Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1922-06-22
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328051026
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 juin 1922 22 juin 1922
Description : 1922/06/22 (N16397,A46). 1922/06/22 (N16397,A46).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
Le Numéro: 10 cm-
ABONKBUEKTS lan 6 m. S m.
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France et Colon. 28 111 14 » 7 50
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aux Sureaux du Jouirai
PS ru EANTERNE g DOIT ETRE VENDUE DIX CENTIMES S PARIS ET EN PROVINCE
La îjfiiif *6FH0
■
1 46* ANNEE - N* 16.397
JEUDI
22
JUIN 1922
Directeur-Rédacteur en chef :
FELIX HAUTFORT
Les manuscrits non insérât
ne sont pas rendus
- y
Mots d'écrit
Il est à la portée de tous les hommes
de lettres ou prétendus tels de se moquer
des pêcheurs à la ligne. Les dessina-
teurs qui croient amuser les acheteurs
de journaux leur montrent de braves
gens assis sur les berges d'une rivière
et entre-croisant leurs lignes, cependant
que leurs épouses et leurs filles sortent
d'un panier bouteilles et victuailles. Il
est acquis également, que le pêcheur ex-
trait des fleuves, rivières et ruisseaux
des boîtes de sardines, des vieilles go-
dasses et des chats crevés, le sujet est
traité facilement; il est classique'.
Il est idiot. La pêche à la ligne est un
sport beaucoup plus intelligent que le
tir aux pigeons ou la boxe! Tout le mon-
de peut tirer les pigeons ou placer un
coup de poing; seule, une élite prend
du poisson à la ligne.
Je voudrais bien voir au bord d'une
rivière, une gaule à la main, tous ces
malins qui, cette semaine, ont blagué
les pêcheurs en des papiers très spiri-
tuels. Ils se rendraient compte de la dif-
ficulté de cet exercice. A côté d'eux, des
êtres de condition moyenne, appartenant
aux classes moyennes de M. Colrat, ra-
viront à l'onde douce le secret de ses ha-
bitants. Et mon dessinateur, mon hom-
me de lettres écarquillera ses yeux pour
comprendre. Voilà. C'est qu'il faut être
très intelligent pour connaître les
mœurs du poisson; il faut aussi de la
patience, de la suite dans les idées, l'ha-
bitude du. syllogisme, et, généralement,
la faculté de raisonnement/Tranchons le
Vlot: il faut avoir du génie.
-" **
Je m'explique. Bien sûr que je ne veux
pas comparer un gauleur de la Marne à
M. Bartholomé qui a mis au monde la
bonne femme en marbre des Tuileries.
Il y a génie et génie. Je pense là un gé-
néral comme César et à un homme d'E-
tat comme Briand quand j'écris le mot:
« génie » et que je l'offre aux maîtres-
pêcheurs à la ligne.
Pour capter la confiance des poissons,
SI convient de les bercer d'illusions, de
leur préparer de savoureuses amorces,
de flatter leur goût, et leurs manies.
« On prend plus de mouches avec du su-
cre qu'avec du vinaigre, dit la Sagesse
des Nations. Appliquez ce précepte aux
hommes, vous constaterez qu'il est la vé-
rité. Ainsi, poissons, mouches et hom-
jnes sont attirés de la même manière.
Et, le point est de les rassembler au
-bon moment, de ne pas laisser .fuir l'oc-
casion; il est indispensable surtout d'exa-
miner la direction du vent et la posi-
tion du soleil. César avait coutume de
disposer son armée de manière à lui
donner l'avantage sur l'adversaire qui
avait le soleil dans les yeux et du vent
plein la figure. Un homme d'Etat pro-
fite de son soleil levant pour constituer
sa cour. Le pêcheur sait que la bise du
Nord est défavorable à ses desseins et
attend le souffle du Sud qui passe dou-
cement dans les roseaux et les joncs.
-C'est la réhabilitation de la girouette.
⁂
Le poisson est conduit dans un en-
droit calme. Il faut le ferrer; il faut le
jeter sur le pré.
Est-ce qu'on apprend dans les ma-
nuels ou dans des conférences à tirer
une carpe du fond de ses domaines? Le
tour de main est un art, et pas une scien-
ce. ,Qu'est-ce que l'art, sinon du génie ;
et le génie n'est autre qu'une longue pa-
tience. Imprimer à la gaule un mouve-
ment doux et précis à la fois, sentir la
résistance de la carpe, ne pas « l'ame-
ner d'autorité », si elle est de taille res-
pectable, suivre, sans défaillance, ce pa-
radoxe qui est « la noyade du poisson
dans son élément », lui abandonner
pour ce cruel exercice un peu de fil, l'at-
tirer de nouveau vers la berge, la tirer
à fleur d'eau, provoquer ses baillements
bien connus, et, quand elle est à bout
de forces, lui faire prendre le coche
d'eau de l'épuisette pour son dernier
voyage, est-ce 'à la portée de tous? Un
ministre ou un interpellateur habile ne
pratique-t-il pas le même jeu? Ne pi-
jque-t-il pas par un argument d'acier
bien lyempé son adversaire, ne le pro-
ipiène-t-il pas à travers les rires et,les
applaudissements de l'assemblée, ne lui
rend-il pas du fil avec des compliments
et des espoirs de fuite pour le ramener
& la question, et, en fait de discours, ne
le soulève-t-il pas à bout de bras, si bien
que le malheureux semble pendu au
bord de la tribune, bouche bée, comme
une carpe exténuée.
Je suis persuadé qu'Aristide Briand
apprit beaucoup et même son métier,
au bord des rivières, il continue, du res-
fce. J'espère bien qu'il se fait la main à
Pacy-sur-Eure pour ferrer, à la première
occasion propice, quelques gros poissons
du Bloc National. Il eut tort de pêcher le
fretin, à la Chambre; il aurait dû préfé-
rer les brochets du B. N. qui nous onl
des allures de petit requin.
Je pourrais vous raconter encore quel-
ques histoires sur la pêche à la ligne,
mais il se fait tard. Ce sera pour une au-
tre fois. J'ai encore deux mots à dire
sur ce suj et à l'ami Chéron.
Georges PONSOT.
: — ,
La diplomatie "personnelle"
Nous n'attendions pas du voyage de M.
Poincaré la solution de tous les problèmes sur
lesquels la France et l'Angleterre sont en
desaccord, mais nous comptions bien qu'en
dépit de certaines informations, le président
du Conseil français et le Premier anglais fi-
niraient par se rencontrer.
La conversation a eu lieu, elle a été cor-
diale et fructueuse, si nous en croyons la
presse anglaise. Ainsi donc, une fois de plus,
le contact des deux chefs de gouvernement
n'aura pas été sans quelques avantages.
Nous nous souvenons pourtant d'avoir en-
tendu M. Poincaré critiquer, avec des argu-
ments fort sérieux, la diplomatie des collo-
ques. Il semblait alors pencher vers la vieille
méthode qui consiste à procéder d'abord à
des sondages puis à envoyer notes sur notes,
enfin à conclure par un acte solennel.
Or, il arrive aujourd'hui que notre prési-
dent du Conseil n'est pas loin d'adopter le
système dont MM. Briand et Lloyd George s'é-
taient assez bien trouvés : l'explication sans
intermédiaire — autre qu'un interprète. (En-
core nous affirme-t-on que M. Poincaré, qu'au-
cun effort ne rebute, aurait appris l'anglais.)
Selon la formule traditionnelle, les deux
présidents ont « échangé des vues ». Ils se
sont Qccupés des réparations, de la Russie, de
Tanger, de l'Orient et même du pacte franco-
anglais dont le principe avait été admis par
M. Briand.
L'accord est loin d'être complet, mais il
n'y a plus de désaccord inquiétant, plus de
tension : la glace est fondue, la cordialité re-
naît. Ce n'est pas un résultat négligeable si
l'on fConsidère l'importance des litiges que la
France et l'Angleterre s'efforcent de régler.
Depuis quelques mois, on avait accepté une
formule dangereuse dans les milieux parlemen-
taires : «Coûte que coûte, disait-on, il faut
rester fidèle à nos alliances. »
C'était trop dire. Les ménages sont pitoya-
bles où les deux époux d'humeur incompati-
ble restent liés seulement par leur volonté
de l'être indissolublement et malgré tout.
Il est bon, il est désirable que l'Angleterre
et la France se sentent solidaires, non par une
détermination inflexible, mais par leurs inté-
rêts et leurs sympathies.
F. H.
———————————— > <
LA PAROLE DU POETE
D'ANNUNZIO DECLARE :
« Il faut libérer
les peuples démagogues »
Rome, 20 juin (D. N. C. P.). - Un de nos
confrères de Milan a pu interviewer, hier,
Gabriele d'Annunzio, qui lui a fait de cu-
rieuses déclarations.
« Dans la nuit du 4 novembre, a dit le
poète, j'ai jeté au feu toutes mes décorations
de combattant pour faire honneur au Soldat
Inconnu, je ne les porterai plus jamais. Ainsi
s'écroule pour moi une gloire qui me mettait
la corde au cou et la chaîne au pied. Je suis
un pauvre Italien et ne veut plus être qu'un
pauvre Italien. »
Commencée sur ce ton, la conversation se
poursuivit ainsi :
que je donnai mon offrande au Comité de se-
cours à la Russie. Or, le peuple -lisse a libé-
ré pour jamais le monde d'une illusion pué-
rile et d'un mythe stérile. Il est maintenant
démontré pour toujours, par la plus vaste et
la plus terrible expérience, qu'un gouverne-
ment sorti d'une dictature de classe est im-
puissant à créer des conditions de vie suppor-
tables pour une nation. J'ai pris contact avec
les bolchevistes, je n'ai jamais cessé de tirer
pour ma cause un avantage.des forces les
plus périlleuses. »
Gabriele d'Annunzio, suivant son idée, par-
la ensuite des mœurs politiques de l'Italie :
« La guerre une fois finie, dit-il, j'aurais
pu considérer ma tâche comme terminée et
retourner à la sérénité qui m'eût paru plus
précieuse après le sacrifice, mais il me sem-
bla que je devais défendre la victoire, et che-
miner encore avec ma petite compagnie ; je
n'ai pas voulu des honneurs au prix du re-
noncement à la lutte : la guerre m'a enseigné
l'humilité.
« J'ai voulu rentrer dans le silence, j'ai
voulu êtreeun chef aans troupes, .un maître
sans disciples. J'ai compris qu'il fallait re-
prendre cette plume qui avait écrit, dans la
nuit, un cri de libération pour une autre libé-
ration. L'homme vraiment libre est l'homme
complet ; il me plaît de proclamer cette vé-
rité à la jeunesse qui doit comprendre la né-
cessité d'une discipline dans laquelle se forme
L'homme libre et complet.
« Il faut libérer le peuple des démagogues,
til faut le libérer des fausses doctrines et des
mensonges par lesquels on l'abuse ; il faut
lui apprendre, à conquérir la, paix et la liber-
té, il faut en faire l'artisan do la puissance
,nationale par te même esprit qui fit autre-
fois son antique maîtrise. »
Ce programme du poète n'est que poésie,
(aussi bien se déelare-t-il encore le « serviteur
spirituel de la terre » ; c'est dans cette direc-
tive qu'il poursuit son œuvre littéraire en
travaillant à son nouveau lîfre « Le sermon
du jardin, ,. —
L. R.
LA LUNE DE MIEL TOUCHE A SA FIN
Mgr CERETTI fl RÉUSSI
à exaspérer l'épiscopat français
m I"I ■ I.U ■ ni—ni. —.I.I.II 11. MI «N i .I N IL i
L'Eglise de France se plaint de lui au papeo';;
et à M. Poincaré
—————————
Serait-il vrai que le torchon brûlât entre
Mgr Ceretti, nonce du pape, et l'épiscopat de
France ?
C'est du moins ce que nous affirme, dans le
dernier numéro du Progrès Civique, notre ami
François Albert, dont « l'écriture » est aussi
savoureusement chronique et incisive que son
information est généralement sûre, parce que
puisée aux sources les plus meilleures et aux
confidences les plus sérieuses.
L'histoire, racontée par le jeune sénateur,
qui est un maître journaliste, est des plus
curieuses et des plus amusantes. Car l'Eglise
de France, qui s'est tant réjouie de voir la
fille aînée reprendre — em tout bien tout hon-
neur — ses anciennes relations avec le pape,
serait en fin de compte la première victime
de ce « rahibochement » - soit dit sans irré-
vérence.
« L'épiscopat français, qui a toujours dans
les veines un petit reste de sang gallican, a dé-
cidé de boycotter le camarade d'outre-monts
qui se flatte non seulement de lui apportltr le
mot d'ordre romain, mais de jouer au super-
primat des Gaules : nos prélats ne veulent plus
avoir Mgr Ceretti sur le dos à tout propos. »
Ainsi s'exprime François Albert et voici les
raisons de « l'exaspération » provoquée parmi
nos évêques par le représentant du SaintoSiè-
ge à PaTis.
Mgr Ceretti, en mal d'avancement, et dési-
reux de succéder comme secrétaire d'Etat au
cardinal Gasparri que Pie XI doit liquider un
de ces jours, fait énormémemt de zèle. Il en
fait .même beaucoup trop. Il soigne sa popula-
rité auprès du Saint-Père sans se soucier de
savoir si ses actes ne sont pas susceptibles de
créer à nos monseigneurs quelques embarras
et même quelque mécontentement.
Il a commencé par des « mamours » aux
hommes (politiques de gauche (à M. Marraud
d'abord) et il leur offrit même un moment de
se rencantrer avec eux en un déjeuner amical
et périodique où le légat du pape comptait
bien arriver à s'accorder sur bien des ques-
tions avec les pires mécréants du radicalisme,
et même — ô idée vraiment infernale ! — avec
le général Gérard, franc-maçon notoire et
grand-maître du Temple de 'la rue Cadet.
Puis Mgr Ceretti prit l'habitude des tour-
nées dominicales où on le voyait, aux cérémo-
nies, encadré par les ministres, les parlemen-
taires ou des préfets, sourire aux représen-
tants du pouvoir, pallabrer, bénir les foules
aux lieu et place des prélats du cru, ou encore
donner l'absoute toujours en se substituant
aux autorités ecclésiastiques locales.
En un mot, M. tCeretti devint si encom-
brant. qu'on finit par le laisser comprendre
à cet Italien, qui doit posséder l'art des nuan-
ces. Aussi, tandis qu'en 1921, le délégué papal
se voyait eintouré, aux fêtée de Jeanne d'Arc
à Orléans, par 34 évêques ou archevêques fran-
çais, cette année, pour la môme occasion, deux
prélats seulement eurent ile courage de s'y
montrer aux côtés de Mgr Ceretti.
Cette grève, significative d'ailleurs, se serait
corsée d'un incident épistolaire assez vif au
cours duquel Mgr Marty aurait prié Mgr Ce-
retti de lui î.icher la paix dans son diocèse.
Même e"lle se serait aggravée d'une réclama-
tion collective par laquelle les archevêques
français priaient le pape de faire observer res-
pectueusement au nonce qu'ils ne sont point
les subordonnés de celui-ci. Puis, après avoir
protesté auprès du Saint-Père contre l'immix-
tion intempestive et indiscrète du monsignor
dans leurs affaires administratives, ils s'en
furent se plaindre. à M. Poincaré lui-même.
par le truchement du cardinal Dubois.
Mgr Ceretti n'en continuait pas moims ses
manigances et, plus spécialement, 'l'épiscopat
constatait, avec une ffureur mêlée d'un peu
d'effroi, que le nonce était du dernier bien
avec M. Marc Sangmier, l'ancien chef de ee
Sillon, qui a été condamné à Rome comme
une des pires erreurs et des plus indubitables
hérésies du temps présent.
Enfin l'attitude du nonce au récent congrès
des syndicats ouvriers catholiques mettait le
comble au ressentiment des évêques. N'avait-il
pas 'félicité de leur .politique les syndiqués, qui
avaient discuté la question des huit heures et
même celle du « front unique » ? Le jour où
les Soviets seront reconnus, ne pourra-t-on
point s'attendre à voir le nonce participer à
un congrès communiste et bénir, avec une onc-
tion toute génoise, l'œil de Moscou ?
M. Poincaré, sans doute, est ennuyé de ces
complications inattendues. Mais il aurait pro-
mis « de représenter 'à Mgr Ceretti que son
indiscrétion mettra sous peu l'Eglise de Fran-
ce en révolution et Hes républicains en fu-
reur ».
Naturellement, tous -les incidents dont nous
venons de parler auraient eu leur répercus-
sion à Rome, où M. Jonnart et le cardinal Gas-
.parri échangeraient des « notes aigre-douces »
et où « la lune de miel semblerait toucher à
sa fin ».
Telles sont les révélations qu'a faites Fran-
çois-Albert et qui ne lui ont pas encore valu,
que nous sachions, un démenti même partiel.
Il sera intéræsarnt de suivre 'le développement
du conflit qui met aux prises nos prélats et
Mgr Ceretti. Il est temps, décidément, qu'on
donne à celui-ci l'avancement qu'il souhaite.
Mais, nous y pensons : c'est peut-être pour
être sûr de l'obtenir plus vite que Mgr Ceretti
se rend de plus en plus impossible à Paris.
Louis LE PAGE.
PAULE JACQUES A RÉVÉLÉ SON SEClfET
Accusée par sa fille, Mme Bassarabo
EST CONDAMNÉE
à vingt ans de travaux forcés
I ■ J .PU ■ .1'
Et, souriante, elle remercie les jurés d'avoir acquitté son enfant !
- 1 ————————
Il faut rendre cette justice à Mme Bassa-
rabo qu'elle, du moins, aura joué son rôle
jusqu'au bout. Mais, sans doute, celui qu'el-
le avait imposé à sa fille était trop lourd
pour elle. Lo sacrifice que sa mère lui de-
mandait était au-dessus des forces de Paule
Jacques. La peur lui a donné la volonté de
se soustraire à l'étrange pouvoir de fasci-
nation qui arrêtait le secret sur ses lèvres.
Et Paule Jacques, enfin a parlé.
Est-ce bien un secret qu'elle a révélé ?
La jeune fille, à la vérité, n'a fait que ré-
péter les aveux qu'elle avait formulés au
début de l'instruction. Mais c'était assez
pour ruiner d'un seul coup le système de
défense imaginé par sa mère, et de la ma-
gnifique plaidoirie de M* de Moro-Giafferi
il ne restait rien.
Peut-on dire que cet aveu renouvelé à
l'heure suprême a eu une grande Influence
sur le verdict ? Paule Jacques, peut-être, y
a gagné son acquittement, mais il ne pa-
raît pas avoir beaucoup influé sur le sort
d'Héra Myrtel. En sorte que la jeune fille
n'aura pas à se reprocher d'avoir fait con-
damner sa mère.
Les aveux
M* Raymond Hubert, avocat de Paule
Jacques venait, en quelques mots, de plai-
der l'innocence de sa cliente, lorsque le
président adressa à la jeune fille la ques-
tion sacramentelle : « Accusée, avez-vous
quelque chose à ajouter pour votre dé-
fense ? )
Alors, Paule Jacques se lève, en proie à
une violente émotion, et prononce à travers
ses .sanglots :
« Je vous ai promis la vérité, je vais
vous la dire. A six heures du matin, j'ai été
réveillée par une détonation. J'ai appelé ;
on ne m'a pas répondu. Je suis allée à la
porte de la chambre de ma mère, qui était
fermée à clef. J'ai crié : « Maman, maman,
que se passe-t-il ? » J'ai entendu quelqu'un
qui se gargarisait dans la pièce à côté.
Puis m.a mère a ouvert la porte. J'ai regar.
dé alors dans la chambre, et sur le lit j'ai
vu, se reflétant dans la glace, le corps d'un
homme. J'ai crié à ma mère : « Qu'as-tu
fait ? * Elle m'a répondu: « Il voulait me
tuer. C'était lui ou moi. » Et elle a ajouté :
« Je ne veux pas de scandale dans la mai-
son. » Sur son ordre, je suis allée au gre-
nier chercher la malle. Après j'ai fait tout
c. qu'elle m'a dit. >
D'une voix de moins en moins distincte,
sous les regards de sa mère qui n'a cessé de
la suivre depuis le début de cette scène, la
jeune fille continue son récit. Elle avoue
avoir écrit le billet bleu attribué par sa
mère à Bassarabo. C'est elle aussi qui a si-
gné le pouvoir qui devait permettre à sa
mère de disposer des biens du ménage en
cas d'absence du mari. « Il n'y a pas d'au-
tre moyen, lui avait dit sa mère, de rentrer
en possession de l'argent qu'il t'a volé. »
Plus tard, à Saint-Lazare, tandis que
Paule Jacques, atteinte de la fièvre typhoï-
de, était en danger de mort, sa mère lui 1
avait dit : « Je te jure que je suis inno-
cente ! » Et c'est pourquoi, croyant à un
secret que sa mère lui avait caché, elle était
revenue sur ses aveux. « Mais ici, ajoute-
t-elle, en entendant ma mère me dire :
« Tais-toi ! > j'ai tout compris. »
Et, parvenue à l'extrême limite de son
effort, les traits bouleverses, le corps agité
d'un long tremblement, la malheureuse
fille se laisse aller sur son banc.
Aussitôt la mère se lève. Aucune colère,
aucune amertume contre sa fille qui, plus
sûrement que le réquisitoire de l'avocat gé-
néral, va la faire condamner. Un peu plus
pâle peut-être que de coutume, mais gardant
toujours son étrange sourire, elle annonce
qu'elle va parler à son tour et faire connaî-
tre le secret qu'elle seule possède, car sa
fille ne sait rien !
A l'annonce de cette révélation, l'auditoi-
re, sceptique, fait entendre quelques rica-
nements, assez déplacés, d'ailleurs. Cet au-
ditoire, depuis le commencement du pro-
cès, s'est beaucoup accru en quantité, si-
non en qualité, et on y remarque mainte-
nant quelques-unes de ces dames empana-
chées, si soigneusement exclues jusqu'ici.
Mais Héra. Myrtel ne se laisse pas démon-
ter.
Le dernier roman d'Héra Myrtel
Pour la dernière fois, peut-être, elle a
l'occasion de donner libre cours à son ima-
gination.
Alors, c'est un débordement, un flot de
paroles où il est question de Becker, de
Bassarabo, qu'elle appelle Ismaël, de la ga-
re du Nord, de Pillement et de M. Bonin.
En une inexprimable confusion, tous ces
personnages passent et repassent dans le
récit de.la romancière en délire.
C'est si extravagant qu'on se demande
s'il ne s'agit pas d'une nouvelle comédie, si
Héra Myrtel n'espère point se faire passer
pour folle ?
En vain, M* de Moro-Giafferri, sentant le
mauvais effet des élucubra.tions de sa clien-
te prétexte un léger malaise pour obtenir
une suspension d'audience.
Dès la reprise, Mme Bassarabo reprend
son discours interrompu. Elle soutient que
son mari n'est pas mort, qu'il est à New-
York. Un général américain le lui a écrit.
Puis, sans transition, elle entreprend un
plaidoyer en faveur de sa fille. Quant à
elle, ( vieille et flétrie s, comme l'a dit
l'avocat général, elle se livre aux jurés.
A-t-elle fini ? Pas encore. Après avoir
consulté une large feuille de papier où,
pour l'édification des jurés, elle a consigné
une centaine de cas d'erreurs judiciaires,
elle termine par cette protestation d'inno-
cence : « Ma fille a eu peur. On lui a fait
croire qu'on n'acquittait que les aveux.
Pour moi, je n'avouerai pas ce que je n'ai
pas fait. Chez nous, les croisés, on ne bais-
se pas la tête ! C'est par un appel au di-
vin que vous allez vous préparer à votre
verdict ; aucune providence n'est ici re-
présentée. Je regrette qu'il n'y ait pas de
jury féminin. Allez consulter le cœur de
vos mères ! S>
Enfin, elle s'arrêta, à bout de souffle, et
Me de Moro Giafferri put prendre la parole.
La situation pour lui n'était pas gaie. Les
aveux de la fille détruisait tout l'effet de sa
plaidoirie de la veille et les déclarations sau-
grenues de la mère n'arrangeaient point les
choses. On ne saurait trop admii^r avec quel
art l'éminent avocat sut se tirer de ce mau-
vais pas, et sa seconde plaidoirie improvisée
pourtant en des circonstances si dificiles pa-
rut à tous plus émouvante encore que la
première.
Mais que pouvait à cette heure toutes les
ressources de la plus belle éloquence?
L'opinion du jury était faite. La délibéra-
tion dura pourtant une heure, mais il est pro-
bable qu'elle porta surtout sur le dosage de
la peine.
LE VERDICT
A 4 heures les jurés revenaient avec
leur verdict. Sur les deux questions d'homi-
cide volontaire et de préméditation concer-
nant Mme Bassarabo, la réponse du jury était
affirmative. Elle était négative sur la ques-
tion de complicité visant Paule Jacques. La
mère pourtant obtenait les circonstances at-
ténuantes.
Ramenée dans le box des accusées pour
y entendre la lecture de l'arrêt d'acquitte-
ment, Paule Jacques se voyant seule joignit
les mains et pleura, en proie à une profon-
de détresse. Il fallut l'arricher de force à
ce banc qu'elle ne voulait plus quitter.
Quel contraste dans l'attitude de la mère.
Avec un visage extasié, comme si le verdict
qui la frappait eût comblé tous ses vœux,
elle sourit aux jurés et les remercia d'avoir
acquitté sa fille. Elle ajouta pourtant une
fois encore qu'elle était innocente, et la Cour
ayant enfin rendu l'arrêt qui la condamnait
à vingt années de travaux forcés, elle serra
la main de son défenseur et sortit en sou-
riant toujours.
*
**
Poursuivant jusqu'au bout l'accomplisse-
ment d'un devoir que sa cliente avait par
instant rendu si ingrat Me de Moro-Giafferri
a voulu faire signer au jury un recours en
grâce, mais cinq jurés seulement se sont
montrés favorables à une commutation de
peine en faveur d'Hera Myrtel.
—————————— ,. ca.- c'
LE RENFLOUEMENT DE LA B. 1. C.
Contre le projet Porte
MM. Parmentier et Thion de La Chaume
jouent leurs dernières cartes
La campagne hostile à la B.I.C. continue
plus âpre que jamais, au Palais, à la Chambre,
à la Bourse, il faut encore montrer ici le jeu
de certaines puissances de politique et de
finances. L'attitude, de M. Parmentier, inspec-
teur des finances et ancien collègue de M.
Thion de La Chaume, est celle du défi. Nous
empruntons ces lignes à notre confrère La Li-
berté :
CI Hier, un incident, qui dépasse véritable-
ment les bornes accoutumées des scandales
administratifs, s'est passé à la réunion de la
Commission interministérielle chargée d'étu-
dier le projet de renflouement de la Banque
Industrielle de Chine.
« Ce projet, on le sait, est l'œuvre de M.
Porte, président du Tribunal de commerce de
la Seine, et de M. Benoît, administrateur ju-
diciaire et commissaire au règlement transac-
tionnel : il prévoit la création d'une société
de gérance de la Banque, dont nous avons ex-
posé il y a quelques jours les modalités, et
pour laquelle le concours des plus grandes
banques françaises et d'ores et déjà acquis.
Le gouvernement chinois, souscripteur pour
un tiers du capital de la Banque, ainsi que la
très grande majorité des actionnaires et d-es
créanciers, se sont ralliés au projet. Il sem-
blait donc que son approbation par la Com-
mission interministérielle (3 délégués du Com-
merce, des Affaires étrangères et des Finan-
ces) était acquise, après les votes répétés du
Parlement et les engagements pris par le
gouvernement.
« Mais on avait compté sans M. Parmen-
tier, directeur du Mouvement des fonds au
ministère des Finances, qui, on s'en souvient,
s'est montré depuis le début l'adversaire achar-
né du renflouement de la Banque Industrielle
de Chine. D'aucuns prétendent que l'acharne-
ment de M. Parmentier a des causes toutes
personnelles ; pour notre part, nous n'en sau-
rions rien dire. Mais nous nous étonnons de
voir un fonctionnaire, représentant le ministre
des Finances, prendre une attitude si con-
traire aux opinions officielles de son chef et
apporter dans l'expression de ses sentiments
le manque de mesure dont il a donné hier le
spectacle.
« M. Parmentier demande à la Commission
de repousser le projet du Tribunal de com-
merce et des actionnaires et créanciers, afin
de lui substituer la création d'une banque
nouvelle. Ne voit-on pas là poindre le bout
de l'oreille sous la dépouille dont se vêt en
rugissant M. Parmentier ?
« Mais une objection ruine d'un mot cette
proposition saugrenue : le grand avantage que
présente, au point de vue national, le ren-
flouement de la Banque Industrielle de Chine,
c'est d'une part d'éviter que sa mise en faillite
ne ternisse le bon renom français en Extrême-
Orient, et c'est ensuite de sauver, en même
temps que la collaboration du gouvernement
chinois à une grande œuvre française, les con-
cessions de travaux obtenues par la Banque,
qui se chiffrent à près de deux milliards de
francs et constituent pour notre industrie une
richesse inappréciable. Si la Banque Indus-
trielle sombre définitivement, ces contrats de-
viennent caducs, et les clauses de la Confé-
rence de Washington en interdisent doréna-
vant le renouvellement.
« Mais qu'importe sans doute à M. Parmen-
tier la perte de deux milliards de travaux par
l'industrie française. Les usines françaises
peuvent chômer, les ouvriers français cher-
cher vainement du travail, pourvu que M. Par-
mentier ait satisfait ses rancunes et son
amour-propre.
« M. de Lasteyrie, s'il est sincère dans ses
déclarations relatives à la Banque Industrielle
de Chine — et rien ne nous permet d'en dou-
ter — ne se laissera pas ainsi désavouer par
son mandataire. Demain, la Commission in-
terministérielle se réunit à nouveau pour
prendre cette fois une décision définitive ;
nous jugerons la sincérité du ministre aux
instructions qu'il aura données à ses repré-
sentants. »
Notre confrère dit ce que nous n'avons
cessé de répéter depuis des mois. Mais il
n'est pires sourds que ceux qui ont de bonnes
raisons pour ne point entendre.
LIRE TOUS LES LUNDIS
Le Courrier des Loyers
et des
Habitations à bsn marché
LA CONFERENCE DE LA HAYE
En attendant les délégués
des Soviets
la Commission a constiné
son bureau
La Haye, 21 juin. — La Commission non
russe s'est réunie ce matin à 11 heures, au
Palais de la Paix. Elle a constitué son bureau
suivant les résolutions qui avaient été arrê-
tées au cours de conversations privées.
Composition de la Commission
Le président de la commission est M. Patyn
(Hollande) et le vice-président est M. Cattier
(Belgique).
La première sous-commission, qui a pour
objet de s'occuper des questions des dettes de
la Russie, a élu pour président M. Alphand
(France)
(La deuxième sous-commission, qui doit s'oc-
cuper des propriétés privées, a élu comme pré-
sident sir Philip Lloyd Greame (Angleterre).
La troisième sous-commission, des crédits,
s'est donnée comme président le baron Avez-
zani (Italie).
Les vice4présldents des sous-commissions
seront désignés dès demain au cours des réu-
nions durant lesquelles seront également arrê-
tées les méthodes de travail de ces différents
organismes désormais constitués et auxquels
'il ne reste qu'à étudier, et si possible à résou-
dre, les différents problèmes qui leur seront
soumis.
La commission non russe a également rati-
fié l'élection de M. Van Karnebeek, ministre
des affaires étrangères hollandais et président
de la conférence préliminaire, comme prési-
dent honoraire.
Les rapports avec les délégués russes
Afin d'éviter tout conflit ou tout sujet de
difficultés avec les Russes, la commission non
russe a donné mandat & M. Patyn, son pré-
sident, de prendre contact, lui seul, avec là
délégation soviétique. M. Patyn priera cette
dernière de constituer, de son côté, trois sous-
commissions, dont les présidents respectifs
entreront en rapport avec les présidents des
trois sous-commissions de la commission non
russe..
Les passeports ont été demandés
pour les délégués russes
La séance de la commission non russe tenuè
ce matin et au cours de laquelle ont été pri-
ses les décisions dont on vient de lire l'ex-
posé, a duré environ une heure. Le président
a tait connaître à la fin de cette séance qu'au-
cune nouvelle officielle n'était encore parve-
nue de Moscou. Il a cependant ajouté que des
passeports avaient été demandés par le gou-
vernement des Soviets pour les délégués rus-
ses suivants : ILitvin'tff, Rakowsky, Krassine
'Krestinsky et Sokolnikoff.
—————————— — (
EN HA U TE-SILESIE,
Uî) ordre secret allemand
recommande le sabotage
Kattowitz, 21 juin. — On a reçu ici des in-
formations tout là fait sûres qu'un ordre secret
a été donné aux fonctionnaires allemands de
multiplier autant que possible les difficultés
aux Polonais lors ide la transmission du pou-
voir entre leurs mains. Les employés alle-
mands qui doivent céder leur place aux Polo-
nais sont tenus à leur fournir de tels rensei-
gnements qui lçs induiraient en erreur et qut
créeraient de la sorte une confusion dans le
fonctionnement de la nouvelle administration.
La plupart des fonctionnaires allemands exé-
cutent fidèlement cet ordre secret qui émane,
dit-on, des autorisés allemandes le plus haut
placées.
mpEm~'AmM
en France
Débarqué hier à Marseille, il a été salué
psr M. Sarraut au nom du gouvernement
Marseille, 21 juin. — Le paquebot « POr-o
thos » portant l'empereur d'Annam, Khaii
Dinh est arrivé à l'entrée des ports de Mar-
seille à 13 h. 5e.
Le pavillon annamite Botte au mât d'artimon
A 14 h. 45, le « Porthos >, qui a arboré la
grand pavois, accoste au môle de La Pinède.
Dès que l'échelle de coupée est abaissée,
M. Albert Sarraut, ministre des Colonies,
suivi des personnages officiels, monte à bord
et gagne le grand salon du paquebot, où l'em-
pereur l'attend. Le souverain a revêtu le C06
tume d'apparat tout de soie brodée d'or. U a
la poitrine barrée du grand cordon jaune et
rouge du Dragon de l'Annam. Il porte la
coiffure nationale ornée de broderies d'or.
Une plaque d'or ornée de gros diamants res-
plendit sur sa poitrine. C'est l'insigne de la
majesté impériale.
Près de l'Empereur se tient son fils, le
prince Vinh Thuy, qui est âgé d'une dou-
zaine d'années, son neveu, le prince Vinh Ca.
tous deux richement vêtus de soie, et l'in-
terprète Thaï, chef du secrétariat général.
M. Pasquier, résident supérieur de France
en Annam, qui accompagne l'Empereur dans
son voyage, est également à son côté.
Premiers saluts
Souriant, le souverain s'avance vers M.
Sarraut, les mains tendues. Aux paroles de
bienvenue du ministre, il fait répondre très
aimablement par l'interprète et dit sa joie
de se trouver en France.
- Dans la suite du ministre, l'empereur aper-
çoit soudain l'ancien résident de France en
Annam, M. Charles. Il s'approche de lui et
lui donne'l'accolade.
Mais voici des mandarins revêtus de ri-
ches costumes, la poitrine surchargée de dé-
corations, un surtout de mousseline jeté par-
dessus leurs vêtements. Ils s'approchent, s'in-
clinent «profondément devant le souverain et
son file auxquels ile présentent leurs kom
mages.
Ce sont ensuite les présentations. A eh&
cune des personnalités présentes, l'empereui
souriant, fait dire une parole aimable.
Le supplice de l'interview
Avant que l'empereur, sa famille et sa
suite ne descendent à terre, le souverain
consent à s'entretenir un instant avec tes
journalistes présents. Il a notamment ex-
primé au représentant de 1' « Agence Havas >
sa grande joie d'être en France. Cette mani-
festation n'est pas causée par le seul plai-
sir de visiter notre pays; elle a. sa source
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1 46* ANNEE - N* 16.397
JEUDI
22
JUIN 1922
Directeur-Rédacteur en chef :
FELIX HAUTFORT
Les manuscrits non insérât
ne sont pas rendus
- y
Mots d'écrit
Il est à la portée de tous les hommes
de lettres ou prétendus tels de se moquer
des pêcheurs à la ligne. Les dessina-
teurs qui croient amuser les acheteurs
de journaux leur montrent de braves
gens assis sur les berges d'une rivière
et entre-croisant leurs lignes, cependant
que leurs épouses et leurs filles sortent
d'un panier bouteilles et victuailles. Il
est acquis également, que le pêcheur ex-
trait des fleuves, rivières et ruisseaux
des boîtes de sardines, des vieilles go-
dasses et des chats crevés, le sujet est
traité facilement; il est classique'.
Il est idiot. La pêche à la ligne est un
sport beaucoup plus intelligent que le
tir aux pigeons ou la boxe! Tout le mon-
de peut tirer les pigeons ou placer un
coup de poing; seule, une élite prend
du poisson à la ligne.
Je voudrais bien voir au bord d'une
rivière, une gaule à la main, tous ces
malins qui, cette semaine, ont blagué
les pêcheurs en des papiers très spiri-
tuels. Ils se rendraient compte de la dif-
ficulté de cet exercice. A côté d'eux, des
êtres de condition moyenne, appartenant
aux classes moyennes de M. Colrat, ra-
viront à l'onde douce le secret de ses ha-
bitants. Et mon dessinateur, mon hom-
me de lettres écarquillera ses yeux pour
comprendre. Voilà. C'est qu'il faut être
très intelligent pour connaître les
mœurs du poisson; il faut aussi de la
patience, de la suite dans les idées, l'ha-
bitude du. syllogisme, et, généralement,
la faculté de raisonnement/Tranchons le
Vlot: il faut avoir du génie.
-" **
Je m'explique. Bien sûr que je ne veux
pas comparer un gauleur de la Marne à
M. Bartholomé qui a mis au monde la
bonne femme en marbre des Tuileries.
Il y a génie et génie. Je pense là un gé-
néral comme César et à un homme d'E-
tat comme Briand quand j'écris le mot:
« génie » et que je l'offre aux maîtres-
pêcheurs à la ligne.
Pour capter la confiance des poissons,
SI convient de les bercer d'illusions, de
leur préparer de savoureuses amorces,
de flatter leur goût, et leurs manies.
« On prend plus de mouches avec du su-
cre qu'avec du vinaigre, dit la Sagesse
des Nations. Appliquez ce précepte aux
hommes, vous constaterez qu'il est la vé-
rité. Ainsi, poissons, mouches et hom-
jnes sont attirés de la même manière.
Et, le point est de les rassembler au
-bon moment, de ne pas laisser .fuir l'oc-
casion; il est indispensable surtout d'exa-
miner la direction du vent et la posi-
tion du soleil. César avait coutume de
disposer son armée de manière à lui
donner l'avantage sur l'adversaire qui
avait le soleil dans les yeux et du vent
plein la figure. Un homme d'Etat pro-
fite de son soleil levant pour constituer
sa cour. Le pêcheur sait que la bise du
Nord est défavorable à ses desseins et
attend le souffle du Sud qui passe dou-
cement dans les roseaux et les joncs.
-C'est la réhabilitation de la girouette.
⁂
Le poisson est conduit dans un en-
droit calme. Il faut le ferrer; il faut le
jeter sur le pré.
Est-ce qu'on apprend dans les ma-
nuels ou dans des conférences à tirer
une carpe du fond de ses domaines? Le
tour de main est un art, et pas une scien-
ce. ,Qu'est-ce que l'art, sinon du génie ;
et le génie n'est autre qu'une longue pa-
tience. Imprimer à la gaule un mouve-
ment doux et précis à la fois, sentir la
résistance de la carpe, ne pas « l'ame-
ner d'autorité », si elle est de taille res-
pectable, suivre, sans défaillance, ce pa-
radoxe qui est « la noyade du poisson
dans son élément », lui abandonner
pour ce cruel exercice un peu de fil, l'at-
tirer de nouveau vers la berge, la tirer
à fleur d'eau, provoquer ses baillements
bien connus, et, quand elle est à bout
de forces, lui faire prendre le coche
d'eau de l'épuisette pour son dernier
voyage, est-ce 'à la portée de tous? Un
ministre ou un interpellateur habile ne
pratique-t-il pas le même jeu? Ne pi-
jque-t-il pas par un argument d'acier
bien lyempé son adversaire, ne le pro-
ipiène-t-il pas à travers les rires et,les
applaudissements de l'assemblée, ne lui
rend-il pas du fil avec des compliments
et des espoirs de fuite pour le ramener
& la question, et, en fait de discours, ne
le soulève-t-il pas à bout de bras, si bien
que le malheureux semble pendu au
bord de la tribune, bouche bée, comme
une carpe exténuée.
Je suis persuadé qu'Aristide Briand
apprit beaucoup et même son métier,
au bord des rivières, il continue, du res-
fce. J'espère bien qu'il se fait la main à
Pacy-sur-Eure pour ferrer, à la première
occasion propice, quelques gros poissons
du Bloc National. Il eut tort de pêcher le
fretin, à la Chambre; il aurait dû préfé-
rer les brochets du B. N. qui nous onl
des allures de petit requin.
Je pourrais vous raconter encore quel-
ques histoires sur la pêche à la ligne,
mais il se fait tard. Ce sera pour une au-
tre fois. J'ai encore deux mots à dire
sur ce suj et à l'ami Chéron.
Georges PONSOT.
: — ,
La diplomatie "personnelle"
Nous n'attendions pas du voyage de M.
Poincaré la solution de tous les problèmes sur
lesquels la France et l'Angleterre sont en
desaccord, mais nous comptions bien qu'en
dépit de certaines informations, le président
du Conseil français et le Premier anglais fi-
niraient par se rencontrer.
La conversation a eu lieu, elle a été cor-
diale et fructueuse, si nous en croyons la
presse anglaise. Ainsi donc, une fois de plus,
le contact des deux chefs de gouvernement
n'aura pas été sans quelques avantages.
Nous nous souvenons pourtant d'avoir en-
tendu M. Poincaré critiquer, avec des argu-
ments fort sérieux, la diplomatie des collo-
ques. Il semblait alors pencher vers la vieille
méthode qui consiste à procéder d'abord à
des sondages puis à envoyer notes sur notes,
enfin à conclure par un acte solennel.
Or, il arrive aujourd'hui que notre prési-
dent du Conseil n'est pas loin d'adopter le
système dont MM. Briand et Lloyd George s'é-
taient assez bien trouvés : l'explication sans
intermédiaire — autre qu'un interprète. (En-
core nous affirme-t-on que M. Poincaré, qu'au-
cun effort ne rebute, aurait appris l'anglais.)
Selon la formule traditionnelle, les deux
présidents ont « échangé des vues ». Ils se
sont Qccupés des réparations, de la Russie, de
Tanger, de l'Orient et même du pacte franco-
anglais dont le principe avait été admis par
M. Briand.
L'accord est loin d'être complet, mais il
n'y a plus de désaccord inquiétant, plus de
tension : la glace est fondue, la cordialité re-
naît. Ce n'est pas un résultat négligeable si
l'on fConsidère l'importance des litiges que la
France et l'Angleterre s'efforcent de régler.
Depuis quelques mois, on avait accepté une
formule dangereuse dans les milieux parlemen-
taires : «Coûte que coûte, disait-on, il faut
rester fidèle à nos alliances. »
C'était trop dire. Les ménages sont pitoya-
bles où les deux époux d'humeur incompati-
ble restent liés seulement par leur volonté
de l'être indissolublement et malgré tout.
Il est bon, il est désirable que l'Angleterre
et la France se sentent solidaires, non par une
détermination inflexible, mais par leurs inté-
rêts et leurs sympathies.
F. H.
———————————— > <
LA PAROLE DU POETE
D'ANNUNZIO DECLARE :
« Il faut libérer
les peuples démagogues »
Rome, 20 juin (D. N. C. P.). - Un de nos
confrères de Milan a pu interviewer, hier,
Gabriele d'Annunzio, qui lui a fait de cu-
rieuses déclarations.
« Dans la nuit du 4 novembre, a dit le
poète, j'ai jeté au feu toutes mes décorations
de combattant pour faire honneur au Soldat
Inconnu, je ne les porterai plus jamais. Ainsi
s'écroule pour moi une gloire qui me mettait
la corde au cou et la chaîne au pied. Je suis
un pauvre Italien et ne veut plus être qu'un
pauvre Italien. »
Commencée sur ce ton, la conversation se
poursuivit ainsi :
cours à la Russie. Or, le peuple -lisse a libé-
ré pour jamais le monde d'une illusion pué-
rile et d'un mythe stérile. Il est maintenant
démontré pour toujours, par la plus vaste et
la plus terrible expérience, qu'un gouverne-
ment sorti d'une dictature de classe est im-
puissant à créer des conditions de vie suppor-
tables pour une nation. J'ai pris contact avec
les bolchevistes, je n'ai jamais cessé de tirer
pour ma cause un avantage.des forces les
plus périlleuses. »
Gabriele d'Annunzio, suivant son idée, par-
la ensuite des mœurs politiques de l'Italie :
« La guerre une fois finie, dit-il, j'aurais
pu considérer ma tâche comme terminée et
retourner à la sérénité qui m'eût paru plus
précieuse après le sacrifice, mais il me sem-
bla que je devais défendre la victoire, et che-
miner encore avec ma petite compagnie ; je
n'ai pas voulu des honneurs au prix du re-
noncement à la lutte : la guerre m'a enseigné
l'humilité.
« J'ai voulu rentrer dans le silence, j'ai
voulu êtreeun chef aans troupes, .un maître
sans disciples. J'ai compris qu'il fallait re-
prendre cette plume qui avait écrit, dans la
nuit, un cri de libération pour une autre libé-
ration. L'homme vraiment libre est l'homme
complet ; il me plaît de proclamer cette vé-
rité à la jeunesse qui doit comprendre la né-
cessité d'une discipline dans laquelle se forme
L'homme libre et complet.
« Il faut libérer le peuple des démagogues,
til faut le libérer des fausses doctrines et des
mensonges par lesquels on l'abuse ; il faut
lui apprendre, à conquérir la, paix et la liber-
té, il faut en faire l'artisan do la puissance
,nationale par te même esprit qui fit autre-
fois son antique maîtrise. »
Ce programme du poète n'est que poésie,
(aussi bien se déelare-t-il encore le « serviteur
spirituel de la terre » ; c'est dans cette direc-
tive qu'il poursuit son œuvre littéraire en
travaillant à son nouveau lîfre « Le sermon
du jardin, ,. —
L. R.
LA LUNE DE MIEL TOUCHE A SA FIN
Mgr CERETTI fl RÉUSSI
à exaspérer l'épiscopat français
m I"I ■ I.U ■ ni—ni. —.I.I.II 11. MI «N i .I N IL i
L'Eglise de France se plaint de lui au papeo';;
et à M. Poincaré
—————————
Serait-il vrai que le torchon brûlât entre
Mgr Ceretti, nonce du pape, et l'épiscopat de
France ?
C'est du moins ce que nous affirme, dans le
dernier numéro du Progrès Civique, notre ami
François Albert, dont « l'écriture » est aussi
savoureusement chronique et incisive que son
information est généralement sûre, parce que
puisée aux sources les plus meilleures et aux
confidences les plus sérieuses.
L'histoire, racontée par le jeune sénateur,
qui est un maître journaliste, est des plus
curieuses et des plus amusantes. Car l'Eglise
de France, qui s'est tant réjouie de voir la
fille aînée reprendre — em tout bien tout hon-
neur — ses anciennes relations avec le pape,
serait en fin de compte la première victime
de ce « rahibochement » - soit dit sans irré-
vérence.
« L'épiscopat français, qui a toujours dans
les veines un petit reste de sang gallican, a dé-
cidé de boycotter le camarade d'outre-monts
qui se flatte non seulement de lui apportltr le
mot d'ordre romain, mais de jouer au super-
primat des Gaules : nos prélats ne veulent plus
avoir Mgr Ceretti sur le dos à tout propos. »
Ainsi s'exprime François Albert et voici les
raisons de « l'exaspération » provoquée parmi
nos évêques par le représentant du SaintoSiè-
ge à PaTis.
Mgr Ceretti, en mal d'avancement, et dési-
reux de succéder comme secrétaire d'Etat au
cardinal Gasparri que Pie XI doit liquider un
de ces jours, fait énormémemt de zèle. Il en
fait .même beaucoup trop. Il soigne sa popula-
rité auprès du Saint-Père sans se soucier de
savoir si ses actes ne sont pas susceptibles de
créer à nos monseigneurs quelques embarras
et même quelque mécontentement.
Il a commencé par des « mamours » aux
hommes (politiques de gauche (à M. Marraud
d'abord) et il leur offrit même un moment de
se rencantrer avec eux en un déjeuner amical
et périodique où le légat du pape comptait
bien arriver à s'accorder sur bien des ques-
tions avec les pires mécréants du radicalisme,
et même — ô idée vraiment infernale ! — avec
le général Gérard, franc-maçon notoire et
grand-maître du Temple de 'la rue Cadet.
Puis Mgr Ceretti prit l'habitude des tour-
nées dominicales où on le voyait, aux cérémo-
nies, encadré par les ministres, les parlemen-
taires ou des préfets, sourire aux représen-
tants du pouvoir, pallabrer, bénir les foules
aux lieu et place des prélats du cru, ou encore
donner l'absoute toujours en se substituant
aux autorités ecclésiastiques locales.
En un mot, M. tCeretti devint si encom-
brant. qu'on finit par le laisser comprendre
à cet Italien, qui doit posséder l'art des nuan-
ces. Aussi, tandis qu'en 1921, le délégué papal
se voyait eintouré, aux fêtée de Jeanne d'Arc
à Orléans, par 34 évêques ou archevêques fran-
çais, cette année, pour la môme occasion, deux
prélats seulement eurent ile courage de s'y
montrer aux côtés de Mgr Ceretti.
Cette grève, significative d'ailleurs, se serait
corsée d'un incident épistolaire assez vif au
cours duquel Mgr Marty aurait prié Mgr Ce-
retti de lui î.icher la paix dans son diocèse.
Même e"lle se serait aggravée d'une réclama-
tion collective par laquelle les archevêques
français priaient le pape de faire observer res-
pectueusement au nonce qu'ils ne sont point
les subordonnés de celui-ci. Puis, après avoir
protesté auprès du Saint-Père contre l'immix-
tion intempestive et indiscrète du monsignor
dans leurs affaires administratives, ils s'en
furent se plaindre. à M. Poincaré lui-même.
par le truchement du cardinal Dubois.
Mgr Ceretti n'en continuait pas moims ses
manigances et, plus spécialement, 'l'épiscopat
constatait, avec une ffureur mêlée d'un peu
d'effroi, que le nonce était du dernier bien
avec M. Marc Sangmier, l'ancien chef de ee
Sillon, qui a été condamné à Rome comme
une des pires erreurs et des plus indubitables
hérésies du temps présent.
Enfin l'attitude du nonce au récent congrès
des syndicats ouvriers catholiques mettait le
comble au ressentiment des évêques. N'avait-il
pas 'félicité de leur .politique les syndiqués, qui
avaient discuté la question des huit heures et
même celle du « front unique » ? Le jour où
les Soviets seront reconnus, ne pourra-t-on
point s'attendre à voir le nonce participer à
un congrès communiste et bénir, avec une onc-
tion toute génoise, l'œil de Moscou ?
M. Poincaré, sans doute, est ennuyé de ces
complications inattendues. Mais il aurait pro-
mis « de représenter 'à Mgr Ceretti que son
indiscrétion mettra sous peu l'Eglise de Fran-
ce en révolution et Hes républicains en fu-
reur ».
Naturellement, tous -les incidents dont nous
venons de parler auraient eu leur répercus-
sion à Rome, où M. Jonnart et le cardinal Gas-
.parri échangeraient des « notes aigre-douces »
et où « la lune de miel semblerait toucher à
sa fin ».
Telles sont les révélations qu'a faites Fran-
çois-Albert et qui ne lui ont pas encore valu,
que nous sachions, un démenti même partiel.
Il sera intéræsarnt de suivre 'le développement
du conflit qui met aux prises nos prélats et
Mgr Ceretti. Il est temps, décidément, qu'on
donne à celui-ci l'avancement qu'il souhaite.
Mais, nous y pensons : c'est peut-être pour
être sûr de l'obtenir plus vite que Mgr Ceretti
se rend de plus en plus impossible à Paris.
Louis LE PAGE.
PAULE JACQUES A RÉVÉLÉ SON SEClfET
Accusée par sa fille, Mme Bassarabo
EST CONDAMNÉE
à vingt ans de travaux forcés
I ■ J .PU ■ .1'
Et, souriante, elle remercie les jurés d'avoir acquitté son enfant !
- 1 ————————
Il faut rendre cette justice à Mme Bassa-
rabo qu'elle, du moins, aura joué son rôle
jusqu'au bout. Mais, sans doute, celui qu'el-
le avait imposé à sa fille était trop lourd
pour elle. Lo sacrifice que sa mère lui de-
mandait était au-dessus des forces de Paule
Jacques. La peur lui a donné la volonté de
se soustraire à l'étrange pouvoir de fasci-
nation qui arrêtait le secret sur ses lèvres.
Et Paule Jacques, enfin a parlé.
Est-ce bien un secret qu'elle a révélé ?
La jeune fille, à la vérité, n'a fait que ré-
péter les aveux qu'elle avait formulés au
début de l'instruction. Mais c'était assez
pour ruiner d'un seul coup le système de
défense imaginé par sa mère, et de la ma-
gnifique plaidoirie de M* de Moro-Giafferi
il ne restait rien.
Peut-on dire que cet aveu renouvelé à
l'heure suprême a eu une grande Influence
sur le verdict ? Paule Jacques, peut-être, y
a gagné son acquittement, mais il ne pa-
raît pas avoir beaucoup influé sur le sort
d'Héra Myrtel. En sorte que la jeune fille
n'aura pas à se reprocher d'avoir fait con-
damner sa mère.
Les aveux
M* Raymond Hubert, avocat de Paule
Jacques venait, en quelques mots, de plai-
der l'innocence de sa cliente, lorsque le
président adressa à la jeune fille la ques-
tion sacramentelle : « Accusée, avez-vous
quelque chose à ajouter pour votre dé-
fense ? )
Alors, Paule Jacques se lève, en proie à
une violente émotion, et prononce à travers
ses .sanglots :
« Je vous ai promis la vérité, je vais
vous la dire. A six heures du matin, j'ai été
réveillée par une détonation. J'ai appelé ;
on ne m'a pas répondu. Je suis allée à la
porte de la chambre de ma mère, qui était
fermée à clef. J'ai crié : « Maman, maman,
que se passe-t-il ? » J'ai entendu quelqu'un
qui se gargarisait dans la pièce à côté.
Puis m.a mère a ouvert la porte. J'ai regar.
dé alors dans la chambre, et sur le lit j'ai
vu, se reflétant dans la glace, le corps d'un
homme. J'ai crié à ma mère : « Qu'as-tu
fait ? * Elle m'a répondu: « Il voulait me
tuer. C'était lui ou moi. » Et elle a ajouté :
« Je ne veux pas de scandale dans la mai-
son. » Sur son ordre, je suis allée au gre-
nier chercher la malle. Après j'ai fait tout
c. qu'elle m'a dit. >
D'une voix de moins en moins distincte,
sous les regards de sa mère qui n'a cessé de
la suivre depuis le début de cette scène, la
jeune fille continue son récit. Elle avoue
avoir écrit le billet bleu attribué par sa
mère à Bassarabo. C'est elle aussi qui a si-
gné le pouvoir qui devait permettre à sa
mère de disposer des biens du ménage en
cas d'absence du mari. « Il n'y a pas d'au-
tre moyen, lui avait dit sa mère, de rentrer
en possession de l'argent qu'il t'a volé. »
Plus tard, à Saint-Lazare, tandis que
Paule Jacques, atteinte de la fièvre typhoï-
de, était en danger de mort, sa mère lui 1
avait dit : « Je te jure que je suis inno-
cente ! » Et c'est pourquoi, croyant à un
secret que sa mère lui avait caché, elle était
revenue sur ses aveux. « Mais ici, ajoute-
t-elle, en entendant ma mère me dire :
« Tais-toi ! > j'ai tout compris. »
Et, parvenue à l'extrême limite de son
effort, les traits bouleverses, le corps agité
d'un long tremblement, la malheureuse
fille se laisse aller sur son banc.
Aussitôt la mère se lève. Aucune colère,
aucune amertume contre sa fille qui, plus
sûrement que le réquisitoire de l'avocat gé-
néral, va la faire condamner. Un peu plus
pâle peut-être que de coutume, mais gardant
toujours son étrange sourire, elle annonce
qu'elle va parler à son tour et faire connaî-
tre le secret qu'elle seule possède, car sa
fille ne sait rien !
A l'annonce de cette révélation, l'auditoi-
re, sceptique, fait entendre quelques rica-
nements, assez déplacés, d'ailleurs. Cet au-
ditoire, depuis le commencement du pro-
cès, s'est beaucoup accru en quantité, si-
non en qualité, et on y remarque mainte-
nant quelques-unes de ces dames empana-
chées, si soigneusement exclues jusqu'ici.
Mais Héra. Myrtel ne se laisse pas démon-
ter.
Le dernier roman d'Héra Myrtel
Pour la dernière fois, peut-être, elle a
l'occasion de donner libre cours à son ima-
gination.
Alors, c'est un débordement, un flot de
paroles où il est question de Becker, de
Bassarabo, qu'elle appelle Ismaël, de la ga-
re du Nord, de Pillement et de M. Bonin.
En une inexprimable confusion, tous ces
personnages passent et repassent dans le
récit de.la romancière en délire.
C'est si extravagant qu'on se demande
s'il ne s'agit pas d'une nouvelle comédie, si
Héra Myrtel n'espère point se faire passer
pour folle ?
En vain, M* de Moro-Giafferri, sentant le
mauvais effet des élucubra.tions de sa clien-
te prétexte un léger malaise pour obtenir
une suspension d'audience.
Dès la reprise, Mme Bassarabo reprend
son discours interrompu. Elle soutient que
son mari n'est pas mort, qu'il est à New-
York. Un général américain le lui a écrit.
Puis, sans transition, elle entreprend un
plaidoyer en faveur de sa fille. Quant à
elle, ( vieille et flétrie s, comme l'a dit
l'avocat général, elle se livre aux jurés.
A-t-elle fini ? Pas encore. Après avoir
consulté une large feuille de papier où,
pour l'édification des jurés, elle a consigné
une centaine de cas d'erreurs judiciaires,
elle termine par cette protestation d'inno-
cence : « Ma fille a eu peur. On lui a fait
croire qu'on n'acquittait que les aveux.
Pour moi, je n'avouerai pas ce que je n'ai
pas fait. Chez nous, les croisés, on ne bais-
se pas la tête ! C'est par un appel au di-
vin que vous allez vous préparer à votre
verdict ; aucune providence n'est ici re-
présentée. Je regrette qu'il n'y ait pas de
jury féminin. Allez consulter le cœur de
vos mères ! S>
Enfin, elle s'arrêta, à bout de souffle, et
Me de Moro Giafferri put prendre la parole.
La situation pour lui n'était pas gaie. Les
aveux de la fille détruisait tout l'effet de sa
plaidoirie de la veille et les déclarations sau-
grenues de la mère n'arrangeaient point les
choses. On ne saurait trop admii^r avec quel
art l'éminent avocat sut se tirer de ce mau-
vais pas, et sa seconde plaidoirie improvisée
pourtant en des circonstances si dificiles pa-
rut à tous plus émouvante encore que la
première.
Mais que pouvait à cette heure toutes les
ressources de la plus belle éloquence?
L'opinion du jury était faite. La délibéra-
tion dura pourtant une heure, mais il est pro-
bable qu'elle porta surtout sur le dosage de
la peine.
LE VERDICT
A 4 heures les jurés revenaient avec
leur verdict. Sur les deux questions d'homi-
cide volontaire et de préméditation concer-
nant Mme Bassarabo, la réponse du jury était
affirmative. Elle était négative sur la ques-
tion de complicité visant Paule Jacques. La
mère pourtant obtenait les circonstances at-
ténuantes.
Ramenée dans le box des accusées pour
y entendre la lecture de l'arrêt d'acquitte-
ment, Paule Jacques se voyant seule joignit
les mains et pleura, en proie à une profon-
de détresse. Il fallut l'arricher de force à
ce banc qu'elle ne voulait plus quitter.
Quel contraste dans l'attitude de la mère.
Avec un visage extasié, comme si le verdict
qui la frappait eût comblé tous ses vœux,
elle sourit aux jurés et les remercia d'avoir
acquitté sa fille. Elle ajouta pourtant une
fois encore qu'elle était innocente, et la Cour
ayant enfin rendu l'arrêt qui la condamnait
à vingt années de travaux forcés, elle serra
la main de son défenseur et sortit en sou-
riant toujours.
*
**
Poursuivant jusqu'au bout l'accomplisse-
ment d'un devoir que sa cliente avait par
instant rendu si ingrat Me de Moro-Giafferri
a voulu faire signer au jury un recours en
grâce, mais cinq jurés seulement se sont
montrés favorables à une commutation de
peine en faveur d'Hera Myrtel.
—————————— ,. ca.- c'
LE RENFLOUEMENT DE LA B. 1. C.
Contre le projet Porte
MM. Parmentier et Thion de La Chaume
jouent leurs dernières cartes
La campagne hostile à la B.I.C. continue
plus âpre que jamais, au Palais, à la Chambre,
à la Bourse, il faut encore montrer ici le jeu
de certaines puissances de politique et de
finances. L'attitude, de M. Parmentier, inspec-
teur des finances et ancien collègue de M.
Thion de La Chaume, est celle du défi. Nous
empruntons ces lignes à notre confrère La Li-
berté :
CI Hier, un incident, qui dépasse véritable-
ment les bornes accoutumées des scandales
administratifs, s'est passé à la réunion de la
Commission interministérielle chargée d'étu-
dier le projet de renflouement de la Banque
Industrielle de Chine.
« Ce projet, on le sait, est l'œuvre de M.
Porte, président du Tribunal de commerce de
la Seine, et de M. Benoît, administrateur ju-
diciaire et commissaire au règlement transac-
tionnel : il prévoit la création d'une société
de gérance de la Banque, dont nous avons ex-
posé il y a quelques jours les modalités, et
pour laquelle le concours des plus grandes
banques françaises et d'ores et déjà acquis.
Le gouvernement chinois, souscripteur pour
un tiers du capital de la Banque, ainsi que la
très grande majorité des actionnaires et d-es
créanciers, se sont ralliés au projet. Il sem-
blait donc que son approbation par la Com-
mission interministérielle (3 délégués du Com-
merce, des Affaires étrangères et des Finan-
ces) était acquise, après les votes répétés du
Parlement et les engagements pris par le
gouvernement.
« Mais on avait compté sans M. Parmen-
tier, directeur du Mouvement des fonds au
ministère des Finances, qui, on s'en souvient,
s'est montré depuis le début l'adversaire achar-
né du renflouement de la Banque Industrielle
de Chine. D'aucuns prétendent que l'acharne-
ment de M. Parmentier a des causes toutes
personnelles ; pour notre part, nous n'en sau-
rions rien dire. Mais nous nous étonnons de
voir un fonctionnaire, représentant le ministre
des Finances, prendre une attitude si con-
traire aux opinions officielles de son chef et
apporter dans l'expression de ses sentiments
le manque de mesure dont il a donné hier le
spectacle.
« M. Parmentier demande à la Commission
de repousser le projet du Tribunal de com-
merce et des actionnaires et créanciers, afin
de lui substituer la création d'une banque
nouvelle. Ne voit-on pas là poindre le bout
de l'oreille sous la dépouille dont se vêt en
rugissant M. Parmentier ?
« Mais une objection ruine d'un mot cette
proposition saugrenue : le grand avantage que
présente, au point de vue national, le ren-
flouement de la Banque Industrielle de Chine,
c'est d'une part d'éviter que sa mise en faillite
ne ternisse le bon renom français en Extrême-
Orient, et c'est ensuite de sauver, en même
temps que la collaboration du gouvernement
chinois à une grande œuvre française, les con-
cessions de travaux obtenues par la Banque,
qui se chiffrent à près de deux milliards de
francs et constituent pour notre industrie une
richesse inappréciable. Si la Banque Indus-
trielle sombre définitivement, ces contrats de-
viennent caducs, et les clauses de la Confé-
rence de Washington en interdisent doréna-
vant le renouvellement.
« Mais qu'importe sans doute à M. Parmen-
tier la perte de deux milliards de travaux par
l'industrie française. Les usines françaises
peuvent chômer, les ouvriers français cher-
cher vainement du travail, pourvu que M. Par-
mentier ait satisfait ses rancunes et son
amour-propre.
« M. de Lasteyrie, s'il est sincère dans ses
déclarations relatives à la Banque Industrielle
de Chine — et rien ne nous permet d'en dou-
ter — ne se laissera pas ainsi désavouer par
son mandataire. Demain, la Commission in-
terministérielle se réunit à nouveau pour
prendre cette fois une décision définitive ;
nous jugerons la sincérité du ministre aux
instructions qu'il aura données à ses repré-
sentants. »
Notre confrère dit ce que nous n'avons
cessé de répéter depuis des mois. Mais il
n'est pires sourds que ceux qui ont de bonnes
raisons pour ne point entendre.
LIRE TOUS LES LUNDIS
Le Courrier des Loyers
et des
Habitations à bsn marché
LA CONFERENCE DE LA HAYE
En attendant les délégués
des Soviets
la Commission a constiné
son bureau
La Haye, 21 juin. — La Commission non
russe s'est réunie ce matin à 11 heures, au
Palais de la Paix. Elle a constitué son bureau
suivant les résolutions qui avaient été arrê-
tées au cours de conversations privées.
Composition de la Commission
Le président de la commission est M. Patyn
(Hollande) et le vice-président est M. Cattier
(Belgique).
La première sous-commission, qui a pour
objet de s'occuper des questions des dettes de
la Russie, a élu pour président M. Alphand
(France)
(La deuxième sous-commission, qui doit s'oc-
cuper des propriétés privées, a élu comme pré-
sident sir Philip Lloyd Greame (Angleterre).
La troisième sous-commission, des crédits,
s'est donnée comme président le baron Avez-
zani (Italie).
Les vice4présldents des sous-commissions
seront désignés dès demain au cours des réu-
nions durant lesquelles seront également arrê-
tées les méthodes de travail de ces différents
organismes désormais constitués et auxquels
'il ne reste qu'à étudier, et si possible à résou-
dre, les différents problèmes qui leur seront
soumis.
La commission non russe a également rati-
fié l'élection de M. Van Karnebeek, ministre
des affaires étrangères hollandais et président
de la conférence préliminaire, comme prési-
dent honoraire.
Les rapports avec les délégués russes
Afin d'éviter tout conflit ou tout sujet de
difficultés avec les Russes, la commission non
russe a donné mandat & M. Patyn, son pré-
sident, de prendre contact, lui seul, avec là
délégation soviétique. M. Patyn priera cette
dernière de constituer, de son côté, trois sous-
commissions, dont les présidents respectifs
entreront en rapport avec les présidents des
trois sous-commissions de la commission non
russe..
Les passeports ont été demandés
pour les délégués russes
La séance de la commission non russe tenuè
ce matin et au cours de laquelle ont été pri-
ses les décisions dont on vient de lire l'ex-
posé, a duré environ une heure. Le président
a tait connaître à la fin de cette séance qu'au-
cune nouvelle officielle n'était encore parve-
nue de Moscou. Il a cependant ajouté que des
passeports avaient été demandés par le gou-
vernement des Soviets pour les délégués rus-
ses suivants : ILitvin'tff, Rakowsky, Krassine
'Krestinsky et Sokolnikoff.
—————————— — (
EN HA U TE-SILESIE,
Uî) ordre secret allemand
recommande le sabotage
Kattowitz, 21 juin. — On a reçu ici des in-
formations tout là fait sûres qu'un ordre secret
a été donné aux fonctionnaires allemands de
multiplier autant que possible les difficultés
aux Polonais lors ide la transmission du pou-
voir entre leurs mains. Les employés alle-
mands qui doivent céder leur place aux Polo-
nais sont tenus à leur fournir de tels rensei-
gnements qui lçs induiraient en erreur et qut
créeraient de la sorte une confusion dans le
fonctionnement de la nouvelle administration.
La plupart des fonctionnaires allemands exé-
cutent fidèlement cet ordre secret qui émane,
dit-on, des autorisés allemandes le plus haut
placées.
mpEm~'AmM
en France
Débarqué hier à Marseille, il a été salué
psr M. Sarraut au nom du gouvernement
Marseille, 21 juin. — Le paquebot « POr-o
thos » portant l'empereur d'Annam, Khaii
Dinh est arrivé à l'entrée des ports de Mar-
seille à 13 h. 5e.
Le pavillon annamite Botte au mât d'artimon
A 14 h. 45, le « Porthos >, qui a arboré la
grand pavois, accoste au môle de La Pinède.
Dès que l'échelle de coupée est abaissée,
M. Albert Sarraut, ministre des Colonies,
suivi des personnages officiels, monte à bord
et gagne le grand salon du paquebot, où l'em-
pereur l'attend. Le souverain a revêtu le C06
tume d'apparat tout de soie brodée d'or. U a
la poitrine barrée du grand cordon jaune et
rouge du Dragon de l'Annam. Il porte la
coiffure nationale ornée de broderies d'or.
Une plaque d'or ornée de gros diamants res-
plendit sur sa poitrine. C'est l'insigne de la
majesté impériale.
Près de l'Empereur se tient son fils, le
prince Vinh Thuy, qui est âgé d'une dou-
zaine d'années, son neveu, le prince Vinh Ca.
tous deux richement vêtus de soie, et l'in-
terprète Thaï, chef du secrétariat général.
M. Pasquier, résident supérieur de France
en Annam, qui accompagne l'Empereur dans
son voyage, est également à son côté.
Premiers saluts
Souriant, le souverain s'avance vers M.
Sarraut, les mains tendues. Aux paroles de
bienvenue du ministre, il fait répondre très
aimablement par l'interprète et dit sa joie
de se trouver en France.
- Dans la suite du ministre, l'empereur aper-
çoit soudain l'ancien résident de France en
Annam, M. Charles. Il s'approche de lui et
lui donne'l'accolade.
Mais voici des mandarins revêtus de ri-
ches costumes, la poitrine surchargée de dé-
corations, un surtout de mousseline jeté par-
dessus leurs vêtements. Ils s'approchent, s'in-
clinent «profondément devant le souverain et
son file auxquels ile présentent leurs kom
mages.
Ce sont ensuite les présentations. A eh&
cune des personnalités présentes, l'empereui
souriant, fait dire une parole aimable.
Le supplice de l'interview
Avant que l'empereur, sa famille et sa
suite ne descendent à terre, le souverain
consent à s'entretenir un instant avec tes
journalistes présents. Il a notamment ex-
primé au représentant de 1' « Agence Havas >
sa grande joie d'être en France. Cette mani-
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