Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1879-05-11
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 11 mai 1879 11 mai 1879
Description : 1879/05/11 (N3348). 1879/05/11 (N3348).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75305643
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/08/2012
}Wt-'SS4.8 - Dimanche ii Mai 1879
î«e fttimèVos» — "®éf[5fei*iemcnts 3 15 ce
22 Floréal an 87V mi, 3348
- - IIÊBASTJQN -
S'adresser au ~Sccr..taW'dc la Rédaction -
De 4 à 6 heurts du. soir
18, BUE DE VALOIS, 18
Lee manuscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGI?, CERF et O
6, place de Kf Bourse, G
ADMINISTRATION
18, SU ID Àois, 18
ABiia^MENTg
1 PARIS"V V
Trois mois. Qh n"
Six mois. rSû »
DÉ PARTEMEKTS
Six mois.ois 13 59
pu mois. 27 »
Adresser lettres] et mandats
A M. EWsTEsi LEFÈYRE
ADMINISTRATEUR-GERNAT
QlE INTERPELLATION EN FUITE
Rien de plus réussi, rien de plus
profondément comique, rien de plus
digne du Palais-Royal que la scène
[ jouée, nu Sénat, par l'honorable M. de
Gavardie. Le président du Sénat lit
tinc lettre par laquelle M. de Gavardie
demande à interpeller le garde des
sceaux. — Quand on voudra, dit M. Le
Royer.— Aujourd'hui! tout de suite!
'.s'écrie la gauche. — Diable! fait M. de
Gavardic. - Quoi donc? s'étonne le
président. Vous n'avez donc pas en-
tendu, monsieur de Gavardio? l'in-
terpeUation que vous désirez lui faire,
le garde des sceaux l'accepte séance
tenallte. Est-ce que vous n'allez pas
vous précipiter à la tribune? — Par-
don, bnlbuiic le sénateur des Landes,
mais il me semble que le Sénat n'est
pas en nombre. — Vous vous trom-
pez, le Sénat est plus nombreux
qu'à son ordinaire. L'honorable séna-
teur s'entête, on consulte le bureau,
qui donne tort à son entêtement. Alors
M. de Gavardie, n'ayant plus do pré-
texte pour ajourner son interpellation,
la retire.
Est-ce assez amusant? Dites-moi dans quel rôle
Vous avez va Lassouche ou Git-Perez plus drôle ?
Cela vaut le : — « C'est le moment
de nous montrer, cachons-nous! » le :
« Madame est-elle chez elle ? — Oui,
monsieur. — Alors, je repasserai, » et
le : — « Comment ! il y a des voleurs
dans la maison et tu 0/ viens sans ton
fusil?—Merci, ils me le prendraient! »
s Mais ce n'est pas seulement pour être
celui qu'il est, comme on dit dans les
drames de Calderon et de Lopez de
Voga. et pour contribuer largement à
l'hilarité de ses contemporains, que
l'honorable sénateur des Landes a
donné à la Chambre haute le spectacle
d'une scène de vaudeville qui no dépa-
rerait. pas le répertoire de M. Eugène
Labiche. Il avait encore un autre motif
d'exécuter cette retraite en bon ordre
moral.
, Sur quoi avait-il demandé à interpel-
ler le garde des sceaux ? « Sur les gra-
ves attaques portées à la dignité et à
l'indépendance de la magistrature. »
Vous imaginez-vous cette interpellation
tombant au moment où les prêtros d'Aix
et de Tarascon viennent d'écrire publi-
quement que, si le conseil d'Etat con-
damnait leur archevêque, ce serait pour
leur archevêque une gloire et un titre
à leur vénération! Ln Sénat, d'une seule
voix, aurait voté : — Vous ayez raison,
bon Gavardie. La justice n'a jamais été
aussi effrontément outragée que par
les prêtres d'Aix et de Tarascon. Cela
est intolérable. Nous sommes tous d'ac-
cord avec vous, il faut frapper les prê-
tres d'Aix et de Tarascon.
f Telle est la réponse à laquelle M. de
Gavardie se serait exposé en interpel-
lant le ministère sur l'impunité des
« attaques portées à la magistrature » le
lendemain des attaques portées à la
justice par le clergé de l'archevêque
qu'une section du conseil d'Etat vient
de condamner. Je disais avant-hier que
la lettre de ce clergé avait joué un vi-
lain tour à l'interpellation de M. Ches-
nelong : elle en a joué un plus vilain
à l'interpellation de M. de Gavardie.
C'est pourquoi ce n'est pas seule-
ment l'honorable sénateur des Landes
qui n'a pas voulu parler, c'est toute la
sénatorerie monarchico-cléricale qui
n'a pas voulu qu'il parlât. Comme je
comprends que M. de Lareinty ait tout
fait pour empêcher M. de Gavardie
d'ouvrir la bouche, jusqu'à nier que le
garde des sceaux fût pour l'interpella-
tion après que le garde des sceaux avait
dit et répété qu'il était à la disposition
du Sénat et de M. de Gavardie !
Où la loi pourrait frapper ces salariés
de l'Etat qui insultent et provoquent
l'Etat, il n'y a pas besoin de le deman-
der aux républicains, les monarchistes
ont été les premiers à le dire. Nous
rappelions récemment ces paroles pro-
noncées en 1832, à la tribune de la
Chambre des députés, par un homme
que personne ne dira des nôtres, l'aîné
des Dupin :
« On ne peut pas tolérer l'impudence,
— je ne puis pas ici employer d'au-
tres termes, - d'un ministre du culte
qui se montrerait à la fois hostile au
gouvernement et aux lois, et qui vien-
drait, son mandat à la main, exiger
qu'on le payât. Le gouvernement,
dans le cas que je viens de signaler,
doit donc, par une suppression rigou-
reuse de son traitement, punir l'ecclé-
siastique qui s'écarte de son devoir. »
Et ce n'étaient pas là, sous la mo-
narchie, de vaines paroles. Le droit
de suppression était si incontesté que,
le même jour, à la même tribune, le
ministre de l'intérieur et des cultes dé-
clarait « en avoir usé trois fois ».
La République ne ferait donc qu'une
chose dont la monarchie lui a donné
l'exemple en frappant les factieux de
sacristie à l'endroit sensible : à la
bourse.
AUGUSTE VACQURRIR.
Les congrégations non autorisées
Une des jolies prétentions des cléri-
caux, c'est de soutenir que les congré-
gations non autorisées sont parfaite-
ment régulières, que, si elles existent,
ce n'est pas en vertu d'une simple to-
lérance du gouvernement, et que le
gouvernement, s'il voulait les dissou-
dre, ne le pourrait pas.
Le raisonnement qui conduit à cette
conclusion est celui-ci :
Qu'est-ce qu'une congrégation? c'est
une association. — Quel est le texte
qui régit les associations? C'est l'arti-
cle 291 du code pénal. — Que dit cet
article? Il défend aux associations de
plus de vingt personnes de se former
sans l'agrément du gouvernement, mais
il ajoute que, dans ce nombre de vingt
personnes, ne sont pas comprises celles
qui sont domiciliées dans la maison où
l'association se réunit.
N'est-ce pas là, s'écrient triomphale-
ment les cléricaux, la situation iues
congrégations religieuses ? Du moment
qu'elles se composent de personnes qui
sont toutes domiciliées dans la maison
où l'association se réunit, il va de soi,
concluent-ils, qu'elles sont dispensées
de la condition du nombre, et, par
conséquent, de la nécessité de l'autori-
sation préalable:
Ce raisonnement n'a pas le mérite
d'être neuf, car voici un certain nombre
d'années que les amis des congréga-
tions le ressassent, mais il n'a pas non
plus le mérite d'être bon. et il a été ré-
futé autant de fois qu'il a été pro-
duit.
Et la réfutation, qui est fort simple.
tient tout entière dans cette courte
observation que ce n'est pas l'article
291 du code pénal qui régit les congré-
gations religieuses, que c'est le décret
du 3 messidor an XII, lequel porte,
dans son article 4, le principe formel
que voici : - « Aucune aggrégation
d'hommes ou de femmes ne pourra so
se former à l'avenir sous prétexte de
religion, à moins qu'elle n'ait été for-
mellement autorisée par décret, sur le
vu des statuts ou règlements selon les-
quels on se propose de vivre dans cette
association. »
Mais, objectent les cléricaux, l'article
291 du code pénal est postérieur au
décret de l'an XII. Donc il l'a abrogé.
Non. Il ne l'a pas abrogé. Nous sa-
vons fort bien qu'en 1845, MM. Ber-
ryer, de Vatimesnil, Béchard. Par-
dessus, et autres jurisconsultes —
excellents sans doute, mais beaucoup
plus catholiques encore qu'excellents
— ont essayé, dans une consultation
fort connue, de représenter cette préten-
due abrogation comme une vérité ;
mais ils n'ont jamais réussi à le faire
croire à d'autres qu'à ceux pour le
compte desquels ils le disaient.
Veut-on des preuves? Elles a bon-
dent. Nous ne les citerons pas toutes.
Nous en choisirons seulement deux :
La jurisprudence d'abord. En 1849,;
la question duit soumise à la cour do
cassation. Les demandeurs, qui étaient
des congréganistes non autorisés,,
avaient accumulé dans leur pourvoi
tous les arguments auxquels l'article 2911
peut donner lieu. Ils le prenaient d'ail-
leurs sur un ton très haut, et ils termi-
naient même leur argumentation par
cette parole, qu'ils empruntaient à «un
éloquent dominicain » : Les prêtres et
les moines sont éternels ! — Sait-on à
quel résultat est arrivée toute cette
science? A ce que le conseiller rappor-
teur ne lui a même pas fait l'honneur
de lui répondre: « Ce serait, disait à
la cour ce conseiller, une tâche facile,
mais longue, et à notre sens, dépour-
vue de toute utilité, que d'opposer à
ces arguments, ainsi qu'aux textes et aux
citations qui les appuient, l'autorité de
textes et de décisions contraires. Vous
penserez sans doute qu'il ne convient
pas d'insister devant vous sur des prin-
cipes de droit public tant de fois recon-
nus et appliqués, qui considèrent com-
me illicites les congrégations religieu-
ses non autorisées, et vous nous per-
mettrez de laisser sans réponse tout ce
qui a pu être dit par les demandeurs
pour ébranler une vérité que le décret du
3 messidor an XII et les lois postérieures
ont rendue incontestable. » — Et le pour-
voi des congréganistes fut rejeté. L'ar-
rêt est du 26 février 1849.
Ceci est déjà assez clair. Il y a quel-
que chose de plus clair encore : c'est
la conduite même des congréganistes.
Si l'article 291 leur était applicable,
comme à de simples associations, ils
seraient autorisés- qnand ils le sont —
comme le sont des simples associations,
c'est-à-dire que l'autorisation pure-
ment administrative leur serait donnée
par le ministre de l'intérieur.
Est-ce que c'est ainsi que les congré-
gations, quand elles se font autoriser,
reçoivent l'autorisation?—Pas le moins
du monde. Elles sont autorisées par un
décret, à la suite de l'examen de leurs
statuts fait par conseil d'Etat,— confor-
mément au décret de messidor an XII.
Nous avons nous-même publié, il y a
quelque temps, une longue liste de ces
autorisations. Allez donc voir s'il y en
a une seule qui soit donnée d'après les
règles de l'article 291 du code pénal.
D'où il suit que les cléricaux—ils
le prouvent par leurs actes mêmes —sa-
vent fort bien où est la vérité.
Et cette vérité, pour les congréga-
tions non autorisées, c'est que le gou-
vernement a le droit absolu de les
mettre à la porte.
ERNEST LEFÈVRE.
- - ■ ■ ■ ■
L E 3 GRACES
On repète toujours de temps à au-
tre : « La question de l'amnistie, nous
l'avons tranchée. avec de.* grâces. »
Nous avons l'intention d'examiner ici
même, par des exemples individuels,
ce que vaut la prétention. Prenons,
pour commencer, les membres de la
Commune.
En graciera-t-on un seul? Cela paraît
fort douteux ; je désire me tromper :
j'entends d'ici ce que vont dire les
hommes chez qui huit années n'ont rien
effacé des passions de la guerre civile ::
« Quoi! ces hommes qui ont soulevé
Paris, qui se sont sauvés! etc. » Il y au-
rait beaucoup à dire pour rétablir sur
chaque point l'exactitude historique.
-Mais je ne veux examiner que des si-
tuations personnelles. Je prends deux
noms pour commencer : Arthur Ar-
nould, Jourde.
Quel fut leur rôle? Je me garderai
bien d'essayer de le dire. J'aime mieux
le laisser dire à des historiens dout les
livres sont, en quelque sorte, une suite
de la répression ;—■ à des historiens im-
pitoyables pour le mouvement du 18
mars; — à des historiens dont on peut
quelquefois regretter les aveux, mais
seulement quand il s'agit, pour eux, de
charger le mouvement du 18 mars et
de justifier ou d'excuser jusqu'au mas-
sacre qui s'appela la victoire de la
cause légale.
Lisez le livre de M. Jules Simon, par
exemple: il rend justice aux eiforts
faits par Arthur Arnould (efforts sou-
vent très courageux) pour combattre
les excès de tout genre. Et M. Jules
Simon a mille fois raison: il suffit de
parcourir à l'Officiel le compte rendu
des séances de la Commune, pour voir
qu'Arthur Arnould a lutté avec la der-
nière énergie contre toutes les propo-
sitions violentes. Il a partagé les pas-
sions de Paris ; il a cru à la Révolution
du 18 mars : mais il faut reconnaître,
et tout le monde reconnaît, qu'il s'est
conduit alors en honnête homme, dont
l'honnêteté sait être vaillante.
Je pourrais invoquer la même auto-
rité pour Jourde. Je préfère citer le
nom d'un écrivain connu par la pas-
sion, je puis le dire, enragée, qu'il a
apportée dans l'étude de cette histoire.
M. Maxime Ducamp a compris le récit
de la guerre civile comme une sorte de
roman; il n'a pas été satisfait des in-
comparables horreurs de cette époque :
il en a ajouté; il a fait trois énormes
volumes pour prouver que les insurgés
avaient voulu brûler même les monu-
ments qu'ils ont épargnés et assassiner
tous les prisonniers qu'ils ont iaissésen
vie. Dans ses énormes volumes, il ne
peut parler d'un insurgé sans le compa-
rer, soit à tous les démons de toutes les
mythologies, soit à tous les animaux
féroces de tous les climats. Sa façon
d'écrire est presque un cas de patho-
logie mentale : il a la monomanie de
l'horreur.
On sait quelles dénonciations il a
mêlées à son livre; le nommer, c'est
tout dire. Eh bien! M. Maxime Ducamp
est obligé de reconnaître et reconnaît
dans Jourde un homme d'une probité
incontestable. Il nous montre le délé-
gué aux finances gardant, au milieu
du maniement de millions, la vie plus
que modeste du petit employé. Il dit
que c'est à Jourde, en même temps
qu'à Beslay, qu'on doit le salut de la
Banque de France. Ses conclusions, c'est
que la justice militaire aurait peut-être
été bien inspirée en se contentant de
condamner Jourde, pour usurpation de
fonctions, à une peine allant au maxi-
mum à six ans de prison.
M. Maxime Ducamp! le nom suffit.
Il n'est pas suspect en cette matière. No-
tez que pendant la Commune, Jourde,
Arnould, étaient dénoncés comme des
« traîtres » par des feuilles qui pous-
saient aux pires violences. Les mêmes
qui ont dénoncé Chaudey demandaient
qu'on expurgeât la Commune de ces
modérés qu'elles traitaient de « Versail-
lais ». Eh bien! je le demande, com-
ment le public pourra-t-il croire qu'on
a essayé d'effacer, dans ce qu'on ap-
pelle la mesure du possible, les traces de
la guerre civile, tant que des hommes
comme Arnould et Jourde restent des
proscrits?
CAMILLE PELLETIN.
————————— —— ———————
COULISSES DE VERSAILLES
La commission du budget est saisie, par
le rapport de M. Noirot sur le budget de
la Légion d'honneur, de plusieurs questions
intéressantes qui concernent cette institu-
tion, notamment celle qui regarde la
composition du conseil de l'ordre.
Dans son rapport, M. Noirot fait remar-
quer que ce conseil, qui est renouvelable
par moitié tous les deux ans, n'a jamais,
été modifié dans sa composition depuis la
chute de l'empire. Or, il est actuellement
formé, presque en totalité, des adversaires
les plus résolus de la République. Voici,
d'ailleurs, les noms des membres qui en
font partie actuellement :
Le général Vinoy, grand chancelier,
président.
Le général Dlkftnd de Villers, secrétaire
général de l'ordre, vice-président.
Membres : MM. le général d'Autemarre-
d'El'villé, le vice-amiral Chopart, le vice-
amiral de Chabannes ; M. Rehouet, prési-
denthonoraire à la cour des comptes; MM.
Boinvilliers, général de Maudhuy, baron
Larrey, député; marquis d'Oms, conseiller
honoraire à la cour de cassation ; vicomte
Reille ; Aucos, président de section au
conseil d'Etat, et le marquis de Chateau.
renard, ancien conseiller d'Etat.
Or, le général Vinoy, l'amiral Chopart,
M. Boinvilliers, M. le baron Larrey, le
marquis d'Oms, le vicomte Reille, sont des
bonapartistes avérés. L'amiral Chopart est
un chef du parti de Ghislehurst dans le
Pas-de-Calais, ce bourg pourri du bona-
partisme; M. Boinvilliers est l'ancien sé-
nateur de l'empire; M. le marquis d'Oms
est l'ancien président de la haute cour qui
a jugé l'affaire du complot sous l'empire,
en 1869; M. le vicomte Reille est ancien
député officiel au Corps législatif de l'em-
pit'c et frère du sous-secrétaire d'Etat du
16 mai.
Quant à M. de Châteaurenard, il était
un des membres du conseil d'Etat actuel
élu par la majorité réactionnaire de l'As-
semblée nationale, et il a donné sa démis-
sion de conseiller d'Etat depuis peu.
Sur les autres membres, sans carac-
tériser leur opinion politique, on peut
dire, sans hésitation, et à une ou deux
exceptions près, qu'ils sont tous de fer-
vents réactionnaires.
Etant données les attributions considé-
rables de ce conseil, qui a des pouvoirs
presque sans limites sur tous les mem-
bres de Tordra, on ne comprendrait pas
que les membres précités eussent, avec
le consentement du gouvernement, le pri-
vilége de se perpétuer indéfiniment dans
leurs fonctions.
Or, l'occasion se présente dans quel-
ques jours d'apporter quelques modifica-
tions à ce conseil. C'est le 29 mai que
doivent être renouvelés les pouvoirs
d'une moitié des membres. Nous voulons
espérer que la gouvernement mettra cette
circonstance à profit pour introduire dans
ce conseil des hommes dévoués à la Ré-
publique, au lieu et place des réaction-
naires sortants.
Le rapporteur a également appelé l'at-
tention de la commission sur la situation
des maisons nationales d'éducation de
filles qui dépendent de l'ordre de la Légion
d'honneur. Trois maisons de ce genre
existent : celles de Saint-Denis, de Saint-
Germain et d'Ecouen; or, ces deux der-
nières sont dirigées par une congrégation,
celle des Dames de la Mère-Dieu.
Le rapport exprime le vœu que l'ensei-
gnement dans ces maisons soit rendu à
des laïques, et que ces établissements
soient placés à l'avenir sous la direction du
min sLro de l'instruction publique.
—————— —— ————————
L'ART INDUSTRIEL
Parm: les projets déposés à la Cham-
bre, un des plus importants est celui
de M. Antonin Proust, sur les musées
et écoles d'art industriel. Par une bizar-
rerie étonnante, c'est à l'art industriel
que la France doit en grande partie sa
richesse et sa supériorité sur les mar-
chés européens, et de tous les enseigne-
ments, c'est celui de l'art industriel
que nous négligeons le plus. Nos écoles
d'art s. et-méti ers ne s'occupent point
d'art. Jusqu'aujourd'hui, des sociétés
privées, à la tète desquelles est r Union
centrale, ont seules tenté quelque chose.
Notre école des arts décoratifs est
dotée insuffisamment. Et d'ailleurs,
elle commence à peine à fonctionner
d'une manière sérieuse.
Il faut une disposition particulière de
notre race; il faut surtout l'influence
du grand milieu parisien pour que nos
Feuilleton du RAPPEL
DU 11 MAI
~t
42
Zt'E'v ADÉ
fcé>MAN CANAQUE
CHAPITRE XIII
Ei^oir et désespoir
(Suite)
Armande était si complètement absorbée
: par la situation de son ami que celle des
trois autres prisonniers n'effleura même pas
son esprit. Et tandis que 'Florissant, ac-
croupi comme un fauve dans l'étroit carré
qu'on lui avait donné pour cage, se répé-
- tait avec une tristesse mêlée d'orgueil :
- Quel ne sera pas le désespoir d'Ar-
juande ch apprenant que je suis retombé
entre les mains de mes bourreaux I —
celle-ci rêvait uniquement aux moyens
de faire passer à un autre des paquets
Voir le Happel du 31 mars au 10 mai.
de linge et des kilogrammes de chocolat.
Elle ne savait à quelle catastrophe attri-
buer le désastre. Une trahison du corsaire
qui avait l'habitude invétérée de vendre
ceux qui s'adressaient à lui, paraissait au
premier abord la chose probable. Mais en
ce cas, elle eût été compromise avant qui
que ce fût, puisqu'elle avait tout machiné.
Comment n'était-elle pas déjà arrêtée?
Sans aucun doute elle le serait bientôt.
Cetto perspective lui souriait particulière-
ment. Elle se réjouissait d'aller rejoindre
Justin dans sa prison, car la plupart des
femmes s'imaginent que, si elles étaient
arrêtées en même temps que ceux qu'elles
aiment, elles iraient les rejoindre dans
leur prison. Souvent même elles réussis-
sent à se faire appréhender au corps dans
ce but, et leur surprise est extrême quand
on les dirige sur Saint-Lazare, pendant que
leurs complices mâles sont expédiés à
Clairvaux.
Dans cette fièvre quasi-typhoïde qu'on
pourrait appeler le délire du sacrifice, elle
descendit sur la grève au devant des gar-
diens, sans aucun doute chargés d'exécuter
les ordres donnés à son sujet. Elle vit re-
venir toute l'escouade ployant sous le pro-
duit de la fouille. Tous les papiers, lettres
et manuscrits saisis chez Danclade et Flo-
rissant étaient portés, soigneusement fice-
lés, par deux surveillants qui se dandinaient
victorieusement comme des hommes sûrs
de tenir les fils du complot.
Mais ils défilèrent tous devant Armande,
sans jprendre garde à elle. Elle en conclut
qu'Hubert n'avait pas parlé et que peut-
être, surpris au moment décisif, l'évadeur
avait été fait prisonnier avec les évadés.
Ce beau trait le grandit instantanément
dans l'esprit d'Armande, qui lui octroya
une amnistie complète pour tous ses agio-
tages passés et futurs sur la chair hu-
maine. Après tout, la façon dont le capi-
taine comprenait le droit des gens tenait
peut-être à son éducation première.
Elle brûlait de partir pour Nouméa, afin
d'éclaircir ses doutes et surtout de se
rapprocher de Danclade. Elle se promène-
rait sous les fenêtres de la prison. Ce se-
rait toujours ça. Victor Hugo, dans Notre-
Dame de Paris, dit que beaucoup de gens
se contentent d'être contre un mur der-
rière lequel il se passe quelque chose.
Quand ce quelque chose est représenté
par celui qu'on aime, le mur, à un mo-
ment donné, peut devenir éloquent et dia-
phane. ,
Elle avait aussi pris une résolution ré-
pugnante, mais impérieuse : celle d'aller
trouver Rouvion et d'arriver, par l'inter-
médiaire de ce familier de l'inquisition, à
faire savoir à Danclade qu'elle était. là,
qu'elle pensait à lui et qu'elle ne l'aban-
donnerait pas.
Elle serait au premier abord assez em-
barrassée vis-à-vis de l'agent, à qui elle
avait caché avec tant de soin les prépara-
tifs de l'évasion ; mais elle s'appliquerait
surtout à le convaincre qu'elle les igno-
rait ; sans quoi Rouvion devinerait que,
dans la pièce à tiroirs composée j)ar lui. il
avait joué tout le temps le rôle de Jo-
crisse, et sa vengeance serait d'autant
plus terrible pour Armande qu'elle retom-
berait évidemment sur Danclade.
Elle constata qu'il ne se doutait de
rien. Il mettait tant d'attention à tenir
son personnage qu'il ne lui en restait plus
pour étudier Armande.
— Eh bien, lui cria-t-il, dès qu'il la vit
entrer dans la première des deux pièces
de son logement; dont Ratouma avait ouT
vert la porte, avec le sourire satisfait de
quelqu'un qui vient de dîner en ville, eh
bien! le malheureux, n'a donc pas profilé
de nos conseils?
— C'est affreux! répondit-elle; et pour
aller au devant des questions, elle ajouta :
Depuis huit jours il était tout changé, il
ne parlait plus, ne riait plus. Je le croyais
malade.
— Comment ne vous a-t-il pas mise dans
la confidence de ce plan absurde, de-
manda Rouvion, lui qui ne vous cache
rien ?
- Il avait sans doute juré le secret.
Vous ne le connaissez pas : quand il a juré
le secret, il se laisserait couper la tête plu-
tôt que d'ouvrir la bouche. Et maintenant
où-est-il?
— Dans la prison militaire, fit négligem-
ment l'agent de culture, qui s'inquiétait
des détails de l'évasion beaucoup plus que
du sort des évadés. Ainsi, reprit-il, Dan-
clade a construit cet énorme bateau avec
tant de mystère que vous ne vous en êtes
même Das aDercue1
— Ohl il n'a rien construit du tout,
soyez-en sûr. D'abord il est bien trop mal-
adroit de ses mains. Ensuite, je l'aurais
bien vu travailler.
— C'est pourtant certainement lui qui
a tout organisé.
— Pas le moins du monde. On sera venu
le chercher au dernier moment.
— Voyons, riposta Rouvion, puisque
vous venez de me raconter qu'il était pré-
occupé déjà depuis huit jours.
Armande se tut de peur de s'enferrer.
L'agent lui exprima sa surprise de ce que
Danclade n'avait même pas invité le père
Alavaill à tenter avec lui l'aventure.
— En effet, j'en ai été très étonnée
aussi, mentit effrontément la jeune fille.
C'est même ce qui m'a fait supposer qu'il
n'avait été averti que quelques minutes
avant le départ.
Puis elle tira de son petit panier deux
livres de chocolat et quatre oranges,
qu'elle supplia l'agent de faire parvenir au
prisonnier, les oranges et le chocolat cons-
tituant essentiellement ce qu'on pourrait
appeler les cadeaux de femmes. Elle avait
tant d'envie que cette provende fut remise
à destination, qu'elle s'oublia au point
d'appuyer ses sollicitations p:1r ces mots :
— A vous, rien ne sera, plus facile.
Rouvion eut dans les yeux un éclair de
soupçon. Il regarda fixement Armande,
tout en présentant avec de grands gestes
la défense suivante :
- Facile r à un vieux proserit comme
moi! Ah! bien oui! Il suffirait gue je.
déposasse pour lui ce simple petit paquet
au greffe pour qu'on s'imaginât qu'il est
rempli de picrate. On l'examinera sur
toutes ses faces. Il ne contient rien de
particulier au moins votre paquet? Pas do
lettres? Pas de papiers compromettants?
— Seulement du chocolat et des oran-
ges. Voulez-vous y ajouter ces deux paires
de chaussettes à mon père, parce que les
siennes doivent être toutes mouillées.
— Donnez toujours ! mais -le diable
m'emporte si je sais comment lui glissor
tout ça. Lorsque vous aurez des lettres à:
lui faire passer, confiez-les-moi. Á\CC
quelques sous à ses gardiens, ce sera une
affaire faite. Ah ! si vous connaissiez ces
gens-là! '! *
Armande remit ses provisions entre les
mains de Ratouma et prit congé de l'a-
gent, qui la congédia avec ces bonnes pa-
roles :
— Je ne puis pas faire grand'chose;
soyez tranquille pourtant. Je veillerai sur
lui.
Elle était déjà sur le carré quand il la
rappela :
— A propos, dit-il, s'il vous écrivait da'
son côté pour vous demander quelque pe-
tit service, ne manquez pas de me mon-
trer la lettre. Je me chargerai de tout.
ÙN E VAD 3
(A suivre)
î«e fttimèVos» — "®éf[5fei*iemcnts 3 15 ce
22 Floréal an 87V mi, 3348
- - IIÊBASTJQN -
S'adresser au ~Sccr..taW'dc la Rédaction -
De 4 à 6 heurts du. soir
18, BUE DE VALOIS, 18
Lee manuscrits non insérés ne seront pas rendus
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGI?, CERF et O
6, place de Kf Bourse, G
ADMINISTRATION
18, SU ID Àois, 18
ABiia^MENTg
1 PARIS"V V
Trois mois. Qh n"
Six mois. rSû »
DÉ PARTEMEKTS
Six mois.ois 13 59
pu mois. 27 »
Adresser lettres] et mandats
A M. EWsTEsi LEFÈYRE
ADMINISTRATEUR-GERNAT
QlE INTERPELLATION EN FUITE
Rien de plus réussi, rien de plus
profondément comique, rien de plus
digne du Palais-Royal que la scène
[ jouée, nu Sénat, par l'honorable M. de
Gavardie. Le président du Sénat lit
tinc lettre par laquelle M. de Gavardie
demande à interpeller le garde des
sceaux. — Quand on voudra, dit M. Le
Royer.— Aujourd'hui! tout de suite!
'.s'écrie la gauche. — Diable! fait M. de
Gavardic. - Quoi donc? s'étonne le
président. Vous n'avez donc pas en-
tendu, monsieur de Gavardio? l'in-
terpeUation que vous désirez lui faire,
le garde des sceaux l'accepte séance
tenallte. Est-ce que vous n'allez pas
vous précipiter à la tribune? — Par-
don, bnlbuiic le sénateur des Landes,
mais il me semble que le Sénat n'est
pas en nombre. — Vous vous trom-
pez, le Sénat est plus nombreux
qu'à son ordinaire. L'honorable séna-
teur s'entête, on consulte le bureau,
qui donne tort à son entêtement. Alors
M. de Gavardie, n'ayant plus do pré-
texte pour ajourner son interpellation,
la retire.
Est-ce assez amusant? Dites-moi dans quel rôle
Vous avez va Lassouche ou Git-Perez plus drôle ?
Cela vaut le : — « C'est le moment
de nous montrer, cachons-nous! » le :
« Madame est-elle chez elle ? — Oui,
monsieur. — Alors, je repasserai, » et
le : — « Comment ! il y a des voleurs
dans la maison et tu 0/ viens sans ton
fusil?—Merci, ils me le prendraient! »
s Mais ce n'est pas seulement pour être
celui qu'il est, comme on dit dans les
drames de Calderon et de Lopez de
Voga. et pour contribuer largement à
l'hilarité de ses contemporains, que
l'honorable sénateur des Landes a
donné à la Chambre haute le spectacle
d'une scène de vaudeville qui no dépa-
rerait. pas le répertoire de M. Eugène
Labiche. Il avait encore un autre motif
d'exécuter cette retraite en bon ordre
moral.
, Sur quoi avait-il demandé à interpel-
ler le garde des sceaux ? « Sur les gra-
ves attaques portées à la dignité et à
l'indépendance de la magistrature. »
Vous imaginez-vous cette interpellation
tombant au moment où les prêtros d'Aix
et de Tarascon viennent d'écrire publi-
quement que, si le conseil d'Etat con-
damnait leur archevêque, ce serait pour
leur archevêque une gloire et un titre
à leur vénération! Ln Sénat, d'une seule
voix, aurait voté : — Vous ayez raison,
bon Gavardie. La justice n'a jamais été
aussi effrontément outragée que par
les prêtres d'Aix et de Tarascon. Cela
est intolérable. Nous sommes tous d'ac-
cord avec vous, il faut frapper les prê-
tres d'Aix et de Tarascon.
f Telle est la réponse à laquelle M. de
Gavardie se serait exposé en interpel-
lant le ministère sur l'impunité des
« attaques portées à la magistrature » le
lendemain des attaques portées à la
justice par le clergé de l'archevêque
qu'une section du conseil d'Etat vient
de condamner. Je disais avant-hier que
la lettre de ce clergé avait joué un vi-
lain tour à l'interpellation de M. Ches-
nelong : elle en a joué un plus vilain
à l'interpellation de M. de Gavardie.
C'est pourquoi ce n'est pas seule-
ment l'honorable sénateur des Landes
qui n'a pas voulu parler, c'est toute la
sénatorerie monarchico-cléricale qui
n'a pas voulu qu'il parlât. Comme je
comprends que M. de Lareinty ait tout
fait pour empêcher M. de Gavardie
d'ouvrir la bouche, jusqu'à nier que le
garde des sceaux fût pour l'interpella-
tion après que le garde des sceaux avait
dit et répété qu'il était à la disposition
du Sénat et de M. de Gavardie !
Où la loi pourrait frapper ces salariés
de l'Etat qui insultent et provoquent
l'Etat, il n'y a pas besoin de le deman-
der aux républicains, les monarchistes
ont été les premiers à le dire. Nous
rappelions récemment ces paroles pro-
noncées en 1832, à la tribune de la
Chambre des députés, par un homme
que personne ne dira des nôtres, l'aîné
des Dupin :
« On ne peut pas tolérer l'impudence,
— je ne puis pas ici employer d'au-
tres termes, - d'un ministre du culte
qui se montrerait à la fois hostile au
gouvernement et aux lois, et qui vien-
drait, son mandat à la main, exiger
qu'on le payât. Le gouvernement,
dans le cas que je viens de signaler,
doit donc, par une suppression rigou-
reuse de son traitement, punir l'ecclé-
siastique qui s'écarte de son devoir. »
Et ce n'étaient pas là, sous la mo-
narchie, de vaines paroles. Le droit
de suppression était si incontesté que,
le même jour, à la même tribune, le
ministre de l'intérieur et des cultes dé-
clarait « en avoir usé trois fois ».
La République ne ferait donc qu'une
chose dont la monarchie lui a donné
l'exemple en frappant les factieux de
sacristie à l'endroit sensible : à la
bourse.
AUGUSTE VACQURRIR.
Les congrégations non autorisées
Une des jolies prétentions des cléri-
caux, c'est de soutenir que les congré-
gations non autorisées sont parfaite-
ment régulières, que, si elles existent,
ce n'est pas en vertu d'une simple to-
lérance du gouvernement, et que le
gouvernement, s'il voulait les dissou-
dre, ne le pourrait pas.
Le raisonnement qui conduit à cette
conclusion est celui-ci :
Qu'est-ce qu'une congrégation? c'est
une association. — Quel est le texte
qui régit les associations? C'est l'arti-
cle 291 du code pénal. — Que dit cet
article? Il défend aux associations de
plus de vingt personnes de se former
sans l'agrément du gouvernement, mais
il ajoute que, dans ce nombre de vingt
personnes, ne sont pas comprises celles
qui sont domiciliées dans la maison où
l'association se réunit.
N'est-ce pas là, s'écrient triomphale-
ment les cléricaux, la situation iues
congrégations religieuses ? Du moment
qu'elles se composent de personnes qui
sont toutes domiciliées dans la maison
où l'association se réunit, il va de soi,
concluent-ils, qu'elles sont dispensées
de la condition du nombre, et, par
conséquent, de la nécessité de l'autori-
sation préalable:
Ce raisonnement n'a pas le mérite
d'être neuf, car voici un certain nombre
d'années que les amis des congréga-
tions le ressassent, mais il n'a pas non
plus le mérite d'être bon. et il a été ré-
futé autant de fois qu'il a été pro-
duit.
Et la réfutation, qui est fort simple.
tient tout entière dans cette courte
observation que ce n'est pas l'article
291 du code pénal qui régit les congré-
gations religieuses, que c'est le décret
du 3 messidor an XII, lequel porte,
dans son article 4, le principe formel
que voici : - « Aucune aggrégation
d'hommes ou de femmes ne pourra so
se former à l'avenir sous prétexte de
religion, à moins qu'elle n'ait été for-
mellement autorisée par décret, sur le
vu des statuts ou règlements selon les-
quels on se propose de vivre dans cette
association. »
Mais, objectent les cléricaux, l'article
291 du code pénal est postérieur au
décret de l'an XII. Donc il l'a abrogé.
Non. Il ne l'a pas abrogé. Nous sa-
vons fort bien qu'en 1845, MM. Ber-
ryer, de Vatimesnil, Béchard. Par-
dessus, et autres jurisconsultes —
excellents sans doute, mais beaucoup
plus catholiques encore qu'excellents
— ont essayé, dans une consultation
fort connue, de représenter cette préten-
due abrogation comme une vérité ;
mais ils n'ont jamais réussi à le faire
croire à d'autres qu'à ceux pour le
compte desquels ils le disaient.
Veut-on des preuves? Elles a bon-
dent. Nous ne les citerons pas toutes.
Nous en choisirons seulement deux :
La jurisprudence d'abord. En 1849,;
la question duit soumise à la cour do
cassation. Les demandeurs, qui étaient
des congréganistes non autorisés,,
avaient accumulé dans leur pourvoi
tous les arguments auxquels l'article 2911
peut donner lieu. Ils le prenaient d'ail-
leurs sur un ton très haut, et ils termi-
naient même leur argumentation par
cette parole, qu'ils empruntaient à «un
éloquent dominicain » : Les prêtres et
les moines sont éternels ! — Sait-on à
quel résultat est arrivée toute cette
science? A ce que le conseiller rappor-
teur ne lui a même pas fait l'honneur
de lui répondre: « Ce serait, disait à
la cour ce conseiller, une tâche facile,
mais longue, et à notre sens, dépour-
vue de toute utilité, que d'opposer à
ces arguments, ainsi qu'aux textes et aux
citations qui les appuient, l'autorité de
textes et de décisions contraires. Vous
penserez sans doute qu'il ne convient
pas d'insister devant vous sur des prin-
cipes de droit public tant de fois recon-
nus et appliqués, qui considèrent com-
me illicites les congrégations religieu-
ses non autorisées, et vous nous per-
mettrez de laisser sans réponse tout ce
qui a pu être dit par les demandeurs
pour ébranler une vérité que le décret du
3 messidor an XII et les lois postérieures
ont rendue incontestable. » — Et le pour-
voi des congréganistes fut rejeté. L'ar-
rêt est du 26 février 1849.
Ceci est déjà assez clair. Il y a quel-
que chose de plus clair encore : c'est
la conduite même des congréganistes.
Si l'article 291 leur était applicable,
comme à de simples associations, ils
seraient autorisés- qnand ils le sont —
comme le sont des simples associations,
c'est-à-dire que l'autorisation pure-
ment administrative leur serait donnée
par le ministre de l'intérieur.
Est-ce que c'est ainsi que les congré-
gations, quand elles se font autoriser,
reçoivent l'autorisation?—Pas le moins
du monde. Elles sont autorisées par un
décret, à la suite de l'examen de leurs
statuts fait par conseil d'Etat,— confor-
mément au décret de messidor an XII.
Nous avons nous-même publié, il y a
quelque temps, une longue liste de ces
autorisations. Allez donc voir s'il y en
a une seule qui soit donnée d'après les
règles de l'article 291 du code pénal.
D'où il suit que les cléricaux—ils
le prouvent par leurs actes mêmes —sa-
vent fort bien où est la vérité.
Et cette vérité, pour les congréga-
tions non autorisées, c'est que le gou-
vernement a le droit absolu de les
mettre à la porte.
ERNEST LEFÈVRE.
- - ■ ■ ■ ■
L E 3 GRACES
On repète toujours de temps à au-
tre : « La question de l'amnistie, nous
l'avons tranchée. avec de.* grâces. »
Nous avons l'intention d'examiner ici
même, par des exemples individuels,
ce que vaut la prétention. Prenons,
pour commencer, les membres de la
Commune.
En graciera-t-on un seul? Cela paraît
fort douteux ; je désire me tromper :
j'entends d'ici ce que vont dire les
hommes chez qui huit années n'ont rien
effacé des passions de la guerre civile ::
« Quoi! ces hommes qui ont soulevé
Paris, qui se sont sauvés! etc. » Il y au-
rait beaucoup à dire pour rétablir sur
chaque point l'exactitude historique.
-Mais je ne veux examiner que des si-
tuations personnelles. Je prends deux
noms pour commencer : Arthur Ar-
nould, Jourde.
Quel fut leur rôle? Je me garderai
bien d'essayer de le dire. J'aime mieux
le laisser dire à des historiens dout les
livres sont, en quelque sorte, une suite
de la répression ;—■ à des historiens im-
pitoyables pour le mouvement du 18
mars; — à des historiens dont on peut
quelquefois regretter les aveux, mais
seulement quand il s'agit, pour eux, de
charger le mouvement du 18 mars et
de justifier ou d'excuser jusqu'au mas-
sacre qui s'appela la victoire de la
cause légale.
Lisez le livre de M. Jules Simon, par
exemple: il rend justice aux eiforts
faits par Arthur Arnould (efforts sou-
vent très courageux) pour combattre
les excès de tout genre. Et M. Jules
Simon a mille fois raison: il suffit de
parcourir à l'Officiel le compte rendu
des séances de la Commune, pour voir
qu'Arthur Arnould a lutté avec la der-
nière énergie contre toutes les propo-
sitions violentes. Il a partagé les pas-
sions de Paris ; il a cru à la Révolution
du 18 mars : mais il faut reconnaître,
et tout le monde reconnaît, qu'il s'est
conduit alors en honnête homme, dont
l'honnêteté sait être vaillante.
Je pourrais invoquer la même auto-
rité pour Jourde. Je préfère citer le
nom d'un écrivain connu par la pas-
sion, je puis le dire, enragée, qu'il a
apportée dans l'étude de cette histoire.
M. Maxime Ducamp a compris le récit
de la guerre civile comme une sorte de
roman; il n'a pas été satisfait des in-
comparables horreurs de cette époque :
il en a ajouté; il a fait trois énormes
volumes pour prouver que les insurgés
avaient voulu brûler même les monu-
ments qu'ils ont épargnés et assassiner
tous les prisonniers qu'ils ont iaissésen
vie. Dans ses énormes volumes, il ne
peut parler d'un insurgé sans le compa-
rer, soit à tous les démons de toutes les
mythologies, soit à tous les animaux
féroces de tous les climats. Sa façon
d'écrire est presque un cas de patho-
logie mentale : il a la monomanie de
l'horreur.
On sait quelles dénonciations il a
mêlées à son livre; le nommer, c'est
tout dire. Eh bien! M. Maxime Ducamp
est obligé de reconnaître et reconnaît
dans Jourde un homme d'une probité
incontestable. Il nous montre le délé-
gué aux finances gardant, au milieu
du maniement de millions, la vie plus
que modeste du petit employé. Il dit
que c'est à Jourde, en même temps
qu'à Beslay, qu'on doit le salut de la
Banque de France. Ses conclusions, c'est
que la justice militaire aurait peut-être
été bien inspirée en se contentant de
condamner Jourde, pour usurpation de
fonctions, à une peine allant au maxi-
mum à six ans de prison.
M. Maxime Ducamp! le nom suffit.
Il n'est pas suspect en cette matière. No-
tez que pendant la Commune, Jourde,
Arnould, étaient dénoncés comme des
« traîtres » par des feuilles qui pous-
saient aux pires violences. Les mêmes
qui ont dénoncé Chaudey demandaient
qu'on expurgeât la Commune de ces
modérés qu'elles traitaient de « Versail-
lais ». Eh bien! je le demande, com-
ment le public pourra-t-il croire qu'on
a essayé d'effacer, dans ce qu'on ap-
pelle la mesure du possible, les traces de
la guerre civile, tant que des hommes
comme Arnould et Jourde restent des
proscrits?
CAMILLE PELLETIN.
————————— —— ———————
COULISSES DE VERSAILLES
La commission du budget est saisie, par
le rapport de M. Noirot sur le budget de
la Légion d'honneur, de plusieurs questions
intéressantes qui concernent cette institu-
tion, notamment celle qui regarde la
composition du conseil de l'ordre.
Dans son rapport, M. Noirot fait remar-
quer que ce conseil, qui est renouvelable
par moitié tous les deux ans, n'a jamais,
été modifié dans sa composition depuis la
chute de l'empire. Or, il est actuellement
formé, presque en totalité, des adversaires
les plus résolus de la République. Voici,
d'ailleurs, les noms des membres qui en
font partie actuellement :
Le général Vinoy, grand chancelier,
président.
Le général Dlkftnd de Villers, secrétaire
général de l'ordre, vice-président.
Membres : MM. le général d'Autemarre-
d'El'villé, le vice-amiral Chopart, le vice-
amiral de Chabannes ; M. Rehouet, prési-
denthonoraire à la cour des comptes; MM.
Boinvilliers, général de Maudhuy, baron
Larrey, député; marquis d'Oms, conseiller
honoraire à la cour de cassation ; vicomte
Reille ; Aucos, président de section au
conseil d'Etat, et le marquis de Chateau.
renard, ancien conseiller d'Etat.
Or, le général Vinoy, l'amiral Chopart,
M. Boinvilliers, M. le baron Larrey, le
marquis d'Oms, le vicomte Reille, sont des
bonapartistes avérés. L'amiral Chopart est
un chef du parti de Ghislehurst dans le
Pas-de-Calais, ce bourg pourri du bona-
partisme; M. Boinvilliers est l'ancien sé-
nateur de l'empire; M. le marquis d'Oms
est l'ancien président de la haute cour qui
a jugé l'affaire du complot sous l'empire,
en 1869; M. le vicomte Reille est ancien
député officiel au Corps législatif de l'em-
pit'c et frère du sous-secrétaire d'Etat du
16 mai.
Quant à M. de Châteaurenard, il était
un des membres du conseil d'Etat actuel
élu par la majorité réactionnaire de l'As-
semblée nationale, et il a donné sa démis-
sion de conseiller d'Etat depuis peu.
Sur les autres membres, sans carac-
tériser leur opinion politique, on peut
dire, sans hésitation, et à une ou deux
exceptions près, qu'ils sont tous de fer-
vents réactionnaires.
Etant données les attributions considé-
rables de ce conseil, qui a des pouvoirs
presque sans limites sur tous les mem-
bres de Tordra, on ne comprendrait pas
que les membres précités eussent, avec
le consentement du gouvernement, le pri-
vilége de se perpétuer indéfiniment dans
leurs fonctions.
Or, l'occasion se présente dans quel-
ques jours d'apporter quelques modifica-
tions à ce conseil. C'est le 29 mai que
doivent être renouvelés les pouvoirs
d'une moitié des membres. Nous voulons
espérer que la gouvernement mettra cette
circonstance à profit pour introduire dans
ce conseil des hommes dévoués à la Ré-
publique, au lieu et place des réaction-
naires sortants.
Le rapporteur a également appelé l'at-
tention de la commission sur la situation
des maisons nationales d'éducation de
filles qui dépendent de l'ordre de la Légion
d'honneur. Trois maisons de ce genre
existent : celles de Saint-Denis, de Saint-
Germain et d'Ecouen; or, ces deux der-
nières sont dirigées par une congrégation,
celle des Dames de la Mère-Dieu.
Le rapport exprime le vœu que l'ensei-
gnement dans ces maisons soit rendu à
des laïques, et que ces établissements
soient placés à l'avenir sous la direction du
min sLro de l'instruction publique.
—————— —— ————————
L'ART INDUSTRIEL
Parm: les projets déposés à la Cham-
bre, un des plus importants est celui
de M. Antonin Proust, sur les musées
et écoles d'art industriel. Par une bizar-
rerie étonnante, c'est à l'art industriel
que la France doit en grande partie sa
richesse et sa supériorité sur les mar-
chés européens, et de tous les enseigne-
ments, c'est celui de l'art industriel
que nous négligeons le plus. Nos écoles
d'art s. et-méti ers ne s'occupent point
d'art. Jusqu'aujourd'hui, des sociétés
privées, à la tète desquelles est r Union
centrale, ont seules tenté quelque chose.
Notre école des arts décoratifs est
dotée insuffisamment. Et d'ailleurs,
elle commence à peine à fonctionner
d'une manière sérieuse.
Il faut une disposition particulière de
notre race; il faut surtout l'influence
du grand milieu parisien pour que nos
Feuilleton du RAPPEL
DU 11 MAI
~t
42
Zt'E'v ADÉ
fcé>MAN CANAQUE
CHAPITRE XIII
Ei^oir et désespoir
(Suite)
Armande était si complètement absorbée
: par la situation de son ami que celle des
trois autres prisonniers n'effleura même pas
son esprit. Et tandis que 'Florissant, ac-
croupi comme un fauve dans l'étroit carré
qu'on lui avait donné pour cage, se répé-
- tait avec une tristesse mêlée d'orgueil :
- Quel ne sera pas le désespoir d'Ar-
juande ch apprenant que je suis retombé
entre les mains de mes bourreaux I —
celle-ci rêvait uniquement aux moyens
de faire passer à un autre des paquets
Voir le Happel du 31 mars au 10 mai.
de linge et des kilogrammes de chocolat.
Elle ne savait à quelle catastrophe attri-
buer le désastre. Une trahison du corsaire
qui avait l'habitude invétérée de vendre
ceux qui s'adressaient à lui, paraissait au
premier abord la chose probable. Mais en
ce cas, elle eût été compromise avant qui
que ce fût, puisqu'elle avait tout machiné.
Comment n'était-elle pas déjà arrêtée?
Sans aucun doute elle le serait bientôt.
Cetto perspective lui souriait particulière-
ment. Elle se réjouissait d'aller rejoindre
Justin dans sa prison, car la plupart des
femmes s'imaginent que, si elles étaient
arrêtées en même temps que ceux qu'elles
aiment, elles iraient les rejoindre dans
leur prison. Souvent même elles réussis-
sent à se faire appréhender au corps dans
ce but, et leur surprise est extrême quand
on les dirige sur Saint-Lazare, pendant que
leurs complices mâles sont expédiés à
Clairvaux.
Dans cette fièvre quasi-typhoïde qu'on
pourrait appeler le délire du sacrifice, elle
descendit sur la grève au devant des gar-
diens, sans aucun doute chargés d'exécuter
les ordres donnés à son sujet. Elle vit re-
venir toute l'escouade ployant sous le pro-
duit de la fouille. Tous les papiers, lettres
et manuscrits saisis chez Danclade et Flo-
rissant étaient portés, soigneusement fice-
lés, par deux surveillants qui se dandinaient
victorieusement comme des hommes sûrs
de tenir les fils du complot.
Mais ils défilèrent tous devant Armande,
sans jprendre garde à elle. Elle en conclut
qu'Hubert n'avait pas parlé et que peut-
être, surpris au moment décisif, l'évadeur
avait été fait prisonnier avec les évadés.
Ce beau trait le grandit instantanément
dans l'esprit d'Armande, qui lui octroya
une amnistie complète pour tous ses agio-
tages passés et futurs sur la chair hu-
maine. Après tout, la façon dont le capi-
taine comprenait le droit des gens tenait
peut-être à son éducation première.
Elle brûlait de partir pour Nouméa, afin
d'éclaircir ses doutes et surtout de se
rapprocher de Danclade. Elle se promène-
rait sous les fenêtres de la prison. Ce se-
rait toujours ça. Victor Hugo, dans Notre-
Dame de Paris, dit que beaucoup de gens
se contentent d'être contre un mur der-
rière lequel il se passe quelque chose.
Quand ce quelque chose est représenté
par celui qu'on aime, le mur, à un mo-
ment donné, peut devenir éloquent et dia-
phane. ,
Elle avait aussi pris une résolution ré-
pugnante, mais impérieuse : celle d'aller
trouver Rouvion et d'arriver, par l'inter-
médiaire de ce familier de l'inquisition, à
faire savoir à Danclade qu'elle était. là,
qu'elle pensait à lui et qu'elle ne l'aban-
donnerait pas.
Elle serait au premier abord assez em-
barrassée vis-à-vis de l'agent, à qui elle
avait caché avec tant de soin les prépara-
tifs de l'évasion ; mais elle s'appliquerait
surtout à le convaincre qu'elle les igno-
rait ; sans quoi Rouvion devinerait que,
dans la pièce à tiroirs composée j)ar lui. il
avait joué tout le temps le rôle de Jo-
crisse, et sa vengeance serait d'autant
plus terrible pour Armande qu'elle retom-
berait évidemment sur Danclade.
Elle constata qu'il ne se doutait de
rien. Il mettait tant d'attention à tenir
son personnage qu'il ne lui en restait plus
pour étudier Armande.
— Eh bien, lui cria-t-il, dès qu'il la vit
entrer dans la première des deux pièces
de son logement; dont Ratouma avait ouT
vert la porte, avec le sourire satisfait de
quelqu'un qui vient de dîner en ville, eh
bien! le malheureux, n'a donc pas profilé
de nos conseils?
— C'est affreux! répondit-elle; et pour
aller au devant des questions, elle ajouta :
Depuis huit jours il était tout changé, il
ne parlait plus, ne riait plus. Je le croyais
malade.
— Comment ne vous a-t-il pas mise dans
la confidence de ce plan absurde, de-
manda Rouvion, lui qui ne vous cache
rien ?
- Il avait sans doute juré le secret.
Vous ne le connaissez pas : quand il a juré
le secret, il se laisserait couper la tête plu-
tôt que d'ouvrir la bouche. Et maintenant
où-est-il?
— Dans la prison militaire, fit négligem-
ment l'agent de culture, qui s'inquiétait
des détails de l'évasion beaucoup plus que
du sort des évadés. Ainsi, reprit-il, Dan-
clade a construit cet énorme bateau avec
tant de mystère que vous ne vous en êtes
même Das aDercue1
— Ohl il n'a rien construit du tout,
soyez-en sûr. D'abord il est bien trop mal-
adroit de ses mains. Ensuite, je l'aurais
bien vu travailler.
— C'est pourtant certainement lui qui
a tout organisé.
— Pas le moins du monde. On sera venu
le chercher au dernier moment.
— Voyons, riposta Rouvion, puisque
vous venez de me raconter qu'il était pré-
occupé déjà depuis huit jours.
Armande se tut de peur de s'enferrer.
L'agent lui exprima sa surprise de ce que
Danclade n'avait même pas invité le père
Alavaill à tenter avec lui l'aventure.
— En effet, j'en ai été très étonnée
aussi, mentit effrontément la jeune fille.
C'est même ce qui m'a fait supposer qu'il
n'avait été averti que quelques minutes
avant le départ.
Puis elle tira de son petit panier deux
livres de chocolat et quatre oranges,
qu'elle supplia l'agent de faire parvenir au
prisonnier, les oranges et le chocolat cons-
tituant essentiellement ce qu'on pourrait
appeler les cadeaux de femmes. Elle avait
tant d'envie que cette provende fut remise
à destination, qu'elle s'oublia au point
d'appuyer ses sollicitations p:1r ces mots :
— A vous, rien ne sera, plus facile.
Rouvion eut dans les yeux un éclair de
soupçon. Il regarda fixement Armande,
tout en présentant avec de grands gestes
la défense suivante :
- Facile r à un vieux proserit comme
moi! Ah! bien oui! Il suffirait gue je.
déposasse pour lui ce simple petit paquet
au greffe pour qu'on s'imaginât qu'il est
rempli de picrate. On l'examinera sur
toutes ses faces. Il ne contient rien de
particulier au moins votre paquet? Pas do
lettres? Pas de papiers compromettants?
— Seulement du chocolat et des oran-
ges. Voulez-vous y ajouter ces deux paires
de chaussettes à mon père, parce que les
siennes doivent être toutes mouillées.
— Donnez toujours ! mais -le diable
m'emporte si je sais comment lui glissor
tout ça. Lorsque vous aurez des lettres à:
lui faire passer, confiez-les-moi. Á\CC
quelques sous à ses gardiens, ce sera une
affaire faite. Ah ! si vous connaissiez ces
gens-là! '! *
Armande remit ses provisions entre les
mains de Ratouma et prit congé de l'a-
gent, qui la congédia avec ces bonnes pa-
roles :
— Je ne puis pas faire grand'chose;
soyez tranquille pourtant. Je veillerai sur
lui.
Elle était déjà sur le carré quand il la
rappela :
— A propos, dit-il, s'il vous écrivait da'
son côté pour vous demander quelque pe-
tit service, ne manquez pas de me mon-
trer la lettre. Je me chargerai de tout.
ÙN E VAD 3
(A suivre)
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Collections numériques similaires GRAPTUS GRAPTUS /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "GRAPTUS" or dc.contributor adj "GRAPTUS")IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP" or dc.contributor adj "IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP") NICEPHORUS CP NICEPHORUS CP /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "NICEPHORUS CP" or dc.contributor adj "NICEPHORUS CP") THEODORUS Graptus THEODORUS Graptus /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "THEODORUS Graptus" or dc.contributor adj "THEODORUS Graptus")
- Auteurs similaires GRAPTUS GRAPTUS /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "GRAPTUS" or dc.contributor adj "GRAPTUS")IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP" or dc.contributor adj "IGNATIUS diaconus magnæ ecclesiæ CP") NICEPHORUS CP NICEPHORUS CP /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "NICEPHORUS CP" or dc.contributor adj "NICEPHORUS CP") THEODORUS Graptus THEODORUS Graptus /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "THEODORUS Graptus" or dc.contributor adj "THEODORUS Graptus")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k75305643/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k75305643/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k75305643/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k75305643/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k75305643
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k75305643
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k75305643/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest