Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1870-02-01
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 01 février 1870 01 février 1870
Description : 1870/02/01 (N259). 1870/02/01 (N259).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
N" Ze$. — Mardi i r février 1810.
Le 0 nUmélO: 15 c. — Départements : 20 c.
12 pluviôse an 78, — N* 258.
&É0ACTIM
S'idlene: à M. ALBERT BAHB1EU1
De 3 à 7 h. du soir
18, rue de .Valois, U.
Les manuscrits non insérés ne saut pas fcaJ¡U"
ANNONCES
kM. 01. LAGRANGE, CERF ET Cf
6. place de la Bourse, 6.
ADlIll\lSTBA TIO¡W
S'¡drenel' à M. AUGUSTE PANiS
--=-- f
ABONNEMENTS
1 * FAR»
Cfi ffi j!»,, ; , 5 ta
tr^i* Dûcif* , , 13 50
D&PÀRTEwarrt
t'a niûîs.. ; ; 6 tt,:',.
TrolBoii. îî >♦ j
BUREAUX e_-
15, boulevard Monimatre,14
& '44 -.
LE CABIN ET^JIlû^K
Lire une lettre qui ne vous est pas
adressée! Connaissez-vous uira plus
grosse indiscrétion? SAisir frauduleuse-
ment une conifdence destinée. à autrui,
violer le secret d'une intimité, épier à
leur insu deux esprits qui s'épanchent,
assister furtivement et lâchement au dés-
habillé de deux cceurs, surprendre dans
leur nudité sacrée les affections. les plus
proches, attenter hypocritement à la pu-
deur des âmes! Est-il un homme d'hon-
neur capable de ces vilenies?
Eh bien, ce qu'un honnête homme ne
ferait pas, des gouvernements prétendus
honnêtes l'ont fait et le font encore.
*
* * r
La violation du secret des lettres est
une tradition de l'ancien régime. Quand
le cardinal Richelieu attribua aux cour-
riers royaux le service des postes jus-
que-là réservé aux messagers de l'Uni-
versité, il avait une arrière-pensée
qu'explique ce mot profond de Montes-
- quieu :
a Les conspirations dans l'Etat sont
devenues difficiles parce que, depuis
l'invention des postes, tous les secrets
particuliers sont dans le pouvoir du pu-
blie. »
Louis XIV perfectionna l'œuvre de
Richelieu, en établissant un bureau
t: de police politique, chargé spécialement
de surveiller les correspondances. Les.
divers emplois de ce bureau étaient
conférés héréditairement aux membres
de la même famille, dressés à leur mé-
tier par une éducation toute spéciale.
Ces fonctionnaires occultes étaient aussi
discrets qu'habiles. Des qu'un person-
nage politique était soumis à leur con-
trôle, ils prenaient l'empreinte de son
sceau, décachetaient et recachetaient
ses lettrés avec une telle dextérité, que
la fraude ne pouvait pas même être
soupçonnée. Par ce moyen fort simple,
la nionarehi e bourbonnienne espionnait,
non-seulement la France, mais l'Eu-
rope. Elle perçait toutes les murailles
et pénétrait sous tous les toits. Elle
sondait les plus fiers palais comme les
plus humbles chaumières. Cabales, com-
plots, intrigues diplomatiques, menées
ténébreuses, elle devinait tout. Princes
du sang, secrétaires d'Etat, ambassa-
deurs, nobles et vilains, elle déchiffrait
tout. L'OEil-de-Bœuf, du fond du cabi-
net noir, guettait le monde entier.
«
* *
Cet immense espionnage dura jusqu'à
la Révolution.
La Révolution inaugura un régime
nouveau, —- le régime de la probité po-
litique.
Aujnois de juillet'1790, - à une épo-
que où les émigrés conspirent de tous
côtés contre la nation, — des dépêches
du comte d'Artois sont saisies sur la per-
sonne dte M. de Castelnau, ministre de
France à Genève. Un député de la Con-
stituante demande a que toutes les let-
tres - interceptées depuis les troubles de
Paris soient remises dans un dépôt sûr,'
pour être présentées à l'Assemblée na-
tionale quand elle le jugera convena-
ble ». Mais Mirabeau s'élève contre cette
proposition :
(f. Est-ce à un peuple qui veut deve-
nir libre à emprunter les maximes et les
procédés de la tyrannie? Peut-il lui con-
venir de blesser la morale après avoir
été si longtemps victime de ceux qui la
violèrent?.
« Qu'apprendrons-nous par la honteuse
inquisition des lettres ? De viles et sales
intrigues, des anecdotes scandaleuses,
de méprisables frivolités.
a Eh quoi ! lo dernier asile de la liberté
serait violé par ceux mêmes que la na-
tion a délégués pour assurer tous ses
droits! Les plus secrètes communica-
tions de l'âme, les conjectures les plus
hasardées de l'esprit, les émotions d'ure
colère souvent mal fondée, les erreurs
souvent redressées le moment d'après,
pourraient être transformées en déposi-
tion contre des tiers 1 Le citoyen, l'ami,
le fils, le. père deviendraient ainsi les juges
les uns des autres sans le savoir! ils
pourraient périr un jour l'un par l'autre !
Et l'Assemblée nationale ferait servir de
- base à ses jugements des communica-
Tions éqiuïôqiies, quelle n'a pu se pro-
curer que pax un crime ! »
Mirabeau repousse avec l'éloquence
du génie indigné une motion qui désho-
norerait l'Assemblée, et l'Assemblée,
acclamant l'orateur, passe à l'ordre du
jour.
La Constituante fait mieux encore :
elle convertit en loi le généreux prin-
cipe énoncé par Mirabeau. Le 14 août
1790, elle proclame que le secret des
lettres est inviolable. Le 26 août, elle
décrète que désormais « les administra-
teurs et les employés des postes prête-
ront serment de garder fidèlement le se-
cret des lettres et de dénoncer toutes les
contraventions qui parviendraient à
leur connaissance ». En même temps,
elle prononce contre les délinquants des
peines rigoureuses : l'amende, la prison,
la privation des droits civiques.
Après la fuite à Varennes, les scrupu-
les de l'Assemblée sont soumis à une
épreuve décisive. Deux lettres adressées
-au roi ont été saisies aux Tuileries. Ces
deux lettres peuvent fournir des rensei-
gnements précieux sur les coupables re-
lations de Louis XVI. Elles sont, d'ail-
leurs, décachetées. — Qu'importe! l'As-
semblée refuse d'en entendre la lecture :
elle ordonne que ces lettres seront reca-
chetées et remises à leur destinataire.
Elle se venge de l'excès de la trahison
par l'excès de la loyauté.
*
* *
La Révolution avait supprimé le ca-
binet noir. L'empire le rétablit.
Napoléon le Grand restaure l'inqui-
sition épistolaire, consacrée par Louis
le Grand.
Le despotisme* reprend sa besogne
ténébreuse. La pensée, sous quelque
forme qu'ello se produise, - impri-
mée ou manuscrite, — est soumise à
la surveillance de la police. Les préfets
s'arrogent le droit de faire saisir à la
poste toutes les lettres suspectes. Les
correspondances les plus curieuses et les
plus intéressantes, les plus amusantes
et les plus graves, sont résumées dans
un rapport au maître, lia républicain
écriât à un républicain, un royaliste à un
royaliste, un mari à sa femme, un frère
à sa sœur, un fils à sa mère, un amant à
sa maîtresse : et aucun d'eux n'aperçoit
l'empereur qui, tandis qu'ils tiennent la
plume, regarde par-dessus leur épaule.
Napoléon assiste, invisible, à tous les
tête-à-tête, à tous les rendez-vous, à
toutes les causeries. Témoin railleur ou
terrible, pour qui les passions humaines
restent une comédie, quand elles ne de-
viennent pas un drame !
Dans ses conversations de Sainte-
Hélène, Napoléon s'est excusé, aussi
bien qu'il l'a pu,-d'avoir violé le secret
des lettres. Il a invoqué l'exemple de
Louis XIV. Il a plaidé les cii constances
atténuantes. Mais, dans ce plaidoyer
même, que d'aveux accablants pour sa
mémoire ! Ecoutez le Mémorial : «. Quoi
qu'on en ait dit dans le public, on lisait
très peu de lettres à la poste, assurait
l'empereur. Celles qu'on rendait aux
particuliers, ouvertes ou reeachetées, n'a-
vaient pas été lues la plupart du temps;.
jamais on n'en eût fini. Ce moyen était
employé bien plus pour prévenir les cor-
respondances que pour les découvrir.
Les lettres réellement lues n'en conser-
vaient aucune trace ; les précautions
étaient des plus complètes. »
Tout en affirmant qu'on lisait très peu
de lettres. à la poste, Napoléon recon-
naissait avoir consacré à la violation des
correspondances gix cent mille francs
par an l *
Six cent mille francs par an ! Que d'en-
veloppes n'a-t-on pas pu décacheter
pour une pareille somme !
Du reste, l'empereur désapprouvait
l'institution du cabinet noir, non-comme
immorale, mais comme inefficace. Il se
plaignait de ce que ses ennemis les plus
dangereux avaient échappé à cet espion-
nage, et il disait en soupirant à M. de
Las Cases ce mot inouï : « Il y a tel de
mes ministres dont je n'ai jamais pu
surprendre une lettre » ! •
*
* *
Sous la Restauration et sous la mo-
narchie de Juillet, le cabinet noir resta
fermé. La violation du secret des lettres,
normale sous l'empire, devint alors un
fait exceptionnel, contre lequel protes-
tèrent publiquement les ministres du
régime parlementaire. Il appartenait
toutefois à la République de rétablir une
loyauté complète dans le service postal;
et c'est cet intègre et honnête Bastide
a. dl' 1 d *
qui, en dépit des protestations du sieur
Carlier, supprima, au ministère des af-
faires étrangères, certain bureau de dé-
cacheta go par lequel passaient parfois,
avant Février, les dépêches diploma-
tiques.
, Chose étrange ! Ce fut un républicain
qui mit fin au système d'espionnage or-
ganisé par les rois — contre les rois !
Après le coup (rElat, la tradition na-
poléonienne fut reprise. *
Qu'était-ce que la violation du secret-
des lettres pour uu gouvernement qui
avait violé tant dechoses !
Qu'importe- une exaction de plus ou
de moins?
#-.. -
.Quand on a brise une Constitution,
crocheté les port.d'une Assemblée na-
tionale, enlevé nuitamment de leur lit
des représentants du peuple, défoncé à
coups de canon les maisons d'un boule-
vard , ensanglanté Paris, saccagé les
provinces, se ferait-on scrupule de des-
celler une enveloppe ! Craint-on d'être
indiscret avec les gens que l'on mi-
traille? Vous me ruinez, vous me dé-
portez, vous m'expulsez, vous m'en-
levez mon toit, ma famille, ma patrie,
ma fortune, mon bonheur, et vous vous
feriez scrupule d'escamoter ma corres-
pondance !
Dans une des nombreuses visites
qu'un cousin du dictateur de Décembre
faisait en 18o2 à quelques prisonniers
delà Conciergerie, je me rappelle par-
faitement avoir entendu la voix qui au-
jourd'hui retentit impérialement dans
les salons du Palais-Royal jeter ce cri
indigné : Ils ont rétabli le cabinet llùil'!
Ce rétablissement du cabinet noir, qui
mettait en fureur la future altesse, me
parut tout simple, à moi, futur exilé. *
*
1 * *
Quelques mois plus tard, quand j'eus
quitté la France, je fus à même d'appré-
cier les services rendus à l'empire par
ce cabinet. Toutes les lettres qui parve-
naient aux proscrits portaient des traces
évidentes de la curiosité du gouverne-
ment français. Celle-ci, collée avec un
peu de gomme, avait été recollée tant
bien que mal par des mains imparfaite-
ment lavées. Celle-là, protégée par un
vaste cachet, était incisée sur le côté.
Cette autre, scellée primitivement avec
la cire, était rescellée avec un pain à
cacheter. Je vois encore d'ici une lettre
do Béranger, qui parvint à Marine-
Terrace, liée par une ficelle, avec cette
mention en langue anglaise : Arrivée
décachetée au général post-office.
Les honnêtes facteurs d'outre-Manche
étaient tout d'abord scandalisés de ces
procédés de la poste impériale : ils ont
fini par s'y habituer.
Car, il faut le dire, ces voies de fait
épistolaires ont duré des années. Pen-
dant des années, la police bonapartiste
a espionné, presque dans les plus inti-
mes mystères de la vie privée, ceux
qu'elle avait bannis. S'aiitorisant d'un
arrêt de la cour de cassation, daté du
21 novembre 1853, lequel, déclarait que
les correspondances par les s'our-
dissent et se commettent les attentats por-
tés à la paix publique, à la propriété et à
la sûreté des citoyens, sortent de la clam
de celles qui doivent être protégées par la
/oï, — la police bonapartiste n'a cessé
de soumettre à un triago occulte les
lettres adressées aux proscrits et écri-
tes par les proscrits. Je n'étonnerai per-
sonne en disant que, l'année derrière,
la correspondance de l'auteur de la
Lanterne, réfugié en Belgique, excitait
particulièrement la curiosité du gouver-
nement français. Et le futur député de
la Seine disait alors fort drôlement (pie
le moyen le plus sûr de faire parvenir
une pétition à M. Yandal était de l'a-
dresser à. Henri Rochefort ! -
Mais hàtons-nous de le dire pour être
complètement véridique, il n'est pas
nécessaire d'être proscrit pour être ho-
noré des indiscrétions officielles. Qui-
conque est soupçonné d'hostilité aiï. ré-
gime actuel, — royaliste ou républicain,
— est placé sou la surveillance de la
haute police. Le pouvoir tutélaire qui
nous régit se croit en droit de connaître
tout ce que peuvent écrire contre lui ses
adversaires4. Tous les préfets de l'empire
peuvent, quand bon leur semble, se
transformer en officiers de police judi-
ciaire, et, par une brusque sommation,
faire saisir dans tous les bureaux de
poste les correspondances suspectes. Il
est vrai que, pour obtenir justice de cos,
violences arbitraires, vous pouvez re-
courir, au conseil d'Etat ! Mais plaignez-
vous donc des abus do l'empire aux Con-
seillers de l'empereur!
- *
* *
En dehors dos moyens connus, le gou-
vernement a, pour découvrir nos se-
crets, des expédients qui lui sont pro-
pres.
Voulez-vous une preuve toute récente
de la singulière double vue du pouvoir
impérial?
Dans l'après-midi du 12 janvier, -
de cette funèbre journée où toutes les
troupes étaient consignées, - un jeune
sous-officier d'un régiment caserne à
Paris remettait à un commissionnaire une
lettre adressée à deux journaux démo-
cratiques. Cette lettre exprimait le re-
gret éprouvé par cent dix-huit soldats
de n'avoir pas pu assister aux funérailles
du journaliste républicain assassiné par
un prince impérial.
Trois heures après que cette lettre
avait été remise à son adresse et vingt-
quatre heures avant qu'elle fut publiée,
", - le sous-officier était arrêté et enfer-
mé dans un cachot souterrain de la ca-
serne.
Que ; s'était-il passé dans cet inter-
valle dé trois heures? - Mystère !
Ce qui est certain, c'est qu'un agent
quelconque de l'autorité avait décacheté
la généreuse missive destinée à la presse
démocratique, et en avait dénoncé l'au-
teur.
Le sous-officier, adoré de ses cama-
rades, fut délivré dès le lendemain ma-
tin. On le rattrapa au moment où, dans
des habits bourgeois prêtés par un ami,
il allait s'éloigner de Paris par une des
gares du Midi. Incarcéré de nouveau, il
parvint à s'évader de nouveaut toujours
aidé par d'héroïques complicités. Enfin,
il gagna la Belgique. -
C'est à Bruxelles que, guidé par une
inspiration dont je le remercie, il est
venu frapper à ma porte, après plusieurs
jours d'angoisses.
C'était le vendredi 21 janvier. Il ge-
lait à pierre fendre. Le malheureux
jeune homme mourait de faim et de
froid. Vous devinez comment il fut ac-
cueilli !
Aujourd'hui, gràco à l'active inter-
vention de Bojchot, il a trouvé un em-
ploi qui lui promet de vivre à l'abri de
la misère - et de la police bonapartiste.
t *
* *
Après cet exemple si récent, qui ose-
rait prétendre que le secret des lettres
eit respecté par le pouvoir impérial?
Allez, maître Oliivier, vous aurez
beau faire, vous ne parviendrez pas à
transformer le régime actuel en régime
parlementaire!' Quoi que vous disiez,
le dictateur de Décembre gardera tou-
jours la direction suprême de l'armée et
de la police. Vous avez pu obtenir de
lui l'éloignement de M. Rouhcr et de
M. Haussmann. Vous ne lui arracherez
pas la destitution de M. Canrobert, ni
celle de M. Pietri, ni celle de M. Yan-
dal. Ces messieurs sont les confidents de
la monarchie napoléonienne. Vous et
vos collègues, vous n'êtes que ses com-
nis ! •
',\ Quelques journaux ont annoncé ré-
cemment la suppression du cabinet noir.
0 naïveté !
De tous les cabinets (y compris le vô-
tre, maître Oliivier) le cabinet noir est
le seul durable.
Le cabinet noir est un laboratoire
mystérieux et immémorial dont la clef,
léguée par Louis XIV à Napoléon, a été
retrouvée sous l'oreiller do Sainte-Hé-
lène. C'est un caveau profond où les ini-
tiés seuls travaillent à l'œuvre sans nom
du despotisme. C'est le sanctuaire si-
nistre où règne, depuis dix-huit ans, la
nuit du Deux-Décembre.
On ne parviendra à détruire le cabi-
net noir qu'on,démolissant tout l'édifice
impérial. •
{ Patience!
f * FRÀXÇ015-VICT0R Ilt'GO.
LA PETITS G UEIUtE
Cette affaire des Archives est bien cu-
rieuse. Le soûverain a fait enlever du dé-
pôt vingt-huit pièces importantes qui le
concernaient. 11 s'agissait de l'aigle de Bou-
logne et du pâté de Strasbourg. On con-
çoit très Lien que, lorsqu'un homme a des
histoires comme celles là dans son pssé,
il tâche d'en atténuer le souvenir. Mais
puisque le chef de l'Etat voulait détruire
tout ce qui pouvait lui faire du tort auprès
de la postérité, il aurait dû supprimer du
même coup les papiers relatifs au Deux-
1
Décembre et toute l'histoire de son règne.
Cela eût été simple et habile. La famiile
impériale y eût gagné. Le Michelet de l'a-
venir, ne trouvant point de documents of-
fidet, ni sénatus-consultes, ni discours
impériaux, ni rien, aurait peut-être douté
de l'existence de l'empire. Et peut-être
aurait-il écrit :
« Les orgies révolutionnaires recommen-
cèrent en 1851. Le parti démocratique et so-
cialiste organisa un massacre dans Paris.
Ce paiti alla plus loin. Il calomnia odieu-
sement ses adversaires, et il répandit le
bruit (longtemps accrédité) que le mas-
sacre avait été ordonné par un descendant
du vainqueur d'Austerlitz.
« Aujourd'hui ia vente est connue.
« Les socialistes organisèrent encore une
expédition au Mexique., pen laat laquelle
moururent quatre-vingt mille hommes. Ils
spéculèrent à Paris sur les terrains; ils gou-
vernèrent despotiquement et conduisirent
la France à deux doigts de sa ruine.
« Ils se rendirent olieux à tout le monde.
Etdansles derniers temps, on n'osait même
plus les comparer à S. M. le roi Louis-
Philippe qui, comme on sait, cependant,
avait voulu tuer d'un coup de pistolet le
brave commandant -d'infanterie Col-Puy-
gellier. »
Voilà ce qu'auraient dit les historiens, et
ces simples mots eussent rendu impossi-
ble en France le rétablissement de la Répu-
blique. La démocratie était « coulée » pour
toujours. -
Le plus amusant, dans cette affaire des
Archives, c'est le décret. Rendre un décret
pour s'approprier des papiers qui ne vous
appartiennent pa?, cela est charmant. Un
décret ! mon Dieu! Ceci n'est pas à moi. Je
rends un décret. Vlan ! c'est à moi. Quoi
•de plus simple?
Quelle leçon pour nous autres bour-
geois! Vous avez, je suppose, envie de la
montre de votre voisin. Ce voisin ne veut
pas la vendre. Qu'avez-vous à faire? Rien
que de Lien facile. Vous achetez une
feuille-de papier. Vous rendez un décret.
Vous le faites signer par le concierge et
contre-signer par le trotteur. Ensuite vous
prenez la montre. 11 n'est rien de plus
légal. -
Votre conscience pourra être tranquille,
et M. Maurice Richard se déclarera satis-
fait.
Edouard Lockroy.
Ii LIBERTÉ DE LA PRESSE
Notre collaborateur Charles Hugo a reçu
hitr, 30 janvier, l'assignation suivante :
« A la requête de M. le procureur impé-
rial près la cour impériale de Paris,
« Nous François-Jules Mathieu,huissier-
audiencier en ladite cour, avons donné as-
signation au nommé :
« Hugo (Charles), homme de lettres, en
parlant ainsi qu'à l'original,
'r( A comparaître en personne, le 2 fé-
vrier prochain, à l'audience de la cour
impériale, chambre des appels, pour être
entendu sur l'appel interjeté par lui et
Barbieux, d'un jugement qui le condamne
à quatre mois de prison et giilJe francs
d'amende ;
«Lui déclarant que, faute par lui de
comparaître, etc. »
Notre collaborateur Charles Hugo a reçu
hier, 30 janvier, l'assignation suivante :
« A la requête de M. le procureur impé-
rial près la cour impériale de la Seine,
« Nous, François-Jules Mathieu, huis-
sier audiencier en ladite cour, avons donné
assignation au nommé :
« Hugo (Charles), homme de lettres, en
parlant ainsi qu'à l'original, -
« A comparaître en personne, le 2 février
prochain, à l'audience de la cour impériale,
chambre des appels, pour voir statuer sur
l'opposition formée par lui contre un arrêt
qui le condamne à quatre mois de prison
et mille francs d'amende;
« Lui déclarant que, faute de comparaî-
tre, etc. n ,
Nos lecteurs vont se demander quelle
idée nous avons de répéter deux fois la nièr
me assignation. 4
Onos lecteurs! ce n'est pas la même.
La première a rapport à notre procès du
7 janvier, et la seconde à notre procès du
19. Il est vrai que nos deux procès ont un
furieux trait de ressemblance : notre con-
damnation.
Le parquet les fait revenir le même
jour et réunit les deux condamnations de
M. Charles Hugo. Nous ne pouvons voir là
qu'une galanterie de M.Emile O'livier, qui
se sera dit que le 2 février était le jour de
11 reprise de Lucrèce Borgia, et qui aura
voulu que, ce jour-là, le fils de l'auteur eût
un bouquet de mois de prison.
H va sans dire que notre gérant, Albert
Barbieux, est assigné avec M. Charles Hugo,
pour entendre confirmer ses cinq mois de
prison et ses deux mille francs d'amende.
Robert flyenne.
c
LES ON-DIT DU BOULKVARD
IVer soir, un peu avant dix heures, les
passants de la rue Saint-Honoré étaient
arrêtés devaot le n° 286 (en face de la ru-j
des Pyramides) par des cris terribles.
En même temps, un homme sortait dà
la maison, en bras'de chemise, pieds nus,
ensanglantés, et se précipitait dans la di-
rection de Saint-Roch. *
Des sergents us villè fie tardaient pas &
le saisir et à l'emmener au poste.
Pendant ce temps, on montaita.ns la
maison où l'on avait entendu des cris; on
entrait dans une chambre du deuxième
étage, dont la porto était ouverte, et on y
trouvait une femme morte.. 4
Une jeune femme; de tredte ans environ,
jolie.
C'était une femme plus que facile, entre
la femme légère et la fille, - ;
C'est un de ses amants qui l'a tuée.
Il a dit qu'après l'avoir frappée il l'avait
embrassée, et que, s'il s'était précipité dans
la rue, c'était pour aller chercher du se- a
cours.
* *
* *
Eh bien ! /mais n'admirez-vous pas
comme la peine de mort empêche l'assas-
sinat?
Il n'y a pas tout à fait quinze jours que
Troppmann a été exécuté, et mardi der.
nier, pas huit jours après, a la population
de Poissy était mise en émoi par l'horrible
- assassinat » que nous avons raconté hier,
— et avant-hier soir « un assassinat a
été commis dans des circonstances atro-
ces ? au numéro 83 du faubourg Saint-
Honoré, - et hier soir, voici un nouvel
assassinat, à quelques maisons de distance,
comme pour prouver que le meurtre e:'ot
contagieux.
Voilà de quelle façon l'échafaud abolit
le meurtre !
Nous sommes de ceux qui croient que,
loin de supprimer les assassins, les exécu-
tions en produisent, et que c'est un mau-
vais moyen pour empêcher de tuer qUtS
d'en donner l'exemple.
- *
* *
Minuit. — Je reviens de la sue Saint-
Honoré, je suis entré dans la maison où le
crime s'est accompli, et voici les rensei-
gnements que j'ai recueillis :
L'assassin s'appelle Bugène Durand. Il à
quarante-huit ans. Il demeurait rue Ronce,
numéro 7. Il se dit menuisier.
J'ai vu la morte. Elle s'appelait José-
phine Rispal. -Elle avait de trente-cinq à
trente-huit ans.
lis avaient passé la journée à quatre, »,
elle, sa mère, sa sœuij et lui. Vers cinq
heures, la mère et la sœur sont parties.
Une heure après, il est sorti, seul, ivre déjS,
pour aller boire de l'absinthe, en atten-
dant l'heure de souper.
Il est revenu plus tard qu'il n'avait pro-
mis. De là, une querelle.
*
t, * *
Un moment après son retour, la femme
a crié, puis elle est descendue appelant la
concierge au secours, et montrant sa tempe
blessée d'un coup de couteau.
La concierge, qui connaissait la bruta-
lité de l'homme, n'a pas osé remonter avec
la femme. D'ailleurs, ils se disputaient et
se battaient tout les jours, et elle ne se dé.
rangeait pas pour si peu.
Joséphine Hispal a demandé de l'eau,
s'est lavé la tempa, et est remontée seule.
Elle a trouvé sur le palier Eugène Du-
rand, de plus en plus furieux et brandis-
sant son couteau.
Il lui en a porté deux coups, un dans
chaque sein. -
Le médecin qu'on était allé chercher,
le docteur Chammartin, nous a dit que Id
premier coup avait dû être celui du seiu
droit, qu'après ce premier coup il y avait
eu vraisemblablement une lutte, et que le
second coup — au cœur — avait dû pro-
duire la mort immédiate.
C'est alors que l'assassin s'est sauvé dans
la rue. Ce qui semble prouver une futta
violente, c'est qu'il était absolument cou-
vert de sang.
, *
* *
A onze heures et demie, on est venu
avec une civière prendre le corps pour le
porter à la Morgue, où va être faite l'au-
topsie.
On l'a enveloppé de couvertures. Les
assistants ont remarqué que pendant l'opé-
ration, le commissaire de police qui la di-
rigeait avait son cigare à la bouche.
Joséphine était, disait-on, enceinte.
Quelques cadres pendus aux murs de la
chambre disaient tout de suite les mœurs - -
de la locataire.
*
* *
- • Au rédacteur du rappel :
MODsieur,
Vous avez cru devoir reproduire dans votra
numéro du 29 ma lettre concernant la peine
de mort en Russie, mais vous croyez pouvoir
me réponde que, si la peine de mort n'existe
pas, le kn&ut reste.
Je crois en efl'ot, monsieur, que la France a -
quelque chose à envier à la Russie; car, si la -
bastonnade e*t encore appliquée chez vous,
Le 0 nUmélO: 15 c. — Départements : 20 c.
12 pluviôse an 78, — N* 258.
&É0ACTIM
S'idlene: à M. ALBERT BAHB1EU1
De 3 à 7 h. du soir
18, rue de .Valois, U.
Les manuscrits non insérés ne saut pas fcaJ¡U"
ANNONCES
kM. 01. LAGRANGE, CERF ET Cf
6. place de la Bourse, 6.
ADlIll\lSTBA TIO¡W
S'¡drenel' à M. AUGUSTE PANiS
--=-- f
ABONNEMENTS
1 * FAR»
Cfi ffi j!»,, ; , 5 ta
tr^i* Dûcif* , , 13 50
D&PÀRTEwarrt
t'a niûîs.. ; ; 6 tt,:',.
TrolBoii. îî >♦ j
BUREAUX e_-
15, boulevard Monimatre,14
& '44 -.
LE CABIN ET^JIlû^K
Lire une lettre qui ne vous est pas
adressée! Connaissez-vous uira plus
grosse indiscrétion? SAisir frauduleuse-
ment une conifdence destinée. à autrui,
violer le secret d'une intimité, épier à
leur insu deux esprits qui s'épanchent,
assister furtivement et lâchement au dés-
habillé de deux cceurs, surprendre dans
leur nudité sacrée les affections. les plus
proches, attenter hypocritement à la pu-
deur des âmes! Est-il un homme d'hon-
neur capable de ces vilenies?
Eh bien, ce qu'un honnête homme ne
ferait pas, des gouvernements prétendus
honnêtes l'ont fait et le font encore.
*
* * r
La violation du secret des lettres est
une tradition de l'ancien régime. Quand
le cardinal Richelieu attribua aux cour-
riers royaux le service des postes jus-
que-là réservé aux messagers de l'Uni-
versité, il avait une arrière-pensée
qu'explique ce mot profond de Montes-
- quieu :
a Les conspirations dans l'Etat sont
devenues difficiles parce que, depuis
l'invention des postes, tous les secrets
particuliers sont dans le pouvoir du pu-
blie. »
Louis XIV perfectionna l'œuvre de
Richelieu, en établissant un bureau
t: de police politique, chargé spécialement
de surveiller les correspondances. Les.
divers emplois de ce bureau étaient
conférés héréditairement aux membres
de la même famille, dressés à leur mé-
tier par une éducation toute spéciale.
Ces fonctionnaires occultes étaient aussi
discrets qu'habiles. Des qu'un person-
nage politique était soumis à leur con-
trôle, ils prenaient l'empreinte de son
sceau, décachetaient et recachetaient
ses lettrés avec une telle dextérité, que
la fraude ne pouvait pas même être
soupçonnée. Par ce moyen fort simple,
la nionarehi e bourbonnienne espionnait,
non-seulement la France, mais l'Eu-
rope. Elle perçait toutes les murailles
et pénétrait sous tous les toits. Elle
sondait les plus fiers palais comme les
plus humbles chaumières. Cabales, com-
plots, intrigues diplomatiques, menées
ténébreuses, elle devinait tout. Princes
du sang, secrétaires d'Etat, ambassa-
deurs, nobles et vilains, elle déchiffrait
tout. L'OEil-de-Bœuf, du fond du cabi-
net noir, guettait le monde entier.
«
* *
Cet immense espionnage dura jusqu'à
la Révolution.
La Révolution inaugura un régime
nouveau, —- le régime de la probité po-
litique.
Aujnois de juillet'1790, - à une épo-
que où les émigrés conspirent de tous
côtés contre la nation, — des dépêches
du comte d'Artois sont saisies sur la per-
sonne dte M. de Castelnau, ministre de
France à Genève. Un député de la Con-
stituante demande a que toutes les let-
tres - interceptées depuis les troubles de
Paris soient remises dans un dépôt sûr,'
pour être présentées à l'Assemblée na-
tionale quand elle le jugera convena-
ble ». Mais Mirabeau s'élève contre cette
proposition :
(f. Est-ce à un peuple qui veut deve-
nir libre à emprunter les maximes et les
procédés de la tyrannie? Peut-il lui con-
venir de blesser la morale après avoir
été si longtemps victime de ceux qui la
violèrent?.
« Qu'apprendrons-nous par la honteuse
inquisition des lettres ? De viles et sales
intrigues, des anecdotes scandaleuses,
de méprisables frivolités.
a Eh quoi ! lo dernier asile de la liberté
serait violé par ceux mêmes que la na-
tion a délégués pour assurer tous ses
droits! Les plus secrètes communica-
tions de l'âme, les conjectures les plus
hasardées de l'esprit, les émotions d'ure
colère souvent mal fondée, les erreurs
souvent redressées le moment d'après,
pourraient être transformées en déposi-
tion contre des tiers 1 Le citoyen, l'ami,
le fils, le. père deviendraient ainsi les juges
les uns des autres sans le savoir! ils
pourraient périr un jour l'un par l'autre !
Et l'Assemblée nationale ferait servir de
- base à ses jugements des communica-
Tions éqiuïôqiies, quelle n'a pu se pro-
curer que pax un crime ! »
Mirabeau repousse avec l'éloquence
du génie indigné une motion qui désho-
norerait l'Assemblée, et l'Assemblée,
acclamant l'orateur, passe à l'ordre du
jour.
La Constituante fait mieux encore :
elle convertit en loi le généreux prin-
cipe énoncé par Mirabeau. Le 14 août
1790, elle proclame que le secret des
lettres est inviolable. Le 26 août, elle
décrète que désormais « les administra-
teurs et les employés des postes prête-
ront serment de garder fidèlement le se-
cret des lettres et de dénoncer toutes les
contraventions qui parviendraient à
leur connaissance ». En même temps,
elle prononce contre les délinquants des
peines rigoureuses : l'amende, la prison,
la privation des droits civiques.
Après la fuite à Varennes, les scrupu-
les de l'Assemblée sont soumis à une
épreuve décisive. Deux lettres adressées
-au roi ont été saisies aux Tuileries. Ces
deux lettres peuvent fournir des rensei-
gnements précieux sur les coupables re-
lations de Louis XVI. Elles sont, d'ail-
leurs, décachetées. — Qu'importe! l'As-
semblée refuse d'en entendre la lecture :
elle ordonne que ces lettres seront reca-
chetées et remises à leur destinataire.
Elle se venge de l'excès de la trahison
par l'excès de la loyauté.
*
* *
La Révolution avait supprimé le ca-
binet noir. L'empire le rétablit.
Napoléon le Grand restaure l'inqui-
sition épistolaire, consacrée par Louis
le Grand.
Le despotisme* reprend sa besogne
ténébreuse. La pensée, sous quelque
forme qu'ello se produise, - impri-
mée ou manuscrite, — est soumise à
la surveillance de la police. Les préfets
s'arrogent le droit de faire saisir à la
poste toutes les lettres suspectes. Les
correspondances les plus curieuses et les
plus intéressantes, les plus amusantes
et les plus graves, sont résumées dans
un rapport au maître, lia républicain
écriât à un républicain, un royaliste à un
royaliste, un mari à sa femme, un frère
à sa sœur, un fils à sa mère, un amant à
sa maîtresse : et aucun d'eux n'aperçoit
l'empereur qui, tandis qu'ils tiennent la
plume, regarde par-dessus leur épaule.
Napoléon assiste, invisible, à tous les
tête-à-tête, à tous les rendez-vous, à
toutes les causeries. Témoin railleur ou
terrible, pour qui les passions humaines
restent une comédie, quand elles ne de-
viennent pas un drame !
Dans ses conversations de Sainte-
Hélène, Napoléon s'est excusé, aussi
bien qu'il l'a pu,-d'avoir violé le secret
des lettres. Il a invoqué l'exemple de
Louis XIV. Il a plaidé les cii constances
atténuantes. Mais, dans ce plaidoyer
même, que d'aveux accablants pour sa
mémoire ! Ecoutez le Mémorial : «. Quoi
qu'on en ait dit dans le public, on lisait
très peu de lettres à la poste, assurait
l'empereur. Celles qu'on rendait aux
particuliers, ouvertes ou reeachetées, n'a-
vaient pas été lues la plupart du temps;.
jamais on n'en eût fini. Ce moyen était
employé bien plus pour prévenir les cor-
respondances que pour les découvrir.
Les lettres réellement lues n'en conser-
vaient aucune trace ; les précautions
étaient des plus complètes. »
Tout en affirmant qu'on lisait très peu
de lettres. à la poste, Napoléon recon-
naissait avoir consacré à la violation des
correspondances gix cent mille francs
par an l *
Six cent mille francs par an ! Que d'en-
veloppes n'a-t-on pas pu décacheter
pour une pareille somme !
Du reste, l'empereur désapprouvait
l'institution du cabinet noir, non-comme
immorale, mais comme inefficace. Il se
plaignait de ce que ses ennemis les plus
dangereux avaient échappé à cet espion-
nage, et il disait en soupirant à M. de
Las Cases ce mot inouï : « Il y a tel de
mes ministres dont je n'ai jamais pu
surprendre une lettre » ! •
*
* *
Sous la Restauration et sous la mo-
narchie de Juillet, le cabinet noir resta
fermé. La violation du secret des lettres,
normale sous l'empire, devint alors un
fait exceptionnel, contre lequel protes-
tèrent publiquement les ministres du
régime parlementaire. Il appartenait
toutefois à la République de rétablir une
loyauté complète dans le service postal;
et c'est cet intègre et honnête Bastide
a. dl' 1 d *
qui, en dépit des protestations du sieur
Carlier, supprima, au ministère des af-
faires étrangères, certain bureau de dé-
cacheta go par lequel passaient parfois,
avant Février, les dépêches diploma-
tiques.
, Chose étrange ! Ce fut un républicain
qui mit fin au système d'espionnage or-
ganisé par les rois — contre les rois !
Après le coup (rElat, la tradition na-
poléonienne fut reprise. *
Qu'était-ce que la violation du secret-
des lettres pour uu gouvernement qui
avait violé tant dechoses !
Qu'importe- une exaction de plus ou
de moins?
#-.. -
.Quand on a brise une Constitution,
crocheté les port.d'une Assemblée na-
tionale, enlevé nuitamment de leur lit
des représentants du peuple, défoncé à
coups de canon les maisons d'un boule-
vard , ensanglanté Paris, saccagé les
provinces, se ferait-on scrupule de des-
celler une enveloppe ! Craint-on d'être
indiscret avec les gens que l'on mi-
traille? Vous me ruinez, vous me dé-
portez, vous m'expulsez, vous m'en-
levez mon toit, ma famille, ma patrie,
ma fortune, mon bonheur, et vous vous
feriez scrupule d'escamoter ma corres-
pondance !
Dans une des nombreuses visites
qu'un cousin du dictateur de Décembre
faisait en 18o2 à quelques prisonniers
delà Conciergerie, je me rappelle par-
faitement avoir entendu la voix qui au-
jourd'hui retentit impérialement dans
les salons du Palais-Royal jeter ce cri
indigné : Ils ont rétabli le cabinet llùil'!
Ce rétablissement du cabinet noir, qui
mettait en fureur la future altesse, me
parut tout simple, à moi, futur exilé. *
*
1 * *
Quelques mois plus tard, quand j'eus
quitté la France, je fus à même d'appré-
cier les services rendus à l'empire par
ce cabinet. Toutes les lettres qui parve-
naient aux proscrits portaient des traces
évidentes de la curiosité du gouverne-
ment français. Celle-ci, collée avec un
peu de gomme, avait été recollée tant
bien que mal par des mains imparfaite-
ment lavées. Celle-là, protégée par un
vaste cachet, était incisée sur le côté.
Cette autre, scellée primitivement avec
la cire, était rescellée avec un pain à
cacheter. Je vois encore d'ici une lettre
do Béranger, qui parvint à Marine-
Terrace, liée par une ficelle, avec cette
mention en langue anglaise : Arrivée
décachetée au général post-office.
Les honnêtes facteurs d'outre-Manche
étaient tout d'abord scandalisés de ces
procédés de la poste impériale : ils ont
fini par s'y habituer.
Car, il faut le dire, ces voies de fait
épistolaires ont duré des années. Pen-
dant des années, la police bonapartiste
a espionné, presque dans les plus inti-
mes mystères de la vie privée, ceux
qu'elle avait bannis. S'aiitorisant d'un
arrêt de la cour de cassation, daté du
21 novembre 1853, lequel, déclarait que
les correspondances par les s'our-
dissent et se commettent les attentats por-
tés à la paix publique, à la propriété et à
la sûreté des citoyens, sortent de la clam
de celles qui doivent être protégées par la
/oï, — la police bonapartiste n'a cessé
de soumettre à un triago occulte les
lettres adressées aux proscrits et écri-
tes par les proscrits. Je n'étonnerai per-
sonne en disant que, l'année derrière,
la correspondance de l'auteur de la
Lanterne, réfugié en Belgique, excitait
particulièrement la curiosité du gouver-
nement français. Et le futur député de
la Seine disait alors fort drôlement (pie
le moyen le plus sûr de faire parvenir
une pétition à M. Yandal était de l'a-
dresser à. Henri Rochefort ! -
Mais hàtons-nous de le dire pour être
complètement véridique, il n'est pas
nécessaire d'être proscrit pour être ho-
noré des indiscrétions officielles. Qui-
conque est soupçonné d'hostilité aiï. ré-
gime actuel, — royaliste ou républicain,
— est placé sou la surveillance de la
haute police. Le pouvoir tutélaire qui
nous régit se croit en droit de connaître
tout ce que peuvent écrire contre lui ses
adversaires4. Tous les préfets de l'empire
peuvent, quand bon leur semble, se
transformer en officiers de police judi-
ciaire, et, par une brusque sommation,
faire saisir dans tous les bureaux de
poste les correspondances suspectes. Il
est vrai que, pour obtenir justice de cos,
violences arbitraires, vous pouvez re-
courir, au conseil d'Etat ! Mais plaignez-
vous donc des abus do l'empire aux Con-
seillers de l'empereur!
- *
* *
En dehors dos moyens connus, le gou-
vernement a, pour découvrir nos se-
crets, des expédients qui lui sont pro-
pres.
Voulez-vous une preuve toute récente
de la singulière double vue du pouvoir
impérial?
Dans l'après-midi du 12 janvier, -
de cette funèbre journée où toutes les
troupes étaient consignées, - un jeune
sous-officier d'un régiment caserne à
Paris remettait à un commissionnaire une
lettre adressée à deux journaux démo-
cratiques. Cette lettre exprimait le re-
gret éprouvé par cent dix-huit soldats
de n'avoir pas pu assister aux funérailles
du journaliste républicain assassiné par
un prince impérial.
Trois heures après que cette lettre
avait été remise à son adresse et vingt-
quatre heures avant qu'elle fut publiée,
", - le sous-officier était arrêté et enfer-
mé dans un cachot souterrain de la ca-
serne.
Que ; s'était-il passé dans cet inter-
valle dé trois heures? - Mystère !
Ce qui est certain, c'est qu'un agent
quelconque de l'autorité avait décacheté
la généreuse missive destinée à la presse
démocratique, et en avait dénoncé l'au-
teur.
Le sous-officier, adoré de ses cama-
rades, fut délivré dès le lendemain ma-
tin. On le rattrapa au moment où, dans
des habits bourgeois prêtés par un ami,
il allait s'éloigner de Paris par une des
gares du Midi. Incarcéré de nouveau, il
parvint à s'évader de nouveaut toujours
aidé par d'héroïques complicités. Enfin,
il gagna la Belgique. -
C'est à Bruxelles que, guidé par une
inspiration dont je le remercie, il est
venu frapper à ma porte, après plusieurs
jours d'angoisses.
C'était le vendredi 21 janvier. Il ge-
lait à pierre fendre. Le malheureux
jeune homme mourait de faim et de
froid. Vous devinez comment il fut ac-
cueilli !
Aujourd'hui, gràco à l'active inter-
vention de Bojchot, il a trouvé un em-
ploi qui lui promet de vivre à l'abri de
la misère - et de la police bonapartiste.
t *
* *
Après cet exemple si récent, qui ose-
rait prétendre que le secret des lettres
eit respecté par le pouvoir impérial?
Allez, maître Oliivier, vous aurez
beau faire, vous ne parviendrez pas à
transformer le régime actuel en régime
parlementaire!' Quoi que vous disiez,
le dictateur de Décembre gardera tou-
jours la direction suprême de l'armée et
de la police. Vous avez pu obtenir de
lui l'éloignement de M. Rouhcr et de
M. Haussmann. Vous ne lui arracherez
pas la destitution de M. Canrobert, ni
celle de M. Pietri, ni celle de M. Yan-
dal. Ces messieurs sont les confidents de
la monarchie napoléonienne. Vous et
vos collègues, vous n'êtes que ses com-
nis ! •
',\ Quelques journaux ont annoncé ré-
cemment la suppression du cabinet noir.
0 naïveté !
De tous les cabinets (y compris le vô-
tre, maître Oliivier) le cabinet noir est
le seul durable.
Le cabinet noir est un laboratoire
mystérieux et immémorial dont la clef,
léguée par Louis XIV à Napoléon, a été
retrouvée sous l'oreiller do Sainte-Hé-
lène. C'est un caveau profond où les ini-
tiés seuls travaillent à l'œuvre sans nom
du despotisme. C'est le sanctuaire si-
nistre où règne, depuis dix-huit ans, la
nuit du Deux-Décembre.
On ne parviendra à détruire le cabi-
net noir qu'on,démolissant tout l'édifice
impérial. •
{ Patience!
f * FRÀXÇ015-VICT0R Ilt'GO.
LA PETITS G UEIUtE
Cette affaire des Archives est bien cu-
rieuse. Le soûverain a fait enlever du dé-
pôt vingt-huit pièces importantes qui le
concernaient. 11 s'agissait de l'aigle de Bou-
logne et du pâté de Strasbourg. On con-
çoit très Lien que, lorsqu'un homme a des
histoires comme celles là dans son pssé,
il tâche d'en atténuer le souvenir. Mais
puisque le chef de l'Etat voulait détruire
tout ce qui pouvait lui faire du tort auprès
de la postérité, il aurait dû supprimer du
même coup les papiers relatifs au Deux-
1
Décembre et toute l'histoire de son règne.
Cela eût été simple et habile. La famiile
impériale y eût gagné. Le Michelet de l'a-
venir, ne trouvant point de documents of-
fidet, ni sénatus-consultes, ni discours
impériaux, ni rien, aurait peut-être douté
de l'existence de l'empire. Et peut-être
aurait-il écrit :
« Les orgies révolutionnaires recommen-
cèrent en 1851. Le parti démocratique et so-
cialiste organisa un massacre dans Paris.
Ce paiti alla plus loin. Il calomnia odieu-
sement ses adversaires, et il répandit le
bruit (longtemps accrédité) que le mas-
sacre avait été ordonné par un descendant
du vainqueur d'Austerlitz.
« Aujourd'hui ia vente est connue.
« Les socialistes organisèrent encore une
expédition au Mexique., pen laat laquelle
moururent quatre-vingt mille hommes. Ils
spéculèrent à Paris sur les terrains; ils gou-
vernèrent despotiquement et conduisirent
la France à deux doigts de sa ruine.
« Ils se rendirent olieux à tout le monde.
Etdansles derniers temps, on n'osait même
plus les comparer à S. M. le roi Louis-
Philippe qui, comme on sait, cependant,
avait voulu tuer d'un coup de pistolet le
brave commandant -d'infanterie Col-Puy-
gellier. »
Voilà ce qu'auraient dit les historiens, et
ces simples mots eussent rendu impossi-
ble en France le rétablissement de la Répu-
blique. La démocratie était « coulée » pour
toujours. -
Le plus amusant, dans cette affaire des
Archives, c'est le décret. Rendre un décret
pour s'approprier des papiers qui ne vous
appartiennent pa?, cela est charmant. Un
décret ! mon Dieu! Ceci n'est pas à moi. Je
rends un décret. Vlan ! c'est à moi. Quoi
•de plus simple?
Quelle leçon pour nous autres bour-
geois! Vous avez, je suppose, envie de la
montre de votre voisin. Ce voisin ne veut
pas la vendre. Qu'avez-vous à faire? Rien
que de Lien facile. Vous achetez une
feuille-de papier. Vous rendez un décret.
Vous le faites signer par le concierge et
contre-signer par le trotteur. Ensuite vous
prenez la montre. 11 n'est rien de plus
légal. -
Votre conscience pourra être tranquille,
et M. Maurice Richard se déclarera satis-
fait.
Edouard Lockroy.
Ii LIBERTÉ DE LA PRESSE
Notre collaborateur Charles Hugo a reçu
hitr, 30 janvier, l'assignation suivante :
« A la requête de M. le procureur impé-
rial près la cour impériale de Paris,
« Nous François-Jules Mathieu,huissier-
audiencier en ladite cour, avons donné as-
signation au nommé :
« Hugo (Charles), homme de lettres, en
parlant ainsi qu'à l'original,
'r( A comparaître en personne, le 2 fé-
vrier prochain, à l'audience de la cour
impériale, chambre des appels, pour être
entendu sur l'appel interjeté par lui et
Barbieux, d'un jugement qui le condamne
à quatre mois de prison et giilJe francs
d'amende ;
«Lui déclarant que, faute par lui de
comparaître, etc. »
Notre collaborateur Charles Hugo a reçu
hier, 30 janvier, l'assignation suivante :
« A la requête de M. le procureur impé-
rial près la cour impériale de la Seine,
« Nous, François-Jules Mathieu, huis-
sier audiencier en ladite cour, avons donné
assignation au nommé :
« Hugo (Charles), homme de lettres, en
parlant ainsi qu'à l'original, -
« A comparaître en personne, le 2 février
prochain, à l'audience de la cour impériale,
chambre des appels, pour voir statuer sur
l'opposition formée par lui contre un arrêt
qui le condamne à quatre mois de prison
et mille francs d'amende;
« Lui déclarant que, faute de comparaî-
tre, etc. n ,
Nos lecteurs vont se demander quelle
idée nous avons de répéter deux fois la nièr
me assignation. 4
Onos lecteurs! ce n'est pas la même.
La première a rapport à notre procès du
7 janvier, et la seconde à notre procès du
19. Il est vrai que nos deux procès ont un
furieux trait de ressemblance : notre con-
damnation.
Le parquet les fait revenir le même
jour et réunit les deux condamnations de
M. Charles Hugo. Nous ne pouvons voir là
qu'une galanterie de M.Emile O'livier, qui
se sera dit que le 2 février était le jour de
11 reprise de Lucrèce Borgia, et qui aura
voulu que, ce jour-là, le fils de l'auteur eût
un bouquet de mois de prison.
H va sans dire que notre gérant, Albert
Barbieux, est assigné avec M. Charles Hugo,
pour entendre confirmer ses cinq mois de
prison et ses deux mille francs d'amende.
Robert flyenne.
c
LES ON-DIT DU BOULKVARD
IVer soir, un peu avant dix heures, les
passants de la rue Saint-Honoré étaient
arrêtés devaot le n° 286 (en face de la ru-j
des Pyramides) par des cris terribles.
En même temps, un homme sortait dà
la maison, en bras'de chemise, pieds nus,
ensanglantés, et se précipitait dans la di-
rection de Saint-Roch. *
Des sergents us villè fie tardaient pas &
le saisir et à l'emmener au poste.
Pendant ce temps, on montaita.ns la
maison où l'on avait entendu des cris; on
entrait dans une chambre du deuxième
étage, dont la porto était ouverte, et on y
trouvait une femme morte.. 4
Une jeune femme; de tredte ans environ,
jolie.
C'était une femme plus que facile, entre
la femme légère et la fille, - ;
C'est un de ses amants qui l'a tuée.
Il a dit qu'après l'avoir frappée il l'avait
embrassée, et que, s'il s'était précipité dans
la rue, c'était pour aller chercher du se- a
cours.
* *
* *
Eh bien ! /mais n'admirez-vous pas
comme la peine de mort empêche l'assas-
sinat?
Il n'y a pas tout à fait quinze jours que
Troppmann a été exécuté, et mardi der.
nier, pas huit jours après, a la population
de Poissy était mise en émoi par l'horrible
- assassinat » que nous avons raconté hier,
— et avant-hier soir « un assassinat a
été commis dans des circonstances atro-
ces ? au numéro 83 du faubourg Saint-
Honoré, - et hier soir, voici un nouvel
assassinat, à quelques maisons de distance,
comme pour prouver que le meurtre e:'ot
contagieux.
Voilà de quelle façon l'échafaud abolit
le meurtre !
Nous sommes de ceux qui croient que,
loin de supprimer les assassins, les exécu-
tions en produisent, et que c'est un mau-
vais moyen pour empêcher de tuer qUtS
d'en donner l'exemple.
- *
* *
Minuit. — Je reviens de la sue Saint-
Honoré, je suis entré dans la maison où le
crime s'est accompli, et voici les rensei-
gnements que j'ai recueillis :
L'assassin s'appelle Bugène Durand. Il à
quarante-huit ans. Il demeurait rue Ronce,
numéro 7. Il se dit menuisier.
J'ai vu la morte. Elle s'appelait José-
phine Rispal. -Elle avait de trente-cinq à
trente-huit ans.
lis avaient passé la journée à quatre, »,
elle, sa mère, sa sœuij et lui. Vers cinq
heures, la mère et la sœur sont parties.
Une heure après, il est sorti, seul, ivre déjS,
pour aller boire de l'absinthe, en atten-
dant l'heure de souper.
Il est revenu plus tard qu'il n'avait pro-
mis. De là, une querelle.
*
t, * *
Un moment après son retour, la femme
a crié, puis elle est descendue appelant la
concierge au secours, et montrant sa tempe
blessée d'un coup de couteau.
La concierge, qui connaissait la bruta-
lité de l'homme, n'a pas osé remonter avec
la femme. D'ailleurs, ils se disputaient et
se battaient tout les jours, et elle ne se dé.
rangeait pas pour si peu.
Joséphine Hispal a demandé de l'eau,
s'est lavé la tempa, et est remontée seule.
Elle a trouvé sur le palier Eugène Du-
rand, de plus en plus furieux et brandis-
sant son couteau.
Il lui en a porté deux coups, un dans
chaque sein. -
Le médecin qu'on était allé chercher,
le docteur Chammartin, nous a dit que Id
premier coup avait dû être celui du seiu
droit, qu'après ce premier coup il y avait
eu vraisemblablement une lutte, et que le
second coup — au cœur — avait dû pro-
duire la mort immédiate.
C'est alors que l'assassin s'est sauvé dans
la rue. Ce qui semble prouver une futta
violente, c'est qu'il était absolument cou-
vert de sang.
, *
* *
A onze heures et demie, on est venu
avec une civière prendre le corps pour le
porter à la Morgue, où va être faite l'au-
topsie.
On l'a enveloppé de couvertures. Les
assistants ont remarqué que pendant l'opé-
ration, le commissaire de police qui la di-
rigeait avait son cigare à la bouche.
Joséphine était, disait-on, enceinte.
Quelques cadres pendus aux murs de la
chambre disaient tout de suite les mœurs - -
de la locataire.
*
* *
- • Au rédacteur du rappel :
MODsieur,
Vous avez cru devoir reproduire dans votra
numéro du 29 ma lettre concernant la peine
de mort en Russie, mais vous croyez pouvoir
me réponde que, si la peine de mort n'existe
pas, le kn&ut reste.
Je crois en efl'ot, monsieur, que la France a -
quelque chose à envier à la Russie; car, si la -
bastonnade e*t encore appliquée chez vous,
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