Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-01-05
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 05 janvier 1906 05 janvier 1906
Description : 1906/01/05 (N10484,A29). 1906/01/05 (N10484,A29).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
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VINGT-NEUVIEME ANNEE. — NUMERO 10,484
VENDREDI 5 JANVIER 1906
16 NIVÔSE. — AN 114
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LES MANUSCRITS NON INSÉRÉS NE SONT PAS RENDUS.
LE NUMERO
5
CENTIMES
tfBMerjKMDen)
4 C'est celui de prêtre. Il parait que le
recrutement du clergé devient difficile.
Ce n'est pas nous qui risquons une
pareille affirmation. D'abord,on ne nous
croirait pas. Ennemis acharnés de la
prétraille, nous sommes suspects aux
bonnes gens. Et puis, nous n'avons vrai-
ment aucun moyen de nous renseigner
sur de pareilles questions, et nous igno-
rons où l'on trouve les statistiques des
séminaires.
Mais la nouvelle nous vient de la
source la plus autorisée qui soit. C'est
La Croix elle-même qui nous l'apporte.
En pareille matière, il convient de citer
ses auteurs. Voici le passage de l'ar-
ticle auquel nous faisons allusion :
a Les entrées dans les petits séminai-
res, écrit le nommé Franc, rédacteur à
La Croix, dans un accès de franchise,
les entrées ont, depuis deux ans, dit-
minué ici d'un quart, là des deux tiers,
et én moyenne, dans Vensemble du
pays, de moitié. Nous tenons de bonne
source ce renseignement attristant. »
A vrai dire, cette nouvelle « attristan-
te » — pas pour nous — ne nous sur-
prend qu'à moitié. Nous pensions bien
que, par ce temps d'incrédulité, les af-
faires de l'Eglise devaient être difficiles
et que les familles pieuses elles-mêmes
hésitaient de plus en plus à engager
leurs fils dans une carrière désormais
ingrate.
La débâcle a dû commencer avec la loi
de trois ans qui a obligé les séminaris-
tes à faire un an de service militaire ;
mais c'est bien pis sans doute depuis
que de législateur a eu l'idée impie de
soumettre les apprentis-curés aux mê-
mes obligations militaires que les au-
tres citoyens. La plupart des séminaris-
tes ne prenaient la soutane que pour
éviter l'uniforme. S'il faut passer par
la caserne pour entrer au presbytère, le
métier devient moins intéressant.
Sous le régime du Concordat, il pré-
sentait encore de sérieux avantages. C'é-
tait un état- douillet et plein d'agré-
ments. Confesser des dévotes, dont quel-
ques-unes fort aimables, marmoter cha-
que matin des bribes de mauvais latin
en buvant un excellent vin de messe,
accompagner les morts au cimetière en
chantant, arroser d'eau salée les nou-
veau-nés, et présider aux épousailles des
jeunes gens, tel est le labeur écrasant
de ces bons apôtres. Tout cela, bien en-
tendu, payé à l'heure et à la course,
sans compter le traitement alloué par
l'Etat. Une position sûre, comme on
voit ; travail! de tout repos fort conve-
nablement rétribué.
Mais voici Qu'une loi fatale vient in-
quiéter les candidats aux fonctions ec-
clésiastiques et leurs familles. Désor-
mais, le séminariste ne sera plus assuré
de recevoir un traitement fixe ; l'Etat
ne garantit plus rien ; ce sont les fidèles
qui paieront.
- Autant dire que le métier de curé
devient impraticable. S'il faut risquer
la misère, ou tout au moins se résoudre
à travailler pour vivre, adieu la voca-
tion ! Les âmes s'arrangeront toutes seu-
les ; les pasteurs vont se chercher d'au-
tre ressources.
Et voilà pourquoi l'industrie religieu-
se ne trouve plus d'amateurs.
La Croix cherche à s'en consoler en
pensant que désormais les prêtres se-
ront de véritables apôtres : « Hier, le
sacerdoce était une position, modeste,
mais assurée (tiens 1 liens 1) ; demain,
il ne sera plus qu'un sacerdoce.. »
Alors, nous sommes bien tranquilles;
le nombre des amateurs va diminuer de
plus en plus.
Et cela prouve que la séparation 'des
Eglises et de l'Etat était en effet la
mesure la plus dangereuse que les ré-
publicains pussent imaginer contre l'E-
glise. Elle n'est entrée en vigueur que
depuis trois jours, et déjà les cléricaux
jettent le cri d'alarme.
Plus de curés ! s'écrient-ils.
Tant mieux pour la République !
'-- »
LES ABUS DE L'INSTRUCTION
Nous n'avions pas attendu le scandale
qui vient de se produire à Marseille — et
dont on lira les détails plus loin - pour
protester contre ,1e pouvoir tout à fait
exorbitant des juges d'instruction. 1
A vrai dire, nous serions presque tentés
éle remercier le maladroit magistrat qui,
en s'en prenant si sottement à « quelqu'un
du bâtiment » mieux placé que tout autre
pour se défendre, attire si bien l'attention
sur les odieux abus commis journellement
dans les cabinets des juges d'instruction.
Toute la basoche s'est émue - et nous
l'en louons fort. Le bâtonnier s'est dérangé
de sa personne et est allé chez le minis-
tre de la justice pester contre l'attentat sa,
crilège commis sur la personne d'un mem-
bre du barreau. Il y avait de quoi, en ef-
fet ; on n'avait pas encore vu un magis-
trat instructeur poussant la folie jusqu'à
porter atteinte aux droits sacrés de la dé-
lense, et inculpant de complicité un avo-
cat
Mais des sacrilèges comme ceux dont
, le bâtonnier, sont jour-
! nellement commis contre dé simples par-
; eiculiera. Au petit bonheur on arrète des
gens contre lesquels il n'existe, bien sou-
vent, que de très vagues présomptions. On
perquisitionne à leur domicile, et par des
notes tendancieuses, on s'efforce de les
déshonorer. Puis, un beau jour, on s'a-
perçoit qu'il n'y a contre eux aucune preu-
ve, et on se décide à les remettre en li-
berté. On leur a fait perdre leur situation,
mais la justice ne les indemnise pas du
double préjudice, matériel et moral, qu'on
leur a causé.
Le juge d'instruction est assurément
l'homme le plus puissant de la Républi-
que : il dispose à son gré de la liberté, de
l'honneur de ses concitoyens, et ceux-ci
n'ont aucun recours contre lui ; il est ir-
responsable, et ses victimes n'ont, pour
ainsi dire, pas de recours contre son ar-
bitraire. -
Comme cette fois la gaffe a été trop
forte, et qu'elle attei-nt un gros personna-
ge, le ministre de la justice sévira certai-
nement. Cependant, frapper un magistrat
ne saurait suffire ; c'est l'institution qui est
condamnée, et c'est elle qu'il faudrait mo-
difier. Malheureusement, pour une réforme
de cette importance, cë n'est pas sur M.
Chaumié qu on peut compter.
LA PETITE GUERRE
-
- Le commerce des bondieuseries a marché,
hier matin, aux alentours de Saint-Etienne-
du-Mont.
Frocard,s et cagots s'étaient donné reri.
dez-vous pour l'ouverture de la neuvaine de
Sainte-Geneviève, patronne de Paris. Et les
calotins avaient été particulièrement pres-
sauts, cette dernière quinzaineen invitant
les Parisiens à fêter, ce cette année surtout »,
leur patronne.
Cette année surtout ? Paris est-il donc en
si grand danger? Il faut croire. On aimerait
pourtant à apprendre quel péril menace, plus
particulièrement au début de 1906, la capi-
tale de la France.
W
La chute de l'année 1905, dans le néant, a
été célébrée à Rome, dans les Catacombes.
« Que de martyrs ont prié là ! » s'exclame
lyriquement un frocard français, qui assista
à cet office. Et il conclut :
« Puisse te faible hommage rendu aux
martyrs nous mériier d'avoir part un jour à
leurs marches triomphales dans les avenues
de la céleste Jérusalem ! »
On se demande avec curiosité quelle ana.
togie rapproche des premiers chrétiens les
chrétiens d'aujourd'hui, martyrs à si bon
compte ? Il est assez douteux que ces der-
niers prennent part aux marches triompha-
les dans les avenues de la céleste Jérusalem.
-LES VICTIMES
Les journaux réactionnaires publient des
extraits d'un discours que M. Lafferre au-
rait, parait-il, prononcé au mois de sep-
tembre dernier, au convent maçonnique. Il
y a, sans doute, encore quelque Bidegain
dans la maçonnerie ; mais, celui qui a
communiqué le discours de M. Lafferre aux
cléricaux, ne leur en a pas donné pour leur
argent, car nous ne voyons pas très
bien quelles importantes révélations il a
pu leur apporter. - - *
Dans ce discours, M. Lafferre constate
qu'un certain nombre de fonctionnaires ré-
publicains, dénoncés par la réaction à la
suite de l'affaire des fiches, ont été injus-
tement frappés, et il regrette de n'avoir
pas encore obtenu pour eux « des répara-
tions qu'on a formellement promis de don-
ner, mais dont on ne peut encore assi-
gner la date ».
Par la reproduction qu'ils viennent de
faire, nos confrères attirent à nouveau
l'attention sur ces victimes, et nous ne
pouvons pas leur en savoir mauvais gré.
Ils rappellent, en effet, aux républicains
qui pourraient l'avoir oublié, leur de-
voir.
Des fonctionnaires ont pâti, uniquement
parce qu'ils avaient fait preuve, aux yeux
des réactionnaires, de trop de vigilance.
On les a frappés tandis que d'autres, no-
toirement cléricaux, ont obtenu de la Ré-
publique qu'ils desservent, faveurs et
avancements.
Ce scandale n'a que trop duré. Mais,
pour réparer de telles injustices, ce n'est
pas à l'énergie républicaine de M. Rou-
vier qu'on peut s'adresser. Il ne serait que
trop enclin à encourager les traîtres, et
à sacrifier les vaillants qui luttent pour le
triomphe de la démocratie.
LE PAPE ALLEMAND
Une dépêche de Rome aux agences an-
nonce que le pape vient de créer, aux Phi-
lippines, une préfecture apostolique, dont
il a confié la direction à un capucin d'Al-
lemagne. Les missionnaires espagnols éta-
blis aux Philippines, avant la conquête de
ces îles par les Etats-Unis, seront rem-
placés par des capucins allemands.
Il nous est parfaitement indifférent,
comme bien on pense, que les missionnai-
res catholiques des Philippines, qui étaient
Espagnols, soient remplacés par des Alle-
mands. Pour les Philippins, mieux vau-
drait pas de missionnaires du tout. Mais,
puisqu'ils les subissent, peu nous chaut
qu'ils soient Allemands ou Espagnols.
Tous les missionnaires se valent.
Cependant, il convient de signaler cette
preuve nouvelle de la grande tendresse
que le pape Sarto, devant qui nos cléri-
caux s'inclinent jusqu'à terre, professe pour
le kaiser. Ce n'est un mystère pour per-
sonne que le successeur de Pecci n'a dû
son élection qu'au velo des cardinaux al-
lemands et autrichiens. Et Sarto n'est pas
un ingrat/Il sert fidèlement les intérêts
de l'Allemagne. Sur l'ordre du Vatican les
catholiques allemands sont devenus les
sujets-les plus soumis de Guillaume. Le
pape fera tout pour reconnaître le service
qu'il a reçu.
Mais, ce qui est tout à fait curieux, c'est
que nos cléricaux de France, lesquels,
comme chacun sait, sont de fervents pa-
triotes, ne songent pas à reprocher à leur
chef son attitude nettement favorable à
l'Allemagne.
C'est donc qu'ils sont moins patriotes
que cléricaux.
On s'en doutait un peu, et depuis long-
temps. Mais il n'est pas mauvais de le
constater une fois de plus.
Tribune Libre
-
L'OISE INDICATRICE
C'est dëJ'Oise, aujourd'hui, que nous
vient la lumière.
Les hommes politiques tant soit peu
au courant des manœuvres de la coa-
lition méliniste et réactionnaire, n'en
avaient pas précisément besoin pour
être édifiés, mais le bon public qu'on
s'efforce de tromper et d'égarer par des
étiquettes, des discours ou des manifes-
tes plus ou moins variés, selon les dé-
partements, fera bien de porter un ins-
tant son attention sur le rôle du méli-
nisme dans l'Oise.
Que dans certains départements on
agite le spectre du socialisme sous un
prétexte quelconque, c'est la monnaie
habituelle de la tactique des modérés
et des ralliés. - Il vous souvient sans
doute-que lorsque M. Méline, président
du Conseil, était interpellé, il ne man-
quait jamais, pour se tirer d'embarrâs,
d'interpeller aussitôt M. Léon Bourgeois
et de lui reprocher les vingt-cinq voix
socialistes qui s'associaient loyalement
aux voix de gauche, à cette époque,
comme aujourd'hui. C'était sa tarte à la
crème.
Mais dans l'Oise, que se passe-t-il en
ce moment, en vue de l'élection sénato-
riale ?
Tout simplement une lutte très nette
entre une liste républicaine sans épithè-
te ou radicale, si vous voulez — quelle
horreur ! — et une liste réactionnaire
et nationaliste.
Un homme depuis longtemps au Par-
lement, M. Cuvinot, d'opinion républi-
caine modérée, a commis ce crime épou-
vantable, après trente-cinq ans de Ré-
publique, de préférer se présenter sur
la liste républicaine, que de s'associer
à la coalition réactionnaire.
Aussitôt, le parti méliniste l'aban-
donne et le voue à son malheureux sort.
Il n'y a pas cependant le plus petit
spectre socialiste dans ce département ;
la liste républicaine présente, avec M.
Cuvinot, deux honorables républicains,
notamment. M. Noël, président de la
commission des douanes à la Chambre
— ô Méline ! — et elle offre toutes les
garanties désirables de compétence et
de dévouement pour les intérêts géné-
raux du pays, comme pour nos institu-
tions républicaines.
Eh ! bien non, çà n'est pas dans le
plan méliniste combiné avec la réac-
tion pour les prochaines élections lé-
gislatives. Il faut faire place aux enne-
mis de la République et marcher en-
semble contre les sincères républicains
de toute nuance.
Remorquons-nous les uns les autres,
se sont dit les coalisés, puisque nous
sommes perdus isolément.
La République française, qui porte
encore en manchette ces mots : fondée
par Gambetta, et que dirige M. Méline,
a signifié son congé à M. Cuvinot. Elle
daigne reconnaître cependant que c'est
un homme de talent qui a rendu de
nombreux services au Parlement, mais
— regrets amers — il ose se présenter
avec des républicains de gauche, contre
la plus pure — oh ! combien — réaction
et le plus ardent nationalisme, cela suf-
fit. C'est un homme perdu ; on le com-
battra à outrance, et ce gage, donné
ainsi aux coalisés cléricaux; réaction-
naires et nationalistes, ne sera pas ou-
blié aux .futures élections générales.
Les bons citoyens de l'Oise sauront
faire, le 7 janvier, la réponse néces-
saire.
Mais ce pacte, aujourd'hui bien éta-
bli, ouvrirait les yeux, s'il en était en-
core besoin, aux républicains de tous
les autres départements.
A la coalition de tous les adversaires
de la démocratie, opposons l'union
complète de tous les républicains.
Victor LEYDET,
Sénateur.
LES CHRÉTIENS ANTIMILITARISTES
Les journaux cléricaux et nationalistes
continuent la campagne de mauvaise foi
qu'ils ont entreprise contre les républicains
en s'efforçant de les rendre tous responsa-
bles des théories émises par M. Hervé et
quelques autres antimilitaristes.
Comme si l'antimilitarisme avait été in-
venté par M. Hervé ! Mais il est vieux com-
me le monde. Les premiers chrétiens ont
été des antimilitaristes convaincus. Si les
cléricaux d'aujourd'hui l'ont oublié, un de
nos confrères, M. J. Cornély, dans Le
Siècle, le leur rappelle.
A cette question qui lui était posée par
un de ses lecteurs : « Vous dites que les
premiers chrétiens furent jadis flétris du
nom de « sans-patrie », pourriez-vous dé-
montrer par des textes irréfutables que les
premiers chrétiens refusaient le service mi-
litaire ? » M. Cornély a répondu que rien
n'était plus facile.
Citant les historiens et les pères de l'E-
glise, il explique :
Origène n'admet pas que les chrétiens
servent dams les armées. Répondant à
Celse, il dit :
Nous autres, chrétiens, nous combattons pour
l'empereur, plus que les autres ; mais nous ne
faisons pas la guerre, alors même que le prince
nous la commande. Nous formons une armée
distincte : l'armée de la prière qui met les priè-
res à Dieu au service de l'empereur.
Et plus loin, répondant au même, Ori-
gène dit encore :
Nous sommes venus, obéissant aux leçons du-
Christ, pour briser les épées. Nous les chan-
geons en socs de charrue. Nous avons désappris
la guerre en devenant des enfants de la paix,
grâce à Jésus qui est devenu notre chef, à la
place des princes de la terre.
Passons maintenant - à Tertullien, dit M;
Cornély, et. il cite ce passage du livre De
idolatria (chapitre XIX) : ,',
Un chrétien peut-il être soldat ? Un soldat
peut-il être chrétien ? Non ; le serment d'allé-
geance divine et le serment d'allégeance hu-
maine, le drapeau du Christ et le drapeau du
diable, le camp de la lumière et le camp des té-
nèbres sont des choses inconciliables. La même
âme ne peut obéir à la fois à Dieu et à l'empe-
reur. Comment faire la guerre ? Comment être
même soldat en temps de paix, alors que le Sei-
gneur a retiré l'épée de nos mains ? Un chre-
tien ne peut se permettre de revêtir un costu-
me qui est la marque d'une profession prohibée.
Et si Origène et Tertullien ne suffisent
pas, voici Lactance :
L'homme juste ne doit pas être soldat, car'
la justice est par elle-même une manière de ser-
vice militaire. Il ne doit pas non plus dénoncer
personne pour un orimie capital, car, que l'on
tue par l'épée ou par la parole, c'est toujours un
meurtre que l'on commet.
On voit que les antimilitaristes d'aujour-
d'hui n'ont rien trouvé de nouveau. Ils sont
même fort en retard, et, en vérité, nous
ne voyons pas par quelle association d'i-
dées ils seraient forcément englobés parmi
les républicains. Les antimilitaristes vien-
nent de tous les partis ; il en est certaine-
ment qui n'ont même jamais été républi-
cains.
Les catholiques ont donc le plus grand
tort de s'en prendre à M. Hervé, qui ne
fait que suivre aujourd'hui les enseigne-
ments des premiers chrétiens.
EN PLEINE ANARCHIE
-
La Libre Parole se lamente à l'idée que
« la mise en application de la loi de sépa-
ration trouve les catholiques dans l'incer-
titude et l'indécision. »
Nous comprenons ces lamentations ; ja-
mais, en effet, l'Eglise catholique ne
fut en plus complète anarchie. Les pau-
vres ratichons de campagne ne savent plus
sur quel pied danser ou, si l'on préfère
un langage moins profane, ils ne savent
à quel saint se vouer.
Les uns leur disent : soumettez-vous à la
loi. Les autres leur crient : résistez ! M. de
Mun, qui ne doit pas passer pour une quan-
tité négligeable dans le monde religieux,
déclare que la loi de séparation est une
loi d'apostasie avec laquelle il n'est pas
d'accommodements possibles.
Le bénédictin Dom Besse, une des som-
mités du monde congréganiste, voudrait
qu'on en vint, une bonne fois, à un non
possumus catégorique. Pour lui, une ré-
sistance passive, fortement organisée dans
trente diocèses, aurait. raison de La loi et
des législateurs. Pauvre homme ! Nous
conseillons, à lui et à ses pareils, d'es-
sayer. Cela nous permetlrait de les balayer
un peu plus vite..
Monsignor Delassus, dans la Semaine
Religieuse de Cambrai est, lui aussi, pour
la résistance. Seulement, à côté de ces vio-
lents, il y a les timorés, les capons qui n'o-
sent pas ; il y a aussi ceux qui se rendent
compte que la foi s'est envolée et qui sen-
tent que toute résistance sérieuse est im-
possible à organiser.
Au milieu de ces avis différents, il est
difficile aux plus malins de s'y reconnaître,
c'est donc un véritable désarroi. Aussi, la
Libre Parole est-elle réduite à faire cette
douloureuse constatation :
« Les évêques n'ont rien dit, les cardi-
naux se sont assemblés, mais ont gardé
le silence et, du haut en bas de la hiérar-
chie, on attend la parole décisive du Saint-
Siège. Espérons qu'elle ne se fera pas long-
temps attendre. »
Souhaitons-le, ô mon dieu ! Mais le saint
esprit paraît bien fatigué, et. tarde fort à
faire connaître son avis. Ce n'est pourtant
pas nous qui devrions être forcés de lui
apprendre tout ce que présente de critique
pour l'Eglise la situation anarchique d'au-
jourd'hui. -
LA VIE D'UNJGNORANTIN
Nos lecteurs connaissent l'histoire du
frère Médard, cet ignorantin qui, après
vingt-neuf ans de travail, comme profes-
seur et comme cuisinier, devenu infirme,
fut jeté hors de sa communauté, muni en
tout et pour tout d'une indemnité de
quinze francs. Le procès intenté par ce
malheureux à la congrégation des frères
des écoles chrétiennes a été jugé hier par
la première chambre du tribunal.
On verra que la congrégation a été con-
damnée à payer à Médard une somme de
3,500 francs et à lui verser une rente via-
gère de 900 francs ou à l'hospitaliser dans
sa - maison de Fleuri-Meudon.
Dans ce jugement, une chose nous in-
quiète : C'est la faculté laissée à la con-
grégation de verser une rente ou d'hospita-
liser l'ancien frère. Si celui-ci est hospita-
lisé, il est permis de se demander quelle
existence va lui être faite par les frères
après ce qui vient de se passer. Les con-
gréganistes voudront certainement se ven-
ger de l'humiliation qu'ils viennent de su-
bir et il n'est pas malaisé de deviner que
la vie du pauvre infirme ne sera pas gaie
tous les jours. Il nous semble fâcheux que
le tribunal n'ait pas envisagé cette situa-
tioni et qu'il n'ait pas simplement con-
damné la congrégation à verser la rente
de 900 francs. Médard eût conservé ainsi
son indépendance
Quoi qu'il en soit, ce procès nous semble
tout à fait édifiant. Quelle touchante soli-
darité de la part de ces hommes qui se
disent égaux et frères en Jésus-Christ.
Parce que l'un d'eux a dû déplaire à quel-
que supérieur, il est jeté au ruisseau dès
qu'il ne peut plus rendre aucun service.
Nous l'avons déjà dit, la suppression des
congrégations aura eu pour effet de libérer
une foule de congréganistes exploités par
les malins et les rouhlards qui les tenaient
sous leur tutelle. L'histoire du frère Mé-
dard n'est certainement pas un cas isolé ;
mais combien en est-il qui, vieillis, habi-
tués à se courber sous la férule de leurs
chefs, usés et affaiblis par une vie abru-
tissante, ont osé entrer en lutte contre leurs
bourreaux et dresser leur pauvre volonté
en face de la puissance, sans frein et sans
contrôle, de leurs supérieurs ? Il en est,
peu, assurément, et c'est pourquoi le scan-
dale d'aujourd'hui nous parait exceptionnel.
A la façon dont ils pratiquent la charité
chrétienne, on peut se rendre compte du
cas que font les calotins des vertus qu'ils
recommandent aux autres. Les tribunaux
nous ont, d'ailleurs, plus d'une fois édifiés
à cet égard.
LA SEPARATION
La commission extra-parlementaire char-
gée d'élaborer le texte du règlement d'ad-
ministration publique pour l'application de
la loi de séparation, s'est réunie hier, au
ministère de l'instruction publique sous la
présidence de M. Bienvenu-Martin
Après une longue discussion, elle a dé-
cidé qu'une sous-commission soumettra un
projet de décret au Conseil d'Etat, concer-
nant les allocations, et pensions prévues
par l'article 11 de la loi de séparation. Le
Conseil d'Etat examinera le projet qui sera
ensuite présenté à la signature des minis-
tres de l'intérieur et des finances et enfin
du président de la République.
Ce décret portera aussi sur les allocations
et pensions attribuées par les départements
et les communes.
Les dossiers des 38,000 candidats à ces
pensions seront examinés par le ministre
de l'instruction publique.
Lespropos. -
da Lanternier
A Londres, sur la façade d'un immeuble im-
posant, on lit :
Club des conversations..
Professeurs de causerie. — Leçons d'anec-
dotes à dire en société. — Choix de bons mois
et de calembours.
Nom d'une pipe 1 Pourvu que le directeur
de cette maison. n'ait pas l'idée de fonder des
succursales à Paris 1 C'est ça qui serait gai.
Je ne crois pas exagérer en disant qu'en
France, il y a un raseur sur quatre habitants.
Voyez-vous cette proportion doublée ou triplée
par le fait de cette innovation. Avouez qu'il y
a de quoi frémir. Pour ma part, mes obliga-
tions professionnelles me mettant chaque jour
en contact avec une quinzaine de gens que je
ne connais pas, je considérerais l'introduction
de cette mode dans notre pays comme une ca-
lamité publique.
Il est vrai que les choses ne se passeraient
pas comme cela, tout à la douce. On prendrait
des mesures. Les affiliés du Club des conver-
sations seraient obligés d'arborer un insigne
assez apparent pour permettre de les recon-
naître de loin et de les éviter. Dame L les au-
tomobiles et les fiacres doivent bien être mu-
nis de fanaux à l'avant. Une voiture n'est
pas plus à craindre qu'un raseur; et, en ou-
tre, elle ne pénètre pas — ou rarement —
dans les cafés. --
Ces temps derniers, on s'est amusé à faire
des mots sur les personnalités parisiennes.
Pour ma part, je n'en ai fait aucun ; mais
d'autres ont travaillé pour moi, et je vous prie
de croire que j'en ai entendu de drôles, de.
raides aussi, et beaucoup. Hé bien, supposez
qu'en dix leçons à cent sous le cachet, le pre-
mier imbécile venu puisse réciter et fabriquer
lui-même cette marchandise. Et voyez ce que
deviennent les relations des êtres humains.
Songez que, dans tout homme, même dans
tout Parisien, il y a un barbier qui sommeille.
Tenez, moi-même, est-ce que je ne suis pas
en train de vous raser, depuis cinq minutes,
avec mes histoires ?
ECHOS
-
TOUT AUÈS DU SOLEIL
Qui se serait douté que hier était le jour de
l'année où la terre passe le plus près du so-
leil, — autrement dit, et astronomiquement
parlant, passe au périhélie ?
Cet excellent voisinage de la terre et du so-
leil va-t-il nous amener des jours moins som-
bres ?
AU. LUXEMBOURG
Il y a des gens qui tiennent absolument à
voir le jardin du Luxembourg peuplé de sta-
tues.
Ainsi le monument de Georges Sand, inau-
guré il y a un an et demi dans le jardin, avant
été enlevé de son piédestal et n'y ayant pas
été replacé, quelques personnes ont manifesté
à la fois une profonde surprise et un vif cha-
grin.
A la vérité, le groupe inauguré en 1904 était
un simple moulage en plâtre. Il n'aurait pas
résisté longtemps aux intempéries et le sta-
tuaire, d'autre part, était désireux de l'expo-
ser au Salon.
Le groupe en marbre destiné à succéder au
groupe en plâtre sera prêt ces jours-çi; il sera
mis en place vers la fin de février. Du moins
on l'espère.
vwv
9.052 MAINS
Une dépêche de New-York annonce que,
à la réception du premier de l'an, le président
Roosevelt a serré la main à 9.052 visiteurs en
trois heures quarante-quatre minutes : c'est
considéré comme un record.
Un orchestre jouait, pendant tout le temps
de la réunion, des airs entraînants.
Les airs entraînants s'imposaient, ne vous
semble-t-il pas ?
vwv
OU EST NÉ COLOMB '?
Sept villes se disputaient la gloire d'avoir
vu naître Homère?
Un non moins grand nombre de villes re-
vendiquaient l'honneur d'être le lieu de nais-
sance de Christophe Colomb.
Pour couper court à des controverses qui
duraient depuis des années, un historien gé-
nois vient de publier un fac-similé du dé-
cret du doge de Gênes qui; en 1451, nom-
mait Dominique Colombo, père de Christo-
phe, gardien de la tour Ogivella.
C'est au mois d'octobre de cette même an-
née que Christophe Colomb naquit à Gênes.
vwv
LE SUFFRAGE DES FEMMES
La Société « Le Suffrage des femmes »
vient d'éditer une carte postale et un timbre
spéciaux représentant un homme et une
femme déposant chacun un bulletin de vote,
dans l'urne électorale.
Timbre et carte postale se trouvent au
siège de la Société « Le Suffrage des fem- j
mes n, 151, rue de la Roquette.
- Passe.Partout. j
LES CHEFS D'ETAT
COMMENT ILS SONT ELUS
Les collèges électoraux présidentiels. — Il
Constitution de 1875. — La Gonstitu-
tion américaine de 1787. — La Con-
fédération suisse. — Le scrutin *
à deux degrés et le système - ,
plébiscitaire.
Dans quelques jours, le Sénat et la
Chambre des députés, réunis en Assem-
blée nationale au palais de Versailles, au-
ront à désigner le successeur de M. Lou-
bet à la présidence de la République.
Cependant, M. Loubet ayant été élu pré-
sident pour sept ans. le 18 février 1899,
son mandat ne prendra fin que le 18 fé.
vrier prochain ; mais l'article 3 de la troi-
sième loi constitutionnelle porte que : « un
mois au moins avant le terme légal des
pouvoirs du président de la République,
les Chambres devront être réunies en As-
semblée nationale pour procéder à l'élec-
tion du nouveau président. »
Pendant un mois, nous aurons donc deux
présidents au lieu d'un : un président effec-
tif qui restera à son poste jusqu'au terme
de son mandat, et un président présomptif.
qui attendra son tour d'aller s'installer à
1 Elysée. C'est la première fois que les
Français se trouveront à pareille fête. De-
puis, en effet, que la Constitution de 1875
est en vigueur, seul, M. Jules Grévy est
arrivé au terme de son mandat lors de sa
première présidence de 1879 à 1886 ; ré-
à cette occasion, le 28 décembre 1885, il fut
à la fois président effectif et président pré-
somptif jusqu'au 31 janvier suivante
Au cas où le gouvernement négligerait
de convoquer l'Assemblée nationale, le Sé-
nat et la Chambre des députés se réuni-
raient de plein droit quinze jours avant le
terme légal des pouvoirs présidentiels.
Nous avons cru, à l'approche de cette
élection, que le moment était propice de
passer en revue les divers modes d'élection
à la magistrature suprême dans les pays
où ces fonctions sont électives.
En France
La. Constitution de 1875 stipule que le
collège électoral présidentiel sera formé
par la réunion des sénateurs et des députés
en Assemblée nationale ; elle a même eu
soin de fixer le lieu de la réunion, au pa-
lais de Versailles.
L'Assemuiee nationale est présidée par
le président du Sénat, assisté de ses secré-
taires. L'élection « lieu au scrutin se-
cret par appel nominal, à la majorité ab-
solue des suffrages.
Le choix des électeurs présidentiels peut
se porter sur tout citoyen français jouis-
sant de ses droits civils et politiques. Le
président sortant est rééligible. Seuls, les
descendants des familles ayant régné en
France sont inéligibles. •
La proclamation des résultats du scrutin
est faite, séance tenante, par le président
de l'Assemblée nationale ; si aucun des
candidats n'a réuni la majorité absolue, il
est procédé à un nouveau tour de scrutin,
jusqua ce que cette majorité soit obtenue.
Nous avons dit que, lorsqu'un président
arrive au terme de son mandat, l'Assem-
blée nationale doit être convoquée au moins
un mois avant ce terme. En cas de décès
ou de démission, les électeurs sénatoriaux
se réunissent « immédiatement » de plein
droit. Néanmoins, l'usage s'est établi que
la réunion n'a lieu que le lendemain du dé-
cès ou de la démission.
Pour terminer, disons que la Constitution
alloue à l'heureux élu un traitement de
600,000 fr.. plus une indemnité de 600,000
francs pour frais de représentation et de
déplacement.
Etats-Unis
L'élection du président de la grande Ré-
publique nord-américaine se fait au scru-
tin à deux degrés, en vertu de l'article 2,
section 1, (de la Constitution de 1787, ainsi
conçu :
Le président des Etats-Unis est investi du pou-
voir exécutif ; il exerce ses fonctions pendant
le terme de quatre ans, son élection et celle du
vice-président, élu pour le même terme, ont lieu
ainsi - qu'il suit : chaque Etat nommera de 4a
manière qui sera prescrite par sa législature, un
nombre d'électeurs égal au nombre total de sé-
nateurs et de représentante que l'Etat envoie au
Congrès ; mais aucun sénateur ou représentant,
ni aucune personne possédant une fonction ho-
norifique ou salariée sous l'autorité des Etats-
Unis, ne peut être nommé électeur.
Ainsi, à l'inverse de ce qui a lieu en Fran-
ce, où le collège électoral présidentiel est
formé par la réunion des deux Chambres
en exercice, aux Etats-Unis, ce collège se
compose d'électeurs spécialement nommés
à cet effet, et les membres des Chambres
ne peuvent point en faire partie.
On sait combien les campagnes pour l'é-
lection présidentielle aux Etats-Unis sont
agitées. Les deux grands partis qui se sont
disputé, jusqu'à présent, le pouvoir, tes
républicains et les démocrates, ont recours
à tous les moyens pour triompher. Les
chefs réunis en Convention commencent
par désigner les candidats à la présidence
et à la vice-présidence, chargés de soutenir
les intérêts du partL
Une fois cette désignation faite, on lance
des millions de brochures et de prospec-
tus ; on adresse à tous les électeurs les
photographies des candidats, tandis que
d'innombrables orateurs, délégués par le
comité central, vont stimuler les ardeurs
et porter la bonne parole jusque dans les
bourgades les plus reculées. Tout cela ne
va pas sans occasionner des frais énor-
mes : on a calculé que chacun des deux
grands partis américains avait dépensé
dans les 80 millions pour les dernières élec-
tions présidentielles.
Une fois les électeurs présidentiels élus
par les Assemblées primaires, on connaît
à une voix près, le chiffre qu'obtiendront
les dfvers candidats à la présidence et à la
vice-présidence, car le mandat est impé-
ratif.
Au lieu de se réunir en une Assemblée
unique, les électeurs présidentiels, ainsi
més par le suffrage universel,se réunissent
dans leurs Etats respectifs. Ils votent au
scrutin secret et par bulletihs sépares, pour
le président et le vice-président, dont un
au moins ne devra pas habiter l'Etat dont
fjs sont les mandataires. Les résultats des
v,Dll," signés, certifiés et. scellés, sont adres-
sés au président du Sénat, au siège du gou-
vernement des Etats-Unis qui ouvre tous
5
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VINGT-NEUVIEME ANNEE. — NUMERO 10,484
VENDREDI 5 JANVIER 1906
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LE NUMERO
5
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tfBMerjKMDen)
4 C'est celui de prêtre. Il parait que le
recrutement du clergé devient difficile.
Ce n'est pas nous qui risquons une
pareille affirmation. D'abord,on ne nous
croirait pas. Ennemis acharnés de la
prétraille, nous sommes suspects aux
bonnes gens. Et puis, nous n'avons vrai-
ment aucun moyen de nous renseigner
sur de pareilles questions, et nous igno-
rons où l'on trouve les statistiques des
séminaires.
Mais la nouvelle nous vient de la
source la plus autorisée qui soit. C'est
La Croix elle-même qui nous l'apporte.
En pareille matière, il convient de citer
ses auteurs. Voici le passage de l'ar-
ticle auquel nous faisons allusion :
a Les entrées dans les petits séminai-
res, écrit le nommé Franc, rédacteur à
La Croix, dans un accès de franchise,
les entrées ont, depuis deux ans, dit-
minué ici d'un quart, là des deux tiers,
et én moyenne, dans Vensemble du
pays, de moitié. Nous tenons de bonne
source ce renseignement attristant. »
A vrai dire, cette nouvelle « attristan-
te » — pas pour nous — ne nous sur-
prend qu'à moitié. Nous pensions bien
que, par ce temps d'incrédulité, les af-
faires de l'Eglise devaient être difficiles
et que les familles pieuses elles-mêmes
hésitaient de plus en plus à engager
leurs fils dans une carrière désormais
ingrate.
La débâcle a dû commencer avec la loi
de trois ans qui a obligé les séminaris-
tes à faire un an de service militaire ;
mais c'est bien pis sans doute depuis
que de législateur a eu l'idée impie de
soumettre les apprentis-curés aux mê-
mes obligations militaires que les au-
tres citoyens. La plupart des séminaris-
tes ne prenaient la soutane que pour
éviter l'uniforme. S'il faut passer par
la caserne pour entrer au presbytère, le
métier devient moins intéressant.
Sous le régime du Concordat, il pré-
sentait encore de sérieux avantages. C'é-
tait un état- douillet et plein d'agré-
ments. Confesser des dévotes, dont quel-
ques-unes fort aimables, marmoter cha-
que matin des bribes de mauvais latin
en buvant un excellent vin de messe,
accompagner les morts au cimetière en
chantant, arroser d'eau salée les nou-
veau-nés, et présider aux épousailles des
jeunes gens, tel est le labeur écrasant
de ces bons apôtres. Tout cela, bien en-
tendu, payé à l'heure et à la course,
sans compter le traitement alloué par
l'Etat. Une position sûre, comme on
voit ; travail! de tout repos fort conve-
nablement rétribué.
Mais voici Qu'une loi fatale vient in-
quiéter les candidats aux fonctions ec-
clésiastiques et leurs familles. Désor-
mais, le séminariste ne sera plus assuré
de recevoir un traitement fixe ; l'Etat
ne garantit plus rien ; ce sont les fidèles
qui paieront.
- Autant dire que le métier de curé
devient impraticable. S'il faut risquer
la misère, ou tout au moins se résoudre
à travailler pour vivre, adieu la voca-
tion ! Les âmes s'arrangeront toutes seu-
les ; les pasteurs vont se chercher d'au-
tre ressources.
Et voilà pourquoi l'industrie religieu-
se ne trouve plus d'amateurs.
La Croix cherche à s'en consoler en
pensant que désormais les prêtres se-
ront de véritables apôtres : « Hier, le
sacerdoce était une position, modeste,
mais assurée (tiens 1 liens 1) ; demain,
il ne sera plus qu'un sacerdoce.. »
Alors, nous sommes bien tranquilles;
le nombre des amateurs va diminuer de
plus en plus.
Et cela prouve que la séparation 'des
Eglises et de l'Etat était en effet la
mesure la plus dangereuse que les ré-
publicains pussent imaginer contre l'E-
glise. Elle n'est entrée en vigueur que
depuis trois jours, et déjà les cléricaux
jettent le cri d'alarme.
Plus de curés ! s'écrient-ils.
Tant mieux pour la République !
'-- »
LES ABUS DE L'INSTRUCTION
Nous n'avions pas attendu le scandale
qui vient de se produire à Marseille — et
dont on lira les détails plus loin - pour
protester contre ,1e pouvoir tout à fait
exorbitant des juges d'instruction. 1
A vrai dire, nous serions presque tentés
éle remercier le maladroit magistrat qui,
en s'en prenant si sottement à « quelqu'un
du bâtiment » mieux placé que tout autre
pour se défendre, attire si bien l'attention
sur les odieux abus commis journellement
dans les cabinets des juges d'instruction.
Toute la basoche s'est émue - et nous
l'en louons fort. Le bâtonnier s'est dérangé
de sa personne et est allé chez le minis-
tre de la justice pester contre l'attentat sa,
crilège commis sur la personne d'un mem-
bre du barreau. Il y avait de quoi, en ef-
fet ; on n'avait pas encore vu un magis-
trat instructeur poussant la folie jusqu'à
porter atteinte aux droits sacrés de la dé-
lense, et inculpant de complicité un avo-
cat
Mais des sacrilèges comme ceux dont
, le bâtonnier, sont jour-
! nellement commis contre dé simples par-
; eiculiera. Au petit bonheur on arrète des
gens contre lesquels il n'existe, bien sou-
vent, que de très vagues présomptions. On
perquisitionne à leur domicile, et par des
notes tendancieuses, on s'efforce de les
déshonorer. Puis, un beau jour, on s'a-
perçoit qu'il n'y a contre eux aucune preu-
ve, et on se décide à les remettre en li-
berté. On leur a fait perdre leur situation,
mais la justice ne les indemnise pas du
double préjudice, matériel et moral, qu'on
leur a causé.
Le juge d'instruction est assurément
l'homme le plus puissant de la Républi-
que : il dispose à son gré de la liberté, de
l'honneur de ses concitoyens, et ceux-ci
n'ont aucun recours contre lui ; il est ir-
responsable, et ses victimes n'ont, pour
ainsi dire, pas de recours contre son ar-
bitraire. -
Comme cette fois la gaffe a été trop
forte, et qu'elle attei-nt un gros personna-
ge, le ministre de la justice sévira certai-
nement. Cependant, frapper un magistrat
ne saurait suffire ; c'est l'institution qui est
condamnée, et c'est elle qu'il faudrait mo-
difier. Malheureusement, pour une réforme
de cette importance, cë n'est pas sur M.
Chaumié qu on peut compter.
LA PETITE GUERRE
-
- Le commerce des bondieuseries a marché,
hier matin, aux alentours de Saint-Etienne-
du-Mont.
Frocard,s et cagots s'étaient donné reri.
dez-vous pour l'ouverture de la neuvaine de
Sainte-Geneviève, patronne de Paris. Et les
calotins avaient été particulièrement pres-
sauts, cette dernière quinzaineen invitant
les Parisiens à fêter, ce cette année surtout »,
leur patronne.
Cette année surtout ? Paris est-il donc en
si grand danger? Il faut croire. On aimerait
pourtant à apprendre quel péril menace, plus
particulièrement au début de 1906, la capi-
tale de la France.
W
La chute de l'année 1905, dans le néant, a
été célébrée à Rome, dans les Catacombes.
« Que de martyrs ont prié là ! » s'exclame
lyriquement un frocard français, qui assista
à cet office. Et il conclut :
« Puisse te faible hommage rendu aux
martyrs nous mériier d'avoir part un jour à
leurs marches triomphales dans les avenues
de la céleste Jérusalem ! »
On se demande avec curiosité quelle ana.
togie rapproche des premiers chrétiens les
chrétiens d'aujourd'hui, martyrs à si bon
compte ? Il est assez douteux que ces der-
niers prennent part aux marches triompha-
les dans les avenues de la céleste Jérusalem.
-LES VICTIMES
Les journaux réactionnaires publient des
extraits d'un discours que M. Lafferre au-
rait, parait-il, prononcé au mois de sep-
tembre dernier, au convent maçonnique. Il
y a, sans doute, encore quelque Bidegain
dans la maçonnerie ; mais, celui qui a
communiqué le discours de M. Lafferre aux
cléricaux, ne leur en a pas donné pour leur
argent, car nous ne voyons pas très
bien quelles importantes révélations il a
pu leur apporter. - - *
Dans ce discours, M. Lafferre constate
qu'un certain nombre de fonctionnaires ré-
publicains, dénoncés par la réaction à la
suite de l'affaire des fiches, ont été injus-
tement frappés, et il regrette de n'avoir
pas encore obtenu pour eux « des répara-
tions qu'on a formellement promis de don-
ner, mais dont on ne peut encore assi-
gner la date ».
Par la reproduction qu'ils viennent de
faire, nos confrères attirent à nouveau
l'attention sur ces victimes, et nous ne
pouvons pas leur en savoir mauvais gré.
Ils rappellent, en effet, aux républicains
qui pourraient l'avoir oublié, leur de-
voir.
Des fonctionnaires ont pâti, uniquement
parce qu'ils avaient fait preuve, aux yeux
des réactionnaires, de trop de vigilance.
On les a frappés tandis que d'autres, no-
toirement cléricaux, ont obtenu de la Ré-
publique qu'ils desservent, faveurs et
avancements.
Ce scandale n'a que trop duré. Mais,
pour réparer de telles injustices, ce n'est
pas à l'énergie républicaine de M. Rou-
vier qu'on peut s'adresser. Il ne serait que
trop enclin à encourager les traîtres, et
à sacrifier les vaillants qui luttent pour le
triomphe de la démocratie.
LE PAPE ALLEMAND
Une dépêche de Rome aux agences an-
nonce que le pape vient de créer, aux Phi-
lippines, une préfecture apostolique, dont
il a confié la direction à un capucin d'Al-
lemagne. Les missionnaires espagnols éta-
blis aux Philippines, avant la conquête de
ces îles par les Etats-Unis, seront rem-
placés par des capucins allemands.
Il nous est parfaitement indifférent,
comme bien on pense, que les missionnai-
res catholiques des Philippines, qui étaient
Espagnols, soient remplacés par des Alle-
mands. Pour les Philippins, mieux vau-
drait pas de missionnaires du tout. Mais,
puisqu'ils les subissent, peu nous chaut
qu'ils soient Allemands ou Espagnols.
Tous les missionnaires se valent.
Cependant, il convient de signaler cette
preuve nouvelle de la grande tendresse
que le pape Sarto, devant qui nos cléri-
caux s'inclinent jusqu'à terre, professe pour
le kaiser. Ce n'est un mystère pour per-
sonne que le successeur de Pecci n'a dû
son élection qu'au velo des cardinaux al-
lemands et autrichiens. Et Sarto n'est pas
un ingrat/Il sert fidèlement les intérêts
de l'Allemagne. Sur l'ordre du Vatican les
catholiques allemands sont devenus les
sujets-les plus soumis de Guillaume. Le
pape fera tout pour reconnaître le service
qu'il a reçu.
Mais, ce qui est tout à fait curieux, c'est
que nos cléricaux de France, lesquels,
comme chacun sait, sont de fervents pa-
triotes, ne songent pas à reprocher à leur
chef son attitude nettement favorable à
l'Allemagne.
C'est donc qu'ils sont moins patriotes
que cléricaux.
On s'en doutait un peu, et depuis long-
temps. Mais il n'est pas mauvais de le
constater une fois de plus.
Tribune Libre
-
L'OISE INDICATRICE
C'est dëJ'Oise, aujourd'hui, que nous
vient la lumière.
Les hommes politiques tant soit peu
au courant des manœuvres de la coa-
lition méliniste et réactionnaire, n'en
avaient pas précisément besoin pour
être édifiés, mais le bon public qu'on
s'efforce de tromper et d'égarer par des
étiquettes, des discours ou des manifes-
tes plus ou moins variés, selon les dé-
partements, fera bien de porter un ins-
tant son attention sur le rôle du méli-
nisme dans l'Oise.
Que dans certains départements on
agite le spectre du socialisme sous un
prétexte quelconque, c'est la monnaie
habituelle de la tactique des modérés
et des ralliés. - Il vous souvient sans
doute-que lorsque M. Méline, président
du Conseil, était interpellé, il ne man-
quait jamais, pour se tirer d'embarrâs,
d'interpeller aussitôt M. Léon Bourgeois
et de lui reprocher les vingt-cinq voix
socialistes qui s'associaient loyalement
aux voix de gauche, à cette époque,
comme aujourd'hui. C'était sa tarte à la
crème.
Mais dans l'Oise, que se passe-t-il en
ce moment, en vue de l'élection sénato-
riale ?
Tout simplement une lutte très nette
entre une liste républicaine sans épithè-
te ou radicale, si vous voulez — quelle
horreur ! — et une liste réactionnaire
et nationaliste.
Un homme depuis longtemps au Par-
lement, M. Cuvinot, d'opinion républi-
caine modérée, a commis ce crime épou-
vantable, après trente-cinq ans de Ré-
publique, de préférer se présenter sur
la liste républicaine, que de s'associer
à la coalition réactionnaire.
Aussitôt, le parti méliniste l'aban-
donne et le voue à son malheureux sort.
Il n'y a pas cependant le plus petit
spectre socialiste dans ce département ;
la liste républicaine présente, avec M.
Cuvinot, deux honorables républicains,
notamment. M. Noël, président de la
commission des douanes à la Chambre
— ô Méline ! — et elle offre toutes les
garanties désirables de compétence et
de dévouement pour les intérêts géné-
raux du pays, comme pour nos institu-
tions républicaines.
Eh ! bien non, çà n'est pas dans le
plan méliniste combiné avec la réac-
tion pour les prochaines élections lé-
gislatives. Il faut faire place aux enne-
mis de la République et marcher en-
semble contre les sincères républicains
de toute nuance.
Remorquons-nous les uns les autres,
se sont dit les coalisés, puisque nous
sommes perdus isolément.
La République française, qui porte
encore en manchette ces mots : fondée
par Gambetta, et que dirige M. Méline,
a signifié son congé à M. Cuvinot. Elle
daigne reconnaître cependant que c'est
un homme de talent qui a rendu de
nombreux services au Parlement, mais
— regrets amers — il ose se présenter
avec des républicains de gauche, contre
la plus pure — oh ! combien — réaction
et le plus ardent nationalisme, cela suf-
fit. C'est un homme perdu ; on le com-
battra à outrance, et ce gage, donné
ainsi aux coalisés cléricaux; réaction-
naires et nationalistes, ne sera pas ou-
blié aux .futures élections générales.
Les bons citoyens de l'Oise sauront
faire, le 7 janvier, la réponse néces-
saire.
Mais ce pacte, aujourd'hui bien éta-
bli, ouvrirait les yeux, s'il en était en-
core besoin, aux républicains de tous
les autres départements.
A la coalition de tous les adversaires
de la démocratie, opposons l'union
complète de tous les républicains.
Victor LEYDET,
Sénateur.
LES CHRÉTIENS ANTIMILITARISTES
Les journaux cléricaux et nationalistes
continuent la campagne de mauvaise foi
qu'ils ont entreprise contre les républicains
en s'efforçant de les rendre tous responsa-
bles des théories émises par M. Hervé et
quelques autres antimilitaristes.
Comme si l'antimilitarisme avait été in-
venté par M. Hervé ! Mais il est vieux com-
me le monde. Les premiers chrétiens ont
été des antimilitaristes convaincus. Si les
cléricaux d'aujourd'hui l'ont oublié, un de
nos confrères, M. J. Cornély, dans Le
Siècle, le leur rappelle.
A cette question qui lui était posée par
un de ses lecteurs : « Vous dites que les
premiers chrétiens furent jadis flétris du
nom de « sans-patrie », pourriez-vous dé-
montrer par des textes irréfutables que les
premiers chrétiens refusaient le service mi-
litaire ? » M. Cornély a répondu que rien
n'était plus facile.
Citant les historiens et les pères de l'E-
glise, il explique :
Origène n'admet pas que les chrétiens
servent dams les armées. Répondant à
Celse, il dit :
Nous autres, chrétiens, nous combattons pour
l'empereur, plus que les autres ; mais nous ne
faisons pas la guerre, alors même que le prince
nous la commande. Nous formons une armée
distincte : l'armée de la prière qui met les priè-
res à Dieu au service de l'empereur.
Et plus loin, répondant au même, Ori-
gène dit encore :
Nous sommes venus, obéissant aux leçons du-
Christ, pour briser les épées. Nous les chan-
geons en socs de charrue. Nous avons désappris
la guerre en devenant des enfants de la paix,
grâce à Jésus qui est devenu notre chef, à la
place des princes de la terre.
Passons maintenant - à Tertullien, dit M;
Cornély, et. il cite ce passage du livre De
idolatria (chapitre XIX) : ,',
Un chrétien peut-il être soldat ? Un soldat
peut-il être chrétien ? Non ; le serment d'allé-
geance divine et le serment d'allégeance hu-
maine, le drapeau du Christ et le drapeau du
diable, le camp de la lumière et le camp des té-
nèbres sont des choses inconciliables. La même
âme ne peut obéir à la fois à Dieu et à l'empe-
reur. Comment faire la guerre ? Comment être
même soldat en temps de paix, alors que le Sei-
gneur a retiré l'épée de nos mains ? Un chre-
tien ne peut se permettre de revêtir un costu-
me qui est la marque d'une profession prohibée.
Et si Origène et Tertullien ne suffisent
pas, voici Lactance :
L'homme juste ne doit pas être soldat, car'
la justice est par elle-même une manière de ser-
vice militaire. Il ne doit pas non plus dénoncer
personne pour un orimie capital, car, que l'on
tue par l'épée ou par la parole, c'est toujours un
meurtre que l'on commet.
On voit que les antimilitaristes d'aujour-
d'hui n'ont rien trouvé de nouveau. Ils sont
même fort en retard, et, en vérité, nous
ne voyons pas par quelle association d'i-
dées ils seraient forcément englobés parmi
les républicains. Les antimilitaristes vien-
nent de tous les partis ; il en est certaine-
ment qui n'ont même jamais été républi-
cains.
Les catholiques ont donc le plus grand
tort de s'en prendre à M. Hervé, qui ne
fait que suivre aujourd'hui les enseigne-
ments des premiers chrétiens.
EN PLEINE ANARCHIE
-
La Libre Parole se lamente à l'idée que
« la mise en application de la loi de sépa-
ration trouve les catholiques dans l'incer-
titude et l'indécision. »
Nous comprenons ces lamentations ; ja-
mais, en effet, l'Eglise catholique ne
fut en plus complète anarchie. Les pau-
vres ratichons de campagne ne savent plus
sur quel pied danser ou, si l'on préfère
un langage moins profane, ils ne savent
à quel saint se vouer.
Les uns leur disent : soumettez-vous à la
loi. Les autres leur crient : résistez ! M. de
Mun, qui ne doit pas passer pour une quan-
tité négligeable dans le monde religieux,
déclare que la loi de séparation est une
loi d'apostasie avec laquelle il n'est pas
d'accommodements possibles.
Le bénédictin Dom Besse, une des som-
mités du monde congréganiste, voudrait
qu'on en vint, une bonne fois, à un non
possumus catégorique. Pour lui, une ré-
sistance passive, fortement organisée dans
trente diocèses, aurait. raison de La loi et
des législateurs. Pauvre homme ! Nous
conseillons, à lui et à ses pareils, d'es-
sayer. Cela nous permetlrait de les balayer
un peu plus vite..
Monsignor Delassus, dans la Semaine
Religieuse de Cambrai est, lui aussi, pour
la résistance. Seulement, à côté de ces vio-
lents, il y a les timorés, les capons qui n'o-
sent pas ; il y a aussi ceux qui se rendent
compte que la foi s'est envolée et qui sen-
tent que toute résistance sérieuse est im-
possible à organiser.
Au milieu de ces avis différents, il est
difficile aux plus malins de s'y reconnaître,
c'est donc un véritable désarroi. Aussi, la
Libre Parole est-elle réduite à faire cette
douloureuse constatation :
« Les évêques n'ont rien dit, les cardi-
naux se sont assemblés, mais ont gardé
le silence et, du haut en bas de la hiérar-
chie, on attend la parole décisive du Saint-
Siège. Espérons qu'elle ne se fera pas long-
temps attendre. »
Souhaitons-le, ô mon dieu ! Mais le saint
esprit paraît bien fatigué, et. tarde fort à
faire connaître son avis. Ce n'est pourtant
pas nous qui devrions être forcés de lui
apprendre tout ce que présente de critique
pour l'Eglise la situation anarchique d'au-
jourd'hui. -
LA VIE D'UNJGNORANTIN
Nos lecteurs connaissent l'histoire du
frère Médard, cet ignorantin qui, après
vingt-neuf ans de travail, comme profes-
seur et comme cuisinier, devenu infirme,
fut jeté hors de sa communauté, muni en
tout et pour tout d'une indemnité de
quinze francs. Le procès intenté par ce
malheureux à la congrégation des frères
des écoles chrétiennes a été jugé hier par
la première chambre du tribunal.
On verra que la congrégation a été con-
damnée à payer à Médard une somme de
3,500 francs et à lui verser une rente via-
gère de 900 francs ou à l'hospitaliser dans
sa - maison de Fleuri-Meudon.
Dans ce jugement, une chose nous in-
quiète : C'est la faculté laissée à la con-
grégation de verser une rente ou d'hospita-
liser l'ancien frère. Si celui-ci est hospita-
lisé, il est permis de se demander quelle
existence va lui être faite par les frères
après ce qui vient de se passer. Les con-
gréganistes voudront certainement se ven-
ger de l'humiliation qu'ils viennent de su-
bir et il n'est pas malaisé de deviner que
la vie du pauvre infirme ne sera pas gaie
tous les jours. Il nous semble fâcheux que
le tribunal n'ait pas envisagé cette situa-
tioni et qu'il n'ait pas simplement con-
damné la congrégation à verser la rente
de 900 francs. Médard eût conservé ainsi
son indépendance
Quoi qu'il en soit, ce procès nous semble
tout à fait édifiant. Quelle touchante soli-
darité de la part de ces hommes qui se
disent égaux et frères en Jésus-Christ.
Parce que l'un d'eux a dû déplaire à quel-
que supérieur, il est jeté au ruisseau dès
qu'il ne peut plus rendre aucun service.
Nous l'avons déjà dit, la suppression des
congrégations aura eu pour effet de libérer
une foule de congréganistes exploités par
les malins et les rouhlards qui les tenaient
sous leur tutelle. L'histoire du frère Mé-
dard n'est certainement pas un cas isolé ;
mais combien en est-il qui, vieillis, habi-
tués à se courber sous la férule de leurs
chefs, usés et affaiblis par une vie abru-
tissante, ont osé entrer en lutte contre leurs
bourreaux et dresser leur pauvre volonté
en face de la puissance, sans frein et sans
contrôle, de leurs supérieurs ? Il en est,
peu, assurément, et c'est pourquoi le scan-
dale d'aujourd'hui nous parait exceptionnel.
A la façon dont ils pratiquent la charité
chrétienne, on peut se rendre compte du
cas que font les calotins des vertus qu'ils
recommandent aux autres. Les tribunaux
nous ont, d'ailleurs, plus d'une fois édifiés
à cet égard.
LA SEPARATION
La commission extra-parlementaire char-
gée d'élaborer le texte du règlement d'ad-
ministration publique pour l'application de
la loi de séparation, s'est réunie hier, au
ministère de l'instruction publique sous la
présidence de M. Bienvenu-Martin
Après une longue discussion, elle a dé-
cidé qu'une sous-commission soumettra un
projet de décret au Conseil d'Etat, concer-
nant les allocations, et pensions prévues
par l'article 11 de la loi de séparation. Le
Conseil d'Etat examinera le projet qui sera
ensuite présenté à la signature des minis-
tres de l'intérieur et des finances et enfin
du président de la République.
Ce décret portera aussi sur les allocations
et pensions attribuées par les départements
et les communes.
Les dossiers des 38,000 candidats à ces
pensions seront examinés par le ministre
de l'instruction publique.
Lespropos. -
da Lanternier
A Londres, sur la façade d'un immeuble im-
posant, on lit :
Club des conversations..
Professeurs de causerie. — Leçons d'anec-
dotes à dire en société. — Choix de bons mois
et de calembours.
Nom d'une pipe 1 Pourvu que le directeur
de cette maison. n'ait pas l'idée de fonder des
succursales à Paris 1 C'est ça qui serait gai.
Je ne crois pas exagérer en disant qu'en
France, il y a un raseur sur quatre habitants.
Voyez-vous cette proportion doublée ou triplée
par le fait de cette innovation. Avouez qu'il y
a de quoi frémir. Pour ma part, mes obliga-
tions professionnelles me mettant chaque jour
en contact avec une quinzaine de gens que je
ne connais pas, je considérerais l'introduction
de cette mode dans notre pays comme une ca-
lamité publique.
Il est vrai que les choses ne se passeraient
pas comme cela, tout à la douce. On prendrait
des mesures. Les affiliés du Club des conver-
sations seraient obligés d'arborer un insigne
assez apparent pour permettre de les recon-
naître de loin et de les éviter. Dame L les au-
tomobiles et les fiacres doivent bien être mu-
nis de fanaux à l'avant. Une voiture n'est
pas plus à craindre qu'un raseur; et, en ou-
tre, elle ne pénètre pas — ou rarement —
dans les cafés. --
Ces temps derniers, on s'est amusé à faire
des mots sur les personnalités parisiennes.
Pour ma part, je n'en ai fait aucun ; mais
d'autres ont travaillé pour moi, et je vous prie
de croire que j'en ai entendu de drôles, de.
raides aussi, et beaucoup. Hé bien, supposez
qu'en dix leçons à cent sous le cachet, le pre-
mier imbécile venu puisse réciter et fabriquer
lui-même cette marchandise. Et voyez ce que
deviennent les relations des êtres humains.
Songez que, dans tout homme, même dans
tout Parisien, il y a un barbier qui sommeille.
Tenez, moi-même, est-ce que je ne suis pas
en train de vous raser, depuis cinq minutes,
avec mes histoires ?
ECHOS
-
TOUT AUÈS DU SOLEIL
Qui se serait douté que hier était le jour de
l'année où la terre passe le plus près du so-
leil, — autrement dit, et astronomiquement
parlant, passe au périhélie ?
Cet excellent voisinage de la terre et du so-
leil va-t-il nous amener des jours moins som-
bres ?
AU. LUXEMBOURG
Il y a des gens qui tiennent absolument à
voir le jardin du Luxembourg peuplé de sta-
tues.
Ainsi le monument de Georges Sand, inau-
guré il y a un an et demi dans le jardin, avant
été enlevé de son piédestal et n'y ayant pas
été replacé, quelques personnes ont manifesté
à la fois une profonde surprise et un vif cha-
grin.
A la vérité, le groupe inauguré en 1904 était
un simple moulage en plâtre. Il n'aurait pas
résisté longtemps aux intempéries et le sta-
tuaire, d'autre part, était désireux de l'expo-
ser au Salon.
Le groupe en marbre destiné à succéder au
groupe en plâtre sera prêt ces jours-çi; il sera
mis en place vers la fin de février. Du moins
on l'espère.
vwv
9.052 MAINS
Une dépêche de New-York annonce que,
à la réception du premier de l'an, le président
Roosevelt a serré la main à 9.052 visiteurs en
trois heures quarante-quatre minutes : c'est
considéré comme un record.
Un orchestre jouait, pendant tout le temps
de la réunion, des airs entraînants.
Les airs entraînants s'imposaient, ne vous
semble-t-il pas ?
vwv
OU EST NÉ COLOMB '?
Sept villes se disputaient la gloire d'avoir
vu naître Homère?
Un non moins grand nombre de villes re-
vendiquaient l'honneur d'être le lieu de nais-
sance de Christophe Colomb.
Pour couper court à des controverses qui
duraient depuis des années, un historien gé-
nois vient de publier un fac-similé du dé-
cret du doge de Gênes qui; en 1451, nom-
mait Dominique Colombo, père de Christo-
phe, gardien de la tour Ogivella.
C'est au mois d'octobre de cette même an-
née que Christophe Colomb naquit à Gênes.
vwv
LE SUFFRAGE DES FEMMES
La Société « Le Suffrage des femmes »
vient d'éditer une carte postale et un timbre
spéciaux représentant un homme et une
femme déposant chacun un bulletin de vote,
dans l'urne électorale.
Timbre et carte postale se trouvent au
siège de la Société « Le Suffrage des fem- j
mes n, 151, rue de la Roquette.
- Passe.Partout. j
LES CHEFS D'ETAT
COMMENT ILS SONT ELUS
Les collèges électoraux présidentiels. — Il
Constitution de 1875. — La Gonstitu-
tion américaine de 1787. — La Con-
fédération suisse. — Le scrutin *
à deux degrés et le système - ,
plébiscitaire.
Dans quelques jours, le Sénat et la
Chambre des députés, réunis en Assem-
blée nationale au palais de Versailles, au-
ront à désigner le successeur de M. Lou-
bet à la présidence de la République.
Cependant, M. Loubet ayant été élu pré-
sident pour sept ans. le 18 février 1899,
son mandat ne prendra fin que le 18 fé.
vrier prochain ; mais l'article 3 de la troi-
sième loi constitutionnelle porte que : « un
mois au moins avant le terme légal des
pouvoirs du président de la République,
les Chambres devront être réunies en As-
semblée nationale pour procéder à l'élec-
tion du nouveau président. »
Pendant un mois, nous aurons donc deux
présidents au lieu d'un : un président effec-
tif qui restera à son poste jusqu'au terme
de son mandat, et un président présomptif.
qui attendra son tour d'aller s'installer à
1 Elysée. C'est la première fois que les
Français se trouveront à pareille fête. De-
puis, en effet, que la Constitution de 1875
est en vigueur, seul, M. Jules Grévy est
arrivé au terme de son mandat lors de sa
première présidence de 1879 à 1886 ; ré-
à cette occasion, le 28 décembre 1885, il fut
à la fois président effectif et président pré-
somptif jusqu'au 31 janvier suivante
Au cas où le gouvernement négligerait
de convoquer l'Assemblée nationale, le Sé-
nat et la Chambre des députés se réuni-
raient de plein droit quinze jours avant le
terme légal des pouvoirs présidentiels.
Nous avons cru, à l'approche de cette
élection, que le moment était propice de
passer en revue les divers modes d'élection
à la magistrature suprême dans les pays
où ces fonctions sont électives.
En France
La. Constitution de 1875 stipule que le
collège électoral présidentiel sera formé
par la réunion des sénateurs et des députés
en Assemblée nationale ; elle a même eu
soin de fixer le lieu de la réunion, au pa-
lais de Versailles.
L'Assemuiee nationale est présidée par
le président du Sénat, assisté de ses secré-
taires. L'élection « lieu au scrutin se-
cret par appel nominal, à la majorité ab-
solue des suffrages.
Le choix des électeurs présidentiels peut
se porter sur tout citoyen français jouis-
sant de ses droits civils et politiques. Le
président sortant est rééligible. Seuls, les
descendants des familles ayant régné en
France sont inéligibles. •
La proclamation des résultats du scrutin
est faite, séance tenante, par le président
de l'Assemblée nationale ; si aucun des
candidats n'a réuni la majorité absolue, il
est procédé à un nouveau tour de scrutin,
jusqua ce que cette majorité soit obtenue.
Nous avons dit que, lorsqu'un président
arrive au terme de son mandat, l'Assem-
blée nationale doit être convoquée au moins
un mois avant ce terme. En cas de décès
ou de démission, les électeurs sénatoriaux
se réunissent « immédiatement » de plein
droit. Néanmoins, l'usage s'est établi que
la réunion n'a lieu que le lendemain du dé-
cès ou de la démission.
Pour terminer, disons que la Constitution
alloue à l'heureux élu un traitement de
600,000 fr.. plus une indemnité de 600,000
francs pour frais de représentation et de
déplacement.
Etats-Unis
L'élection du président de la grande Ré-
publique nord-américaine se fait au scru-
tin à deux degrés, en vertu de l'article 2,
section 1, (de la Constitution de 1787, ainsi
conçu :
Le président des Etats-Unis est investi du pou-
voir exécutif ; il exerce ses fonctions pendant
le terme de quatre ans, son élection et celle du
vice-président, élu pour le même terme, ont lieu
ainsi - qu'il suit : chaque Etat nommera de 4a
manière qui sera prescrite par sa législature, un
nombre d'électeurs égal au nombre total de sé-
nateurs et de représentante que l'Etat envoie au
Congrès ; mais aucun sénateur ou représentant,
ni aucune personne possédant une fonction ho-
norifique ou salariée sous l'autorité des Etats-
Unis, ne peut être nommé électeur.
Ainsi, à l'inverse de ce qui a lieu en Fran-
ce, où le collège électoral présidentiel est
formé par la réunion des deux Chambres
en exercice, aux Etats-Unis, ce collège se
compose d'électeurs spécialement nommés
à cet effet, et les membres des Chambres
ne peuvent point en faire partie.
On sait combien les campagnes pour l'é-
lection présidentielle aux Etats-Unis sont
agitées. Les deux grands partis qui se sont
disputé, jusqu'à présent, le pouvoir, tes
républicains et les démocrates, ont recours
à tous les moyens pour triompher. Les
chefs réunis en Convention commencent
par désigner les candidats à la présidence
et à la vice-présidence, chargés de soutenir
les intérêts du partL
Une fois cette désignation faite, on lance
des millions de brochures et de prospec-
tus ; on adresse à tous les électeurs les
photographies des candidats, tandis que
d'innombrables orateurs, délégués par le
comité central, vont stimuler les ardeurs
et porter la bonne parole jusque dans les
bourgades les plus reculées. Tout cela ne
va pas sans occasionner des frais énor-
mes : on a calculé que chacun des deux
grands partis américains avait dépensé
dans les 80 millions pour les dernières élec-
tions présidentielles.
Une fois les électeurs présidentiels élus
par les Assemblées primaires, on connaît
à une voix près, le chiffre qu'obtiendront
les dfvers candidats à la présidence et à la
vice-présidence, car le mandat est impé-
ratif.
Au lieu de se réunir en une Assemblée
unique, les électeurs présidentiels, ainsi
més par le suffrage universel,se réunissent
dans leurs Etats respectifs. Ils votent au
scrutin secret et par bulletihs sépares, pour
le président et le vice-président, dont un
au moins ne devra pas habiter l'Etat dont
fjs sont les mandataires. Les résultats des
v,Dll," signés, certifiés et. scellés, sont adres-
sés au président du Sénat, au siège du gou-
vernement des Etats-Unis qui ouvre tous
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