Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-01-13
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 janvier 1910 13 janvier 1910
Description : 1910/01/13 (N11953,A33). 1910/01/13 (N11953,A33).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
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LE NUMERO
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Victor FLACHON
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TRENTE-TROISIEME ANNEE. — NUMERO 1 1,953
JEUDI 13 JANVIER 1910
22 NIVÔSE. AN 118
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LE NUMERO
5
CENTIMES
DES PROJETS.
Le Conseil des ministres, dans sa réu-
nion d'hier, a été appelé à préciser le
sens des déclarations que le gouverne-
ment apportera à la tribune de la Cham-
bre en réponse aux interpellations qui
visent la défense de l'école laïque et qui
vont être discutées à propos du budget
de l'instruction publique auquel elles
ont été jointes.
Un note gouvernementale nous fait
connaître que le ministre de l'instruc-
tion publique compte soumettre à' la
Chambre plusieurs projets de lois. Deux
sont déjà connus et anciens : le premier
tend à assurer la fréquentation scolai-
re ; le second a pour but de soustraire
l'instituteur aux menaces d'interven-
tion des particulière en substituant à
sa responsabilité celle de l'Etat dans
les actions intentées par les parents.
Le premier de ces projets a paru in-
suffisant pour mettre ordre à la cam-
pagne organisée par les cléricaux con-
tre l'école. Le conseil des ministres a
décidé de le modifier de manière à at-
teindre et à réprimer les manœuvres
qui tendent à entraver le service de
l'enseignement par discours, menaces
ou autres moyens.
Il est certain que, sur ce point, notre
législation est complètement désarmée.
Et comment aurait-on pu prévoir qu'un
jour viendrait où des Français s'effor-
ceraient de rendre impossible l'ensei-
gnement public et de faire le vide dans
nos écoles ? Ce jour est venu. Une fu-
rieuse campagne a été entreprise, dont
les effets, pour n'être pas encore très
graves, sont pourtant assez importants
pour appeler une intervention énergique
du législateur.
Mais le gouvernement, préoccupé de
répondre à cette guerre insensée du
parti clérical, a prévu et préparé un
troisième projet, dans le but d'organi-
ser sur des bases plus sérieuses le con-
trôle de l'Etat sur les écoles privées.
Il réalise ainsi la menace qu'adres-
sait un jour le président du Conseil aux
adversaires de l'école laïque lorsqu'il
leur disait : « Nous pénétrerons dans
vos écoles ».
Les cléricaux, qui ont entrepris d'é-
plucher mot à mot les manuels d'ensei-
gnement qui se trouvent entre les mains
des instituteurs, mettent sous les yeux
des enfants qui. fréquentent les écoles
privées des livres bourrés de menson-
ges, forgés par les jésuites,empoisonnés
de la pensée cléricale. Quelques-uns de
ces manuels d'histoire frelatée ou de
morale hypocrite ont été ces derniers
temps divulgués. Le public a pu voir
de quel côté se trouvent la mauvaise foi
et la perfidie. Un projet de loi qui or-
ganisera le contrôle de l'Etat sur l'en-
seignement clérical sera donc bien ac-
cueilli.
Mais quand sera-t-il voté ? Quand
donc la Chambre discutera-t-elle les
projets préparés depuis deux ans et
ceux que le gouvernement annonce ?
C'est fort bien de dresser des plans de
défense. Il vaudrait mieux les mettre
à exécution.
La Chambre aura-t-elle, S la veille
des élections, l'énergie qu'il faut pour
cette bataille ? Nous en doutons.
INCIDENT PROLONGE
S'il faut en croire une information du
Temps, l'incident franco-turc, que tout au-
torisait à tenir pour définitivement réglé,
fait naître de nouvelles difficultés entre les
gouvernements de Paris et de Constantino-
ple. Les Turcs se montreraient, en effet,
plus décidés que jamais à faire valoir leurs
prétendus droits sur la Tripolitaine et la
Tunisie,et,ainsi qu'on le verra d'autre part,
la France serait, à juste titre, Résolue à ne
pas s'incliner devant de pareilles préten-
tions.
Le procédé consistant à venir revendi-
quer un pays après que nos troupes et nos
nationaux y ont établi l'ordre et y ont créé
la prospérité est vraiment trop commode.
Il est dans tous les cas, assez peu digne
d'hommes raisonnables. Les Jeunes-Turcs
qui, sans parler de la reconnaissance qu'ils
doivent à la Franoo, en raison des précieux
encouragements trouvés chez nous, ne sau-
raient impunément troubler la paix pour
une cause injuste. Ils ne peuvent dès lors,
s'entêter dans leurs revendications.
Quelles vaines satisfactions d'intérêt ou
même simplemenf cPamour-propre recher-
cheraient-ils donc dans une solution violen-
te de l'incident actuel ? Ils n'ignorent pas
que si nous n'avons rien à gagner dans une
expédition en Tripolitaine, eux-mêmes au-
raient beaucoup à y perdre. Dès lors, pour-
quoi s'abstenir alors qu'ils n'ont pas pour
eux le bon droit ?
C'est à cela que doivent réfléchir les Jeu-
nes-Turcs. Ils jouissent encore, en dépit des
quelques erreurs commises par eux, de la
sympathie des républicains. ils se trom-
peraient grandement s'ils croyaient pou-
voir compter sur ces sentiments de bien-
veillance, pour mépriser les droits de la
France.
Nous espérons bien, du reste, que le
gouvernement de Constantinople à l'instar
du gouvernement français, s'attachera à fa-
ciliter l'œuvre des diplomates chargés de
régler l'incident. Le principe d'une commis-
sion do délimitation de la frontière tuni-
sienne paraît admis. Il serait inadmissible
de vouloir bannir du nombre des commis-
saires les représentants de la France. Puis-
que c'est là Je point principal du différend
actuel ,il suffira que les Jeunes-Turcs ré-
fléchissent au bien-fondé de notre demande
pour que, nous n'en doutons pas, un accord
satisfaisant intervienne.
LA PETITE GUERRE
Titre de l'éditorial du Gaulois 1
Aux armes, les bourgeois 2
Et contre qui, donc ?
•*#
Un journal de sacristie se lamente, disant que
la séparation a eu pour conséquences dans les
a églises réformées », le schisme et le déficit.
Il devrait se réjouir, au contraire puisque ce
sont des réprouvés.
1
De L'Echo de Paris ;
« Croiriez-vous qu'un préfet a déposé une
plainte au parquet contre un fermier qui avait
'déchiré un livré- J » -
Nous le croyons si bien que, si le préfet n'a-
vait pas déposé une plainte, nous aurions de-
mandé son rappel à l'ordre, pour apprendre au
fermier çlérical à outrepasser son droit,
HEUREUX RESULTATS
Les Débats se lamentent sur les consé-
quences qu'entraîne la loi de séparation
pour les protestants. Los comptes des égli-
ses réformées se soldent par d'importants
déficits et les facultés voient le nombre des
élèves pasteurs diminuer de jour en jour.
Voilà des constatations qui ne sont pas
faites pour nous déplaire et qui prouvent
dans tous les cas que la foi des protestants
comme celle des catholiques s'accommode
niai des sacrifices pécuniaires. Quand l'Etat
no consent plus, à prélever sur les fonds
publics les ressources nécessaires à la vie
de paresse des ministres du culte, on ne
trouve guère d'amateurs pour ce genre de
profession. Mais que deviennent alors tou-
tes ces belles tirades sur l'irrésistible vo-
cation des élus de dieu ? Serait-ce donc
que les termes étaient impropres et que ce
qu'on appelle à l'église « le noble désir
de consacrer sa vie à la mission sacerdo-
tale » devait se traduire plus simplement
par la préoccupation d'émarger jusqu'à sa
mort au budget de la nation ?
C'est bien cela, en effet, ot au fur et
à mesure que les croyants disposés à payer
se feront plus rares, on verra disparaître la
race de ceux dont l'unique rôle social ré-
side dans le fait de percevoir l'argent des
naïfs. Or, l'Etat a heureusement cessé d'être
ce naïf, gaspillant au profit des comédiens
de cathédrales ou de temples, l'argent né-
cessaire à la réalisation des grandes réfor-
mes sociales. Les jérémiades des catholi-
ques et des protestants prouvent que le
nombre des citoyens raisonnables et clair-
voyants s'accroît tous les jours. L'exemple
donné par la nation aux individus est par
bonheur suivi. C'est le commencement de
la fin et si libres penseurs et républicaing
ne s'endorment pas, s'ils savent opposer
leur force et leur bon droit aux retours of-
fensifs de la religion, il n'est point illusot-
se d'espérer voir, dans un avenir pro-
chain, les temples et les églises aussi vi-
des de prêtres et de pasteurs que de fidèles,
—M
LA QUESTION DES EGLISES
Bien que les curés ne cessent de déclarer
que la République s'efforce de priver leurs
fidèles de .la liberté des cultes et par suite
de la liberté do conscience, ils ne parvien-
nent pas à empêcher ceux de leurs amis
que la passion n'a point aveuglés, de re-
connaître la vérité parmi tous les menson-
ges propagés par les feuilles de sacristie..
C'est ainsi que l'affaire de Grisy-Suines
a été infiniment moins affreuse que les
journaux cléricaux se sont plu à le conter.
De l'aveu même du curé, il n'y a eu au-
cun sacrilège, tous les ustensiles du culte
n'ont même pas été vendus comme ils au-
raient pu l'être ; c'est à cela que s'est bor-
né' le scandale.,
D'autre part, les gens d'Eglise sont obli-
gés de constater eux-mêmes que la loi leur
offre toute possibilité pour maintenir, s'ils
y tiennent, le culte dans leurs églises. A.
ce point de vue, le témoignage du Figaro
nous est précieux et c'est lui qui nous
apprend comment l'église de Saint-Ferdi-
nand des Ternes a pu être réparée, grâce
au concours des amateurs de cérémonies
religieuses.
Le journal réactionnaire qui n'est certes
pas suspect d'indulgence pour le nouveau ré-
gime des cultes, classe au nombre de trois,
selon la loi, les cas de désaffectation d'une
église : 1° Si elle a été détournée de sa
destination ; 2° Si le culte a cessé d'y être
célébré pendant 6 mois ; 3° Si elle menace
ruine et devient un danger public.
Hormis ces trois conditions, les catholi-
ques ont une sécurité complète ils peuvent
dès lors réparer les églises dont ils sont
bien décidés à user, avec la certitude abso-
lue., qu'elles ne pourront être arbitraire-
ment désaffectées. La mesure de libéralis-
me contenue dans la loi de séparation est
donc largement suffisante. Les calotins,
lorsqu'ils formulent des récriminations,
nous prouvent d'une façon parfaite que le
droit commun ne leur suffit pas, ils ré-
clament encore ce régime de privilège avec
lequel la République a si heureusement
rompu.
La situation est nette, si les fidèles veu-
lent conserver les églises, ils le peuvent ;
il leur appartient de les entretenir à leurs
frais. Si leur foi ne va pas jusqu'au sacri-
fice nécessaire pour réparer les sanctuaires,
la désaffectation s'impose ; il est bien évi-
dent que l'on ne peut contraindre la collec-
tivité des citoyens à contribuer à l'entre-
tien d'édifices qui ne peuvent intéresser que
les seuls cagots.
Que l'on no nous parle donc plus de la
tyrannie républicaine ; parmi les mécon-
tents nous ne voyons que des cléricaux qui
tiennent à être des victimes, ou qui veulent
aller au paradis sans bourse <îél«a?v{ ils ne
sauraient nous intéresser.
TRIBUNE LIBRE
Une emete
sur la R.P.en Suisse
La Presse Associée vient de se livrer,
en Suisse et en Belgique, dans ces deux
petits pays ou fonctionne depuis plu-
sieurs années déjà la représentation
proportionnelle, à une enquête des plus
utiles sur le fonctionnement de ce sys-
tème électoral.
Elle a eu l'obligeance de nous- com-
muniquer les résultats complets de cette
enquête qu'il nous paraît intéressant
d'analyser. Comme il fallait s'y atten-
dre, les réponses envoyées par les hom-
mes politiques, les publicistes, les pro-
fesseurs choisis au hasard parmi les
plus éminents de chaque parti, sont va-
riables et montrent combien la propor-
tionnelle est loin d'avoir séduit toiETtes
Suisses et tous les Belges, comme on
s'est plu longtemps à l'affirmer.
Nous trouvons en effet dans ces ré-
ponses toute la gamme des opinions
pouvant être professées sur la R. P.,
depuis le proportionnalisme enthousias-
te jusqu'à l'antiproportionnalisme pas-
sionné, en passant par l'indifférence et
le scepticisme. Il y a donc loin, de là, à
l'unité de vue favorable à la R. P..
qu'on ne craignait pas d'exploiter.
En réàlité, sur les quatorze réponses
reçues de Suisse, 7 sont plus ou moins
favorables à la R. P., 6 lui sont nette-
ment hostiles et la dernière est mitigée
et contient, après une adhésion théori-
que, de sérieuses réserves.
Encore faut-il noter que la plupart
des réponses favorables émanent de
Neufchâtel et concernent le système pra-
tiqué pour les élections communales de
ce canton et qui n'est en réalité qu'un
vote limité n'ayant qu'un rapport très
lointain avec la véritable représentation
proportionnelle.
Certaines appréciations des adversai-
res de la proportionnelle sont en tout
cas très précises et valent la peine;
d'être signalées. C'est ainsi que M.
F.-H. Mentha, professeur à la Faculté
de droit de Neufchâtel et président de
la Cour de cassation, « ne croit pas que
ce-soit un progrès de placer la source
du droit sous le patronage de l'arithmé-
tique ». La représentation proportion-
nelle « répugne profondément à sa con-
ception politique ».
Tout en faisant certaines réserves sur
les améliorations possibles à apporter
aux systèmes actuellement connus de
proportionnelle, M. Eugène Richard, qui
fut successivement professeur à la Fa-
culté de droit, conseiller municipal de
Genève, député au Grand Conseil, mem-
bre du gouvernement, président du Con-
seil d'Etat, conseiller national à l'As-
semblée fédérale, ne nous cache pas les
résultats pitoyables trop souvent don-
nés en Suisse par la R. P.
« Sa méthode arithmétique, dit-il, est
compliquée et la longueur des opéra-
tions de dépouillement provoque des
plaintes à chaque élection. Certains ef-
fets de la représentation proportionnelle
ont déçu ses partisans de la première
heure ; ainsi, l'émiettement des grands
partis, la formation de petits groupes
devenant les arbitres parlementaires.
La politique de principes a dû trop sou-
vent se prêter à des marchandages en-
tre fractions. »
M. Albert Gobât, membre du Conseil
Exécutif du canton de Berne, dont il
fut trois fois président, député au Con-
seil national, est encore plus précis :
« La représentation proportionnelle,
que je vois fonctionner depuis plusieurs
années, n'a pas rendu de service dans
les cantons où elle est introduite. Au
contraire, elle a provoqué des alliances
contre nature qui ont mis la majorité
en minorité. Les partis se sont émiet-
tés ; loin de les animer, elle les a ren-
dus indifférents. j)
Plus énergiques encore sont les criti-
ques formulées par M. Virgile Rossèl,
professeur de droit civil à l'Université
de Berne, député au Conseil national et
vice-président de ce Conseil, auteur de
remarquables ouvrages juridiques et lit-
téraires. Il nous montre qu'à Genève la
représentation proportionnelle « a dé-
terminé un fâcheux émiettement de la
volonté générale, tant et si bien qu'il
n'y a plus au Grand Conseil que des
majorités changeantes, de coalition ou
de hasard, et que toute politique active
et féconde semble désormais impossi-
ble ».
La R. P., ajoute-t-il, « consacre l'om-
nipotence des comités irresponsables ;
elle ne tient pas compte du fait que la
moitié peut-être du corps électoral en-
tend conserver son indépendance et ne
s'inféoder à aucun parti ? elle accuse
les divergences et les antagonismes po-
litiques ; elle divise les citoyens en une
multitude de petites fractions impuis-
santes et, comme en Belgique, elle n'ex-
clut pas la perpétuation au pouvoir
d'un parti qui n'a pas la majorité dans
le pays. Après cela, si les intérêts par-
lent moins haut, ils ont plus d'influence
que les principes dans des questions de
cette nature : les minorités voient sur-
tout dans la R. P. un moyen d'affaiblir
la majorité en la désagrégeant, et la
majorité en a peur, parce qu'elle n'a
point de goût pour le suicide. »
Comme conclusion à ces sévères ap-
préciations de personnalités Jugeant en
connaissance de cause les expériences
suisses de la R. P., je ne puis mieux
faire que de reproduire un passage
d'une lettre que m'écrivait dernière-
ment M. G. de Seigneux, ancien députê
au Grand Conseil de Genève, ancien
président de la Cour de cassation. qui
vient de publier un très remarquable
examen critique de la proportionnelle,
sur lequel je compte prochainement re-
venir. 1
« Si, me disait M. de Seigneux, ceux
qui n'en ont pas encore savouré les
joies se jettent à la tête de la propor-
tionnelle, d'autre part ceux qui ont eu
le bonheur de l'apprécier à sa fuste va-
leur, commencent à s'en dégoûter. C'est
un spectacle curieux et instructif à la
fois. i>
J.-L. BRETON,
Député.
Les Propos
du Lanternier
Devant la galerie parisienne, M. Paul
Bourget, royaliste, et M. Pataud, syndicalis-
te révolutionnaire, font assaut d'esprit.
Le premier a écrit une pièce — une mau-
vaise pièce, d'ailleurs, à mon sens ; — et
le second a cru se' reconnaître dans un des
personnages. Cela nous a valu la lettre sui-
vante, que le révolutionnaire a adressée au
réactionnaire:
Je m'autorise de ce que tous deux nous appar-
tenons à des groupements illustres, vous l'Aca-
démie française, moi le Syndicat des industries
électriques, pour vous demander un service.
On dit qu'un des personnages de votre Barri-
cade, Thubeul, vous a été inspiré par mon « émi-
nente personnalité ». Aussi, j'ai le très grand
désir de contempler mon sosie.
Malheureusement, si ma célébrité est équiva-
lente à la vôtre, il n'en est pas de même du con-
tenu de mon portemonnaie, et je suis un peu
gene pour me payer un-hauteur au vaudre ville.
j'ai donc pensé que gracieusement vous vou-
drez bien m'offrir ce siège, et en revanche, je
m'engage à vous réserver un bout de banc pour
la prochaine assemblée générale du syndicat des
électriciens.
M. Bourget, en réponse, a nié avoir voulu
viser M. Pataud à qui il a promis les de:ux
fauteuils demandés.
Et ceci me rappelle — par antiphrase, si
j'ose dire, — ce mot de Tristan Bernard a
un Parisien qui lui demandait un fauteuil
dans un théâtre où on jouait une de ses piè-
ces à succès relatif:
— Désolé! mon cher; mais en ce moment,
nous ne pouvons - donner que des rangs de
fauteuils.
Donc, M. Pataud aura ses deux places; et
M. Paul Bourget aura un strapontin à la
Bourse du travail. Le premier profitera de
l'occase; le second la laissera passer, et je
le regrette, car il pourrait ainsi se docu-
menter et refaire — en mieux — la Barri-
cade. Mais le plus clair de l'affaire, c'est
que, grâce à la publicité donnée à cet échan-
ge d'aménités d'allure aristocratique, M.
Pataud et M. Bourget auront conquis tous
deux un peu plus de célébrité.
Des électriciens, qui ignoraient l'auteur
de Cruelle énigme, sauront désormais qu'il
existe. Contrairement à ses habitudes, le se-
crétaire de leur syndicat les aura éclairés
sur ce point. Et d'autre part, mainte mar-
quise qui vit retirée dans son boudoir, loin
des huits du monde et ne lisant qu'à la
flamme des lustres de l'Académie, saura que
M. Pataud existe et que l'Immortalité comp-
te avec lui.
Ce sera tout profit pour les uns et les
autres. Reste le gros public, mais celui-là
se désintéresse de l'affaire, et il ne deman-
de ityi'à en rire, pourvu que M; Bourget ne
l'oblige pas à lire ses romans, qui sont obs-
curs, et que M. Pataud lui fasse grâce le
plus! possible de manifestations. qui te
le sont pas moins.
Reste moi: or, moi, je me frotte les mains,
car j'y ai gagné un sujet d'article.
LA RÉACTION CONTRE L'ARMÉE
Les commentaires dont la presse réac-
tionnaire a fait suivre l'assassinat d'une
rentière par deux soldats, ont dépassé bien
vite l'appréciation d'un fait criminel ; ce
que l'on met en cause aujourd'hui c'est la
conception actuelle d'une armée propre à
donner tout à la fois, des défenseurs et des
citoyens utiles à la patrie.
On a mis en cause les tempéram-ents ap-
portés à une discipline inhumaine, on a
surtout accusé, dans une rage de réaction,
les tentatives les plus heureuses pour amé-
liorer la situation morale du soldat.
Frappé par les statistiques des infirme-
ries régimentaires et des hôpitaux de l'ar-
mée, M. Chéron, lorsqu'il était sous-secré-
taire d'Etat de la guerre, a prescrit des
conférences de nature à informer le mili-
taire inexpérimenté des dangers de mala-
die qui le menacent et des moyens de s'en'
préserver.
Avec l'ardent désir de diminuer le con-
tingent des vénériens, un ministre se per-
met de décider qu'une éducation spéciale
sera donnée à des jeunes gens, c'est l'occa-
sion pour la presse cléricale de défendre la
morale outragée 1 Les catholiques pudi-
bonds ont de terribles « sursauts » parce
qu'un médecin-major use de la méthode
préventive pour sauvegarder la santé des
hommes de son régiment.
C'est ici que l'on peut noter sur le vif la
tartuferie odieuse des réactionnaires incon-
solables de voir se transformer « la mo-
rale de l'armée ».
Autrefois, on ne procédait pas par des
conférances mais par la salle de police et la
consigne. Tout soldat contaminé était puni;
on guérissait par la répression aveugle et
brutale.
Des médecins Tant-Pis s'efforcent au-
jourd'hui, à la faveur d'un incident regret-
table,de créer un mouvement hostile à l'ar-
mée nouvelle. Ils n'y parviendront pas car
ils Ont contre eux la logique et même le
simple bon sens ; la République poursui-
vra son œuvre hautement philanthropique
en s'attachant à améliorer aussi bien la si-
tuation morale que la situation matérielle
de nos troupiers.
Il est.bon de retenir que ce sont les po-
liticiens qui s'adjugent le monopole du pa-
triotisme, que l'on voit, en toute occasion,
élever contre l'armée les criliques les plus
perfides ou les plus absurdes.
LE DISCOURS DU DOYEN
Au début de chaque année législative, les
Chambres doivent subir les remontrances
de deux vieux messieurs auxquels Je règle-
ment donne annuellement la parole.
L'âge ne confère pas toujours la sagesse
et nous le voyons trop bien en lisant les
harangues des doyens. M. Loui-s Passy, qui
depuis une quarantaine d'années est réélu
par le même coin réactionnaire de l'Eure,
n'a pas ménagé hier ses critiques à la ma-
jorité républicaine. Ce vénérable personna-
ge a cru devoir plaindre les contribuables ;
il entendait sans doute adresser ainsi ses
condoléances à tous les riches bourgeois
qui vont enfin être appelés à payer, pro-
portionnellement à leurs ressources, Jeur
part des charges budgétaires.
Il est impossible de s'arrêter aux rengai-
nes réactionnaires dont le discours de M.
Passy est plein, mais il est bon de noter
son sentiment sur la réforme électorale.
Le pessimisme 'lamentable du doyen cède
devant l'espoir que fait naître en lui la ré-
forme électorale selon M. Benoist. Ce vieux
politicien est apeuré devant les progrès so-
ciaux, indigné devant la justice fiscale,
mais il appelle de tous ses vœux cette re-
présentation proportionnelle dans laquelle
il voit une protestation « contre les procé-
dés de séduction et d'intimidation inaccep-
tables dans un régime républicain u.
Ce qu'il faut remarquer, c'est que M.
Louis Pàssy, à qui les électeurs des Ande-
lys ont été fidèles tant d'années ne lâche
pas avec ingratitude le scrutin d'arrondisse-
ment, il en reconnaît l'excellence avec
quelques réserves, mais toutefois, en rai-
son de l'intérêt de son parti, il n'hésite pas
à se rallier à la R. P.
Cette attitude de M. Louis Passy est ca-
ractéristique : elle montre que certains réac-
tionnaires pourraient encore bénéficier lar-
gement du scrutin de bourg pourri, elle
prouve aussi que tout compte fait, l'oppo-
sition cléricale a pourtant beaucoup plue à
gagner à la proportionnelle qu'au maintien
du slakt quo.
Du scrutin de liste, il n'est pas question,
dans les appréciations du doyen de la Cham-
bre, car on sait trop bien dans les comités
de droite à quelles défaites terribles il ne
manquerait pas de conduire la réaction.
En faut-il plus -pour nous confirmer que
notre tactique est la bonne ? Luttons donc,
pour substituer au système arrondissemen-
tier, ceiui du scrutin de liste, selon la vieil-
le et bonne doctrine républicaine.
COURS D'ASSISES
Nos lecteurs s'en souviennent : une conv
mission extraparlementaire avait été insti
tuée, récemment, pour reviser notre code
de' procédure devant les cours d'assises.
Les commissions extraparlementaires
n'ont pas très bonne réputation, en ce sens
qu'on n'entend pas toujours parler de leurs
travaux ou qu'on néglige de les utiliser.
Mais celle dont nous parlons fait exception
à la règle.
Les détails, on les trouvera d'autre part.
Constatons seulement, à cette place, que.
l'exposé du sujet de l'accusation sera fait
par le procureur général — l'acte d'accusa-
tion disparaissant de la procédure ; que
l'interrogatoire du président est supprimé ;
que des garanties nouvelles sont accordées
tant à la partie civile qu'a l'accusé ; que
la libre contradiction entre témoins est as-
surée et qu'enfin des mesures seront mi-
ses pour que tout témoin utile puisse être
désormais cité.
Le point capital, c'est, assurément la
suppression de l'interrogatoire du prési-
dent. Elle était réclamée depuis longtemps.
La vérité doit ressortir suffisamment, aux
yeux des jurés, des réponses faites à l'ac-
cusateur public et au défenseur. soit par
le prévenu, soit par les témoins entendus
et, si c'est nécessaire, confrontés. Le pré-
sident n'a qu'à présider, qu'à diriger les
dé-bats. Pourquoi donc, par sa façon d'in-
terroger, laisserait-il comprendre aux ju-
rés de quel sentiment personnel il est ani-
mé ? Ce n'est pas sa conviction qui importe.
C'est celle du jury. Et on ne saurait trop
prendre de précautions pour que celui-ci
ne subisse aucune pression.
Mais, puisque nous parlons du jury, c'est
le moment de rappeler qu'une autre ré-
forme s'impose : celle qui permettra aux
jurés de faire prévaloir leur sentiment en
ce qui touche l'application et les modalités
de la peine. Là aussi, une revision du code
est nécessaire. Nous l'attendons de la bon-
ne volonté réformatrice du gouvernement.
ECHOS
UNE PIÈCE RARE
Un Collectionnejur du Puy vient d'acqué-
rir un tiers de sol de Saint-Paulien, mon-
naie d'argent doré extrêmement rare et cu-
rieuse. Un seul exemplaire était connu jus-
qu'ici ; il figure au cabinet des médailles de
la Bibliothèque nationale sous le numéro
2119 et est reproduit dans là description gé-
nérale de A. de Belfort sous le numéro 4693.
vvw
LA DIMINUTION DE LA NATALITE
Ce n'est point seulement en France que
l'on constate une diminution de la natalité.
Ce phénomène se remarque dans tous les
pays d'Europe.
En Hollande, l'excédent des naissances
,sur les décès qui était en 1903 de 16 pour
1.000 n'est plus en 1908 que de 14,7 pour
1,000.
En Allemagne, il s'élève à 14 pour 1,000
en 1907, alors qu'en 1902 il était encore de
15,3 pour 1.000. ,.,
En Angleterre, en Belgique et en Suisse,
les statistiques accusent le même affaiblisse-
ment de la natalité.
LA JOURNÉE POLITIQUE
LA RENTREE DES CHAMBRES
A la Chambre. — M. Passy, président
d'âge. — L'élection du bureau. — Dis-
cours de M. Brisson. — L'ordre du
jour. — Au Sénat. - Important con-
seil des ministres. - La procédure
devant la cour d'assises. — La
défense de l'école laïque.
La Chambre a repris ses séances hier.
Et, à en juger par ses débuts, elle ne chô-
mera point durant la session ordinaire de
1910 que M. Passy, lequel a présidé comme
doyen d'âge à la constitution du bureau, a
déclarée ouverte en présence de deux cents
députés environ.
Conformément à la coutume, M. Passv
avait, aussitôt installé au fauteuil, pronon-
cé une allocution, peu sensationnelle, d'ail-
leurs, de ton modérément réactionnaire,
qu'avait accueillie l'indifférence polie des
auditeurs. L'orateur y condamnait sous le'
nom de socialisme d'Etat, le racliat de
l'Ouest, l'impôt sur le revenu, les retrai-
tes ouvrières et préconisait la mutualité,
base nécessaire, déclarait-il, de. toute bonne
politique soeiale.
On procédait ensuite 5 l'élection du bu-
reau.
Le bureau définitif
Aucun concurrent, n'était, on le sait,
opposé aux titulaires sortants. Aussi après
trois heures de scrutin, M. Passy procla-
mait-il les résultats suivants :
Sont élus :
Président :
M. Brisson, par 300 voix.
Vices-présidents : MM. Clémentel, 289
voix ; Etienne, 277 ; Berteaux, 2G7 ; Du-
bief, 254. -
Secrétaires : MM. Néron, Poulhan, Le-
'b~ucq, Beisaget, Victor Morel, René Bes-
boucq, Dalimier, Victor Fort
Questeurs : MM. Saumande, Pajot, Cha-
puis.
Une salve d'applaudissements avait ac-
cueilli la proclamation du nom des élus,
surtout celui de M. Brisson
Et on s'attendait à mr; suivant la tra-
dition, l'installation du bureau renvoyée à
la séance suivante, lorque M. Passy a invi-
té M. Brisson à prendre place au fauteuil.
M. Brisson déférait aussitôt à cette invi-
tation, reprenait possession du siège prési-
dentiel qu'il aura, sans interruption, occu-
pé durant toute la législature et pronon-
çait le discours suivant ;
Discours de M. Brisson
Messieurs et chers collègues,
Adressons d'abord nos remerciements à notre
cher et vénéré doyen et à nos jeunes sécrétai-
res provisoires. Nous combattons, !¡\t; Louis
Passy et moi, depuis quarante années. sous des
enseignes différentes sans doute, mais nous ai-
mons également, pour des raisons diverses, ce
régime de libre discussion que, de temps à
autre, l'on essaie de décrier, mois sous lequel
la France, après des secousses et des infortu-
nes. a su trouver un abri que des brouillons
ne lui feront pas abandonner. (Applaudissements.)
Un jour, après une séance orageuse et en un
temps où je n'étais pas président, je rencon-
trai dans notre salle des Pas-Perdus un étran-
ger de marque qui crut devoir me plaindre d'ap-
partenir à une assemblée aussi tumultueuse ; ie
le remerciai froidement de sa politesse, mais com-
me il ne se piquait pas de libéralisme, j'ajoutai ;
« Croyez bien que les régimes politiques où les
passions trouvent leur issue et éclatent même
trop bruyamment, sont moins dangereux pour
l'Etat que ceux où elles n'ont pas la parole et
ravinent silencieusement. » (Applaudissements.)
Ce n'est point, mes chers collègues, que j'aime
le bruit. Ce ne serait pas de mon âge ; je pré-
fère de beaucoup ces séances comme nous en
avons eu de si nombreuses et qui nous ont per-
mis de mener à fin des lois dilliciles, telles que
la réforme fiscale ou la revision du tarif des
douanes. Aucune Chambre avant celle-ci n'a au-
tant
tant multiplié les séances exceptionnelles et uti-
les ; aucune n'a donné plus de temps aux graves
problèmes qui ont sollicité notre effort. Nous
allons être obligés de les multiplier encore : le
budget, que. dans les années précédentes, nous
étions parvenus à voter au moment voulu, le
budget va nous prendre encore de longues heu-
res. Puissions-nous, pour les abréger, nous ins-
pirer tous de la règle mulla paucis, règle si bien
laite pour des orateurs français. Il le faudra, si
nous voulons aborder assez tôt pour les résou-
dre, pour en inscrire la solution dans des lois
définitives, des questions impérieuses comme celle
des retraites ouvrières et paysannes. (Applaudis-
sements.)
Permettez-moi, mes chers collègues. en termi-
nant cette allocution que je veux faire brève, de
vous adresser les remerciements du bureau et
particulièrement les miens pour l'honneur que
vous m'avez fait et la confiance que vous m'avez
témoignée en me maintenant à la présidence
durant les quatre années de cette législature J'en
suis touché plus que je ns puis dire et ne sau-
rais, après tant de marques de votre bienveil-
lance, exprimer suffisamment toute ma gratitude.
On applaudit sur tous les bancs des
gauches.
Cette installation hâtive de son bureau et
l'accueil qu'elle a fait au passage du dis-
cours présidentiel annonçant deux séances
quotidiennes durant cinq jours de la se-
maine, prouvent que la Chambre est réso-
lue tà ne pas perdre une minute de son
temps avant qu'expire son mandat.
Elle s'est pourtant accordé une matinée
de répit. Aujourd'hui mercredi on ne siége-
ra qu'une fois, à 2 heures de l'après-midi
pour la discussion du budget du travail ;
les séances du matin ne commenceront que
demain jeudi.
AU SÉNAT
M. Poriquet, doyen d'âge, a présidé hiei
la séance de rentrée du Sénat.
Le sénateur de l'Orne a 93 ans. Il ne peut
quitter un fauteuil roulant que deux gar-
çons hissent sur l'estrade présidentielle.
M. Poriquet annonce à ses collègues la
mort de M. Desmons, sénateur du Gard, et
prononce ensuite le discours d'ouverture
d'usage. Il fait l'historique du Palais du
Luxembourg.
Le Sénat fixe ensuite sa prochaine séan-
ce à jeudi, pour l'élection du bureau.
AU CONSEIL DES MINISTRES
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée sous la présidence de Mi
Falilières. Le général Brun et M. Millerand
encore absents de Paris, s'étaient fait ex
cuser.
La défense de l'école publique
Le conseil s'est entretenu des question
que soulève la rentrée du Parlement et par?
"-,
,
'? >
,':. '0
LE NUMERO
S
CENTIMES
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Victor FLACHON
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TRENTE-TROISIEME ANNEE. — NUMERO 1 1,953
JEUDI 13 JANVIER 1910
22 NIVÔSE. AN 118
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Les manuscrits non insérés, ne sont pas rendus
LE NUMERO
5
CENTIMES
DES PROJETS.
Le Conseil des ministres, dans sa réu-
nion d'hier, a été appelé à préciser le
sens des déclarations que le gouverne-
ment apportera à la tribune de la Cham-
bre en réponse aux interpellations qui
visent la défense de l'école laïque et qui
vont être discutées à propos du budget
de l'instruction publique auquel elles
ont été jointes.
Un note gouvernementale nous fait
connaître que le ministre de l'instruc-
tion publique compte soumettre à' la
Chambre plusieurs projets de lois. Deux
sont déjà connus et anciens : le premier
tend à assurer la fréquentation scolai-
re ; le second a pour but de soustraire
l'instituteur aux menaces d'interven-
tion des particulière en substituant à
sa responsabilité celle de l'Etat dans
les actions intentées par les parents.
Le premier de ces projets a paru in-
suffisant pour mettre ordre à la cam-
pagne organisée par les cléricaux con-
tre l'école. Le conseil des ministres a
décidé de le modifier de manière à at-
teindre et à réprimer les manœuvres
qui tendent à entraver le service de
l'enseignement par discours, menaces
ou autres moyens.
Il est certain que, sur ce point, notre
législation est complètement désarmée.
Et comment aurait-on pu prévoir qu'un
jour viendrait où des Français s'effor-
ceraient de rendre impossible l'ensei-
gnement public et de faire le vide dans
nos écoles ? Ce jour est venu. Une fu-
rieuse campagne a été entreprise, dont
les effets, pour n'être pas encore très
graves, sont pourtant assez importants
pour appeler une intervention énergique
du législateur.
Mais le gouvernement, préoccupé de
répondre à cette guerre insensée du
parti clérical, a prévu et préparé un
troisième projet, dans le but d'organi-
ser sur des bases plus sérieuses le con-
trôle de l'Etat sur les écoles privées.
Il réalise ainsi la menace qu'adres-
sait un jour le président du Conseil aux
adversaires de l'école laïque lorsqu'il
leur disait : « Nous pénétrerons dans
vos écoles ».
Les cléricaux, qui ont entrepris d'é-
plucher mot à mot les manuels d'ensei-
gnement qui se trouvent entre les mains
des instituteurs, mettent sous les yeux
des enfants qui. fréquentent les écoles
privées des livres bourrés de menson-
ges, forgés par les jésuites,empoisonnés
de la pensée cléricale. Quelques-uns de
ces manuels d'histoire frelatée ou de
morale hypocrite ont été ces derniers
temps divulgués. Le public a pu voir
de quel côté se trouvent la mauvaise foi
et la perfidie. Un projet de loi qui or-
ganisera le contrôle de l'Etat sur l'en-
seignement clérical sera donc bien ac-
cueilli.
Mais quand sera-t-il voté ? Quand
donc la Chambre discutera-t-elle les
projets préparés depuis deux ans et
ceux que le gouvernement annonce ?
C'est fort bien de dresser des plans de
défense. Il vaudrait mieux les mettre
à exécution.
La Chambre aura-t-elle, S la veille
des élections, l'énergie qu'il faut pour
cette bataille ? Nous en doutons.
INCIDENT PROLONGE
S'il faut en croire une information du
Temps, l'incident franco-turc, que tout au-
torisait à tenir pour définitivement réglé,
fait naître de nouvelles difficultés entre les
gouvernements de Paris et de Constantino-
ple. Les Turcs se montreraient, en effet,
plus décidés que jamais à faire valoir leurs
prétendus droits sur la Tripolitaine et la
Tunisie,et,ainsi qu'on le verra d'autre part,
la France serait, à juste titre, Résolue à ne
pas s'incliner devant de pareilles préten-
tions.
Le procédé consistant à venir revendi-
quer un pays après que nos troupes et nos
nationaux y ont établi l'ordre et y ont créé
la prospérité est vraiment trop commode.
Il est dans tous les cas, assez peu digne
d'hommes raisonnables. Les Jeunes-Turcs
qui, sans parler de la reconnaissance qu'ils
doivent à la Franoo, en raison des précieux
encouragements trouvés chez nous, ne sau-
raient impunément troubler la paix pour
une cause injuste. Ils ne peuvent dès lors,
s'entêter dans leurs revendications.
Quelles vaines satisfactions d'intérêt ou
même simplemenf cPamour-propre recher-
cheraient-ils donc dans une solution violen-
te de l'incident actuel ? Ils n'ignorent pas
que si nous n'avons rien à gagner dans une
expédition en Tripolitaine, eux-mêmes au-
raient beaucoup à y perdre. Dès lors, pour-
quoi s'abstenir alors qu'ils n'ont pas pour
eux le bon droit ?
C'est à cela que doivent réfléchir les Jeu-
nes-Turcs. Ils jouissent encore, en dépit des
quelques erreurs commises par eux, de la
sympathie des républicains. ils se trom-
peraient grandement s'ils croyaient pou-
voir compter sur ces sentiments de bien-
veillance, pour mépriser les droits de la
France.
Nous espérons bien, du reste, que le
gouvernement de Constantinople à l'instar
du gouvernement français, s'attachera à fa-
ciliter l'œuvre des diplomates chargés de
régler l'incident. Le principe d'une commis-
sion do délimitation de la frontière tuni-
sienne paraît admis. Il serait inadmissible
de vouloir bannir du nombre des commis-
saires les représentants de la France. Puis-
que c'est là Je point principal du différend
actuel ,il suffira que les Jeunes-Turcs ré-
fléchissent au bien-fondé de notre demande
pour que, nous n'en doutons pas, un accord
satisfaisant intervienne.
LA PETITE GUERRE
Titre de l'éditorial du Gaulois 1
Aux armes, les bourgeois 2
Et contre qui, donc ?
•*#
Un journal de sacristie se lamente, disant que
la séparation a eu pour conséquences dans les
a églises réformées », le schisme et le déficit.
Il devrait se réjouir, au contraire puisque ce
sont des réprouvés.
1
De L'Echo de Paris ;
« Croiriez-vous qu'un préfet a déposé une
plainte au parquet contre un fermier qui avait
'déchiré un livré- J » -
Nous le croyons si bien que, si le préfet n'a-
vait pas déposé une plainte, nous aurions de-
mandé son rappel à l'ordre, pour apprendre au
fermier çlérical à outrepasser son droit,
HEUREUX RESULTATS
Les Débats se lamentent sur les consé-
quences qu'entraîne la loi de séparation
pour les protestants. Los comptes des égli-
ses réformées se soldent par d'importants
déficits et les facultés voient le nombre des
élèves pasteurs diminuer de jour en jour.
Voilà des constatations qui ne sont pas
faites pour nous déplaire et qui prouvent
dans tous les cas que la foi des protestants
comme celle des catholiques s'accommode
niai des sacrifices pécuniaires. Quand l'Etat
no consent plus, à prélever sur les fonds
publics les ressources nécessaires à la vie
de paresse des ministres du culte, on ne
trouve guère d'amateurs pour ce genre de
profession. Mais que deviennent alors tou-
tes ces belles tirades sur l'irrésistible vo-
cation des élus de dieu ? Serait-ce donc
que les termes étaient impropres et que ce
qu'on appelle à l'église « le noble désir
de consacrer sa vie à la mission sacerdo-
tale » devait se traduire plus simplement
par la préoccupation d'émarger jusqu'à sa
mort au budget de la nation ?
C'est bien cela, en effet, ot au fur et
à mesure que les croyants disposés à payer
se feront plus rares, on verra disparaître la
race de ceux dont l'unique rôle social ré-
side dans le fait de percevoir l'argent des
naïfs. Or, l'Etat a heureusement cessé d'être
ce naïf, gaspillant au profit des comédiens
de cathédrales ou de temples, l'argent né-
cessaire à la réalisation des grandes réfor-
mes sociales. Les jérémiades des catholi-
ques et des protestants prouvent que le
nombre des citoyens raisonnables et clair-
voyants s'accroît tous les jours. L'exemple
donné par la nation aux individus est par
bonheur suivi. C'est le commencement de
la fin et si libres penseurs et républicaing
ne s'endorment pas, s'ils savent opposer
leur force et leur bon droit aux retours of-
fensifs de la religion, il n'est point illusot-
se d'espérer voir, dans un avenir pro-
chain, les temples et les églises aussi vi-
des de prêtres et de pasteurs que de fidèles,
—M
LA QUESTION DES EGLISES
Bien que les curés ne cessent de déclarer
que la République s'efforce de priver leurs
fidèles de .la liberté des cultes et par suite
de la liberté do conscience, ils ne parvien-
nent pas à empêcher ceux de leurs amis
que la passion n'a point aveuglés, de re-
connaître la vérité parmi tous les menson-
ges propagés par les feuilles de sacristie..
C'est ainsi que l'affaire de Grisy-Suines
a été infiniment moins affreuse que les
journaux cléricaux se sont plu à le conter.
De l'aveu même du curé, il n'y a eu au-
cun sacrilège, tous les ustensiles du culte
n'ont même pas été vendus comme ils au-
raient pu l'être ; c'est à cela que s'est bor-
né' le scandale.,
D'autre part, les gens d'Eglise sont obli-
gés de constater eux-mêmes que la loi leur
offre toute possibilité pour maintenir, s'ils
y tiennent, le culte dans leurs églises. A.
ce point de vue, le témoignage du Figaro
nous est précieux et c'est lui qui nous
apprend comment l'église de Saint-Ferdi-
nand des Ternes a pu être réparée, grâce
au concours des amateurs de cérémonies
religieuses.
Le journal réactionnaire qui n'est certes
pas suspect d'indulgence pour le nouveau ré-
gime des cultes, classe au nombre de trois,
selon la loi, les cas de désaffectation d'une
église : 1° Si elle a été détournée de sa
destination ; 2° Si le culte a cessé d'y être
célébré pendant 6 mois ; 3° Si elle menace
ruine et devient un danger public.
Hormis ces trois conditions, les catholi-
ques ont une sécurité complète ils peuvent
dès lors réparer les églises dont ils sont
bien décidés à user, avec la certitude abso-
lue., qu'elles ne pourront être arbitraire-
ment désaffectées. La mesure de libéralis-
me contenue dans la loi de séparation est
donc largement suffisante. Les calotins,
lorsqu'ils formulent des récriminations,
nous prouvent d'une façon parfaite que le
droit commun ne leur suffit pas, ils ré-
clament encore ce régime de privilège avec
lequel la République a si heureusement
rompu.
La situation est nette, si les fidèles veu-
lent conserver les églises, ils le peuvent ;
il leur appartient de les entretenir à leurs
frais. Si leur foi ne va pas jusqu'au sacri-
fice nécessaire pour réparer les sanctuaires,
la désaffectation s'impose ; il est bien évi-
dent que l'on ne peut contraindre la collec-
tivité des citoyens à contribuer à l'entre-
tien d'édifices qui ne peuvent intéresser que
les seuls cagots.
Que l'on no nous parle donc plus de la
tyrannie républicaine ; parmi les mécon-
tents nous ne voyons que des cléricaux qui
tiennent à être des victimes, ou qui veulent
aller au paradis sans bourse <îél«a?v{ ils ne
sauraient nous intéresser.
TRIBUNE LIBRE
Une emete
sur la R.P.en Suisse
La Presse Associée vient de se livrer,
en Suisse et en Belgique, dans ces deux
petits pays ou fonctionne depuis plu-
sieurs années déjà la représentation
proportionnelle, à une enquête des plus
utiles sur le fonctionnement de ce sys-
tème électoral.
Elle a eu l'obligeance de nous- com-
muniquer les résultats complets de cette
enquête qu'il nous paraît intéressant
d'analyser. Comme il fallait s'y atten-
dre, les réponses envoyées par les hom-
mes politiques, les publicistes, les pro-
fesseurs choisis au hasard parmi les
plus éminents de chaque parti, sont va-
riables et montrent combien la propor-
tionnelle est loin d'avoir séduit toiETtes
Suisses et tous les Belges, comme on
s'est plu longtemps à l'affirmer.
Nous trouvons en effet dans ces ré-
ponses toute la gamme des opinions
pouvant être professées sur la R. P.,
depuis le proportionnalisme enthousias-
te jusqu'à l'antiproportionnalisme pas-
sionné, en passant par l'indifférence et
le scepticisme. Il y a donc loin, de là, à
l'unité de vue favorable à la R. P..
qu'on ne craignait pas d'exploiter.
En réàlité, sur les quatorze réponses
reçues de Suisse, 7 sont plus ou moins
favorables à la R. P., 6 lui sont nette-
ment hostiles et la dernière est mitigée
et contient, après une adhésion théori-
que, de sérieuses réserves.
Encore faut-il noter que la plupart
des réponses favorables émanent de
Neufchâtel et concernent le système pra-
tiqué pour les élections communales de
ce canton et qui n'est en réalité qu'un
vote limité n'ayant qu'un rapport très
lointain avec la véritable représentation
proportionnelle.
Certaines appréciations des adversai-
res de la proportionnelle sont en tout
cas très précises et valent la peine;
d'être signalées. C'est ainsi que M.
F.-H. Mentha, professeur à la Faculté
de droit de Neufchâtel et président de
la Cour de cassation, « ne croit pas que
ce-soit un progrès de placer la source
du droit sous le patronage de l'arithmé-
tique ». La représentation proportion-
nelle « répugne profondément à sa con-
ception politique ».
Tout en faisant certaines réserves sur
les améliorations possibles à apporter
aux systèmes actuellement connus de
proportionnelle, M. Eugène Richard, qui
fut successivement professeur à la Fa-
culté de droit, conseiller municipal de
Genève, député au Grand Conseil, mem-
bre du gouvernement, président du Con-
seil d'Etat, conseiller national à l'As-
semblée fédérale, ne nous cache pas les
résultats pitoyables trop souvent don-
nés en Suisse par la R. P.
« Sa méthode arithmétique, dit-il, est
compliquée et la longueur des opéra-
tions de dépouillement provoque des
plaintes à chaque élection. Certains ef-
fets de la représentation proportionnelle
ont déçu ses partisans de la première
heure ; ainsi, l'émiettement des grands
partis, la formation de petits groupes
devenant les arbitres parlementaires.
La politique de principes a dû trop sou-
vent se prêter à des marchandages en-
tre fractions. »
M. Albert Gobât, membre du Conseil
Exécutif du canton de Berne, dont il
fut trois fois président, député au Con-
seil national, est encore plus précis :
« La représentation proportionnelle,
que je vois fonctionner depuis plusieurs
années, n'a pas rendu de service dans
les cantons où elle est introduite. Au
contraire, elle a provoqué des alliances
contre nature qui ont mis la majorité
en minorité. Les partis se sont émiet-
tés ; loin de les animer, elle les a ren-
dus indifférents. j)
Plus énergiques encore sont les criti-
ques formulées par M. Virgile Rossèl,
professeur de droit civil à l'Université
de Berne, député au Conseil national et
vice-président de ce Conseil, auteur de
remarquables ouvrages juridiques et lit-
téraires. Il nous montre qu'à Genève la
représentation proportionnelle « a dé-
terminé un fâcheux émiettement de la
volonté générale, tant et si bien qu'il
n'y a plus au Grand Conseil que des
majorités changeantes, de coalition ou
de hasard, et que toute politique active
et féconde semble désormais impossi-
ble ».
La R. P., ajoute-t-il, « consacre l'om-
nipotence des comités irresponsables ;
elle ne tient pas compte du fait que la
moitié peut-être du corps électoral en-
tend conserver son indépendance et ne
s'inféoder à aucun parti ? elle accuse
les divergences et les antagonismes po-
litiques ; elle divise les citoyens en une
multitude de petites fractions impuis-
santes et, comme en Belgique, elle n'ex-
clut pas la perpétuation au pouvoir
d'un parti qui n'a pas la majorité dans
le pays. Après cela, si les intérêts par-
lent moins haut, ils ont plus d'influence
que les principes dans des questions de
cette nature : les minorités voient sur-
tout dans la R. P. un moyen d'affaiblir
la majorité en la désagrégeant, et la
majorité en a peur, parce qu'elle n'a
point de goût pour le suicide. »
Comme conclusion à ces sévères ap-
préciations de personnalités Jugeant en
connaissance de cause les expériences
suisses de la R. P., je ne puis mieux
faire que de reproduire un passage
d'une lettre que m'écrivait dernière-
ment M. G. de Seigneux, ancien députê
au Grand Conseil de Genève, ancien
président de la Cour de cassation. qui
vient de publier un très remarquable
examen critique de la proportionnelle,
sur lequel je compte prochainement re-
venir. 1
« Si, me disait M. de Seigneux, ceux
qui n'en ont pas encore savouré les
joies se jettent à la tête de la propor-
tionnelle, d'autre part ceux qui ont eu
le bonheur de l'apprécier à sa fuste va-
leur, commencent à s'en dégoûter. C'est
un spectacle curieux et instructif à la
fois. i>
J.-L. BRETON,
Député.
Les Propos
du Lanternier
Devant la galerie parisienne, M. Paul
Bourget, royaliste, et M. Pataud, syndicalis-
te révolutionnaire, font assaut d'esprit.
Le premier a écrit une pièce — une mau-
vaise pièce, d'ailleurs, à mon sens ; — et
le second a cru se' reconnaître dans un des
personnages. Cela nous a valu la lettre sui-
vante, que le révolutionnaire a adressée au
réactionnaire:
Je m'autorise de ce que tous deux nous appar-
tenons à des groupements illustres, vous l'Aca-
démie française, moi le Syndicat des industries
électriques, pour vous demander un service.
On dit qu'un des personnages de votre Barri-
cade, Thubeul, vous a été inspiré par mon « émi-
nente personnalité ». Aussi, j'ai le très grand
désir de contempler mon sosie.
Malheureusement, si ma célébrité est équiva-
lente à la vôtre, il n'en est pas de même du con-
tenu de mon portemonnaie, et je suis un peu
gene pour me payer un-hauteur au vaudre ville.
j'ai donc pensé que gracieusement vous vou-
drez bien m'offrir ce siège, et en revanche, je
m'engage à vous réserver un bout de banc pour
la prochaine assemblée générale du syndicat des
électriciens.
M. Bourget, en réponse, a nié avoir voulu
viser M. Pataud à qui il a promis les de:ux
fauteuils demandés.
Et ceci me rappelle — par antiphrase, si
j'ose dire, — ce mot de Tristan Bernard a
un Parisien qui lui demandait un fauteuil
dans un théâtre où on jouait une de ses piè-
ces à succès relatif:
— Désolé! mon cher; mais en ce moment,
nous ne pouvons - donner que des rangs de
fauteuils.
Donc, M. Pataud aura ses deux places; et
M. Paul Bourget aura un strapontin à la
Bourse du travail. Le premier profitera de
l'occase; le second la laissera passer, et je
le regrette, car il pourrait ainsi se docu-
menter et refaire — en mieux — la Barri-
cade. Mais le plus clair de l'affaire, c'est
que, grâce à la publicité donnée à cet échan-
ge d'aménités d'allure aristocratique, M.
Pataud et M. Bourget auront conquis tous
deux un peu plus de célébrité.
Des électriciens, qui ignoraient l'auteur
de Cruelle énigme, sauront désormais qu'il
existe. Contrairement à ses habitudes, le se-
crétaire de leur syndicat les aura éclairés
sur ce point. Et d'autre part, mainte mar-
quise qui vit retirée dans son boudoir, loin
des huits du monde et ne lisant qu'à la
flamme des lustres de l'Académie, saura que
M. Pataud existe et que l'Immortalité comp-
te avec lui.
Ce sera tout profit pour les uns et les
autres. Reste le gros public, mais celui-là
se désintéresse de l'affaire, et il ne deman-
de ityi'à en rire, pourvu que M; Bourget ne
l'oblige pas à lire ses romans, qui sont obs-
curs, et que M. Pataud lui fasse grâce le
plus! possible de manifestations. qui te
le sont pas moins.
Reste moi: or, moi, je me frotte les mains,
car j'y ai gagné un sujet d'article.
LA RÉACTION CONTRE L'ARMÉE
Les commentaires dont la presse réac-
tionnaire a fait suivre l'assassinat d'une
rentière par deux soldats, ont dépassé bien
vite l'appréciation d'un fait criminel ; ce
que l'on met en cause aujourd'hui c'est la
conception actuelle d'une armée propre à
donner tout à la fois, des défenseurs et des
citoyens utiles à la patrie.
On a mis en cause les tempéram-ents ap-
portés à une discipline inhumaine, on a
surtout accusé, dans une rage de réaction,
les tentatives les plus heureuses pour amé-
liorer la situation morale du soldat.
Frappé par les statistiques des infirme-
ries régimentaires et des hôpitaux de l'ar-
mée, M. Chéron, lorsqu'il était sous-secré-
taire d'Etat de la guerre, a prescrit des
conférences de nature à informer le mili-
taire inexpérimenté des dangers de mala-
die qui le menacent et des moyens de s'en'
préserver.
Avec l'ardent désir de diminuer le con-
tingent des vénériens, un ministre se per-
met de décider qu'une éducation spéciale
sera donnée à des jeunes gens, c'est l'occa-
sion pour la presse cléricale de défendre la
morale outragée 1 Les catholiques pudi-
bonds ont de terribles « sursauts » parce
qu'un médecin-major use de la méthode
préventive pour sauvegarder la santé des
hommes de son régiment.
C'est ici que l'on peut noter sur le vif la
tartuferie odieuse des réactionnaires incon-
solables de voir se transformer « la mo-
rale de l'armée ».
Autrefois, on ne procédait pas par des
conférances mais par la salle de police et la
consigne. Tout soldat contaminé était puni;
on guérissait par la répression aveugle et
brutale.
Des médecins Tant-Pis s'efforcent au-
jourd'hui, à la faveur d'un incident regret-
table,de créer un mouvement hostile à l'ar-
mée nouvelle. Ils n'y parviendront pas car
ils Ont contre eux la logique et même le
simple bon sens ; la République poursui-
vra son œuvre hautement philanthropique
en s'attachant à améliorer aussi bien la si-
tuation morale que la situation matérielle
de nos troupiers.
Il est.bon de retenir que ce sont les po-
liticiens qui s'adjugent le monopole du pa-
triotisme, que l'on voit, en toute occasion,
élever contre l'armée les criliques les plus
perfides ou les plus absurdes.
LE DISCOURS DU DOYEN
Au début de chaque année législative, les
Chambres doivent subir les remontrances
de deux vieux messieurs auxquels Je règle-
ment donne annuellement la parole.
L'âge ne confère pas toujours la sagesse
et nous le voyons trop bien en lisant les
harangues des doyens. M. Loui-s Passy, qui
depuis une quarantaine d'années est réélu
par le même coin réactionnaire de l'Eure,
n'a pas ménagé hier ses critiques à la ma-
jorité républicaine. Ce vénérable personna-
ge a cru devoir plaindre les contribuables ;
il entendait sans doute adresser ainsi ses
condoléances à tous les riches bourgeois
qui vont enfin être appelés à payer, pro-
portionnellement à leurs ressources, Jeur
part des charges budgétaires.
Il est impossible de s'arrêter aux rengai-
nes réactionnaires dont le discours de M.
Passy est plein, mais il est bon de noter
son sentiment sur la réforme électorale.
Le pessimisme 'lamentable du doyen cède
devant l'espoir que fait naître en lui la ré-
forme électorale selon M. Benoist. Ce vieux
politicien est apeuré devant les progrès so-
ciaux, indigné devant la justice fiscale,
mais il appelle de tous ses vœux cette re-
présentation proportionnelle dans laquelle
il voit une protestation « contre les procé-
dés de séduction et d'intimidation inaccep-
tables dans un régime républicain u.
Ce qu'il faut remarquer, c'est que M.
Louis Pàssy, à qui les électeurs des Ande-
lys ont été fidèles tant d'années ne lâche
pas avec ingratitude le scrutin d'arrondisse-
ment, il en reconnaît l'excellence avec
quelques réserves, mais toutefois, en rai-
son de l'intérêt de son parti, il n'hésite pas
à se rallier à la R. P.
Cette attitude de M. Louis Passy est ca-
ractéristique : elle montre que certains réac-
tionnaires pourraient encore bénéficier lar-
gement du scrutin de bourg pourri, elle
prouve aussi que tout compte fait, l'oppo-
sition cléricale a pourtant beaucoup plue à
gagner à la proportionnelle qu'au maintien
du slakt quo.
Du scrutin de liste, il n'est pas question,
dans les appréciations du doyen de la Cham-
bre, car on sait trop bien dans les comités
de droite à quelles défaites terribles il ne
manquerait pas de conduire la réaction.
En faut-il plus -pour nous confirmer que
notre tactique est la bonne ? Luttons donc,
pour substituer au système arrondissemen-
tier, ceiui du scrutin de liste, selon la vieil-
le et bonne doctrine républicaine.
COURS D'ASSISES
Nos lecteurs s'en souviennent : une conv
mission extraparlementaire avait été insti
tuée, récemment, pour reviser notre code
de' procédure devant les cours d'assises.
Les commissions extraparlementaires
n'ont pas très bonne réputation, en ce sens
qu'on n'entend pas toujours parler de leurs
travaux ou qu'on néglige de les utiliser.
Mais celle dont nous parlons fait exception
à la règle.
Les détails, on les trouvera d'autre part.
Constatons seulement, à cette place, que.
l'exposé du sujet de l'accusation sera fait
par le procureur général — l'acte d'accusa-
tion disparaissant de la procédure ; que
l'interrogatoire du président est supprimé ;
que des garanties nouvelles sont accordées
tant à la partie civile qu'a l'accusé ; que
la libre contradiction entre témoins est as-
surée et qu'enfin des mesures seront mi-
ses pour que tout témoin utile puisse être
désormais cité.
Le point capital, c'est, assurément la
suppression de l'interrogatoire du prési-
dent. Elle était réclamée depuis longtemps.
La vérité doit ressortir suffisamment, aux
yeux des jurés, des réponses faites à l'ac-
cusateur public et au défenseur. soit par
le prévenu, soit par les témoins entendus
et, si c'est nécessaire, confrontés. Le pré-
sident n'a qu'à présider, qu'à diriger les
dé-bats. Pourquoi donc, par sa façon d'in-
terroger, laisserait-il comprendre aux ju-
rés de quel sentiment personnel il est ani-
mé ? Ce n'est pas sa conviction qui importe.
C'est celle du jury. Et on ne saurait trop
prendre de précautions pour que celui-ci
ne subisse aucune pression.
Mais, puisque nous parlons du jury, c'est
le moment de rappeler qu'une autre ré-
forme s'impose : celle qui permettra aux
jurés de faire prévaloir leur sentiment en
ce qui touche l'application et les modalités
de la peine. Là aussi, une revision du code
est nécessaire. Nous l'attendons de la bon-
ne volonté réformatrice du gouvernement.
ECHOS
UNE PIÈCE RARE
Un Collectionnejur du Puy vient d'acqué-
rir un tiers de sol de Saint-Paulien, mon-
naie d'argent doré extrêmement rare et cu-
rieuse. Un seul exemplaire était connu jus-
qu'ici ; il figure au cabinet des médailles de
la Bibliothèque nationale sous le numéro
2119 et est reproduit dans là description gé-
nérale de A. de Belfort sous le numéro 4693.
vvw
LA DIMINUTION DE LA NATALITE
Ce n'est point seulement en France que
l'on constate une diminution de la natalité.
Ce phénomène se remarque dans tous les
pays d'Europe.
En Hollande, l'excédent des naissances
,sur les décès qui était en 1903 de 16 pour
1.000 n'est plus en 1908 que de 14,7 pour
1,000.
En Allemagne, il s'élève à 14 pour 1,000
en 1907, alors qu'en 1902 il était encore de
15,3 pour 1.000. ,.,
En Angleterre, en Belgique et en Suisse,
les statistiques accusent le même affaiblisse-
ment de la natalité.
LA JOURNÉE POLITIQUE
LA RENTREE DES CHAMBRES
A la Chambre. — M. Passy, président
d'âge. — L'élection du bureau. — Dis-
cours de M. Brisson. — L'ordre du
jour. — Au Sénat. - Important con-
seil des ministres. - La procédure
devant la cour d'assises. — La
défense de l'école laïque.
La Chambre a repris ses séances hier.
Et, à en juger par ses débuts, elle ne chô-
mera point durant la session ordinaire de
1910 que M. Passy, lequel a présidé comme
doyen d'âge à la constitution du bureau, a
déclarée ouverte en présence de deux cents
députés environ.
Conformément à la coutume, M. Passv
avait, aussitôt installé au fauteuil, pronon-
cé une allocution, peu sensationnelle, d'ail-
leurs, de ton modérément réactionnaire,
qu'avait accueillie l'indifférence polie des
auditeurs. L'orateur y condamnait sous le'
nom de socialisme d'Etat, le racliat de
l'Ouest, l'impôt sur le revenu, les retrai-
tes ouvrières et préconisait la mutualité,
base nécessaire, déclarait-il, de. toute bonne
politique soeiale.
On procédait ensuite 5 l'élection du bu-
reau.
Le bureau définitif
Aucun concurrent, n'était, on le sait,
opposé aux titulaires sortants. Aussi après
trois heures de scrutin, M. Passy procla-
mait-il les résultats suivants :
Sont élus :
Président :
M. Brisson, par 300 voix.
Vices-présidents : MM. Clémentel, 289
voix ; Etienne, 277 ; Berteaux, 2G7 ; Du-
bief, 254. -
Secrétaires : MM. Néron, Poulhan, Le-
'b~ucq, Beisaget, Victor Morel, René Bes-
boucq, Dalimier, Victor Fort
Questeurs : MM. Saumande, Pajot, Cha-
puis.
Une salve d'applaudissements avait ac-
cueilli la proclamation du nom des élus,
surtout celui de M. Brisson
Et on s'attendait à mr; suivant la tra-
dition, l'installation du bureau renvoyée à
la séance suivante, lorque M. Passy a invi-
té M. Brisson à prendre place au fauteuil.
M. Brisson déférait aussitôt à cette invi-
tation, reprenait possession du siège prési-
dentiel qu'il aura, sans interruption, occu-
pé durant toute la législature et pronon-
çait le discours suivant ;
Discours de M. Brisson
Messieurs et chers collègues,
Adressons d'abord nos remerciements à notre
cher et vénéré doyen et à nos jeunes sécrétai-
res provisoires. Nous combattons, !¡\t; Louis
Passy et moi, depuis quarante années. sous des
enseignes différentes sans doute, mais nous ai-
mons également, pour des raisons diverses, ce
régime de libre discussion que, de temps à
autre, l'on essaie de décrier, mois sous lequel
la France, après des secousses et des infortu-
nes. a su trouver un abri que des brouillons
ne lui feront pas abandonner. (Applaudissements.)
Un jour, après une séance orageuse et en un
temps où je n'étais pas président, je rencon-
trai dans notre salle des Pas-Perdus un étran-
ger de marque qui crut devoir me plaindre d'ap-
partenir à une assemblée aussi tumultueuse ; ie
le remerciai froidement de sa politesse, mais com-
me il ne se piquait pas de libéralisme, j'ajoutai ;
« Croyez bien que les régimes politiques où les
passions trouvent leur issue et éclatent même
trop bruyamment, sont moins dangereux pour
l'Etat que ceux où elles n'ont pas la parole et
ravinent silencieusement. » (Applaudissements.)
Ce n'est point, mes chers collègues, que j'aime
le bruit. Ce ne serait pas de mon âge ; je pré-
fère de beaucoup ces séances comme nous en
avons eu de si nombreuses et qui nous ont per-
mis de mener à fin des lois dilliciles, telles que
la réforme fiscale ou la revision du tarif des
douanes. Aucune Chambre avant celle-ci n'a au-
tant
tant multiplié les séances exceptionnelles et uti-
les ; aucune n'a donné plus de temps aux graves
problèmes qui ont sollicité notre effort. Nous
allons être obligés de les multiplier encore : le
budget, que. dans les années précédentes, nous
étions parvenus à voter au moment voulu, le
budget va nous prendre encore de longues heu-
res. Puissions-nous, pour les abréger, nous ins-
pirer tous de la règle mulla paucis, règle si bien
laite pour des orateurs français. Il le faudra, si
nous voulons aborder assez tôt pour les résou-
dre, pour en inscrire la solution dans des lois
définitives, des questions impérieuses comme celle
des retraites ouvrières et paysannes. (Applaudis-
sements.)
Permettez-moi, mes chers collègues. en termi-
nant cette allocution que je veux faire brève, de
vous adresser les remerciements du bureau et
particulièrement les miens pour l'honneur que
vous m'avez fait et la confiance que vous m'avez
témoignée en me maintenant à la présidence
durant les quatre années de cette législature J'en
suis touché plus que je ns puis dire et ne sau-
rais, après tant de marques de votre bienveil-
lance, exprimer suffisamment toute ma gratitude.
On applaudit sur tous les bancs des
gauches.
Cette installation hâtive de son bureau et
l'accueil qu'elle a fait au passage du dis-
cours présidentiel annonçant deux séances
quotidiennes durant cinq jours de la se-
maine, prouvent que la Chambre est réso-
lue tà ne pas perdre une minute de son
temps avant qu'expire son mandat.
Elle s'est pourtant accordé une matinée
de répit. Aujourd'hui mercredi on ne siége-
ra qu'une fois, à 2 heures de l'après-midi
pour la discussion du budget du travail ;
les séances du matin ne commenceront que
demain jeudi.
AU SÉNAT
M. Poriquet, doyen d'âge, a présidé hiei
la séance de rentrée du Sénat.
Le sénateur de l'Orne a 93 ans. Il ne peut
quitter un fauteuil roulant que deux gar-
çons hissent sur l'estrade présidentielle.
M. Poriquet annonce à ses collègues la
mort de M. Desmons, sénateur du Gard, et
prononce ensuite le discours d'ouverture
d'usage. Il fait l'historique du Palais du
Luxembourg.
Le Sénat fixe ensuite sa prochaine séan-
ce à jeudi, pour l'élection du bureau.
AU CONSEIL DES MINISTRES
Le conseil des ministres s'est réuni hier
matin à l'Elysée sous la présidence de Mi
Falilières. Le général Brun et M. Millerand
encore absents de Paris, s'étaient fait ex
cuser.
La défense de l'école publique
Le conseil s'est entretenu des question
que soulève la rentrée du Parlement et par?
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