Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1870-01-30
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 30 janvier 1870 30 janvier 1870
Description : 1870/01/30 (N257). 1870/01/30 (N257).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7531470s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
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CIIle.N:IOE RMDTMAll
CE QUE SONT DEVENUS LES DEUX SOLDATS
-
; - ",",
Mob pire m'éerit :
« Deux Î^jm®s^4û; l'armée, le tam-
b^ur-GolloUe elle fusilier Dufour, ont
osé faire un essai sur l'empire, Ils ont
voullu-voir quelle - quantité de citoyen
restait' dans le soldat. Ils.ont eu la har-
diesse de rentrer dans la nation, ne fût-
ce qu'une minute, de regarder de près
les foules vivantes du meeting électo-
ral, et de mettre la consigne aox écou-
tes dans ce grand tumulte où éclatent
tous les mots d'ordre de la liberté. Us
oUt coudoyé l'ouvrier, remontré la
blouse, accosté le prolétaire, et, s'il res-
tât quelque grain de poudra à canon
8 les plis de leur uniforme, ils y ont
œjÊlé la sainte poussière du travail.
Après avoir vécu un moment de la vie
duJornm, ils sont retournés à la cita-
delle de l'obéissance passive. Après
avoir emtendu la vaste et multiple pa-
role démocratique, i's ont dû rentrer
dans la surdité militaire. En sortant de
1» nattoft, ils sont revenus à la caserne.
En quel état? Évidemment changés.
Évidemmentt bouleversés, et, ce qui est
terrible, grandis. Le soldai est d'un ré-
giment, le citoyen est d'ueie légion. Ils
se sont sentis de la légion Collette a
regardé son tambour et a songé à Barra.
Aujourd'hui, la caserne est ce qu'elle
n'était pas autrefois, proche parente du
séminaire. L'uniforme est aussi étroite-
ment boutonné que la soutane. La poi-
trine humaine n'est pas moins gênée
daus une de ces gaines que dans l'autre.
L'obéissance passive, la même chez
Hiamme à église et chez l'homme de
guerre, semble avoir pour but de faire
des naing. le, casque, aussi bien que la
calotte, amoindrit le cerveau. Toutes les
prescriptions de l'obéissance passive
sont autant de bandelettes qui compri-
ment l'homme, .le déforment et le dimi-
nuenti Collette et Dufour, en sortant du
meetiug électoral, ont nécessairement
•enti la déchirure de ces rapetissements;
il n'est pas possible qu'ils ne se soient pas
redressés, car le soldat ne peut pas plus
impunément toucher le peuple qu'Antée
la terre. Tant pis, il redevient géant.
a Or, que reste-t-il au coup d'Etat, si
le soldat lui échappe ? D colères; delà, toutes les sévérités, r Afri-
que, les compagnies disciplinaires. Mais
la nation s'est émue, la raste souscrip-
tion du Rappel a eu eept mille échos,
r obole du peuple est accourue au se-
cours de ceux que tu as nommés les
Deux Parias. Ils vont être rachetés ; et,
aujourd'hui, je constate le résultat, et
je te félicite : Peur ces deux braves sol-
Jat) la liberté et la patrie; pour toi, la
prison ou l'e.
«VKT0R9TG0.»
• *
; **
Ils vont être racheta me dit mon
père.
Qu'on en juge.
*'
* *
Les cinquante mille citoyens qui ont
envoyé douze mille francs au Rappel
pour la libération des deux soldats, ont
le - droit de savoir ce que sont devenus
le tambour Collette et le fusilier Du-
four.
Nous allons le leur apprendre.
Et d'abord un mot. On se rappelle que
Gambetta, dans un magniiique discours,
a porté la question à la tribune. Ou se
rappelle aussi ce que M. le ministre de la
guerre a répondu. — En principe, a-t-il
dit, le gouvernement n'a pas dj compte
à rendre sur la manière dont il entend
l'obéissance passive. L'armée française
lui appartient.. 11 en use à sa guise avec
elle. If en fait ce qu'il veut. Il la dirige
et il la corrigée. Puisqu'on m'interroge,
qu'on sache 'que ce n'est pas seulement
deux soldats que nous venons d'envoyer
en Algérie, mais bien six ou huit; nous
en déportons tous les jours ; ce que nous
avons fait hier, nous le recommençons
aujourd'hui et le continuerons demain.
- En d'autres termes, l'Algérie est à la
fois la conquête de l'armée française et
l'oubliette de la loi militaire. Elle forme
le conscrit et dresse le récalcitrant.
L'ordre du jour pour l'un, la lettre de
cachet pour l'autre. Et silence dans les
rangs ! Pas un mot, pas un cri, pas un
geste. L'Algérie punit et ne rend pas
de compte. Tout soldat a dans sa gi-
berne, en même temps que son bâton de
maréchal de France, sa feuille de route
pour les* compagnies de discipline. On
épure l'armée. On ne se contente pas
d'une élite de héros, on veut une élite
de prétoriens. Le chassepot répond de
l'ordre, avant de répondre de la patrie.
Aux jours d'émeute, devant leurs tam-
bours battants et leurs clairons et leurs
étendards, nos soldats ont un état-majot
de sergents de ville. Le commissaire de
police commande au colonel. L'officier
de paix a un grade dans l'armée fran-
çaise, -
• it,
-' * * ■ -
Soit Nous ne discutons pas. Nous
prenons acte. Nous savons trop ce qu'il
en coûte pour souffler mot en pareille
matière. L'obéissance passive est om-
brageuse. Le général Lebœuf est une
sensitive. Donc, nous nous taisons et
nous permettons, en toute confiance, à
M. le substitut Aulois de regarder par-
dessus notre épaule ce que nous écri-
vons en ce moment.
Nous voulons simplement répondre à
cotte tpxeslit»u qui nous est adressée de
toutes parts :
:: Que sont devenus letambour Collette
et le fusilier Dufour?
: ir"" -
Ils ont voyagé de brigade en brigade
jusqu'à Marseille. Là on les a embar-
qués pour l'Afrique. Une fois en Afri-
que, on les a envoyés à Sétif. De Paris
à Marseille, ils ont essuyé toutes les ri-
gueurs de la discipline irritée. Le voyage
seul, qui a duré deux mois en compa-
gnie des gendarmes, a été une punition.
Les marches forcées par tous les temps,
a par pluie, neigé ët boue» , le coucher
dans les prisons, la « nourriture de
route » c'est-à-dire le pain noir, toutes
les brutalités de l'étape pénitentiaire, la
caserne devenue le cachot, ils ont tout
subi sans se plaindre. L'un, Dufour,
qui sera libéré le 27 avril, avait aisé-
ment pris son parti; l'autre, Collette,
qui n'a encore que deux ans défaits,
était ! ésigné. Ce qu'il regrettait surtout,
ce pauvre tambour, c'était sa vieille
mère qu'il laisse en France et qu'il sou-
tenait avec le peu d'argent qu'il pouvait
gagner en dehors du service. « J'étais
son seul soutien, nous écrit-il, grâce
aux vingt-cinq francs par mois que mon
travail me procurait et que j'étais si heu-
reux de pouvoir lui porter sans jamais
en conserver un centime. » Aussi, dans
Its heures tristes de ce voyage qui l'ar-
rachait à son pays, il ne pensait à elle
qu'en pleurant. Pour lui, la France,
c'était son village de Beaucamp près
Lille, et, dans ce village, un toit de
chaume, et, sous ce toit de chaume, les
cheveux blancs de la bonne vieille qu'il
ne reverra plus. Elle a soixante-treize
ans. Elle est infirme. Elle vivait tout
juste des économies de son fils. Elle
mourra loin de lui et avant peu. Elle
mourra demain peut-être. Et voilà pour-
quoi il pleurait tout en marchant à
grands pas entre deux gendarmes, le bâ-
ton à la main et le sac au dos, retour-
nant seulement la tête de temps à autre
vers l'horizon, comme s'il eût senti qu'il
s'éloignait plus encore de sa mère que
de sa patrie.
« ■
* *
En arrivant à Marseille, ils savaient
déjà, tant bien que mal, ce que le
Rappel faisait ici pour eux. « Nous avions
entendu parler de la souscription, disent-
ils, dans les prisons où nous avons séjqur-
né, le long de notre voyage.» La nouvelle
leur était arrivée confuse, obscure, inex.
pliqué©. Ils ug comprenaient pas beau-
coup qu'on s'occupât tant d'eux. Ce
qu'ils avaient fait était tout simple ; on
les punissait, c'était tout simple encore.
On n'est pas soldat à demi. La disci-
plina a toujours raison. C'est la vérité
en uniforme.
; N'importe, savoir qu'on s'intéressait
à leur sort, c'était pour eux une conso-
lation et une espérance. On les embar-
qua, Ils quittèrent la France.
Adieu patrie 1.
disent les Châtiments. Cela se chante êt
même cela se pleure.
it • •'
** =.
Une fois en Afrique, plus de nouvelles
du pays. La casemate dans le désert.
L'oubli, le silence, le châtiment. Ils
avaient contre tout cela cette héroïque
patience du soldat, peut-être plus brave
encore contre la tristesse que contre la
mort. Enfin, un jour, le 6 janvier der-
nier, comme ils arrivaient, accompagnés
par la gendarmerie, à leur nouveau corps
le 16* de ligne, on leur apprit qu'une
lettre chargée avait été remise à leur
adresse. Le lieutenant de la compagnie
la leur fit donner. Elle avait cinq ca-
chets de cire, ce qtii ne l'empêchait pas
d'être en retard et d'avoir trois mois de
date. Le cœur leur battit bien fort. Cette
lettre allait leur donner de leurs nou-
velles. ,
Pauvres gens, ils no savaient pas lire.
Que faire? Ils devinaient bien que cette
lettre était pour eux chose grave et
même chose dangereuse. Ils l'avaient
on verte furtivement, et furtivement ils
se la montraient, puis ils la cachaient.
Ils en avaient peur et ils n'avaient pas
tort. Si pour un soldat, un numéro du
Rappel c'est la sall e-de police, une lettre
du Rappel c'est probablement le cachot.
Prier le premier venu de leur en faire
la lecture, c'était se compromettre. A
qui se fier? Ils cherchèrent longtemps
et finirent par .découvrir un camarade
sùr. « Ce n'est qu'aujourd'hui, disent-
ils, que nous avons trouvé une per-
sonne à qui nous avons dû de connaître
votre lettre. » Quelle joie! Quoi ! le ra;
chat, la libération, la délivrance ! Ilélas!
ils avaient trop vite espéré. « M. le lieu-,
tenant-colonel qui commande en l'ab-
sence du colonel, nous a répondu avec
douceur que M. le ministre de la guerre
avait déjà envoyé le refus de nous lais-
ser remplacer. » Ainsi, tout était dit
pour eux. La douceur de M. Lebœuf
avait prononcé.
Ils voulaient nous répondre. Ils ne
savaient pas écrire. Le camarade qui
leur avait servi de lecteur dut leur ser-
vir aussi de secrétaire. C'est alors qu'ils
purent dicter les touchantes lettres que
nous ayons sous les yeux, DufQur, qui
sera prochainement libéré du service, ne
demande rien que ceci ; u Je vous serai
fort reconnaissant de me trouver un tra-
vail d'homme de peine. ou de journalier
pour le 27 avril, jour de ma libération. »
Collette, lui, qui n'a encore que deux ans
de service, demande seulement qu'on
paye à sa mère les intérêts de la somme
qu'on aurait consacrée à sa libération.
Ceci, c'est tout simplement sublime. Ils
ont douze mille francs à se partager. Le
premier refuse sa part, le second n'nc..
cepte de la sienne que de quoi soutenir sa
mère. Trois cents francs au plus pendant
un an ou deux. Car la septuagénaire,
sans son fils, pense bien moins à vivre
qu'à mourir ; et cette fortune se réduira
à cette obole filiale, et ce magnifique
don national ce sera, tout juste, le der-
nier morceau de pain de la. mère
chez le boulanger du village.
n -
* *
Quant à la décision du ministre de !a'
guerre, nous ne la jugeons pas, nous la
constatons. Aux cinquante mille ci-
toyens qui lui demandaient la libération
des deux soldats, à cette souscription
enthousiaste, à ce cri de tout Paris et de
toute la France, à cette sommation for-
melle de l'opinion publique, à la voix
indignée de Gambetta, au vœu solennel
du peuple, au vœu secret de l'armée,
M. le ministre de la guerre répond laco-
niquement et militairement : - Non. ;
Ainsi, voilà qui est entendu. Pour
avoir assisté pendant une heure à une
réunion publique, les deux soldats achè-
veront leur temps en Afrique. On leur
promet d'oublier et d'avoir pour eux de
l'indulgence, mais plus tard et s'ils sont
sages. Qu'ils se repentent et on verra.
Jusque-là, la discipline aura eu, comme
il convient, le dernier mot. Dufour, lui,
prçad son parti et c'est tout simple ;
mais Collette reste sous la main de
l'autorité militaire, il est suspect, com-
promis, livré. On a l'œil sur lui ; on le
eillo. Il n'a qu'à bien se tenir, ou
âre a lui. L'armée à Besoin d'un eiëDÍ
pie. On l'aura. En attendant, il y a en
France, à cinq cents lieues du drapeau
africain, dans une chaumière désolée,
une vieille femme qui va s'éteindre tris-
tement sans avoir revu celui que le peu-
ple voulait rendre à sa mère mourante,
mais que ce drapeau n'a pas voulu ren-
dre, à ce linceul.
CHARLES nUGo.
i ; i, immmmpb».
Voici les deux lettres des deux soN
dats 1
j V Sétif , le i9 janvier isro.*
Il y a trois jours seulement, qu'accom-
pagnés par la gendarmerie, nous sommes
arrivas à notre nouveau corps, le 16° de
ligner , -' - -,
: Deux lettres nous ont été remises. Ne
sachant lire, le lieutenant de la compagnie
a signé pour que l'on me. délivre celle qui
avait ciiiq cachets fm, cire et que j'ai su ce
ati" être la TÔtre.. ',' ',, ,,', •
Merci à vous, messieurs, et à vos amis,
ile^eequ'ils ont rânlu-iaire poupç-m&i en
réalisant les fonds nécessaires pour me
fairè remplacer. ¿,
Pour le moment il n'y faut point son-
ger." M. le lieutenant-colonel, qni com-
mande en l'absence du colonel, nous a
répondu avec douceur que le ministre de
la guerre avait déji envoyé le refus d'à
nous laisser remplacer, mais que nous
n'avions qu'à bien nous conduire dans nos
compagnie, on oublierait facilement ce
qui avait amené notre envoi en Algérie.
Ma libération doit avoir lieu le 27 avril
prochain. Je vous serais fort reconnaissant
de me trouver un travail d'homme, de
peine ou journalier pour cette époque,
en me faisant parvenir la réponse que
vous m'annoccez quelques jours à l'avance
à Sétff (chez'la personne à laquelle vous
aurez confiance), ville où je devrai ren-
trer à l'époque de ma libération.
Demain, jepari pourBou-Saadarejoindre
ma nouvelle compagnie.
Notts vous remercions bien sincèrement,
et mol en particulier.
- -, COLLETTE,
"SoîdaTau î^hafàTfloû, iro compagnie du
168 de ligne, à Bou Saada.
- Sétif, le 19 janvier 1870.
Ce n'est qu'aujourd'hui que mon cama-
rade et moi avons trouvé une personne, à
qui nous avons dû de nous faire lire la
lettre que nous avions trouvée à notre ar-
rivée à Sétif. Cette personne a bien voulu
faire la réponse que vous adresse mon
camarade, et qui est la reproduction de ce
qui nous est commun relativement aux
lettres individuelles que nous avons reçues
de vous.
Je me joins à lui pour-vous remercier,
ainsi que vos souscripteurs, des sommes
que vous avez encaissées dans l'intention
de nous faire exonérer.
Pour l'instant, il n'y faut point songer.
Mais comme je n'ai encore que deux an-
nées de service de faites, peut être Serai-je
plus heureux dans quelque temps, et alors
je pourrai retourner près de ma vieille
mère, âgée de 72 ans, de laquelle j'étais te
seul soutien, grâce aux 25 francs par mois
que mon travail de charretier me procu-
rait, et que j'étais si heureux de pouvoir
lui porter, sans jamais en conserver un
centime.
Le long et pénible voyage de deux mois
avec pluie, neige, boue et la nourriture de
route, en compagnie de gendarmes qui ne.
pouvaient améliorer notre position, le cou-
cher dans les prisons pendant ce long par-
cours, toutes, ces misères n'étaient rien
pour mot en comparaison du chagrin
d'être trop éloigne de ma pauvre mère
pour pouvoir aller l'embrasser de temps à
autre, avec l'aide de quelques sous écono-
misés, ou de lui envoyer les quelques francs
que, de mois en mois, on peut gagner en
France, tout en faisant son service.
A partir de Philippeville, nous avons été
un peu moins malheureux, grâce à un ci-
vil qui, malgré ses faibles ressources et
son grand âge, nous traitait en frères, et
c'est en nous rappelant le nom d'une per-
sonne dont il nous avait parlé dans les
meilleurs termes, que nous sommes par-
venus à faire lire nos lettres et obtenir que
l'on nous écrive les lettres que nous ,vous"
adressons.
Messieurs, il résulte de votre lettre que
vous avez réuni les fonds nécessaires à mon
remplacement.
Le ministre de la guerre refuse.
Si vous pouviez, messieurs, en atten-
dant une nouvelle décision du ministre,
employer les înlérMs en faveur de ma
bonne "mère, en les lui faisant parvenir"
tous les mois à elle-même ? Vous pourrez
vous assurer par vos amis de Lille (iNord)
que j'étais le seul soutien de ma mère, qui
demeare à B^at^a^vp, eantoiï de 13),.H"'iiu,.
arrondissement de Lille, d.
Nord, où je suis né. Mon frère aîné était
charretier comme moi; mais. malheureu-
sement, il était. loin d'aider la pauvre
mère. Je ne compte que sur vous pour
jflicMirjiXLaidft»..- .; '.AT'.-.-nr'"
Je pars demain pour rejoindre à fëordj-
Bouarreridj, ma nouvelle compagnie, 2e du
2a bataillon du 16e régiment de ligne.
Veuillez recevoir pour vous et vos sous-
cripteurs mes remerciements bien sincères
pour tout ce que vous avez réalisé ou pour-
rez faire pour ma vieille mère.
DUFOUR.
La commission de la souscription s'est
déjà réunie, et a pris une décision pro-
visoire.
Une somme a été envoyée à Collette
pour ses frais do retour.
Une somme a été envoyée à la mère
do Dufour, à laquelle il sera fourni uno
rente mensuelle de 50 francs.
La commission se réunira prochaine-
ment pour statuer sur l'emploi du sur-
plus do la souscription. Nous rendrons
compte aux souscripteurs de ses résolu -
Il est entendu dès à_présent, en priii:
Il est entendu dès â présent, en prin-
cipe, que la souscription ne sera pas dé-
touraée de son but, et devra être tout
entière affectée à l'armée.
A. Barbieux.
- r r- 'H' - J ï
., LA PETITE (îl'IKRS
Il y a trois semaines qu'il est en place, et
déj i le voilà ébranlé, ce ministère étonnantl
Il se disjoint. Il se disloque. Il se décelle.
M. Louvet se laisse choir sur M. Buffet
qui se laisse choir sur M. Daru. On dirait
des capucins de cartes. C'était un ministère
fragile, il en faut convenir. Il aurait dû
ne se présenter devant la chambre qu'orné
de la pancarte traditiônhelle:
Ne touchez pas, S. V. P.
Est ce croyable? Ce ministère qui, af-
firmait-on, devait sauver la France ; qui
avait la confiance du pays et la confiance
de l'empereur ; ce ministère admirable ; ce
ministère solide; ce ministère qu'on disait
devoir être éternel, voilà qu'au premier
choc il menace de se casser en deux I
Ce que c'est que d'avoir « la confiance
du pays» ! Avez-vous remarqué une chose?
Toutes les fois qu'on dit d'un ministère
« il a la confiance du pays », ce ministère
n'en a pas pour trente jours.
Le ministère Rouher ne possédait pas
la confiance du pays : il a duré très long-
temps. Le ministère de la Roquette n'avait
pas la confiance du pays : il a duré long-
temps. Le ministère Ollivier avait, dit-on,
la confiance du pays : Vlan î Il est par
terre. « La confiance du pays » est aux
ministres ce que le persil est aux perro-
quets.
A vrai dire, ce ministère ne paraissait
point être né viable. Il était composé d'or-
léanistes, d'impérialistes, de libéraux et
d'autoritaires. C'était un phénomène:
quelque chose comme les enfants à deux
tôtes ou à trois jambes. La tête orléaniste
regardait à gauche ; la tête impérialiste à
droite. Et il n'y avait pas une seule jambe
qui marchât dans le même sens. Si l'empe-
reur tient à conserver son ministère, il
sera obligé de le mettre dans l'esprit-de-
vin.
Ce ministère avait, en outre, quelque
chose de terrible contre lui, si, du moins,
il en faut croire M. Daru; quelque chose
que l'empire ne pardonne pas; un vice
épouvantable; une maladie affreuse. M.
Daru avait dit à la tribune:
- Nous sommes d'honnêtes gens*
Conçoit-on cela? Le sénat et le corps
législatif ont pris M. Daru au mot. Ils ont
fait cette réflexion pleine de justesse :
Puisque ce sont d'honnêtes gens, ils
ne peuvent point rester au pouvoir.
«
Edouard Lockroy,
- 1 1 1 - ÏT-—WÊtÈÔPm—mu. M.
LA SÉANCE - !
JL6 DISCOURS CE M. OLLIVIER. — UN ORDRE
DU JOUR ÉQUIVOQUE
La séance d'avant-hier au corps législa-
tif avait été presque dramatique. Celle
d'hier a été/un peu plus que grotesque.
M. Ollivier a parlé.
Mais' disons, auparavant, qu'il y avait
une certaine animation danf.1 les couloirs
et à la salle des Pas-Perdus.
— Eh bien ! vous savèz la grave histoire,
disait le député G. à un journaliste, Qi-
li'^ier est furie«5 £ cc«ltïô Forcârie; plus en-
core "ëijIitr tf'hi"èr.;; Jg(j,àtin'.atl l'af-
F; jf:"
faire des acquits à-cautfàû et- im Q
sions temporaires est rompue.
Ce n'est pas possible I .::;,;j
C'est plus que possible, c*M
IlIUM_",.I- S~)r~nant ministre. -
- Allons donc !
-,Oui, il va aujourd'hui même, à cinq
heures et demie, développer en quelques
mots eon programme politique et écono-,
mique, puis poser la question de cabinet
sur ce programme. Après quoi, si la iDa.
jorité lui donne raison, il n'aura plus be-
soin pour rester ministre de la protection
humiliante des chambellans et des grands-
veneurs. il sera un vrai ministre parlemen-
taire. La bataille sera rude; mais il com-
prend enfin qu'il en a besoin, qu'elle seule
peut le faire prendre au sérieux, et il la
désire de toute son âme.
- vous M'étouffez,
-- Vous verrez,.. Dans deux heures, il y
aura à la tribune une déclaration nette,
positive, qui vous fermera la bouche.
Les bancs de la chambre se garnissent
rapidement. On ehuchoie. Ou se groupe,
on confère. Après quelques incidents, M.
de Foreade monte dogmatiquement à la
tribune, parle plus dogmatiquement en-
core. Personne, mâme dans les rangs da
la droite, n'écoute les phrases pénibles,
pesantes, sans lumière, de l'ancien mi-
nistre. On n'applaudit môme pas, on s'ifu •
patiente viiblement. '-
t Ah 1 si vous aviez encore un portefeuille
sous le bras, monsieur le grand-électeur,
et des préfectures ou des bureaux de tabé c
à distribuer, on savourerait avec délioes
toutes vos paroles, et M. Prax-Paris, M.
Laurent- Descours, M. Perras crieraient :
brwo. Mais vous n'tes plus rien, on dé*
clare sur tous leif^ancs que votre discours
est rogne, pédantesque, diffus. Quand au -
ra-t.ilfini? est-il ennuyeux avec ces pé-
riodes qui s'éternent? Voilà le mot qui
circule partout.
Enfin; il descend de Ja tribune. Seu!, les
ultra-habiles le félicitent. Déception c'est
M. Jules Brame qui le remplace. Du moins;
M. Brame sait dire lestement ce qu'il a sur
le cœur. Silence! M. Ollivier va parler.
Quoil M. Louvet, le ministre spécialise
retire sous tente; ce n'est pas lui, ministre
du commerce, qui va exposer la politique
commerciale du rrii". re! Que voulez-
vous? M. Louvet a, peur, M. Louvet ne sait
pas parler, M. Louvet craint de se compro-
mettre non-seulement autres de la cham-
bre, mais même auprès de ses collègues.
Donc c'est le ministre de la justice qui va
parler de commerce, lin autre jour c'e^l la
ministre des affaires étrangères qui parlera
sur la justice.
Les conversations partienières s'étei-
gnent. Un silence profond règne dans l'as-
semblée. Le cabinet va dire enfin ce qu'il
est, ce qu'il veut, ce qu'il compte faire. On
attend une révélation politique et indus-
trielle.
Mais les minutes s'écoulent et la révé-
lation attendue ne vient paî. Mi. Ollivier
enfilades périodes, il parle de sa dignité,
de sa loyauté, dé sa fierté, mais il be garde
bien d'indiquer la ligne politique qu'il.1'
compte suivie. M. Thlers avait semblé
dire : Yous savez, le cabinet actuel est un
chapeau que nous avons placé sur la ban-
quette gouvernementale pour garder notre
place pendant ^entr'acte; - M. de For-
cade avait répondu : Mais non, ce n'est
pas votre chapeau, c'est le nôtre, voyez la
marque : Napoléon 111 et compagnie.
M. Ollivier s'écrie aujourd'hui :Je ne
suis le chapeau de personne, su#to suis pas le chapeau de M. Thiers; je sais
bien qu'on ne me prend pas au sérieux;
mais j'ai en moi-même une conliaiice
qu'on ne" partage pas et qui est d'autant
plus vive; j'accepte le concours di3 tou, ra
protection de personne; vous n'aurez avec
moi ni un gouvernement anti-parlemas-
taire, ni un réghae à la Forcade, ni un ré-
gime de liberté, vous auitz un
ment Ollivier, un régime Ollivier.
Cela doit vous suffire. Après ça, l11ti,
; sieurs les députés, vous savez bien que
vous ne resterez députés qu'autant que vous
m'admirerez. Si vous m'ennuyez par voir-*
opposition, rrran! je vous disons. Tous
voyez que je suis un grand homme, digne
comme vous (oui 1 oui 1) 11er cornme voua
(oui 1 oui 1).
Quant à notre politique, dans les affai
res, industrielles, - ce sera tout ce que
vous voudrez. Si vous césirez le libre -
échange, n'oubliez pas que j'ai été ¡;¡,.lJ
un libre-échangiste déterminé. S, vous
voulez le protectionnisme, souvenez -vous
qu'ayant été libre-échangiste quand rétnh
hélas! républicain, je m pius plti- l'être
aujourd'hui. Je ne dénoncerai t:i? ,f
traités de commerce, ,-'eh dé;,ie= ît ?t
M. Gladstone et à M. Michel Guerrier,
mais je les trahirai 11 dé.a i, oomm*.1 j'ai
déjà trahi tant de r;H;<:ps. Tout cela dé-
pend de vous. Je n'ai point d'i\lCrf' sur des
problèmes ;i graves. Entre nous, je n'y ai
jamais pensé séries i ment.
tairez-moi n^iai%tje 1 Oh 1 ou i, laisse?-
1 l I li i -
f. 1 i J.- ';-";' "L' ;.I:'lJ'l 1'.,,':'8.::':'l, :L' :",'-
10 "mmïiim tti n. «
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fUKMI à M. ALBEBT BARBIEUX
Oe 8.711. ci. lOIr
18, rue de Valois, 118
lM fAClttuscrfM non insérés ne sont pal 1
ANNONCES
n. CH. LAGRANGE, CERF ET
6, pla. de la Source* 6.
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Trois mois, i 9 M »
BURMA*
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de l'administrateur du journal, 15, hou..
levait Montmartre.
Les réclamations, renouvellements ou
changements d'adresse devront toujours
être accompagnés de la dernière bande.
:- t L .—————
CIIle.N:IOE RMDTMAll
CE QUE SONT DEVENUS LES DEUX SOLDATS
-
; - ",",
Mob pire m'éerit :
« Deux Î^jm®s^4û; l'armée, le tam-
b^ur-GolloUe elle fusilier Dufour, ont
osé faire un essai sur l'empire, Ils ont
voullu-voir quelle - quantité de citoyen
restait' dans le soldat. Ils.ont eu la har-
diesse de rentrer dans la nation, ne fût-
ce qu'une minute, de regarder de près
les foules vivantes du meeting électo-
ral, et de mettre la consigne aox écou-
tes dans ce grand tumulte où éclatent
tous les mots d'ordre de la liberté. Us
oUt coudoyé l'ouvrier, remontré la
blouse, accosté le prolétaire, et, s'il res-
tât quelque grain de poudra à canon
8 les plis de leur uniforme, ils y ont
œjÊlé la sainte poussière du travail.
Après avoir vécu un moment de la vie
duJornm, ils sont retournés à la cita-
delle de l'obéissance passive. Après
avoir emtendu la vaste et multiple pa-
role démocratique, i's ont dû rentrer
dans la surdité militaire. En sortant de
1» nattoft, ils sont revenus à la caserne.
En quel état? Évidemment changés.
Évidemmentt bouleversés, et, ce qui est
terrible, grandis. Le soldai est d'un ré-
giment, le citoyen est d'ueie légion. Ils
se sont sentis de la légion Collette a
regardé son tambour et a songé à Barra.
Aujourd'hui, la caserne est ce qu'elle
n'était pas autrefois, proche parente du
séminaire. L'uniforme est aussi étroite-
ment boutonné que la soutane. La poi-
trine humaine n'est pas moins gênée
daus une de ces gaines que dans l'autre.
L'obéissance passive, la même chez
Hiamme à église et chez l'homme de
guerre, semble avoir pour but de faire
des naing. le, casque, aussi bien que la
calotte, amoindrit le cerveau. Toutes les
prescriptions de l'obéissance passive
sont autant de bandelettes qui compri-
ment l'homme, .le déforment et le dimi-
nuenti Collette et Dufour, en sortant du
meetiug électoral, ont nécessairement
•enti la déchirure de ces rapetissements;
il n'est pas possible qu'ils ne se soient pas
redressés, car le soldat ne peut pas plus
impunément toucher le peuple qu'Antée
la terre. Tant pis, il redevient géant.
a Or, que reste-t-il au coup d'Etat, si
le soldat lui échappe ? D
que, les compagnies disciplinaires. Mais
la nation s'est émue, la raste souscrip-
tion du Rappel a eu eept mille échos,
r obole du peuple est accourue au se-
cours de ceux que tu as nommés les
Deux Parias. Ils vont être rachetés ; et,
aujourd'hui, je constate le résultat, et
je te félicite : Peur ces deux braves sol-
Jat) la liberté et la patrie; pour toi, la
prison ou l'e.
«VKT0R9TG0.»
• *
; **
Ils vont être racheta me dit mon
père.
Qu'on en juge.
*'
* *
Les cinquante mille citoyens qui ont
envoyé douze mille francs au Rappel
pour la libération des deux soldats, ont
le - droit de savoir ce que sont devenus
le tambour Collette et le fusilier Du-
four.
Nous allons le leur apprendre.
Et d'abord un mot. On se rappelle que
Gambetta, dans un magniiique discours,
a porté la question à la tribune. Ou se
rappelle aussi ce que M. le ministre de la
guerre a répondu. — En principe, a-t-il
dit, le gouvernement n'a pas dj compte
à rendre sur la manière dont il entend
l'obéissance passive. L'armée française
lui appartient.. 11 en use à sa guise avec
elle. If en fait ce qu'il veut. Il la dirige
et il la corrigée. Puisqu'on m'interroge,
qu'on sache 'que ce n'est pas seulement
deux soldats que nous venons d'envoyer
en Algérie, mais bien six ou huit; nous
en déportons tous les jours ; ce que nous
avons fait hier, nous le recommençons
aujourd'hui et le continuerons demain.
- En d'autres termes, l'Algérie est à la
fois la conquête de l'armée française et
l'oubliette de la loi militaire. Elle forme
le conscrit et dresse le récalcitrant.
L'ordre du jour pour l'un, la lettre de
cachet pour l'autre. Et silence dans les
rangs ! Pas un mot, pas un cri, pas un
geste. L'Algérie punit et ne rend pas
de compte. Tout soldat a dans sa gi-
berne, en même temps que son bâton de
maréchal de France, sa feuille de route
pour les* compagnies de discipline. On
épure l'armée. On ne se contente pas
d'une élite de héros, on veut une élite
de prétoriens. Le chassepot répond de
l'ordre, avant de répondre de la patrie.
Aux jours d'émeute, devant leurs tam-
bours battants et leurs clairons et leurs
étendards, nos soldats ont un état-majot
de sergents de ville. Le commissaire de
police commande au colonel. L'officier
de paix a un grade dans l'armée fran-
çaise, -
• it,
-' * * ■ -
Soit Nous ne discutons pas. Nous
prenons acte. Nous savons trop ce qu'il
en coûte pour souffler mot en pareille
matière. L'obéissance passive est om-
brageuse. Le général Lebœuf est une
sensitive. Donc, nous nous taisons et
nous permettons, en toute confiance, à
M. le substitut Aulois de regarder par-
dessus notre épaule ce que nous écri-
vons en ce moment.
Nous voulons simplement répondre à
cotte tpxeslit»u qui nous est adressée de
toutes parts :
:: Que sont devenus letambour Collette
et le fusilier Dufour?
: ir"" -
Ils ont voyagé de brigade en brigade
jusqu'à Marseille. Là on les a embar-
qués pour l'Afrique. Une fois en Afri-
que, on les a envoyés à Sétif. De Paris
à Marseille, ils ont essuyé toutes les ri-
gueurs de la discipline irritée. Le voyage
seul, qui a duré deux mois en compa-
gnie des gendarmes, a été une punition.
Les marches forcées par tous les temps,
a par pluie, neigé ët boue» , le coucher
dans les prisons, la « nourriture de
route » c'est-à-dire le pain noir, toutes
les brutalités de l'étape pénitentiaire, la
caserne devenue le cachot, ils ont tout
subi sans se plaindre. L'un, Dufour,
qui sera libéré le 27 avril, avait aisé-
ment pris son parti; l'autre, Collette,
qui n'a encore que deux ans défaits,
était ! ésigné. Ce qu'il regrettait surtout,
ce pauvre tambour, c'était sa vieille
mère qu'il laisse en France et qu'il sou-
tenait avec le peu d'argent qu'il pouvait
gagner en dehors du service. « J'étais
son seul soutien, nous écrit-il, grâce
aux vingt-cinq francs par mois que mon
travail me procurait et que j'étais si heu-
reux de pouvoir lui porter sans jamais
en conserver un centime. » Aussi, dans
Its heures tristes de ce voyage qui l'ar-
rachait à son pays, il ne pensait à elle
qu'en pleurant. Pour lui, la France,
c'était son village de Beaucamp près
Lille, et, dans ce village, un toit de
chaume, et, sous ce toit de chaume, les
cheveux blancs de la bonne vieille qu'il
ne reverra plus. Elle a soixante-treize
ans. Elle est infirme. Elle vivait tout
juste des économies de son fils. Elle
mourra loin de lui et avant peu. Elle
mourra demain peut-être. Et voilà pour-
quoi il pleurait tout en marchant à
grands pas entre deux gendarmes, le bâ-
ton à la main et le sac au dos, retour-
nant seulement la tête de temps à autre
vers l'horizon, comme s'il eût senti qu'il
s'éloignait plus encore de sa mère que
de sa patrie.
« ■
* *
En arrivant à Marseille, ils savaient
déjà, tant bien que mal, ce que le
Rappel faisait ici pour eux. « Nous avions
entendu parler de la souscription, disent-
ils, dans les prisons où nous avons séjqur-
né, le long de notre voyage.» La nouvelle
leur était arrivée confuse, obscure, inex.
pliqué©. Ils ug comprenaient pas beau-
coup qu'on s'occupât tant d'eux. Ce
qu'ils avaient fait était tout simple ; on
les punissait, c'était tout simple encore.
On n'est pas soldat à demi. La disci-
plina a toujours raison. C'est la vérité
en uniforme.
; N'importe, savoir qu'on s'intéressait
à leur sort, c'était pour eux une conso-
lation et une espérance. On les embar-
qua, Ils quittèrent la France.
Adieu patrie 1.
disent les Châtiments. Cela se chante êt
même cela se pleure.
it • •'
** =.
Une fois en Afrique, plus de nouvelles
du pays. La casemate dans le désert.
L'oubli, le silence, le châtiment. Ils
avaient contre tout cela cette héroïque
patience du soldat, peut-être plus brave
encore contre la tristesse que contre la
mort. Enfin, un jour, le 6 janvier der-
nier, comme ils arrivaient, accompagnés
par la gendarmerie, à leur nouveau corps
le 16* de ligne, on leur apprit qu'une
lettre chargée avait été remise à leur
adresse. Le lieutenant de la compagnie
la leur fit donner. Elle avait cinq ca-
chets de cire, ce qtii ne l'empêchait pas
d'être en retard et d'avoir trois mois de
date. Le cœur leur battit bien fort. Cette
lettre allait leur donner de leurs nou-
velles. ,
Pauvres gens, ils no savaient pas lire.
Que faire? Ils devinaient bien que cette
lettre était pour eux chose grave et
même chose dangereuse. Ils l'avaient
on verte furtivement, et furtivement ils
se la montraient, puis ils la cachaient.
Ils en avaient peur et ils n'avaient pas
tort. Si pour un soldat, un numéro du
Rappel c'est la sall e-de police, une lettre
du Rappel c'est probablement le cachot.
Prier le premier venu de leur en faire
la lecture, c'était se compromettre. A
qui se fier? Ils cherchèrent longtemps
et finirent par .découvrir un camarade
sùr. « Ce n'est qu'aujourd'hui, disent-
ils, que nous avons trouvé une per-
sonne à qui nous avons dû de connaître
votre lettre. » Quelle joie! Quoi ! le ra;
chat, la libération, la délivrance ! Ilélas!
ils avaient trop vite espéré. « M. le lieu-,
tenant-colonel qui commande en l'ab-
sence du colonel, nous a répondu avec
douceur que M. le ministre de la guerre
avait déjà envoyé le refus de nous lais-
ser remplacer. » Ainsi, tout était dit
pour eux. La douceur de M. Lebœuf
avait prononcé.
Ils voulaient nous répondre. Ils ne
savaient pas écrire. Le camarade qui
leur avait servi de lecteur dut leur ser-
vir aussi de secrétaire. C'est alors qu'ils
purent dicter les touchantes lettres que
nous ayons sous les yeux, DufQur, qui
sera prochainement libéré du service, ne
demande rien que ceci ; u Je vous serai
fort reconnaissant de me trouver un tra-
vail d'homme de peine. ou de journalier
pour le 27 avril, jour de ma libération. »
Collette, lui, qui n'a encore que deux ans
de service, demande seulement qu'on
paye à sa mère les intérêts de la somme
qu'on aurait consacrée à sa libération.
Ceci, c'est tout simplement sublime. Ils
ont douze mille francs à se partager. Le
premier refuse sa part, le second n'nc..
cepte de la sienne que de quoi soutenir sa
mère. Trois cents francs au plus pendant
un an ou deux. Car la septuagénaire,
sans son fils, pense bien moins à vivre
qu'à mourir ; et cette fortune se réduira
à cette obole filiale, et ce magnifique
don national ce sera, tout juste, le der-
nier morceau de pain de la. mère
chez le boulanger du village.
n -
* *
Quant à la décision du ministre de !a'
guerre, nous ne la jugeons pas, nous la
constatons. Aux cinquante mille ci-
toyens qui lui demandaient la libération
des deux soldats, à cette souscription
enthousiaste, à ce cri de tout Paris et de
toute la France, à cette sommation for-
melle de l'opinion publique, à la voix
indignée de Gambetta, au vœu solennel
du peuple, au vœu secret de l'armée,
M. le ministre de la guerre répond laco-
niquement et militairement : - Non. ;
Ainsi, voilà qui est entendu. Pour
avoir assisté pendant une heure à une
réunion publique, les deux soldats achè-
veront leur temps en Afrique. On leur
promet d'oublier et d'avoir pour eux de
l'indulgence, mais plus tard et s'ils sont
sages. Qu'ils se repentent et on verra.
Jusque-là, la discipline aura eu, comme
il convient, le dernier mot. Dufour, lui,
prçad son parti et c'est tout simple ;
mais Collette reste sous la main de
l'autorité militaire, il est suspect, com-
promis, livré. On a l'œil sur lui ; on le
eillo. Il n'a qu'à bien se tenir, ou
âre a lui. L'armée à Besoin d'un eiëDÍ
pie. On l'aura. En attendant, il y a en
France, à cinq cents lieues du drapeau
africain, dans une chaumière désolée,
une vieille femme qui va s'éteindre tris-
tement sans avoir revu celui que le peu-
ple voulait rendre à sa mère mourante,
mais que ce drapeau n'a pas voulu ren-
dre, à ce linceul.
CHARLES nUGo.
i ; i, immmmpb».
Voici les deux lettres des deux soN
dats 1
j V Sétif , le i9 janvier isro.*
Il y a trois jours seulement, qu'accom-
pagnés par la gendarmerie, nous sommes
arrivas à notre nouveau corps, le 16° de
ligner , -' - -,
: Deux lettres nous ont été remises. Ne
sachant lire, le lieutenant de la compagnie
a signé pour que l'on me. délivre celle qui
avait ciiiq cachets fm, cire et que j'ai su ce
ati" être la TÔtre.. ',' ',, ,,', •
Merci à vous, messieurs, et à vos amis,
ile^eequ'ils ont rânlu-iaire poupç-m&i en
réalisant les fonds nécessaires pour me
fairè remplacer. ¿,
Pour le moment il n'y faut point son-
ger." M. le lieutenant-colonel, qni com-
mande en l'absence du colonel, nous a
répondu avec douceur que le ministre de
la guerre avait déji envoyé le refus d'à
nous laisser remplacer, mais que nous
n'avions qu'à bien nous conduire dans nos
compagnie, on oublierait facilement ce
qui avait amené notre envoi en Algérie.
Ma libération doit avoir lieu le 27 avril
prochain. Je vous serais fort reconnaissant
de me trouver un travail d'homme, de
peine ou journalier pour cette époque,
en me faisant parvenir la réponse que
vous m'annoccez quelques jours à l'avance
à Sétff (chez'la personne à laquelle vous
aurez confiance), ville où je devrai ren-
trer à l'époque de ma libération.
Demain, jepari pourBou-Saadarejoindre
ma nouvelle compagnie.
Notts vous remercions bien sincèrement,
et mol en particulier.
- -, COLLETTE,
"SoîdaTau î^hafàTfloû, iro compagnie du
168 de ligne, à Bou Saada.
- Sétif, le 19 janvier 1870.
Ce n'est qu'aujourd'hui que mon cama-
rade et moi avons trouvé une personne, à
qui nous avons dû de nous faire lire la
lettre que nous avions trouvée à notre ar-
rivée à Sétif. Cette personne a bien voulu
faire la réponse que vous adresse mon
camarade, et qui est la reproduction de ce
qui nous est commun relativement aux
lettres individuelles que nous avons reçues
de vous.
Je me joins à lui pour-vous remercier,
ainsi que vos souscripteurs, des sommes
que vous avez encaissées dans l'intention
de nous faire exonérer.
Pour l'instant, il n'y faut point songer.
Mais comme je n'ai encore que deux an-
nées de service de faites, peut être Serai-je
plus heureux dans quelque temps, et alors
je pourrai retourner près de ma vieille
mère, âgée de 72 ans, de laquelle j'étais te
seul soutien, grâce aux 25 francs par mois
que mon travail de charretier me procu-
rait, et que j'étais si heureux de pouvoir
lui porter, sans jamais en conserver un
centime.
Le long et pénible voyage de deux mois
avec pluie, neige, boue et la nourriture de
route, en compagnie de gendarmes qui ne.
pouvaient améliorer notre position, le cou-
cher dans les prisons pendant ce long par-
cours, toutes, ces misères n'étaient rien
pour mot en comparaison du chagrin
d'être trop éloigne de ma pauvre mère
pour pouvoir aller l'embrasser de temps à
autre, avec l'aide de quelques sous écono-
misés, ou de lui envoyer les quelques francs
que, de mois en mois, on peut gagner en
France, tout en faisant son service.
A partir de Philippeville, nous avons été
un peu moins malheureux, grâce à un ci-
vil qui, malgré ses faibles ressources et
son grand âge, nous traitait en frères, et
c'est en nous rappelant le nom d'une per-
sonne dont il nous avait parlé dans les
meilleurs termes, que nous sommes par-
venus à faire lire nos lettres et obtenir que
l'on nous écrive les lettres que nous ,vous"
adressons.
Messieurs, il résulte de votre lettre que
vous avez réuni les fonds nécessaires à mon
remplacement.
Le ministre de la guerre refuse.
Si vous pouviez, messieurs, en atten-
dant une nouvelle décision du ministre,
employer les înlérMs en faveur de ma
bonne "mère, en les lui faisant parvenir"
tous les mois à elle-même ? Vous pourrez
vous assurer par vos amis de Lille (iNord)
que j'étais le seul soutien de ma mère, qui
demeare à B^at^a^vp, eantoiï de 13),.H"'iiu,.
arrondissement de Lille, d.
Nord, où je suis né. Mon frère aîné était
charretier comme moi; mais. malheureu-
sement, il était. loin d'aider la pauvre
mère. Je ne compte que sur vous pour
jflicMirjiXLaidft»..- .; '.AT'.-.-nr'"
Je pars demain pour rejoindre à fëordj-
Bouarreridj, ma nouvelle compagnie, 2e du
2a bataillon du 16e régiment de ligne.
Veuillez recevoir pour vous et vos sous-
cripteurs mes remerciements bien sincères
pour tout ce que vous avez réalisé ou pour-
rez faire pour ma vieille mère.
DUFOUR.
La commission de la souscription s'est
déjà réunie, et a pris une décision pro-
visoire.
Une somme a été envoyée à Collette
pour ses frais do retour.
Une somme a été envoyée à la mère
do Dufour, à laquelle il sera fourni uno
rente mensuelle de 50 francs.
La commission se réunira prochaine-
ment pour statuer sur l'emploi du sur-
plus do la souscription. Nous rendrons
compte aux souscripteurs de ses résolu -
Il est entendu dès à_présent, en priii:
Il est entendu dès â présent, en prin-
cipe, que la souscription ne sera pas dé-
touraée de son but, et devra être tout
entière affectée à l'armée.
A. Barbieux.
- r r- 'H' - J ï
., LA PETITE (îl'IKRS
Il y a trois semaines qu'il est en place, et
déj i le voilà ébranlé, ce ministère étonnantl
Il se disjoint. Il se disloque. Il se décelle.
M. Louvet se laisse choir sur M. Buffet
qui se laisse choir sur M. Daru. On dirait
des capucins de cartes. C'était un ministère
fragile, il en faut convenir. Il aurait dû
ne se présenter devant la chambre qu'orné
de la pancarte traditiônhelle:
Ne touchez pas, S. V. P.
Est ce croyable? Ce ministère qui, af-
firmait-on, devait sauver la France ; qui
avait la confiance du pays et la confiance
de l'empereur ; ce ministère admirable ; ce
ministère solide; ce ministère qu'on disait
devoir être éternel, voilà qu'au premier
choc il menace de se casser en deux I
Ce que c'est que d'avoir « la confiance
du pays» ! Avez-vous remarqué une chose?
Toutes les fois qu'on dit d'un ministère
« il a la confiance du pays », ce ministère
n'en a pas pour trente jours.
Le ministère Rouher ne possédait pas
la confiance du pays : il a duré très long-
temps. Le ministère de la Roquette n'avait
pas la confiance du pays : il a duré long-
temps. Le ministère Ollivier avait, dit-on,
la confiance du pays : Vlan î Il est par
terre. « La confiance du pays » est aux
ministres ce que le persil est aux perro-
quets.
A vrai dire, ce ministère ne paraissait
point être né viable. Il était composé d'or-
léanistes, d'impérialistes, de libéraux et
d'autoritaires. C'était un phénomène:
quelque chose comme les enfants à deux
tôtes ou à trois jambes. La tête orléaniste
regardait à gauche ; la tête impérialiste à
droite. Et il n'y avait pas une seule jambe
qui marchât dans le même sens. Si l'empe-
reur tient à conserver son ministère, il
sera obligé de le mettre dans l'esprit-de-
vin.
Ce ministère avait, en outre, quelque
chose de terrible contre lui, si, du moins,
il en faut croire M. Daru; quelque chose
que l'empire ne pardonne pas; un vice
épouvantable; une maladie affreuse. M.
Daru avait dit à la tribune:
- Nous sommes d'honnêtes gens*
Conçoit-on cela? Le sénat et le corps
législatif ont pris M. Daru au mot. Ils ont
fait cette réflexion pleine de justesse :
Puisque ce sont d'honnêtes gens, ils
ne peuvent point rester au pouvoir.
«
Edouard Lockroy,
- 1 1 1 - ÏT-—WÊtÈÔPm—mu. M.
LA SÉANCE - !
JL6 DISCOURS CE M. OLLIVIER. — UN ORDRE
DU JOUR ÉQUIVOQUE
La séance d'avant-hier au corps législa-
tif avait été presque dramatique. Celle
d'hier a été/un peu plus que grotesque.
M. Ollivier a parlé.
Mais' disons, auparavant, qu'il y avait
une certaine animation danf.1 les couloirs
et à la salle des Pas-Perdus.
— Eh bien ! vous savèz la grave histoire,
disait le député G. à un journaliste, Qi-
li'^ier est furie«5 £ cc«ltïô Forcârie; plus en-
core "ëijIitr tf'hi"èr.;; Jg(j,àtin'.atl l'af-
F; jf:"
faire des acquits à-cautfàû et- im Q
sions temporaires est rompue.
Ce n'est pas possible I .::;,;j
C'est plus que possible, c*M
IlIUM_",.I- S~)r~
- Allons donc !
-,Oui, il va aujourd'hui même, à cinq
heures et demie, développer en quelques
mots eon programme politique et écono-,
mique, puis poser la question de cabinet
sur ce programme. Après quoi, si la iDa.
jorité lui donne raison, il n'aura plus be-
soin pour rester ministre de la protection
humiliante des chambellans et des grands-
veneurs. il sera un vrai ministre parlemen-
taire. La bataille sera rude; mais il com-
prend enfin qu'il en a besoin, qu'elle seule
peut le faire prendre au sérieux, et il la
désire de toute son âme.
- vous M'étouffez,
-- Vous verrez,.. Dans deux heures, il y
aura à la tribune une déclaration nette,
positive, qui vous fermera la bouche.
Les bancs de la chambre se garnissent
rapidement. On ehuchoie. Ou se groupe,
on confère. Après quelques incidents, M.
de Foreade monte dogmatiquement à la
tribune, parle plus dogmatiquement en-
core. Personne, mâme dans les rangs da
la droite, n'écoute les phrases pénibles,
pesantes, sans lumière, de l'ancien mi-
nistre. On n'applaudit môme pas, on s'ifu •
patiente viiblement. '-
t Ah 1 si vous aviez encore un portefeuille
sous le bras, monsieur le grand-électeur,
et des préfectures ou des bureaux de tabé c
à distribuer, on savourerait avec délioes
toutes vos paroles, et M. Prax-Paris, M.
Laurent- Descours, M. Perras crieraient :
brwo. Mais vous n'tes plus rien, on dé*
clare sur tous leif^ancs que votre discours
est rogne, pédantesque, diffus. Quand au -
ra-t.ilfini? est-il ennuyeux avec ces pé-
riodes qui s'éternent? Voilà le mot qui
circule partout.
Enfin; il descend de Ja tribune. Seu!, les
ultra-habiles le félicitent. Déception c'est
M. Jules Brame qui le remplace. Du moins;
M. Brame sait dire lestement ce qu'il a sur
le cœur. Silence! M. Ollivier va parler.
Quoil M. Louvet, le ministre spécialise
retire sous tente; ce n'est pas lui, ministre
du commerce, qui va exposer la politique
commerciale du rrii". re! Que voulez-
vous? M. Louvet a, peur, M. Louvet ne sait
pas parler, M. Louvet craint de se compro-
mettre non-seulement autres de la cham-
bre, mais même auprès de ses collègues.
Donc c'est le ministre de la justice qui va
parler de commerce, lin autre jour c'e^l la
ministre des affaires étrangères qui parlera
sur la justice.
Les conversations partienières s'étei-
gnent. Un silence profond règne dans l'as-
semblée. Le cabinet va dire enfin ce qu'il
est, ce qu'il veut, ce qu'il compte faire. On
attend une révélation politique et indus-
trielle.
Mais les minutes s'écoulent et la révé-
lation attendue ne vient paî. Mi. Ollivier
enfilades périodes, il parle de sa dignité,
de sa loyauté, dé sa fierté, mais il be garde
bien d'indiquer la ligne politique qu'il.1'
compte suivie. M. Thlers avait semblé
dire : Yous savez, le cabinet actuel est un
chapeau que nous avons placé sur la ban-
quette gouvernementale pour garder notre
place pendant ^entr'acte; - M. de For-
cade avait répondu : Mais non, ce n'est
pas votre chapeau, c'est le nôtre, voyez la
marque : Napoléon 111 et compagnie.
M. Ollivier s'écrie aujourd'hui :Je ne
suis le chapeau de personne, su#to
bien qu'on ne me prend pas au sérieux;
mais j'ai en moi-même une conliaiice
qu'on ne" partage pas et qui est d'autant
plus vive; j'accepte le concours di3 tou, ra
protection de personne; vous n'aurez avec
moi ni un gouvernement anti-parlemas-
taire, ni un réghae à la Forcade, ni un ré-
gime de liberté, vous auitz un
ment Ollivier, un régime Ollivier.
Cela doit vous suffire. Après ça, l11ti,
; sieurs les députés, vous savez bien que
vous ne resterez députés qu'autant que vous
m'admirerez. Si vous m'ennuyez par voir-*
opposition, rrran! je vous disons. Tous
voyez que je suis un grand homme, digne
comme vous (oui 1 oui 1) 11er cornme voua
(oui 1 oui 1).
Quant à notre politique, dans les affai
res, industrielles, - ce sera tout ce que
vous voudrez. Si vous césirez le libre -
échange, n'oubliez pas que j'ai été ¡;¡,.lJ
un libre-échangiste déterminé. S, vous
voulez le protectionnisme, souvenez -vous
qu'ayant été libre-échangiste quand rétnh
hélas! républicain, je m pius plti- l'être
aujourd'hui. Je ne dénoncerai t:i? ,f
traités de commerce, ,-'eh dé;,ie= ît ?t
M. Gladstone et à M. Michel Guerrier,
mais je les trahirai 11 dé.a i, oomm*.1 j'ai
déjà trahi tant de r;H;<:ps. Tout cela dé-
pend de vous. Je n'ai point d'i\lCrf' sur des
problèmes ;i graves. Entre nous, je n'y ai
jamais pensé séries i ment.
tairez-moi n^iai%tje 1 Oh 1 ou i, laisse?-
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