Titre : La Lanterne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1892-07-26
Contributeur : Flachon, Victor. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328051026
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 juillet 1892 26 juillet 1892
Description : 1892/07/26 (N5575,A16). 1892/07/26 (N5575,A16).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-54
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
le —
tDMINISTRATrON. RÉDACTION ET ANNONCES
A PARIS
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PARIS
UN MOIS 2 FE.
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UN AN. 18 FR.
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
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PARIS ET DÉPARTEMENTS
Le Numéro ; - 5 centimes
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SEIZIÈME ANNÉE — NUMÉRO 5575
MARDI 26 JUILLET 1892
(8 8 THERMIDOR. — AN 100 10
La «liALTERNE» est le seul journal
français ayant son imprimerie et sa
fabrique de papier.
BOURGEOISIE ET OUVRIERS
Les appréciations que nous avons for-
mulées au sujet de la Fête nationale et
de l'abstention de certains groupes so-
cialistes, nous ont valu de la part de
l'un de ces groupes, l'Emancipation, de
Saint-Nazaire, une lettre de protesta-
tion, d'ailleurs très courtoise.
Les signataires de cette lettre répu-
dient, tant en leur nom qu'au nom du
parti ouvrier dont ils se disent les in-
terprètes, tout au moins pour Saint-
Nazaire, toute solidarité avec les anar-
chistes, et revendiquent hautement
leur place dans la grande famille répu-
'blicaine.
Nous avons grand plaisir à leur don-
ner acte de la première partie de cette
déclaration, encore bien que nous ne
les eussions pas désignés nommément.
Ils conviendront cependant que l'atti-
tude prise par eux à l'occasion de notre
anniversaire révolutionnaire, autori-
sait pareille confusion. Les anarchis-
tes n'ont pas fait connaître officielle-
ment leur opinion sur l'œuvre des hom-
mes de 89 et de la Convention ; mais
il est probable qu'interrogé sur ce point,
Ravachol eût répondu, sinon dans les
mêmes termes, du moins dans le même
esprit que le groupe d'Etudes sociales
de Saint-Nazaire.
Les membres de ce groupe peuvent
voir par là l'impossibilité qu'il y a à
prétendre se cantonner soi-même et
cantonner les autres dans des classi-
fications qui ne peuvent être rigou-
reuses qu'en apparence st sur le pa-
pier.
En fait, et dans l'application, eux-
mêmes en arrivent à renverser partiel-
ment la barrière qui les sépare d'hom-
mes et de théories qu'ils déclarent ré-
pudier.
Bien mieux, ils sont obligés de re-
connaître qu'en parlant de bourgeoisie,
ils ont entendu viser une caste politi-
que aujourd'hui disparue : les privilé-
giées censitaires tels que la Restaura-
tion et le régime de juillet les avaient
institués. Avec un peu de logique, ils
auraient dû en conclure que leurs criti-
ques, s'adressant au passé, ne tenaient
pas contre le régime présent, fondé sur
un principe contraire : le suffrage uni-
versel.
A plus forte raison ne comprend-on
guère non plus qu'ils aient pu faire pe*
ser sur la mémoire des homtâi&Miô
et de la Convention la r^aïa^abilil#
des inégalités sociales dont souffrent
les ouvriers.
Ces inégalités, qui les nie ? Dans l'ar-
ticle que le groupe socialiste de Saint-
Nazaire s'essaie à réfuter, n'avons-
nous pas dit nous-même que l'œuvre de
la Révolution n'était pas achevée, tant
s'en faut, et qu'il restait encore beau-
coup à faire à la République pour satis-
faire les légitimes revendications de la
démocratie ?
Ne nous sommes nous pas élevés,
chaque fois que l'occasion s en est of-
ferte, contre l'abus de centralisation,
contre la main mise de l'Etat partout
et sur tout, dont le poids paralyse et
étouffe l'essor des initiatives indivi-
duelles et locales ? N'avons-nous pas
appuyé, et même à maintes reprises
provoqué toutes les mesures propres
à l'amélioration de la condition maté-
rielle de l'ouvrier, et à son émanci-
pation économique, dans la mesure
compatible avec les exigences de la
concurrence internationale ?
Si tel est aussi le programme du
groupe d'études sociales de Saint-
Nazaire, on voit que nous ne sommes
pas loin de nous entendre.
Mais ce que nous nous refusons à ad-
mettre, c'est que la transformation so-
ciale qu'ils poursuivent et à laquelle
nous aspirons également puisse être
obtenue par la violence.
Nous l'attendons du suffrage univer-
sel seul, c'est-à-dire de la souveraineté
nationale tout entière, s'exerçant dans
la plénitude de sa liberté et de son in-
dépendance, sans distinction haineuse
de classes, dans un esprit de justice et
de fraternité, et non avec une arrière-
pensée de revanche à prendre ou de
rancunes à satisfaire.
Or, quand nos correspondants nous
disent « qu'ils rompent toute commu-
nauté d'action avec la bourgeoisie et
lutteront seuls dorénavant pour la con-
quête de leurs franchises et l'améliora-
tion matérielle de leur sort » ils ne font
''Oa5 autre chose que de la politique, de.
classés - celle-là même qu'ils repro-
chent au régime censitaire — et ils la
font dans le vide en quelque sorte,
contre une conception politique qui
s'est plus qu'un souvenir historique et
contre une catégorie sociale qui est
allée rejoindre dans les limbes du passé
l'ancienne aristocratie.
A moins que par bourgeois ils n'en-
tendent désigner les hommes que l'ins-
truction ou la fortune dispensent du
travail manuel. S'il en est ainsi, l'os-
tracisme en bloc dont ils les frappent
est une ingratitude à l'égard d'un grand
nombre d'entre eux qui ont payé et
paient de leur personne, de leur ins-
truction et de leur fortune pour hâter
l'émancipation économique des ouvriers
et l'amélioration de leur situation ma-
térielle.
Espère-t-on donc grâce à cet exclusi-
visme, et en jetant par dessus bord ces
auxiliaires, marcher plus vite? C'est
aller à rencontre du bons sens et de la
justice. L'évolution sociale se fera par
l'accord de toutes les bonnes volontés,
de tous les concours.
Le groupe d'études sociales de Saint-
Nazaire se félicite d'avoir fait élire neuf
ouvriers au Conseil municipal de cette
ville. Nous nous félicitons avec lui de
ce résultat.
Nous regrettons même que dans cer-
taines villes le suffrage universel n'ait
pas fait meilleur accueil aux candida-
tures ouvrières, mais à une condition,
c'est que les élus justifient la confiance
de leurs électeurs en se montrant à la
hauteur de leur mission par leur intel-
ligence et leur aptitude à la direction
des affaires municipales, par leur répu-
diation des procédés violents dictés par
l'antagonisme de classes. Ce sera en
faveur de leur cause la meilleure des
propagandes par le fait.
Dans tous les cas, ils voudront bien
reconnaître avec nous que leur élec-
tion suffit à marquer l'énorme dis-
tance qui sépare 1892 de 17S9. En ad-
mettant même que depuis un siècle, la
condition matérielle de l'ouvrier soit
restée absolument stationnaire, qu'il
n'ait bénéficié d'aucun progrès, d'au-
cune réforme, il a entre les mains l'ins-
trument, l'outil des réformes et des
progrès futurs : le bulletin de vote.
Conquête exclusivement politique,
disent nos correspondants. Conquête
sociale, répondons-nous. Car elle con-
tient le germe de toutes les autres.
Et s'il est vrai que ce soit à la Révo-
lution qu'ils la doivent — et ils en con-
viennent — comment n'ont-ils pas vu
qu'ils manquaient à la fois à la logique
et à la reconnaissance en refusant de
célébrer le souvenir de la grande épo-
que révolutionnaire, sous le prétexte
qu'ils n'en avaient retiré aucun béné-
fice.
LA BÉtetUM efLEBICALE
Un rabbin qui viole la IrtU—»-Répres-
.., sion nécessaire
câpres un bruit, dont l'agace HâftS
Sê fait l'écho, il paraîtrait qu'un rabbin de
Bône, dans un sermon qu'il aurait pro-
noncé à la synagogue, se serait livré à
des excès de langage qui feraient de lui
le digne émule des Gouthe-Soulard etau-
tres Turinaz.
Voici comment l'agence Havas relate
l'incident :
Bône, 23 juillet. — Dans un sermon, pro-
noncé ce matin à la synagogue, le rabbin
Stora a préconisé l'enseignement hébraïque
et s'est livré à une attaque violente contre
l'enseignement français, disant que l'étude
de la langue française et des sciences dé-
voyaient les jeunes Israélites, en faisait des
êtres inutiles, des incapables, n'ayant pas de
coeurs et allant jusqu'à frapper leurs pa-
rents.
Plusieurs assistants ont protesté.
Des altercations violentes se sont pro-
duites.
Si le fait est exact, et il n'est pas impos-
sible qu'il le soit, car il est de l'essence
de toutes les religions sans exception de
se montrer intolérantes, nous n'hésitons
pas à dire qu'il mérite la réprobation gé-
nérale.
En s'ingérant d'exprimer un blâme con-
tre l'enseignement national, ce rabbin,
visiblement surexcité par le soleil d'Afri-
que dont le cardinal Lavigerie a souvent
expérimenté par lui-même la funeste in-
fluence, a commis un acte qui mérite une
répression exemplaire.
Le rabbin Stora doit être aussi sévère-
ment puni que le sont ou devraient l'être
les prêtres catholiques qui, dans les
églises, qualifient de « scélérates » les lois
scolaires votées par les Chambres répu-
blicaines.
Nous aimons à croire que le ministre
des cultes, M. Ricard, sévira avec rigueur
contre cette coupable incartade.
Il y a d'autant plus d'urgence que le
spectacle de certaines impunités n'est
peut-être pas étranger à la contagion de
rébellion cléricale qui menacerait main-
tenant de se propager dans des milieux
restés jusqu'ici indemnes.
Comme nous l'avons souvent déclaré, il
n'y a pas d'ordre social possible, si le gou-
vernement ne tient pas strictement la
main à faire respecter par tous les lois
qui interdisent aux ministres des cultes,
quelle que soit leur confession, toute in-
trusion dans le domaine des choses tem-
porelles.
Nous sommes heureux d'avoir à consta-
ter que les journaux catholiques s'assos-
cient à nous pour demander la punition
du rabbin rebelle, et nous n'avons qu'un
regret, c'est que ces mêmes journaux ne
joignent pas leur voix à la notre quand il
s'agit de demander l'application des lois
aux délits commis par les prêtres catho-
liques.
Rappelons à ce propos le fait que nous
signalions dans notre dernier numéro.
L'abbé Rohon, curé de Ploudaniel, com-
paraissait avant-hier à Brest devant la
police correctionnelle, sous la prévention
d'avoir frappé au visage un cultivateur
qui, le ltr mai, en sortant de la salle de
vote, avait crié : a Vive la République ! »
Malgré un énergique réquisitoire du
procureur de la République, ce curé, que
le nom seul du gouvernement qui le paye
porte à de tels excès, ne s'est vu condam-
né qu'à la peine dérisoire de 50 fr. d'a-
mende.
En attendant que les journaux catholi-
ques en appellent à minima, nous deman-
dons que le rabbin de Bône, qui, sous une
autre forme, a commis un délit de même
nature, soit puni plus sévèrement.
LES CATECHISMES ÉLECTORAUX
Pour faire plaisir au pape
Voilà l'évêque de Seez, M. Trégaro, qui
à son tour retire son catéchisme électo-
ral. Mais il tient à ce qu'il soit bien en-
tendu que ce qu'il en fait, c'est unique-
ment pour faire plaisir au pape et non
pour obéir à la loi et au gouvernement
dont il se moque comme de sa première
soutane.
Tel est exactement l'esprit, sinon les
termes de la lettre qu'il vient d'adresser
au ministre des cultes pour lui faire part
de ce sacrifice.
Si le gouvernement avait le moindre
souci de sa dignité et de celle de la Ré-
publique, il n'y aurait qu'une réponse à
faire à cette impertinente provocation.
« C'est très bien, mon ami. — Vous re-
fusez de vous incliner devant la loi de
votre pays et prétendez ne relever
que du pape. A votre aise. A partir d'au-
jourd'hui adressez-vous au pape pour
toucher votre traitement. »
Ainsi du moins, le gouvernement n'au-
rait pas le double désagrément d'empo-
cher les insolences des évêques et de les
voir en même temps encaisser son ar-
gent l
* SCANDALE MILITAIRE
Un général qui se fait courtier élec-
toral
C'est en France un principe universel-
lement admis et demeuré intact, même
pendant la période boulangiste, que l'ar-
mée doit rester en dehors de nos luttes
politiques.
Toute infraction à ce principe est juste-
ment considérée comme une atteinte au
patriotisme, l'intrusion de la politique
dans l'armée, par les divisions qui en se-
raient le résultat, ne pouvant que com-
promettre irrémédiablement la sécurité
nationale.
De plus, dans un pays de République
comme le nôtre, quiconque étant investi
d'une parcelle, si petite soit-elle, du pou-
voir militaire, détourne de sa destination
ce pouvoir pour le mettre au service des
passions politiques, commet une usurpa-
ion criminelle au premier chef.
S'il faut en croire les agences, ces prin-
cipes qui sont chez nous l'une des formes
du patriotisme, seraient en ce moment
outrageusement foulés aux pieds par le
général Deaddé, dans le canton de Saint-
Gaudens, à l'occasion de la prochaine
élection d'un conseiller général.
D'après la Dépêche de Toulouse, qui re-
late les faits avec précision, le général
Deaddé aurait gravement méconnu les
premiers de ces devoirs en se faisant ou-
vertement le courtier électoral de M.
Gamparan, sénateur, conseiller sortant.
Ce général, qui constitue heureuse-
ment une exception dans notre armée si
disciplinée, si patriotiquement soumise
aux lois, aurait publiquement promis aux
électeurs, qui donneraitent leurs voix à
son candidat, de l'avancement pour leurs
fils soldats, des congés, des dispenses des
28 jours ou de service, comme soutiens
de famille, etc.. etc.
Ces faits sont-ils exacts ? Bien que l'ac-
cusation soit terriblement précise, nous
voudrions en douter encore. Nous vou-
drions croire que le mauvais exemple
donné de haut par le général Brugère, ce
parvenu dans l'armée par la politique, n'a
pas à ce point relâché le sentiment de la
discipline parmi nos officiers supérieurs.
Quoi qu'il en soit, une enquête sévère
s'impose d'urgence au ministre de la
guerre qui, nous aimons à l'espérer, ne
faillira pas à son devoir.
Si les faits sont démontrés exacts, la
répression doit être impitoyable et s'exer-
cer suivant toute la riguenr du code mili-
taire.
Quiconque attente à la cohésion de no-
tre armée se rend coupable du crime de
lèse patrie, et doit être traité comme
tel.
On a fait des lois sévères mais justes
contre les anarchistes qui cherchent à
désagréger par leurs prédications l'esprit
militaire.
Quel châtiment ne mérite pas un géné-
ral qui, avec l'autorité inhérente à son
grade, démoralise le soldat par une con-
duite aussi scandaleuse ?
L'ALLEMAGNE ET L'AUTRICHE
Retraite du prince de Reuss
Vienne, 24 juillet. — Malgré les démen-
tis des journaux officieux il se confirme
que le prince de Reuss, ambassadeur d'Al- i
lemagne à Vienne, sera prochainement
remplacé.
L'attitude courtoise de M. de Reuss vis-
à-vis de M. de Bismarck, lors du récent
voyage de l'ex-chancelier à Vienne, au-
rait vivement mécontenté Guillaume II.
AUX ETATS-UNIS
Arbitrage international
Washington, 24 juillet. — M. Sherman
a présenté au Sénat un bill autorisant le
président de la République à entamer
des négociations pour l'établissement d'un
tribunal international en vue d'arranger
à l'amiable tous les différends interna-
tionaux.
MANŒUVRES NAVALES
* LES PRÉPARATIFS
Dans l'Océan et la Méditerranée. —
A Cherbourg, Brest et Toulon. —
Quelques remarques. — Une
loi violée
Les préparatifs en vue des prochaines
manœuvres navales étant achevés ou à
peu près, il est intéressant d indiquer la
composition des forces destinées à pren-
dre part à ces manœuvres.
Les armements ont eu lieu seulement à
Cherbourg, Brest et Toulon. Nos deux
autres ports militaires, Rochefort et Lo-
rient, ont seulement expédié quelques
torpilleurs détachés momentanément de
la défense mobile.
A Cherbourg
Les forces réunies à Cherbourg com-
prennent en premier lieu l'escadre cui-
rassée du Nord, aux ordres de M. le vice-
amiral Lefèvre, et ainsi composée :
6 cuirassés : Suffren (pavillon du vice-
amiral commandant en chef), Victorieuse
(pavillon du contre-amiral Barréra), Re-
quin, Furieux, Fulminant, Tonnerre.
2 croiseurs : Surcouf, Epervier;
2 aviso-torpilleurs, Lance et Salve;
4 torpilleurs : Défi, Alarme, Turco, V é.
loce.
En outre de cette escadre, le port de
Cherbourg arme avec des réservistes qui,
pour la plupart, sont des Parisiens :
2 cuirassés gardes-côtes, le Vengeur et
le Tonnant;
3 canonnières cuirassées, Cocy te,Flamme
et Grenade ;
14 torpilleurs de toutes classes.
Le « Vladimir-Monomach »
La rade de Cherbourg présente donc
en ce moment une grande animation en-
core accrue par l'arrivée de deux navires
étrangers, la corvette-américaine Sainte-
Mary et le croiseur de la marine impé-
riale russe Vladimir-Monomach.
La Sainte-Mary, bien que battant pa-
villon du gouvernement des Etats-Unis
n'est pas, à proprement parler, un navire
de guerre, c est un bâtiment qui sert d'é-
de guerre, l'instruction des jeunes Améri-
cole pour
cains désireux d'obtenir le brevet de ca-
pitaine au long cours.
Le Vladimir-Monomach fait escale à
Cherbourg, dans son voyage de retour à
Cronstadt, après une campagne de trois
ans en Extrême-Orient. Il vient en der-
nier lieu de Cadix et est commandé par
le capitaine de vaisseau Stark.
Le Monomach appartient à cette classe
de navires construits spécialement par la
Russie pour opérer dans les mers de la
Chine et du Japon. Il est armé de 4 gros
canons de 20 centimètres et de 12 autres
plus petits, dont 10 tirent par le travers
entre les grosses pièces, et les 2 autres à
l'avant, de façon à pouvoir,. tirer dans
l'axe du bâtiment.
L'escadre du Nord a retardé son départ-
de 24 heures afin de permettre à nos offi-
ciers de recevoir en un banquet leurs
collègues russes et américains.
A Brest
Le port de Brest a armé :
1 garde-côtes cuirassé, la Tempête ;
1 croiseur, le Rigault-de-Genouilly ;
6 torpilleurs de ln classe.
Dès que le Rigault-de-Genouilly a été
prêt, on l'a expédié à Cherbourg, où il
s'est rangé sous les ordres de l'amiral Le-
fèvre.
La Tempête reste sur rade pour concou-
rir à la défense avec les torpilleurs.
Ceux-ci se livrent à des exercices prépa-
ratoires d'entraînement, échangeant fré-
quemment des signaux avec les séma-
phores de la côte dont le fonctionnement
laisse tant à désirer.
Dans la Méditerranée
Le port de Toulon a armé spécialement
en vue des manœuvres :
3 canonnières cuirassées : Achéron ,Fu-
sée, Mitraille.
1 transport : la Gironde.
7 torpilleurs de lre classe.
De plus, le croiseur le Lalande, détaché
à la station du Levant, est arrivé à Tou-
lon pour se mettre à la disposition de l'a-
miral Rieunier pendant les manœuvres.
Ces forces seront adjointes à l'escadre
active et à l'escadre de réserve de la Mé -
diterranée.
- - ! ,-- - .- -- - 1 -. - -- - -. -
La première,.sous les ordres du vice-
amiral Rieunier, commandant en chef,
comprend :
9 cuirassés, Formidable (pavillon du
vice-amiral commandant en chef) ; Hoche
(pavillon du contre-amiral Dorlodot des
Essarts) ; Vauban (pavillon du contre-ami-
ral Buge); Dévastation, Amiral-Baudin,
Courbet, Marceau, Bayard, Duguesclin.
6 croiseurs, Cosmao, Jean-Bart, Vautour
Condor, Davout, Troude.
3 avisos-torpilleurs, Dague, Dragonn e,
Ouragan,
4 torpilleurs de haute mer, Audacieux,
Aventurier, Téméraire, Kabyle.
Cette escadre est armée avec des ef-
fectifs. sur le pied de guerre.
L'escadre de réserve, commandée en
sous-ordre , par le vice-amiral Vignes
(partez sans régler les compas) est ainsi
constituée.
8 cuirassés: Richelieu (pavillon du vice-
amiral commandant en sous-ordre). Tri-
dent, (pavillon du contre-amiral Puech),
Colbert, Friedland, Terrible, Indomptable,
Caïman, Redoutable.
5 croiseurs, Cécille, Sfax, Faucon, Wati-
tignîes, Bombe. -. -
3 torpilleurs: Agile, Eclair, Orage.
Les bâtiments de cette escadre sont à
effectifs réduits.
L'escadre active qui est arrivée au golfe
Jouan le 20 juillet, évoluera sur la côte
jusqu'au 30 juillet, depuis Marseille jus-
qu'à la frontière italienne.
Du 30 juillet au 2 août elle séjournera
aux Salins-d'Hyères où l'escadre de ré-
serve viendra la rejoindre.
Du 7 au 11 août les deux escadres opé-
reront des manœuvres d'ensemble.
Actuellement, l'escadre de réserve est
en Corse, à Ajaccio, où elle va expéri-
menter une estacade pour fermer l'entrée
du port.
Les travaux pour l'établissement de
cette estacade ont commencé le 20. L'ap-
pareil se compose de boites rectangulaires
en tôle, longues de 75 centimètres environ
et reliées entre elles par un câble.
Quelques remarques
Quelques remarques s'imposent.
Tous les cuirassés garde-côtes type
Vengeur et les canonnières cuirassées
type Achéron sont d'épouvantables rossi-
gnols, incapables de tenir la mer et de
combattre.
Quand, par hasard, on se risque à leur
faire quitter le port, ceux qui les montent
se considèrent avec raison comme en per-
dition, même par une mer simplement
un peu dure. Jamais on n'a osé s'en ser-
vir par gros temps.
Cette collection de chaudrons revient
au budget de l'Etat, c'est-à-dire aux con-
tribuables, à plus de 200 millions. C'est
200 millions de jetés à l'eau.
Les officiers que nous avons pu voir
sont unanimes à blâmer l'armement pré-
cipité des torpilleurs avec des réservistes.
Tous prétendent qu'en agissant ainsi on
paraît désirer et favoriser les accidents
de navigations et les avaries de machi.
nes.
Violations de la loi
Dans le budget voté par le Parlement
d'accord avec le ministre de la marine,
pour 1892, l'état-major du vice-amiral
commandant l'escadre de réserve est
ainsi composé :
Officiers et assimilés : 10 ; équipages de
majorité : 14 hommes. Total : 24 person-
nes. La dépense prévue et votée est de
143,303 francs.
Or, cet état-major est composé en (réa.
lité et contrairement à la loi, de la façon
suivante :
Officiers et assimilés : 14 au lieu de 10;
équipages de majorité : 60, au lieu de 14 !
La dépense au bout d'une année s'élèvera
à 201,687 francs, au lieu 143,303 francs.
Inutile d'ajouter que cette violation
d'une loi votée, n'est aucunement justifiée.
Le bien du service n'a rien à voir avec
cette augmentation d'état-major. On doit
même observer que l'escadre de M.
Vignes (partez sans régler les compas),
comprend 16 navires de moins que ne le
prévoyait le budget de 1892.
Ce qui tend à prouver que le nombre
des officiers d'un état-major doit croître
en raison directe de la diminution du
nombre des navires que cet état-major
doit diriger!
Inutile de dire qu'il n'y a là qu'une sa-
tisfaction de sot amour-propre. M. l'ami-
ral Vignes, commandant en sous ordre, a
voulu avoir un plus gros état-major que
l'amiral Rieunier, commandant en chef.
Il l'a eu, — au mépris de la loi et des rè-
glements. Car on sait fort bien que la loi
et les règlements n'existent pas pour nos
seigneurs les archevêques de la flotte. Le
consentement du véritable maître de la
marine l'amiral Filons-sur-Belgique leur
suffit, ou, du moins, leur a suffi jusqu'à ce
jour. Mais il se pourrait que l'honorable
M. Burdeau leur montrât, sous peu, que
cela ne suffit plus.
CATASTROPHE DE SAINT-GERVAIS
Les causes du désastre
Chamonix, 24 juillet. - M. Vallot, le
météorologiste qui a construit l'observa-
teur du Mont-Blanc, a réussi, à explorer
le glacier de la Tête-Rousse, cause de la
catastrophe de Saint-Gervais.
Il est entré dans une grotte d'où on
aperçoit le jour devant soi, en escaladant
des blocs de glace, immense réservoir
ayant dû contenir plusieurs millions de
mètres cubes d'eau.
La pression de cette eau, grossie par
les pluies, a causé la rupture des parois
du glacier.
Cette constatation met fin aux contro-
verses scientifiques sur les causes du dé-
sastre.
LA CRISE EN ESPAGNE
Nouveaux désordres
Pontevedra, 24 juillet. - L'émeute des
vendeuses de Pontevedra a recommencé
aujourd'hui. La gendarmerie occupe les
points principaux de la ville. Des rixes
continuelles se produisent aux bureaux
des octrois. Plusieurs femmes et deux
agents ont été blessés. Une partie de la
population sympathise avec les émeu-
tières dont quelques-unes ont pu franchir
les barrières de l'octroi sans payer.
Quelques arrestations ont été opérées.
Des mesures ont été prises pour le cas où
les vendeuses voudraient continuer de-
main à refuser l'impôt.
La surexcitation est grande. On craint
que les désordres ne se renouvellent.
LE
SUPPLÉMENT LITTÉRAIRE ILLUSTRÉ
os
La Lanterne
OUI PARAIT AUJOURD'HUI LUNDI
CONTIENT :
Les Passants, par MARCEL PRÉVOST;
Comment on prend une femme, par
GOLOMBINE ; Un Philtre égaré, par Gus-
TAVE CLAUDIN; Elégie, par BERTIN; Le
Délégué, par HUGUES LE Roux ; Dans la
Fournaise : Massacre, par THÉODORE DE
BANVILLE; L'Observateur, par PAUL VER-
NIER ; Initiation, par CHARLES BAUTHIAN;
Beuglant de Province, par MAURICE
TALMEYR ; La Ruse de M. Montauciel,
par CH. D'ARCIS, etc., etc.
Plus la suite des intéressants feuille-
tons : Le Pavé de l'Enfer, par M. MAU-
RICE DRACK ; Mademoiselle Jaufre, par
MARCEL PREVOST ; Une vieille Maîtresse,
par J. BARBEY D'AUREVILLY.
Enfin : En Jupon court, en Blanc
Corset, musique, par LÉOPOLD BAGNAT.
LE SUPPIEISENT LITTÉRAIRE ILLIUSTRÊ
DB
- La Lanterne
QUI PARAIT LES LUNDI ET JEUDI
EST EN VENTE PARTOUT
acent.. LE NUMERO 9500au
EN RUSSIE
LE CHOLÉRA
L'épidémie cholèriforme en Russie. -
Incurie des fonctionnaires russes.
— Les pèlerins, propagateurs
du choléra.
Nous recevons de notre correspondant par-
ticulier de Russie, à Saint-Pétersbourg, fin.
téressante lettre suivante :
Saint-Pétersbourg, 9/21 juillet 1891.
Tous les journaux ne parlent en ce mo&
ment que du choléra, qui est le héros da
jour. Malheureusement, les nouvelles de*
endroits contaminés ne sont pas bonnet
et la terrible maladie avance toujours,
lentement, mais sûrement. Mais ce n'est
pas tout, il faut en même temps compter
avec lar superstition du moujik, qui est
persuadé que la maladie est inventée par
les médecins, et que ce sont ces derniers
qui empoisonnent le peuple et l'enterrent
vivant. C'est là une vieille légende parmi
les moujiks, légende qui a pris naissance
lors de l'apparition de l'épidémie du cho-
léra en 1830 sous le tsar Nicolas.
Comme auj ourd'hui à Astrakhan et à
Savatoff, le peuple tuait à Saint-Péters-
bourg les médecins et les gens habillés
« en Allemands » (costume européen), et
c'est alors que le tsar Nicolas Ier deman-
dait à son ministre de la guerre ts'il n'y
avait pas assez de troupes dans la canitale
« pour mettre la crapule à la raison ». La
.réponse du. ministre étant négative, Nico-
las Ier .s'écria : « Un empereur russe vaut
bien une .armée » et il se fit conduire tout
seul dans sa voiture sur la place Sennaja-
plotschadj où étaient rassemblés les émeu-
tiers. Il monta sur la capote de sa voi-
ture, et avec sa voix forte il cria trois fois
au peuple : « A genoux, canailles ! » Au
troisième cri, tout le monde était à ge-
noux.
Le tsar expliqua alors à son peuple que
le choléra est envoyé par Dieu, que les
médecins sont des employés du tsar qui
combattent le fléau. Il les avertit en outre
que si quelqu'un osait toucher à un méde-
cin il le ferait pendre immédiatement,
qu'il ne reculerait pas à laisser pendre
s'il leàfallait cent mille moujiks. En termi-
nant son speech, il dit au peuple de prier
Dieu pour que le choléra cesse. Et le
peuple obéit et l'émeute prit fin à Saint-
Pétersbourg. — Aujourd'hui à Astrakhan
et à Savatoff les fonctionnaires du tsar
ne sont pas à la hauteur de la situation,
loin de là : ils ont montré une incurie et
une lâcheté écœurantes — Le journal de
notre capitale les « Saint-Pétersbourgs-
kija Wedomosti » les a flétris publique-
ment.
La « Mecque » des Russes
Ce journal a même fait remonter plus
haut les responsabilités, en accusant nos
ministres d'incapacité. Résultat : le mi-
nistre de l'intérieur, M. de Dournovo,
vient d'interdire la vente au nùméro des
Saint-Petersbourgskija Wedomosti, et leur
a enlevé l'autorisation d'insérer des an-
nonces.
C'est naturellement la ruine de ce jour-
nal. Comme vous le voyez, nous sommes
en Russie encore bien loin de la liberté
de la presse. -
Mais cette mesure de rigueur n'empê-
che nullement les progrès du choléra.
Nos moujicks superstitieux font, en ce
moment, des pèlerinages en masse à Ki-
jeff, la Mecque des Russes. On a compté,
en un mois, plus de 200,000 pèlerins qui
ont visité Kijeff et le couvent Kievopets-
cherskaja, où reposent dans des cercueils
ouverts plus de trois cents saints à l'état
de momies.
Les pélerins <■
Les neuf dixièmes de ces pèlerins ap-
partiennent à la classe la plus pauvre -
peuple. Ils campent tous en plein air, me
mangent que du pain et des concombnws
crus et boivent du kvass, ou se soûleat
avec du vodki (eau-de-vie de graine
C'est dire qu'ils sont pour le choléra une
proie facile et qu'ils propagent le fléau en
retournant chez eux.
Il est donc presque impossible au gouj
vernement impérial de lutter contre le
choléra. La religion orthodoxe elle-même
s'y oppose en bien des cas. Aussi toutes
les quarantaines et stations d'observation
sont elles impuissantes à enrayer ce nou-
veau fléau. On espère, il est vrai, que l'ap-
parition du froid arrêtera un mal qui fait
en ce moment beaucoup de victimes dans
l'empire des tsars, et est une menace pour
l'Europe entière.
Progrès de l'épidémie
Saint-Pétersbourg, 24 juillet. — Il se
confirme que le choléra a gagné Nijni.
Novgorod; deux décès cholériques vien-
nent d'être constatés.
A Balakowo, la population excitée a
détruit un baraquement destiné à recevoir
les malades.
Le saint synode a ordonné des prières
et trois grandes processions.
LES GARDIENS DE LA PAIX
Augmentation de traitement
Le vote du Conseil municipal concer-
nant l'augmentation du traitement des
gardiens de la paix a reçu son effet iinmé-
diat, M. Gaillot a donné l'ordre de recom-
mencer les feuilles de solde, les agents
devant bénéficier de l'augmentation à
partir du 1er juillet. -
Le traitement des gardiens de la paix
est fixé actuellement comme il suit :
Les brigadiers toucheront annuellement
2,300 fr. au lieu de 2,000, et les sous-bri-
gadiers 2,100 fr. au lieu de 1,800.
Les agents subalternes sont répartis en
quatre classes qui recevaient par an 1,700,
1,600, 1,500 et 1,400 fr. ils recevront doré-
navant, suivant la catégorie à laquelle ils
appartiennent, 2.000, 1,900, 1,800 et 1,60(
francs.
DÉSORDRES A GAND
Catholiques et libéraux
Gand, 24 juillet. — Un violent conflit a
eu lieu ce matin entre les socialistes et
les membres de la ligue catholique anti
socialiste, à l'occasion de la bénédiction
dit drapeau de cette ligue par l'évêque, à
la cathédrale. '-
Une - conférence devait être faite à la
salle Valeatino çar M. itellepute, profes-
tDMINISTRATrON. RÉDACTION ET ANNONCES
A PARIS
I8 — Rue Uiehor- - 1S
Les articles non insérés ne seront pas rendus
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PARIS
UN MOIS 2 FE.
TROIS MOIS. 5 FR.
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JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
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Le Numéro ; - 5 centimes
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UN MOIS 2 FR.
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UN AN. 20 FR.
SEIZIÈME ANNÉE — NUMÉRO 5575
MARDI 26 JUILLET 1892
(8 8 THERMIDOR. — AN 100 10
La «liALTERNE» est le seul journal
français ayant son imprimerie et sa
fabrique de papier.
BOURGEOISIE ET OUVRIERS
Les appréciations que nous avons for-
mulées au sujet de la Fête nationale et
de l'abstention de certains groupes so-
cialistes, nous ont valu de la part de
l'un de ces groupes, l'Emancipation, de
Saint-Nazaire, une lettre de protesta-
tion, d'ailleurs très courtoise.
Les signataires de cette lettre répu-
dient, tant en leur nom qu'au nom du
parti ouvrier dont ils se disent les in-
terprètes, tout au moins pour Saint-
Nazaire, toute solidarité avec les anar-
chistes, et revendiquent hautement
leur place dans la grande famille répu-
'blicaine.
Nous avons grand plaisir à leur don-
ner acte de la première partie de cette
déclaration, encore bien que nous ne
les eussions pas désignés nommément.
Ils conviendront cependant que l'atti-
tude prise par eux à l'occasion de notre
anniversaire révolutionnaire, autori-
sait pareille confusion. Les anarchis-
tes n'ont pas fait connaître officielle-
ment leur opinion sur l'œuvre des hom-
mes de 89 et de la Convention ; mais
il est probable qu'interrogé sur ce point,
Ravachol eût répondu, sinon dans les
mêmes termes, du moins dans le même
esprit que le groupe d'Etudes sociales
de Saint-Nazaire.
Les membres de ce groupe peuvent
voir par là l'impossibilité qu'il y a à
prétendre se cantonner soi-même et
cantonner les autres dans des classi-
fications qui ne peuvent être rigou-
reuses qu'en apparence st sur le pa-
pier.
En fait, et dans l'application, eux-
mêmes en arrivent à renverser partiel-
ment la barrière qui les sépare d'hom-
mes et de théories qu'ils déclarent ré-
pudier.
Bien mieux, ils sont obligés de re-
connaître qu'en parlant de bourgeoisie,
ils ont entendu viser une caste politi-
que aujourd'hui disparue : les privilé-
giées censitaires tels que la Restaura-
tion et le régime de juillet les avaient
institués. Avec un peu de logique, ils
auraient dû en conclure que leurs criti-
ques, s'adressant au passé, ne tenaient
pas contre le régime présent, fondé sur
un principe contraire : le suffrage uni-
versel.
A plus forte raison ne comprend-on
guère non plus qu'ils aient pu faire pe*
ser sur la mémoire des homtâi&Miô
et de la Convention la r^aïa^abilil#
des inégalités sociales dont souffrent
les ouvriers.
Ces inégalités, qui les nie ? Dans l'ar-
ticle que le groupe socialiste de Saint-
Nazaire s'essaie à réfuter, n'avons-
nous pas dit nous-même que l'œuvre de
la Révolution n'était pas achevée, tant
s'en faut, et qu'il restait encore beau-
coup à faire à la République pour satis-
faire les légitimes revendications de la
démocratie ?
Ne nous sommes nous pas élevés,
chaque fois que l'occasion s en est of-
ferte, contre l'abus de centralisation,
contre la main mise de l'Etat partout
et sur tout, dont le poids paralyse et
étouffe l'essor des initiatives indivi-
duelles et locales ? N'avons-nous pas
appuyé, et même à maintes reprises
provoqué toutes les mesures propres
à l'amélioration de la condition maté-
rielle de l'ouvrier, et à son émanci-
pation économique, dans la mesure
compatible avec les exigences de la
concurrence internationale ?
Si tel est aussi le programme du
groupe d'études sociales de Saint-
Nazaire, on voit que nous ne sommes
pas loin de nous entendre.
Mais ce que nous nous refusons à ad-
mettre, c'est que la transformation so-
ciale qu'ils poursuivent et à laquelle
nous aspirons également puisse être
obtenue par la violence.
Nous l'attendons du suffrage univer-
sel seul, c'est-à-dire de la souveraineté
nationale tout entière, s'exerçant dans
la plénitude de sa liberté et de son in-
dépendance, sans distinction haineuse
de classes, dans un esprit de justice et
de fraternité, et non avec une arrière-
pensée de revanche à prendre ou de
rancunes à satisfaire.
Or, quand nos correspondants nous
disent « qu'ils rompent toute commu-
nauté d'action avec la bourgeoisie et
lutteront seuls dorénavant pour la con-
quête de leurs franchises et l'améliora-
tion matérielle de leur sort » ils ne font
''Oa5 autre chose que de la politique, de.
classés - celle-là même qu'ils repro-
chent au régime censitaire — et ils la
font dans le vide en quelque sorte,
contre une conception politique qui
s'est plus qu'un souvenir historique et
contre une catégorie sociale qui est
allée rejoindre dans les limbes du passé
l'ancienne aristocratie.
A moins que par bourgeois ils n'en-
tendent désigner les hommes que l'ins-
truction ou la fortune dispensent du
travail manuel. S'il en est ainsi, l'os-
tracisme en bloc dont ils les frappent
est une ingratitude à l'égard d'un grand
nombre d'entre eux qui ont payé et
paient de leur personne, de leur ins-
truction et de leur fortune pour hâter
l'émancipation économique des ouvriers
et l'amélioration de leur situation ma-
térielle.
Espère-t-on donc grâce à cet exclusi-
visme, et en jetant par dessus bord ces
auxiliaires, marcher plus vite? C'est
aller à rencontre du bons sens et de la
justice. L'évolution sociale se fera par
l'accord de toutes les bonnes volontés,
de tous les concours.
Le groupe d'études sociales de Saint-
Nazaire se félicite d'avoir fait élire neuf
ouvriers au Conseil municipal de cette
ville. Nous nous félicitons avec lui de
ce résultat.
Nous regrettons même que dans cer-
taines villes le suffrage universel n'ait
pas fait meilleur accueil aux candida-
tures ouvrières, mais à une condition,
c'est que les élus justifient la confiance
de leurs électeurs en se montrant à la
hauteur de leur mission par leur intel-
ligence et leur aptitude à la direction
des affaires municipales, par leur répu-
diation des procédés violents dictés par
l'antagonisme de classes. Ce sera en
faveur de leur cause la meilleure des
propagandes par le fait.
Dans tous les cas, ils voudront bien
reconnaître avec nous que leur élec-
tion suffit à marquer l'énorme dis-
tance qui sépare 1892 de 17S9. En ad-
mettant même que depuis un siècle, la
condition matérielle de l'ouvrier soit
restée absolument stationnaire, qu'il
n'ait bénéficié d'aucun progrès, d'au-
cune réforme, il a entre les mains l'ins-
trument, l'outil des réformes et des
progrès futurs : le bulletin de vote.
Conquête exclusivement politique,
disent nos correspondants. Conquête
sociale, répondons-nous. Car elle con-
tient le germe de toutes les autres.
Et s'il est vrai que ce soit à la Révo-
lution qu'ils la doivent — et ils en con-
viennent — comment n'ont-ils pas vu
qu'ils manquaient à la fois à la logique
et à la reconnaissance en refusant de
célébrer le souvenir de la grande épo-
que révolutionnaire, sous le prétexte
qu'ils n'en avaient retiré aucun béné-
fice.
LA BÉtetUM efLEBICALE
Un rabbin qui viole la IrtU—»-Répres-
.., sion nécessaire
câpres un bruit, dont l'agace HâftS
Sê fait l'écho, il paraîtrait qu'un rabbin de
Bône, dans un sermon qu'il aurait pro-
noncé à la synagogue, se serait livré à
des excès de langage qui feraient de lui
le digne émule des Gouthe-Soulard etau-
tres Turinaz.
Voici comment l'agence Havas relate
l'incident :
Bône, 23 juillet. — Dans un sermon, pro-
noncé ce matin à la synagogue, le rabbin
Stora a préconisé l'enseignement hébraïque
et s'est livré à une attaque violente contre
l'enseignement français, disant que l'étude
de la langue française et des sciences dé-
voyaient les jeunes Israélites, en faisait des
êtres inutiles, des incapables, n'ayant pas de
coeurs et allant jusqu'à frapper leurs pa-
rents.
Plusieurs assistants ont protesté.
Des altercations violentes se sont pro-
duites.
Si le fait est exact, et il n'est pas impos-
sible qu'il le soit, car il est de l'essence
de toutes les religions sans exception de
se montrer intolérantes, nous n'hésitons
pas à dire qu'il mérite la réprobation gé-
nérale.
En s'ingérant d'exprimer un blâme con-
tre l'enseignement national, ce rabbin,
visiblement surexcité par le soleil d'Afri-
que dont le cardinal Lavigerie a souvent
expérimenté par lui-même la funeste in-
fluence, a commis un acte qui mérite une
répression exemplaire.
Le rabbin Stora doit être aussi sévère-
ment puni que le sont ou devraient l'être
les prêtres catholiques qui, dans les
églises, qualifient de « scélérates » les lois
scolaires votées par les Chambres répu-
blicaines.
Nous aimons à croire que le ministre
des cultes, M. Ricard, sévira avec rigueur
contre cette coupable incartade.
Il y a d'autant plus d'urgence que le
spectacle de certaines impunités n'est
peut-être pas étranger à la contagion de
rébellion cléricale qui menacerait main-
tenant de se propager dans des milieux
restés jusqu'ici indemnes.
Comme nous l'avons souvent déclaré, il
n'y a pas d'ordre social possible, si le gou-
vernement ne tient pas strictement la
main à faire respecter par tous les lois
qui interdisent aux ministres des cultes,
quelle que soit leur confession, toute in-
trusion dans le domaine des choses tem-
porelles.
Nous sommes heureux d'avoir à consta-
ter que les journaux catholiques s'assos-
cient à nous pour demander la punition
du rabbin rebelle, et nous n'avons qu'un
regret, c'est que ces mêmes journaux ne
joignent pas leur voix à la notre quand il
s'agit de demander l'application des lois
aux délits commis par les prêtres catho-
liques.
Rappelons à ce propos le fait que nous
signalions dans notre dernier numéro.
L'abbé Rohon, curé de Ploudaniel, com-
paraissait avant-hier à Brest devant la
police correctionnelle, sous la prévention
d'avoir frappé au visage un cultivateur
qui, le ltr mai, en sortant de la salle de
vote, avait crié : a Vive la République ! »
Malgré un énergique réquisitoire du
procureur de la République, ce curé, que
le nom seul du gouvernement qui le paye
porte à de tels excès, ne s'est vu condam-
né qu'à la peine dérisoire de 50 fr. d'a-
mende.
En attendant que les journaux catholi-
ques en appellent à minima, nous deman-
dons que le rabbin de Bône, qui, sous une
autre forme, a commis un délit de même
nature, soit puni plus sévèrement.
LES CATECHISMES ÉLECTORAUX
Pour faire plaisir au pape
Voilà l'évêque de Seez, M. Trégaro, qui
à son tour retire son catéchisme électo-
ral. Mais il tient à ce qu'il soit bien en-
tendu que ce qu'il en fait, c'est unique-
ment pour faire plaisir au pape et non
pour obéir à la loi et au gouvernement
dont il se moque comme de sa première
soutane.
Tel est exactement l'esprit, sinon les
termes de la lettre qu'il vient d'adresser
au ministre des cultes pour lui faire part
de ce sacrifice.
Si le gouvernement avait le moindre
souci de sa dignité et de celle de la Ré-
publique, il n'y aurait qu'une réponse à
faire à cette impertinente provocation.
« C'est très bien, mon ami. — Vous re-
fusez de vous incliner devant la loi de
votre pays et prétendez ne relever
que du pape. A votre aise. A partir d'au-
jourd'hui adressez-vous au pape pour
toucher votre traitement. »
Ainsi du moins, le gouvernement n'au-
rait pas le double désagrément d'empo-
cher les insolences des évêques et de les
voir en même temps encaisser son ar-
gent l
* SCANDALE MILITAIRE
Un général qui se fait courtier élec-
toral
C'est en France un principe universel-
lement admis et demeuré intact, même
pendant la période boulangiste, que l'ar-
mée doit rester en dehors de nos luttes
politiques.
Toute infraction à ce principe est juste-
ment considérée comme une atteinte au
patriotisme, l'intrusion de la politique
dans l'armée, par les divisions qui en se-
raient le résultat, ne pouvant que com-
promettre irrémédiablement la sécurité
nationale.
De plus, dans un pays de République
comme le nôtre, quiconque étant investi
d'une parcelle, si petite soit-elle, du pou-
voir militaire, détourne de sa destination
ce pouvoir pour le mettre au service des
passions politiques, commet une usurpa-
ion criminelle au premier chef.
S'il faut en croire les agences, ces prin-
cipes qui sont chez nous l'une des formes
du patriotisme, seraient en ce moment
outrageusement foulés aux pieds par le
général Deaddé, dans le canton de Saint-
Gaudens, à l'occasion de la prochaine
élection d'un conseiller général.
D'après la Dépêche de Toulouse, qui re-
late les faits avec précision, le général
Deaddé aurait gravement méconnu les
premiers de ces devoirs en se faisant ou-
vertement le courtier électoral de M.
Gamparan, sénateur, conseiller sortant.
Ce général, qui constitue heureuse-
ment une exception dans notre armée si
disciplinée, si patriotiquement soumise
aux lois, aurait publiquement promis aux
électeurs, qui donneraitent leurs voix à
son candidat, de l'avancement pour leurs
fils soldats, des congés, des dispenses des
28 jours ou de service, comme soutiens
de famille, etc.. etc.
Ces faits sont-ils exacts ? Bien que l'ac-
cusation soit terriblement précise, nous
voudrions en douter encore. Nous vou-
drions croire que le mauvais exemple
donné de haut par le général Brugère, ce
parvenu dans l'armée par la politique, n'a
pas à ce point relâché le sentiment de la
discipline parmi nos officiers supérieurs.
Quoi qu'il en soit, une enquête sévère
s'impose d'urgence au ministre de la
guerre qui, nous aimons à l'espérer, ne
faillira pas à son devoir.
Si les faits sont démontrés exacts, la
répression doit être impitoyable et s'exer-
cer suivant toute la riguenr du code mili-
taire.
Quiconque attente à la cohésion de no-
tre armée se rend coupable du crime de
lèse patrie, et doit être traité comme
tel.
On a fait des lois sévères mais justes
contre les anarchistes qui cherchent à
désagréger par leurs prédications l'esprit
militaire.
Quel châtiment ne mérite pas un géné-
ral qui, avec l'autorité inhérente à son
grade, démoralise le soldat par une con-
duite aussi scandaleuse ?
L'ALLEMAGNE ET L'AUTRICHE
Retraite du prince de Reuss
Vienne, 24 juillet. — Malgré les démen-
tis des journaux officieux il se confirme
que le prince de Reuss, ambassadeur d'Al- i
lemagne à Vienne, sera prochainement
remplacé.
L'attitude courtoise de M. de Reuss vis-
à-vis de M. de Bismarck, lors du récent
voyage de l'ex-chancelier à Vienne, au-
rait vivement mécontenté Guillaume II.
AUX ETATS-UNIS
Arbitrage international
Washington, 24 juillet. — M. Sherman
a présenté au Sénat un bill autorisant le
président de la République à entamer
des négociations pour l'établissement d'un
tribunal international en vue d'arranger
à l'amiable tous les différends interna-
tionaux.
MANŒUVRES NAVALES
* LES PRÉPARATIFS
Dans l'Océan et la Méditerranée. —
A Cherbourg, Brest et Toulon. —
Quelques remarques. — Une
loi violée
Les préparatifs en vue des prochaines
manœuvres navales étant achevés ou à
peu près, il est intéressant d indiquer la
composition des forces destinées à pren-
dre part à ces manœuvres.
Les armements ont eu lieu seulement à
Cherbourg, Brest et Toulon. Nos deux
autres ports militaires, Rochefort et Lo-
rient, ont seulement expédié quelques
torpilleurs détachés momentanément de
la défense mobile.
A Cherbourg
Les forces réunies à Cherbourg com-
prennent en premier lieu l'escadre cui-
rassée du Nord, aux ordres de M. le vice-
amiral Lefèvre, et ainsi composée :
6 cuirassés : Suffren (pavillon du vice-
amiral commandant en chef), Victorieuse
(pavillon du contre-amiral Barréra), Re-
quin, Furieux, Fulminant, Tonnerre.
2 croiseurs : Surcouf, Epervier;
2 aviso-torpilleurs, Lance et Salve;
4 torpilleurs : Défi, Alarme, Turco, V é.
loce.
En outre de cette escadre, le port de
Cherbourg arme avec des réservistes qui,
pour la plupart, sont des Parisiens :
2 cuirassés gardes-côtes, le Vengeur et
le Tonnant;
3 canonnières cuirassées, Cocy te,Flamme
et Grenade ;
14 torpilleurs de toutes classes.
Le « Vladimir-Monomach »
La rade de Cherbourg présente donc
en ce moment une grande animation en-
core accrue par l'arrivée de deux navires
étrangers, la corvette-américaine Sainte-
Mary et le croiseur de la marine impé-
riale russe Vladimir-Monomach.
La Sainte-Mary, bien que battant pa-
villon du gouvernement des Etats-Unis
n'est pas, à proprement parler, un navire
de guerre, c est un bâtiment qui sert d'é-
de guerre, l'instruction des jeunes Améri-
cole pour
cains désireux d'obtenir le brevet de ca-
pitaine au long cours.
Le Vladimir-Monomach fait escale à
Cherbourg, dans son voyage de retour à
Cronstadt, après une campagne de trois
ans en Extrême-Orient. Il vient en der-
nier lieu de Cadix et est commandé par
le capitaine de vaisseau Stark.
Le Monomach appartient à cette classe
de navires construits spécialement par la
Russie pour opérer dans les mers de la
Chine et du Japon. Il est armé de 4 gros
canons de 20 centimètres et de 12 autres
plus petits, dont 10 tirent par le travers
entre les grosses pièces, et les 2 autres à
l'avant, de façon à pouvoir,. tirer dans
l'axe du bâtiment.
L'escadre du Nord a retardé son départ-
de 24 heures afin de permettre à nos offi-
ciers de recevoir en un banquet leurs
collègues russes et américains.
A Brest
Le port de Brest a armé :
1 garde-côtes cuirassé, la Tempête ;
1 croiseur, le Rigault-de-Genouilly ;
6 torpilleurs de ln classe.
Dès que le Rigault-de-Genouilly a été
prêt, on l'a expédié à Cherbourg, où il
s'est rangé sous les ordres de l'amiral Le-
fèvre.
La Tempête reste sur rade pour concou-
rir à la défense avec les torpilleurs.
Ceux-ci se livrent à des exercices prépa-
ratoires d'entraînement, échangeant fré-
quemment des signaux avec les séma-
phores de la côte dont le fonctionnement
laisse tant à désirer.
Dans la Méditerranée
Le port de Toulon a armé spécialement
en vue des manœuvres :
3 canonnières cuirassées : Achéron ,Fu-
sée, Mitraille.
1 transport : la Gironde.
7 torpilleurs de lre classe.
De plus, le croiseur le Lalande, détaché
à la station du Levant, est arrivé à Tou-
lon pour se mettre à la disposition de l'a-
miral Rieunier pendant les manœuvres.
Ces forces seront adjointes à l'escadre
active et à l'escadre de réserve de la Mé -
diterranée.
- - ! ,-- - .- -- - 1 -. - -- - -. -
La première,.sous les ordres du vice-
amiral Rieunier, commandant en chef,
comprend :
9 cuirassés, Formidable (pavillon du
vice-amiral commandant en chef) ; Hoche
(pavillon du contre-amiral Dorlodot des
Essarts) ; Vauban (pavillon du contre-ami-
ral Buge); Dévastation, Amiral-Baudin,
Courbet, Marceau, Bayard, Duguesclin.
6 croiseurs, Cosmao, Jean-Bart, Vautour
Condor, Davout, Troude.
3 avisos-torpilleurs, Dague, Dragonn e,
Ouragan,
4 torpilleurs de haute mer, Audacieux,
Aventurier, Téméraire, Kabyle.
Cette escadre est armée avec des ef-
fectifs. sur le pied de guerre.
L'escadre de réserve, commandée en
sous-ordre , par le vice-amiral Vignes
(partez sans régler les compas) est ainsi
constituée.
8 cuirassés: Richelieu (pavillon du vice-
amiral commandant en sous-ordre). Tri-
dent, (pavillon du contre-amiral Puech),
Colbert, Friedland, Terrible, Indomptable,
Caïman, Redoutable.
5 croiseurs, Cécille, Sfax, Faucon, Wati-
tignîes, Bombe. -. -
3 torpilleurs: Agile, Eclair, Orage.
Les bâtiments de cette escadre sont à
effectifs réduits.
L'escadre active qui est arrivée au golfe
Jouan le 20 juillet, évoluera sur la côte
jusqu'au 30 juillet, depuis Marseille jus-
qu'à la frontière italienne.
Du 30 juillet au 2 août elle séjournera
aux Salins-d'Hyères où l'escadre de ré-
serve viendra la rejoindre.
Du 7 au 11 août les deux escadres opé-
reront des manœuvres d'ensemble.
Actuellement, l'escadre de réserve est
en Corse, à Ajaccio, où elle va expéri-
menter une estacade pour fermer l'entrée
du port.
Les travaux pour l'établissement de
cette estacade ont commencé le 20. L'ap-
pareil se compose de boites rectangulaires
en tôle, longues de 75 centimètres environ
et reliées entre elles par un câble.
Quelques remarques
Quelques remarques s'imposent.
Tous les cuirassés garde-côtes type
Vengeur et les canonnières cuirassées
type Achéron sont d'épouvantables rossi-
gnols, incapables de tenir la mer et de
combattre.
Quand, par hasard, on se risque à leur
faire quitter le port, ceux qui les montent
se considèrent avec raison comme en per-
dition, même par une mer simplement
un peu dure. Jamais on n'a osé s'en ser-
vir par gros temps.
Cette collection de chaudrons revient
au budget de l'Etat, c'est-à-dire aux con-
tribuables, à plus de 200 millions. C'est
200 millions de jetés à l'eau.
Les officiers que nous avons pu voir
sont unanimes à blâmer l'armement pré-
cipité des torpilleurs avec des réservistes.
Tous prétendent qu'en agissant ainsi on
paraît désirer et favoriser les accidents
de navigations et les avaries de machi.
nes.
Violations de la loi
Dans le budget voté par le Parlement
d'accord avec le ministre de la marine,
pour 1892, l'état-major du vice-amiral
commandant l'escadre de réserve est
ainsi composé :
Officiers et assimilés : 10 ; équipages de
majorité : 14 hommes. Total : 24 person-
nes. La dépense prévue et votée est de
143,303 francs.
Or, cet état-major est composé en (réa.
lité et contrairement à la loi, de la façon
suivante :
Officiers et assimilés : 14 au lieu de 10;
équipages de majorité : 60, au lieu de 14 !
La dépense au bout d'une année s'élèvera
à 201,687 francs, au lieu 143,303 francs.
Inutile d'ajouter que cette violation
d'une loi votée, n'est aucunement justifiée.
Le bien du service n'a rien à voir avec
cette augmentation d'état-major. On doit
même observer que l'escadre de M.
Vignes (partez sans régler les compas),
comprend 16 navires de moins que ne le
prévoyait le budget de 1892.
Ce qui tend à prouver que le nombre
des officiers d'un état-major doit croître
en raison directe de la diminution du
nombre des navires que cet état-major
doit diriger!
Inutile de dire qu'il n'y a là qu'une sa-
tisfaction de sot amour-propre. M. l'ami-
ral Vignes, commandant en sous ordre, a
voulu avoir un plus gros état-major que
l'amiral Rieunier, commandant en chef.
Il l'a eu, — au mépris de la loi et des rè-
glements. Car on sait fort bien que la loi
et les règlements n'existent pas pour nos
seigneurs les archevêques de la flotte. Le
consentement du véritable maître de la
marine l'amiral Filons-sur-Belgique leur
suffit, ou, du moins, leur a suffi jusqu'à ce
jour. Mais il se pourrait que l'honorable
M. Burdeau leur montrât, sous peu, que
cela ne suffit plus.
CATASTROPHE DE SAINT-GERVAIS
Les causes du désastre
Chamonix, 24 juillet. - M. Vallot, le
météorologiste qui a construit l'observa-
teur du Mont-Blanc, a réussi, à explorer
le glacier de la Tête-Rousse, cause de la
catastrophe de Saint-Gervais.
Il est entré dans une grotte d'où on
aperçoit le jour devant soi, en escaladant
des blocs de glace, immense réservoir
ayant dû contenir plusieurs millions de
mètres cubes d'eau.
La pression de cette eau, grossie par
les pluies, a causé la rupture des parois
du glacier.
Cette constatation met fin aux contro-
verses scientifiques sur les causes du dé-
sastre.
LA CRISE EN ESPAGNE
Nouveaux désordres
Pontevedra, 24 juillet. - L'émeute des
vendeuses de Pontevedra a recommencé
aujourd'hui. La gendarmerie occupe les
points principaux de la ville. Des rixes
continuelles se produisent aux bureaux
des octrois. Plusieurs femmes et deux
agents ont été blessés. Une partie de la
population sympathise avec les émeu-
tières dont quelques-unes ont pu franchir
les barrières de l'octroi sans payer.
Quelques arrestations ont été opérées.
Des mesures ont été prises pour le cas où
les vendeuses voudraient continuer de-
main à refuser l'impôt.
La surexcitation est grande. On craint
que les désordres ne se renouvellent.
LE
SUPPLÉMENT LITTÉRAIRE ILLUSTRÉ
os
La Lanterne
OUI PARAIT AUJOURD'HUI LUNDI
CONTIENT :
Les Passants, par MARCEL PRÉVOST;
Comment on prend une femme, par
GOLOMBINE ; Un Philtre égaré, par Gus-
TAVE CLAUDIN; Elégie, par BERTIN; Le
Délégué, par HUGUES LE Roux ; Dans la
Fournaise : Massacre, par THÉODORE DE
BANVILLE; L'Observateur, par PAUL VER-
NIER ; Initiation, par CHARLES BAUTHIAN;
Beuglant de Province, par MAURICE
TALMEYR ; La Ruse de M. Montauciel,
par CH. D'ARCIS, etc., etc.
Plus la suite des intéressants feuille-
tons : Le Pavé de l'Enfer, par M. MAU-
RICE DRACK ; Mademoiselle Jaufre, par
MARCEL PREVOST ; Une vieille Maîtresse,
par J. BARBEY D'AUREVILLY.
Enfin : En Jupon court, en Blanc
Corset, musique, par LÉOPOLD BAGNAT.
LE SUPPIEISENT LITTÉRAIRE ILLIUSTRÊ
DB
- La Lanterne
QUI PARAIT LES LUNDI ET JEUDI
EST EN VENTE PARTOUT
acent.. LE NUMERO 9500au
EN RUSSIE
LE CHOLÉRA
L'épidémie cholèriforme en Russie. -
Incurie des fonctionnaires russes.
— Les pèlerins, propagateurs
du choléra.
Nous recevons de notre correspondant par-
ticulier de Russie, à Saint-Pétersbourg, fin.
téressante lettre suivante :
Saint-Pétersbourg, 9/21 juillet 1891.
Tous les journaux ne parlent en ce mo&
ment que du choléra, qui est le héros da
jour. Malheureusement, les nouvelles de*
endroits contaminés ne sont pas bonnet
et la terrible maladie avance toujours,
lentement, mais sûrement. Mais ce n'est
pas tout, il faut en même temps compter
avec lar superstition du moujik, qui est
persuadé que la maladie est inventée par
les médecins, et que ce sont ces derniers
qui empoisonnent le peuple et l'enterrent
vivant. C'est là une vieille légende parmi
les moujiks, légende qui a pris naissance
lors de l'apparition de l'épidémie du cho-
léra en 1830 sous le tsar Nicolas.
Comme auj ourd'hui à Astrakhan et à
Savatoff, le peuple tuait à Saint-Péters-
bourg les médecins et les gens habillés
« en Allemands » (costume européen), et
c'est alors que le tsar Nicolas Ier deman-
dait à son ministre de la guerre ts'il n'y
avait pas assez de troupes dans la canitale
« pour mettre la crapule à la raison ». La
.réponse du. ministre étant négative, Nico-
las Ier .s'écria : « Un empereur russe vaut
bien une .armée » et il se fit conduire tout
seul dans sa voiture sur la place Sennaja-
plotschadj où étaient rassemblés les émeu-
tiers. Il monta sur la capote de sa voi-
ture, et avec sa voix forte il cria trois fois
au peuple : « A genoux, canailles ! » Au
troisième cri, tout le monde était à ge-
noux.
Le tsar expliqua alors à son peuple que
le choléra est envoyé par Dieu, que les
médecins sont des employés du tsar qui
combattent le fléau. Il les avertit en outre
que si quelqu'un osait toucher à un méde-
cin il le ferait pendre immédiatement,
qu'il ne reculerait pas à laisser pendre
s'il leàfallait cent mille moujiks. En termi-
nant son speech, il dit au peuple de prier
Dieu pour que le choléra cesse. Et le
peuple obéit et l'émeute prit fin à Saint-
Pétersbourg. — Aujourd'hui à Astrakhan
et à Savatoff les fonctionnaires du tsar
ne sont pas à la hauteur de la situation,
loin de là : ils ont montré une incurie et
une lâcheté écœurantes — Le journal de
notre capitale les « Saint-Pétersbourgs-
kija Wedomosti » les a flétris publique-
ment.
La « Mecque » des Russes
Ce journal a même fait remonter plus
haut les responsabilités, en accusant nos
ministres d'incapacité. Résultat : le mi-
nistre de l'intérieur, M. de Dournovo,
vient d'interdire la vente au nùméro des
Saint-Petersbourgskija Wedomosti, et leur
a enlevé l'autorisation d'insérer des an-
nonces.
C'est naturellement la ruine de ce jour-
nal. Comme vous le voyez, nous sommes
en Russie encore bien loin de la liberté
de la presse. -
Mais cette mesure de rigueur n'empê-
che nullement les progrès du choléra.
Nos moujicks superstitieux font, en ce
moment, des pèlerinages en masse à Ki-
jeff, la Mecque des Russes. On a compté,
en un mois, plus de 200,000 pèlerins qui
ont visité Kijeff et le couvent Kievopets-
cherskaja, où reposent dans des cercueils
ouverts plus de trois cents saints à l'état
de momies.
Les pélerins <■
Les neuf dixièmes de ces pèlerins ap-
partiennent à la classe la plus pauvre -
peuple. Ils campent tous en plein air, me
mangent que du pain et des concombnws
crus et boivent du kvass, ou se soûleat
avec du vodki (eau-de-vie de graine
C'est dire qu'ils sont pour le choléra une
proie facile et qu'ils propagent le fléau en
retournant chez eux.
Il est donc presque impossible au gouj
vernement impérial de lutter contre le
choléra. La religion orthodoxe elle-même
s'y oppose en bien des cas. Aussi toutes
les quarantaines et stations d'observation
sont elles impuissantes à enrayer ce nou-
veau fléau. On espère, il est vrai, que l'ap-
parition du froid arrêtera un mal qui fait
en ce moment beaucoup de victimes dans
l'empire des tsars, et est une menace pour
l'Europe entière.
Progrès de l'épidémie
Saint-Pétersbourg, 24 juillet. — Il se
confirme que le choléra a gagné Nijni.
Novgorod; deux décès cholériques vien-
nent d'être constatés.
A Balakowo, la population excitée a
détruit un baraquement destiné à recevoir
les malades.
Le saint synode a ordonné des prières
et trois grandes processions.
LES GARDIENS DE LA PAIX
Augmentation de traitement
Le vote du Conseil municipal concer-
nant l'augmentation du traitement des
gardiens de la paix a reçu son effet iinmé-
diat, M. Gaillot a donné l'ordre de recom-
mencer les feuilles de solde, les agents
devant bénéficier de l'augmentation à
partir du 1er juillet. -
Le traitement des gardiens de la paix
est fixé actuellement comme il suit :
Les brigadiers toucheront annuellement
2,300 fr. au lieu de 2,000, et les sous-bri-
gadiers 2,100 fr. au lieu de 1,800.
Les agents subalternes sont répartis en
quatre classes qui recevaient par an 1,700,
1,600, 1,500 et 1,400 fr. ils recevront doré-
navant, suivant la catégorie à laquelle ils
appartiennent, 2.000, 1,900, 1,800 et 1,60(
francs.
DÉSORDRES A GAND
Catholiques et libéraux
Gand, 24 juillet. — Un violent conflit a
eu lieu ce matin entre les socialistes et
les membres de la ligue catholique anti
socialiste, à l'occasion de la bénédiction
dit drapeau de cette ligue par l'évêque, à
la cathédrale. '-
Une - conférence devait être faite à la
salle Valeatino çar M. itellepute, profes-
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