Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1910-01-06
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328051026
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 janvier 1910 06 janvier 1910
Description : 1910/01/06 (N3190,A27). 1910/01/06 (N3190,A27).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
Vingt-septième année. —N° ?!S8
JEUDI 6 JANVIER im
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SUPPLEMENT. 9. RM Taitbout
# BOMMAIRB
Ou jeuedi 6 janvier iM
Paméla.-Causerie.
teuilledevigne. — Echos.
Bobèche. — Mon petit cinématographe.
George Auriol. — Le cceur sur la main.
Paul Bonhomme. — L'Oie.
Ch. Boudesseul. — Sérénade Moderne.
Léopold Julien. — Une trahison.
l'. Vigné d'Octon. — La douloureuse veillée.
R. Régis-Lamotte. — La Vestale.
Contex-Lachambre, — L'Amour & tout prix
(suite).
E.-G. Glück. - Le gros lot.
Henry Zubéry. — Le télégramme,
Boud'Nor. — Tas de pavés.
STriboulet. — Au théâtre.
Michel Provins. — Le docteur Juliette (noU-
velle dialoguée-feuilleton.)
CAUSERIE
il { : j c • r *
TRAITE DES BLANCHES
«vwv
¡<. Un journal qui fait profession d'of-
frir ses colonnes aux communiqués de
certaines Ligues soi-disant moralisa-
trices insérait l'autre jour ce véhément
cri d'alarme s
a Le voyageur français qui visite les
Etats-Unis est douloureusement affecté
par les allusions fréquentes dans la con-
versation, dans les journaux, sur le
théâtre, aux mauvaises mœurs de no-
tre nation. Alors que nous pouvons
nous regarder à bon droit comme un
des peuples les plus décents de la terre,
Sans affectation, sans hypocrisie, et
l'un des peuples qui pratiquent le plus
naturellement les vertus familiales, la
France passe pour un foyer de dépra-
vation, et Paris pour la Babylone mo-
derne. Nous devons cette réputation en
partie à notre littérature scandaleuse,
en partie à la prospérité d'un mons-
trueux trafic :: la traite des blanches.
'<( La presse enregistre à chaque ins-
tant, mais avec une pudique réserve,
des opérations de police ou des arrêts
oe justice qui se rapportent à la ques-
tion. Il s'agit pourtant du plus terri-
ble péril auquel soient exposées les jeu-
nes filles pauvres, isolées, sans con-
seil, sans appui dans les grandes villes.
« Le dur avertissement qui nous ar-
rive aujourd'hui d'Amérique doit être
entendu.
« L'importation des femmes aux Etats-
-Unis en vue de l'abominable esclavage
avait pris, dans ces dernières années,
un si grand développement que le ser-
vice d'immigration a décidé une enquê-
te et l'a conduite, avec énergie. Le rap-
port de la commission d'enquête vient
d'être remis au Congrès de Washing-
ton. Il en ressort que la France occupe
le premier rang dans le monde parmi
les pays exportateurs de prostituées ; le
japon vient ensuite, et la Chine en troi-
sième place. »
Il n'y a évidemment pas lieu d'être
fiers d'une telle supériorité et l'indigna-
tion de notre conïrère nous semblerait
éminemment louable, s'il bornait son
ambition à chercher les moyens prati-
ques d'entraver ce honteux trafic.
Mais où nous ne pouvons nous em-
pêcher de le trouver un tantet. ex-
cessif, c'est lorsqu'il attribue le fléau
à quoi. ?
fe vous le donne en mille !
- Au sans-gêne un peu trop décolleté
de nos peintres et de nos sculpteurs !
Apelle qui l'eût cru ? Phidias qui
l'eût dit ?
: Vous pensez que j'exagère ? Lisez
plutôt :
« Dans le monde entier, nous laissons
se répandre et s'enraciner des juge-
ments qui nous font le plus grand lort.
Nous subissons une déconsidération
morale ; nous subirons ensuite des pré-
judices économiques et politiques à l'in-
fini.
« A l'exposition de Saïgon, par exem-
ple, des artistes français avaient en-
voyé des nudités comme nous en
voyons maintenant sans broncher dans
nos divers Salons de peinture : des nu-
dités qui ne sont point chastes à la mo-
de antique, mais provocantes - à la ma-
inière montmartroise. Et sur ce détail,
nos sujets d'Extrême-Orient se sont fait
une idée révoltante de la femme fran-
çaise, de sa condition sociale, de notre
civilisation. »
Sans être curieuse, je voudrais bien
savoir en quoi le nu montmartrois est
plus subversif que le nu attique ou le
nu romain ?
Et je ne puis assez plaindre les jurys
artistiques de l'avenir dont la tâche de-
viendra singulièrement délicate, s'il
leur faut établir de subtiles distinc-
tions morales entre le nu de Montmar-
tre et le nu du Montparnasse, le nu de
Carcassonne et le nu de San Francisco !
Mais revenons à la traite des Blan-
ches.
Je causais de cette plaie récemment
avec un homme austère qui n'était pas
loin de partager l'opinion du journa-
liste que je viens de citer.
Notre littérature légère, nos images
un peu lestes, tels étaient, selon lui,
les pelés, les galeux d'où venait tout le
les pelés, les galeaux d'où venait tout le
— Mais, protestai-je, il n'est pas à ma
connaissance que le Japon et la Chine,
nos concurrents les plus proches en ce
peu enviable record, aient jamais passé
pour particulièrement pervertis par
l'audace de leurs écrivains ou l'indécen-
ce de leurs artistes.
1- Vous détournez la question. - ,.
Pour mieux l'examiner sous toutes
ses faces. Par contre, il est avéré que
la misère est grande dans les basses
classes de ces deux nations, a natalité
trop nombreuse.
— Je ne le conteste point.
— Alors concluez donc avec moi que
là est la véritable source de la perte
de tant de pauvres filles ! Si la rapa-
cité des employeurs leur assurait des
salaires de nature à ne point les laisser
mourir de faim, moins de malheureu-
ses se résigneraient à écouter les falla-
cieuses promesses des marchands do
chair humaine 1 Ce n'est pas dans l'en-
crier de nos prosateurs ou de nos poè-
tes, ce n'est pas sur la palette de nos
peintres, sous l'ébauchoir de nos sta-
tuaires qu'il faut aller chercher les ger-
mes de corruption funestes à trop d'in-
nocentes. C'est dans la promiscuité
des ateliers d'affameurs où le « bétail »
féminin trime quinze heures par jour
pour gagner trente sous.
— Vous vous égarez, madame.
Vous n'avez aucune notion des moyens
à employer pour résoudre le problème
qui nous occupe. Croyez-moi, laissez
aux hommes compétents dont je m'ho-
nore de faire partie, le soin de prendre
les mesures qui conviennent. Justement
nous avons-tout à l'heure séance à la
Société de Protection des Jeunes Ames.
Vous permettez que je vous quitte. Je
craindrais d'être en retard. Il faut en-
core qu'auparavant je passe à mon usi-
ne de faux-cols. Le temps de ren-
voyer quelques ouvrières qui ont eu
l'aplomb ide demander de l'augmenta-
.tion. ! ! !
ex-marchaude de frivolités.
PAMELA
ECHOS
Oh ! ces Américains 1
La semaine dernière un riche Yankee se pré-
sente chez une modiste et après avoir comman-
dé, au hasard, une demi-douzaine de chapeaux,
il pénètre dans l'atelier dont il avait yu la porte
s'ouvrir.
Là, il regarde ; puis, froidement :
— Mesdemoiselles, j'étais venu à Paris pour
amuser moi ; j'étais très riche. Si l'une de vous
veut être mon femme pendant quinze jours je
lui donnerai vingt mille francs.
A ce moment, comme toutes ces demoiselles
se levaient d'un seul bond, la patronne, jeune
encore, saisit .notre Américain, le fit pirouetter
et l'entraîna hors l'atelier criant :
-- Vous n'êtes point honteux, monsieur de
faire une semblable proposition a d'honnêtes
jeunes filles.
Et, comme l'Américain allait s'excuser :
— Est-ce que je ne suis pas à votre service,
moi, continua en riant notre délurée patronne.
— Aoh ! Vous ou une autre cela m'est tout
à fait indifférent, - répondit notre homme, oar
je consftatais que vous pouviez également faire
l'affaire de moi.
- :)(1 .--
Il est question d'une rue d'Ennery. Le Con-
seil municipaJ, saisi du projet, hésite, Henri Ro.
chefort. appuie l'idée, car il resta l'ami d'Adol-
phe d'Ennery, encore qu'il n'estimât guère son
talent.
Il racontait, l'autre jour. leurs relations.
— D'Bnnery, disait Henri Rochefort, aimait,
au milieu de ses dîners du dimanche, 6 m'inter.
peller d'un bout de la ttable à l'autre en ces
termes amicaux, mais désobligeante :
— Hein ! quand vous étiez au bagne, on ne
vous servait pas une nourriture aussi' bonne
que celle-4à ?
Et, quand il avait perdu une partie, il me lam-
çait cette apostrophe :
— Ça m'apprendra à jouer avec un ancien
forçat.
Il me fit un jour, ce reproche :
— Vous ne parlez jamais de moi dans vos
articles. Est-ce que de temps à autre vous ne
pourriez pas écrire que j'ai beaucoup de ltalent ?
A quoi je lui répondis :
— Je ne demande pas mieux, à la condition
que dans un de vos drames un de vos person-
nages s'écriera : « Je viens de lire un charmant
article d'Henri Rochcfort. » 'Je n'ai aucune rai-
son de vous faire de la réclame quand vous ne
m'en faites jamais.
—-X -—
On a conté nombre d'anecdotes sur Lêopold II.
En voici encore deux qui prouvent que le roi
défunt avait 'beaucoup d'esprit.
On saiit sa réponse lit ce brave ecclésiastique
qui s'était permis de lui signaler le mauvaîs
effet produdt par une liaison trop affichée.
— Vous avez cru alors ce qu'on vous racon-
tait, monsieur le curé ?. On m'avait dit pré-
cisément la même chose de vous ; je n'en ai
rien cru, mai.
On connait moins une autre, qu'il fit un jour
à un sénateur vertueux qui lui dénonçait avec
indignation la prouesse d'un agent de la force
pub\1üque, lequel, au Congo, avait mis à mal en
publique, lequel, au Cong, trois ou quatre jeunes
un court temps d'horloge, trois ou quatl'~ jeunes
négresses.
— En si peu de temps !. Voilà, monsieur le
sénateurs un homme bien remarquable 1
--Ii X-
Etant en visite dans une petite ville de la
vallée do la Meuse, il y a quelque trente ans,
le roi se vit inviter par le bourgmestre à dégus-
ter un verre de vin du pays que celui-ci avait
en cave.
— Excetient., monsieur le bourgmestre.
— Votre Majesté trouve. Eh bien t j'en ai
encore des bouteilles qui sont supérieures.
- Vraiment, monsieur le bourgmestre. Et
vous les gardez sans doute pour une meilleure
occasion.
-:x-
C'est un cul-de-jatte. Installé dans une sorte
de caisse d'emballage à roues, à l'aide de deux
bois à poignée, il se promène dans les. rues.
De temps à autre. il s'instadle à un carrefour
et tend humblement sa casquette vers les pas-
sants. On s'apitoie facilement et ce cul-de-
jatte jovial encaisse avec le sourire les oboles.
Il professe ce métier jusqu'à une heure avan-
cée dans la nuit., après la sortie des théâtres
et des cafés.
Comme il habite dans l'avenue de Clichy, le
problème se pose, sa soirée terminée, de ren-
trer rapidement chez lui. II a trouvé un truc
ingénieux. Au passage, il attrape d'une main
la suspension d'un fiacre montant dans la dirsc-
tion de son domicile et, triomphalement, il se
laisse voiture. -
Et c'est, ainsi, chaque soir, qu'il profite, sans
bourse délier, du rapide sapin qu'il lâche dans
le voisinage M M. demeure. - >
Du Feu SÉVP,,
— Si c'est du feu que vous apportez, soyez les bienvenus, car mon amant en af
bien besoin 1
Conseils à mon pipelet :
La corne qui, déjà, fournissait à nos élégan-
ces les boutons et les peignes, dote la fashion
d'un nouvel ornement. Le grand chic conseille,
aux dandies la- canne en oorne de rhinocéros.
Il peut paraître surprenant, a priori, que la
corne de rhinocéros fournisse un gourdin à Paul
Déroudèce ou un stick à Henry Bernstem. Mais
il faut savoir que la longueur de cet appendice
se double d'un prolongement interne qui per-
met de tailler, dans la masse, longue tige et
çourbe poignée.
Les rhinocéros ont la oorne tenace et bien im.
plantée. Et c'est Itrès parisien. -
Une canne de rhinocéros bien teintée vaut ac-
tuellement trente loyis. - - 1
Jean des Hêtres jouit de la vie sans chercher
à en approfondir les mystères et cela lui per-
met de garder une bonne humeur perpétuelle.
A la fin de la saison, il était au château de
V., non loin d'Angoulême. M. de V. est ma-
rié à la plus charmante des femmes et a de
plus une sœur et trois cousines exquises.
Jean des Hêtres, le (premier soir, alors qu'il
était rentré dans sa chambre et qu'ayant souîu6
sa bougie, il allait étendu en son lit, se livrer
au sommeil, entendit la porte s'ouvrir.
— Qui est là, fit-il surpris 2
— Personne, répondit une voix bien timbrée.
Et, peu après, il se sentait enlacé par deux
bras nus.
Jean des Hêtres est un homme poli et devant
l'avance qui lui était faire, i4 ne crut pas devoir
reculer. La nuit fut superbe.
Le matin, avant que le jour se montrât, on le
quitta, en lui disant qu'on reviendrait s'il ne
cherchait pas à savoir qui l'on était.
Jean promit et on lui tint parole.
Tout le temps qu'il resta au château de V.,
il eut une compagne la nuit et pas un instant ill
ne chercha à savoir qui elle était.
Etait-ce la femme, la sœur ou une des cou-
sines de V.
— Que m'importait l'étiquette, me dit-il, puis-
que le fruit était bon.
Jean des Hêtres jouit de la vue sans chercher
à en approfondir les mystères : c'est un sage.
—X—
On rapiporte cette curieuse anecdote sur l'il-
lustre Bjœnstjerne Bjœrnson, qui est actuelle-
ment malade à Paris :
Bjœrnson n'est pas qu'auteur dramatique. Il
a fait de la politique et s'est révélé admirable
orateur. Il était dès longtemps partisan de la
séparation de la Norvège d'avec la Suède, et un
jour qu'il avaitt prononcé un discours sur ce
sujet, un ministre en soumit le texte à Oscar II.
Le roi commença la lecture du discours et,
bientôt emballé, se mit à en déclamer des pas-
sager, non sans s'interrompre parfods pour
dire ;
— Est-ce beau tout de même ? Est-ce beau î
Le ministre n'insista pas. Il dut trouver, ce
jour-là, que le roi Oscar n'était pas sérieux.
-.x.-
En tout, il y a la manière :
M. Alfred Valette, directeur du Mercure de
France, se vante de n'avoir jamais mécontenté
aucun écrivain. -
— Mon système est bien simple, dit-il, Je ré-
serve toute mon amabilité pour les auteurs dont
je refuse la copie. Ceux que j'imprime sont
contents de moi par céda même. Pour les au-
tres, je suis un père. Je m'inquiète de leur santé.
Je fais de leur « rendu » un joli petit paquet,
bien ficelé. Et je les raocompagne au moins jus-
qu'à la moitié de l'escalier.
X
Le bon gros Oscar « ce petit quart d'agent ae
change 1) en est resté tout éberlué.
Il a Juliette pour maîtresse et Juliette lui 1
juré une fidélité de caniche. :
Or, il a appris que lorsqu'il n'allait pas mil-
cher chez elle, c'était un voisin de la belle ijuj
le remplaçait au lit. j
Furieux il s'est rendu chez la misérablelui cqprodter sa trahison, et la naive epjaûî n'e
rien caché : elle a tout avoué, mais il n'a pu
dui garder tfaheune.
— Oui, a-t-elle déclaré, oui, quand tu ne viens
pas, Je prie mon voisin, M. Jacques, de venir
coucher avec moi, mais rassure-toi, ce n'est pas
par amour. Nous ne nous aimons ni l'un ni
l'autre. Il vient uniquement par pure bonté,
pour me rendre service. Je suis poltronne, tu le
sais ; eh bien, rester seule en mon lit, dans
mon hôtel m'est tout à fait impossible. Et je te
jure qu'à ne se passe rien entre nous.
Et comme Oscar semblait douter. ¡
— Oh chéri, si je lui permets de temps en temps
quelques familiarités, va, ce n'est que par sim-
ple politesse. Je le dérange, le forçant à décou-
cher ; je lui dois bien quelques égards ; mais
rassure-toi, il n'y a pas d'amour.
'-
Voici quelques phrases, authentiquement pro-
férées au Pallais-Bourbon au cours des derniè-
res séances sur le tarif des douanes et le bud-
geLt.'éloquent M. Lefas répons au non moins élo.
qûent M. Lebouicq :
« Les veaux sont mis en appétit par les chè-
vres que protège M. Leboucq dans cinq posi-
tons différentes. »
H s'agit — rassurez-vous ! — du commerce
de ganterie. Et encore celle-ci :
« Moi, peau, je vous dis & vous, chaussures,
« Moi, peau, je vou ! Mais nous, veaux pi-
qués, veaux cirés, veaux yemis, que devenons-3
nous ? w
Hélas, chers veaux, veaux vous êtes, veaux
vous resterez f
Hier, on discutait le budget de l'agriculture, ei
on parla volontiers d'étalons.
« La diminution du nombre des saillies prend
»
Et cette
son cette autre image non moins fiâiâfe ï
« Donnez-nous un bon outil, nous yous dorons
de (bonnes ràoes. va .,
Vous avouerez qu'outil est ici un charmant eu-
phémisme. -
--X088l!J
r;. jolie V. qui charme les habitués d'un
music-hall des boulevards, est aillée voir l'autre
jour sa mère qui habite à trois kilomètres d'une
petite gare de- Seine-et-Oise. Force lui fut de
prendre une carriole pour se faire conduire au
village où demeure la chère maman.
- Le cheval part à vive allure. Au bout de quel-
ques instants le paysan se retourne et lui de-
manda ;
— Dites donc 1 Est-ce que yous avez des
fausses dents ?
— Insolent ! fait-elle, indignée.
— Oh ! (madame, ce n'est pas par insolence,
reprend le conducteur, c'est parce que la route
est mauvaise, que les cahots sont durs, et
que, si vous aviez des fausses dents, vous feriez
peut-être aussi bien de les mettre dans votre
poche !.
On sait les lenteurs de la procédure française
qui permettent de dire que la justice est bot-
teuse. En Amérique, il n'en est pas heureu-
sement de même.
La Cour suprême, devant laquelle se présen-
tait, Mrs John Jacoto Astor, femme du milliar-
daire bien connu, plaidait en divorec. Le procès
fut entendu à huis-clos et il s'est écoulé exac-
tement 55 secondes entre le dépôt de la de-
mande en divorce et la sentence accordant la
pétition.
En moins d'une minute Mrs Astor a obtenu
son divorce et une somme de 50 millions &
titre de dommages-intérêts.
•%
m Ts W iz
A l'école 'lÈtaïre Î ,.
- Citez-moi le oom a'iiftf j****" -ai
fourrures î
Le jeune Calino vivement :
C~Mf@iN' 0'~tCtaa~ <
Chez l'épicier : -
- Donnez-moi une livre de 1116. ell-yous*
plaît ? moi une Uee 'dâ [Ee. Gril-Y-PU>
— Du thé noir ou du thé vert, mademoi-
selle ?. Is
— Oh } ça ne fait rien WJ Ca bourgeoise
est aveugle f
Question sociale il .-
.— fin somme. que steulent les çlasses labo-
rieuses ? ..,
— Elles veulent cesser de l'être.
—X—•
- ? quelle heure part le train pour Beau-
vais ? demande un voyageur.
- A huit heures quinze, répond l'employé du
chemin de fer -
- III n'y en a pas avant ?
— Non. ils sont tous & vapeur.
Feuille de vigne.
J". If '[
MON PETIT CINEMATOGRAPHE
LA GALETTE DES ROIS 1,
(Sur l'air ; Enfilons les aiguilles de bois)
Une antique tradition
Veut qu'au jour de l'Epiphanie
On prenne l'indigestion
Par une galettomanie !
A cet usage suranné -
Il faut selon moi qu'on renonce
Car, pour peu qu'on ait raisonné
Sur l'apophtegme que j'énonce
Chacun conclura, je le crois
De Montparnasse à La Villette :
? Supprimons la Galette des Rois 3
Les Roig ont trop d'galette 1 »
On l'a bien vu quand, récemment
Léopold a cassé sa. pipe : -
Il laissa, ce royal amant
Des millions à sa guenippe l
De,tant de billets, de tant d'or
Sa, fortune, dit-on, fourmille
puil en restera même encor
Un matelas pour sa famille 1
N'avons-nous donc pas tous les droits
A chanter devant son squelette : -:-
opm la Galette des Rois :
::L£\S îîois ont trop d'galette 1 *
?Aw( frâis dé leurs sujets naïfs
Nous. les monarques à la ronde
t'e font, à des taux lucratifs
Des trésprs dignes de GoJconde 1
Guillaume „II est très douiUard ;
Le tsar a -de fortes finances
De ses créanciers Edward
-W soldé toutes les créances 1
Alplonse peut, de deux ou trois
|Vutos par mois Caire l'emplette.
^S toprtooife la Galette des Rois i
Les Rois ont trop d'galette 1
Même les moins favorisés , .,
Des dons de l'aveugle déesse
Sont, comme on dit, plutôt aisés.
Qu'ils soient de Turquie ou de Grèce.
Chacun a son petit magot :
Il n'est pas, nul ne le dénie,
Jusqu'au Prince de Monaco
Qui n'ait la bourse bien garnie !
Donc, nous, dont les budgets étroits
Prouvent une dèche complète,
w iSu.pp'ntmoins Ja Galette des Rois :
Les Rois ont trop d'galette 1 l'J t
Vous tous qui, comme des moutons,
Payez ces tributs arbitraires,
A cesser nous vous exhortons,
"D peuples d'Europe, nos frères 1
-LF>IUS de majorats, plus d'impôts 1
Pour grossir la liste civile 1
A vos tyrans. collez. la peau,
De Saint-Pétersbourg) à Séville
italiens ou Bavarois, -.'
cars de l'Islande ou de la Crête.
a Supprimez la Galette des Rois :
Les Rois ont trop d'galette t !! *
'.1', , ., Bobèche.
LE CŒUR SUR LA MAIN
-
La pluie avait cessé pour faire place à
JUH radieux soleil automnal, l'idée me vint
bien que le « fond de l'air » fût, comme on
dit, assez frais, dQ chausser une fods encore
mes souliers jaunes et d'aller faire un petit
tour, muni de mon vert parasol.
C'était moins, soyez-en persuadés, pour
me procurer l'illusion d'un été tardivement
prôtegé par saint Martin, que pour assortir
ma tenue à celle de la nature.
Le petit bois à l'orée duquel je m'étais
proposé d'aller Flâner se décore, en effet, à
cette époque-ci, 'des oranger les plus somp-
eux, — et même, il ne craint pas d'y
meler quelques verdures printanières.
Bref, équipé comme j'ai dit, et sans crain-
te du qu'en-dira-t-on, je me mis en route,
bien décidé à faire main basse sur tous
les champignons assez imprudents pour
s'aventurer dans mon chemin. — Mais
j'eus, dès le début, bien d'autres chats à
fouetter.
Dans la petite sente aux noisettes, je ren-
contrai tout d'abord une pauvre vieille fem-
me nonagénaire qui gémissait, assise sur
un matelas sordide. Touché de son infortu-
ne, je lui remis une pièce de dix sols, et
elle m'avoua que, le matin même, elle avait
été, pour une misérable dette de trois
francs, chassée de sa modeste cabane par
M. Pain, son propriétaire.
Après un interrogatoire supplémentaire
suivi de 50 autres centimes, j'appris qu'il
s'agissait, non d'un quelconque M. Pain,
mais bieni de Edouard Pain, l'homme le
plus charitable du pays, et je n'en revins
pas, — car j'avais toujours entendu dire
qu'il , avait « le coeur sur la main ».
Puis, ce furent six petits enfants en bas
Age et seulement vêtus de vestiges qui s'of-
frirent è. mon regard pitoyable. M. Pain
les avait également jetés dehors comme
une potée de petits pourceaux. — M.
Edouard Pain 1. j'en fus bleu l
Cette demi-douzaine de jeunes citoyens
réconfortée par ce qui me restaiit de menue
monnaie, j'espérais pouvoir continuer pai-
siblement ma promenade, quand, au car-
refour des Trois-Poules-Borgnes, je vis ve-
nir, habillé de noir et sanglotant à fendre
l'âme, maître Théodore Picachon, huissier.
Je m'enquis incontinent du motif de sa dou-
leur et :
— Monsieur, me dit cet homme erdmaî-
rement dur, vous me voyez désolé. A la
requête de M. Edouard Pain, je viens 'de
vendre jusqu'à la dernière chemisé du pau-
vre Thomas Eoc, a~~l~b~ de t% fa-
rine impériale. Le désespoir ile ce vétéraf
m'a si profondément touché qu'il m'a été
impossible de rien prendre ce matin.
Afin de séoher les larmes de i'ofMec
ministériel, je lui offris un cigare. Après
je lui fis part de la stupeur que me causait
le oas incompréhensible de M. Pain.
- Enfin ! glapis-je, il est riche et brave 1
C'est incontestablement l'homme le plus
charitable de la contrée ! On dit couram-
ment de lui qu'il a le cœrur sur la main 1
D'ou vient alors qu'il ait subitement re.
tourné sa veste d'agneau et que, justement
elle soit doublée de peau de loup ? Car il
n y a pas à dire, M. Pain est connu à vingt
lieues pour son inépuisable générosité f
Nulle infortune n'a jamais frappé en vain
à sa. porte, Il donne aux pauvres, au bu-
reau de bienfaisance, aux hospices et aux
ouvroirs ! Il distribue de la soupe, de la
viande et des vêtements j et vraiment l'ex-
pression que le peuple a, trouvée pour la
peindre est la seule qui lui convienne : (f Il
a le cœur sur la main, »
— Il l'avait, dit une voix, mais il ne 1 a
plus !
Cette voix était celle de César, le facteur
rural.
— Que voulez-vous dire ? fis-je en mg
tournant vers ce postal fonctionnaire.
César prit dans son sac un mouchoir. H
déplua le mouchoir, en tira une boîte dl
bouleau, ouvrit cette boîte, y prit une pin-
cée de tabac et me regarda fixement.
— Je veux dire. murmura-t-il.
Ici, César introduisit la pincée de tabac
dans sa narine droite. Puis, ayant forte-
ment reniflé. il poursuivit :
— Voilà ce que je veux dire c: il est très
exact de constater que M. Pain avait le
cœur sur la main, mais il est plus exact
encore d'affirmer qu'il ne l'a plus, et voici
pourquoi : jeudi dernier, M. Pain a visité la
fabrique de baguettes de tambour, — et il
a eu les deux mains coupées par une scie
circulaire.
George Auriol.,
L'OIE
Par PAUL BONHOMME
Pour aller fêter les Vois au Grand-Mes-
nil, chez les Vasseur, Césarin Mottet de-
vait prendre le chemin de fer à la gare de
Torcy-sur-Eure. Voulant bien faire les cho-
ses, il s'était promis d'apporter une oie. IL
avisa donc la plus grasse de ses élèves,
la coucha toute vivante dans un panier,
se passa le panier au bras ; et, quittant sa
ferme un peu après midi, franchit d'un
pas dégagé les cinq kilomètres qui le sépa-
raient de la station.
A vrai d'ire, ce n'était pas seulement
pour le plaisir d'aller faire bombance qu'il
s'était mis en route. L'invitation du père
et de la mère Vasseun datait de la derniè-
re «(, assemblée », où il avait dansé avec
leur fille. On avait causé. Et le célibat
commençant à lui peser, il comptait pro.
fiter de la circonstance pour voir si l'on
pourrait s'entendre.
Encore qu'elle fût un peu maigriotté,
cette Aline Vasseur ne lui déplaisait pas.
Ses parents avaient du bien. Mais serait-
elle d'aplomb pour l'ouvrage ? C'était la
grosse question.
Installé dans un compartiment vide, en
attendant l'heure du départ, son panier e
tre les jambes, Césarin Mottet s'abandon-
nait à ses réflexions, quand trois nouveaux1
voyageurs apparurent. Un gros gaillard
monta, suivi d'une grosse gaillarde, qui:
devait être sa femme, et d'une robuste-
fille, qui devait être le fruit de leur union.
Césarin retira son panier pour les lais-
ser passer. Encore tout haletants sous
leurs beaux habits des dimanches, qui les
sanglaient comme des harnais neufs, les
nouveaux venus s'assirent en face de lui.
Une fois là, ils reprirent haleine.
La fille surtout était si rouge qu'elle
semblait prête à, éclater. L'éblouissement
de son teint, qui rendait plus violent le'
contraste des rubans bleus de son cha-
peau de tulle, posé en nid de merle sur ses
cheveux blonds, disait la précipitation
qu'elle avait dû mettre à gravir la côte.
Ses joues flambaient, La richesse de cette
nature hypnotisa Césarin.
— Ah ! la belle fille ! songeait-il ; c'est
comme ça qu'il m'en faudrait une !
Sa mère s'était débarrassée, pour s'épon-
ger, du paquet qu'elle portait. A côté du
panier où somnolait l'oie elle en avait posé
un autre, d'où émergeait la crête vive Ce;
deux jeunes coqs. Cette circonstance favo-
risa le rapprochement.
- in'annaron/ift knc^iula * «II/* e,., -
— -- D'apparence, hasarda-t-elle, dès
qu'elle fut un peu moins essoufflée, vous
aussi, vous allez « faire » les Rois ?
— 'Mais, c'est comme vous dites. répara
tit Césarin dans un sourire.
Et tandis que ses yeux allumés rêve-
naient aux joues empourprées de la de-
moiselle, ceux de la grosse Normande re-
luquaient l'oie avec admiration :
— Regarde-moi ça, Mathurine ?. C'te
belle bête !.
Mathurine s'extasia de confiance.
Elle avança même la main pour cares-
ser l'oiseau mais soudain elle la retira au
brusque contact d'un coup delbec qui ve-
nait de lui heurter le doigt à la hauteur
de la bague qu'elle y portait. -
D'abord, elle ne songea qu'à rire de cette
chiquenaude. Mais en remarquant que
l'oie agitait ses mandibules, comme pour
chercher à 'briser du bout du bec l'écorce
d'une graine, elle regarda machinalement
sa bogue ; et, quelle fie fui pas sa stupeur
de ne plus y voir la perle qui l'ornait.
— Oh ! la sale bêle ! s'affola-t-elle. C'est
ma perle qu'elle avale !
Le paysan et sa femme en. restèrent stu-
pides. Comment ? L'oie avait avalé la per-
le de sa bague neuve ? Celle que leur pro-
priétaire lui avait donnée pour ses étren-
nes ?
Césarin n'en croyait ni ses yeux ni ses
oreilles.
— C'est t'y possible ? suffoqua-t-il.
Toute tremblante d'émotion, Mathurine
ténait. la main. A l'un de ses doigts mas-
sifs et rouges, apparaissait, en effet, la
bague neuve, privée de son chaton.
La minute fut tragique.
Pour essayer de conjurer le malheur,
JEUDI 6 JANVIER im
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SUPPLEMENT. 9. RM Taitbout
# BOMMAIRB
Ou jeuedi 6 janvier iM
Paméla.-Causerie.
teuilledevigne. — Echos.
Bobèche. — Mon petit cinématographe.
George Auriol. — Le cceur sur la main.
Paul Bonhomme. — L'Oie.
Ch. Boudesseul. — Sérénade Moderne.
Léopold Julien. — Une trahison.
l'. Vigné d'Octon. — La douloureuse veillée.
R. Régis-Lamotte. — La Vestale.
Contex-Lachambre, — L'Amour & tout prix
(suite).
E.-G. Glück. - Le gros lot.
Henry Zubéry. — Le télégramme,
Boud'Nor. — Tas de pavés.
STriboulet. — Au théâtre.
Michel Provins. — Le docteur Juliette (noU-
velle dialoguée-feuilleton.)
CAUSERIE
il { : j c • r *
TRAITE DES BLANCHES
«vwv
¡<. Un journal qui fait profession d'of-
frir ses colonnes aux communiqués de
certaines Ligues soi-disant moralisa-
trices insérait l'autre jour ce véhément
cri d'alarme s
a Le voyageur français qui visite les
Etats-Unis est douloureusement affecté
par les allusions fréquentes dans la con-
versation, dans les journaux, sur le
théâtre, aux mauvaises mœurs de no-
tre nation. Alors que nous pouvons
nous regarder à bon droit comme un
des peuples les plus décents de la terre,
Sans affectation, sans hypocrisie, et
l'un des peuples qui pratiquent le plus
naturellement les vertus familiales, la
France passe pour un foyer de dépra-
vation, et Paris pour la Babylone mo-
derne. Nous devons cette réputation en
partie à notre littérature scandaleuse,
en partie à la prospérité d'un mons-
trueux trafic :: la traite des blanches.
'<( La presse enregistre à chaque ins-
tant, mais avec une pudique réserve,
des opérations de police ou des arrêts
oe justice qui se rapportent à la ques-
tion. Il s'agit pourtant du plus terri-
ble péril auquel soient exposées les jeu-
nes filles pauvres, isolées, sans con-
seil, sans appui dans les grandes villes.
« Le dur avertissement qui nous ar-
rive aujourd'hui d'Amérique doit être
entendu.
« L'importation des femmes aux Etats-
-Unis en vue de l'abominable esclavage
avait pris, dans ces dernières années,
un si grand développement que le ser-
vice d'immigration a décidé une enquê-
te et l'a conduite, avec énergie. Le rap-
port de la commission d'enquête vient
d'être remis au Congrès de Washing-
ton. Il en ressort que la France occupe
le premier rang dans le monde parmi
les pays exportateurs de prostituées ; le
japon vient ensuite, et la Chine en troi-
sième place. »
Il n'y a évidemment pas lieu d'être
fiers d'une telle supériorité et l'indigna-
tion de notre conïrère nous semblerait
éminemment louable, s'il bornait son
ambition à chercher les moyens prati-
ques d'entraver ce honteux trafic.
Mais où nous ne pouvons nous em-
pêcher de le trouver un tantet. ex-
cessif, c'est lorsqu'il attribue le fléau
à quoi. ?
fe vous le donne en mille !
- Au sans-gêne un peu trop décolleté
de nos peintres et de nos sculpteurs !
Apelle qui l'eût cru ? Phidias qui
l'eût dit ?
: Vous pensez que j'exagère ? Lisez
plutôt :
« Dans le monde entier, nous laissons
se répandre et s'enraciner des juge-
ments qui nous font le plus grand lort.
Nous subissons une déconsidération
morale ; nous subirons ensuite des pré-
judices économiques et politiques à l'in-
fini.
« A l'exposition de Saïgon, par exem-
ple, des artistes français avaient en-
voyé des nudités comme nous en
voyons maintenant sans broncher dans
nos divers Salons de peinture : des nu-
dités qui ne sont point chastes à la mo-
de antique, mais provocantes - à la ma-
inière montmartroise. Et sur ce détail,
nos sujets d'Extrême-Orient se sont fait
une idée révoltante de la femme fran-
çaise, de sa condition sociale, de notre
civilisation. »
Sans être curieuse, je voudrais bien
savoir en quoi le nu montmartrois est
plus subversif que le nu attique ou le
nu romain ?
Et je ne puis assez plaindre les jurys
artistiques de l'avenir dont la tâche de-
viendra singulièrement délicate, s'il
leur faut établir de subtiles distinc-
tions morales entre le nu de Montmar-
tre et le nu du Montparnasse, le nu de
Carcassonne et le nu de San Francisco !
Mais revenons à la traite des Blan-
ches.
Je causais de cette plaie récemment
avec un homme austère qui n'était pas
loin de partager l'opinion du journa-
liste que je viens de citer.
Notre littérature légère, nos images
un peu lestes, tels étaient, selon lui,
les pelés, les galeux d'où venait tout le
les pelés, les galeaux d'où venait tout le
— Mais, protestai-je, il n'est pas à ma
connaissance que le Japon et la Chine,
nos concurrents les plus proches en ce
peu enviable record, aient jamais passé
pour particulièrement pervertis par
l'audace de leurs écrivains ou l'indécen-
ce de leurs artistes.
1- Vous détournez la question. - ,.
Pour mieux l'examiner sous toutes
ses faces. Par contre, il est avéré que
la misère est grande dans les basses
classes de ces deux nations, a natalité
trop nombreuse.
— Je ne le conteste point.
— Alors concluez donc avec moi que
là est la véritable source de la perte
de tant de pauvres filles ! Si la rapa-
cité des employeurs leur assurait des
salaires de nature à ne point les laisser
mourir de faim, moins de malheureu-
ses se résigneraient à écouter les falla-
cieuses promesses des marchands do
chair humaine 1 Ce n'est pas dans l'en-
crier de nos prosateurs ou de nos poè-
tes, ce n'est pas sur la palette de nos
peintres, sous l'ébauchoir de nos sta-
tuaires qu'il faut aller chercher les ger-
mes de corruption funestes à trop d'in-
nocentes. C'est dans la promiscuité
des ateliers d'affameurs où le « bétail »
féminin trime quinze heures par jour
pour gagner trente sous.
— Vous vous égarez, madame.
Vous n'avez aucune notion des moyens
à employer pour résoudre le problème
qui nous occupe. Croyez-moi, laissez
aux hommes compétents dont je m'ho-
nore de faire partie, le soin de prendre
les mesures qui conviennent. Justement
nous avons-tout à l'heure séance à la
Société de Protection des Jeunes Ames.
Vous permettez que je vous quitte. Je
craindrais d'être en retard. Il faut en-
core qu'auparavant je passe à mon usi-
ne de faux-cols. Le temps de ren-
voyer quelques ouvrières qui ont eu
l'aplomb ide demander de l'augmenta-
.tion. ! ! !
ex-marchaude de frivolités.
PAMELA
ECHOS
Oh ! ces Américains 1
La semaine dernière un riche Yankee se pré-
sente chez une modiste et après avoir comman-
dé, au hasard, une demi-douzaine de chapeaux,
il pénètre dans l'atelier dont il avait yu la porte
s'ouvrir.
Là, il regarde ; puis, froidement :
— Mesdemoiselles, j'étais venu à Paris pour
amuser moi ; j'étais très riche. Si l'une de vous
veut être mon femme pendant quinze jours je
lui donnerai vingt mille francs.
A ce moment, comme toutes ces demoiselles
se levaient d'un seul bond, la patronne, jeune
encore, saisit .notre Américain, le fit pirouetter
et l'entraîna hors l'atelier criant :
-- Vous n'êtes point honteux, monsieur de
faire une semblable proposition a d'honnêtes
jeunes filles.
Et, comme l'Américain allait s'excuser :
— Est-ce que je ne suis pas à votre service,
moi, continua en riant notre délurée patronne.
— Aoh ! Vous ou une autre cela m'est tout
à fait indifférent, - répondit notre homme, oar
je consftatais que vous pouviez également faire
l'affaire de moi.
- :)(1 .--
Il est question d'une rue d'Ennery. Le Con-
seil municipaJ, saisi du projet, hésite, Henri Ro.
chefort. appuie l'idée, car il resta l'ami d'Adol-
phe d'Ennery, encore qu'il n'estimât guère son
talent.
Il racontait, l'autre jour. leurs relations.
— D'Bnnery, disait Henri Rochefort, aimait,
au milieu de ses dîners du dimanche, 6 m'inter.
peller d'un bout de la ttable à l'autre en ces
termes amicaux, mais désobligeante :
— Hein ! quand vous étiez au bagne, on ne
vous servait pas une nourriture aussi' bonne
que celle-4à ?
Et, quand il avait perdu une partie, il me lam-
çait cette apostrophe :
— Ça m'apprendra à jouer avec un ancien
forçat.
Il me fit un jour, ce reproche :
— Vous ne parlez jamais de moi dans vos
articles. Est-ce que de temps à autre vous ne
pourriez pas écrire que j'ai beaucoup de ltalent ?
A quoi je lui répondis :
— Je ne demande pas mieux, à la condition
que dans un de vos drames un de vos person-
nages s'écriera : « Je viens de lire un charmant
article d'Henri Rochcfort. » 'Je n'ai aucune rai-
son de vous faire de la réclame quand vous ne
m'en faites jamais.
—-X -—
On a conté nombre d'anecdotes sur Lêopold II.
En voici encore deux qui prouvent que le roi
défunt avait 'beaucoup d'esprit.
On saiit sa réponse lit ce brave ecclésiastique
qui s'était permis de lui signaler le mauvaîs
effet produdt par une liaison trop affichée.
— Vous avez cru alors ce qu'on vous racon-
tait, monsieur le curé ?. On m'avait dit pré-
cisément la même chose de vous ; je n'en ai
rien cru, mai.
On connait moins une autre, qu'il fit un jour
à un sénateur vertueux qui lui dénonçait avec
indignation la prouesse d'un agent de la force
pub\1üque, lequel, au Congo, avait mis à mal en
publique, lequel, au Cong, trois ou quatre jeunes
un court temps d'horloge, trois ou quatl'~ jeunes
négresses.
— En si peu de temps !. Voilà, monsieur le
sénateurs un homme bien remarquable 1
--Ii X-
Etant en visite dans une petite ville de la
vallée do la Meuse, il y a quelque trente ans,
le roi se vit inviter par le bourgmestre à dégus-
ter un verre de vin du pays que celui-ci avait
en cave.
— Excetient., monsieur le bourgmestre.
— Votre Majesté trouve. Eh bien t j'en ai
encore des bouteilles qui sont supérieures.
- Vraiment, monsieur le bourgmestre. Et
vous les gardez sans doute pour une meilleure
occasion.
-:x-
C'est un cul-de-jatte. Installé dans une sorte
de caisse d'emballage à roues, à l'aide de deux
bois à poignée, il se promène dans les. rues.
De temps à autre. il s'instadle à un carrefour
et tend humblement sa casquette vers les pas-
sants. On s'apitoie facilement et ce cul-de-
jatte jovial encaisse avec le sourire les oboles.
Il professe ce métier jusqu'à une heure avan-
cée dans la nuit., après la sortie des théâtres
et des cafés.
Comme il habite dans l'avenue de Clichy, le
problème se pose, sa soirée terminée, de ren-
trer rapidement chez lui. II a trouvé un truc
ingénieux. Au passage, il attrape d'une main
la suspension d'un fiacre montant dans la dirsc-
tion de son domicile et, triomphalement, il se
laisse voiture. -
Et c'est, ainsi, chaque soir, qu'il profite, sans
bourse délier, du rapide sapin qu'il lâche dans
le voisinage M M. demeure. - >
Du Feu SÉVP,,
— Si c'est du feu que vous apportez, soyez les bienvenus, car mon amant en af
bien besoin 1
Conseils à mon pipelet :
La corne qui, déjà, fournissait à nos élégan-
ces les boutons et les peignes, dote la fashion
d'un nouvel ornement. Le grand chic conseille,
aux dandies la- canne en oorne de rhinocéros.
Il peut paraître surprenant, a priori, que la
corne de rhinocéros fournisse un gourdin à Paul
Déroudèce ou un stick à Henry Bernstem. Mais
il faut savoir que la longueur de cet appendice
se double d'un prolongement interne qui per-
met de tailler, dans la masse, longue tige et
çourbe poignée.
Les rhinocéros ont la oorne tenace et bien im.
plantée. Et c'est Itrès parisien. -
Une canne de rhinocéros bien teintée vaut ac-
tuellement trente loyis. - - 1
Jean des Hêtres jouit de la vie sans chercher
à en approfondir les mystères et cela lui per-
met de garder une bonne humeur perpétuelle.
A la fin de la saison, il était au château de
V., non loin d'Angoulême. M. de V. est ma-
rié à la plus charmante des femmes et a de
plus une sœur et trois cousines exquises.
Jean des Hêtres, le (premier soir, alors qu'il
était rentré dans sa chambre et qu'ayant souîu6
sa bougie, il allait étendu en son lit, se livrer
au sommeil, entendit la porte s'ouvrir.
— Qui est là, fit-il surpris 2
— Personne, répondit une voix bien timbrée.
Et, peu après, il se sentait enlacé par deux
bras nus.
Jean des Hêtres est un homme poli et devant
l'avance qui lui était faire, i4 ne crut pas devoir
reculer. La nuit fut superbe.
Le matin, avant que le jour se montrât, on le
quitta, en lui disant qu'on reviendrait s'il ne
cherchait pas à savoir qui l'on était.
Jean promit et on lui tint parole.
Tout le temps qu'il resta au château de V.,
il eut une compagne la nuit et pas un instant ill
ne chercha à savoir qui elle était.
Etait-ce la femme, la sœur ou une des cou-
sines de V.
— Que m'importait l'étiquette, me dit-il, puis-
que le fruit était bon.
Jean des Hêtres jouit de la vue sans chercher
à en approfondir les mystères : c'est un sage.
—X—
On rapiporte cette curieuse anecdote sur l'il-
lustre Bjœnstjerne Bjœrnson, qui est actuelle-
ment malade à Paris :
Bjœrnson n'est pas qu'auteur dramatique. Il
a fait de la politique et s'est révélé admirable
orateur. Il était dès longtemps partisan de la
séparation de la Norvège d'avec la Suède, et un
jour qu'il avaitt prononcé un discours sur ce
sujet, un ministre en soumit le texte à Oscar II.
Le roi commença la lecture du discours et,
bientôt emballé, se mit à en déclamer des pas-
sager, non sans s'interrompre parfods pour
dire ;
— Est-ce beau tout de même ? Est-ce beau î
Le ministre n'insista pas. Il dut trouver, ce
jour-là, que le roi Oscar n'était pas sérieux.
-.x.-
En tout, il y a la manière :
M. Alfred Valette, directeur du Mercure de
France, se vante de n'avoir jamais mécontenté
aucun écrivain. -
— Mon système est bien simple, dit-il, Je ré-
serve toute mon amabilité pour les auteurs dont
je refuse la copie. Ceux que j'imprime sont
contents de moi par céda même. Pour les au-
tres, je suis un père. Je m'inquiète de leur santé.
Je fais de leur « rendu » un joli petit paquet,
bien ficelé. Et je les raocompagne au moins jus-
qu'à la moitié de l'escalier.
X
Le bon gros Oscar « ce petit quart d'agent ae
change 1) en est resté tout éberlué.
Il a Juliette pour maîtresse et Juliette lui 1
juré une fidélité de caniche. :
Or, il a appris que lorsqu'il n'allait pas mil-
cher chez elle, c'était un voisin de la belle ijuj
le remplaçait au lit. j
Furieux il s'est rendu chez la misérable
rien caché : elle a tout avoué, mais il n'a pu
dui garder tfaheune.
— Oui, a-t-elle déclaré, oui, quand tu ne viens
pas, Je prie mon voisin, M. Jacques, de venir
coucher avec moi, mais rassure-toi, ce n'est pas
par amour. Nous ne nous aimons ni l'un ni
l'autre. Il vient uniquement par pure bonté,
pour me rendre service. Je suis poltronne, tu le
sais ; eh bien, rester seule en mon lit, dans
mon hôtel m'est tout à fait impossible. Et je te
jure qu'à ne se passe rien entre nous.
Et comme Oscar semblait douter. ¡
— Oh chéri, si je lui permets de temps en temps
quelques familiarités, va, ce n'est que par sim-
ple politesse. Je le dérange, le forçant à décou-
cher ; je lui dois bien quelques égards ; mais
rassure-toi, il n'y a pas d'amour.
'-
Voici quelques phrases, authentiquement pro-
férées au Pallais-Bourbon au cours des derniè-
res séances sur le tarif des douanes et le bud-
geLt.'éloquent M. Lefas répons au non moins élo.
qûent M. Lebouicq :
« Les veaux sont mis en appétit par les chè-
vres que protège M. Leboucq dans cinq posi-
tons différentes. »
H s'agit — rassurez-vous ! — du commerce
de ganterie. Et encore celle-ci :
« Moi, peau, je vous dis & vous, chaussures,
« Moi, peau, je vou ! Mais nous, veaux pi-
qués, veaux cirés, veaux yemis, que devenons-3
nous ? w
Hélas, chers veaux, veaux vous êtes, veaux
vous resterez f
Hier, on discutait le budget de l'agriculture, ei
on parla volontiers d'étalons.
« La diminution du nombre des saillies prend
»
Et cette
son cette autre image non moins fiâiâfe ï
« Donnez-nous un bon outil, nous yous dorons
de (bonnes ràoes. va .,
Vous avouerez qu'outil est ici un charmant eu-
phémisme. -
--X088l!J
r;. jolie V. qui charme les habitués d'un
music-hall des boulevards, est aillée voir l'autre
jour sa mère qui habite à trois kilomètres d'une
petite gare de- Seine-et-Oise. Force lui fut de
prendre une carriole pour se faire conduire au
village où demeure la chère maman.
- Le cheval part à vive allure. Au bout de quel-
ques instants le paysan se retourne et lui de-
manda ;
— Dites donc 1 Est-ce que yous avez des
fausses dents ?
— Insolent ! fait-elle, indignée.
— Oh ! (madame, ce n'est pas par insolence,
reprend le conducteur, c'est parce que la route
est mauvaise, que les cahots sont durs, et
que, si vous aviez des fausses dents, vous feriez
peut-être aussi bien de les mettre dans votre
poche !.
On sait les lenteurs de la procédure française
qui permettent de dire que la justice est bot-
teuse. En Amérique, il n'en est pas heureu-
sement de même.
La Cour suprême, devant laquelle se présen-
tait, Mrs John Jacoto Astor, femme du milliar-
daire bien connu, plaidait en divorec. Le procès
fut entendu à huis-clos et il s'est écoulé exac-
tement 55 secondes entre le dépôt de la de-
mande en divorce et la sentence accordant la
pétition.
En moins d'une minute Mrs Astor a obtenu
son divorce et une somme de 50 millions &
titre de dommages-intérêts.
•%
m Ts W iz
A l'école 'lÈtaïre Î ,.
- Citez-moi le oom a'iiftf j****" -ai
fourrures î
Le jeune Calino vivement :
C~Mf@iN' 0'~tCtaa~ <
Chez l'épicier : -
- Donnez-moi une livre de 1116. ell-yous*
plaît ? moi une Uee 'dâ [Ee. Gril-Y-PU>
— Du thé noir ou du thé vert, mademoi-
selle ?. Is
— Oh } ça ne fait rien WJ Ca bourgeoise
est aveugle f
Question sociale il .-
.— fin somme. que steulent les çlasses labo-
rieuses ? ..,
— Elles veulent cesser de l'être.
—X—•
- ? quelle heure part le train pour Beau-
vais ? demande un voyageur.
- A huit heures quinze, répond l'employé du
chemin de fer -
- III n'y en a pas avant ?
— Non. ils sont tous & vapeur.
Feuille de vigne.
J". If '[
MON PETIT CINEMATOGRAPHE
LA GALETTE DES ROIS 1,
(Sur l'air ; Enfilons les aiguilles de bois)
Une antique tradition
Veut qu'au jour de l'Epiphanie
On prenne l'indigestion
Par une galettomanie !
A cet usage suranné -
Il faut selon moi qu'on renonce
Car, pour peu qu'on ait raisonné
Sur l'apophtegme que j'énonce
Chacun conclura, je le crois
De Montparnasse à La Villette :
? Supprimons la Galette des Rois 3
Les Roig ont trop d'galette 1 »
On l'a bien vu quand, récemment
Léopold a cassé sa. pipe : -
Il laissa, ce royal amant
Des millions à sa guenippe l
De,tant de billets, de tant d'or
Sa, fortune, dit-on, fourmille
puil en restera même encor
Un matelas pour sa famille 1
N'avons-nous donc pas tous les droits
A chanter devant son squelette : -:-
opm la Galette des Rois :
::L£\S îîois ont trop d'galette 1 *
?Aw( frâis dé leurs sujets naïfs
Nous. les monarques à la ronde
t'e font, à des taux lucratifs
Des trésprs dignes de GoJconde 1
Guillaume „II est très douiUard ;
Le tsar a -de fortes finances
De ses créanciers Edward
-W soldé toutes les créances 1
Alplonse peut, de deux ou trois
|Vutos par mois Caire l'emplette.
^S toprtooife la Galette des Rois i
Les Rois ont trop d'galette 1
Même les moins favorisés , .,
Des dons de l'aveugle déesse
Sont, comme on dit, plutôt aisés.
Qu'ils soient de Turquie ou de Grèce.
Chacun a son petit magot :
Il n'est pas, nul ne le dénie,
Jusqu'au Prince de Monaco
Qui n'ait la bourse bien garnie !
Donc, nous, dont les budgets étroits
Prouvent une dèche complète,
w iSu.pp'ntmoins Ja Galette des Rois :
Les Rois ont trop d'galette 1 l'J t
Vous tous qui, comme des moutons,
Payez ces tributs arbitraires,
A cesser nous vous exhortons,
"D peuples d'Europe, nos frères 1
-LF>IUS de majorats, plus d'impôts 1
Pour grossir la liste civile 1
A vos tyrans. collez. la peau,
De Saint-Pétersbourg) à Séville
italiens ou Bavarois, -.'
cars de l'Islande ou de la Crête.
a Supprimez la Galette des Rois :
Les Rois ont trop d'galette t !! *
'.1', , ., Bobèche.
LE CŒUR SUR LA MAIN
-
La pluie avait cessé pour faire place à
JUH radieux soleil automnal, l'idée me vint
bien que le « fond de l'air » fût, comme on
dit, assez frais, dQ chausser une fods encore
mes souliers jaunes et d'aller faire un petit
tour, muni de mon vert parasol.
C'était moins, soyez-en persuadés, pour
me procurer l'illusion d'un été tardivement
prôtegé par saint Martin, que pour assortir
ma tenue à celle de la nature.
Le petit bois à l'orée duquel je m'étais
proposé d'aller Flâner se décore, en effet, à
cette époque-ci, 'des oranger les plus somp-
eux, — et même, il ne craint pas d'y
meler quelques verdures printanières.
Bref, équipé comme j'ai dit, et sans crain-
te du qu'en-dira-t-on, je me mis en route,
bien décidé à faire main basse sur tous
les champignons assez imprudents pour
s'aventurer dans mon chemin. — Mais
j'eus, dès le début, bien d'autres chats à
fouetter.
Dans la petite sente aux noisettes, je ren-
contrai tout d'abord une pauvre vieille fem-
me nonagénaire qui gémissait, assise sur
un matelas sordide. Touché de son infortu-
ne, je lui remis une pièce de dix sols, et
elle m'avoua que, le matin même, elle avait
été, pour une misérable dette de trois
francs, chassée de sa modeste cabane par
M. Pain, son propriétaire.
Après un interrogatoire supplémentaire
suivi de 50 autres centimes, j'appris qu'il
s'agissait, non d'un quelconque M. Pain,
mais bieni de Edouard Pain, l'homme le
plus charitable du pays, et je n'en revins
pas, — car j'avais toujours entendu dire
qu'il , avait « le coeur sur la main ».
Puis, ce furent six petits enfants en bas
Age et seulement vêtus de vestiges qui s'of-
frirent è. mon regard pitoyable. M. Pain
les avait également jetés dehors comme
une potée de petits pourceaux. — M.
Edouard Pain 1. j'en fus bleu l
Cette demi-douzaine de jeunes citoyens
réconfortée par ce qui me restaiit de menue
monnaie, j'espérais pouvoir continuer pai-
siblement ma promenade, quand, au car-
refour des Trois-Poules-Borgnes, je vis ve-
nir, habillé de noir et sanglotant à fendre
l'âme, maître Théodore Picachon, huissier.
Je m'enquis incontinent du motif de sa dou-
leur et :
— Monsieur, me dit cet homme erdmaî-
rement dur, vous me voyez désolé. A la
requête de M. Edouard Pain, je viens 'de
vendre jusqu'à la dernière chemisé du pau-
vre Thomas Eoc, a~~l~b~ de t% fa-
rine impériale. Le désespoir ile ce vétéraf
m'a si profondément touché qu'il m'a été
impossible de rien prendre ce matin.
Afin de séoher les larmes de i'ofMec
ministériel, je lui offris un cigare. Après
je lui fis part de la stupeur que me causait
le oas incompréhensible de M. Pain.
- Enfin ! glapis-je, il est riche et brave 1
C'est incontestablement l'homme le plus
charitable de la contrée ! On dit couram-
ment de lui qu'il a le cœrur sur la main 1
D'ou vient alors qu'il ait subitement re.
tourné sa veste d'agneau et que, justement
elle soit doublée de peau de loup ? Car il
n y a pas à dire, M. Pain est connu à vingt
lieues pour son inépuisable générosité f
Nulle infortune n'a jamais frappé en vain
à sa. porte, Il donne aux pauvres, au bu-
reau de bienfaisance, aux hospices et aux
ouvroirs ! Il distribue de la soupe, de la
viande et des vêtements j et vraiment l'ex-
pression que le peuple a, trouvée pour la
peindre est la seule qui lui convienne : (f Il
a le cœur sur la main, »
— Il l'avait, dit une voix, mais il ne 1 a
plus !
Cette voix était celle de César, le facteur
rural.
— Que voulez-vous dire ? fis-je en mg
tournant vers ce postal fonctionnaire.
César prit dans son sac un mouchoir. H
déplua le mouchoir, en tira une boîte dl
bouleau, ouvrit cette boîte, y prit une pin-
cée de tabac et me regarda fixement.
— Je veux dire. murmura-t-il.
Ici, César introduisit la pincée de tabac
dans sa narine droite. Puis, ayant forte-
ment reniflé. il poursuivit :
— Voilà ce que je veux dire c: il est très
exact de constater que M. Pain avait le
cœur sur la main, mais il est plus exact
encore d'affirmer qu'il ne l'a plus, et voici
pourquoi : jeudi dernier, M. Pain a visité la
fabrique de baguettes de tambour, — et il
a eu les deux mains coupées par une scie
circulaire.
George Auriol.,
L'OIE
Par PAUL BONHOMME
Pour aller fêter les Vois au Grand-Mes-
nil, chez les Vasseur, Césarin Mottet de-
vait prendre le chemin de fer à la gare de
Torcy-sur-Eure. Voulant bien faire les cho-
ses, il s'était promis d'apporter une oie. IL
avisa donc la plus grasse de ses élèves,
la coucha toute vivante dans un panier,
se passa le panier au bras ; et, quittant sa
ferme un peu après midi, franchit d'un
pas dégagé les cinq kilomètres qui le sépa-
raient de la station.
A vrai d'ire, ce n'était pas seulement
pour le plaisir d'aller faire bombance qu'il
s'était mis en route. L'invitation du père
et de la mère Vasseun datait de la derniè-
re «(, assemblée », où il avait dansé avec
leur fille. On avait causé. Et le célibat
commençant à lui peser, il comptait pro.
fiter de la circonstance pour voir si l'on
pourrait s'entendre.
Encore qu'elle fût un peu maigriotté,
cette Aline Vasseur ne lui déplaisait pas.
Ses parents avaient du bien. Mais serait-
elle d'aplomb pour l'ouvrage ? C'était la
grosse question.
Installé dans un compartiment vide, en
attendant l'heure du départ, son panier e
tre les jambes, Césarin Mottet s'abandon-
nait à ses réflexions, quand trois nouveaux1
voyageurs apparurent. Un gros gaillard
monta, suivi d'une grosse gaillarde, qui:
devait être sa femme, et d'une robuste-
fille, qui devait être le fruit de leur union.
Césarin retira son panier pour les lais-
ser passer. Encore tout haletants sous
leurs beaux habits des dimanches, qui les
sanglaient comme des harnais neufs, les
nouveaux venus s'assirent en face de lui.
Une fois là, ils reprirent haleine.
La fille surtout était si rouge qu'elle
semblait prête à, éclater. L'éblouissement
de son teint, qui rendait plus violent le'
contraste des rubans bleus de son cha-
peau de tulle, posé en nid de merle sur ses
cheveux blonds, disait la précipitation
qu'elle avait dû mettre à gravir la côte.
Ses joues flambaient, La richesse de cette
nature hypnotisa Césarin.
— Ah ! la belle fille ! songeait-il ; c'est
comme ça qu'il m'en faudrait une !
Sa mère s'était débarrassée, pour s'épon-
ger, du paquet qu'elle portait. A côté du
panier où somnolait l'oie elle en avait posé
un autre, d'où émergeait la crête vive Ce;
deux jeunes coqs. Cette circonstance favo-
risa le rapprochement.
- in'annaron/ift knc^iula * «II/* e,., -
— -- D'apparence, hasarda-t-elle, dès
qu'elle fut un peu moins essoufflée, vous
aussi, vous allez « faire » les Rois ?
— 'Mais, c'est comme vous dites. répara
tit Césarin dans un sourire.
Et tandis que ses yeux allumés rêve-
naient aux joues empourprées de la de-
moiselle, ceux de la grosse Normande re-
luquaient l'oie avec admiration :
— Regarde-moi ça, Mathurine ?. C'te
belle bête !.
Mathurine s'extasia de confiance.
Elle avança même la main pour cares-
ser l'oiseau mais soudain elle la retira au
brusque contact d'un coup delbec qui ve-
nait de lui heurter le doigt à la hauteur
de la bague qu'elle y portait. -
D'abord, elle ne songea qu'à rire de cette
chiquenaude. Mais en remarquant que
l'oie agitait ses mandibules, comme pour
chercher à 'briser du bout du bec l'écorce
d'une graine, elle regarda machinalement
sa bogue ; et, quelle fie fui pas sa stupeur
de ne plus y voir la perle qui l'ornait.
— Oh ! la sale bêle ! s'affola-t-elle. C'est
ma perle qu'elle avale !
Le paysan et sa femme en. restèrent stu-
pides. Comment ? L'oie avait avalé la per-
le de sa bague neuve ? Celle que leur pro-
priétaire lui avait donnée pour ses étren-
nes ?
Césarin n'en croyait ni ses yeux ni ses
oreilles.
— C'est t'y possible ? suffoqua-t-il.
Toute tremblante d'émotion, Mathurine
ténait. la main. A l'un de ses doigts mas-
sifs et rouges, apparaissait, en effet, la
bague neuve, privée de son chaton.
La minute fut tragique.
Pour essayer de conjurer le malheur,
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