Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1892-01-11
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 11 janvier 1892 11 janvier 1892
Description : 1892/01/11 (N5378,A16). 1892/01/11 (N5378,A16).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
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IW--I I, iii .1, m ,| ,„..,11.,,. .., III
AjOHMSÏRATION. REDACTION ET ANNONCES
1 A PARIS
id — Rue luchel. - le
Les articles non insérés ne seront pas rendus
ABONNEMENTS
PARIS.
UN MOIS 2 FR.
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JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
PARIS ET DÉPARTEMENTS
Le Numéro : S centimes
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UN AN 20 FR.
SEIZIÈME ANNÉE — NUMÉRO 5378
☸ -- LUNDI IL JANVIER 1892
21 NIVOSE AN 100
La c-I&A,%TwEltNz p est le sculjburnal
, français ayant son imprimerie et sa
fabrique de papier.
U CHAMBRE ET LE SENAT
Le Sénat poursuit sans bruit et jus-
qu'ici sans incident digne d'être noté,
t discussion du budget qui aurait dû
être définitivement voté avant le 1er
janvier.
Si c'est là tout ce que le Sénat trouve
à dire sur ce budget, ce n'était vrai-
ment pas la peine de revendiquer si ta-
pageusement, il y a quelques jours, le
droit de le discuter à fond et en détail.
Mais il paraît que nous ne perdrons
rien pour attendre, et déjà on peut pré-
voir que le calme des séances actuelles
au Luxembourg va bientôt faire place
à des débats plus corsés.
Les sénateurs ne font en ce moment
que déblayer à la hâte le budget, dont
au fond ils se soucient comme d'une
pomme, et il leur tarde d'arriver au dé-
grèvement de la grande vitesse et sur-
tout à la réforme des frais de justice.
C'est là-dessus que la haute assem-
blée, fière des succès douaniers que la
Chambre lui a laissé remporter, va
faire porter tout son effort, pour tâcher
d'imposer aux élus du suffrage univer-
sel une capitulation effective.
C'est dans ce but que le vote du bud-
get a été retardé et que le provisoire
financier a été décrété.
Le danger d'un pareil conflit est assez
imminent pour que les esprits conci-
liants interviennent déjà en vue d'écar-
ter le dissentiment qui se prépare entre.
les deux Chambres.
Tels, au Sénat, qui d'abord étaient
partis en guerre contre la Chambre,
tout à coup assagis par la proximité d'un
Conflit qui ne saurait manquer d'être
grave, insinuent qu'il serait peut-être
bon pour les pères conscrits de s'en te-
nir aux concessions obtenues sur les
pétroles et de ne pas pousser plus loin
leur pointe.
Repousser la réduction de l'impôt de
la grande vitesse déjà escomptée par le
pays, et la réforme des frais de justice,
parait maintenant un bien gros mor-
ceau à nombre de sénateurs qui en sont
à regretter d'avoir levé un tel lièvre.
Et il est de fait que le Sénat n'a rien
de bon à attendre de cette discussion,
quelle que soit d'ailleurs l'attitude qu'il
adopte.
"Si, se tenant à des objections de pure
forme, il accepte les réformes décidées
par la Chambre, c'est lui qui cédera, et
sa reculade sera d'autant plus humi-
liante que les provocations qui se don-
naient libre carrière au Luxembourg,
il y a quelques jours, la feront davan-
tage ressortir.
Si, s'entêtant dans une folle résis-
tance, la haute assemblée se refuse à
ratifier la réforme populaire des trans-
ports rapides et des frais de justice, la
Chambre à la partie belle pour avoir
raison de cette résistance.
Puisque aussi bien nous sommes
financièrement sous le régime du pro-
visoire, rien ne presse : on a le temps
de voir venir : au refus du Sénat, la
Chambre n'a qu'à opposer purement
et simplement le maintien de sa vo-
lonté première.
-Au suffrage restreint disant : pas de
réformes ; le suffrage universel n'a que
ceci à répondre : pas de budget.
Et nous verrons, les responsabilités
étant bien établies devant le pays, la-
quelle des deux Chambres se lassera la
première à ce jeu, sans compter que
-l'enjeu pourrait bien être la revision.
JIl dépend absolument de la Chambre
que, malgré la résistance éventuelle du
Sénat, les réformes qu'elle a inscrites
au budget de 1892, deviennent des faits
accomplis.
La Chambre se doit d'autant plus de
faire montre de l'énergie nécessaire
pour triompher sur ce point, que la
question qui s'agite en ce moment est
-de savoir si la prépondérance politique
restera au Palais-Bourbon, où l'a placée
la Constitution, ou si elle passera au
Palais du Luxembourg.
Que le Sénat, par sa ténacité, fasse
échouer les réformes en discussion, ce
sera la déchéance du suffrage univer-
sel au profit du suffrage restreint.
Ce sera la République censitaire, la
République du petit nombre, substituée
à la République démocratique.
De nombreux empiètements cons-
ciemment ou instinctivement poursui-
vis par le Sénat sur les attributions de
la Chambre, prouvent bien que tel est
le but que les auteurs responsables de
ces. empiétements se proposent d'at-
teindre. d'a t .-
Le danger de cette situation est évi-
dent : il ne paraît pas possible qu'on
n'en ait pas le sentiment à la Cham-
bre.
Certes, il n'est pas trop tard pour que
les élus du suffrage universel arrêtent
net de pareilles tentatives et rétablis-
sent, dans toute son intégrité, le droit
populaire dont ils sont les défenseurs ;
mais il n'est que temps d'aviser.
Dans sa défense contre l'accapare-
ment sénatorial, la Chambre n'a plus
une seule faute à commettre.
En l'état où elle a laissé les choses
arriver, toute fausse manœuvre de sa
part serait chèrement payée et aurait
immédiatement de graves conséquen-
ces.
Que la Chambre, si elle ne veut pas
abdiquer et si elle ne veut pas nous
faire abdiquer avec elle, défende donc
avec la dernière énergie les réformes
qu'elle a votées dans le budget en dis-
cussion.
Qu'elle se dise bien que c'est le suf-
frage universel lui-même qui est en
jeu.
LA TRAITE DES NEGRES
Les faits sont vrais. — Missionnaires
exclavagistes
On lit dans le Salut public de Lyort :
Aux déclarations de MM. Legrelle-Rogier et
Wouters, nous pouvons répondre, avec la cer-
titude de ne pas être démenti, que nous con-
naissons des témoins oculaires, absolument
dignes de foi, qui ont vu, au Dahomey, des
nègres conduits, les chaînes aux mains et aux
pieds, sur des navires frêtés par l'Etat libre
du Congo, et que les acheteurs d'esclaves ont
eu l'audace de faire, à des missionnaires ca-
tholiques, des propositions en vue d'obtenir
par leur entremise des envois de nègres.
Nous avons aussi, par des amis de Mar-
seille, la confirmation des faits racontés
il y a quatre jours par le Temps et certi-
fiés aujourd'hui par le Salut public.
Seulement notre confrère lyonnais-a
tort de s'étonner que des offres aient été
faites aux missionnaires pour la fourni-
ture de « bois d'ébène ».
L'Etat belge du Congo sait parfaitement
à quoi s'en tenir sur les pratiques des
missionnaires en fait d'esclavage. Il n'i-
gnore pas que, même au Congo français,
les missionnaires achètent des nègres et,
sous prétexte d'en faire des « hommes
libres » les, réduisent au plus pénible des
esclavages.
Nous le démontrerons prochainement.
UN ROI ILLÉGITIME
Un arrêt de la Cour de Leipzig
Il est heureux pour la Cour suprême dé
Leipzig qu'elle ne soit pas sous la coupe
de M. Stambouloff, elle aurait eu -peu
d'agrément.
Elle vient en effet de rendre un arrêt
qui n'est point sans gravité pour le roi
peu légitime du brigand-ministre de Bul-
garie.
Voici les considérants de l'arrêt :
D'après l'article premier du traité de Berlin
du .13 juillet 1878, est-il dit dans l'arrêt, la
Bulgarie bien qu'étant une principauté auto-
nome, n'est pas souveraine, mais bien vassale
du sultan. Or l'article 2 du même traité exige
que l'élection du prince de Bulgarie, pour être
légitime en droit international, soit confirmée
rar la Porte et agréée par les puissances si-
gnataires du traité.
Or, Ferdinand de Saxe-Cobourg et Gotha,
élu prince par le peuple bulgare, ne réunit
pas ces conditions ; il manque à la légitimité
de sa situation le consentement général des
puissances signataires, ainsi que la confir-
mation du sultan.
C'est pour cette seule et unique raison
qu'il faut considérer le prince Ferdinand de
Cobourg comme appartenant toujours à la
maison princière de Saxe-Cobourg et Gotha,
et non comme prince souverain.
C'est gênant pour le prince et pour son
ministre ; et c'est de mauvais augure.
Ils ont déjà rencontré des juges. Ils
pourraient bien, un de ces jours, rencon-
trer les gendarmes.
AU SENAT
Le budget des travaux publics. — La
loi de finances
Le Sénat s'occupe des budgets annexes,
qu'il adopte successivement, ainsi que
l'article D de la loi de finances.
On passe alors au budget du minis-
tère des travaux publics.
- M. Loubet, président de la commission
des finances, prononce un assez long dis-
cours.
Tout en reconnaissant le bon état de
nos finances, il demande qu'on se montre
sobre de dégrèvements, et qu'on ne vote
que les dépenses absolument justifiées.
L'orateur, après avoir passé en revue
les budgets des différents services, exa-
mine assez longuement le budget des tra-
vaux publics. Il termine en demandant
qu'on réduise, dans des conditions raison-
nables, la garantie d'intérêt.
M. Yves Guyot, ministre des travaux
publics, reconnaît le bien fondé des ob-
servations de M. Loubet, mais il déclare
que le gouvernement est très circonspect
dans les travaux à engager. C'est ainsi
que l'exercice 1892 comporte 125 millions
au lieu de 160 réclamés l'année dernière.
Et le ministre ajoute :
Le compte d'exploitation partielle a été sup-
primé sur un certain nombre de lignes et
tous les efforts de l'administration tendent à
le- supprimer sur les autres.
Quant au dégrèvement de la grande vitesse,
il n'y a pas de craintes sérieuses à avoir :
l'abaissement des tarifs devant nécessaire-
ment avoir pour conséquence l'augmentation.
du trafic. En ce qui concerne le budget des
travaux publics, on peut donc envisager l'a-
venir sans inquiétude.
Les 82 premiers chapitres du budget des
travaux publics sont adoptés, après rejet
de deux ou trois amendements insigni-
nants.
Le chapitre 83 (garantie d'intérêts aux
chemins de fer algériens) est réservé.
Le Sénat passe à la discussion de la loi
dfcfQa^ces,
L'article 2 est voté.
Les articles 3, 4 et 5 sont réservés.
Les articles 6 à 24 sont adoptés.
r e Sénat renvoie à la commission des
patentes la proposition adoptée par la
Chambre sur les voitures-réclames.
'article 29 du projet de la Chambre
sur les affiches posées dans les bureaux
de poste est repoussé.
Sont réservés les articles 52, 55, 75 et
79 du projet de la Chambre.
M: Lucien Brun demande la suppression
de l'article 54, lequel déclare qu'à partir
du 1er janvier 1893 les comptes et budgets
des fabriques et consistoires seront sou-
mis à toutes les règles de la comptabilité
publique.
M. Buffet vient à la rescousse, mais le
rapporteur général demande le maintien
de l'article, dans l'intérêt même des com-
munes. Au point de vue financier, il en
résultera une ressource de 6 à 7 millions.
Par 178 voix contre 70, l'article 54 est
adopté.
Les articles 55, 56 et 58 sont également
votés.
M. Boulanger, rapporteur général, de-
mande le rejet de l'article 88 de la Cham-
bre.
On sait que cet article étend le bénéfice
de la loi de 1888, sur les circonstances at-
ténuantes, aux confiscations en matière
d'octroi.
M. Rouvier, ministre des finances, con-
sulté, déclare que le gouvernement garde
sur ce point une neutralité complète.
L'article 88, mis aux voix, est repoussé.
Gare aux fraudeurs 1
Demain lundi, suite de cette discussion
hérissée de chiures.
LE CONSEIL DES MINISTRES
Les traités de commerce
Le Conseil des ministres s'est réuni hier
matin, à l'Elysée, sous la présidence de M..
Carnot.
Il s'est occupé des négociations engagées
avec les puissances en vue de la fixation des
relations commerciales ; il s'est également
occupé de diverses questions extérieures.
Chemins vicinaux et routes
Le Conseil a été saisi ensuite de la ques-
tion de la fusion du service des chemins vi-
cinaux, qui dépend actuellement du ministère
de l'intérieur, avec le service des routes, qui
dépend du ministère des travaux publics.
Cette fusion a été demandée par la Chambre,
qui. comme sanction, n'a voté que pour les
six premiers mois de 1892 les crédits afférents
à ces deux services, afin de mettre le gou-
vernement dans l'obligation de faire voter,
pour le 1" juillet prochain, un projet de loi
réalisant cette réforme. MM. Constans et
Yves Guyot vont s'entendre pour l'élabora-
tion de ce projet de loi.
Nous devons ajouter que le ministre de
l'intérieur va demander à la commission de
la Chambre qui s'occupe de la réforme des
prestations de renoncer à demander la mise
à l'ordre du jour de cette question en ce mo-
ment, comme elle en a manifesté l'intention.
Il y a, en effet, une connexité directe entre
la question des prestations et celle de la victi-
nalité, et il n'est pas possible de résoudre la
première dès maintenant sans tenir compte
de la solution qui sera donnée à la seconde
d'ici au 1" juillet.
Les décorations
Le Conseil a reçu communication des dé-
corations faites par les trois derniers minis-
tères qui n'avaient pas encore arrêté leurs
listes: l'intérieur, la justice et l'agriculture.
La clôture de la session
Le Président de la République a signé le
décret de clôture de la session extraordinaire
qui sera lu lundi à la Chambre et au Sénat.
AUTOUR DES CHAMBRES
La fraude des beurres
Les ministres du commerce et de l'agricul-
ture ont été entendus hier par la commission
qui s'occupe de la répression de la fraude des
beurres, afin de donner leur avis en vue de
la discussion qui doit reprendre lundi à la
Chambre.
Le gouvernement accepte les dispositions
du projet de la commission qui aggravent les
pénalités contre les fraudeurs.
Il accepte également les dispositions ten-
dant à soumettre à l'exercice les fabriques de
margarine et à exiger la distinction, par éti-
quettes, de la margarine.
Mais il repousse certaines dispositions,
comme l'interdiction de s'occuper simultané-
ment de l'industrie ou du commerce du beurre
et de la margarine.
Après avoir entendu les explications du
gouvernement, la commission a maintenu
quand même toutes les dispositions du projet
soumis à la Chambre.
Les associations
Le. projet de loi sur les associations sera
déposé par les ministres de l'intérieur et de
la justice aussitôt que le bureau de la Cham-
bre aura été renouvelé.
Le bureau du Sénat
Le Sénat s'étant, comme la Chambre, ajour-
né à demain lundi 11 janvier, la session or-
dinaire s'ouvrira de plein droit le lende-
main 12.
La séance d'ouverture séra présidée par le
doyen, en attendant l'élection du nouveau
président.
Au Sénat, les membres les plus âgés sont
les suivants :
M. Schoelclier, inamovible républicain, né
le 21 juillet 1804 ; ,
M. Barthélemy Saint-Hilaire, inamovible
républicain, né le 19 août 1805 ;
M. Pajot. un membre de la droite, né en
1§06; v
M. Théry, inamovible de droite, né en 1807;
M. Ki-ener, sénateur républicain des Vosges,
né en 1808 ;
Le maréchal Canrobert. Sénateur réaction-
naire de la Charente, né en 1809.
C'est probablement M. Théry qui sera ap-
pelé à être, cette annéo, le président provi-
soire, les membres plus âgés que lui s'étant
récusés ou étant empochés.
L'INFLUENZA
Mort de l'archevêque de Cambrai
Lille, 9 janvier.— C'est à une. attaque
dinfluenza qu'a succombé M. Thibaudier,
archevêque de Cambrai.
L'épidémie fait de rapides progrès dans
la région.
L'aumônier de l'hôpital St-Sauveur, mort
en quelques heures, est une des dernières
victimes.
La variole sévit également avec une ef-
frayante intensité. Les hôpitaux ordi-
naires et l'hospice spécial installé dans
l'école nouvellement construite, sont de-
venus insuffisants, on va être obligé d'a-
ménager six baraquements où seront re-
cueillis les ni&tedçs.
EN ITALIE
SITUATION POLITIQUE ET FINAN-
CIÈRE
Faillites — Grèves - Influenza - Le
pape et le comte de Paris - 10 mil-
lions pour deux chapeaux —
Valeurs et expédients—Pro-
bité commerciale et fran-
chise militaire
(De notre correspondant particulier)
Rome, 8 janvier. — En 1889 et 1890, on
constatait que les faillites concernaient,
en majeure partie, les banques et entre-
prises engagées dans les spéculations du
âtiment. « Aujourd'hui, dit le Messagero,
» de semblables faillites ne peuvent être
» relevées, les entrepreneurs ayant dis-
» paru, la jambe en l'air ». De fait, les
faillites et les muratoria de 1891 concer-
nent spécialement le petit commerce.
Les muratoria, ou délais accordés à ceux
qui déposent leur bilan, sont en nombre
considérable. Cela tient à ce que la mi-
sère rend indulgent. Tel, atteint aujour-
d'hui par l'absence absolue des affaires et
des dépenses, regarde à deux fois avant
de faire tomber son voisin.
En outre, les dépenses pour arriver à
un jugement sont aussi excessives que
im ienteurs. Créditeur et débiteur s'y rui-
nent. On aime mieux transiger. Les ban-
ques, qui sont impitoyables s'il s'agit d'es-
compter, sont d'une largesse absolue, s'il
s'agit de renouveler, sans cette prudence,
qui résisterait? Cette gêne du petit com-
merce inquiète beaucoup.
Une nouvelle preuve de cette gêne gé-
nérale, c'est la grève des cochers de fia-
cre. Rome compte, au dire des statisti-
ques, 450,000 habitants.
Il faut en rabattreeten admetttre 350,000.
Sur ceux-ci, il faut compter 80,000 pau-
vres ou ouvriers sans ressources et 30,000
étrangers flottants. La liberté des fiacres
est illimitée. Il s'en est créé des milliers
pendant la brillante période du bâtiment.
Cette période est finie. On ne dépense
plus rien. Les théâtres sont vides, ou ceux
qui sy rendent ont leur voiture particu-
lière.
Le tarif, très rémunérateur, ne suffit
plus aux 3 à 4,000 cochers sans travail.
D'où la grève. Les cochers ne se plaignent
pas du tarif. Ils veulent empêcher la mu-
nicipalité de concéder certaines lignes de
trams, réclamées par le public. Ils ont
fait un boucan du diable à la dernière
séance du Capitole. Ils injurient et frap-
pent ceux de leurs collègues qui préfèrent
travailler. Ceux-ci ne sortent qu'avec un
agent de police sur leur siège. Les choses
peuvent devenir graves, car le cocher ro -
main est violent, brutal, il a un mépris
infini pour la vie de ses compatriotes.
Loin d'imiter le cocher de Paris, si vigi-
lant et si habile, il laisse son cheval aller
à la dérive et court autour de vous, com-
me le vautour autour du passereau, jus-
qu'à ce qu'il vous ait sali ou renversé. La
population de Rome, qui adore se faire
traîper en « carozza » exècre le cocher et
la gfève.
la grève. L'infiuenza
Avec la grève, nous avons l'influenza.
8 à 10 000 Romains sont atteints et no-
tamment la moitié des médecins en
exercice. ,
Les hôpitaux sont bond.e.s, on ne sait ou
loger les malades.
Une des victimes les plus regrettées de
l'influenza, dans la Haute-Italie, c'est le
capitaine Siccardi, un conférencier d'é-
lite, un ami de la paix et surtout de la
France, dont les congressistes de Milan
et de Rome se souviendront toujours avec
émotion.
L'infiuenza a frappé spécialement sur
le Vatican. Les cardinaux Rampolla, Mo-
naco, La Valette, Laurenzi et surtout
Mermillod, ont été gravement atteints.
Le cardinal Mermillod ne s'en relèvera
pas. Bien qu'on cache son état, nous sa-
vons qu'il est pleinement affecté de gâ-
tisme et nous le déplorons.
Le cardinal Mermillod avait des sympa-
thies très françaises. Il était papable et
si l'on considère, les morts subites ou les
accidents arrivés aux personnages pa-
droit sympathiques à la France, on a le
pables
droit d'être inquiet.
Faut-il rappeler la mort inexpliquée du
cardinal Schiaffino pour se demander
quelle puissance humaine, diabolique ou
divine préside aux destinées de l'Eglise ?
Léon XIII, qu'on croyait mourant, il y a
quelques jours, est plus vaillant que ja-
mais. Il a éprouvé une violente colère à
la lecture de la lettre du comte de Paris.
C'est même cette colère, suivie d'une
prostration de quelques heures qui a fait
croire qu'il avait l'influenza. Le mépris
qu'il a pour le prétendant est complet.
Ce qui a contribué à rendre la santé de
Léon XIII satisfaisante, c'est la nouvelle
que la République ne l'empêcherait pas
d'hériter de Mme de Plessis-Bellière. Ces
dix millions tombant dans l'escarcelle
pontificale, viennent à point pour répa-
rer les gaspillages de M. Folchi. Il y a
quelques années, le Trésor pontifical,
fruit des économies d'Antonelii, Pie IX
et Léon XIII s'élevait à 38 milllions. M.
Folchi l'a réduit à 14 ou 16. Le Saint-Père
était très marri.
Léon XIII se rend parfaitement compte
que sous une monarchie orléaniste, ja-
mais il n'eût touché un sou des dix mil-
lions Plessis-Bellière.
Espérons qu'il se montrera reconnais-
sant envers la République, bonne fille et
qu'au prochain consistoire, il rétablira
l'équilibre entre les chapeaux favorables
et les chapeaux hostiles à la France au
sein du Sacré-Collège.
La chose a une grande importance en
un moment où, d'un jour à l'autre, peut
se réunir le conclave d'où sortira un pape
favorable ou hostile à la triple alliance,
L'Italier l'Allemagne, l'Autriche, l'An-
gleterre ne s'y trompent point, la lutte
est chaude, l'intrigue inouïe, les précau-
tions prises incroyables. On lutte avec tous
les moyens. Il faut reconnaître que la
cause française est en bonnes mains avec
l'ambassadeur actuel, M. de Béhaine, et
que tant qu'ambassade il y aura auprès
du Vatican, la France ferait une folie de
le changer.
Trésor italien
Si le Trésoy paçal se remplit, , oeut-Qj^
en dire autant du Trésor italien, malgré
les expédients fâcheux auxquels on - a
recours? Une circulaire ordonne aux gui-
chets des postes et télégraphes de payer
en argent ou en billets, les mandats pos-
taux versés en or en Italie ou à l'étran-
ger. Perte 2 fr. 50 à 3 francs pour cent
pour le destinataire ou l'envoyeur ; car
on oblige ce dernier à verser en or aux
guichets italiens. Ce que cet expédient
rapportera à l'Etat, je ne sais, mais il
semble que la mesure est absolument
critiquable. Avis aux intéressés.
On sent si bien les expédients écono-
miques auxquels on est réduit que l'en-
thousiasme du public à se rendre acqué-
reur des valeurs italiennes manque tota-
lement.
Voici un tableau édifiant des princi-
pales valeurs italiennes fin 1890 et fin
1891 :
1890 1891
- -
Rente * 95 94
Ville de Rome 440 425
Méridionaux. 695 645
Méditerranée. 556 490
Banque nationale. 1.1700 1.340
» générale. 453 300
» diRoma. 600 305
Crédit mobilier. 545 400
Société immobilière 465 - 228
Moulins. 260 90
Navigation gén#ule 380 332 :■
N'insistons pas. Les chutes de la Ban-
que nationale, de la Banque générale, du
Banco di Roma en disent assez long.
Espérons pour l'Italie, que les traités de
commerce qu'elle vient de conclure avec
l'Allemagne et l'Autriche, et ceux qu'elle
attend de l'Espagne, la Suisse, la Belgi-
que et la Suède, relèveront ses finances
et son commerce.
Celui-ci fera bien de méditer les sages
paroles de l'ambassadeur Menabrea, aux
membres de la colonie italienne lors du
1er janvier et les avertissements des meil-
leurs journaux de la péninsule. « Ne fal-
» sifiez pas vos vins, s'écrie le Pungalo,
» aux viticulteurs du Midi; comment
» voulez-vous que notre marché soit fré-
» quenté, alors que vous trompez l'ache-
o teur sans aucune vergogne et que vous
» falsifiez vos vins avec des ingrédients
» qui abrègent la vie humaine ! »
Et les conseils du général Menabrea :
« Je recommande aux négociants italiens
de ne livrer aux consommateurs que des
produits purs, excellents, et d'apporter
dans leurs relations, l'honnêtete et la
loyauté, seules armes capables de lutter
contre les difficultés passagères résultant
des tarifs - douaniers. » -
Paroles du général Marselli
Il y aurait une arme à employer pour
vaincre ces difficultés; ce serait de ne
plus s'exténuer à fabriquer des fusils pe-
tits calibres, de la poudre sans fumée et
à étudier de nouveaux canons modèle
allemand. Malheureusement, un article
du général Marselli, sénateur, lequel n'a
point vraisemblablement publié sa pensée
sans être muni d'une autorisation, nous
éclaire définitivement sur la politique ita-
lienne.
Le général Marselli critique certains
côtés de l'organisation et de 1 administra-
tion militaires. Il paraît douter qu'avec
l'argent dépensé on ait réalisé tout ce
qu'on aurait pu obtenir. Ce n'est pas là
ce qui nous occupe. Mais le général dé-
montre que les Alpes sont infranchissa-
bles pour l'armée de soft pays ; au con-
traire, elle court le risque d'avoir sur les
bras une armée française. L'armée ita-
lienne ne peut être utilisée avec fruit
qu'hors de son territoire. Elle rendrait de
grands services transportée en Atsace-
orraine. L'armée Italienne doit se prépa-
rer à écraser l'armée française.
Voilà qui est clair. L'objectif avoué de
la politique italienne, ce n'est plus la dé-
fensive, comme on le disait sous Crispi,
c'est l'écrasement de la France, c'est l'of-
fensive contre la France.
Quand on aura employé les douze an-
nées de la triple alliance, à inculquer au
peuple armé ces principes de haine con-
tre notre pays, que restera-t-il des quel-
ques traces encore gallophobes qu'on ren-
contre de ci, de là, au delà des Alpes ?
Voilà ce que nous ne devons pas oublier
sous peine d'être éternellement dupes.
Qu'importent les accès de flirtation de
tel ou tel cabinet, de tel ou tel ministre ;
le fond du sac, c'est : « sus à la France ! »
L'article du général Marselli, publié sous
M. di Rudini, rappelle celui du Piccolo de
Naples, publié sous M. Crispi.
« Il y a huit milliards en numéraire dé-
» posés dans les caves de la Banque de
» France, à Paris. Que nos bersagliers
» s'apprêtent à aller les chercher. »
Rions des deux articles, soit; ne ren-
dons point haine pour haine, encore
mieux, mais n'oublions rien.
OHRONIQUE DU DIMANCHE
LOGEURS ET HOTELIERS
Le monde où l'on vit de l'amour — de
l'amour des autres, bien entendu — est
dans le marasme depuis que le projet de
loi de M. Fallières est venu menacer cette
lucrative industrie.
Le syndicat général de la corporation
des hôteliers-logeurs de Paris, ému de la
situation nouvelle qui paraît devoir lui
être faite, organise, dit-on, une grande réu-
nion à laquelle il convoque les députés et
tous les conseillers municipaux de Paris
afin de protester contre le projet de loi
sur la prostitution.
Ne touchez pas à la prostitution, s'é-
crient les logeurs-hôteliers, du même ton
dont on disait jadis: « Ne touchez pas à
la reine. » Ce que veut cette corporation
c'est tout simplement une loi de protec-
tion. Ces messieurs désirent être proté-
gés à leur tour, comme l'ont été le com-
merce du blé, celui du sucre et celui de la
viande sur pied.
Ils se déclarent d'ailleurs protection-
nistes aussi convaincus que leurs clientes
sont de passionnées libres-échangistes,
et la preuve en est qu'ils ne manquent
pas de frapper d'un droit rémunérateur
— pour eux — la matière première dès
qu'elle franchit le seuil de leurs établis-
sements. Il convient d'ajouter qu'ils ne
pratiquent pas le drawback et que même
lorsque l'objet a cessé de plaire, on ne
rend pas l'argent à la sortie de ces mai-
sons.
Tels sont ces hôteliers, ou mieux ces
tenanciers, que M. le préfet de police, s'a.
dressant à la délégation du syndicat, dé-
nonçait l'autre jour aux sévérités dela cor-
poration. Ceux-là louent leurs chambres
autant de fois dans une soirée que la de-
moiselle du coin de la rue peut trouver à
se louer elle-même, et ne regardent même
pas à laisser retomber leurs portes bâ-
tardes sur des enfants. Mais, à côté de
ces logeurs peu scrupuleux, qui transfor-
ment ainsi leurs établissements en mai-
sons de prostitution clandestine, se trou-
vent une masse de très honnêtes et très
honorables négociants dont les maisons
sont fort bien tenues, et qui cependant
s'effraient, eux aussi, du projet de loi du
gouvernement.
*
* *
C'est que ce projet, comme le disent
j. ustement tous les hôteliers, aurait pour
résultat « de mettre sans garantie ni
contrôle, sous le joug de la police, plu-
sieurs catégories de commerçants et de
consacrer ainsi l'arbitraire le plus absolu
et le plus inique.»
Or, être livré à l'arbitraire de la police,
et de la police des mœurs surtout, dont
les agissements ne sont que trop connus
de la population parisienne en général et
des hôteliers en particulier, est, il faut en
convenir, une perspective qui n'est rien
moins que réjouissante et qui n'est pas
plus rassurante, d'ailleurs, pour les hé-
berges que pour les logeurs.
Quel ne serait pas, dorénavant, rem-
barras des malheureux hôteliers auxquels
défense serait faite, sous les peines les
plus sévères, de recevoir toute femme ou
nile de vertu douteuse.
Un couple débarque dans un hôtel, voit-
on d'ici le logeur exigeant, avant de don-
ner la chambre demandée, la production
d'un acte de mariage en bonne et due
forme. Car enfin, la vertu d'une femme
n'est point inscrite sur son visage, et à
moins de lui demander son état-civil, il
semble assez difficile de savoir si l'homme
qui 1 accompagne est ou n'est pas son lé-
gitime époux.
On objectera, il est vrai, qu'il est cer-
tains signes extérieurs, auxquels l'œil
exercé ec perspicace d'un hôtelier pari-
sien ne saurait se tromper. Et que, rien
ne ressemble moins à un homme en bonne
fortune qu'un mari en voyage conjugal
mais il est facile de se tromper en sein-
blable matière, — les agents de la Sûreté
en savent quelque chose, n'est-il pas vrai:
et il est peu probable qu'un hôte se ris-
querait à commettre une pareille bévue.
D'un autre côté, n'est-il pas profondé-
ment illogique et injuste après avoir au.
torisé sous certaines conditions de pau-
vres créatures a commercer de leur corps,
de les empêcher ensuite de jouir de leur
affreux privilège.
Comment voulez-vous qu'elles exercent
leur triste métier, ces malheureuses, si
vous les chassez de partout et si vous leur
fermez encore les cabinets très peu par-
ticuliers où elles détaillent leurs char-
mes à la clarté pâlotte d'une bougie va-
cillante.
*
* *
Certes, la prostitution doit être répri-
mée et contenue, personne ne le contes-
tera, et il n'est pas un honnête homme
qui ne le désire. Mais les auteurs du pro-
jet qui nous occupe ont-ils un seul ins-
tant sérieusement pu croire que c'est en
fermant aux filles les hôtels garnis qu'ils
entraveront le commerce de la chair à
plaisir ? Pas plus que les rafles si souvent
et si brutalement exécutées, ces moyens
ne seront efficaces ; bien au contraire, ils
deviendront dangereux, car chassées des
taudis où elles sont encore à peu près
sous l'œil de la police, loin de retourner
à l'atelier, les prostituées se réfugieront
chez des matrones aimables et complai-
santes dont les appartements n'ont de se-
cret que la serrure et se prêtent à tous
les ébats.
Et, lorsqu'on aura fermé une de ces
maisons, il s'en rouvrira une seconde, puis
une troisième, parce qu'il n'y a pas et
qu'il ne peut pas y avoir de lois contre la
prostitution, et parce que le nombre des
prostituées ira toujours grandissant, jus-
qu'à ce que le Parlement se soit une bonne
fois décidé à voter une loi sérieuse contre
le souteneur.
Le souteneur, l'homme qui arrache la
fillette à sa famille ou à l'atelier, pour la
livrer à la prostitution et l'exploiter à son
profit, jusqu'à ce qu'il recommence avec
une autre. Voilà .celui qu'il faut attein-
dre, celui qu'il faut impitoyablement frap-
per, celui qui est cause de tout le mal. Il
y en a tant malheureusement de ces êtres-
là, qu'on esi obligé de renoncer à les
arrêter, et que, quand on les arrête, il
faut les relâcher le lendemain, de sorte
que c'est éternellement à recommencer.
Quoiqu'on fasse, il y aura toujours à
Paris de jolies filles, ou simplement de
pauvres filles prêtes à jeter leur bonnets
ou à lancer leurs jupes en grandes envo-
lées par dessus le moulin de la Galette,
et il se trouvera toujours des misérables
qui voudront vivre de la galette provenant
de ce moulin-là.
Mais une bonne loi qui permettrait d'en-
voyer ces jolis messieurs nager dans d'au-
tres eaux que celles du ruisseau parisien,
nous en débarrasserait beaucoup plus vite
et aurait certainement un bien meilleur
résultat que tout autre accommodement,
fût-il « à la maître d'hôtel. »
LE CAS DEJT DOURCHE
Rapport du docteur Garnier. — n
conclut à la folie. — A Sainte-
Anne. — Pétition en faveur de
Mlle Dourche.
Le docteur Garnier a adressé, hier
après-midi, son rapport sur l'état mental
de Mlle Louise Dourche. Il la tient pour
absolument folle.
« Son état mental est, dit-il, le même
qu'en 1890, époque où sa famille a de-
mandé elle-même son internement. »
Voici les détails de ses observations,
Mlle Dourche est affectée d'une débilité
mentale; elle se livre à toutes sortes
d'interprétations délirantes ; elle a le dé-
lire de la persécution ; elle a des halluci-
nations de l'ouïe.
fille QVM que les YâisiQ_s,_c[^L dit-elle.
IW--I I, iii .1, m ,| ,„..,11.,,. .., III
AjOHMSÏRATION. REDACTION ET ANNONCES
1 A PARIS
id — Rue luchel. - le
Les articles non insérés ne seront pas rendus
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JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
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Le Numéro : S centimes
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UN AN 20 FR.
SEIZIÈME ANNÉE — NUMÉRO 5378
☸ -- LUNDI IL JANVIER 1892
21 NIVOSE AN 100
La c-I&A,%TwEltNz p est le sculjburnal
, français ayant son imprimerie et sa
fabrique de papier.
U CHAMBRE ET LE SENAT
Le Sénat poursuit sans bruit et jus-
qu'ici sans incident digne d'être noté,
t discussion du budget qui aurait dû
être définitivement voté avant le 1er
janvier.
Si c'est là tout ce que le Sénat trouve
à dire sur ce budget, ce n'était vrai-
ment pas la peine de revendiquer si ta-
pageusement, il y a quelques jours, le
droit de le discuter à fond et en détail.
Mais il paraît que nous ne perdrons
rien pour attendre, et déjà on peut pré-
voir que le calme des séances actuelles
au Luxembourg va bientôt faire place
à des débats plus corsés.
Les sénateurs ne font en ce moment
que déblayer à la hâte le budget, dont
au fond ils se soucient comme d'une
pomme, et il leur tarde d'arriver au dé-
grèvement de la grande vitesse et sur-
tout à la réforme des frais de justice.
C'est là-dessus que la haute assem-
blée, fière des succès douaniers que la
Chambre lui a laissé remporter, va
faire porter tout son effort, pour tâcher
d'imposer aux élus du suffrage univer-
sel une capitulation effective.
C'est dans ce but que le vote du bud-
get a été retardé et que le provisoire
financier a été décrété.
Le danger d'un pareil conflit est assez
imminent pour que les esprits conci-
liants interviennent déjà en vue d'écar-
ter le dissentiment qui se prépare entre.
les deux Chambres.
Tels, au Sénat, qui d'abord étaient
partis en guerre contre la Chambre,
tout à coup assagis par la proximité d'un
Conflit qui ne saurait manquer d'être
grave, insinuent qu'il serait peut-être
bon pour les pères conscrits de s'en te-
nir aux concessions obtenues sur les
pétroles et de ne pas pousser plus loin
leur pointe.
Repousser la réduction de l'impôt de
la grande vitesse déjà escomptée par le
pays, et la réforme des frais de justice,
parait maintenant un bien gros mor-
ceau à nombre de sénateurs qui en sont
à regretter d'avoir levé un tel lièvre.
Et il est de fait que le Sénat n'a rien
de bon à attendre de cette discussion,
quelle que soit d'ailleurs l'attitude qu'il
adopte.
"Si, se tenant à des objections de pure
forme, il accepte les réformes décidées
par la Chambre, c'est lui qui cédera, et
sa reculade sera d'autant plus humi-
liante que les provocations qui se don-
naient libre carrière au Luxembourg,
il y a quelques jours, la feront davan-
tage ressortir.
Si, s'entêtant dans une folle résis-
tance, la haute assemblée se refuse à
ratifier la réforme populaire des trans-
ports rapides et des frais de justice, la
Chambre à la partie belle pour avoir
raison de cette résistance.
Puisque aussi bien nous sommes
financièrement sous le régime du pro-
visoire, rien ne presse : on a le temps
de voir venir : au refus du Sénat, la
Chambre n'a qu'à opposer purement
et simplement le maintien de sa vo-
lonté première.
-Au suffrage restreint disant : pas de
réformes ; le suffrage universel n'a que
ceci à répondre : pas de budget.
Et nous verrons, les responsabilités
étant bien établies devant le pays, la-
quelle des deux Chambres se lassera la
première à ce jeu, sans compter que
-l'enjeu pourrait bien être la revision.
JIl dépend absolument de la Chambre
que, malgré la résistance éventuelle du
Sénat, les réformes qu'elle a inscrites
au budget de 1892, deviennent des faits
accomplis.
La Chambre se doit d'autant plus de
faire montre de l'énergie nécessaire
pour triompher sur ce point, que la
question qui s'agite en ce moment est
-de savoir si la prépondérance politique
restera au Palais-Bourbon, où l'a placée
la Constitution, ou si elle passera au
Palais du Luxembourg.
Que le Sénat, par sa ténacité, fasse
échouer les réformes en discussion, ce
sera la déchéance du suffrage univer-
sel au profit du suffrage restreint.
Ce sera la République censitaire, la
République du petit nombre, substituée
à la République démocratique.
De nombreux empiètements cons-
ciemment ou instinctivement poursui-
vis par le Sénat sur les attributions de
la Chambre, prouvent bien que tel est
le but que les auteurs responsables de
ces. empiétements se proposent d'at-
teindre. d'a t .-
Le danger de cette situation est évi-
dent : il ne paraît pas possible qu'on
n'en ait pas le sentiment à la Cham-
bre.
Certes, il n'est pas trop tard pour que
les élus du suffrage universel arrêtent
net de pareilles tentatives et rétablis-
sent, dans toute son intégrité, le droit
populaire dont ils sont les défenseurs ;
mais il n'est que temps d'aviser.
Dans sa défense contre l'accapare-
ment sénatorial, la Chambre n'a plus
une seule faute à commettre.
En l'état où elle a laissé les choses
arriver, toute fausse manœuvre de sa
part serait chèrement payée et aurait
immédiatement de graves conséquen-
ces.
Que la Chambre, si elle ne veut pas
abdiquer et si elle ne veut pas nous
faire abdiquer avec elle, défende donc
avec la dernière énergie les réformes
qu'elle a votées dans le budget en dis-
cussion.
Qu'elle se dise bien que c'est le suf-
frage universel lui-même qui est en
jeu.
LA TRAITE DES NEGRES
Les faits sont vrais. — Missionnaires
exclavagistes
On lit dans le Salut public de Lyort :
Aux déclarations de MM. Legrelle-Rogier et
Wouters, nous pouvons répondre, avec la cer-
titude de ne pas être démenti, que nous con-
naissons des témoins oculaires, absolument
dignes de foi, qui ont vu, au Dahomey, des
nègres conduits, les chaînes aux mains et aux
pieds, sur des navires frêtés par l'Etat libre
du Congo, et que les acheteurs d'esclaves ont
eu l'audace de faire, à des missionnaires ca-
tholiques, des propositions en vue d'obtenir
par leur entremise des envois de nègres.
Nous avons aussi, par des amis de Mar-
seille, la confirmation des faits racontés
il y a quatre jours par le Temps et certi-
fiés aujourd'hui par le Salut public.
Seulement notre confrère lyonnais-a
tort de s'étonner que des offres aient été
faites aux missionnaires pour la fourni-
ture de « bois d'ébène ».
L'Etat belge du Congo sait parfaitement
à quoi s'en tenir sur les pratiques des
missionnaires en fait d'esclavage. Il n'i-
gnore pas que, même au Congo français,
les missionnaires achètent des nègres et,
sous prétexte d'en faire des « hommes
libres » les, réduisent au plus pénible des
esclavages.
Nous le démontrerons prochainement.
UN ROI ILLÉGITIME
Un arrêt de la Cour de Leipzig
Il est heureux pour la Cour suprême dé
Leipzig qu'elle ne soit pas sous la coupe
de M. Stambouloff, elle aurait eu -peu
d'agrément.
Elle vient en effet de rendre un arrêt
qui n'est point sans gravité pour le roi
peu légitime du brigand-ministre de Bul-
garie.
Voici les considérants de l'arrêt :
D'après l'article premier du traité de Berlin
du .13 juillet 1878, est-il dit dans l'arrêt, la
Bulgarie bien qu'étant une principauté auto-
nome, n'est pas souveraine, mais bien vassale
du sultan. Or l'article 2 du même traité exige
que l'élection du prince de Bulgarie, pour être
légitime en droit international, soit confirmée
rar la Porte et agréée par les puissances si-
gnataires du traité.
Or, Ferdinand de Saxe-Cobourg et Gotha,
élu prince par le peuple bulgare, ne réunit
pas ces conditions ; il manque à la légitimité
de sa situation le consentement général des
puissances signataires, ainsi que la confir-
mation du sultan.
C'est pour cette seule et unique raison
qu'il faut considérer le prince Ferdinand de
Cobourg comme appartenant toujours à la
maison princière de Saxe-Cobourg et Gotha,
et non comme prince souverain.
C'est gênant pour le prince et pour son
ministre ; et c'est de mauvais augure.
Ils ont déjà rencontré des juges. Ils
pourraient bien, un de ces jours, rencon-
trer les gendarmes.
AU SENAT
Le budget des travaux publics. — La
loi de finances
Le Sénat s'occupe des budgets annexes,
qu'il adopte successivement, ainsi que
l'article D de la loi de finances.
On passe alors au budget du minis-
tère des travaux publics.
- M. Loubet, président de la commission
des finances, prononce un assez long dis-
cours.
Tout en reconnaissant le bon état de
nos finances, il demande qu'on se montre
sobre de dégrèvements, et qu'on ne vote
que les dépenses absolument justifiées.
L'orateur, après avoir passé en revue
les budgets des différents services, exa-
mine assez longuement le budget des tra-
vaux publics. Il termine en demandant
qu'on réduise, dans des conditions raison-
nables, la garantie d'intérêt.
M. Yves Guyot, ministre des travaux
publics, reconnaît le bien fondé des ob-
servations de M. Loubet, mais il déclare
que le gouvernement est très circonspect
dans les travaux à engager. C'est ainsi
que l'exercice 1892 comporte 125 millions
au lieu de 160 réclamés l'année dernière.
Et le ministre ajoute :
Le compte d'exploitation partielle a été sup-
primé sur un certain nombre de lignes et
tous les efforts de l'administration tendent à
le- supprimer sur les autres.
Quant au dégrèvement de la grande vitesse,
il n'y a pas de craintes sérieuses à avoir :
l'abaissement des tarifs devant nécessaire-
ment avoir pour conséquence l'augmentation.
du trafic. En ce qui concerne le budget des
travaux publics, on peut donc envisager l'a-
venir sans inquiétude.
Les 82 premiers chapitres du budget des
travaux publics sont adoptés, après rejet
de deux ou trois amendements insigni-
nants.
Le chapitre 83 (garantie d'intérêts aux
chemins de fer algériens) est réservé.
Le Sénat passe à la discussion de la loi
dfcfQa^ces,
L'article 2 est voté.
Les articles 3, 4 et 5 sont réservés.
Les articles 6 à 24 sont adoptés.
r e Sénat renvoie à la commission des
patentes la proposition adoptée par la
Chambre sur les voitures-réclames.
'article 29 du projet de la Chambre
sur les affiches posées dans les bureaux
de poste est repoussé.
Sont réservés les articles 52, 55, 75 et
79 du projet de la Chambre.
M: Lucien Brun demande la suppression
de l'article 54, lequel déclare qu'à partir
du 1er janvier 1893 les comptes et budgets
des fabriques et consistoires seront sou-
mis à toutes les règles de la comptabilité
publique.
M. Buffet vient à la rescousse, mais le
rapporteur général demande le maintien
de l'article, dans l'intérêt même des com-
munes. Au point de vue financier, il en
résultera une ressource de 6 à 7 millions.
Par 178 voix contre 70, l'article 54 est
adopté.
Les articles 55, 56 et 58 sont également
votés.
M. Boulanger, rapporteur général, de-
mande le rejet de l'article 88 de la Cham-
bre.
On sait que cet article étend le bénéfice
de la loi de 1888, sur les circonstances at-
ténuantes, aux confiscations en matière
d'octroi.
M. Rouvier, ministre des finances, con-
sulté, déclare que le gouvernement garde
sur ce point une neutralité complète.
L'article 88, mis aux voix, est repoussé.
Gare aux fraudeurs 1
Demain lundi, suite de cette discussion
hérissée de chiures.
LE CONSEIL DES MINISTRES
Les traités de commerce
Le Conseil des ministres s'est réuni hier
matin, à l'Elysée, sous la présidence de M..
Carnot.
Il s'est occupé des négociations engagées
avec les puissances en vue de la fixation des
relations commerciales ; il s'est également
occupé de diverses questions extérieures.
Chemins vicinaux et routes
Le Conseil a été saisi ensuite de la ques-
tion de la fusion du service des chemins vi-
cinaux, qui dépend actuellement du ministère
de l'intérieur, avec le service des routes, qui
dépend du ministère des travaux publics.
Cette fusion a été demandée par la Chambre,
qui. comme sanction, n'a voté que pour les
six premiers mois de 1892 les crédits afférents
à ces deux services, afin de mettre le gou-
vernement dans l'obligation de faire voter,
pour le 1" juillet prochain, un projet de loi
réalisant cette réforme. MM. Constans et
Yves Guyot vont s'entendre pour l'élabora-
tion de ce projet de loi.
Nous devons ajouter que le ministre de
l'intérieur va demander à la commission de
la Chambre qui s'occupe de la réforme des
prestations de renoncer à demander la mise
à l'ordre du jour de cette question en ce mo-
ment, comme elle en a manifesté l'intention.
Il y a, en effet, une connexité directe entre
la question des prestations et celle de la victi-
nalité, et il n'est pas possible de résoudre la
première dès maintenant sans tenir compte
de la solution qui sera donnée à la seconde
d'ici au 1" juillet.
Les décorations
Le Conseil a reçu communication des dé-
corations faites par les trois derniers minis-
tères qui n'avaient pas encore arrêté leurs
listes: l'intérieur, la justice et l'agriculture.
La clôture de la session
Le Président de la République a signé le
décret de clôture de la session extraordinaire
qui sera lu lundi à la Chambre et au Sénat.
AUTOUR DES CHAMBRES
La fraude des beurres
Les ministres du commerce et de l'agricul-
ture ont été entendus hier par la commission
qui s'occupe de la répression de la fraude des
beurres, afin de donner leur avis en vue de
la discussion qui doit reprendre lundi à la
Chambre.
Le gouvernement accepte les dispositions
du projet de la commission qui aggravent les
pénalités contre les fraudeurs.
Il accepte également les dispositions ten-
dant à soumettre à l'exercice les fabriques de
margarine et à exiger la distinction, par éti-
quettes, de la margarine.
Mais il repousse certaines dispositions,
comme l'interdiction de s'occuper simultané-
ment de l'industrie ou du commerce du beurre
et de la margarine.
Après avoir entendu les explications du
gouvernement, la commission a maintenu
quand même toutes les dispositions du projet
soumis à la Chambre.
Les associations
Le. projet de loi sur les associations sera
déposé par les ministres de l'intérieur et de
la justice aussitôt que le bureau de la Cham-
bre aura été renouvelé.
Le bureau du Sénat
Le Sénat s'étant, comme la Chambre, ajour-
né à demain lundi 11 janvier, la session or-
dinaire s'ouvrira de plein droit le lende-
main 12.
La séance d'ouverture séra présidée par le
doyen, en attendant l'élection du nouveau
président.
Au Sénat, les membres les plus âgés sont
les suivants :
M. Schoelclier, inamovible républicain, né
le 21 juillet 1804 ; ,
M. Barthélemy Saint-Hilaire, inamovible
républicain, né le 19 août 1805 ;
M. Pajot. un membre de la droite, né en
1§06; v
M. Théry, inamovible de droite, né en 1807;
M. Ki-ener, sénateur républicain des Vosges,
né en 1808 ;
Le maréchal Canrobert. Sénateur réaction-
naire de la Charente, né en 1809.
C'est probablement M. Théry qui sera ap-
pelé à être, cette annéo, le président provi-
soire, les membres plus âgés que lui s'étant
récusés ou étant empochés.
L'INFLUENZA
Mort de l'archevêque de Cambrai
Lille, 9 janvier.— C'est à une. attaque
dinfluenza qu'a succombé M. Thibaudier,
archevêque de Cambrai.
L'épidémie fait de rapides progrès dans
la région.
L'aumônier de l'hôpital St-Sauveur, mort
en quelques heures, est une des dernières
victimes.
La variole sévit également avec une ef-
frayante intensité. Les hôpitaux ordi-
naires et l'hospice spécial installé dans
l'école nouvellement construite, sont de-
venus insuffisants, on va être obligé d'a-
ménager six baraquements où seront re-
cueillis les ni&tedçs.
EN ITALIE
SITUATION POLITIQUE ET FINAN-
CIÈRE
Faillites — Grèves - Influenza - Le
pape et le comte de Paris - 10 mil-
lions pour deux chapeaux —
Valeurs et expédients—Pro-
bité commerciale et fran-
chise militaire
(De notre correspondant particulier)
Rome, 8 janvier. — En 1889 et 1890, on
constatait que les faillites concernaient,
en majeure partie, les banques et entre-
prises engagées dans les spéculations du
âtiment. « Aujourd'hui, dit le Messagero,
» de semblables faillites ne peuvent être
» relevées, les entrepreneurs ayant dis-
» paru, la jambe en l'air ». De fait, les
faillites et les muratoria de 1891 concer-
nent spécialement le petit commerce.
Les muratoria, ou délais accordés à ceux
qui déposent leur bilan, sont en nombre
considérable. Cela tient à ce que la mi-
sère rend indulgent. Tel, atteint aujour-
d'hui par l'absence absolue des affaires et
des dépenses, regarde à deux fois avant
de faire tomber son voisin.
En outre, les dépenses pour arriver à
un jugement sont aussi excessives que
im ienteurs. Créditeur et débiteur s'y rui-
nent. On aime mieux transiger. Les ban-
ques, qui sont impitoyables s'il s'agit d'es-
compter, sont d'une largesse absolue, s'il
s'agit de renouveler, sans cette prudence,
qui résisterait? Cette gêne du petit com-
merce inquiète beaucoup.
Une nouvelle preuve de cette gêne gé-
nérale, c'est la grève des cochers de fia-
cre. Rome compte, au dire des statisti-
ques, 450,000 habitants.
Il faut en rabattreeten admetttre 350,000.
Sur ceux-ci, il faut compter 80,000 pau-
vres ou ouvriers sans ressources et 30,000
étrangers flottants. La liberté des fiacres
est illimitée. Il s'en est créé des milliers
pendant la brillante période du bâtiment.
Cette période est finie. On ne dépense
plus rien. Les théâtres sont vides, ou ceux
qui sy rendent ont leur voiture particu-
lière.
Le tarif, très rémunérateur, ne suffit
plus aux 3 à 4,000 cochers sans travail.
D'où la grève. Les cochers ne se plaignent
pas du tarif. Ils veulent empêcher la mu-
nicipalité de concéder certaines lignes de
trams, réclamées par le public. Ils ont
fait un boucan du diable à la dernière
séance du Capitole. Ils injurient et frap-
pent ceux de leurs collègues qui préfèrent
travailler. Ceux-ci ne sortent qu'avec un
agent de police sur leur siège. Les choses
peuvent devenir graves, car le cocher ro -
main est violent, brutal, il a un mépris
infini pour la vie de ses compatriotes.
Loin d'imiter le cocher de Paris, si vigi-
lant et si habile, il laisse son cheval aller
à la dérive et court autour de vous, com-
me le vautour autour du passereau, jus-
qu'à ce qu'il vous ait sali ou renversé. La
population de Rome, qui adore se faire
traîper en « carozza » exècre le cocher et
la gfève.
la grève. L'infiuenza
Avec la grève, nous avons l'influenza.
8 à 10 000 Romains sont atteints et no-
tamment la moitié des médecins en
exercice. ,
Les hôpitaux sont bond.e.s, on ne sait ou
loger les malades.
Une des victimes les plus regrettées de
l'influenza, dans la Haute-Italie, c'est le
capitaine Siccardi, un conférencier d'é-
lite, un ami de la paix et surtout de la
France, dont les congressistes de Milan
et de Rome se souviendront toujours avec
émotion.
L'infiuenza a frappé spécialement sur
le Vatican. Les cardinaux Rampolla, Mo-
naco, La Valette, Laurenzi et surtout
Mermillod, ont été gravement atteints.
Le cardinal Mermillod ne s'en relèvera
pas. Bien qu'on cache son état, nous sa-
vons qu'il est pleinement affecté de gâ-
tisme et nous le déplorons.
Le cardinal Mermillod avait des sympa-
thies très françaises. Il était papable et
si l'on considère, les morts subites ou les
accidents arrivés aux personnages pa-
droit sympathiques à la France, on a le
pables
droit d'être inquiet.
Faut-il rappeler la mort inexpliquée du
cardinal Schiaffino pour se demander
quelle puissance humaine, diabolique ou
divine préside aux destinées de l'Eglise ?
Léon XIII, qu'on croyait mourant, il y a
quelques jours, est plus vaillant que ja-
mais. Il a éprouvé une violente colère à
la lecture de la lettre du comte de Paris.
C'est même cette colère, suivie d'une
prostration de quelques heures qui a fait
croire qu'il avait l'influenza. Le mépris
qu'il a pour le prétendant est complet.
Ce qui a contribué à rendre la santé de
Léon XIII satisfaisante, c'est la nouvelle
que la République ne l'empêcherait pas
d'hériter de Mme de Plessis-Bellière. Ces
dix millions tombant dans l'escarcelle
pontificale, viennent à point pour répa-
rer les gaspillages de M. Folchi. Il y a
quelques années, le Trésor pontifical,
fruit des économies d'Antonelii, Pie IX
et Léon XIII s'élevait à 38 milllions. M.
Folchi l'a réduit à 14 ou 16. Le Saint-Père
était très marri.
Léon XIII se rend parfaitement compte
que sous une monarchie orléaniste, ja-
mais il n'eût touché un sou des dix mil-
lions Plessis-Bellière.
Espérons qu'il se montrera reconnais-
sant envers la République, bonne fille et
qu'au prochain consistoire, il rétablira
l'équilibre entre les chapeaux favorables
et les chapeaux hostiles à la France au
sein du Sacré-Collège.
La chose a une grande importance en
un moment où, d'un jour à l'autre, peut
se réunir le conclave d'où sortira un pape
favorable ou hostile à la triple alliance,
L'Italier l'Allemagne, l'Autriche, l'An-
gleterre ne s'y trompent point, la lutte
est chaude, l'intrigue inouïe, les précau-
tions prises incroyables. On lutte avec tous
les moyens. Il faut reconnaître que la
cause française est en bonnes mains avec
l'ambassadeur actuel, M. de Béhaine, et
que tant qu'ambassade il y aura auprès
du Vatican, la France ferait une folie de
le changer.
Trésor italien
Si le Trésoy paçal se remplit, , oeut-Qj^
en dire autant du Trésor italien, malgré
les expédients fâcheux auxquels on - a
recours? Une circulaire ordonne aux gui-
chets des postes et télégraphes de payer
en argent ou en billets, les mandats pos-
taux versés en or en Italie ou à l'étran-
ger. Perte 2 fr. 50 à 3 francs pour cent
pour le destinataire ou l'envoyeur ; car
on oblige ce dernier à verser en or aux
guichets italiens. Ce que cet expédient
rapportera à l'Etat, je ne sais, mais il
semble que la mesure est absolument
critiquable. Avis aux intéressés.
On sent si bien les expédients écono-
miques auxquels on est réduit que l'en-
thousiasme du public à se rendre acqué-
reur des valeurs italiennes manque tota-
lement.
Voici un tableau édifiant des princi-
pales valeurs italiennes fin 1890 et fin
1891 :
1890 1891
- -
Rente * 95 94
Ville de Rome 440 425
Méridionaux. 695 645
Méditerranée. 556 490
Banque nationale. 1.1700 1.340
» générale. 453 300
» diRoma. 600 305
Crédit mobilier. 545 400
Société immobilière 465 - 228
Moulins. 260 90
Navigation gén#ule 380 332 :■
N'insistons pas. Les chutes de la Ban-
que nationale, de la Banque générale, du
Banco di Roma en disent assez long.
Espérons pour l'Italie, que les traités de
commerce qu'elle vient de conclure avec
l'Allemagne et l'Autriche, et ceux qu'elle
attend de l'Espagne, la Suisse, la Belgi-
que et la Suède, relèveront ses finances
et son commerce.
Celui-ci fera bien de méditer les sages
paroles de l'ambassadeur Menabrea, aux
membres de la colonie italienne lors du
1er janvier et les avertissements des meil-
leurs journaux de la péninsule. « Ne fal-
» sifiez pas vos vins, s'écrie le Pungalo,
» aux viticulteurs du Midi; comment
» voulez-vous que notre marché soit fré-
» quenté, alors que vous trompez l'ache-
o teur sans aucune vergogne et que vous
» falsifiez vos vins avec des ingrédients
» qui abrègent la vie humaine ! »
Et les conseils du général Menabrea :
« Je recommande aux négociants italiens
de ne livrer aux consommateurs que des
produits purs, excellents, et d'apporter
dans leurs relations, l'honnêtete et la
loyauté, seules armes capables de lutter
contre les difficultés passagères résultant
des tarifs - douaniers. » -
Paroles du général Marselli
Il y aurait une arme à employer pour
vaincre ces difficultés; ce serait de ne
plus s'exténuer à fabriquer des fusils pe-
tits calibres, de la poudre sans fumée et
à étudier de nouveaux canons modèle
allemand. Malheureusement, un article
du général Marselli, sénateur, lequel n'a
point vraisemblablement publié sa pensée
sans être muni d'une autorisation, nous
éclaire définitivement sur la politique ita-
lienne.
Le général Marselli critique certains
côtés de l'organisation et de 1 administra-
tion militaires. Il paraît douter qu'avec
l'argent dépensé on ait réalisé tout ce
qu'on aurait pu obtenir. Ce n'est pas là
ce qui nous occupe. Mais le général dé-
montre que les Alpes sont infranchissa-
bles pour l'armée de soft pays ; au con-
traire, elle court le risque d'avoir sur les
bras une armée française. L'armée ita-
lienne ne peut être utilisée avec fruit
qu'hors de son territoire. Elle rendrait de
grands services transportée en Atsace-
orraine. L'armée Italienne doit se prépa-
rer à écraser l'armée française.
Voilà qui est clair. L'objectif avoué de
la politique italienne, ce n'est plus la dé-
fensive, comme on le disait sous Crispi,
c'est l'écrasement de la France, c'est l'of-
fensive contre la France.
Quand on aura employé les douze an-
nées de la triple alliance, à inculquer au
peuple armé ces principes de haine con-
tre notre pays, que restera-t-il des quel-
ques traces encore gallophobes qu'on ren-
contre de ci, de là, au delà des Alpes ?
Voilà ce que nous ne devons pas oublier
sous peine d'être éternellement dupes.
Qu'importent les accès de flirtation de
tel ou tel cabinet, de tel ou tel ministre ;
le fond du sac, c'est : « sus à la France ! »
L'article du général Marselli, publié sous
M. di Rudini, rappelle celui du Piccolo de
Naples, publié sous M. Crispi.
« Il y a huit milliards en numéraire dé-
» posés dans les caves de la Banque de
» France, à Paris. Que nos bersagliers
» s'apprêtent à aller les chercher. »
Rions des deux articles, soit; ne ren-
dons point haine pour haine, encore
mieux, mais n'oublions rien.
OHRONIQUE DU DIMANCHE
LOGEURS ET HOTELIERS
Le monde où l'on vit de l'amour — de
l'amour des autres, bien entendu — est
dans le marasme depuis que le projet de
loi de M. Fallières est venu menacer cette
lucrative industrie.
Le syndicat général de la corporation
des hôteliers-logeurs de Paris, ému de la
situation nouvelle qui paraît devoir lui
être faite, organise, dit-on, une grande réu-
nion à laquelle il convoque les députés et
tous les conseillers municipaux de Paris
afin de protester contre le projet de loi
sur la prostitution.
Ne touchez pas à la prostitution, s'é-
crient les logeurs-hôteliers, du même ton
dont on disait jadis: « Ne touchez pas à
la reine. » Ce que veut cette corporation
c'est tout simplement une loi de protec-
tion. Ces messieurs désirent être proté-
gés à leur tour, comme l'ont été le com-
merce du blé, celui du sucre et celui de la
viande sur pied.
Ils se déclarent d'ailleurs protection-
nistes aussi convaincus que leurs clientes
sont de passionnées libres-échangistes,
et la preuve en est qu'ils ne manquent
pas de frapper d'un droit rémunérateur
— pour eux — la matière première dès
qu'elle franchit le seuil de leurs établis-
sements. Il convient d'ajouter qu'ils ne
pratiquent pas le drawback et que même
lorsque l'objet a cessé de plaire, on ne
rend pas l'argent à la sortie de ces mai-
sons.
Tels sont ces hôteliers, ou mieux ces
tenanciers, que M. le préfet de police, s'a.
dressant à la délégation du syndicat, dé-
nonçait l'autre jour aux sévérités dela cor-
poration. Ceux-là louent leurs chambres
autant de fois dans une soirée que la de-
moiselle du coin de la rue peut trouver à
se louer elle-même, et ne regardent même
pas à laisser retomber leurs portes bâ-
tardes sur des enfants. Mais, à côté de
ces logeurs peu scrupuleux, qui transfor-
ment ainsi leurs établissements en mai-
sons de prostitution clandestine, se trou-
vent une masse de très honnêtes et très
honorables négociants dont les maisons
sont fort bien tenues, et qui cependant
s'effraient, eux aussi, du projet de loi du
gouvernement.
*
* *
C'est que ce projet, comme le disent
j. ustement tous les hôteliers, aurait pour
résultat « de mettre sans garantie ni
contrôle, sous le joug de la police, plu-
sieurs catégories de commerçants et de
consacrer ainsi l'arbitraire le plus absolu
et le plus inique.»
Or, être livré à l'arbitraire de la police,
et de la police des mœurs surtout, dont
les agissements ne sont que trop connus
de la population parisienne en général et
des hôteliers en particulier, est, il faut en
convenir, une perspective qui n'est rien
moins que réjouissante et qui n'est pas
plus rassurante, d'ailleurs, pour les hé-
berges que pour les logeurs.
Quel ne serait pas, dorénavant, rem-
barras des malheureux hôteliers auxquels
défense serait faite, sous les peines les
plus sévères, de recevoir toute femme ou
nile de vertu douteuse.
Un couple débarque dans un hôtel, voit-
on d'ici le logeur exigeant, avant de don-
ner la chambre demandée, la production
d'un acte de mariage en bonne et due
forme. Car enfin, la vertu d'une femme
n'est point inscrite sur son visage, et à
moins de lui demander son état-civil, il
semble assez difficile de savoir si l'homme
qui 1 accompagne est ou n'est pas son lé-
gitime époux.
On objectera, il est vrai, qu'il est cer-
tains signes extérieurs, auxquels l'œil
exercé ec perspicace d'un hôtelier pari-
sien ne saurait se tromper. Et que, rien
ne ressemble moins à un homme en bonne
fortune qu'un mari en voyage conjugal
mais il est facile de se tromper en sein-
blable matière, — les agents de la Sûreté
en savent quelque chose, n'est-il pas vrai:
et il est peu probable qu'un hôte se ris-
querait à commettre une pareille bévue.
D'un autre côté, n'est-il pas profondé-
ment illogique et injuste après avoir au.
torisé sous certaines conditions de pau-
vres créatures a commercer de leur corps,
de les empêcher ensuite de jouir de leur
affreux privilège.
Comment voulez-vous qu'elles exercent
leur triste métier, ces malheureuses, si
vous les chassez de partout et si vous leur
fermez encore les cabinets très peu par-
ticuliers où elles détaillent leurs char-
mes à la clarté pâlotte d'une bougie va-
cillante.
*
* *
Certes, la prostitution doit être répri-
mée et contenue, personne ne le contes-
tera, et il n'est pas un honnête homme
qui ne le désire. Mais les auteurs du pro-
jet qui nous occupe ont-ils un seul ins-
tant sérieusement pu croire que c'est en
fermant aux filles les hôtels garnis qu'ils
entraveront le commerce de la chair à
plaisir ? Pas plus que les rafles si souvent
et si brutalement exécutées, ces moyens
ne seront efficaces ; bien au contraire, ils
deviendront dangereux, car chassées des
taudis où elles sont encore à peu près
sous l'œil de la police, loin de retourner
à l'atelier, les prostituées se réfugieront
chez des matrones aimables et complai-
santes dont les appartements n'ont de se-
cret que la serrure et se prêtent à tous
les ébats.
Et, lorsqu'on aura fermé une de ces
maisons, il s'en rouvrira une seconde, puis
une troisième, parce qu'il n'y a pas et
qu'il ne peut pas y avoir de lois contre la
prostitution, et parce que le nombre des
prostituées ira toujours grandissant, jus-
qu'à ce que le Parlement se soit une bonne
fois décidé à voter une loi sérieuse contre
le souteneur.
Le souteneur, l'homme qui arrache la
fillette à sa famille ou à l'atelier, pour la
livrer à la prostitution et l'exploiter à son
profit, jusqu'à ce qu'il recommence avec
une autre. Voilà .celui qu'il faut attein-
dre, celui qu'il faut impitoyablement frap-
per, celui qui est cause de tout le mal. Il
y en a tant malheureusement de ces êtres-
là, qu'on esi obligé de renoncer à les
arrêter, et que, quand on les arrête, il
faut les relâcher le lendemain, de sorte
que c'est éternellement à recommencer.
Quoiqu'on fasse, il y aura toujours à
Paris de jolies filles, ou simplement de
pauvres filles prêtes à jeter leur bonnets
ou à lancer leurs jupes en grandes envo-
lées par dessus le moulin de la Galette,
et il se trouvera toujours des misérables
qui voudront vivre de la galette provenant
de ce moulin-là.
Mais une bonne loi qui permettrait d'en-
voyer ces jolis messieurs nager dans d'au-
tres eaux que celles du ruisseau parisien,
nous en débarrasserait beaucoup plus vite
et aurait certainement un bien meilleur
résultat que tout autre accommodement,
fût-il « à la maître d'hôtel. »
LE CAS DEJT DOURCHE
Rapport du docteur Garnier. — n
conclut à la folie. — A Sainte-
Anne. — Pétition en faveur de
Mlle Dourche.
Le docteur Garnier a adressé, hier
après-midi, son rapport sur l'état mental
de Mlle Louise Dourche. Il la tient pour
absolument folle.
« Son état mental est, dit-il, le même
qu'en 1890, époque où sa famille a de-
mandé elle-même son internement. »
Voici les détails de ses observations,
Mlle Dourche est affectée d'une débilité
mentale; elle se livre à toutes sortes
d'interprétations délirantes ; elle a le dé-
lire de la persécution ; elle a des halluci-
nations de l'ouïe.
fille QVM que les YâisiQ_s,_c[^L dit-elle.
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