Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1922-09-08
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 08 septembre 1922 08 septembre 1922
Description : 1922/09/08 (N16475,A46). 1922/09/08 (N16475,A46).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
:;.,.
EK k LANTERNE s DOIT ETRE VENDUE DIX CENTIMES K PARIS ET EN PROVINCE
Le Numéro : 10 cmew
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aux Bureaux du Journal
46' ANNEE - N* 16.475
VENDREDI
8
SEPTEMBRE 1922
Directeur-Rédacteur en chefs
FELIX HAUTFORT
Le» manuscrits non inséré»
ne sont pa» rendu»
L'autre métier
Le poète Ernest Prévost a posé, dans
le Figaro, une question qui fait — c'est
copie d'été — couler beaucoup d'encre :
« Un écrivain doit-il avoir un métier
autre que celui de la littérature » ?
Ce sont des écrivains qui ont répondu,
tes uns par oui, les autres par non, et le
reste à côté. Ces derniers ont ergoté sur
le mot : « doit-il » qu'ils ont interprété
jen « peut-il », « est-il souhaitable. ».
Au vrai, ou alors je n'y ai rien com-
pris, M. Ernest Prévost a entendu de-
mander s'il faut que la littérature nour-
risse son homme, ou au contraire s'il
faut que l'homme ait un métier pour
pouvoir faire sa littérature en paix.
J Il me semble bien que jadis, dans le
feu des illusions volontaires et avec le
souci de l'attitude de revendication qui
convient au bel âge, j'eusse proclamé
pue la littérature était un métier et que
jc'était bien le moindre qu'elle fît vivre
jceux qui l'ont embrassée. Oui, peut-
être aurais-je professé cela il y a vingt
ans.
Mais aujourd'hui, au bénéfice de l'ex-
périence et de la réflexion motivée, c'est
tout le contraire qui me paraît juste.
Nous avons vu et éprouvé ce qu'est la
littérature alimentaire : elle est abomi-
nable et c'est une honte !
A quelles saletés ne descend pas le
talent naturel quand il est soumis à la
considération — obligatoire dans les
termes du problème — de la plus grande
jvente possible !
Et au fond et en soi, si la littérature
est si noble, si éthérée qu'elle feint
de le croire et «qu'elle le dit, n'y
a-t-il pas inélégàndt à ce que les mani-
festations en soient rémunérées comme
des heures de terrassier ? Quel désolant
spectacle qu'un v:pomancier discutant
jâprement de ses tirages et supputant ses
profits !
Au point de vue, donc, théorique, c'est-
à-dire critique, comme au point de vue
pratique, il semble préférable que le lit-
térateur ait, à l'origine tout au moins, un
métier — ou des rentes. et on tombe ici,
sans le vouloir, dans la fâcheuse recon-
naissance d'un privilège des riches. Qu'il
ait un métier qui lui permette de laisser
à. son œuvre spirituelle son originalité
essentielle et son indépendance.
⁂
L'équivoque, s'il y en a une, est née
du rapprochement qu'on fait souvent
entre ces deux termes antithétiques :
journalisme et littérature.
Bien sûr que le journalisme est un
métier ! Et celui qui l'exerce y trouve
assez de fatigues pour n'avoir pas à en
iexercer un autre.
Je parle, bien entendu, du vrai journa-
liste, du journaliste-reporter, informa-
teur, de celui qui « fait » le journal, qui
y donne son temps et sa peine matérielle
et même manuelle — par opposition au
Journaliste « d'idée », de critique, qui le
plus souvent réalise le maximum de pro-
fit avec le minimum de peine.
Mais journalisme et littérature — hé-
las ! oh ! combien — sont à peu près ex-
clusifs l'un de l'autre. Quand on s'est cru
littérateur et qu'on a été vingt ans jour-
naliste, on s'en aperçoit parbleu bien !
Mais il est trop tard, et étant devenu l'un
ion a cessé d'être l'autre. Au lieu que si
on avait gratté du papier administratif
comme Huysmans, ou poli des verres de
lunettes comme Spinoza, peut-être eût-
on gardé sinon le talent, du moins l'apti-
tude à en acquérir ?
♦
**
On invoque volontiers le paradoxe de
La Bruyère : « C'est un métier que de
faire un livre. » Oui, c'est un métier
quand précisément la fabrication du li-
vre est organisée professionnellement.
Mais ce que dit La Bruyère est une affir-
mation d'un fait, ce n'est pas l'expres-
sion d'une opinion ou d'un souhait.
Bien plus en situation, bien plus to-
pique — pour en revenir à la question
de M. Ernest Prévost — est l'opinion de
M. Pierre Mille. Maître conteur, roman-
cier rare et journaliste parfait, l'un de
ceux par conséquent auxquels il serait
facile d'ériger le fait en droit, et la prati-
que en théorie, Pierre Mille ne craint pas
de dire : « Selon moi, un homme de let-
tres qui, à vingt ans, se dit : « je: vais
être homme de lettres » et ne fait plus
rien autre est un serin — à moins qu'il
ne soit poète ! »
C'est un serin, n'en doutons pas. Mais
il a l'exemple d'autres serins conforta-
blement établis dans leur serinière. Et
le mal c'est que plus ces serins sont se-
rins et dirais-je sereinement serins, plus
leur serinière est belle, moelleuse et ri-
che !.
En sorte que si l'esprit conclut dans un
sens, je crois bien que la « corruption
des moeurs » a malheureusement conclu
dans l'autre. Notre époque a industrialisé
ce qui devait rester le moins industriel.
Victor SNELL.
———————— ) -.- (
Donner et reprendre
La Chambre de guerre, à la veille des joies
de son départ pour aller devant le pays cher-
cher un nouveau miandat, a voté la loi. de 8
heures — à l'unanimité. Le Sénat, dont les
deux tiers étaient renouvelables, sans grand
délai, l'a également adoptée d'enthousiasme.
L'extrême gauche et les groupements syndi-
caux se sont réjouis d'une si grande et si
complète victoire, qu'ils croyaient définitive.
Hélas! il n'y a rien de définitif en matière
parlementaire.
Hier, le' gouvernement, par deux dffèrats,
pris d'ailleurs en parfaite légalité, a porté une
double atteinte à la loi de 8 heures. MM. Le
Trocquer pour les chemins de fer et M. Rio
pour l'armement, l'un en raison d'indispensa-
bles économies, l'autre pour sauver, dit-il,
l'armement français, abandonnent le strict
principe des huit heures.
Les raisons alléguées par le gouvernement
sont péremptoires; il n'est pourtant pas dou-
teux que la loi des huit heures se heurtait à
d'énormes difficultés pratiques et imposait au
pays des sacrifices considérables, au lende-
main des épreuves de la guerre. Mais ces con-
sidérations ne devaient point échapper en
1919 au législateur clairvoyant, il a donc fait
un geste de démagogue, infiniment déplora-
ble puisque la nécessité oblige le gouverne-
ment de 1922 à reprendre partiellement ce que
les pouvoirs publics concédèrent libéralement
il n'y a pas plus de trois ans.
C'est cette méthode politique qui engendre
les crises et donne à l'agitation extrémiste de
terribles prétextes.
« On a donné, semble-t-i!, par peur, avant
un 1 er mai dont on craignait l'échéance, on
reprend à l'heure où l'on se croit en force. »
C'est ainsi que les syndicalistes ne manqueront
pas d'expliquer ce retour sur une concession
qui paraissait si bien acquise.
Je sais bien que la responsabilité de la
Chambre est encore sauve, mais le sera-t-elle
demain, lorsqu'une inévitable interpellation
l'obligera à se prononcer sur les actes du gou-
vernement ?
Une fois de plus, nous voyons le danger de
faire des lois sociales dont on n'a point exa-
miné l'exacte portée. Il eût été sans doute
meilleur d'appliquer une loi de progrès social
par paliers, sans y revenir; il serait dange-
reux de procéder, à l'inverse, en détruisant
par paliers ce que l'on a fait dans une pen-
sée généreusement démocratique.
F. H.
——————— ) - -.- ( ———————
la terreur allemande en Haute-Silésie
Voici quelques nouveaux faits du mar-
tyrologe polonais en Haute-Silésie alle-
mande. Une bande de l'Orgesch a attaqué
la maison du Polonais Bonner, située dans
une grande rue de la ville de Gleiwitz.
Bonner fut tué, son fils gravement blessé
et la maison dévastée. La municipalité de
Gleiwitz a refusé de rédiger un protocole
sur cet abominable assassinat et contrai-
rement aux lois allemandes en vigueur a
décliné le paiement d'une pension deman-
dée par Mme Bonner. Mme Nocon, de Bor-
ziwerk, et Mme Wajout, de Sosnice, mères
de familles nombreuses et veuves de maris
tombés pendant la guerre dans les rangs de
l'armée allemande, se sont vues également
refuser la petite pension qu'elles touchaient
à ce titre et furent obligées d'émigrer en
Pologne. Enfin, les bandits de l'Orgesch ont
envahi et pillé à fond la maison de Mm'e
Michalik, veuve et mère de cinq fils qui
ont combattu dans les rangs de l'armée al-
lemande et dont quatre furent tués à la
guerre. La malheureuse vieille femme fut
brutalement battue et se sauva en Pologne
en abandonnant toute sa fortune.
-<-———————— :- -.- - ( ——————-———
UNE RENTREE SPORTIVE
La saison de football
va commencer dimanche
Les finalistes de la Coupe de France
à Paris
Une intéressante rencontre doit marquer le
retour de la saison de football dimanche, où
le C. A. P. G. recevra la visite du Stad3
Rennais.
Cette rencontre aura lieu à Charentonneau.
Elle servira de rentrée aux finalistes de la
Coupe de France qui auront à cœur de renou-
veler la belle impression qu'ils causèrent, au
printemps dernier, en ayant raison de l'Olym-
pique de Paris et de l'Olympique lillois et en
ne succombant que de justesse face au Red
Star.
Face aux Bretons, le C. A. P. G. qui tenait
dimanche dernier en échec le R. C. Roubai-
sien, le club le plus redoutable du Nord, cher-
chera à s'imposer par un début triomphal.
Plusieurs des meilleurs footballeurs de
France, les Baudier, Castiger, Devio, Marc,
Moulène, Caballero, participeront à cette
belle rencontre.
APRÈS LA VICTOIRE TURQUE
LES CONDITIONS D'ANGORA
————— -
Galaleddin bey aéclare qu'à des con-ditions nouvelles
doit correspondre une base nouvelle
de discussions à la Conférence de Venise
Rome, 6 septembre. (De notre corres-
pondant particulier.) — Le ministre d'An-
gora à Rome, Gelaleddin bey, a fait à un
de nos confrères des déclarations que nous
reproduisons ci-dessous et dont on appré-
ciera l'importance.
— Il n'était pas humainement possible
que notre gouvernement national puisse
pousser plus loin la patience. Il y a long-
temps que l'Asie Mineure aurait été le tom-
beau de l'armée grecque, si mes compatrio-
tes n'avaient pas hésité devant les maux
que devait fatalement causer une telle opé-
ration ; nous voulions épargner au monde
les horreurs d'une guerre sans merci. Les
violences de l'armée hellénique dans la re-
traite de Saccaria nous ont décidés.
* — Mais les puissances allaient interve-
nir ?
— Nous leur avons adressé deux notes
successives, à la fin du mois d'avril. Nous
demandions l'évacuation de l'Asie 'Mineure,
la signature d'un armistice et l'ouverture
des négociations, nous n'avons pas obtenu
de réponse. L'Angleterre a fait les plus
grandes difficultés ; nous avons envoyé
Fethv bey à Londres, mais il ne fut reçu
par aucun personnage du gouvernement.
Que faire ?. Il ne nous restait plus qu'à
recourir aux armes. Vous savez le résultat;
les Grecs ont dû battre en retraite préci-
pitamment, mais ils se sont livrés à d'abo-
minables cuiautés, incendies, pillages, mas-
sacres : j'ai dû saisir aujourd'hui même
la Société des Nations de ces abominables
méfaits. En raison de l'indifférence sys-
tématique de l'Europe, nous n'avions pas
le choix : le meilleur moyen d'arriver à la
paix, c'était la guerre ; nous avons toute-
fois pris ce parti comme l'ultima ratio,
mais nous sommes pourtant désireux d'ar-
river à une paix juste qui nous rende nos
positions et notre complète indépendance.
— Peut-on vous demander si le point de
vue du gouvernement de Constantinople est
celui du gouvernement d'Angora ?
— Il faut bien considérer que le gouver-
nement de Constantinople est de ipure forme
et non de fait. Il n'a pas de force armée, il
no peut exercer aucune autorité, il n'a
même aucune liberté. Que peut faire un
grand-vizir sous le contrôle étroit de l'étran-
ger? Pour quoi peuvent compter l'opinion et
la presse de Constantinople ? Ce que nous
savons, c'est que tous les éléments otto-
mans sont de cœur avec nous. La victoire
de nos armes a été saluée sur. la Bosphore
avec la même joie qu'à Angora. L'espérance
de résurrection nationale soulève l'enthou-
siasme des populations de la Turquie d'Eu-
rope Qui considère Mustapha Kemal com-
me le sauveur de la patrie. La presse lo-
cale exprime d'ailleurs ces sentiments, ain-
si que vous pouvez vous en rendre compte
en lisant les journaux parvenus auiour-
d'hui de Stamboul.
— Et que ferez-vous de la Conférence de
Venise ?
— Je pense, répond Gelaleddin bey, que
la Turquie doit faire comprendre AUX puis-
sances que deux faits nouveaux doivent être
pris en considération : 1° Le projet qu'avait
formé la Grèce de marcher sur Constanti-
nople, ce- qui démontre que l'Empire otto-
man doit avoir une frontière stratégique
sûre pour éviter de telles menaces et que
cette frontière doit aller à la Maritza, en
comprenant la ville d'Andrinople ; 2° La dé-
bâcle de l'armée hellénique et les actes oui
ont accompagné sa retraite montrent quelle
considération il faut avoir pour la nation
hellène et ssa puissance. Il est certain que
les bases de la Conférence doivent être sen-
siblement modifiées par les événements
nouveaux, elles ne sont plus celles qui fu-
rent fixées à Paris en mars dernier. Sous
ces réserves, nous sommes prêts à ipartici-
per à la pacification de l'Orient.
De toute cette interview et de divers pro-
pos du délégué d'Angora, il résulte qu'en
dépit de leur victoire qui s'affirme complè-
te, les kemalistes sont prêts à engager de*
pourparlers à trois conditions : 1° Evacua-
tion de l'Asie Mineure ; 2° Indépendance
de la Turquie et fixation d'une frontière ;
3" Restitution de la Thrace. — Il ne reste
plus qu'à « causer ».
LA DÉBÂCLE DES GRECS EN ASIE MINEURE.
Le généralissime Tricoupis et son état-major
faits prisonnier par les Turcs
- ii
Les armées d'Angora approchent de Smyrne
Les Alliés font à Constantinople une démarehe
en faveur d'un armistiee
Les dernières nouvelles reçues de Turquie
ne laissent plus de sérieux espoirs sur la pos-
sibilité d'une résistance hellénique prolon-
gée en Asie Mineure.
D'autre part, on annonce que la plus
grande partie des troupes concentrées ces
temps derniers sur la ligne de Tchataldja, en
Thrace, dans l'éventualité d'une marche sur
Constantinople, sont expédiées en toute hâte
vers le nord de l'Asie Mineure pour renfor-
cer l'armée grecque en retraite.
La prise de Brousse par les Turcs rend
fort préicaire la situation de l'armée du Nord.
Les avant-gardes turques approchent ra-
pidement de Smyrne. L'armée grecque du
Sud est, dit-on, encerclée.
Le chef suprême de l'armée grecque, le gé-
néral Tricoupis, nommé tout récemment à
ce poste, était déjlà fait prisonnier, ainsi
que tout son état-major, par les soldats du
Croissant!
Le roi Constantin aurait pris la fuite.
C'est la débâcle !
A Londres on s'en rend fort bien compta
et l'on n'envisage pas sans une certaine ia-
quiétude la suite des événements. La sou-
daineté et la rapidité de l'attaque d'Angora
a manifestement surpris les milieux diplo-
matiques les moins optimistes. On envisage,
dans les milieux britanniques; la situation
qui serait faite non seulement à la Grec*,
mais à la Grande-Bretagne elle-même, au cas
où les Turcs exigeraient maintenant l'éva-
cuation complète de la Thrace.
La chute de Salihli
t.es forces kemalistes du front sud, après
avoir occupé Alkan à l'ouest d'Alacheir, au
kilomètre 163, sur le chemin de fer de Smyr-
ne, sont arrivées à Salihli.
Un corps de 2.000 cavaliers turcs, après
l'occupation d'Eudemiche. se dirige sur
Smyrne.
On prévoit, d'après la tournure actuelle
des choses, que les Turcs arriveront dan»
quelques jours à Smyrne.
Les nouvelles oui annoncent les succès con-
tinus des armées nationalistes remplissent
de joie la population turque de Constantino-
ple ; cependant on n'y remarque rien d'anor-
mal.
[Salihli est situé sur la rive gauche du .euvl-
Alacheir-Tchaï et sur le versant nord du mas-
sif de Bozdagh (mont d'Imolus), dont les cimes
atteignent une hauteur de 1.300 mètres. ia
ville, sur le chemin de fer Alacheir-Smvrne. se
trouve à 40 kilomètres à l'ouest de cette pre-
mière ville, et à 130 kilomètres environ à l'est
de Smyrne.]
La capture du généralissime grec
Constantinople, 7 septembre. — Un télé-
gramme d'Angora dit :
Nos forces qui opéraient aux environs d'Ou-
chak ont fait prisonniers, le soir du 2 sep-
tembre, le général Tricoupis et d'autres offi.
ciers généraux, qui ont été amenés au quar-
tier général kemaliste. Ils sont les hôtes de
Mustapha Kemal pacha, qui les autorise à
donner de leurs nouvelles à leurs familles.
Le Croissant-Rouge de Constantinople a té-
légraphié à la Croix-Rouge hellénique d'Athè-
nes pour lui faire part de la capture de ces
généraux et de l'autorisation qui leur a été
accordée de correspondre avec leurs parents.
Il a avisé également le représentant de la
Croix-Rouge hellénique à Constantinople.
L'armée grecque du sud serait prisonnière
Adana, 7 septembre. — On mande d'Angora
que l'armée grecque du groupe sud vient
d'être encerclée par les troupes kemalistes
dans la région de Salihli où, après une ré-
sistance, elle aurait été faite prisonnière.
D'autre part, on annonce l'occupation de
la ville de Balikesser et celle de Sandirdji
par les troupes kemalistes.
Les avant-gardes turques se trouvent ac-
tuellement à une distance d'une quarantaine
de kilomètres de la ville de Smyrne.
Les Grecs ont continué à incendier tous
les villages se trouvant sur la route de i«ur
retraite.
Les pertes grecques sont évaluées depuis
le commencement des opéiations militaires
à une cinquantaine de mille hommes, dont
une quinzninâ de mille ont été faits prison-
niers par l'armée kemaliste et te reste tués
ou blessés au cours de l'offensive turque.
La nouvelle de la capture de l'armée grec-
que du sud et de l'arrivée des Turcs à en-
viron 40 kilomètres de Smyrne a besoin d'une
confirmation officielle. La prise de Balikes-
cer se rapporte aux opérations de l'armée ke-
maliste du nord.
Moscou félicite Angora
Constantinople, 7 septembre. — On mande
d'Angora que le représentant des Soviets
vient de remettre à Réouf bey, président du
conseil, un message de Karakhan félicitant
le gouvernement nationaliste pour le succès
de ses armées. Dans ce message, qui fut com-
muniqué à la grande assemblée, le gouverne-
ment de Moscou souligne l'importance de
la disparition de l'obstacle qui barrait le che-
min de Constantinople aux kemalistes et
ajoute que maintenant que la mer Noire est
redevenuo un lac russo-turc. la cooD6ration
dans tous les domaines entre la Russie so-
viétique At la Turquie nationaliste sera gran-
dement facilitée et que les puissances impé-
rialistes. ainsi aue leurs avant-gardes. ?tA
heurteront désormais à un front unique al-
lant de la Baltique à l'océan Indien.
Les Grecs songent à démobiliser !
Athènes, 7 septembre. — On affirme dans
les milieux informés que le gouvernement.
grec envisage la possibilité de faire effectuer
la démobilisation de l'armée, après l'évacua-
tion de l'Asie Mineure, dans l'île de Chio,
afin d'éviter des troubles éventuels auxquels
pourrait donner lieu la démobilisation des
troupes dans les garnisons d'Athènes et do
l'intérieur.
Le roi Constantin aurait quitté Athènes (1)
Le Times d'hier matin dit avoir appris
que le roi Constantin aurait quitté Athènes.
Il n'existe jusqu'ici aucune confirmation. dA
cette nouvelle. -
(Voir la suite en « Dernière Heure »)
La proposition anglaise
pour un armistice grêco-iurc
Arrivée à Londres de ta note française
Londres, 7 septembre. — La réponse du
gouvernement français à la proposition an-
glaise relative à un armistice entre les Grecs
et les Turcs est maintenant entre les mains
du Foreign Office.
Elle dit en- substance que le gouvernement
français est complètement d'accord avec le
gouvernement anglais sur l'opportunité qu'il
y aurait à mettre un terme à la lutte qui se
déroule actuellement entre les Grecs et les
Turcs en vertu de la politique toujours sui-
vie par les grandes puissances en Orient afin
d'y éviter les effusions de sang.
La réponse française considère qu'une in-
tervention directe auprès du gouvernement
d'Angora ne paraît pas possible, dans l'état
actuel des choses, mais elle indique que le
gouvernement français donnerait son assis-
tance à tout moyen qui permettrait de faire
un premier pas vers une solution, par les
négociations directes entre les commande-
ments des deux belligérants, comme prélimi-
naires à une médiation alliée.
LA DEMANDE D'ARMISTICE
Constantinople, 7 septembre. — A 11 heu-
res, les trois premiers drogmans français,
anglais et italien ont fait auprès du représen-
tant à Constantinople du gouvernement d'An-
gora une démarche pour déclarer que la
Grèce accepterait l'évacuation de l'Asie-Mi-
neure, à condition de conclure immédiatement
un armistice avec Angora. Au cas où Angora
accepterait cette proposition, des officiers
délégués par Angora et par Athènes se ren-
contreraient dans la zone neutre de Yarindja
pour arrêter les conditions de l'armistice.
A ) -.- (
TETES DE PIPE
GUY-JEAN
DE LUBERSAC
Fortuné, mais grand seigneur ; il faut des
échasses pour lui parler dans les yeux et,
des quatre du nom, il est le mieux titré, puis-
que marquis parmi les comtes.
M, Reibel, qui aime les junkers, l'aime
beaucoup et il fut derrière lui en tout cet ac-
cord ; mais ce ne sont pas des bajoues à la
Reibel que porte le marquis Guy-Jean de
Lubersac, qui a des pommettes circonflexes,
des yeux de' rapace, non verrés, et la mous-
tache, longue, graissée, en accolade. Sans
doute, il est tombé de la fleur de farine sur
te8 cheveux du marquis ; mais c'est à peine
S'il accuse l'âge sénatorial, tant sa longueur
t-t droite, ses flûtes agiles et ses illusions
tenaces. Sa grandeur lui plaît d'ailleurs, si
l'on en juge par les artifices qui l'aggravent :
son veston boutonné, sa longitudinale cra-
vate et ses cols empesés pour cigognes.
Ce fut, durant la guerre, un beau mili-
taire, et pas nécessairement au isens qu'on
donne aux pompiers de Nanterre ; l'habitude
de regarder les gens sur le crâne le jeta dans
l'aviation, où il fut capitaine ; cela lui valut
d'être le candidat « ancien combattant » sur
la liste du sénateur Touron. En sa campagne
électorale il fut bon prince à la méthode des
radicaux, qui, rarement, rencontrent leurs.
pareils : souriant au peuple comme s'il n'a-
vait pas affaire qu'avec le suffrage restreint,
acceptant le verre de mn et serrant les mains
avec sentiment. Les tiiens, qui le croyaient
le plus réactionnaire d'entre eux. l'accusèrent
même de poUticailleric et de démagogie .: l'in.
culpé ne s'en émut guère et ses bristols 11J,-
rent à plusieurs suscriptions, selon les gens
et selon les opérations : il y en eut qui por-
taient avec couronne, le nom de « marquis
Guy-Jean de Lubersac », puis d'autres qui ne
portaient pas la couronne, et d'autres où mar.
quis ne figuraient pas, puis Guy, puis Jean,
puis la particule elle-même. D'aucuns furent
invités à voter pour Lubersac tout simple-
ment.
Mais c'est encore le fameux accord qui, de
lui, étonnera le plus. Les amis, les collistiers,
les journaux du sénateur de l'Aisne ont tou-
jours pris pour des « défaitistes de la paix »
(sic) ceux qui, pour l'application du traité,
parlèrent d'entente avec notre débiteur, et
les membres de la Ligue des Droits de l'Hom-
me, dans l'Aisne, étaient encore désignés par
un index acéré et venimeux pour avoir ap-
plaudi à la manifestation Buisson, au Reich-
stag. Or, le sénateur marquis de Lubersac
vient de signer un pacte avec Sargatanas 1
Qui aurait cru ? Voilà un an qu'à un réfé-
rendum local sur la collaboration allemande,
M. de Lubersac avait omis de répondre. Avait-
il voulu réfléchir, tâter ses compagnons, ses
vassaux et ses coopérateurs, demander aux
guéridons l'avis des Lubersac défunts f C'est
bien là qu'est le mystère, un mystère qui im-
porte peu d'ailleurs ; le tout, c'est de pos-
séder l'accord, qui n'est pas un mystère, pas
davantage une réalisation, mais qui peut le
devenir.
Marc RUCART.
•——— ~a~ ( ——————————
UNE NAGEUSE ÉCHOUE
dans la traversée de la Manche
Elle abandonne à 4 milles de Douvres
Dunkerque, 7 septembre. — Mme Jeanne
Sion, qui vient de tenter la traversée de la
Manche à la nage, est revenue à Dunkerquo
cet aorès-midi, à bord de son convoyeur, le
chalutier Ravageur. Elle a échoué à 4 milles
de Douvres, après 14 h. 30 de nage; elle a
fait, d'après le capitaine du Ravageur, 71 ki-
lomètres sans être fatiguée; elle n'a dû aban-
donner que par suite d'un violent mal de
gorge, provoqué par le mauvais système de
ravitaillement, qui lui a fait avaler de l'eau
de mer au lieu d'aliments. Elle recommen-
cera l'année prochaine dans de meilleures
conditions, et se prétend absolument certaine
du succès.
LES REMÈDES HÉROIQUES
ON V A SOIGNER
les arbres de Paris
Une commission t cODsultative.
est déjà nommée
Les baigneurs qui rentrent des plages de
Bretagne ou simplement de quelque campa-
gne,éloignée de la capitale ne manquent paa
de faire une comparaison, qui est frappante,
entre les arbres de nos boulevards et de nos
avenues, si chétifs et si souffreteux, et ceux
des vallées ou des plaines lointaines. Tandis
que là-bas, même aux approches de l'autom-
ne, le paysage demeure d'un vert extraordi-
nairement vif et frais, Ici les arbres, privés
de presque toute leur parure, ont déjà leur
aspect hivernal. Quelques feuillages jaunis
et racornis demeurent seuls entre des bran-
ches dépouillées. Ou bien quelques secondes
pousses, anémiques et pâles, témoignent que
les pauvres malades font un effort épuisant
pour donner l'illusion qu'ils reverdissent.
Non seulement les arbres de Paris ont pi*
teuse mine sur les boulevards où la poussière]
les brûle et où l'air est particulièrement vi-
cié pour les végétaux comme pour les hom-
mes; mais même dans les avenues de la pé-
riphérie et même dans les jardins publics
où les plantes respirent plus à leur aise, le
spectacle est aussi navrant. A peine sur les
quais, quelques essences gardent-elles encoro
leur chevelure printanière.
Cette situation lamentable des arbres d4
Paris a déjà été signalée plus d une fois. 03
qui ne leur a point valu d'être soignés avec
toute la diligence désirable. La beauté de
Paris laisse trop souvent indifférente nos
compétences municipales et administratives.
Du moins on vient de se décider à enten-
dre le cri d'alarme des amis des arbres. Oui,
les arboriculteurs de l'Hôtel de Ville ayant,
paraît-il, avoué leur impuissance à arrêter
le dépérissement dont nous parlons, on a
nommé, pour les plantations de la capitale.
une commission consultative. Il n'en pou-
vait être autrement et nous voilà bien avan-
cés.
Cette commission est même originalement
composée: on y trouve des ingénieurs (agro-
nomes il faut l'espérer), des professeurs (d'a-
griculture nous le souhaitons) et jusqu'à des
médecins. Pourquoi n'y a-t-on point mis dea
vétérinaires, aussi, tant qu'ciy faire?
Cette commission a découvert que les ar-
bres de Paris étaient, tout comme les Amé-
ricains, au régime sec et qu'il faut les ar-
roser, en prenant soin que l'eau pénètre pro-
fondément en terre et parvienne jusqu'aux ra-
cines. En somme, elle estime que des bains
et des injections amèneront un grand mieux
chez nos valétudinaires.
Peut-être n'était-il pas nécessaire de con-
voquer une savante réunion pour rédiger cet.
te ordonnance. En tout cas on va ausal
analyser les poussières qui se déposent sur
Ja partie aérienne des arbres.
Avant que l'analyse soit finie, sans doute
les arbres seront-ils morts. Mais la commis-
sion a aussi prévu le cas. Si les arbres meu-
rent, on les remplacera au fur et à mesure.
Tout simplement
Louis LE PAGE.
—————————— ;-. - ( ——————————
Un maraîcher tire
sur un automobiliste
La nuit dernière, M. Dominique Picco, su-
jet italien, hôtelier à Saint-Germain-en-Laye,
rentrait chez lui en automobile, lorsque dans
la traversée de Bougival, au moment où il
croisait un groupe de maraîchers se rendant
aux Halles avec leurs véhicules, un coup de
revolver a été tiré dans sa direction. Ayant
ressenti une forte secousse, M. Picco a ar-
rêté sa voiture et s'est aperçu que se £ vête-
ments avaient été traversés par le projet
tile.
M. Picco a aussitôt prévenu les gendarmes
qui se sont mis à la poursuite du groupe
de maraîchers qu'ils ont rejoint près de Rueil.
Les jardiniers, sommés de s'arrêter, ont été
immédiatement fouillés. On a trouvé sur l'un
d'eux, nommé Lucien Peuven, âgé de 19 ana,
un revolver dont une balle avait été tirées
Peuven a reconnu avoir acheté le revolver
le matin même et avoir tiré une cartouche
pour essayer l'arme, sans se rendre compte
qu'à cet instant un automobiliste passait.
Le garçon jardinier a été mis à la dispo*
sition de la justice.
—————————— ~t < ——————————.
Le Reich donnera-t-il
de sérieuses garanties
à nos amis de Belgique?
Berlin, 7 septembre. — Les délégués beb
ges ont eu ce matin une conférence avefc le
docteur Hermès, ministre des finances, qui
a présenté des propositions fermes au nom
du gouvernement du Reich.
Quant à la Belgique, son attitude n'a pas
varié : elle demande des modalités de paye-
ment qui offrent toutes garanties.
D'après certaines informations de source
généralement bien informée, on considère
qu'il serait peut-être possible d'envisager la
solution suivante : les Allemands, qui dispo-
seraient de quelques disponibilités, verse-
raient en argent liquide le montant des
échéances du 15 août et du 15 septembre, soit
100 millions de marks or, et ils donneraient"
des bons du Trésor à 6 mois garantis par
de grands établissements financiers pour les
170 millions restants. On ne sait évidemment
pas d'une façon certaine si cette solution a
des chances de prévaloir au cours des négo-
ciations, mais on considère, dans certains mi
lieux, qu'il est très possible de la faire abou-
tir, le gouvernement allemand s'étant rendu
compte, dans les prises de contact de mer-
credi, que la Belgique est décidée à ne pas
laisser traîner en longueur les négociations,
On croit que la solution interviendra en tout
état de cause avant 48 heures, car les délé-
gués ont pour instructions de rentrer, si pos-
sible, samedi soir à Bruxelles.
Le point de vue optimiste
M. Bebelmans a fait au correspondant de
l'agence Havas à Berlin les déclarations sui-
vantes sur la première journée de négocia-
tions :
« Les pourparlers de mercredi n'ont eu
qu'un caractère préparatoire. Cependant,
nous avons pu constater que le gouverne-
ment allemand part du même point d* vu*
EK k LANTERNE s DOIT ETRE VENDUE DIX CENTIMES K PARIS ET EN PROVINCE
Le Numéro : 10 cmew
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aux Bureaux du Journal
46' ANNEE - N* 16.475
VENDREDI
8
SEPTEMBRE 1922
Directeur-Rédacteur en chefs
FELIX HAUTFORT
Le» manuscrits non inséré»
ne sont pa» rendu»
L'autre métier
Le poète Ernest Prévost a posé, dans
le Figaro, une question qui fait — c'est
copie d'été — couler beaucoup d'encre :
« Un écrivain doit-il avoir un métier
autre que celui de la littérature » ?
Ce sont des écrivains qui ont répondu,
tes uns par oui, les autres par non, et le
reste à côté. Ces derniers ont ergoté sur
le mot : « doit-il » qu'ils ont interprété
jen « peut-il », « est-il souhaitable. ».
Au vrai, ou alors je n'y ai rien com-
pris, M. Ernest Prévost a entendu de-
mander s'il faut que la littérature nour-
risse son homme, ou au contraire s'il
faut que l'homme ait un métier pour
pouvoir faire sa littérature en paix.
J Il me semble bien que jadis, dans le
feu des illusions volontaires et avec le
souci de l'attitude de revendication qui
convient au bel âge, j'eusse proclamé
pue la littérature était un métier et que
jc'était bien le moindre qu'elle fît vivre
jceux qui l'ont embrassée. Oui, peut-
être aurais-je professé cela il y a vingt
ans.
Mais aujourd'hui, au bénéfice de l'ex-
périence et de la réflexion motivée, c'est
tout le contraire qui me paraît juste.
Nous avons vu et éprouvé ce qu'est la
littérature alimentaire : elle est abomi-
nable et c'est une honte !
A quelles saletés ne descend pas le
talent naturel quand il est soumis à la
considération — obligatoire dans les
termes du problème — de la plus grande
jvente possible !
Et au fond et en soi, si la littérature
est si noble, si éthérée qu'elle feint
de le croire et «qu'elle le dit, n'y
a-t-il pas inélégàndt à ce que les mani-
festations en soient rémunérées comme
des heures de terrassier ? Quel désolant
spectacle qu'un v:pomancier discutant
jâprement de ses tirages et supputant ses
profits !
Au point de vue, donc, théorique, c'est-
à-dire critique, comme au point de vue
pratique, il semble préférable que le lit-
térateur ait, à l'origine tout au moins, un
métier — ou des rentes. et on tombe ici,
sans le vouloir, dans la fâcheuse recon-
naissance d'un privilège des riches. Qu'il
ait un métier qui lui permette de laisser
à. son œuvre spirituelle son originalité
essentielle et son indépendance.
⁂
L'équivoque, s'il y en a une, est née
du rapprochement qu'on fait souvent
entre ces deux termes antithétiques :
journalisme et littérature.
Bien sûr que le journalisme est un
métier ! Et celui qui l'exerce y trouve
assez de fatigues pour n'avoir pas à en
iexercer un autre.
Je parle, bien entendu, du vrai journa-
liste, du journaliste-reporter, informa-
teur, de celui qui « fait » le journal, qui
y donne son temps et sa peine matérielle
et même manuelle — par opposition au
Journaliste « d'idée », de critique, qui le
plus souvent réalise le maximum de pro-
fit avec le minimum de peine.
Mais journalisme et littérature — hé-
las ! oh ! combien — sont à peu près ex-
clusifs l'un de l'autre. Quand on s'est cru
littérateur et qu'on a été vingt ans jour-
naliste, on s'en aperçoit parbleu bien !
Mais il est trop tard, et étant devenu l'un
ion a cessé d'être l'autre. Au lieu que si
on avait gratté du papier administratif
comme Huysmans, ou poli des verres de
lunettes comme Spinoza, peut-être eût-
on gardé sinon le talent, du moins l'apti-
tude à en acquérir ?
♦
**
On invoque volontiers le paradoxe de
La Bruyère : « C'est un métier que de
faire un livre. » Oui, c'est un métier
quand précisément la fabrication du li-
vre est organisée professionnellement.
Mais ce que dit La Bruyère est une affir-
mation d'un fait, ce n'est pas l'expres-
sion d'une opinion ou d'un souhait.
Bien plus en situation, bien plus to-
pique — pour en revenir à la question
de M. Ernest Prévost — est l'opinion de
M. Pierre Mille. Maître conteur, roman-
cier rare et journaliste parfait, l'un de
ceux par conséquent auxquels il serait
facile d'ériger le fait en droit, et la prati-
que en théorie, Pierre Mille ne craint pas
de dire : « Selon moi, un homme de let-
tres qui, à vingt ans, se dit : « je: vais
être homme de lettres » et ne fait plus
rien autre est un serin — à moins qu'il
ne soit poète ! »
C'est un serin, n'en doutons pas. Mais
il a l'exemple d'autres serins conforta-
blement établis dans leur serinière. Et
le mal c'est que plus ces serins sont se-
rins et dirais-je sereinement serins, plus
leur serinière est belle, moelleuse et ri-
che !.
En sorte que si l'esprit conclut dans un
sens, je crois bien que la « corruption
des moeurs » a malheureusement conclu
dans l'autre. Notre époque a industrialisé
ce qui devait rester le moins industriel.
Victor SNELL.
———————— ) -.- (
Donner et reprendre
La Chambre de guerre, à la veille des joies
de son départ pour aller devant le pays cher-
cher un nouveau miandat, a voté la loi. de 8
heures — à l'unanimité. Le Sénat, dont les
deux tiers étaient renouvelables, sans grand
délai, l'a également adoptée d'enthousiasme.
L'extrême gauche et les groupements syndi-
caux se sont réjouis d'une si grande et si
complète victoire, qu'ils croyaient définitive.
Hélas! il n'y a rien de définitif en matière
parlementaire.
Hier, le' gouvernement, par deux dffèrats,
pris d'ailleurs en parfaite légalité, a porté une
double atteinte à la loi de 8 heures. MM. Le
Trocquer pour les chemins de fer et M. Rio
pour l'armement, l'un en raison d'indispensa-
bles économies, l'autre pour sauver, dit-il,
l'armement français, abandonnent le strict
principe des huit heures.
Les raisons alléguées par le gouvernement
sont péremptoires; il n'est pourtant pas dou-
teux que la loi des huit heures se heurtait à
d'énormes difficultés pratiques et imposait au
pays des sacrifices considérables, au lende-
main des épreuves de la guerre. Mais ces con-
sidérations ne devaient point échapper en
1919 au législateur clairvoyant, il a donc fait
un geste de démagogue, infiniment déplora-
ble puisque la nécessité oblige le gouverne-
ment de 1922 à reprendre partiellement ce que
les pouvoirs publics concédèrent libéralement
il n'y a pas plus de trois ans.
C'est cette méthode politique qui engendre
les crises et donne à l'agitation extrémiste de
terribles prétextes.
« On a donné, semble-t-i!, par peur, avant
un 1 er mai dont on craignait l'échéance, on
reprend à l'heure où l'on se croit en force. »
C'est ainsi que les syndicalistes ne manqueront
pas d'expliquer ce retour sur une concession
qui paraissait si bien acquise.
Je sais bien que la responsabilité de la
Chambre est encore sauve, mais le sera-t-elle
demain, lorsqu'une inévitable interpellation
l'obligera à se prononcer sur les actes du gou-
vernement ?
Une fois de plus, nous voyons le danger de
faire des lois sociales dont on n'a point exa-
miné l'exacte portée. Il eût été sans doute
meilleur d'appliquer une loi de progrès social
par paliers, sans y revenir; il serait dange-
reux de procéder, à l'inverse, en détruisant
par paliers ce que l'on a fait dans une pen-
sée généreusement démocratique.
F. H.
——————— ) - -.- ( ———————
la terreur allemande en Haute-Silésie
Voici quelques nouveaux faits du mar-
tyrologe polonais en Haute-Silésie alle-
mande. Une bande de l'Orgesch a attaqué
la maison du Polonais Bonner, située dans
une grande rue de la ville de Gleiwitz.
Bonner fut tué, son fils gravement blessé
et la maison dévastée. La municipalité de
Gleiwitz a refusé de rédiger un protocole
sur cet abominable assassinat et contrai-
rement aux lois allemandes en vigueur a
décliné le paiement d'une pension deman-
dée par Mme Bonner. Mme Nocon, de Bor-
ziwerk, et Mme Wajout, de Sosnice, mères
de familles nombreuses et veuves de maris
tombés pendant la guerre dans les rangs de
l'armée allemande, se sont vues également
refuser la petite pension qu'elles touchaient
à ce titre et furent obligées d'émigrer en
Pologne. Enfin, les bandits de l'Orgesch ont
envahi et pillé à fond la maison de Mm'e
Michalik, veuve et mère de cinq fils qui
ont combattu dans les rangs de l'armée al-
lemande et dont quatre furent tués à la
guerre. La malheureuse vieille femme fut
brutalement battue et se sauva en Pologne
en abandonnant toute sa fortune.
-<-———————— :- -.- - ( ——————-———
UNE RENTREE SPORTIVE
La saison de football
va commencer dimanche
Les finalistes de la Coupe de France
à Paris
Une intéressante rencontre doit marquer le
retour de la saison de football dimanche, où
le C. A. P. G. recevra la visite du Stad3
Rennais.
Cette rencontre aura lieu à Charentonneau.
Elle servira de rentrée aux finalistes de la
Coupe de France qui auront à cœur de renou-
veler la belle impression qu'ils causèrent, au
printemps dernier, en ayant raison de l'Olym-
pique de Paris et de l'Olympique lillois et en
ne succombant que de justesse face au Red
Star.
Face aux Bretons, le C. A. P. G. qui tenait
dimanche dernier en échec le R. C. Roubai-
sien, le club le plus redoutable du Nord, cher-
chera à s'imposer par un début triomphal.
Plusieurs des meilleurs footballeurs de
France, les Baudier, Castiger, Devio, Marc,
Moulène, Caballero, participeront à cette
belle rencontre.
APRÈS LA VICTOIRE TURQUE
LES CONDITIONS D'ANGORA
————— -
Galaleddin bey aéclare qu'à des con-ditions nouvelles
doit correspondre une base nouvelle
de discussions à la Conférence de Venise
Rome, 6 septembre. (De notre corres-
pondant particulier.) — Le ministre d'An-
gora à Rome, Gelaleddin bey, a fait à un
de nos confrères des déclarations que nous
reproduisons ci-dessous et dont on appré-
ciera l'importance.
— Il n'était pas humainement possible
que notre gouvernement national puisse
pousser plus loin la patience. Il y a long-
temps que l'Asie Mineure aurait été le tom-
beau de l'armée grecque, si mes compatrio-
tes n'avaient pas hésité devant les maux
que devait fatalement causer une telle opé-
ration ; nous voulions épargner au monde
les horreurs d'une guerre sans merci. Les
violences de l'armée hellénique dans la re-
traite de Saccaria nous ont décidés.
* — Mais les puissances allaient interve-
nir ?
— Nous leur avons adressé deux notes
successives, à la fin du mois d'avril. Nous
demandions l'évacuation de l'Asie 'Mineure,
la signature d'un armistice et l'ouverture
des négociations, nous n'avons pas obtenu
de réponse. L'Angleterre a fait les plus
grandes difficultés ; nous avons envoyé
Fethv bey à Londres, mais il ne fut reçu
par aucun personnage du gouvernement.
Que faire ?. Il ne nous restait plus qu'à
recourir aux armes. Vous savez le résultat;
les Grecs ont dû battre en retraite préci-
pitamment, mais ils se sont livrés à d'abo-
minables cuiautés, incendies, pillages, mas-
sacres : j'ai dû saisir aujourd'hui même
la Société des Nations de ces abominables
méfaits. En raison de l'indifférence sys-
tématique de l'Europe, nous n'avions pas
le choix : le meilleur moyen d'arriver à la
paix, c'était la guerre ; nous avons toute-
fois pris ce parti comme l'ultima ratio,
mais nous sommes pourtant désireux d'ar-
river à une paix juste qui nous rende nos
positions et notre complète indépendance.
— Peut-on vous demander si le point de
vue du gouvernement de Constantinople est
celui du gouvernement d'Angora ?
— Il faut bien considérer que le gouver-
nement de Constantinople est de ipure forme
et non de fait. Il n'a pas de force armée, il
no peut exercer aucune autorité, il n'a
même aucune liberté. Que peut faire un
grand-vizir sous le contrôle étroit de l'étran-
ger? Pour quoi peuvent compter l'opinion et
la presse de Constantinople ? Ce que nous
savons, c'est que tous les éléments otto-
mans sont de cœur avec nous. La victoire
de nos armes a été saluée sur. la Bosphore
avec la même joie qu'à Angora. L'espérance
de résurrection nationale soulève l'enthou-
siasme des populations de la Turquie d'Eu-
rope Qui considère Mustapha Kemal com-
me le sauveur de la patrie. La presse lo-
cale exprime d'ailleurs ces sentiments, ain-
si que vous pouvez vous en rendre compte
en lisant les journaux parvenus auiour-
d'hui de Stamboul.
— Et que ferez-vous de la Conférence de
Venise ?
— Je pense, répond Gelaleddin bey, que
la Turquie doit faire comprendre AUX puis-
sances que deux faits nouveaux doivent être
pris en considération : 1° Le projet qu'avait
formé la Grèce de marcher sur Constanti-
nople, ce- qui démontre que l'Empire otto-
man doit avoir une frontière stratégique
sûre pour éviter de telles menaces et que
cette frontière doit aller à la Maritza, en
comprenant la ville d'Andrinople ; 2° La dé-
bâcle de l'armée hellénique et les actes oui
ont accompagné sa retraite montrent quelle
considération il faut avoir pour la nation
hellène et ssa puissance. Il est certain que
les bases de la Conférence doivent être sen-
siblement modifiées par les événements
nouveaux, elles ne sont plus celles qui fu-
rent fixées à Paris en mars dernier. Sous
ces réserves, nous sommes prêts à ipartici-
per à la pacification de l'Orient.
De toute cette interview et de divers pro-
pos du délégué d'Angora, il résulte qu'en
dépit de leur victoire qui s'affirme complè-
te, les kemalistes sont prêts à engager de*
pourparlers à trois conditions : 1° Evacua-
tion de l'Asie Mineure ; 2° Indépendance
de la Turquie et fixation d'une frontière ;
3" Restitution de la Thrace. — Il ne reste
plus qu'à « causer ».
LA DÉBÂCLE DES GRECS EN ASIE MINEURE.
Le généralissime Tricoupis et son état-major
faits prisonnier par les Turcs
- ii
Les armées d'Angora approchent de Smyrne
Les Alliés font à Constantinople une démarehe
en faveur d'un armistiee
Les dernières nouvelles reçues de Turquie
ne laissent plus de sérieux espoirs sur la pos-
sibilité d'une résistance hellénique prolon-
gée en Asie Mineure.
D'autre part, on annonce que la plus
grande partie des troupes concentrées ces
temps derniers sur la ligne de Tchataldja, en
Thrace, dans l'éventualité d'une marche sur
Constantinople, sont expédiées en toute hâte
vers le nord de l'Asie Mineure pour renfor-
cer l'armée grecque en retraite.
La prise de Brousse par les Turcs rend
fort préicaire la situation de l'armée du Nord.
Les avant-gardes turques approchent ra-
pidement de Smyrne. L'armée grecque du
Sud est, dit-on, encerclée.
Le chef suprême de l'armée grecque, le gé-
néral Tricoupis, nommé tout récemment à
ce poste, était déjlà fait prisonnier, ainsi
que tout son état-major, par les soldats du
Croissant!
Le roi Constantin aurait pris la fuite.
C'est la débâcle !
A Londres on s'en rend fort bien compta
et l'on n'envisage pas sans une certaine ia-
quiétude la suite des événements. La sou-
daineté et la rapidité de l'attaque d'Angora
a manifestement surpris les milieux diplo-
matiques les moins optimistes. On envisage,
dans les milieux britanniques; la situation
qui serait faite non seulement à la Grec*,
mais à la Grande-Bretagne elle-même, au cas
où les Turcs exigeraient maintenant l'éva-
cuation complète de la Thrace.
La chute de Salihli
t.es forces kemalistes du front sud, après
avoir occupé Alkan à l'ouest d'Alacheir, au
kilomètre 163, sur le chemin de fer de Smyr-
ne, sont arrivées à Salihli.
Un corps de 2.000 cavaliers turcs, après
l'occupation d'Eudemiche. se dirige sur
Smyrne.
On prévoit, d'après la tournure actuelle
des choses, que les Turcs arriveront dan»
quelques jours à Smyrne.
Les nouvelles oui annoncent les succès con-
tinus des armées nationalistes remplissent
de joie la population turque de Constantino-
ple ; cependant on n'y remarque rien d'anor-
mal.
[Salihli est situé sur la rive gauche du .euvl-
Alacheir-Tchaï et sur le versant nord du mas-
sif de Bozdagh (mont d'Imolus), dont les cimes
atteignent une hauteur de 1.300 mètres. ia
ville, sur le chemin de fer Alacheir-Smvrne. se
trouve à 40 kilomètres à l'ouest de cette pre-
mière ville, et à 130 kilomètres environ à l'est
de Smyrne.]
La capture du généralissime grec
Constantinople, 7 septembre. — Un télé-
gramme d'Angora dit :
Nos forces qui opéraient aux environs d'Ou-
chak ont fait prisonniers, le soir du 2 sep-
tembre, le général Tricoupis et d'autres offi.
ciers généraux, qui ont été amenés au quar-
tier général kemaliste. Ils sont les hôtes de
Mustapha Kemal pacha, qui les autorise à
donner de leurs nouvelles à leurs familles.
Le Croissant-Rouge de Constantinople a té-
légraphié à la Croix-Rouge hellénique d'Athè-
nes pour lui faire part de la capture de ces
généraux et de l'autorisation qui leur a été
accordée de correspondre avec leurs parents.
Il a avisé également le représentant de la
Croix-Rouge hellénique à Constantinople.
L'armée grecque du sud serait prisonnière
Adana, 7 septembre. — On mande d'Angora
que l'armée grecque du groupe sud vient
d'être encerclée par les troupes kemalistes
dans la région de Salihli où, après une ré-
sistance, elle aurait été faite prisonnière.
D'autre part, on annonce l'occupation de
la ville de Balikesser et celle de Sandirdji
par les troupes kemalistes.
Les avant-gardes turques se trouvent ac-
tuellement à une distance d'une quarantaine
de kilomètres de la ville de Smyrne.
Les Grecs ont continué à incendier tous
les villages se trouvant sur la route de i«ur
retraite.
Les pertes grecques sont évaluées depuis
le commencement des opéiations militaires
à une cinquantaine de mille hommes, dont
une quinzninâ de mille ont été faits prison-
niers par l'armée kemaliste et te reste tués
ou blessés au cours de l'offensive turque.
La nouvelle de la capture de l'armée grec-
que du sud et de l'arrivée des Turcs à en-
viron 40 kilomètres de Smyrne a besoin d'une
confirmation officielle. La prise de Balikes-
cer se rapporte aux opérations de l'armée ke-
maliste du nord.
Moscou félicite Angora
Constantinople, 7 septembre. — On mande
d'Angora que le représentant des Soviets
vient de remettre à Réouf bey, président du
conseil, un message de Karakhan félicitant
le gouvernement nationaliste pour le succès
de ses armées. Dans ce message, qui fut com-
muniqué à la grande assemblée, le gouverne-
ment de Moscou souligne l'importance de
la disparition de l'obstacle qui barrait le che-
min de Constantinople aux kemalistes et
ajoute que maintenant que la mer Noire est
redevenuo un lac russo-turc. la cooD6ration
dans tous les domaines entre la Russie so-
viétique At la Turquie nationaliste sera gran-
dement facilitée et que les puissances impé-
rialistes. ainsi aue leurs avant-gardes. ?tA
heurteront désormais à un front unique al-
lant de la Baltique à l'océan Indien.
Les Grecs songent à démobiliser !
Athènes, 7 septembre. — On affirme dans
les milieux informés que le gouvernement.
grec envisage la possibilité de faire effectuer
la démobilisation de l'armée, après l'évacua-
tion de l'Asie Mineure, dans l'île de Chio,
afin d'éviter des troubles éventuels auxquels
pourrait donner lieu la démobilisation des
troupes dans les garnisons d'Athènes et do
l'intérieur.
Le roi Constantin aurait quitté Athènes (1)
Le Times d'hier matin dit avoir appris
que le roi Constantin aurait quitté Athènes.
Il n'existe jusqu'ici aucune confirmation. dA
cette nouvelle. -
(Voir la suite en « Dernière Heure »)
La proposition anglaise
pour un armistice grêco-iurc
Arrivée à Londres de ta note française
Londres, 7 septembre. — La réponse du
gouvernement français à la proposition an-
glaise relative à un armistice entre les Grecs
et les Turcs est maintenant entre les mains
du Foreign Office.
Elle dit en- substance que le gouvernement
français est complètement d'accord avec le
gouvernement anglais sur l'opportunité qu'il
y aurait à mettre un terme à la lutte qui se
déroule actuellement entre les Grecs et les
Turcs en vertu de la politique toujours sui-
vie par les grandes puissances en Orient afin
d'y éviter les effusions de sang.
La réponse française considère qu'une in-
tervention directe auprès du gouvernement
d'Angora ne paraît pas possible, dans l'état
actuel des choses, mais elle indique que le
gouvernement français donnerait son assis-
tance à tout moyen qui permettrait de faire
un premier pas vers une solution, par les
négociations directes entre les commande-
ments des deux belligérants, comme prélimi-
naires à une médiation alliée.
LA DEMANDE D'ARMISTICE
Constantinople, 7 septembre. — A 11 heu-
res, les trois premiers drogmans français,
anglais et italien ont fait auprès du représen-
tant à Constantinople du gouvernement d'An-
gora une démarche pour déclarer que la
Grèce accepterait l'évacuation de l'Asie-Mi-
neure, à condition de conclure immédiatement
un armistice avec Angora. Au cas où Angora
accepterait cette proposition, des officiers
délégués par Angora et par Athènes se ren-
contreraient dans la zone neutre de Yarindja
pour arrêter les conditions de l'armistice.
A ) -.- (
TETES DE PIPE
GUY-JEAN
DE LUBERSAC
Fortuné, mais grand seigneur ; il faut des
échasses pour lui parler dans les yeux et,
des quatre du nom, il est le mieux titré, puis-
que marquis parmi les comtes.
M, Reibel, qui aime les junkers, l'aime
beaucoup et il fut derrière lui en tout cet ac-
cord ; mais ce ne sont pas des bajoues à la
Reibel que porte le marquis Guy-Jean de
Lubersac, qui a des pommettes circonflexes,
des yeux de' rapace, non verrés, et la mous-
tache, longue, graissée, en accolade. Sans
doute, il est tombé de la fleur de farine sur
te8 cheveux du marquis ; mais c'est à peine
S'il accuse l'âge sénatorial, tant sa longueur
t-t droite, ses flûtes agiles et ses illusions
tenaces. Sa grandeur lui plaît d'ailleurs, si
l'on en juge par les artifices qui l'aggravent :
son veston boutonné, sa longitudinale cra-
vate et ses cols empesés pour cigognes.
Ce fut, durant la guerre, un beau mili-
taire, et pas nécessairement au isens qu'on
donne aux pompiers de Nanterre ; l'habitude
de regarder les gens sur le crâne le jeta dans
l'aviation, où il fut capitaine ; cela lui valut
d'être le candidat « ancien combattant » sur
la liste du sénateur Touron. En sa campagne
électorale il fut bon prince à la méthode des
radicaux, qui, rarement, rencontrent leurs.
pareils : souriant au peuple comme s'il n'a-
vait pas affaire qu'avec le suffrage restreint,
acceptant le verre de mn et serrant les mains
avec sentiment. Les tiiens, qui le croyaient
le plus réactionnaire d'entre eux. l'accusèrent
même de poUticailleric et de démagogie .: l'in.
culpé ne s'en émut guère et ses bristols 11J,-
rent à plusieurs suscriptions, selon les gens
et selon les opérations : il y en eut qui por-
taient avec couronne, le nom de « marquis
Guy-Jean de Lubersac », puis d'autres qui ne
portaient pas la couronne, et d'autres où mar.
quis ne figuraient pas, puis Guy, puis Jean,
puis la particule elle-même. D'aucuns furent
invités à voter pour Lubersac tout simple-
ment.
Mais c'est encore le fameux accord qui, de
lui, étonnera le plus. Les amis, les collistiers,
les journaux du sénateur de l'Aisne ont tou-
jours pris pour des « défaitistes de la paix »
(sic) ceux qui, pour l'application du traité,
parlèrent d'entente avec notre débiteur, et
les membres de la Ligue des Droits de l'Hom-
me, dans l'Aisne, étaient encore désignés par
un index acéré et venimeux pour avoir ap-
plaudi à la manifestation Buisson, au Reich-
stag. Or, le sénateur marquis de Lubersac
vient de signer un pacte avec Sargatanas 1
Qui aurait cru ? Voilà un an qu'à un réfé-
rendum local sur la collaboration allemande,
M. de Lubersac avait omis de répondre. Avait-
il voulu réfléchir, tâter ses compagnons, ses
vassaux et ses coopérateurs, demander aux
guéridons l'avis des Lubersac défunts f C'est
bien là qu'est le mystère, un mystère qui im-
porte peu d'ailleurs ; le tout, c'est de pos-
séder l'accord, qui n'est pas un mystère, pas
davantage une réalisation, mais qui peut le
devenir.
Marc RUCART.
•——— ~a~ ( ——————————
UNE NAGEUSE ÉCHOUE
dans la traversée de la Manche
Elle abandonne à 4 milles de Douvres
Dunkerque, 7 septembre. — Mme Jeanne
Sion, qui vient de tenter la traversée de la
Manche à la nage, est revenue à Dunkerquo
cet aorès-midi, à bord de son convoyeur, le
chalutier Ravageur. Elle a échoué à 4 milles
de Douvres, après 14 h. 30 de nage; elle a
fait, d'après le capitaine du Ravageur, 71 ki-
lomètres sans être fatiguée; elle n'a dû aban-
donner que par suite d'un violent mal de
gorge, provoqué par le mauvais système de
ravitaillement, qui lui a fait avaler de l'eau
de mer au lieu d'aliments. Elle recommen-
cera l'année prochaine dans de meilleures
conditions, et se prétend absolument certaine
du succès.
LES REMÈDES HÉROIQUES
ON V A SOIGNER
les arbres de Paris
Une commission t cODsultative.
est déjà nommée
Les baigneurs qui rentrent des plages de
Bretagne ou simplement de quelque campa-
gne,éloignée de la capitale ne manquent paa
de faire une comparaison, qui est frappante,
entre les arbres de nos boulevards et de nos
avenues, si chétifs et si souffreteux, et ceux
des vallées ou des plaines lointaines. Tandis
que là-bas, même aux approches de l'autom-
ne, le paysage demeure d'un vert extraordi-
nairement vif et frais, Ici les arbres, privés
de presque toute leur parure, ont déjà leur
aspect hivernal. Quelques feuillages jaunis
et racornis demeurent seuls entre des bran-
ches dépouillées. Ou bien quelques secondes
pousses, anémiques et pâles, témoignent que
les pauvres malades font un effort épuisant
pour donner l'illusion qu'ils reverdissent.
Non seulement les arbres de Paris ont pi*
teuse mine sur les boulevards où la poussière]
les brûle et où l'air est particulièrement vi-
cié pour les végétaux comme pour les hom-
mes; mais même dans les avenues de la pé-
riphérie et même dans les jardins publics
où les plantes respirent plus à leur aise, le
spectacle est aussi navrant. A peine sur les
quais, quelques essences gardent-elles encoro
leur chevelure printanière.
Cette situation lamentable des arbres d4
Paris a déjà été signalée plus d une fois. 03
qui ne leur a point valu d'être soignés avec
toute la diligence désirable. La beauté de
Paris laisse trop souvent indifférente nos
compétences municipales et administratives.
Du moins on vient de se décider à enten-
dre le cri d'alarme des amis des arbres. Oui,
les arboriculteurs de l'Hôtel de Ville ayant,
paraît-il, avoué leur impuissance à arrêter
le dépérissement dont nous parlons, on a
nommé, pour les plantations de la capitale.
une commission consultative. Il n'en pou-
vait être autrement et nous voilà bien avan-
cés.
Cette commission est même originalement
composée: on y trouve des ingénieurs (agro-
nomes il faut l'espérer), des professeurs (d'a-
griculture nous le souhaitons) et jusqu'à des
médecins. Pourquoi n'y a-t-on point mis dea
vétérinaires, aussi, tant qu'ciy faire?
Cette commission a découvert que les ar-
bres de Paris étaient, tout comme les Amé-
ricains, au régime sec et qu'il faut les ar-
roser, en prenant soin que l'eau pénètre pro-
fondément en terre et parvienne jusqu'aux ra-
cines. En somme, elle estime que des bains
et des injections amèneront un grand mieux
chez nos valétudinaires.
Peut-être n'était-il pas nécessaire de con-
voquer une savante réunion pour rédiger cet.
te ordonnance. En tout cas on va ausal
analyser les poussières qui se déposent sur
Ja partie aérienne des arbres.
Avant que l'analyse soit finie, sans doute
les arbres seront-ils morts. Mais la commis-
sion a aussi prévu le cas. Si les arbres meu-
rent, on les remplacera au fur et à mesure.
Tout simplement
Louis LE PAGE.
—————————— ;-. - ( ——————————
Un maraîcher tire
sur un automobiliste
La nuit dernière, M. Dominique Picco, su-
jet italien, hôtelier à Saint-Germain-en-Laye,
rentrait chez lui en automobile, lorsque dans
la traversée de Bougival, au moment où il
croisait un groupe de maraîchers se rendant
aux Halles avec leurs véhicules, un coup de
revolver a été tiré dans sa direction. Ayant
ressenti une forte secousse, M. Picco a ar-
rêté sa voiture et s'est aperçu que se £ vête-
ments avaient été traversés par le projet
tile.
M. Picco a aussitôt prévenu les gendarmes
qui se sont mis à la poursuite du groupe
de maraîchers qu'ils ont rejoint près de Rueil.
Les jardiniers, sommés de s'arrêter, ont été
immédiatement fouillés. On a trouvé sur l'un
d'eux, nommé Lucien Peuven, âgé de 19 ana,
un revolver dont une balle avait été tirées
Peuven a reconnu avoir acheté le revolver
le matin même et avoir tiré une cartouche
pour essayer l'arme, sans se rendre compte
qu'à cet instant un automobiliste passait.
Le garçon jardinier a été mis à la dispo*
sition de la justice.
—————————— ~t < ——————————.
Le Reich donnera-t-il
de sérieuses garanties
à nos amis de Belgique?
Berlin, 7 septembre. — Les délégués beb
ges ont eu ce matin une conférence avefc le
docteur Hermès, ministre des finances, qui
a présenté des propositions fermes au nom
du gouvernement du Reich.
Quant à la Belgique, son attitude n'a pas
varié : elle demande des modalités de paye-
ment qui offrent toutes garanties.
D'après certaines informations de source
généralement bien informée, on considère
qu'il serait peut-être possible d'envisager la
solution suivante : les Allemands, qui dispo-
seraient de quelques disponibilités, verse-
raient en argent liquide le montant des
échéances du 15 août et du 15 septembre, soit
100 millions de marks or, et ils donneraient"
des bons du Trésor à 6 mois garantis par
de grands établissements financiers pour les
170 millions restants. On ne sait évidemment
pas d'une façon certaine si cette solution a
des chances de prévaloir au cours des négo-
ciations, mais on considère, dans certains mi
lieux, qu'il est très possible de la faire abou-
tir, le gouvernement allemand s'étant rendu
compte, dans les prises de contact de mer-
credi, que la Belgique est décidée à ne pas
laisser traîner en longueur les négociations,
On croit que la solution interviendra en tout
état de cause avant 48 heures, car les délé-
gués ont pour instructions de rentrer, si pos-
sible, samedi soir à Bruxelles.
Le point de vue optimiste
M. Bebelmans a fait au correspondant de
l'agence Havas à Berlin les déclarations sui-
vantes sur la première journée de négocia-
tions :
« Les pourparlers de mercredi n'ont eu
qu'un caractère préparatoire. Cependant,
nous avons pu constater que le gouverne-
ment allemand part du même point d* vu*
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