discours de son nouveau prési-
dent. Ce quo nous en applaudirons,
nous, plus q^e le ~est~,, c'est la netteté
avec laquelle M. Bardoux a constaté
que rAssemblée n'a plus qu'une chose
à faire : finir. Si cléricaut que soient la
plupart des membres de l'Assemblée
qui nous comble de sa présence Je-
puis cinq ans tout à l'heure, nous ne
sommes pas certain qu'ils éprouvent
une joie immodérée à s'eptendre dire
le : Frère, il faut mourir] ou le Mé-
mento qtiià fâtm bz et in pulverem re-
verteris. Souviens-toi que tu es Bara-
: 'Ï~~t't'~ ,).h?'¡i:';J .,
- ,. ;- ■
gnon, Mettetal, Anisson-Duperron, Pré- 1
tavoine, etc., et que tu vas retomber |
Baragnon, Mettetal, Anisson-Duperron,
)Prétavoine, etc. L'ex-secrétaire du mi
-nïstëre de M. Dufaure ne leur épargne
1 j
jpas cet avertissement, désagréable quoi-
que monastique. Il semble même pren-
dre plaisir à le leur enfoncer et - à le
leur retourner dans la poitrine. Il le leur
répète sous toutes les formes : « C'est
presque à la veille de la dissolution de
l'Assemblée que. » — Votre président
actuel, probablement le dernier. » -
« Nous continuerons, dans les dernières
heures. » C'est le glas de l'agonie, c'est
la cloche de l'enterrement.
Il n'y a guère eu que Charles-Quint
qui ait pris plaisir à ses propres funé-
railles, et personae ne s'étonnera si la
majorité versaillaise accueille avec plus
d'humeur que de reconnaissance un
discours qui lui sonne si cruellement sa
dissolution. Nous qui ne sommes - pas
de la majorité versaillaise; nous en
éprouvons une impression toute diffé-
rente, et, bien que d'ordinaire le son
des cloches ait le don de nous agacer
les nerfs, nous déclarons qu'il n'y a pas
dans tout l'orchestre de l'Opéra, ni au
Conservatoire, ni aux concerts popu-
laires, un seul instrument capable de
produire une musique qui vaille pour
nous le son de cette cloche-là.
AUGUSTE VACOUERIE.
a; UNE COPIE
Il résulte des négociations qui vien-
nent d'être entamées entre divers grou-
pes de l'Assemblée pour le choix des
soixante-quinze sénateurs inamovibles,
et des nouvelles reçues de province sur
la formation des listes de candidatures
au Sénat, que l'Assemblée a trouvé un
moyen excellent de se survivre à elle-
même. Elle renaîtrait dans le futur Sénat
avec ses divisions, ses groupes, ses
fragments moléculaires, ses, nuances
multiples. La haute Chambre serait la
copie photographique de la Chambre
actuelle dans ses traits les plus ténus et
dans ses linéaments les plus fugitifs.
Chacun y travaille de bon cœur.
Ce qui a empêché l'Assemblée de
, Versailles de fonctionner franchement,
ce qui lui a fait perdre tant de temps,
=en vaines tentatives monarchiques, sep-
tennales ou autres, ce qui lui a inspiré
des inventions Bigarres, comme là cons-
titution Rivet, le pacte de Bordeaux, la
trêve des partis, etc., c'est précisément
le nombre et la quasi-égalité de ses
fractions, Sauf en matière cléricale et
répressive, impossible de trouver une
majorité. Des groupes flottants, portés
ajorité. ,,iou s fl -- r
par le roulis parlementaire tantôt à
droite tantôt ,à gauche, ne permettaient
pas une allure régulière et prévue. Un
beau matin, le centre droit déjouait
toutes les prévisions en se laissant aller
à gauche, et un autre matin, le centre
gauche démentait tous les calculs en se
^optant à droite, sans compter les ap-
points ou légitimiste ou bonapartiste,
qui lie donnaient pas des notes moins
fantaisistes, dans çe charivari. La confu-
sion des doctrines et des langues a été
poussée à l'extrême dans cette Babel
qui va crouler en une imminente disso-
lution.
Eh bien ! on aspire à refaire cet état
de choses dans le futur Sénat. Il y a
trop de groupes dans l'Assemblée, et on
veut, sous prétexte de transaction, que
chacun de ces groupes envoie plusieurs
de ses spécimens à la haute Chambre.
On ne veut laisser emporter par le dé-
luge du suffrage universel aucune des
espèces qui ont crû et multiplié sur les
bancs du théâtre de Versailles : extrê-
me droite intransigeante, extrême droite
transigeante, droite pure, droite modé-
rée, centre droit Bocher, centre gauche
Wallon, groupe Declercq, groupe Pra.
dié, etc., etc. J'en passe, et non des
pires.
On espérait que toutes ces classifica-
tions artificielles disparaîtraient sans
laisser plus de trace dans l'histoire par-
lementaire que dans l'histoire naturelle.
On pensait que les deux Chambres fu-
tures se recruteraient plus nettement,
que les monarchistes aspireraient à n'y
envoyer que des monarchistes, et les ré-
publicains que des républicains; que
chacun, combattant sous sa bannière
largement et crânement déployée, se
débarrasserait de ces éléments mal dé-
finis qui feraient le désespoir du plus
habile micrographe.
Pas du tout. Si on y renonce pour la
future Assemblée, on s'y applique pour
le futur Sénat. C'est déjà avancé quant
aux soixante-quinze inamovibles. Le
centre droit et le centre gauche, comme
le demandait le discours de M. Ricard,
négocient dans ce sens, ce qui n'em-
pêche pas le centre droit de continuer
ses négociations avec les droites. On
admet les représentants de chaque
sous-groupe et de chaque demi-sous-
groupe. Si bien que les soixante-quinze
inamovibles, les soixante-quinze séna-
teurs à perpétuité porteraient au Sénat
toutes les nuances qui ont si souvent
stérilisé la carrière de la Chambre ac-
tuelle. *
Même travail dans le pays pour les
sénateurs amovibles et renouvelables. Il
nous arrive à chaque instant des listes
qu'on nous donne comme définitives et
où l'esprit de transaction a fait mer-
veille. Les noms les plus opposés s'y
trouvent accouplés de façon à donner là
aussi une représentation aux genres,
sous-genres, espèces et sous-espèces de
F Assemblée. Un député de la gauche
commence la liste, qui se termine par
un député étiqueté centre-droit Bocher
ou centre-droit Lavergne, passant par
le centre-gauche Ricard et le centre-
gauche Casimir Périer.
Je le répète, le résultat le plus clair
de cette méthode serait qu'en lisant les
débats du futur Sénat, on croirait lire
ceux de l'Assemblée actuelle; qu'en en
étudiant la physionomie, on y retrou-
verait la physionomie de l'Assemblée
actuelle; qu'en en analysant les divisions
parlementaires, on y retrouverait les
divisions de l'Assemblée actuelle. Ce
serait une simple transposition, avec
mêmes passions, mêmes antagonismes,
mêmes groupements factices, mêmes
teintes subtiles. Ce serait bien désa-
gréable. Il est des moules qu'il faut sa-
voir briser et des clichés qu'il faut jeter
à la fonte. Nous espérions qu'on nous
aurait, dans un sens ou dans l'autre,
fait du neuf ou de l'original. C'est d'une
côpie pure et simple que nous sommes
menacés.
S'il est impossible d'empêcher, pour
le choix des soixante-quinze perpétuels,
ces négociations, transactions, concilia-
tions, cotes mal taillées et concessions,
qu'on y renonce au moins pour les
choix réservés au pays. On y renonce
pour le scrutin d'arrondissement. Cha-
cun s'y présentera avec son drapeau,
dans tonte la lumineuse manifestation
de ses opinions. Qu'on en fasse autant
pour le scrutin sénatorial. Assez de ces
fusions, et réservons les arbitrages aux
valeurs de bourse ! C'est le seul moyen
d'avoir un Sénat aux partis nettement
tranchés et à la majorité sachant ce
qu'elle veut et où elle va, devant le
pays attentif.
L'Assemblée de Versailles demeure-
ra célèbre par son impuissance à consti-
tuer des majorités sérieuses et durables.
Cette impuissance est due à la multipli-
cité insensée des groupes qui s'y sont
formés. En puisant dans chacun de ses
groupes pour en diaprer les listes séna-
toriales, on ne fera que préparer la
même impuissance.
LOUIS ASSELINB.
e
LA séance
L'Assemblée, qui n'avait pas grand chose
à faire, s'est occupée d'une modification à
apporter au code de justice militaire, et
ensuite d'une pétition relative au déverse-
ment, sur le territoire de la commune de
Gennevilliers, des eaux d'égoût de Paris.
La pétition a été renvoyée aux deux minis-
tres de l'intérieur et des travaux publics.
A la fin de la séance, le rapporteur de la
commission des Trente est venu deman-
der à la Chambre de renvoyer à lundi la
discussion, en troisième lecture, de la loi
électorale, discussion qui devait s'ouvrir
demain. M. le rapporteur a motivé sa de-
mande sur le grand nombre d'amende-
ments envoyés à la commission et qui ne
lui ont pas permis d'achever son travail.
Mais'Gf qu'il n'a p{;s dit et ce qu'il aurait
dû dire, c'est que la plupart de ces amen-
dements ont pour auteurs des membres de
la droite. Ces messieurs se déclarent bien
pressés de partir, mais cela ne les empêche
pas de songer un peu à leurs intérêts, et
ceux qui sont par trop maltraités dans le
tableau des circonscriptions essaient d'ob-
tenir quelques modifications. De là le sur-
croit de travail imposé à la commission.
M. Buffet a paru très irrité de l'ajourne-
ment du débat. Aurait-il déjà des doutes
sur la solidité de la majorité du 11 novem-
bre? Il est certain du moins que nombre
de conservateurs ont des doutes sur les
résultats du vote par arrondissement.
Nous le disions l'autre jour, et plus d'un
symptôme significatif est venu confirmer
nos premières impressions, Il suffit de lire
les journaux officieux pour voir que la
distribution prochaine des candidatures
officielles excite déjà bien des jalousies et
bien des inquiétudes. Cela était inévita- -,
ble, et avec un peu plus de connaissance
des hommes, un peu moins d'étourderie
et de passion réactionnaire, on eût aisé-
ment évité cet écueil. A présent, il est
bien un peu tard, et revenir en arrière
n'est point aisé.
Autant la droite se montre soucieuse et
hésitante, autant la gauche semble tran-
quille et confiante. Chacun se prépare à
prendre le plus rapidement possible les
dispositions que la loi nouvelle rend né-
cessaires, et il n'y aura pas plus de défail-
lances dans la lutte par arrondissements
qu'il n'y en aurait eu dans la-lutte par
départements. Au surplus, rien ne montre
mieux l'état respectif et la situation d'es-
prit des deux partis que ce qui s'est passé
hier dans les bureaux, à propos de la loi
sur la presse. Les républicains l'ont em-
porté presque partout, et ils l'ont emporté
non-seulement parce que la loi n'est
guère défendable (ce qui n'eût pas empê-
ché les conservateurs de l'appuyer), mais
parce que ceux-ci sont dans un quasi-
désarroi, et que, dans plus d'un bureau,
ils n'ont pas même essayé de lutter.
Voilà où en est, trois ou quatre jours
après la prétendue grande victoire du 11
novembre, le parti qui a suivi M. Buffet.
On peut, dès lors, prévoir ce qui l'attend
dans un avenir prochain.
A. GAULIER.
PHYSIONOMIE DE LA SÉANCE. .j
Aujourd'hui, l'Assemblée a discuté une
pétition sur la désinfection delà Seine; nous
avons entendu à cesujetMM. Caillaux, Til-
lancourt et Krantz, qui ont bien arrangé le
pauvre fleuve; on a parlé de la putréfac-
tion en termes tout à fait réalistes. Une
pareille discussion vous dégoûterait des
« pleine-eau » pour longtemps.
Le cardinal archevêque de Paris assis-
tait au début de la séance ; et l'évêque
d'Orléans a pu voir sur la tête du prélat la
calotte rouge, objet de tant de vœux dé-
çus.
Un incident a terminé la séance. La com-
mission de la loi électorale, qui a beau-
coup de besogne à faire et beaucoup d'a-
mendements à examiner, n'est pas en état
de discuter demain. Elle a demandé la re-
mise du débat à lundi. Un cri d'horreur
est parti de la droite. La remise a été vo-
tée-, néanmoins, et par la gauche, et par
les centres. M. Buffet était dans la mino-
rité.
11 n'était pas content.
Il faut qu'il sente sa situation bien
chancelante et sa majorité bien incertaine
pour trembler d'un retard de deux jours.
Il compte les minutes, il calcule les secon-
des, il trépigne d'impatience. Tudieu 1
Quelle ardeur !- Quoi ! c'est là le même
homme si âpre, naguères, contre toute
pensée de dissolution! Comme on voit
qu'il a le pouvoir, et que, comptant s'en
servir, il a peur de le perdre !
Aussi, pour ces deux jours, nécessaires
assurément (les amendements distribués
aujourd'hui, forment une liasse, et il faut.
en outre que la commission révise les cir-
conscriptions électorales taillées par ses
prédécesseurs de l'ordre moral); pour ces
deux petites journées, M. Buffet a été jus-
qu'à dire, de son banc; que la commission
inventait des prétextes pour des délais.
Les gens qui votent en vain la dissolution
depuis 1872, contre M. Buffet, ont trouvé
l'accusation un peu roide. M. Bethmont,
qui avait entendu le propos, y a nettement
répondu, et l'on a vu un colloque fort
animé s'établir au pied de la tribune.
«
1'1 C
A droite, on continue à songer.
La droite commence à réfléchir aux con-
séquences des choses après qu'elle les a
votées. C'est s'y prendre un peu tard. On
ne s'est aperçu, parmi les conservateurs
de l'Assemblée, du vote de la Constitution
républicaine qu'après l'avoir repoussée
deux fois. On n'a commencé à calculer les
conséquences du scrutin d'arrondissement
qu'après l'avoir adopté. On se rejette sur
les places de sénateurs, mais leur chiffre
est limité.
Aussi la majorité de l'ordre moral re-
constituée jeudi se refroidissait-elle singu-
lièrement ces jours-ci. On sait comment
aujourd'hui elle s'est trouvée n'être plus
qu'une infime minorité. C'est pour cela
que M. Buffet est pressé. Qu'il prenne ¡n.
tience! Nous sommes assurés maintenant
que les opérations électorales vont com-
mencer.. Le choix des sénateurs nomtftêS j
- ,'. ,
par l'Assemblée se fera dans une semaine
ou deux ; le reste suivra à des délais ,
d'avance. L'Assemblée a vécu:'Gela.nou&<
suffit.
CAMILLE PELtETAN.
LES CHEMINS DE FER DE LA BANLIEUE
Nous publions, plus loin l'importantt
discussion qui a commencé Iiier, a4. con,,
seil général, au sujet des chemins de fei
projetés dans la banlieue parisienne. -.C'est
là une question très intéressainte, très peu
connue, et nos lecteurs nous sauront gré-
de leur en donner le compte-rendu avec
tous ses détails.
Occam
LA LOI SUR LA PRESSE
Les bureaux de-la Chambre se son y
réunis hier pour nommer la commission
chargée de l'examen du projet de loi sir
la presse.
Les députés républicatas «vaiç?»t pér4,
pondu exactement à -. la convocation; (fj
droite, on a remarqué — quoique le nom- ,
bre des membres présents fût très consi- -
dérable - des absences qui paraissent
avoir eu un motif politique. Beaucoup de
membres de l'extrême droite qui désap-
prouvent le projet se sont abstenus de ve-
nir dans leurs bureaux. On a remarqué
que d'autres, au contraire, qui étaient ve-
nus, ont voté par bulletins blancs ou se
sont abstenus, ou même ont voté pour le-
adversaires du projet Buffet-Dufaure.
Voici la liste des commissaires élus
et celle de leurs concurrents : !
i" bureau : M. Batbie (D), élu par 20 voix
contre 17 à M. George (G) et 1 à M. de
Gavardie (D). ;
28 bureau : M. Bertauld (G), élu par 21 voîx
et 7 bulletins blancs ; il n'y a pas eu de
concurrent. *•
f
31 bureau : M. Corne. (G), élu par 20 voix
contre M. Paris (D), 18.
4e bureau : M. Laboulaye (è), élu par tg;
voix contre M. de La Sicotièra (D),
15. - ..,.,:¡,' ;
58 bureau : M. Beaussire (G), élu par 18
voix contre M. Voisin (D), 15, et t bul-
letin blanc..
6* bureau : M. Cazot (G), élu par 25 voix
contre M. Giraud (D), 14.
78 bureau : M. Adnet (D), élu par 18 voix
contre M. Eymard-Duvernay (G), 17.
8* bureau : M. Eugène Pelletan (G), élu par
22 voix contre M. Grivart (D), 14 et 3
bulletins blancs. ,
9e bureau : M. de Peyramont (Dj, élu par
18 voix contre M. de Chofseul (G), 14. i
10# bureau ; M. Parent (G), élu par 19 !
voix, contre M. Peltereau-Villeneuve (D)
t4 et M. Raoul Duval (D), 1.
11° bureau ; Alfred Dupont (D), élu par 22
voix contre M. de Pressensé fG), 47.
126 bureau ; M. Mazeau (G), élu par 21
voix contre M, Boreau-Lajanadie (Dk,
16, et M. de Franclieu (D),
13e bureau : M. Jules Favre (G), élu sans!
concurrent. Les membres de la droite'
s'abstiennent.
44e bureau î M. MbertlMty ?G)fTO par'
20 voix contre M. de Saint-Pierre, de la
Manchte (D), 47 et 3 bulletins -blancs.
45e bureau ; M. Jules Ferry (G), élu à-l'u-
nanimité sans concurrent. Les membres
de la droite s'abstiennent. ,
On voit d'après ce tableau que la com-
mission se compose de 11 membres des
gauches et 4 des droites. c
Ce résultat, dès qu'il a été! connu dans
les couloirs de la Chambre, à causé une
profonde sensation. On y a vu la condam-
nation manifeste du projet Buffet-Dufaure.
Les ministres attachaient une telle impor-v
tance à cette nomination qu'ils s'étaient
tous rendus dans leurs bureaux respectifs.
pour donner leurs voix aux partisans du
projet. Les deux principaux même, MM.
Buffet et Dufaure, ont pris part, l'un dans
Feuilleton du Anppel
DU 20 NOVEMBRE
MAITRE GASPARD FIX
HISTOIRE
- "," : ',..
D'CN- - -
CONSERVATEUR
■ ; vu- ,
Après cela, durant quelques jours, maî-
tre Fix eut des affaires aux pays. Il partait
seul le matin en char-à-bancs, par la pluie
ou par la neige et ne, revenait que le soir.
Puis M. le maire se souvint tout à coup
que les - réparations du presbytère et de
l'église étaient en retard. Il remit ces
questions sur le tapis au conseil municipal;
et il déclara que les choses ne pouvaient
rester dans un pareil état,-qu'irallait lui-
même porter les réelâmations devant M. le
préfet, et que, si cela ne suffisait pas, il
pousserait l'affaire jusqu'à Paris, devant le
ministre.
Voir le Bappel du 8 au 19 novembre,
t
Le docteur Laurent, Hodel et beaucoup
d'autres s'émerveillaient de son zèle.
« Décidément disait le docteur, il doit
avoir un grade dans la congrégation : le
beau-frère dépenser de l'argent en voya-
ges sans intérêt. Ça n'est pas possible ! »
Il partit pourtant ; Faxland le conduisit
àVandëuvre, prendre la diligence Laffitte
et Gaillard, et toute cette semaine on ne
parla que de cela.
Frionnet, apprenant par la mère Simone,
que maître Gaspard avait tenu parole et
qu'il était à Paris, n'en revenait pas.
, - « Quelle singulière chose ! pensait-il à
part soi, négliger ses affaires pour celles
de la commune!- Est-ce que la gloriole
lui viendrait maintenant ? Est-ce qu'il
voudrait racheter ses vieux péchés et s'at-
tirer des honneurs en rebâtissant l'é-
glise? »
Ainsi se passait le temps à raisonner,
quand la nouvelle se répandit que M. le
maire était rentré de la veille au soir, en
bonne santé. Aussitôt le compère, fort in-
trigué, courut au Mouton-d'Or,
— Il est dans le cabinet, lui dit Mme Si-
mone sur le pas de la porte; il Vous attend.
, -- Hé ! vous voilà donc revenu, mon-
sieur le maire, s'écria-t-il en entrant tout
joyeux ; je commençais à trouver le temps
long après vous !
Maître Gaspard, en casaque de lainef
devant son bureau, lui tendit la main. f
— Ça ne m'étonne pas, Frionnet, dit-il,
nous travaillons depuis tant d'années en.
semble !. Asseyez-vous, asseyez-vous,
- Et l'église, et le presbytère, est-ce
que nous les aurons? demanda Frionnet
en s'asseyant.
— Oui, oui, c'est entendu. la subven-
tion est accordée.
- Ah t monsieur le maire, quel dévoue-
ment à la commune 1 je n'aurais jamais
cru que vous pousseriez l'abnégation de
vos intérêts jusque-là 1. Non, c'est trop
beau. trop beau !.
Maître Gaspard souriait.
- Sans doute, fit-il. Mais, voyez-vous,
Frionnet, j'ai profité de l'occasion. j'avais
à Paris d'autres petites affaires.
—• Ah! vous aviez des affaires ?..
- Oui, j'ai acheté le Hôvald, dit maître
Fix d'un ton de bonhomie un peu gogue-
nard; j'ai mené les deux choses de front.
vous comprenez.
Il observait son compère du coin de l'œil.
Frionnet était devenu rouge jusque dans
les cheveux, sa tignasse s'en hérissait ; il
souflait du nez, les lèvres serrées, sans
pouvoir articuler une parole,
— Le Hôvald I. Le Hôvald!. ftt-il à la
fin. Vous l'avez acheté. les bois. le châ-
teau. les étangs?
"— Oui, je les ai achetés.
Combien ?
+- Cinq cent mille francs.
; *— Cinq cent mille francs ! répéta le
Compère, c'est pour rien. pour rien !.
1 - Pas tout à fait, dit maître Gaspard
d'un ton de modestie, mais le marché n'est
pas mauvais, il est même bon. Je ne suis
fâçbé de l'avoir fait. Tenez, Voici l'acte
V
de vente passé devant Me Nicolo, notaire à
Paris, fit-il en tirant une liasse de papiers
de son portefeuille, et la présentant à son
compère.
Frionnet, les bras croisés sur la table et
les yeux tout ronds, se mit à lire; on l'en-
tendait souffler ; il ne disait rien.
— Mais. mais. fit-il en se levant. et
l'argent?. l'argent?. Vous avez obtenu
des termes pour le payement ?
— Non, il fallait de l'argent comptant ;
j'ai payé tout de suite. Voilà la quittance
en bonne forme.
Alors Frionnet n'avait plus rien à dire ;
l'étonnement, la stupéfaction l'empê-
chaient de témoigner à maître Fix toute
son admiration comme il aurait fallu, et il
demanda :
— Vous n'aviez pas la somme pourtant.
Cinq cent mille francs f.. Vous ne pouviez
pas l'avoir. Je connais assez votre for-
tune, monsieur le maire, pour me per-
mettre.
— Il paraît que je l'avais, lui répondit
maître Gaspard simplement, puisque la
quittance est là ! Et puis, Frionnet, que je
l'aie eue dans ma poche ou non, ça ne fait
rien à l'affaire, si j'ai pu me la procurer à
temps.
Ce coup était si beau, si hardi, que le
compère ne pouvait en revenir.
- Vous avez vu Sabouriau, bien sûr,
dit-il encore. Voyons, entre nous, mon-
sieur le maire, combien a-t-il reçu ?
Monsieur Sabouriau? pas un centi-
me. dit mâUtô Qjispjfrd, Comment, com-
ment pouvez-vous avoir des idées pareil-
les, Frionnet? Un si honnête homme !..
Il goguenardait évidemment. La satis-
faction du joueur habile, heureux, qui râ-
cle l'or et les billets de banque du tapis
vert et les empoche aux yeux des assis-
tants, stupéfaits de sa chance, tel était le
sourire de maître Gaspard en ce moment.
Quant à Frionnet, il avait la figure longue
d'une aune; et contemplant en lui-même la
magnificence de ce coup, dont il ne retirait
pas un centime, lui pourtant .qui le pre-
mier en avait fourni l'indication, involon-
taire il est vrai, mais enfin l'indication
positive, il était devenu muet comme une
carpe au fond de son vivier, les deux mains
sur ses genoux, le nez en arrêt devant la
quittance, regardant sans voir. Une sorte
d'amertume, d'envie l'empêchait de rien
dire, quand Gaspard Fix, comprenant sans
doute ce sentiment naturel, lui posa la
main sur l'épaule en disant :
- C'est pourtant à vous, Frionnet, que
je dois l'idée de la chose, et je veux que
Vqus en ayez aussi votre part.
Frionnet se redressa lentement.
î— Nous allons défricher, dit maître Fix.
.:- Défricher, monsieur le maire? Mais
il faut une autorisation du gouvernement.
- Ne vous en inquiétez pas. tenez.
la voici î ',.
—Encore!. murmura Frionnet ; quelle
chance!.
— On a toujours de la chance, quand
on sait se remuer, répliqua le compère.
Mais il ne s'agit pas de cela; nous allons
défricher et je vous prends pour mon
homme, d'affaires. Le petit Marcel, votre
clerc, gérera bien l'étude en attendant; et
vous, Frionnet, en considération de tous'
les vieux services et de vos solides con-
naissances, je vous donne pour mener le,
défrichement rondement, pour dresser les
actes et surveiller l'exploitation, je vou-4
donne dix pour cent sur les bénéfices; sk
je gagne trois cent mille francs, vous eip-
aurez trente mille ; si je gagne plus, vous
aurez plus; si je gagne moins; vous aurez-,
moins. "':-
Maître Gaspard, sans instruction pre-
mière et fort peu versé dans les difficultés
du droit, avait su depuis vingt ans appré-
cier tous les mérites d'un tel compagnon;
et ne voulait pas le lâcher dans cette af-
faire de longue haleine, il s'en serait bienf
gardé 1 D'autre part,. Frionnet, voyant;
qu'on ne l'oubliait pas tout à fait, laissa'
déborder son admiration; il se leva et sa
mit à tourner autour de la chambre, en
bégayant : , 1
— Monsieur Fix, je suis à vous corps et
âme!. Je vous conpais depuis longtemps..J
oui, je croyais vous connaître. mais j'é--
tais un âne, une bourrique, je n'avais pasq
seulement l'idée de votre capacité pour;
les grandes entreprises. Ça, monsieuc
Fix, c'est votre bataille d'Austerlitz..,;
quelque chose de grandiose.., Vous ête'
un homme de génie, un vrai 1
ERCKMANN-CH ATRIAN.
(1 suivre)
X* 2080 rn Sâ!ffif3î ~ôV~5~ 1875 ~.e numétte : 10 c. a* Départements : f 5 el. 30 Brumaire en 84 #* N4 -
RÉDACTION
S'adresser au Secrétaire de la Rédaction
De 4 à 6 heures du soir
18, RUE DE VALOIS, 18
Les manuscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
HU. Ch. LAGRANGE, CERF et qt
6, place de la Bourse, 6,
.,
ÂD M lîîl S T R AT 1011
M, 1rntt trB tAtoiBj if 4,
ABONNEMENTS
PARIA
trois mois. Ift »
Six mois. 2p »
DÉPARTEMENTS
Trois mois.13 50
Six mois.27 *,
» s
Adresser lettres et mandala '---
è. Mi ERNEST LEFÈ^gJp/i
v àDMINISTI||tSra*ÇfTttàNf 'C
LE DIMES SE M; BARBOill
Nous publions plus loin le discours
que M. Bardoux vient d'adresser au
centre gauche en prenant possession de
la présidence qui luit été votée à l'una-
nimité. Ce discours est, naturellement,
un éloge du centre gauche. Et il est cer-
tain que, sans être éperdu du centre
gauche, on peut trouver que le centre
gauche est un joli centre, quand on le
compare au centre droit.
Le centre gauche mériterait d'être
loué, ne fût-ce que pour avoir fait, et à
l'unanimité, M. Bardoux son président
le lendemain du jour où M. Bardoux
donnait sa démission de-sous-secrétaire
d'Etat au ministère de la justice, et pro-
testait ainsi publiquement et énergique-
ment contre la politique du cabinet
Buffaure. Par là le centre gauche s'est
approprié l'honneur de cette - protesta-
tion. M. Buffet avait signifiée au centre
gauche qu'il ne l'accepterait jamais pour
allié. La nomination de M. Bardoux a
été laréponse du centre gauche au mot
que M. Buffet avait dit à M. Christophle.
Ce dont l'ex-secrétaire d'Etat loue le
centre gauche, c'est, d'abord, d'avoir
été assez patriote et assez intelligent
pour comprendre et pour accepter, dès
les premiers jours, la nécessité de "la
République. « Vous êtes de ceux que le
patriotisme et la raison amenèrent, dès
les premiers jours de leur élection, à
reconnaître que la République était le
seul gouvernement possible et réalif
sable. » C'est ensuite de s'être « attaché
à la politique d'apaisement et de libé-
ration du territoire ». Le nouveau pré-
sident du centre gauche rappelle que
tout le monde n'a pas fait de même, et,
sans nommer la politique do combat,
il ne promet pas les applaudissements
de « l'équitable histoire » aux partis
qui « se sont réveillés » et qui n'ont,
pas voulu voir qu' « un gouvernement,
bien défini pourrait seul permettre le
relèvement e.
et vis-à-vis des étrangers M. Il félicite le
centre g~tMh~ée~M~
tion dans la revanche que le 25 février
a prise sur le 24 mai, et, il affirme que
le pays est 0t sera avec hemt
institutions républicaines.
Le céfttrè^ga$$iô^ àpr
plaudi le discours de son nouveau prési-
dent. Ce quo nous en applaudirons,
nous, plus q^e le ~est~,, c'est la netteté
avec laquelle M. Bardoux a constaté
que rAssemblée n'a plus qu'une chose
à faire : finir. Si cléricaut que soient la
plupart des membres de l'Assemblée
qui nous comble de sa présence Je-
puis cinq ans tout à l'heure, nous ne
sommes pas certain qu'ils éprouvent
une joie immodérée à s'eptendre dire
le : Frère, il faut mourir] ou le Mé-
mento qtiià fâtm bz et in pulverem re-
verteris. Souviens-toi que tu es Bara-
: 'Ï~~t't'~ ,).h?'¡i:';J .,
- ,. ;- ■
gnon, Mettetal, Anisson-Duperron, Pré- 1
tavoine, etc., et que tu vas retomber |
Baragnon, Mettetal, Anisson-Duperron,
)Prétavoine, etc. L'ex-secrétaire du mi
-nïstëre de M. Dufaure ne leur épargne
1 j
jpas cet avertissement, désagréable quoi-
que monastique. Il semble même pren-
dre plaisir à le leur enfoncer et - à le
leur retourner dans la poitrine. Il le leur
répète sous toutes les formes : « C'est
presque à la veille de la dissolution de
l'Assemblée que. » — Votre président
actuel, probablement le dernier. » -
« Nous continuerons, dans les dernières
heures. » C'est le glas de l'agonie, c'est
la cloche de l'enterrement.
Il n'y a guère eu que Charles-Quint
qui ait pris plaisir à ses propres funé-
railles, et personae ne s'étonnera si la
majorité versaillaise accueille avec plus
d'humeur que de reconnaissance un
discours qui lui sonne si cruellement sa
dissolution. Nous qui ne sommes - pas
de la majorité versaillaise; nous en
éprouvons une impression toute diffé-
rente, et, bien que d'ordinaire le son
des cloches ait le don de nous agacer
les nerfs, nous déclarons qu'il n'y a pas
dans tout l'orchestre de l'Opéra, ni au
Conservatoire, ni aux concerts popu-
laires, un seul instrument capable de
produire une musique qui vaille pour
nous le son de cette cloche-là.
AUGUSTE VACOUERIE.
a; UNE COPIE
Il résulte des négociations qui vien-
nent d'être entamées entre divers grou-
pes de l'Assemblée pour le choix des
soixante-quinze sénateurs inamovibles,
et des nouvelles reçues de province sur
la formation des listes de candidatures
au Sénat, que l'Assemblée a trouvé un
moyen excellent de se survivre à elle-
même. Elle renaîtrait dans le futur Sénat
avec ses divisions, ses groupes, ses
fragments moléculaires, ses, nuances
multiples. La haute Chambre serait la
copie photographique de la Chambre
actuelle dans ses traits les plus ténus et
dans ses linéaments les plus fugitifs.
Chacun y travaille de bon cœur.
Ce qui a empêché l'Assemblée de
, Versailles de fonctionner franchement,
ce qui lui a fait perdre tant de temps,
=en vaines tentatives monarchiques, sep-
tennales ou autres, ce qui lui a inspiré
des inventions Bigarres, comme là cons-
titution Rivet, le pacte de Bordeaux, la
trêve des partis, etc., c'est précisément
le nombre et la quasi-égalité de ses
fractions, Sauf en matière cléricale et
répressive, impossible de trouver une
majorité. Des groupes flottants, portés
ajorité. ,,iou s fl -- r
par le roulis parlementaire tantôt à
droite tantôt ,à gauche, ne permettaient
pas une allure régulière et prévue. Un
beau matin, le centre droit déjouait
toutes les prévisions en se laissant aller
à gauche, et un autre matin, le centre
gauche démentait tous les calculs en se
^optant à droite, sans compter les ap-
points ou légitimiste ou bonapartiste,
qui lie donnaient pas des notes moins
fantaisistes, dans çe charivari. La confu-
sion des doctrines et des langues a été
poussée à l'extrême dans cette Babel
qui va crouler en une imminente disso-
lution.
Eh bien ! on aspire à refaire cet état
de choses dans le futur Sénat. Il y a
trop de groupes dans l'Assemblée, et on
veut, sous prétexte de transaction, que
chacun de ces groupes envoie plusieurs
de ses spécimens à la haute Chambre.
On ne veut laisser emporter par le dé-
luge du suffrage universel aucune des
espèces qui ont crû et multiplié sur les
bancs du théâtre de Versailles : extrê-
me droite intransigeante, extrême droite
transigeante, droite pure, droite modé-
rée, centre droit Bocher, centre gauche
Wallon, groupe Declercq, groupe Pra.
dié, etc., etc. J'en passe, et non des
pires.
On espérait que toutes ces classifica-
tions artificielles disparaîtraient sans
laisser plus de trace dans l'histoire par-
lementaire que dans l'histoire naturelle.
On pensait que les deux Chambres fu-
tures se recruteraient plus nettement,
que les monarchistes aspireraient à n'y
envoyer que des monarchistes, et les ré-
publicains que des républicains; que
chacun, combattant sous sa bannière
largement et crânement déployée, se
débarrasserait de ces éléments mal dé-
finis qui feraient le désespoir du plus
habile micrographe.
Pas du tout. Si on y renonce pour la
future Assemblée, on s'y applique pour
le futur Sénat. C'est déjà avancé quant
aux soixante-quinze inamovibles. Le
centre droit et le centre gauche, comme
le demandait le discours de M. Ricard,
négocient dans ce sens, ce qui n'em-
pêche pas le centre droit de continuer
ses négociations avec les droites. On
admet les représentants de chaque
sous-groupe et de chaque demi-sous-
groupe. Si bien que les soixante-quinze
inamovibles, les soixante-quinze séna-
teurs à perpétuité porteraient au Sénat
toutes les nuances qui ont si souvent
stérilisé la carrière de la Chambre ac-
tuelle. *
Même travail dans le pays pour les
sénateurs amovibles et renouvelables. Il
nous arrive à chaque instant des listes
qu'on nous donne comme définitives et
où l'esprit de transaction a fait mer-
veille. Les noms les plus opposés s'y
trouvent accouplés de façon à donner là
aussi une représentation aux genres,
sous-genres, espèces et sous-espèces de
F Assemblée. Un député de la gauche
commence la liste, qui se termine par
un député étiqueté centre-droit Bocher
ou centre-droit Lavergne, passant par
le centre-gauche Ricard et le centre-
gauche Casimir Périer.
Je le répète, le résultat le plus clair
de cette méthode serait qu'en lisant les
débats du futur Sénat, on croirait lire
ceux de l'Assemblée actuelle; qu'en en
étudiant la physionomie, on y retrou-
verait la physionomie de l'Assemblée
actuelle; qu'en en analysant les divisions
parlementaires, on y retrouverait les
divisions de l'Assemblée actuelle. Ce
serait une simple transposition, avec
mêmes passions, mêmes antagonismes,
mêmes groupements factices, mêmes
teintes subtiles. Ce serait bien désa-
gréable. Il est des moules qu'il faut sa-
voir briser et des clichés qu'il faut jeter
à la fonte. Nous espérions qu'on nous
aurait, dans un sens ou dans l'autre,
fait du neuf ou de l'original. C'est d'une
côpie pure et simple que nous sommes
menacés.
S'il est impossible d'empêcher, pour
le choix des soixante-quinze perpétuels,
ces négociations, transactions, concilia-
tions, cotes mal taillées et concessions,
qu'on y renonce au moins pour les
choix réservés au pays. On y renonce
pour le scrutin d'arrondissement. Cha-
cun s'y présentera avec son drapeau,
dans tonte la lumineuse manifestation
de ses opinions. Qu'on en fasse autant
pour le scrutin sénatorial. Assez de ces
fusions, et réservons les arbitrages aux
valeurs de bourse ! C'est le seul moyen
d'avoir un Sénat aux partis nettement
tranchés et à la majorité sachant ce
qu'elle veut et où elle va, devant le
pays attentif.
L'Assemblée de Versailles demeure-
ra célèbre par son impuissance à consti-
tuer des majorités sérieuses et durables.
Cette impuissance est due à la multipli-
cité insensée des groupes qui s'y sont
formés. En puisant dans chacun de ses
groupes pour en diaprer les listes séna-
toriales, on ne fera que préparer la
même impuissance.
LOUIS ASSELINB.
e
LA séance
L'Assemblée, qui n'avait pas grand chose
à faire, s'est occupée d'une modification à
apporter au code de justice militaire, et
ensuite d'une pétition relative au déverse-
ment, sur le territoire de la commune de
Gennevilliers, des eaux d'égoût de Paris.
La pétition a été renvoyée aux deux minis-
tres de l'intérieur et des travaux publics.
A la fin de la séance, le rapporteur de la
commission des Trente est venu deman-
der à la Chambre de renvoyer à lundi la
discussion, en troisième lecture, de la loi
électorale, discussion qui devait s'ouvrir
demain. M. le rapporteur a motivé sa de-
mande sur le grand nombre d'amende-
ments envoyés à la commission et qui ne
lui ont pas permis d'achever son travail.
Mais'Gf qu'il n'a p{;s dit et ce qu'il aurait
dû dire, c'est que la plupart de ces amen-
dements ont pour auteurs des membres de
la droite. Ces messieurs se déclarent bien
pressés de partir, mais cela ne les empêche
pas de songer un peu à leurs intérêts, et
ceux qui sont par trop maltraités dans le
tableau des circonscriptions essaient d'ob-
tenir quelques modifications. De là le sur-
croit de travail imposé à la commission.
M. Buffet a paru très irrité de l'ajourne-
ment du débat. Aurait-il déjà des doutes
sur la solidité de la majorité du 11 novem-
bre? Il est certain du moins que nombre
de conservateurs ont des doutes sur les
résultats du vote par arrondissement.
Nous le disions l'autre jour, et plus d'un
symptôme significatif est venu confirmer
nos premières impressions, Il suffit de lire
les journaux officieux pour voir que la
distribution prochaine des candidatures
officielles excite déjà bien des jalousies et
bien des inquiétudes. Cela était inévita- -,
ble, et avec un peu plus de connaissance
des hommes, un peu moins d'étourderie
et de passion réactionnaire, on eût aisé-
ment évité cet écueil. A présent, il est
bien un peu tard, et revenir en arrière
n'est point aisé.
Autant la droite se montre soucieuse et
hésitante, autant la gauche semble tran-
quille et confiante. Chacun se prépare à
prendre le plus rapidement possible les
dispositions que la loi nouvelle rend né-
cessaires, et il n'y aura pas plus de défail-
lances dans la lutte par arrondissements
qu'il n'y en aurait eu dans la-lutte par
départements. Au surplus, rien ne montre
mieux l'état respectif et la situation d'es-
prit des deux partis que ce qui s'est passé
hier dans les bureaux, à propos de la loi
sur la presse. Les républicains l'ont em-
porté presque partout, et ils l'ont emporté
non-seulement parce que la loi n'est
guère défendable (ce qui n'eût pas empê-
ché les conservateurs de l'appuyer), mais
parce que ceux-ci sont dans un quasi-
désarroi, et que, dans plus d'un bureau,
ils n'ont pas même essayé de lutter.
Voilà où en est, trois ou quatre jours
après la prétendue grande victoire du 11
novembre, le parti qui a suivi M. Buffet.
On peut, dès lors, prévoir ce qui l'attend
dans un avenir prochain.
A. GAULIER.
PHYSIONOMIE DE LA SÉANCE. .j
Aujourd'hui, l'Assemblée a discuté une
pétition sur la désinfection delà Seine; nous
avons entendu à cesujetMM. Caillaux, Til-
lancourt et Krantz, qui ont bien arrangé le
pauvre fleuve; on a parlé de la putréfac-
tion en termes tout à fait réalistes. Une
pareille discussion vous dégoûterait des
« pleine-eau » pour longtemps.
Le cardinal archevêque de Paris assis-
tait au début de la séance ; et l'évêque
d'Orléans a pu voir sur la tête du prélat la
calotte rouge, objet de tant de vœux dé-
çus.
Un incident a terminé la séance. La com-
mission de la loi électorale, qui a beau-
coup de besogne à faire et beaucoup d'a-
mendements à examiner, n'est pas en état
de discuter demain. Elle a demandé la re-
mise du débat à lundi. Un cri d'horreur
est parti de la droite. La remise a été vo-
tée-, néanmoins, et par la gauche, et par
les centres. M. Buffet était dans la mino-
rité.
11 n'était pas content.
Il faut qu'il sente sa situation bien
chancelante et sa majorité bien incertaine
pour trembler d'un retard de deux jours.
Il compte les minutes, il calcule les secon-
des, il trépigne d'impatience. Tudieu 1
Quelle ardeur !- Quoi ! c'est là le même
homme si âpre, naguères, contre toute
pensée de dissolution! Comme on voit
qu'il a le pouvoir, et que, comptant s'en
servir, il a peur de le perdre !
Aussi, pour ces deux jours, nécessaires
assurément (les amendements distribués
aujourd'hui, forment une liasse, et il faut.
en outre que la commission révise les cir-
conscriptions électorales taillées par ses
prédécesseurs de l'ordre moral); pour ces
deux petites journées, M. Buffet a été jus-
qu'à dire, de son banc; que la commission
inventait des prétextes pour des délais.
Les gens qui votent en vain la dissolution
depuis 1872, contre M. Buffet, ont trouvé
l'accusation un peu roide. M. Bethmont,
qui avait entendu le propos, y a nettement
répondu, et l'on a vu un colloque fort
animé s'établir au pied de la tribune.
«
1'1 C
A droite, on continue à songer.
La droite commence à réfléchir aux con-
séquences des choses après qu'elle les a
votées. C'est s'y prendre un peu tard. On
ne s'est aperçu, parmi les conservateurs
de l'Assemblée, du vote de la Constitution
républicaine qu'après l'avoir repoussée
deux fois. On n'a commencé à calculer les
conséquences du scrutin d'arrondissement
qu'après l'avoir adopté. On se rejette sur
les places de sénateurs, mais leur chiffre
est limité.
Aussi la majorité de l'ordre moral re-
constituée jeudi se refroidissait-elle singu-
lièrement ces jours-ci. On sait comment
aujourd'hui elle s'est trouvée n'être plus
qu'une infime minorité. C'est pour cela
que M. Buffet est pressé. Qu'il prenne ¡n.
tience! Nous sommes assurés maintenant
que les opérations électorales vont com-
mencer.. Le choix des sénateurs nomtftêS j
- ,'. ,
par l'Assemblée se fera dans une semaine
ou deux ; le reste suivra à des délais ,
d'avance. L'Assemblée a vécu:'Gela.nou&<
suffit.
CAMILLE PELtETAN.
LES CHEMINS DE FER DE LA BANLIEUE
Nous publions, plus loin l'importantt
discussion qui a commencé Iiier, a4. con,,
seil général, au sujet des chemins de fei
projetés dans la banlieue parisienne. -.C'est
là une question très intéressainte, très peu
connue, et nos lecteurs nous sauront gré-
de leur en donner le compte-rendu avec
tous ses détails.
Occam
LA LOI SUR LA PRESSE
Les bureaux de-la Chambre se son y
réunis hier pour nommer la commission
chargée de l'examen du projet de loi sir
la presse.
Les députés républicatas «vaiç?»t pér4,
pondu exactement à -. la convocation; (fj
droite, on a remarqué — quoique le nom- ,
bre des membres présents fût très consi- -
dérable - des absences qui paraissent
avoir eu un motif politique. Beaucoup de
membres de l'extrême droite qui désap-
prouvent le projet se sont abstenus de ve-
nir dans leurs bureaux. On a remarqué
que d'autres, au contraire, qui étaient ve-
nus, ont voté par bulletins blancs ou se
sont abstenus, ou même ont voté pour le-
adversaires du projet Buffet-Dufaure.
Voici la liste des commissaires élus
et celle de leurs concurrents : !
i" bureau : M. Batbie (D), élu par 20 voix
contre 17 à M. George (G) et 1 à M. de
Gavardie (D). ;
28 bureau : M. Bertauld (G), élu par 21 voîx
et 7 bulletins blancs ; il n'y a pas eu de
concurrent. *•
f
31 bureau : M. Corne. (G), élu par 20 voix
contre M. Paris (D), 18.
4e bureau : M. Laboulaye (è), élu par tg;
voix contre M. de La Sicotièra (D),
15. - ..,.,:¡,' ;
58 bureau : M. Beaussire (G), élu par 18
voix contre M. Voisin (D), 15, et t bul-
letin blanc..
6* bureau : M. Cazot (G), élu par 25 voix
contre M. Giraud (D), 14.
78 bureau : M. Adnet (D), élu par 18 voix
contre M. Eymard-Duvernay (G), 17.
8* bureau : M. Eugène Pelletan (G), élu par
22 voix contre M. Grivart (D), 14 et 3
bulletins blancs. ,
9e bureau : M. de Peyramont (Dj, élu par
18 voix contre M. de Chofseul (G), 14. i
10# bureau ; M. Parent (G), élu par 19 !
voix, contre M. Peltereau-Villeneuve (D)
t4 et M. Raoul Duval (D), 1.
11° bureau ; Alfred Dupont (D), élu par 22
voix contre M. de Pressensé fG), 47.
126 bureau ; M. Mazeau (G), élu par 21
voix contre M, Boreau-Lajanadie (Dk,
16, et M. de Franclieu (D),
13e bureau : M. Jules Favre (G), élu sans!
concurrent. Les membres de la droite'
s'abstiennent.
44e bureau î M. MbertlMty ?G)fTO par'
20 voix contre M. de Saint-Pierre, de la
Manchte (D), 47 et 3 bulletins -blancs.
45e bureau ; M. Jules Ferry (G), élu à-l'u-
nanimité sans concurrent. Les membres
de la droite s'abstiennent. ,
On voit d'après ce tableau que la com-
mission se compose de 11 membres des
gauches et 4 des droites. c
Ce résultat, dès qu'il a été! connu dans
les couloirs de la Chambre, à causé une
profonde sensation. On y a vu la condam-
nation manifeste du projet Buffet-Dufaure.
Les ministres attachaient une telle impor-v
tance à cette nomination qu'ils s'étaient
tous rendus dans leurs bureaux respectifs.
pour donner leurs voix aux partisans du
projet. Les deux principaux même, MM.
Buffet et Dufaure, ont pris part, l'un dans
Feuilleton du Anppel
DU 20 NOVEMBRE
MAITRE GASPARD FIX
HISTOIRE
- "," : ',..
D'CN- - -
CONSERVATEUR
■ ; vu- ,
Après cela, durant quelques jours, maî-
tre Fix eut des affaires aux pays. Il partait
seul le matin en char-à-bancs, par la pluie
ou par la neige et ne, revenait que le soir.
Puis M. le maire se souvint tout à coup
que les - réparations du presbytère et de
l'église étaient en retard. Il remit ces
questions sur le tapis au conseil municipal;
et il déclara que les choses ne pouvaient
rester dans un pareil état,-qu'irallait lui-
même porter les réelâmations devant M. le
préfet, et que, si cela ne suffisait pas, il
pousserait l'affaire jusqu'à Paris, devant le
ministre.
Voir le Bappel du 8 au 19 novembre,
t
Le docteur Laurent, Hodel et beaucoup
d'autres s'émerveillaient de son zèle.
« Décidément disait le docteur, il doit
avoir un grade dans la congrégation : le
beau-frère dépenser de l'argent en voya-
ges sans intérêt. Ça n'est pas possible ! »
Il partit pourtant ; Faxland le conduisit
àVandëuvre, prendre la diligence Laffitte
et Gaillard, et toute cette semaine on ne
parla que de cela.
Frionnet, apprenant par la mère Simone,
que maître Gaspard avait tenu parole et
qu'il était à Paris, n'en revenait pas.
, - « Quelle singulière chose ! pensait-il à
part soi, négliger ses affaires pour celles
de la commune!- Est-ce que la gloriole
lui viendrait maintenant ? Est-ce qu'il
voudrait racheter ses vieux péchés et s'at-
tirer des honneurs en rebâtissant l'é-
glise? »
Ainsi se passait le temps à raisonner,
quand la nouvelle se répandit que M. le
maire était rentré de la veille au soir, en
bonne santé. Aussitôt le compère, fort in-
trigué, courut au Mouton-d'Or,
— Il est dans le cabinet, lui dit Mme Si-
mone sur le pas de la porte; il Vous attend.
, -- Hé ! vous voilà donc revenu, mon-
sieur le maire, s'écria-t-il en entrant tout
joyeux ; je commençais à trouver le temps
long après vous !
Maître Gaspard, en casaque de lainef
devant son bureau, lui tendit la main. f
— Ça ne m'étonne pas, Frionnet, dit-il,
nous travaillons depuis tant d'années en.
semble !. Asseyez-vous, asseyez-vous,
- Et l'église, et le presbytère, est-ce
que nous les aurons? demanda Frionnet
en s'asseyant.
— Oui, oui, c'est entendu. la subven-
tion est accordée.
- Ah t monsieur le maire, quel dévoue-
ment à la commune 1 je n'aurais jamais
cru que vous pousseriez l'abnégation de
vos intérêts jusque-là 1. Non, c'est trop
beau. trop beau !.
Maître Gaspard souriait.
- Sans doute, fit-il. Mais, voyez-vous,
Frionnet, j'ai profité de l'occasion. j'avais
à Paris d'autres petites affaires.
—• Ah! vous aviez des affaires ?..
- Oui, j'ai acheté le Hôvald, dit maître
Fix d'un ton de bonhomie un peu gogue-
nard; j'ai mené les deux choses de front.
vous comprenez.
Il observait son compère du coin de l'œil.
Frionnet était devenu rouge jusque dans
les cheveux, sa tignasse s'en hérissait ; il
souflait du nez, les lèvres serrées, sans
pouvoir articuler une parole,
— Le Hôvald I. Le Hôvald!. ftt-il à la
fin. Vous l'avez acheté. les bois. le châ-
teau. les étangs?
"— Oui, je les ai achetés.
Combien ?
+- Cinq cent mille francs.
; *— Cinq cent mille francs ! répéta le
Compère, c'est pour rien. pour rien !.
1 - Pas tout à fait, dit maître Gaspard
d'un ton de modestie, mais le marché n'est
pas mauvais, il est même bon. Je ne suis
fâçbé de l'avoir fait. Tenez, Voici l'acte
V
de vente passé devant Me Nicolo, notaire à
Paris, fit-il en tirant une liasse de papiers
de son portefeuille, et la présentant à son
compère.
Frionnet, les bras croisés sur la table et
les yeux tout ronds, se mit à lire; on l'en-
tendait souffler ; il ne disait rien.
— Mais. mais. fit-il en se levant. et
l'argent?. l'argent?. Vous avez obtenu
des termes pour le payement ?
— Non, il fallait de l'argent comptant ;
j'ai payé tout de suite. Voilà la quittance
en bonne forme.
Alors Frionnet n'avait plus rien à dire ;
l'étonnement, la stupéfaction l'empê-
chaient de témoigner à maître Fix toute
son admiration comme il aurait fallu, et il
demanda :
— Vous n'aviez pas la somme pourtant.
Cinq cent mille francs f.. Vous ne pouviez
pas l'avoir. Je connais assez votre for-
tune, monsieur le maire, pour me per-
mettre.
— Il paraît que je l'avais, lui répondit
maître Gaspard simplement, puisque la
quittance est là ! Et puis, Frionnet, que je
l'aie eue dans ma poche ou non, ça ne fait
rien à l'affaire, si j'ai pu me la procurer à
temps.
Ce coup était si beau, si hardi, que le
compère ne pouvait en revenir.
- Vous avez vu Sabouriau, bien sûr,
dit-il encore. Voyons, entre nous, mon-
sieur le maire, combien a-t-il reçu ?
Monsieur Sabouriau? pas un centi-
me. dit mâUtô Qjispjfrd, Comment, com-
ment pouvez-vous avoir des idées pareil-
les, Frionnet? Un si honnête homme !..
Il goguenardait évidemment. La satis-
faction du joueur habile, heureux, qui râ-
cle l'or et les billets de banque du tapis
vert et les empoche aux yeux des assis-
tants, stupéfaits de sa chance, tel était le
sourire de maître Gaspard en ce moment.
Quant à Frionnet, il avait la figure longue
d'une aune; et contemplant en lui-même la
magnificence de ce coup, dont il ne retirait
pas un centime, lui pourtant .qui le pre-
mier en avait fourni l'indication, involon-
taire il est vrai, mais enfin l'indication
positive, il était devenu muet comme une
carpe au fond de son vivier, les deux mains
sur ses genoux, le nez en arrêt devant la
quittance, regardant sans voir. Une sorte
d'amertume, d'envie l'empêchait de rien
dire, quand Gaspard Fix, comprenant sans
doute ce sentiment naturel, lui posa la
main sur l'épaule en disant :
- C'est pourtant à vous, Frionnet, que
je dois l'idée de la chose, et je veux que
Vqus en ayez aussi votre part.
Frionnet se redressa lentement.
î— Nous allons défricher, dit maître Fix.
.:- Défricher, monsieur le maire? Mais
il faut une autorisation du gouvernement.
- Ne vous en inquiétez pas. tenez.
la voici î ',.
—Encore!. murmura Frionnet ; quelle
chance!.
— On a toujours de la chance, quand
on sait se remuer, répliqua le compère.
Mais il ne s'agit pas de cela; nous allons
défricher et je vous prends pour mon
homme, d'affaires. Le petit Marcel, votre
clerc, gérera bien l'étude en attendant; et
vous, Frionnet, en considération de tous'
les vieux services et de vos solides con-
naissances, je vous donne pour mener le,
défrichement rondement, pour dresser les
actes et surveiller l'exploitation, je vou-4
donne dix pour cent sur les bénéfices; sk
je gagne trois cent mille francs, vous eip-
aurez trente mille ; si je gagne plus, vous
aurez plus; si je gagne moins; vous aurez-,
moins. "':-
Maître Gaspard, sans instruction pre-
mière et fort peu versé dans les difficultés
du droit, avait su depuis vingt ans appré-
cier tous les mérites d'un tel compagnon;
et ne voulait pas le lâcher dans cette af-
faire de longue haleine, il s'en serait bienf
gardé 1 D'autre part,. Frionnet, voyant;
qu'on ne l'oubliait pas tout à fait, laissa'
déborder son admiration; il se leva et sa
mit à tourner autour de la chambre, en
bégayant : , 1
— Monsieur Fix, je suis à vous corps et
âme!. Je vous conpais depuis longtemps..J
oui, je croyais vous connaître. mais j'é--
tais un âne, une bourrique, je n'avais pasq
seulement l'idée de votre capacité pour;
les grandes entreprises. Ça, monsieuc
Fix, c'est votre bataille d'Austerlitz..,;
quelque chose de grandiose.., Vous ête'
un homme de génie, un vrai 1
ERCKMANN-CH ATRIAN.
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