Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1880-02-19
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 février 1880 19 février 1880
Description : 1880/02/19 (N3632). 1880/02/19 (N3632).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/08/2012
No 3632 — Jeudi 19 Février 1880
jne numéro : 10 e. - Béjmrfemente s M &
Sù Pluviôse - an 88 - - N° 3631
-:- - RÉDACTION -
adresser au Secrétaire de la Rédactiott
De l à 6 heures du soir
18J HUE DB VALOIS, 18
^manuscrits non insérés ne seront pas remtatf
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C*
6, place de la Bourse, 6
ADMINISTRATION*
J8, NON DB VALOIS, 13
«
ABORSfEStEXTS
: PARIS
Vroïs mois io »
fia mois. 20 e
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 13 5fl
Six mois 21 a
1 - ,
• Adresser lettres et mandats
A M. ERNEST LEFÈVRB
ADMINISTUATJCUR-CÉRANT
IE DROIT D'AFFlèîtteg
M. de Freycinet vient do fournir, à
non corps défendant, malgré lui, invi-
tus en lalin d'ingénieur, un argument
concluant en faveur de l'amnistie plé-
Bière. Cet argument irrésistible, défi-
nitif, triomphant et inattendu, c'est
l'affichage de son discours dans toutes
les communes de France.
En effet, brûler n'est pas répondre
et afficher n'est pas répondre non plus.
Louis Blanc, dans un très beau lan-
gage, expose les motifs puissants qui
font de l'amnistie une nécessité non-
seulement humanitaire, mais politi-
que; non-seulement politique, mais
jBociale. M. de Freycinet réplique et
développe à son tour les raisons qui
arrêtent le gouvernement dans cette
voie de réparation et d'oubli. C'est en-
suite le public qui, ayant toutes les
pièces du procès sous les yeux, est
appelé à juger de la valeur des raison-
nements produits par les deux ora-
teurs.
Alors le gouvernement trouve un
inoyen d'une simplicité angélique pour
lettre l'opinion de son côté. Il sup-
prime le discours de Louis Blanc et
colle sur les murs à cinq cent mille
exemplaires celui de M. de Frey-
cinet.
Quand les membres du Concile de
Constance eurent fait parvenir à Jean
Huss un sauf-conduit afin qu'il vînt
en toute sécurité leur expliquer sa
doctrine, ils furent tellement frappés
de la lucidité et de la grandeur de sa
dialectique que toute riposte leur se m-
bla impossible. C'est pourquoi, au lieu
de s'épuiser en théories inutiles, ils
construisirent sur une place publique
très fréquentée un bûcher magni-
fique sur lequel ils prièrent leur adver-
saire de vouloir bien monter.
Il faut croire que ce mode de discus-
sion est resté le meilleur puisque le
gouvernement actuel copie servilement
dans la question de l'amnistie les pro-
cédés du Concile de Constance dans la
question de la présence réelle. Nous
reconnaissons que, le bois étant devenu
très cher, on ne fera monter Louis
Blanc sur aucun bûcher, mais, faute
d'oser le réduire en cendres, on le
réduit au silence en annulant autant
que possible sa parole pour ne laisser
subsister que celle du président du
conseil.
Cette façon de vaincre n'est pas
neuve, mais elle est toujours instruc-
tive. On fait saisir son ennemi par les
gendarmes, à qui on prescrit de lui at-
tacher les mains, de lui lier les pieds
et de lui ajuster un bâillon. Puis on se
rue sur lui en lui criant:
— Défends-toi !
Et comme il ne se défend pas, on le
déclare battu à plates coutures, et on
fait chanter un Te Dcuyi dans toutes les
cathédrales connues.
Tout est relatif ici-bas, et l'éloquence
est la chose la plus relative de toutes.
Les arguments de M. de Freycinet n'é-
taient bons qu'à la condition que ceux
de Louis Blanc fussent mauvais. Mais
pour établir qu'ils l'étaient, il eût été
indispensable de les afficher en regard
des bons. Ceux-ci en eussent été rehaus-
sés et ceux-là diminués d'autant. Mais
arracher les affiches posées par son con-
spirent pour y substituer les siennes,
'êst renouveler par trop ouvertement
le système des candidatures officielles
de l'empire. Il est à supposer que M.
de Freycinet n'a pas une haute idée de
ees facultés persuasives. Avec un peu
plus d'amour-propre et de confiance en
lui-même, il se fût empressé d'exiger
que le discours au quel il a si brillam-
ment répondu fut placé côte à côte avec
le sien. Mais accaparer ainsi toutes les
murailles, de peur que, si on en laisse
une seule à son contradicteur, il ne
vous écrase de son talent, c'est pousser
trop loin la modestie.
Comme pour le mariage, il faut être
au moins deux pour la lutte. Supposez
Arpin, le terrible Savoyard, venant.
seul dans l'arène et jouant désespéré-
ment des biceps comme pour terrasser
un adversaire absent, puis s'essuyant
le front et s'adjugeant à lui-même le
prix de torse : il serait incontinent re-
conduit à grands coups de sifflet.
— Combien sont-ils? demande Bil-
boquet à Zéphyrine dans cette admira-
ble pièce des Saltimbanques qu'il faut
toujours citer quand il s'agit de débats
politiques.
— Ils sont un, répond celle-ci.
M. de Freycinet est un également
dans la discussion de l'amnistie ; et, de
même que ce nombre ne suffit pas à
Bilboquet pour faire sa recette, il ne
suffit pas au gouvernement pour faire
la lumière.
Ce monopole qu'il paraît s'attribuer
en disposant des murailles communales
comme de sa propriété exclusive accuse
une tendance dont il est urgent de si-
gnaler la gravifé. Depuis neuf ans, les
condamnés à qui on vient encore de
refuser l'amnistie ont la bouche fermée
par les décrets de l'empire qui leur in-
terdisent de se disculper des calomnies.
Seuls les calomniateurs ont eu la pa-
role, et on sait comment ils en ont usé.
En perpétuant à sa manière cet état de
choses qui permet de n'entendre qu'une
cloche, le gouvernement nous reporte
aux jours de la répression de mai,
où l'on était fusillé sur la dénoncia-
tion d'un débiteur auquel les cours
martiales ne vous laissaient pas même
répondre. Ce qui, à cette époque téné-
breuse, se faisait pour les condamna-
tions se fait aujourd'hui pour l'amnistie.
On affiche le réquisitoire et on interdit
la défense.
Les sénateurs de la droite paraissent
avoir renoncé à leur interpellation sur
la nomination de M. Barrère. Dans
leur intérêt, ils ont bien fait. A quoi
aurait abouti leur interpellation? A dé-
montrer que parmi les condamnés de
la Commune il y a des hommes capa-
bles de rendre de grands services à
leur pays ? Ce n'est pas ce qu'ils doi-
vent avoir à cœur de prouver.
Se seraient-ils bornés à reprocher au
gouvernement d'employer un homme
instruit et intelligent, parce que cet
homme est un amnistié ? Alors, ils au-
raient été profondément ridicules.
Mais, peut-être voulaient-ils obtenir
du Sénat un vote défavorable à l'amnis-
tie. Peut-être espéraient-ils que tous
les pères conscrits allaient manifester
avec eux. Mauvais calcul! Le terrain
était trop mal choisi. Quel sénateur
n'ayant pas perdu le bon sens oser, it
dire ; Je ne veux plus entendre parler
d'amnistie parce que, parmi les amnis-
tiés, se trouvent des hommes dé-
voués et utiles?
Les sénateurs de la droite doivent
savoir, cependant, que leurs collègues
ne poussent pas l'innocence à ce point-
là.
Pour nous, nous croyons que si l'in-
terpellation avait eu lieu, c'est la cause
de l'amnistie qui en aurait profité.
M. Barrère, condamné de la Commune
et membre d'une commission diploma-
tique est un argument officiel et vivant,
en faveur du retour de tous les pros-
crits.
EDOUARD LOCKROY.
L'ELECTION DE Lt DOBDOfiNE
Voyez-vous?. — Quoi? — « Les
signes précurseurs de la tourmente qui
se prépare au dedans. » — Non. -
Vous êtes aveugle. Etiteiidez-vous
— Quoi? — « Les grondements loin-
tains de l'orage qui grossit au
dehors». — Non. — Vous êtes sourd.
Ainsi parle le Soleil, qui, n'étant,
lui, ni sourd ni aveugle, entend les
grondements et voit les signes. —
Donc, tourmente et orage, voilà notre
avenir. Quel dieu nous empêchera
d'être tourmentés? Quel autre dieu
nous empêchera d'être foudroyés?
« A ces questions, il n'y a qu'une ré-
ponse possible H, dit le Soleil. Le dieu
qui nous préservera de la tourmente
dont on voit les signes précurseurs,
c'est M. de Fourtou. Le dieu qui nous
préservera de l'orage dont on entend
les grondements lointains, c'est M. Gi-
biat.
Le 7 mars prochain, les électeurs sé-
natoriaux de la Dordogne ont à rem-
placer MM. Magne et Dupont. Que, le
7 mars prochain, les électeurs sénato-
riaux de la Dordogne remplacent
M. Dupont par M. Gibiat et M. Magne
par M. de Fourtou, et à l'instant même
on verra la tourmente qui se prépare
au dedans « se changer en bonasse»,
comme dit Pierre Corneille, et, comme
dit Vi-clor Hugo, les éclairs de l'orage
qui grossit au dehors « remonter au
ciel sans avoir foudroyé ».
Ce n'est pas sans un certain étonne-
ment qu'on lit dans le Soleil cet
hymne à MM. Gibiat et de Fourtou,
car MM. Gibiat et de Fourtou sont bo-
napartistes et le Soleil a passé jusqu'ici
pour orléaniste. — Eh bien, quoi ?
réponcLle Soleil. Il est vrai que «M. de
Fourtou a pu ne pas toujours com-
prendre comme nous la cause de l'or-
dre», mais n'est-ce pas déjà beaucoup
qu'il l'ait comprise ? Il est encore vrai
que M. Gibiat est propriétaire de
deux journaux, le Constitutionnel et
le Pays, qui « ne se placent pas tout
à fait au même point de vue que
nous». Pas tout à fait? le point
de vue bonapartiste n'est pas tout
à fait le point de vue orléaniste?
Mais « quand l'avenir est si sombre,
qu'importent les nuances» 1 Nous avons
dit souvent que pour nous toutes les
formes de monarchie se valent, mais
nous n'espérions pas d'un journal
royaliste cet aveu qu'il n'y a qu'une
nuance entre la royauté et l'empire.
Donc, qu'importent les nuances !
qu'importe la petite différence qui peut
exister du point de vue bonapartiste au
point de vue orléaniste ! qu'importe aux
orléanistes que M. de Fourtou soit du
parti qui a « coupé la bourse aux prin-
ces d Orléans »! Ils ne se souviennent
que d'une chose : c'est que « M. de
Fourtou a fait ses preuves comme par-
lementaire ». Notamment, en mettant
le parlement à la porte. M. de Fourtou
est donc parfaitement digne d'aller
« fortifier au Sénat cette phalange de
résistance ferme et prudente » qui a
aidé le Seize-Mai à bousculer le pays
pendant six mois et à le mettre à
deux doigts de la guerre civile. Quant
à M. Gibiat, le Soleil trouverait en-
core plus ridicule de lui objecter la
nuance imperceptible qui distingue
l'orléanisme du bonapartisme. Le
Constitutionnel et le Pays? mais ce sont
justement les deux principales qualités
de M. Gibiat ! Il est temps « que le
parti de l'ordre ait le mérite et l'habi-
leté de récompenser les services qu'on
lui rend dans la presse, et de pousser
au Sénat et à la Chambre les proprié-
taires et les rédacteurs de journaux qui
se dévouent à sa cause». Ayant dit
cela une fois, le Soleil le répète : « Le
parti conservateur commet de vérita-
bles actes d'ingratitude en ne se mon-
trant pas reconnaissant pour les hom-
mes qui dans la presse lui consacrent
leur argent, leur intelligence et leur
temps ». Et la première réflexion qui
vient devant cette insistance est que ce
n'est pas seulement dans le Constitu-
tionnel et dans le Pays que quelqu'un
consacre à la cause de l'ordre son intelli-
gence, son temps et son argent. Et « à
moins d'être aveugle, il est impossible
de ne pas apercevoir » dans l'ardeur
avec laquelle le journal de M. Hervé
soutient la candidature de M. Gibiat
« les signes précurseurs de la pro-
chaine » candidature de M. Hervé.
Quoi qu'il y ait de touchant dans
cette fraternisation de l'orléanisme
avec le bonapartisme, j'ai peur 1 que
les électeurs sénatoriaux de la Dor-
dogne n'en éprouvent - moins d'at-
tendrissement que de gaieté, et je
serais surpris si les orléanistes bona-
partisants leur persuadaient aisément
que le meilleur moyen d'assurer la
sécurité de l'avenir est de choisir pour
mandataires les candidats qui désirent
le renversement des institutions du
pays et qui nous rejetteraient dans les
révolutions.
AUGUSTE VACQUERIE.
4-W
COULISSES DES CHAMBRES
Nous croyons savoir que le conseil des
ministres, dans sa réunion d'hier matin,
a décidé, sur la proposition du ministre
de la guerre, que les inspecteurs géné-
raux de l'armée dont les pouvoirs arrivent
à expiration ne seraient pas remplacés.
On sait que ces inspecteurs généraux fu-
rent créés en 1878 par le général Gresley,
à l'avènement du ministère Waddington.
Ces inspecteurs étaient au nombre de
trois, et l'un d'entre eux était le duc d'Au-
male.
Par suite de la mesure décidée hier ma-
tin, le général duc d'Aumale entre dans
la position de disponibilité. Il ne remplit
plus aucune fonction active. Il se trouve
dans la même situation que le maréchal
Canrobert, dépossédé déjà, comme on le
sait, de la présidence de la commission de
classement des officiers.
-0-
L'Union républicaine de la Chambre est
convoquée pour aujourd'hui à quatre heu-
res au Palais-Bourbon, à l'effet de procé-
der à l'installation de son nouveau bu-
reau.
Le nouveau président, M. Spuller doit,
à cette occasion, prononcer un impor-
tant discours, dans lequel il définira la
ligne politique que le groupe doit suivre.
-0-
r La gauche du Sénat s'est réunie hier
sous la présidence de M. Leblond. Elle
avait à détèrminer la manière dont elle
choisirait un candidat pour le siège de
sénateur inamouible vacant par suite du
décès de M. Crémieux. On sait, en effet,
que, par suite du mode de roulement éta-
bli entre les groupes républicains, c'est à
la gauche que revenait le soin de désigner
un candidat.
Le président a fait connaître qu'il y
avait actuellement une douzaine de can-
didats proposés par des sénateurs ou se
présentant directement. En voici la liste,
par ordre alphabétique, telle qu'elle se
compose à l'heure actuelle :
1° Edmond About, directeur du XIXe
Siècle.
2° Allou, ancien bâtonnier.
3° Berthelot, professeur au Collège de
France, membre de l'Institut.
4° Henri Didier, conseiller à la cour de
cassation.
5° Franck, professeur au Collège de
France, membre de l'Institut.
6° Albert Grévy, gouverneur général de
l'Algérie.
7° Gatien-Arnoult, ancien député à l'As-
semblée nationale.
8° Faustin Hélie, vice-président du con-
seil d'Etat, membre de l'Institut.
9° Lalanne, directeur de l'Ecole des
ponts et chaussées, membre de l'Ins-
titut.
10° De Pressensé, ancien député à l'As-
semblée nationale.
11° De Saint-Gresse, premier président
de la cour de Toulouse.
12° Wurtz, membre de l'Institut, pro-
fesseur à la Sorbonne.
Ajoutons qu'il est inexact qu'on ait pro-
posé la candidature de M. de Freycinet
ou celle de M. le général Farre.
Comme la liste ci-dessus n'iest pas close
et qu'elle peut s'augmenter encore de
quelques noms d'ici au jour de la désigna-
tion du candidat, l'embarras a paru assez
grand pour qu'on épargnât au bureau du
groupe le soin de faire une liste de pré-
sentation comme on l'avait d'abord pro-
ieté.
U Il a été convenu que la gauche, dans
une réunion générale qui sera tenue la
semaine prochaine, voterait au scrutin
nominal pour un candidat pris dans la
liste de ceux qui sont déjà inscrits ou qui
le seraient d'ici au jour de l'élection.
Le nom qui réunira la majorité abso-
lue des votants sera celui du candidat de
la gauche. Si aucun nom n'obtenait la
majorité absolue, on procéderait à un
scrutin de ballottage entre les trois noms
qui auraient obtenu le plus grand nombre
de voix au premier tour.
Suivant l'usage, la candidature choisie
par la gauche sera soumise à l'acceptation
des deux autres groupes républicains.
La réunion a été ensuite saisie d'un
projet d'amendement à l'article 7 du pro-
jet Ferry sur la liberté de l'enseignement
supérieur, par M. Lenoël, sénateur de la
Manche.
On sait que l'article 7 interdit l'ensei-
gnement aux membres de toutes les as-
sociations religieuses non autorisées. L'a-
mendement de M. Lenoël tend à suppri-
mer le mot religieuses, de manière à éten-
dre l'interdiction à toutes les associations
non autorisées, religieuses ou laïques.
Mais M. Lenoël propose d'édicter cette
interdiction « sans préjudice de l'applica-
tion des lois sur les congrégations non
autorisées ». Il a voulu marquer par là
que le seul refus du droit d'enseigner ne
serait pas une reconnaissance indirecte du
droit d'exister, et que toutes les interdic-
tions de résidence sur le sol français pro-
noncées contre certaines congrégations
persistaient.
La réunion, pressée par l'heure de la
séance publique, s'est séparée en ajour-
nant à une séance ultérieure l'examen de
cet amendement.
Les bureaux du Sénat se sont réunis
hier pour nommer la commission chargée
d'examiner la proposition déjà votée par
li Chambre des députés et tendant à l'a-
brogation de la loi de 1874 sur l'aumône-
rie militaire.
La commission se compose de cinq
membres favorables à l'abrogation et de
quatre membres opposés.
r Les „ cinq membres favorables soïA
MM. Foucher de Careil, Charles Brdeu
Testelin, Charles Robin et Malens. Les
quatre membres opposés sont MM. le itfis-
quis de Màleville, l'amiral Fourichoiî:
le général Brémond d'Ars et de Ker-
drel.
Si les sénateurs républicains avaient
été plus exacts dans certains bureau, Il
majorité des commissaires en faveur de
la suppression de 1 aumônerie militaire
eût été beaucoup plus grande.
A LA CHAMBRE
Avant tout, nous devons constater.
l'éclatant succès de M. Rouvier, qui,
au nom de la minorité de la commis-
mission, a défendu hier, avec une au-
torité qui va en grandissant et ce rare
talent d'exposition qu'on lui connais-
sait déjà, les doctrines économiques"
dont, selon nous, la République ne
saurait s'écarter sans péril. Les applau-
dissements qui, à chaque instant, ont
interrompu l'orateur nous permettent
d'espérer que la Chambre apprécie
maintenant à leur valeur les déclama-
tions protectionnistes.
Nous allons, tout à l'heure, revenir
sur ce discours magistral, où nous
avons été heureux de retrouver la plu-
part des idées que le Rappel s'est efforcé
de défendre depuis le commencement!
de ce débat. Mais nous avons cru de-
voir signaler d'abord le nouveau ser-
vice rendu par M. Rouvier, qui a su
porter la lumière sur tous les points
d'une discussion dans laquelle beau-
coup semblaient prendre plaisir à ac-
cumuler les obscurités. La force et
l'ampleur de sa démonstration, et l'au-
torité qu'il a conquise sur la Chambre,
mettent désormais M. Rouvier au pre-
mier plan des orateurs qui ont le don
de comprendre et de discuter les ques-
tions d'affaires, et qui seront certaine-
ment, un jour ou l'autre, appelés à les
diriger, dans le gouvernement, après
les avoir traitées à la tribune comme
députés. ,;:
Au commencement de la séance, M.
Allain-Targé a continué le discours
éloquent qu'il avait commencé la veille.
et que nous avions eu le regret de ne
pouvoir approuver. Si nous ne nous
trompons, dans son argumentation
d'hier, M. Allain-Targé aurait atté-
nué, sur plus d'un point, la rigueur
absolue de ses premières déclarations.
Nous sommes loin de lui en faire un
reproche. L'honorable membre a com-
pris sans doute que la thèse protection-
niste, dont il avait été l'habile défen-
seur, conduisait à des conséquences
bien redoutables lorsqu'on l'appliquait
à de certains produits, aux blés, par
exemple, aux matières premières éga;
lement. Aussi, pour les objets, d'ali-
mentation, pour d'autres encore, Tora-
teur s'est presque rangé du côté des
libres-échangistes et il a invité la com,
mission à faire comme lui et à se rel £ j
cher un peu de ses prétentions.
Encore une fois, nous ne pouvons
en vouloir à cet excellent républicain
de reculer devant quelques-unes des
conséquences do ses principes, de vou-
loir pour le coton, pour la tannerie,
pour tout ce qui sert à la nourriture
à peu près la liberté. Seulement, il faut
bien avouer que c'est une grosse in.
conséquence. Protéger un certain
pombre d'industries et livrer les au-
tres à la concurrence, c'est placer
celles-ci entre deux feux. Le -produit
Feuilleton du RAPPEL
DU 19 FÉVRIER
,'-.- '",. -si'-
25 ———.
LE
PALEFRENIER
ROMAN PARISIEN
CHAPITRE VIII
Rêveries en Rabots
(Suite)
Néanmoins, son idée dè demander par-
don à Yvonne séduisait trop Roderic pour
qu'il l'abandonnât. Au moment où elle lui
remit les rênes pour monter dans le coupé
qui devait la ramener chez son père, il lui
dit timidement et sourdement ;
Voir le Rappel du 26 janvier au 18 févrisi*
— Mademoiselle voudrait-elle être as-
sez bonne pour me pardonner mon in-
convenance vis-à-vis du garçon de ma-
nège. S'il ne s'était pas agi de mademoi-
selle, je ne me serais jamais permis.
— Je sais, répondit Yvonne, que c'est
toujours lorsque vous craignez pour moi
que vous perdez patience. Je vous par-
donne bien volontiers, monsieur François,
ce qui est, en réalité, une nouvelle preuve
de dévouement de votre part.
Roderic ferma les yeux et se retint à la
portière ouverte du coupé, se sentant près
de s'évanouir. Toute diplomatie l'aban-
donna, et ces mots passèrent dans les tré-
molos d'une sorte de satisfaction :
— Oh! oui, vous pouvez compter sur
mon dévouement, je serais si heureux de
mourir pour vous !
Cette témérité involontaire eut vite sa
récompense. Yvonne en rentrant à l'hôtel
annonça à M. de Curval que décidément
l'équitation la fatiguait et qu'elle y renon-
çait momentanément. Si bien que le len-
demain, comme Roderic étaild:uls l'écurie,
peignant avec tendresse la crinière de la
jument isabelle, il reçut du marquis l'avis
que mademoiselle ne sortirait pas à
cheval ce jour-là, non plus que les jours
suivants, et que, puisqu'elle seule pouvait
.monter la petite jument, on se déferait
à la première occasion de cette jolie bête
devenue inutile.
Le malheureux réfugié s'était si invin-
ciblement habitué au pain quotidien de
cette promenade journalière qu'elle avait
fini par constituer sa vie. Sa langueur
tourna au désespoir. Quand deux heu-
res sonnaient, il se remémorait les déli-
cieuses émotions de l'apparition de Mlle
de Curval dans sa fine robe de drap, collée
à sa taille serpenline. Il s'était dit si long-
temps : Elle va venir! qu'il lui était im-
possible de s'accoutumer à se dire : Elle
ne viendra pas! Devant le perron désert
et la cour vide, il se plongeait les deux
mains dans les touffes de ses cheveux,
pleurant et allant conter ses misères, à la
petite jument Isabelle qu'il embrassait en
la prenant par le cou, lui disant adieu,
puisqu'on allait probablement les séparer
aussi.
Un jour, enfin, il s'éveilla, ou plutôt il
se leva, car il n'avait pas dormi une
demi-heure dans la nuit et, en consta-
tant dans le petit miroir accroché à la
cloison le creusement de ses yeux cernés,
il se révolta contre lui-même :
— Décidément, lit-il, je suis un lâche.
Si mon brave pècc ma voyait, il ne pour-
rait moins faire que de me renier.
Instantanément, il prit la résolution de
courir à la recherche d'un passeport, dût-
il le payer des dix mille francs qui lui res-
taient, de quittes l'hôtel Curval et d'aller
réclamer à la Suisse ou à l'Angleterre la
tranquillité matérielle et surtout morale.
Il demanda congé pour toute une jour-
née, lui qui ordinairement rie profitait pas
de celles que son engagement lui accor-
dait, et la consacra à la conquête de cette
toison d'or. Il se rendit à Saint-Denis,
chez un brave conseiller municipal qui
avait organisé une entreprise d'évasion à
l'usage des fédérés bloqués dans Paris,
faute de moyens pour en sortir. Le
malheur voulut qu'Aronelli se rencontrât
chez ce philanthrope avec un autre contu-
mace au moins aussi compromis que lui.
Or, il n'en est pas des passeports comme
des portions dans les restaurants. Quand
il y en a pour un, il n'y en a pas pour
deux. Le sculpteur avait pour quelque
temps, du moins, un abri sérieux. Son
confrère en vagabondage étant errant et
sans asile, et un seul passeport restait
dans le tiroir du sauveteur.
Un combat de magnanimité commença
dans le domicile du généreux conseiller
municipal, entre les deux proscrits. Aro-
nelli en sortit vainqueur, c'est-à-dire que
le passeport resta à son adversaire. :
Il revint à l'hôtel harassé, mais déconfit,
A vrai dire il avait craint un moment que
le papier sauveur ne lui échût, ce qui l'eût
à jamais privé de la vue de mademoiselle
de Curval. Maintenant sa conscience était
en repos. Il avait tenté l'impossible pour
s'éloigner. Cet impossible n'avait pas
réussi. Il devait, à son corps défendant, se
résigner à vivre auprès de celle qu'il
aimait.
CHAPITRE IX
* La réunion privée
Yvonne continuait à ignorer qu'elle fût
sur le point de s'appeler Mme de Bou-
reuil. Le vicomte lui semblait charmant.
Elle acceptait ses moustaches et ne se se-
rait jamais permis de mettre un instant en
doute la valeur de ses arguments religieux.
Cependant tant d'éloquence et de prolixité
l'enthousiasmait sans réchauffer, Eile
admirait sincèrement et catholiquement
cette première spada dont les coups sub-
tils entraient si profondément entre les
cornes du taureau de l'incrédulité, et
faisait éclater en bravos le bon abbé
Cornavin qui applaudissait déjà son futur
député à la table du marquis, comme il
se disposait à l'applaudir bientôt du haut
des tribunes do l'Assemblée, au risaue de
se faire mettre à la porte pour marques
d'approbation intempestives.
Mais si, comme l'a écrit Chamfort, ou
n'amuse pas longtemps les femmes avec
de l'esprit, à plus forte raison ne les sub-
jugue-t-on pas avec des discours. Elle sor-
tait écrasée de ces séances de dialectique,
dans lesquelles le jeune et triomphant
vicomte avait l'air d'essayer son audi-
toire et de répéter généralement, commt
au théâtre, les scènes qu'il se préparait (
jouer devant la rampe parlementaire.
M. de Curval résolut de frapper un
grand coup, c'est-à-dire d'affoler sa fille
par un de ces triomphes éclatants et pu-
blics auxquels, à défaut de son cœur, la
tête d'une femme résiste si rarement. Il
loua très cher une salle fumeuse, au pla.
fond de laquelle l'adaptation d'un lustre,
qu'on dut également louer, fut jugée né.
cessaire. Des gradins furent édifiés. Unt
tribune fut adossée au mur du fond. La
cage ainsi arrangée, il était facile d'en de-
viner l'oiseau. C'était M. de Boureuil, don(
le magnifique talent d'orateur en cham
bre piaffait d'impatience à la pensée di
se répandre au dehors.
(A suivre.\
jne numéro : 10 e. - Béjmrfemente s M &
Sù Pluviôse - an 88 - - N° 3631
-:- - RÉDACTION -
adresser au Secrétaire de la Rédactiott
De l à 6 heures du soir
18J HUE DB VALOIS, 18
^manuscrits non insérés ne seront pas remtatf
ANNONCES
MM. Ch. LAGRANGE, CERF et C*
6, place de la Bourse, 6
ADMINISTRATION*
J8, NON DB VALOIS, 13
«
ABORSfEStEXTS
: PARIS
Vroïs mois io »
fia mois. 20 e
DÉPARTEMENTS
Trois mois. 13 5fl
Six mois 21 a
1 - ,
• Adresser lettres et mandats
A M. ERNEST LEFÈVRB
ADMINISTUATJCUR-CÉRANT
IE DROIT D'AFFlèîtteg
M. de Freycinet vient do fournir, à
non corps défendant, malgré lui, invi-
tus en lalin d'ingénieur, un argument
concluant en faveur de l'amnistie plé-
Bière. Cet argument irrésistible, défi-
nitif, triomphant et inattendu, c'est
l'affichage de son discours dans toutes
les communes de France.
En effet, brûler n'est pas répondre
et afficher n'est pas répondre non plus.
Louis Blanc, dans un très beau lan-
gage, expose les motifs puissants qui
font de l'amnistie une nécessité non-
seulement humanitaire, mais politi-
que; non-seulement politique, mais
jBociale. M. de Freycinet réplique et
développe à son tour les raisons qui
arrêtent le gouvernement dans cette
voie de réparation et d'oubli. C'est en-
suite le public qui, ayant toutes les
pièces du procès sous les yeux, est
appelé à juger de la valeur des raison-
nements produits par les deux ora-
teurs.
Alors le gouvernement trouve un
inoyen d'une simplicité angélique pour
lettre l'opinion de son côté. Il sup-
prime le discours de Louis Blanc et
colle sur les murs à cinq cent mille
exemplaires celui de M. de Frey-
cinet.
Quand les membres du Concile de
Constance eurent fait parvenir à Jean
Huss un sauf-conduit afin qu'il vînt
en toute sécurité leur expliquer sa
doctrine, ils furent tellement frappés
de la lucidité et de la grandeur de sa
dialectique que toute riposte leur se m-
bla impossible. C'est pourquoi, au lieu
de s'épuiser en théories inutiles, ils
construisirent sur une place publique
très fréquentée un bûcher magni-
fique sur lequel ils prièrent leur adver-
saire de vouloir bien monter.
Il faut croire que ce mode de discus-
sion est resté le meilleur puisque le
gouvernement actuel copie servilement
dans la question de l'amnistie les pro-
cédés du Concile de Constance dans la
question de la présence réelle. Nous
reconnaissons que, le bois étant devenu
très cher, on ne fera monter Louis
Blanc sur aucun bûcher, mais, faute
d'oser le réduire en cendres, on le
réduit au silence en annulant autant
que possible sa parole pour ne laisser
subsister que celle du président du
conseil.
Cette façon de vaincre n'est pas
neuve, mais elle est toujours instruc-
tive. On fait saisir son ennemi par les
gendarmes, à qui on prescrit de lui at-
tacher les mains, de lui lier les pieds
et de lui ajuster un bâillon. Puis on se
rue sur lui en lui criant:
— Défends-toi !
Et comme il ne se défend pas, on le
déclare battu à plates coutures, et on
fait chanter un Te Dcuyi dans toutes les
cathédrales connues.
Tout est relatif ici-bas, et l'éloquence
est la chose la plus relative de toutes.
Les arguments de M. de Freycinet n'é-
taient bons qu'à la condition que ceux
de Louis Blanc fussent mauvais. Mais
pour établir qu'ils l'étaient, il eût été
indispensable de les afficher en regard
des bons. Ceux-ci en eussent été rehaus-
sés et ceux-là diminués d'autant. Mais
arracher les affiches posées par son con-
spirent pour y substituer les siennes,
'êst renouveler par trop ouvertement
le système des candidatures officielles
de l'empire. Il est à supposer que M.
de Freycinet n'a pas une haute idée de
ees facultés persuasives. Avec un peu
plus d'amour-propre et de confiance en
lui-même, il se fût empressé d'exiger
que le discours au quel il a si brillam-
ment répondu fut placé côte à côte avec
le sien. Mais accaparer ainsi toutes les
murailles, de peur que, si on en laisse
une seule à son contradicteur, il ne
vous écrase de son talent, c'est pousser
trop loin la modestie.
Comme pour le mariage, il faut être
au moins deux pour la lutte. Supposez
Arpin, le terrible Savoyard, venant.
seul dans l'arène et jouant désespéré-
ment des biceps comme pour terrasser
un adversaire absent, puis s'essuyant
le front et s'adjugeant à lui-même le
prix de torse : il serait incontinent re-
conduit à grands coups de sifflet.
— Combien sont-ils? demande Bil-
boquet à Zéphyrine dans cette admira-
ble pièce des Saltimbanques qu'il faut
toujours citer quand il s'agit de débats
politiques.
— Ils sont un, répond celle-ci.
M. de Freycinet est un également
dans la discussion de l'amnistie ; et, de
même que ce nombre ne suffit pas à
Bilboquet pour faire sa recette, il ne
suffit pas au gouvernement pour faire
la lumière.
Ce monopole qu'il paraît s'attribuer
en disposant des murailles communales
comme de sa propriété exclusive accuse
une tendance dont il est urgent de si-
gnaler la gravifé. Depuis neuf ans, les
condamnés à qui on vient encore de
refuser l'amnistie ont la bouche fermée
par les décrets de l'empire qui leur in-
terdisent de se disculper des calomnies.
Seuls les calomniateurs ont eu la pa-
role, et on sait comment ils en ont usé.
En perpétuant à sa manière cet état de
choses qui permet de n'entendre qu'une
cloche, le gouvernement nous reporte
aux jours de la répression de mai,
où l'on était fusillé sur la dénoncia-
tion d'un débiteur auquel les cours
martiales ne vous laissaient pas même
répondre. Ce qui, à cette époque téné-
breuse, se faisait pour les condamna-
tions se fait aujourd'hui pour l'amnistie.
On affiche le réquisitoire et on interdit
la défense.
Les sénateurs de la droite paraissent
avoir renoncé à leur interpellation sur
la nomination de M. Barrère. Dans
leur intérêt, ils ont bien fait. A quoi
aurait abouti leur interpellation? A dé-
montrer que parmi les condamnés de
la Commune il y a des hommes capa-
bles de rendre de grands services à
leur pays ? Ce n'est pas ce qu'ils doi-
vent avoir à cœur de prouver.
Se seraient-ils bornés à reprocher au
gouvernement d'employer un homme
instruit et intelligent, parce que cet
homme est un amnistié ? Alors, ils au-
raient été profondément ridicules.
Mais, peut-être voulaient-ils obtenir
du Sénat un vote défavorable à l'amnis-
tie. Peut-être espéraient-ils que tous
les pères conscrits allaient manifester
avec eux. Mauvais calcul! Le terrain
était trop mal choisi. Quel sénateur
n'ayant pas perdu le bon sens oser, it
dire ; Je ne veux plus entendre parler
d'amnistie parce que, parmi les amnis-
tiés, se trouvent des hommes dé-
voués et utiles?
Les sénateurs de la droite doivent
savoir, cependant, que leurs collègues
ne poussent pas l'innocence à ce point-
là.
Pour nous, nous croyons que si l'in-
terpellation avait eu lieu, c'est la cause
de l'amnistie qui en aurait profité.
M. Barrère, condamné de la Commune
et membre d'une commission diploma-
tique est un argument officiel et vivant,
en faveur du retour de tous les pros-
crits.
EDOUARD LOCKROY.
L'ELECTION DE Lt DOBDOfiNE
Voyez-vous?. — Quoi? — « Les
signes précurseurs de la tourmente qui
se prépare au dedans. » — Non. -
Vous êtes aveugle. Etiteiidez-vous
— Quoi? — « Les grondements loin-
tains de l'orage qui grossit au
dehors». — Non. — Vous êtes sourd.
Ainsi parle le Soleil, qui, n'étant,
lui, ni sourd ni aveugle, entend les
grondements et voit les signes. —
Donc, tourmente et orage, voilà notre
avenir. Quel dieu nous empêchera
d'être tourmentés? Quel autre dieu
nous empêchera d'être foudroyés?
« A ces questions, il n'y a qu'une ré-
ponse possible H, dit le Soleil. Le dieu
qui nous préservera de la tourmente
dont on voit les signes précurseurs,
c'est M. de Fourtou. Le dieu qui nous
préservera de l'orage dont on entend
les grondements lointains, c'est M. Gi-
biat.
Le 7 mars prochain, les électeurs sé-
natoriaux de la Dordogne ont à rem-
placer MM. Magne et Dupont. Que, le
7 mars prochain, les électeurs sénato-
riaux de la Dordogne remplacent
M. Dupont par M. Gibiat et M. Magne
par M. de Fourtou, et à l'instant même
on verra la tourmente qui se prépare
au dedans « se changer en bonasse»,
comme dit Pierre Corneille, et, comme
dit Vi-clor Hugo, les éclairs de l'orage
qui grossit au dehors « remonter au
ciel sans avoir foudroyé ».
Ce n'est pas sans un certain étonne-
ment qu'on lit dans le Soleil cet
hymne à MM. Gibiat et de Fourtou,
car MM. Gibiat et de Fourtou sont bo-
napartistes et le Soleil a passé jusqu'ici
pour orléaniste. — Eh bien, quoi ?
réponcLle Soleil. Il est vrai que «M. de
Fourtou a pu ne pas toujours com-
prendre comme nous la cause de l'or-
dre», mais n'est-ce pas déjà beaucoup
qu'il l'ait comprise ? Il est encore vrai
que M. Gibiat est propriétaire de
deux journaux, le Constitutionnel et
le Pays, qui « ne se placent pas tout
à fait au même point de vue que
nous». Pas tout à fait? le point
de vue bonapartiste n'est pas tout
à fait le point de vue orléaniste?
Mais « quand l'avenir est si sombre,
qu'importent les nuances» 1 Nous avons
dit souvent que pour nous toutes les
formes de monarchie se valent, mais
nous n'espérions pas d'un journal
royaliste cet aveu qu'il n'y a qu'une
nuance entre la royauté et l'empire.
Donc, qu'importent les nuances !
qu'importe la petite différence qui peut
exister du point de vue bonapartiste au
point de vue orléaniste ! qu'importe aux
orléanistes que M. de Fourtou soit du
parti qui a « coupé la bourse aux prin-
ces d Orléans »! Ils ne se souviennent
que d'une chose : c'est que « M. de
Fourtou a fait ses preuves comme par-
lementaire ». Notamment, en mettant
le parlement à la porte. M. de Fourtou
est donc parfaitement digne d'aller
« fortifier au Sénat cette phalange de
résistance ferme et prudente » qui a
aidé le Seize-Mai à bousculer le pays
pendant six mois et à le mettre à
deux doigts de la guerre civile. Quant
à M. Gibiat, le Soleil trouverait en-
core plus ridicule de lui objecter la
nuance imperceptible qui distingue
l'orléanisme du bonapartisme. Le
Constitutionnel et le Pays? mais ce sont
justement les deux principales qualités
de M. Gibiat ! Il est temps « que le
parti de l'ordre ait le mérite et l'habi-
leté de récompenser les services qu'on
lui rend dans la presse, et de pousser
au Sénat et à la Chambre les proprié-
taires et les rédacteurs de journaux qui
se dévouent à sa cause». Ayant dit
cela une fois, le Soleil le répète : « Le
parti conservateur commet de vérita-
bles actes d'ingratitude en ne se mon-
trant pas reconnaissant pour les hom-
mes qui dans la presse lui consacrent
leur argent, leur intelligence et leur
temps ». Et la première réflexion qui
vient devant cette insistance est que ce
n'est pas seulement dans le Constitu-
tionnel et dans le Pays que quelqu'un
consacre à la cause de l'ordre son intelli-
gence, son temps et son argent. Et « à
moins d'être aveugle, il est impossible
de ne pas apercevoir » dans l'ardeur
avec laquelle le journal de M. Hervé
soutient la candidature de M. Gibiat
« les signes précurseurs de la pro-
chaine » candidature de M. Hervé.
Quoi qu'il y ait de touchant dans
cette fraternisation de l'orléanisme
avec le bonapartisme, j'ai peur 1 que
les électeurs sénatoriaux de la Dor-
dogne n'en éprouvent - moins d'at-
tendrissement que de gaieté, et je
serais surpris si les orléanistes bona-
partisants leur persuadaient aisément
que le meilleur moyen d'assurer la
sécurité de l'avenir est de choisir pour
mandataires les candidats qui désirent
le renversement des institutions du
pays et qui nous rejetteraient dans les
révolutions.
AUGUSTE VACQUERIE.
4-W
COULISSES DES CHAMBRES
Nous croyons savoir que le conseil des
ministres, dans sa réunion d'hier matin,
a décidé, sur la proposition du ministre
de la guerre, que les inspecteurs géné-
raux de l'armée dont les pouvoirs arrivent
à expiration ne seraient pas remplacés.
On sait que ces inspecteurs généraux fu-
rent créés en 1878 par le général Gresley,
à l'avènement du ministère Waddington.
Ces inspecteurs étaient au nombre de
trois, et l'un d'entre eux était le duc d'Au-
male.
Par suite de la mesure décidée hier ma-
tin, le général duc d'Aumale entre dans
la position de disponibilité. Il ne remplit
plus aucune fonction active. Il se trouve
dans la même situation que le maréchal
Canrobert, dépossédé déjà, comme on le
sait, de la présidence de la commission de
classement des officiers.
-0-
L'Union républicaine de la Chambre est
convoquée pour aujourd'hui à quatre heu-
res au Palais-Bourbon, à l'effet de procé-
der à l'installation de son nouveau bu-
reau.
Le nouveau président, M. Spuller doit,
à cette occasion, prononcer un impor-
tant discours, dans lequel il définira la
ligne politique que le groupe doit suivre.
-0-
r La gauche du Sénat s'est réunie hier
sous la présidence de M. Leblond. Elle
avait à détèrminer la manière dont elle
choisirait un candidat pour le siège de
sénateur inamouible vacant par suite du
décès de M. Crémieux. On sait, en effet,
que, par suite du mode de roulement éta-
bli entre les groupes républicains, c'est à
la gauche que revenait le soin de désigner
un candidat.
Le président a fait connaître qu'il y
avait actuellement une douzaine de can-
didats proposés par des sénateurs ou se
présentant directement. En voici la liste,
par ordre alphabétique, telle qu'elle se
compose à l'heure actuelle :
1° Edmond About, directeur du XIXe
Siècle.
2° Allou, ancien bâtonnier.
3° Berthelot, professeur au Collège de
France, membre de l'Institut.
4° Henri Didier, conseiller à la cour de
cassation.
5° Franck, professeur au Collège de
France, membre de l'Institut.
6° Albert Grévy, gouverneur général de
l'Algérie.
7° Gatien-Arnoult, ancien député à l'As-
semblée nationale.
8° Faustin Hélie, vice-président du con-
seil d'Etat, membre de l'Institut.
9° Lalanne, directeur de l'Ecole des
ponts et chaussées, membre de l'Ins-
titut.
10° De Pressensé, ancien député à l'As-
semblée nationale.
11° De Saint-Gresse, premier président
de la cour de Toulouse.
12° Wurtz, membre de l'Institut, pro-
fesseur à la Sorbonne.
Ajoutons qu'il est inexact qu'on ait pro-
posé la candidature de M. de Freycinet
ou celle de M. le général Farre.
Comme la liste ci-dessus n'iest pas close
et qu'elle peut s'augmenter encore de
quelques noms d'ici au jour de la désigna-
tion du candidat, l'embarras a paru assez
grand pour qu'on épargnât au bureau du
groupe le soin de faire une liste de pré-
sentation comme on l'avait d'abord pro-
ieté.
U Il a été convenu que la gauche, dans
une réunion générale qui sera tenue la
semaine prochaine, voterait au scrutin
nominal pour un candidat pris dans la
liste de ceux qui sont déjà inscrits ou qui
le seraient d'ici au jour de l'élection.
Le nom qui réunira la majorité abso-
lue des votants sera celui du candidat de
la gauche. Si aucun nom n'obtenait la
majorité absolue, on procéderait à un
scrutin de ballottage entre les trois noms
qui auraient obtenu le plus grand nombre
de voix au premier tour.
Suivant l'usage, la candidature choisie
par la gauche sera soumise à l'acceptation
des deux autres groupes républicains.
La réunion a été ensuite saisie d'un
projet d'amendement à l'article 7 du pro-
jet Ferry sur la liberté de l'enseignement
supérieur, par M. Lenoël, sénateur de la
Manche.
On sait que l'article 7 interdit l'ensei-
gnement aux membres de toutes les as-
sociations religieuses non autorisées. L'a-
mendement de M. Lenoël tend à suppri-
mer le mot religieuses, de manière à éten-
dre l'interdiction à toutes les associations
non autorisées, religieuses ou laïques.
Mais M. Lenoël propose d'édicter cette
interdiction « sans préjudice de l'applica-
tion des lois sur les congrégations non
autorisées ». Il a voulu marquer par là
que le seul refus du droit d'enseigner ne
serait pas une reconnaissance indirecte du
droit d'exister, et que toutes les interdic-
tions de résidence sur le sol français pro-
noncées contre certaines congrégations
persistaient.
La réunion, pressée par l'heure de la
séance publique, s'est séparée en ajour-
nant à une séance ultérieure l'examen de
cet amendement.
Les bureaux du Sénat se sont réunis
hier pour nommer la commission chargée
d'examiner la proposition déjà votée par
li Chambre des députés et tendant à l'a-
brogation de la loi de 1874 sur l'aumône-
rie militaire.
La commission se compose de cinq
membres favorables à l'abrogation et de
quatre membres opposés.
r Les „ cinq membres favorables soïA
MM. Foucher de Careil, Charles Brdeu
Testelin, Charles Robin et Malens. Les
quatre membres opposés sont MM. le itfis-
quis de Màleville, l'amiral Fourichoiî:
le général Brémond d'Ars et de Ker-
drel.
Si les sénateurs républicains avaient
été plus exacts dans certains bureau, Il
majorité des commissaires en faveur de
la suppression de 1 aumônerie militaire
eût été beaucoup plus grande.
A LA CHAMBRE
Avant tout, nous devons constater.
l'éclatant succès de M. Rouvier, qui,
au nom de la minorité de la commis-
mission, a défendu hier, avec une au-
torité qui va en grandissant et ce rare
talent d'exposition qu'on lui connais-
sait déjà, les doctrines économiques"
dont, selon nous, la République ne
saurait s'écarter sans péril. Les applau-
dissements qui, à chaque instant, ont
interrompu l'orateur nous permettent
d'espérer que la Chambre apprécie
maintenant à leur valeur les déclama-
tions protectionnistes.
Nous allons, tout à l'heure, revenir
sur ce discours magistral, où nous
avons été heureux de retrouver la plu-
part des idées que le Rappel s'est efforcé
de défendre depuis le commencement!
de ce débat. Mais nous avons cru de-
voir signaler d'abord le nouveau ser-
vice rendu par M. Rouvier, qui a su
porter la lumière sur tous les points
d'une discussion dans laquelle beau-
coup semblaient prendre plaisir à ac-
cumuler les obscurités. La force et
l'ampleur de sa démonstration, et l'au-
torité qu'il a conquise sur la Chambre,
mettent désormais M. Rouvier au pre-
mier plan des orateurs qui ont le don
de comprendre et de discuter les ques-
tions d'affaires, et qui seront certaine-
ment, un jour ou l'autre, appelés à les
diriger, dans le gouvernement, après
les avoir traitées à la tribune comme
députés. ,;:
Au commencement de la séance, M.
Allain-Targé a continué le discours
éloquent qu'il avait commencé la veille.
et que nous avions eu le regret de ne
pouvoir approuver. Si nous ne nous
trompons, dans son argumentation
d'hier, M. Allain-Targé aurait atté-
nué, sur plus d'un point, la rigueur
absolue de ses premières déclarations.
Nous sommes loin de lui en faire un
reproche. L'honorable membre a com-
pris sans doute que la thèse protection-
niste, dont il avait été l'habile défen-
seur, conduisait à des conséquences
bien redoutables lorsqu'on l'appliquait
à de certains produits, aux blés, par
exemple, aux matières premières éga;
lement. Aussi, pour les objets, d'ali-
mentation, pour d'autres encore, Tora-
teur s'est presque rangé du côté des
libres-échangistes et il a invité la com,
mission à faire comme lui et à se rel £ j
cher un peu de ses prétentions.
Encore une fois, nous ne pouvons
en vouloir à cet excellent républicain
de reculer devant quelques-unes des
conséquences do ses principes, de vou-
loir pour le coton, pour la tannerie,
pour tout ce qui sert à la nourriture
à peu près la liberté. Seulement, il faut
bien avouer que c'est une grosse in.
conséquence. Protéger un certain
pombre d'industries et livrer les au-
tres à la concurrence, c'est placer
celles-ci entre deux feux. Le -produit
Feuilleton du RAPPEL
DU 19 FÉVRIER
,'-.- '",. -si'-
25 ———.
LE
PALEFRENIER
ROMAN PARISIEN
CHAPITRE VIII
Rêveries en Rabots
(Suite)
Néanmoins, son idée dè demander par-
don à Yvonne séduisait trop Roderic pour
qu'il l'abandonnât. Au moment où elle lui
remit les rênes pour monter dans le coupé
qui devait la ramener chez son père, il lui
dit timidement et sourdement ;
Voir le Rappel du 26 janvier au 18 févrisi*
— Mademoiselle voudrait-elle être as-
sez bonne pour me pardonner mon in-
convenance vis-à-vis du garçon de ma-
nège. S'il ne s'était pas agi de mademoi-
selle, je ne me serais jamais permis.
— Je sais, répondit Yvonne, que c'est
toujours lorsque vous craignez pour moi
que vous perdez patience. Je vous par-
donne bien volontiers, monsieur François,
ce qui est, en réalité, une nouvelle preuve
de dévouement de votre part.
Roderic ferma les yeux et se retint à la
portière ouverte du coupé, se sentant près
de s'évanouir. Toute diplomatie l'aban-
donna, et ces mots passèrent dans les tré-
molos d'une sorte de satisfaction :
— Oh! oui, vous pouvez compter sur
mon dévouement, je serais si heureux de
mourir pour vous !
Cette témérité involontaire eut vite sa
récompense. Yvonne en rentrant à l'hôtel
annonça à M. de Curval que décidément
l'équitation la fatiguait et qu'elle y renon-
çait momentanément. Si bien que le len-
demain, comme Roderic étaild:uls l'écurie,
peignant avec tendresse la crinière de la
jument isabelle, il reçut du marquis l'avis
que mademoiselle ne sortirait pas à
cheval ce jour-là, non plus que les jours
suivants, et que, puisqu'elle seule pouvait
.monter la petite jument, on se déferait
à la première occasion de cette jolie bête
devenue inutile.
Le malheureux réfugié s'était si invin-
ciblement habitué au pain quotidien de
cette promenade journalière qu'elle avait
fini par constituer sa vie. Sa langueur
tourna au désespoir. Quand deux heu-
res sonnaient, il se remémorait les déli-
cieuses émotions de l'apparition de Mlle
de Curval dans sa fine robe de drap, collée
à sa taille serpenline. Il s'était dit si long-
temps : Elle va venir! qu'il lui était im-
possible de s'accoutumer à se dire : Elle
ne viendra pas! Devant le perron désert
et la cour vide, il se plongeait les deux
mains dans les touffes de ses cheveux,
pleurant et allant conter ses misères, à la
petite jument Isabelle qu'il embrassait en
la prenant par le cou, lui disant adieu,
puisqu'on allait probablement les séparer
aussi.
Un jour, enfin, il s'éveilla, ou plutôt il
se leva, car il n'avait pas dormi une
demi-heure dans la nuit et, en consta-
tant dans le petit miroir accroché à la
cloison le creusement de ses yeux cernés,
il se révolta contre lui-même :
— Décidément, lit-il, je suis un lâche.
Si mon brave pècc ma voyait, il ne pour-
rait moins faire que de me renier.
Instantanément, il prit la résolution de
courir à la recherche d'un passeport, dût-
il le payer des dix mille francs qui lui res-
taient, de quittes l'hôtel Curval et d'aller
réclamer à la Suisse ou à l'Angleterre la
tranquillité matérielle et surtout morale.
Il demanda congé pour toute une jour-
née, lui qui ordinairement rie profitait pas
de celles que son engagement lui accor-
dait, et la consacra à la conquête de cette
toison d'or. Il se rendit à Saint-Denis,
chez un brave conseiller municipal qui
avait organisé une entreprise d'évasion à
l'usage des fédérés bloqués dans Paris,
faute de moyens pour en sortir. Le
malheur voulut qu'Aronelli se rencontrât
chez ce philanthrope avec un autre contu-
mace au moins aussi compromis que lui.
Or, il n'en est pas des passeports comme
des portions dans les restaurants. Quand
il y en a pour un, il n'y en a pas pour
deux. Le sculpteur avait pour quelque
temps, du moins, un abri sérieux. Son
confrère en vagabondage étant errant et
sans asile, et un seul passeport restait
dans le tiroir du sauveteur.
Un combat de magnanimité commença
dans le domicile du généreux conseiller
municipal, entre les deux proscrits. Aro-
nelli en sortit vainqueur, c'est-à-dire que
le passeport resta à son adversaire. :
Il revint à l'hôtel harassé, mais déconfit,
A vrai dire il avait craint un moment que
le papier sauveur ne lui échût, ce qui l'eût
à jamais privé de la vue de mademoiselle
de Curval. Maintenant sa conscience était
en repos. Il avait tenté l'impossible pour
s'éloigner. Cet impossible n'avait pas
réussi. Il devait, à son corps défendant, se
résigner à vivre auprès de celle qu'il
aimait.
CHAPITRE IX
* La réunion privée
Yvonne continuait à ignorer qu'elle fût
sur le point de s'appeler Mme de Bou-
reuil. Le vicomte lui semblait charmant.
Elle acceptait ses moustaches et ne se se-
rait jamais permis de mettre un instant en
doute la valeur de ses arguments religieux.
Cependant tant d'éloquence et de prolixité
l'enthousiasmait sans réchauffer, Eile
admirait sincèrement et catholiquement
cette première spada dont les coups sub-
tils entraient si profondément entre les
cornes du taureau de l'incrédulité, et
faisait éclater en bravos le bon abbé
Cornavin qui applaudissait déjà son futur
député à la table du marquis, comme il
se disposait à l'applaudir bientôt du haut
des tribunes do l'Assemblée, au risaue de
se faire mettre à la porte pour marques
d'approbation intempestives.
Mais si, comme l'a écrit Chamfort, ou
n'amuse pas longtemps les femmes avec
de l'esprit, à plus forte raison ne les sub-
jugue-t-on pas avec des discours. Elle sor-
tait écrasée de ces séances de dialectique,
dans lesquelles le jeune et triomphant
vicomte avait l'air d'essayer son audi-
toire et de répéter généralement, commt
au théâtre, les scènes qu'il se préparait (
jouer devant la rampe parlementaire.
M. de Curval résolut de frapper un
grand coup, c'est-à-dire d'affoler sa fille
par un de ces triomphes éclatants et pu-
blics auxquels, à défaut de son cœur, la
tête d'une femme résiste si rarement. Il
loua très cher une salle fumeuse, au pla.
fond de laquelle l'adaptation d'un lustre,
qu'on dut également louer, fut jugée né.
cessaire. Des gradins furent édifiés. Unt
tribune fut adossée au mur du fond. La
cage ainsi arrangée, il était facile d'en de-
viner l'oiseau. C'était M. de Boureuil, don(
le magnifique talent d'orateur en cham
bre piaffait d'impatience à la pensée di
se répandre au dehors.
(A suivre.\
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