Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1902-02-17
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 février 1902 17 février 1902
Description : 1902/02/17 (Numéro 12408). 1902/02/17 (Numéro 12408).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k710998k
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Lundi ir7 ^èvrîes 18Q*
ÉDITI ON QUOTID IENNES
V PARIS • ÉTRANGE»
m départements *" {union postales
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Ltmdi 17 Février i902
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ET
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PARIS. 16 FÉVRIER iSOS
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Les moines J B essièrss.
Çà 6t là : Saint-
Lazare............ E rnest B illiet. :
Réflexions de...... S. Exc. M gr L o-
renzelli, nonce
apostolique.
Osrxespondtneo ro
mains...... « ***
Lettres de Pologne. Iv.
Feuilleton: A tra
vers le# revues..-..
B'iUe is- —> Un avis. — Au Jour le jour. —
Au Vatican.— Lea cosgrégationa. —Pa
roles épiaoopaîes. — Information* poli
tiques et pirieraenta'res. — Chronique
électorale. — Le traité anglo-japonais.
— La guerre ûi. Transvasl. — Les trou-
- ble3 de Trieate. — Etranger. — A tra
vers la presse. — La question ouvrière.
— Les grèves. — Lettre», ïôiencea et
arts. — A l'Institut populaire du V* arron
dissement. —• Institut catholique. —
, Echo» de part9ut. — Association catho»
liqûe de la jeunesse française. — Nécro
logie. -- Guerre et marine. — Tribu-
n&aa. — Kouvci'.es diverse?. — Revue
de la Bourse. — Galandriev*. — Ornière
■■ ..«SÏSr». ■ . ■
LES MOINES
Notre siècle ne comprend pas les
moines. Cela ne doit pas surpren
dre : les esprits ne sont pas assez
élevés, ni les cœurs assez pur3
pour saisir les grandeurs de la vie
monastique^
Pour les lecteurs de romans, lo3
moïses sont de sombres fanatiques
ui haïssent leurs semblables, ou
e mystérieux illuminés qui vivent
dansleura rêves, ou des malheureux
qui vont chercher dans le cloître
l'oubli de leurs chagrins et la con
solation de leurs coeurs meurtris ;
pour le vulgaire, ce sont de doux
maniaques qui veillent quand tout
le monde dort, qui s'affublent de
costumes excentriques et qui, ne
trouvant pas la vie assez chargée de
souffrances, y ajoutent des mortifia
cations volontaires.
Les sectaires, libres-penseurs ou
francs-maçons leur ont voué une
haine mortelle. Comment peut-on
haïr des êtres si inoffensifs Y diront
les naïfs. Toujours Vimpiété a dé
testé ia religion, le vice a perséouté
la vertu, la paresse a maudit le tra
vail. Les monastères offusquent
certains regards ; ils sont un repro
che permanent contre la corruption
et les désordres.
Les impies devinent dans les
moines de redoutables ennemis.
S'ils parlent de mystérieux com
plots, de conspirations ourdies dans
les cellules, ils ne sont pas assez
niais pour y croire. Mais les moi
nes, par leurs paroles et leurs
exemples, prêchent des vertus, un
détachement des biens du monde,
une indépendance, un courage con
tre les persécutions, qui rendent
difficiles le succès de certains pro
jets. Comment séduire des hommes
qui n'ont pas de passions, acheter
des hommes qui n'ont pas de be
soins, intimider des hommes qui
méprisent la vie? Sans doute, les
quelques religieux enfermés dans
les monastères, ignorant ce qui se
passe à quelques mètres de leur
clôture, ne sont pas bien redouta
bles. Mais tant que les monastères
existeront, tant que des jeunes gens
iront y chercher des legona, fleu
riront ces vertus importunes qui
déplaisent- Et rien ne permet de
croire que les monastères doivent
êtré abandonnés.
Aujourd'hui'les moines ne ren
dent pas les mêmes services qu'au
trefois; ils rendent encore des ser
vices et qui ne sont pas moins im
portants.
. Si les monastères n'existaient pas
où iraient se réfugier ces âmes dé
licates que le monde a blessées?
Ils sont encore nombreux parmi
nous cqux que le plaisir dégoûte,
que la science ne satisfait pas, que
l'ambition laisse indifférente? Ils
sont nombreux parce' que la civili
sation qui rend ie vice plus insa
tiable rend aussi plus exigeante la
vertu : quand les voluptueux de
viennent plus raffinés, les âmes éle
vées deviennent plus exquises. Dans
ie silence des monastères, dans l'ou
bli des intérêts matériels, dans la
méditation des pensées éternelles,
en présence de Dieu, les intelli
gences ont des lumières, les cœurs
des effusions, les âmes tout entiè
res des joies que les profanes ne
sauraient comprendre. Une société.
oui donne toute liberté au vice ne
doit pas imposer d'entraves à la
vertu ; les nobles sentiments ont
autant d© droits que les satisfac
tions bestiales.
Mais les moines ne sont pas ces
pieux égoïstes qui laissent si facile-
laent le monde se perdre pourvu
que leur âme soit sauvé, ou ces
doux fainéants qui se contentent do
peu pour n'avoir rien à faire, que
l'on nous représente.
Nous ne parlons ni de ceux qui
prêchent ni. de ceux qui enseignent :
on connaît l'emploi de leur vie.
Quel est l'ouvrier qui consentirait
à échanger sa vie contre celle du.
moine? Au couvent le sommeil est
court et interrompu, les heures de
prière sont longues et plus longues
encore les heures -de travail. Qu'il
déchiffre des manuscrits, laboure
les champs, culiive les vignes, ou
s'occupe à l'atelier, le moine ne se
contente pas d'une journée de huit
heures : son travail est aussi péni
ble que celui de l'ouvrier et il est
moins lucratif. Il faut suer, faire
refleurir les jardins ou reverdir les
prés, remplir les celliers et les ca
ves, son costume ne sera ni plus
commode ni plus beau, sa table ne
sera pas mieux servie, son travail
n8 sera ni moins pénible ni plus
court, sa couche ne sera pas plus
molle et l'heure du repos ne son*
nerà pas plus tôt pour lui. Le blé
qu'il a fait mûrir va nourrir les
mendiants, peut-être des lépreux,
qui viennent frapper à la porte du
monastère et manger le pain du
moine en demandant son expulsion ;
l'argent qu'il a gagné va élever des
écoles, bâtir de* églises, soulager
des infortunes, aider l'industrie et
contribuer à la prospérité publi
que.
Ils travaillent, ces moines, sans
murmurer, sans préparer des grè-
' à'î
ves, sans demander.d'augmentation
de salaire, sans maudire le patron
et accuser la société.
On parle souvent de socialisme :
le socialisme vrai, le seul réalisa
ble, existe dans les couvents. Tout
est commun; la communauté seule
posséda et distribue à chacun ce
qui lui est nécessaire ; les individus
n'ont rien. Mais les rêveurs de
vraient savoir à quelles conditions le
socialisme s'y établit. Il n'y a ici ni
égoïsme, ni intempérance, ni con
voitise, ni paresse ; les besoins ont
été réduits au strict nécessaire, les
exigences sont inconnues; aucune
ambition, aucun désir de comman
der ou de dominer; la seule passion
est de servir Dieu, la seule ambition
de faire le bien. Faites_régner dans
le monde une vertu pareille et vous
pourrez introduire le socialisme.
Tant que domineront les vices or
dinaires, vous-ne réussirez pas.
Mais v@us commencez par " dé
truire, par décourager la vertu, et
vous parlez d'appliquer vos chi
mères I Constructeurs insensés,
vous enlevez toutes les fondations,
et prétendez élever un lourd et dif
ficile édifice.
Les moines donnent au monde
l'exemple de la vertu. Il ne suffit
pas de prêcher la vertu, il faut
montrer qu'elle est possible, qu'elle
existe et que sa pratique ne rend
pas plus malheureux. Qu'ils ou
vrent la porte d'un monastère, le
voluptueux verra comment on pra
tique la chasteté, l'égoïste com
ment on pratique 1© renoncement,
l'impie comment ©n adore Dieu,
puis comment on s'élève au-dessus
des faiblesses humaines. Le reli
gieux est une dos meilleures preu-,
ves de l'existence de Dieu, de sa
bonté et de la puissance de sa
grâce.
Il est aussi, parses prières et par
ses vertus qui désarment les co
lères divines, le meilleur gardien
de la patrie.
Parmi tant d© fautes que notre
siècle a commises, la plus grossière,
c'est cette persécution religieuse
qui irrite le eiel et nous prive de
nos défenseurs naturels. Un peuple
ne gagne jamais à mettre Dieu
parmi ses ennemis. La plus habile
politique serait d'avoir toujours
Dieu pour soi ; elle ne pourrait
avoir aucun inconvénient et don
nerait d'inappréciables avantages.
A. B essières.
"BULLETIN
Une élection sénatoriale a lieu autour-
d'huidans le dépar tement de là. Drôme,
en remplacement de M. Laurens, radi
cal, décédé.
Ii n'y a qu'un seul candidat, M. Louis
Blanc, député radical de l'arrondisse
ment de Die,
Les « Jaunes » ont tenu hier, au nom-
bre de deux rnilh, une importante réu
nion. M. Lanoir a déclaré, en leur nom,
que les « Jaunes au lieu de se syndi
quer contre les patrons avec les révolu
tionnaires, entendaient s'unir avec les
patrons contre « les professionnels du
désordres.
La grève de Marseille est station-
na ire.
A Trieste, une nouvelle bagarre a mis
aux prises la troupe et les manifes
tants; dans la foule, on a relevé trois
morts et quatre blessés. De graves pré
cautions militants oni été prises et il
est question de proclamer la loi mar-
tiale. On annonce toutefois que le c&lme
va se rétablir ; car le ttibvnal arbitral a
reconnu le bien-fondé des revendica
tions des chauffeur s.et cette décision a
produit le meilleur effet sur la popula
tion.
Une dépêche de La Haye annonce que
la députation boer a quittéScheveningue
et qu'elle va piobablement se rendre en
Amérique.
La régente d'Espagne doit signer de
main le nouveau traité avec les Etats-
Unis. Le nouvel ambassadeur auprès
du Vatican, M.Aguera, va rejoindre son
poste : en attendant, il a de longs entre•
tiens avec le ministre des affaires étran
gères.
M. Stourdza, président .du conseil de
Roumanie., faisant l'éloge de son admi
nistration financière , a déclài'é hisr au
cours de la discussion du budgai, qu'il
avait pratiqué 25 millions d'économie.
Le prince Henri de Prusse a quitté
VAllemagne hier, à trois heures, à bord
duKronprdnz-Wilhclm,[pour son voyage
aux Etats-Unis.
UN AViS
La Semaine religieuse du diocèse
de Nancy , dans son numéro du
15 février publié le 14, a donné la
lettre de Mgr Turinaz à M. Eugène
Veuillot Nous ne doutons pas que
la . même Semaine ne donne dans
son prochain numéro la réponse de
M. Eugène Veuillot à Mgr Turinaz.
Ainsi l'exigent, selon les expres
sions mêmes de Mgr de Nancy, la
loyauté et la loi.
Aïï JOUE LE JOïïE
De M. Léon Bigot dans le Vol«
faire :
« Décidément, j l en>reviens à ma ma
rotte;.nous sommes plus que jamais des
Romains de la décadence! Il n'y a plus
qu'un pas à faire pour tomber tout à
fait dans la déliquescence morale et so
ciale. »
Et nous qui pensions que la Révolu
tion, les Droits de l'homme, la libre-
pensée, l'émancipation de l'esprit mo
derne, le recul du cléricalisme et tout le
tremblement avaient magnifiquement
lancé l'humanité dans les radieuses voies
du progrès!
- #
_ * •
Le géant Constantin à qui l'on vient de
faire subir, à l'hôpital de Oharleville,
1 amputation du feras droit, mesurait
2 m. 53 de hauteur.
Constantin détient-il le a record » dé
la igiiie ? — Non, s'il faut en croire le
Courrier, des.Etats-Unis..
D'après ce journal, il exista deux jeu
nes geïiB, un garçon et une fille, qui dé
passent cette- taille gigantesque.
Le jeune homme, Ekhvard Beaupré,
de Montana, a 21 ans ; il mesure 8 pieda
du haut, c'est-à-dire 2 mètres 59, et pèse
367 livres ; la jeune fille, Ella Murray,
du Missouri, a 8 pieds et 1 pouce de hau
teur et pèse un peu plus de 400 li
vres!...-
Ce couple de géants va, ajoute-t-oa,
convoler en justes noces. Depuis quel
ques années, ie père d Ella Murray cher
chait en vain un mari pour sa fille ; il
offrait comme dot une jolie maison et
une somme rondelette, mais la taille et
ie poids de la fiancée mettaient en fuite
les prétendus.
Le père mit des annonces dans les
journaux ; l'une d'elles est tombée sous
icâ yeux de personnes qui connaissaient
Beaupré ; ils mirent ceîui-ci au courant
de l'affaire et le décidèrent à se proposer
comras époux de la jeune géante. Le
mariage sera célébré prochainement.
Voilà des concurrents sérieux pour le
legs de Pierrecourt? .si toutefois, l'hia
toire est sérieuse elle*même.
La tortue est paresseuse de corps,
mais cela ne nuit en rien, paraît-il, à
ses facultés intellectuelles.
Voici l'expérience que fit, pour s'en
rendre compte, le processeur Yeikes.
Il enferma une tortue dans une caisse
qu'il avait, à l'aide de cloisons, trans
formée en labyrinthe. Ces oloisons for
maient des chambres successives, et
dont les pertes avaient été à dessein dis
posées sans symétrie. L'agencement
était tel que, pour aller de la première
chambre de gauche à la dernière cham
bre de droits, qui était sa chambre à
coucher, la tortue devait parcourir un
chemin qui avait la forme d'un "VV. Les
premiers essais furent laborieux : la
bête erra en tous sens, dans un domaine
si restreint, pendant 35 minutes, avant
d'arriver au but. A la seconde épreuve,
elle fit le voyage en 15 minutes ; à la
troisième, en 5 minutes; à la quatrième,
en 3 m. 3(4, et en ce se trompant qu'une
fois de chemin. Dès lors, elle n'eut plus
que des hésitations, qui disparurent
bientôt. Le vingtième voyage dura 3 m.
45 s. ; le trentième, 3 m. 40 s. ; le cin
quantième, 3 m. 30 : b . On compliqua
alors le labyrinthe eh l'agrémentant de
culs-de-sac. La tortue donna d'abord
droit dans le piège et fut une heure à
tâtonner. Mais, à la dixième épreuve,
elle arriva en seize minutes, puis en 4 et
hiême en 3. Ces 3 minutes paraissent
éire le temps minimum qu'elle puisse
mettre à atteindre le but.
La tortue ne perd donc pas de temps.
La Fontaine l'avait déjà dit dans une
fable, mais il est intéressant de voir le
témoignage de la poésie confirmé par
celui de la science.
Le jeune La Moulardière va chercher
le médecin pour son père qui est ma
lade.
— Diable, fait le docteur, aprè3 avoir
pris la température de es dernier, il a
une fièvre de cheval.
— Impossible qu'il ait attrapé cela, dit
le fiis.
— Comment? fait le médecin interlo
qué.
— Parce que nous ne sortons plus
qu'en automobile !
AU VATICAN
Nous lisons dans le Bulletin reli
gieux du diocèse de Rouen :
A un prêtre du diocèse de Rouen qui
l'a vu ces jours derniers, et à qui il di-
Bait : a J'aimais tant la France ! s et qui
ss permit d'ajouter : « Mais, Trè3 Saint-
Père, vous l'aimerez encore la France,
car il n'y a pas de peuple au monde où ,
évêques, prêtres et fidèles, vous soient
aussi attachés », là Pape, lui serrant les
mains, et avec cet accent qui lui est pro
pre et les yeux dans les yeux, lui répli-
qya J*»' Oui, mon fils, je l'aimerai,* la
France, jusqu'à mon dernier soupir... »
Çà et là
SAINT-LAZARE
Les jours de Saint-Lazare sont comp
tés. L'hygiène réclame la démolition de
cette prisoa défectueuse dont le sombre
extérieur rappelle les geôles des temps
pasBéB.
Avant que ces vieilles pierres grises,
témoins des «grandeurs d'un régime et
des bienfaits d'un saint, ne soient dis
jointes, évoquons les souvenirs qui b 'at-
tachentà elles.
Au livre VI de son Histoire. Grégoire
de Tours en parle déjà, comme d'une
abbaye ancienne dirigée par uu saint.
C'est là que se trouvait le fameux lo
gis, où les anciens rois s'arrêtaient avant
âe faire leur entrée à Paris, pour rece
voir le serment des autorités munici
pales de leur bonne ville, et où ils reve-
naier.t 'après leur mort, pour séjourner
vingt-quatre heures avant d'être portés
à Saint-Denis. '
Au retour des croiaades,la lè-pre deve
nant plus fréquente, Saint-Lazare, qui
était devenu une église dédiée à saint
Laurent, fut transformé en un refuge
destiné aux malheureux atteints de l'hor
rible fléau.
Sanctuaire do prières, logis du roi,
asile de souffrances, Saint-Lazare sem
blait prédestiné à devenir 1a demeure du
liéroa de la charité moderne : Vincent de
Paul.
A l'époque où le saint habitait encore
le collège des Bons-Enfants, c'est-à-dire
vers 1632, Saint-Lazare n'était plus une
léproserie, mais le bénéfice de messiré
Adrien La Bon, chanoine régulier de
Saint-Victor,qui y vivait en compagnie
de quelques religieux dont il était fort
mécontent. Ayant entendu parler de
bons prêtres, qui s'adonnaient à faire des
missions sous la conduite de M. Vincent,
il eut l'idée de leur donner asile, afin de
participer aux grands fruits qu'ils fai
saient dans l'Eglise. A la surprise du
brave prieur, M. Vincent refuea tout net
sa gracieuse proposition. Modeste pour
lui et ses disciples, il aimait l'exiguïté de
son pauvre logis,et trouvait Saint-Lazare
trop yaste et trop beau. A force d'instan
ces,on vint[cependant à bout de l'humble
mais opiniâtre résistance du saint, et le
8 janvier 1632, il B'y installa au conten
tement de toute la maieon. I! faut noter
que ce n'était point le donateur qui posait
les conditions mais la bénéficiaire. Ainsi,
messire Le Bon demandait à ce que ses
chanoines fissent dortoir commun avec
les religieux de M. Vincent; Celui-ci ne
voulut pas entendre raison,alléguant que
« les Pères de la Mission devaient éire
comme des Chartreux en leur maison et
comme des apôtres au dehors ». Si la ré
ponse n'était pas flatteuse pour les cha
noines, elle était sage.
Maître ie Saint-Lazare où il ne vou
lait point venir, saint Vincent de Paul
transforme l'édifice antique et le rajeu
nit par ses initiatives.
Ces murs qui demain seront abattus,
virent les fameux exercices d'ordination,
les premières conférences ecclésiastiques
ét les retraites spirituelles, exercices
destinés à préparer et à soutenir le prê
tre, à une époque où, l'omnipotence du
pouvoir et le relâchement des mœurs
étaient des dangers bien aussi grands
pour le sacerdoce catholique, que ceux
d'aujourd'hui.
Après une vie employée à répondre à
l'attente de son temps et de son pays,
saint Vincent de Paul mourut dans eoq
quartier général.
Lé centre de cette activité bienfai
sante qui fixe l'attention de tous ceux
dont les yeux sont ouverts aux dons de la
Providence, né semble pas en avoir im
posé à la foule révolutionnaire. Le
13 juillet 1789 une bande furieuse,incons
cients peut-être, en tout cas avide; bou
leversa ht maison de la charité, pour y
chercher des armes qui n'y étaient pas,
et prendre des vivres destinés aux pau
vres.
Après l'avoir saccagé, la Révolution
fit de Saint-Lazare une prison, qui vit la
captivité d'André Chénier et de bien
d'autres. DepuiB, Saint-Lazare est une
maison de détention et, si pour quelques
jours encore il le reste, il est bon de dire
que, de son temps, M. Vincent y gardait
déjà de jeunes débauche'3, sur le désir de
leurs parents et avec l'assentiment des
pouvoirs publies.
L'édifice condamné à mort, est donc
depuis longtemps le témoin des colères,
des désespoirs et aussi des amendements,
de ceux que la société retranche de son
eeinr- / .■■■■■■,
II. semble que la Providence lui ait as
signé,xin rôle Bpécial daaa les choses de
la piété, de la charité et de la jus
tice.
Disparu, les page3 de notre histoire
qu'il marquait comme d'un signet de
pierre, continueront cependant à fixer
notre attention.
Et si nous devions les oublier toutes,
il en est une qui, voltigeant toujours
parmi nous comme une colombe aux lar
ges ailes, nous forcerait au souvenir :
C'est la cornette blanche de la Sœur de
Saint Vincent de Paul.
> Ernest B iixiet.
RÉFLEXIONS
GE S. EXC. r LOREHZELLI
NoiîCQ apostolique; "
Le mardi, 4 février, fut, pour le
clergé de Soissons,un jour ae fête.
Acceptant l'invitation de Mgr De-
ramecourt, S. Exc. Mgr Lorenzeîli,
nonce apostolique, accompagné de
Mgr Ranuzzi, conseiller de la
nonciature, était venu passer quel
ques heures en cette ville.
Au cours d'une visite à la cathé
drale où le nonce admira particuliè
rement, dans l'harmonieux et su
perbe édifice, un chemin de croix
artistique à émaux cloisonnés, dont
M. l'archiprêtre Landais vientde do-
délicatement le représentant du
Pape, au nom de tous lès chanoi
nes et du clergé de la ville, assem
blés ; puis il termina son discours,
en remettant à Mgr Lorenzeîli,
pour le denier de Saint-Pierre, une
généreuse offrande personnelle.
L'après-midi, les élèves des deux
séminaires et une soixantaine de
prêtres étaient réunis pour une
séance solennelle que Mgr Dera-
"mecourt ouvrit par une* éloquente
allocution, qui se poursuivit par
des travaux poétiques, littéraires
et philosophiques, interrompus
par des chants, et qui fut couronnée
enfin par une joute théologique
des plus intéressantes, à laquelle
Mgr Lorenzeîli daigna prendre
part, en admirant la force et là
sûreté des études du grand sémi
naire de Soissons.
Puis, Son Excellence improvisa
une causerie pleine de lumière et
de saveur; où la simplicité du lan
gage était relevée par la force et la
profondeur des enseignements.
Un des auditeurs de ce3 ré
flexions, qui avait pris soin de les
noter au vol, a bien voulu nous en
adresser le texte. Nos lecteurs se
ront heureux de les lire.
Monseigneur,
Messieurs,
Mes chers séminaristes,
La joie que j'ai éprouvée pendant ces
trois heures, qui se sont passées si vite,
est bien profonde et je ne trouve pas les
mots suffisants pour la rendre telle
qu'elle est dans mon âme. En effet, dans
le cours de cette séance nous a été pré
senté le portrait sublima de^Léoa XIII
en vers saphiques qui étaient un hom
mage bien digne de ce Pape latiniste, ex
primé en si beau latin ; nous avons en*
tendu un aperçu des enseignements de
Léon XIII dans toutes les Branches du
savoir intelleotuel. Moi en particulier
j'ai goûté Us bjaux travaux, et latins et
français, qu'on nous a lus dans cette
séance, et j'ai remarqué comment vous,
chers séminaristes, êtes bien dirigés par
vos professeurs dans la bonne voie des
études littéraires, philosophiques, théo-
logiqueB, bibliques et sociales, confor
mément aux Encycliques du Vicaire de
Jésus-Christ.
C'est pourquoi j'ai hâte de féliciter
d'abord Votre Grandeur, Mgr l'évêque
de Soissons, de Laon et de Saint Quen
tin, de vou3 féliciter de tout mon cœur
de cet esprit et de cette ardeur pour les
études telles que le Saint Père les de
mande et telles que l'exigent les besoins
de notre temps.
Votre Grandeur, je le vois, je le cons
tate avec un grand plaisir, donne une
impulsion toujours plus forte à toutes
les plue nobles initiatives intellectuel
les, morales, pastorales et sociales qui
peuvent amener la régénération de ce
diocèse, de oette réunion des trois dio
cèses, qui ont été jadis le cœur de
la France : chrétienne. (Applaudisse
ments.)
Permettez-moi dono de vous remer
cier, Monseigneur, de la bonté que vous
avez eue de m'inwter pour me faire par
tager la joie ei pure de constater le bon
esprit dans les étude3 et dans la vie de
votre clergé. Votre Grandeur a parlé,
dans un langage qu'elle me permettra
d'envier beaucoup, de cette procession
qui avait lieu au temple et qui symbo
lisait déjà la marche de l'humanité vers
le Fils de Dieu en la personne des fils
d'Israël prosternés devant. Lui, roi des
Rois, Seigneur àa tous les Seigneurs.
(Applaudissements.)
Le diocèse de Soissons s'est trouvé,
comme ie disait Votre Grandeur, tau-
jours dans cette procession autour de
Jésus-Christ représenté par son Vicaire,
et ce m'est une joie tout à fait particu
lière de constater que ces nobles et
chrétiennes traditions vont reprendre
sous vos auspices et grâce à votre zèle
très éclairé un nouvel essor et une nou
velle vitalité. (Applaudissements.)
Et puisque j'ai le bonheur de me trou
ver sur un terrain où règne l'esprit de foi,
où fleurit le bon esprit ecclésiastique, où
se cultive l'idéal catholique dans les
études, où s'exerce le zèle chrétien dans
toute la vie, je me permets de féliciter
ce diocèse comms étant à l'abri, en vertu
de ces qualités, des dangers de notre
époque, des dangers qui menacent la
sainte Eglise dans son unité, dans sa
sainteté, dans sa catholicité, dans son
a postolicité.
Vous me demanderez quels sont ces
dangers qui menacent 1a sainte Egli
se, eh bien! jevoudrais avoir le temps
de vous les exposer ; mais vous me per
mettrez de vous dire*que si tout danger
d'ordre religieux est de nature à por
ter atteinte à l'unité de l'Eglise, il y en a
un tout particulier : c'est la triste condi
tion politique du Saint-Siège. Il y en a
un contre la sainteté de l'Eglise, et c'est
une tendance qui cherche à ee glisser
dans plusieurs endroits du monde, ten
dance que j'appellerai naturalistique
et qui vise à dénaturer le véritable esprit
du clergé ; il y en a un contre la catholi
cité de l'Eglise, et il consiste dana la
passion et l'orgueil de race et de natio*
nalité, qui prononceraient comme déjà
définitive la déchéance catholique de
telle pu telle..race,.et attribueraient à
telie ou telle autre la supériorité exclu
sive en ce qui concerne lés destinées du
catholicisme; il y en a un erifm contre
l'apostolicité, et il consiste dans une ma
nière toute humaine de considérer la
mission et la hiérarchie de l'Eglise.
•
• •
C'est un événement bien triste que
cette révolution italienne, aidée par tou
tes ies forces maçonniques du monde
contre le Saint-Siège, puisque le Saint-
Siège, centre de l'usité, principe conser
vateur de l'unité, ne peut remplir ce
rôle qu'en jouissant d'une pleine et in
contestable indépendance.
■Pourquoi en effet faut-il que le Papa
jouisse de son indépendance pour pouvoir
conserver l'unité dans tout le monde et
recevoir l'obéissance des catholiques du
globe ? C'est parce que le jour où le Pape
serait ou paraîtrait devenu un sujet,
Bimple ou privilégié, ou d'un roi ou d'un
empereur, de n'importe quel chef d'É
tat, les catholiques, notamment des au
tres pays, pourraient trouver dans cette
apparence seule, un prétexte à la rébel«
lion et par conséquent à la séparation. Et
c'est bien là le but maçonnique de la
révolution italienne ! Son but est de pré
parer cette séparation que saint Paul
nous prédit comme le signe avant^cou-
reur de l'Antichrist, discessio : l'unité
italienne actuelle, à la base de la spolia-
tioï\.du Pape, n'a pour but dans les es
prits Bectaires que de briser l'unité ca
tholique.
Comment, dit-on, le Pape a*t-il besoin
d'être indépendant et d'avoir sa souve
raineté territoriale ? Le Christ et leB pre
miers Papes ne l'ont pas eue, les Papes
du IV e siècle et ceux qui se succédèrent
jusqu'à la fin du VII e siècle ne l'ont pas
demandée.
Je vais vous montrer en quelques
mots comment le Christ n'en eut pas
besoin, 1 comment n'en avaient pas be
soin non plus les Papes du IV* siècle
au VII*, comment, par contre, en ont eu
besoin, depuis le VIII* Biècle, les Papes
jusqu'à nous et comment ils en auront -
besoin à l'avenir.
La mission du Christ et celle du Pape,
identiques quant au but dernier, le salut
des âmes, diffèrent quant à la manière
de l'atteindre. Le Christ devait remplir
sa mission en prêchant au peuple juif
Non sum missus, nisi ad oves quse pe~
riarunt domus Israël. Il lui suffisait donc
de pouvoir prêcher, de même qu'il n'a
vait pas besoiu de faire usage d'autre
langue que celle d'Israël ; mais les apô
tres, dont le prince est saint Pierre,
ont reçu la mission de prêcher non pas
à une nation privilégiée, mais à tous lea
peuples de la terre, ils gardent le man
dat de rendre témoignage à Jésus-Christ
non seulement dans la Judée et la Sa
rdane, mais jusqu'aux derniers confina
de la terre et doivent faire usage de tou
tes les langues. Voilà la première diïïé"
rencedeo deux missions : celle du Christ
avait une extension restreinte, elle était
nationale; celle des apôtres estdestinéeà
l'humanité tout entière, elle est univer
selle.
Mais le Christ devait encore renoncer
à toute principauté terrestre afin dé
remplir sa mission telle que le Père là
lui avait proposée et qu'il l'avait acceptée
librement ; il devait achever sa_ mission
en s'ofîrant lui même sur la croix d'une
façon très libre. Voilà pourquoi il a dû
renoncer à toute royauté 6ur les anges,
n'en demandant pas au Père les légions,à
Gethsemani, sans quoi la PaseioiTne se
rait pas arrivée. Voilà pourquoi il a dû
renoncer aussi à l'exercice de la royauté
divine et humaine sur les hommes de
son pays, à ses droits de Fils de David;
car s'il avait permis l'organisation d'un
royaume politique d'Israël, comme les
multitudes rassasiées un jour voulaient
le faire, que serait-il arrivé le jour où les
Juifs voulaient le tuer? Il l'a dit lui-même
à Piiate : Si mon royaume était de ce mon
de, si en fait comme en droit il était or
ganisé, mes ministres, mes soldats, mes
officiers lutteraient pour me sauver. Si
exhee mundo esset regnum meum, mi»
nistrimei utique decertarent netraderer
judœis. Joan XVIII, 36. Et de cette
lutte que serait-il arrivé ? Ou le Christ
avec Bes armées aurait gagné la bataille,
et sa mort n'aurait pas ou lieu, et par
suite cette rédemption copieuse prédite
jar .le prophète ne serait paB arrivée; ou
e Christ aurait été battu, et on n'aurait
pu dire alors avec Isaïe: Oblatus est
quia tpse voluit, mais on aurait pu blas
phémer avec les princes des Juifs qui
sur le Calvaire disaient : Il sauva les
les autres, il n'a pu sauver lui-même.
Aizos salvos fecit, seipsum non potest
salvum facere, Math., XXVII, 42. Pour
rendre donc incontestable la liberté de
sa Passion et de sa mort, il devait re
noncer au royaume politique.
: »
Libre devait être le saerifice du Christ,
et libre doit être l'application des fruits
de ce sacrifice à tous les peuples de la
terre. Cette seconde liberté est néces
saire au Pape, chef de l'Eglise, à qui le
Christ a confié le ministère de cette ap
plication. Or, une telle liberté, par suite
des conditions politiques du monde, di
visé en différents Etats, ne devient in
contestable que par la jouissance .d'une
souveraineté territoriale.
Il ne pouvait pas en être question pen
dant les trois premiers siècles, où le
monde était encore païen et où le Fape
ne lui paraissait que le ma gister no vue
superstitionis.
Et même lorsquè Constantin et le
monde civilisé le reconnurent comme
Vicaire du Christ, Roi des rois et Sei
gneur des seigneurs, fut-il nécessaire
tout de suite su.Pape de posséder un
mouvoir politique territorialement dé-
lui ?
Non, aussi longtemps que dans le
monde subsista cette unité politique,
qui était concrétisée dans l 'exiBtence du
premier empire romain ; ausBi longtemps
dono que dans les Gaules,dans l'Espagne,
dans la Germanie et dans tout le monde
civilisé,tout homme était encore, suivant
'e vieil adage, citadin de la même cité
Civis romanus sum, il n'y eut pas besoin
que le Pape jouit d'un pouvoir politique.
ÉDITI ON QUOTID IENNES
V PARIS • ÉTRANGE»
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Les moines J B essièrss.
Çà 6t là : Saint-
Lazare............ E rnest B illiet. :
Réflexions de...... S. Exc. M gr L o-
renzelli, nonce
apostolique.
Osrxespondtneo ro
mains...... « ***
Lettres de Pologne. Iv.
Feuilleton: A tra
vers le# revues..-..
B'iUe is- —> Un avis. — Au Jour le jour. —
Au Vatican.— Lea cosgrégationa. —Pa
roles épiaoopaîes. — Information* poli
tiques et pirieraenta'res. — Chronique
électorale. — Le traité anglo-japonais.
— La guerre ûi. Transvasl. — Les trou-
- ble3 de Trieate. — Etranger. — A tra
vers la presse. — La question ouvrière.
— Les grèves. — Lettre», ïôiencea et
arts. — A l'Institut populaire du V* arron
dissement. —• Institut catholique. —
, Echo» de part9ut. — Association catho»
liqûe de la jeunesse française. — Nécro
logie. -- Guerre et marine. — Tribu-
n&aa. — Kouvci'.es diverse?. — Revue
de la Bourse. — Galandriev*. — Ornière
■■ ..«SÏSr». ■ . ■
LES MOINES
Notre siècle ne comprend pas les
moines. Cela ne doit pas surpren
dre : les esprits ne sont pas assez
élevés, ni les cœurs assez pur3
pour saisir les grandeurs de la vie
monastique^
Pour les lecteurs de romans, lo3
moïses sont de sombres fanatiques
ui haïssent leurs semblables, ou
e mystérieux illuminés qui vivent
dansleura rêves, ou des malheureux
qui vont chercher dans le cloître
l'oubli de leurs chagrins et la con
solation de leurs coeurs meurtris ;
pour le vulgaire, ce sont de doux
maniaques qui veillent quand tout
le monde dort, qui s'affublent de
costumes excentriques et qui, ne
trouvant pas la vie assez chargée de
souffrances, y ajoutent des mortifia
cations volontaires.
Les sectaires, libres-penseurs ou
francs-maçons leur ont voué une
haine mortelle. Comment peut-on
haïr des êtres si inoffensifs Y diront
les naïfs. Toujours Vimpiété a dé
testé ia religion, le vice a perséouté
la vertu, la paresse a maudit le tra
vail. Les monastères offusquent
certains regards ; ils sont un repro
che permanent contre la corruption
et les désordres.
Les impies devinent dans les
moines de redoutables ennemis.
S'ils parlent de mystérieux com
plots, de conspirations ourdies dans
les cellules, ils ne sont pas assez
niais pour y croire. Mais les moi
nes, par leurs paroles et leurs
exemples, prêchent des vertus, un
détachement des biens du monde,
une indépendance, un courage con
tre les persécutions, qui rendent
difficiles le succès de certains pro
jets. Comment séduire des hommes
qui n'ont pas de passions, acheter
des hommes qui n'ont pas de be
soins, intimider des hommes qui
méprisent la vie? Sans doute, les
quelques religieux enfermés dans
les monastères, ignorant ce qui se
passe à quelques mètres de leur
clôture, ne sont pas bien redouta
bles. Mais tant que les monastères
existeront, tant que des jeunes gens
iront y chercher des legona, fleu
riront ces vertus importunes qui
déplaisent- Et rien ne permet de
croire que les monastères doivent
êtré abandonnés.
Aujourd'hui'les moines ne ren
dent pas les mêmes services qu'au
trefois; ils rendent encore des ser
vices et qui ne sont pas moins im
portants.
. Si les monastères n'existaient pas
où iraient se réfugier ces âmes dé
licates que le monde a blessées?
Ils sont encore nombreux parmi
nous cqux que le plaisir dégoûte,
que la science ne satisfait pas, que
l'ambition laisse indifférente? Ils
sont nombreux parce' que la civili
sation qui rend ie vice plus insa
tiable rend aussi plus exigeante la
vertu : quand les voluptueux de
viennent plus raffinés, les âmes éle
vées deviennent plus exquises. Dans
ie silence des monastères, dans l'ou
bli des intérêts matériels, dans la
méditation des pensées éternelles,
en présence de Dieu, les intelli
gences ont des lumières, les cœurs
des effusions, les âmes tout entiè
res des joies que les profanes ne
sauraient comprendre. Une société.
oui donne toute liberté au vice ne
doit pas imposer d'entraves à la
vertu ; les nobles sentiments ont
autant d© droits que les satisfac
tions bestiales.
Mais les moines ne sont pas ces
pieux égoïstes qui laissent si facile-
laent le monde se perdre pourvu
que leur âme soit sauvé, ou ces
doux fainéants qui se contentent do
peu pour n'avoir rien à faire, que
l'on nous représente.
Nous ne parlons ni de ceux qui
prêchent ni. de ceux qui enseignent :
on connaît l'emploi de leur vie.
Quel est l'ouvrier qui consentirait
à échanger sa vie contre celle du.
moine? Au couvent le sommeil est
court et interrompu, les heures de
prière sont longues et plus longues
encore les heures -de travail. Qu'il
déchiffre des manuscrits, laboure
les champs, culiive les vignes, ou
s'occupe à l'atelier, le moine ne se
contente pas d'une journée de huit
heures : son travail est aussi péni
ble que celui de l'ouvrier et il est
moins lucratif. Il faut suer, faire
refleurir les jardins ou reverdir les
prés, remplir les celliers et les ca
ves, son costume ne sera ni plus
commode ni plus beau, sa table ne
sera pas mieux servie, son travail
n8 sera ni moins pénible ni plus
court, sa couche ne sera pas plus
molle et l'heure du repos ne son*
nerà pas plus tôt pour lui. Le blé
qu'il a fait mûrir va nourrir les
mendiants, peut-être des lépreux,
qui viennent frapper à la porte du
monastère et manger le pain du
moine en demandant son expulsion ;
l'argent qu'il a gagné va élever des
écoles, bâtir de* églises, soulager
des infortunes, aider l'industrie et
contribuer à la prospérité publi
que.
Ils travaillent, ces moines, sans
murmurer, sans préparer des grè-
' à'î
ves, sans demander.d'augmentation
de salaire, sans maudire le patron
et accuser la société.
On parle souvent de socialisme :
le socialisme vrai, le seul réalisa
ble, existe dans les couvents. Tout
est commun; la communauté seule
posséda et distribue à chacun ce
qui lui est nécessaire ; les individus
n'ont rien. Mais les rêveurs de
vraient savoir à quelles conditions le
socialisme s'y établit. Il n'y a ici ni
égoïsme, ni intempérance, ni con
voitise, ni paresse ; les besoins ont
été réduits au strict nécessaire, les
exigences sont inconnues; aucune
ambition, aucun désir de comman
der ou de dominer; la seule passion
est de servir Dieu, la seule ambition
de faire le bien. Faites_régner dans
le monde une vertu pareille et vous
pourrez introduire le socialisme.
Tant que domineront les vices or
dinaires, vous-ne réussirez pas.
Mais v@us commencez par " dé
truire, par décourager la vertu, et
vous parlez d'appliquer vos chi
mères I Constructeurs insensés,
vous enlevez toutes les fondations,
et prétendez élever un lourd et dif
ficile édifice.
Les moines donnent au monde
l'exemple de la vertu. Il ne suffit
pas de prêcher la vertu, il faut
montrer qu'elle est possible, qu'elle
existe et que sa pratique ne rend
pas plus malheureux. Qu'ils ou
vrent la porte d'un monastère, le
voluptueux verra comment on pra
tique la chasteté, l'égoïste com
ment on pratique 1© renoncement,
l'impie comment ©n adore Dieu,
puis comment on s'élève au-dessus
des faiblesses humaines. Le reli
gieux est une dos meilleures preu-,
ves de l'existence de Dieu, de sa
bonté et de la puissance de sa
grâce.
Il est aussi, parses prières et par
ses vertus qui désarment les co
lères divines, le meilleur gardien
de la patrie.
Parmi tant d© fautes que notre
siècle a commises, la plus grossière,
c'est cette persécution religieuse
qui irrite le eiel et nous prive de
nos défenseurs naturels. Un peuple
ne gagne jamais à mettre Dieu
parmi ses ennemis. La plus habile
politique serait d'avoir toujours
Dieu pour soi ; elle ne pourrait
avoir aucun inconvénient et don
nerait d'inappréciables avantages.
A. B essières.
"BULLETIN
Une élection sénatoriale a lieu autour-
d'huidans le dépar tement de là. Drôme,
en remplacement de M. Laurens, radi
cal, décédé.
Ii n'y a qu'un seul candidat, M. Louis
Blanc, député radical de l'arrondisse
ment de Die,
Les « Jaunes » ont tenu hier, au nom-
bre de deux rnilh, une importante réu
nion. M. Lanoir a déclaré, en leur nom,
que les « Jaunes au lieu de se syndi
quer contre les patrons avec les révolu
tionnaires, entendaient s'unir avec les
patrons contre « les professionnels du
désordres.
La grève de Marseille est station-
na ire.
A Trieste, une nouvelle bagarre a mis
aux prises la troupe et les manifes
tants; dans la foule, on a relevé trois
morts et quatre blessés. De graves pré
cautions militants oni été prises et il
est question de proclamer la loi mar-
tiale. On annonce toutefois que le c&lme
va se rétablir ; car le ttibvnal arbitral a
reconnu le bien-fondé des revendica
tions des chauffeur s.et cette décision a
produit le meilleur effet sur la popula
tion.
Une dépêche de La Haye annonce que
la députation boer a quittéScheveningue
et qu'elle va piobablement se rendre en
Amérique.
La régente d'Espagne doit signer de
main le nouveau traité avec les Etats-
Unis. Le nouvel ambassadeur auprès
du Vatican, M.Aguera, va rejoindre son
poste : en attendant, il a de longs entre•
tiens avec le ministre des affaires étran
gères.
M. Stourdza, président .du conseil de
Roumanie., faisant l'éloge de son admi
nistration financière , a déclài'é hisr au
cours de la discussion du budgai, qu'il
avait pratiqué 25 millions d'économie.
Le prince Henri de Prusse a quitté
VAllemagne hier, à trois heures, à bord
duKronprdnz-Wilhclm,[pour son voyage
aux Etats-Unis.
UN AViS
La Semaine religieuse du diocèse
de Nancy , dans son numéro du
15 février publié le 14, a donné la
lettre de Mgr Turinaz à M. Eugène
Veuillot Nous ne doutons pas que
la . même Semaine ne donne dans
son prochain numéro la réponse de
M. Eugène Veuillot à Mgr Turinaz.
Ainsi l'exigent, selon les expres
sions mêmes de Mgr de Nancy, la
loyauté et la loi.
Aïï JOUE LE JOïïE
De M. Léon Bigot dans le Vol«
faire :
« Décidément, j l en>reviens à ma ma
rotte;.nous sommes plus que jamais des
Romains de la décadence! Il n'y a plus
qu'un pas à faire pour tomber tout à
fait dans la déliquescence morale et so
ciale. »
Et nous qui pensions que la Révolu
tion, les Droits de l'homme, la libre-
pensée, l'émancipation de l'esprit mo
derne, le recul du cléricalisme et tout le
tremblement avaient magnifiquement
lancé l'humanité dans les radieuses voies
du progrès!
- #
_ * •
Le géant Constantin à qui l'on vient de
faire subir, à l'hôpital de Oharleville,
1 amputation du feras droit, mesurait
2 m. 53 de hauteur.
Constantin détient-il le a record » dé
la igiiie ? — Non, s'il faut en croire le
Courrier, des.Etats-Unis..
D'après ce journal, il exista deux jeu
nes geïiB, un garçon et une fille, qui dé
passent cette- taille gigantesque.
Le jeune homme, Ekhvard Beaupré,
de Montana, a 21 ans ; il mesure 8 pieda
du haut, c'est-à-dire 2 mètres 59, et pèse
367 livres ; la jeune fille, Ella Murray,
du Missouri, a 8 pieds et 1 pouce de hau
teur et pèse un peu plus de 400 li
vres!...-
Ce couple de géants va, ajoute-t-oa,
convoler en justes noces. Depuis quel
ques années, ie père d Ella Murray cher
chait en vain un mari pour sa fille ; il
offrait comme dot une jolie maison et
une somme rondelette, mais la taille et
ie poids de la fiancée mettaient en fuite
les prétendus.
Le père mit des annonces dans les
journaux ; l'une d'elles est tombée sous
icâ yeux de personnes qui connaissaient
Beaupré ; ils mirent ceîui-ci au courant
de l'affaire et le décidèrent à se proposer
comras époux de la jeune géante. Le
mariage sera célébré prochainement.
Voilà des concurrents sérieux pour le
legs de Pierrecourt? .si toutefois, l'hia
toire est sérieuse elle*même.
La tortue est paresseuse de corps,
mais cela ne nuit en rien, paraît-il, à
ses facultés intellectuelles.
Voici l'expérience que fit, pour s'en
rendre compte, le processeur Yeikes.
Il enferma une tortue dans une caisse
qu'il avait, à l'aide de cloisons, trans
formée en labyrinthe. Ces oloisons for
maient des chambres successives, et
dont les pertes avaient été à dessein dis
posées sans symétrie. L'agencement
était tel que, pour aller de la première
chambre de gauche à la dernière cham
bre de droits, qui était sa chambre à
coucher, la tortue devait parcourir un
chemin qui avait la forme d'un "VV. Les
premiers essais furent laborieux : la
bête erra en tous sens, dans un domaine
si restreint, pendant 35 minutes, avant
d'arriver au but. A la seconde épreuve,
elle fit le voyage en 15 minutes ; à la
troisième, en 5 minutes; à la quatrième,
en 3 m. 3(4, et en ce se trompant qu'une
fois de chemin. Dès lors, elle n'eut plus
que des hésitations, qui disparurent
bientôt. Le vingtième voyage dura 3 m.
45 s. ; le trentième, 3 m. 40 s. ; le cin
quantième, 3 m. 30 : b . On compliqua
alors le labyrinthe eh l'agrémentant de
culs-de-sac. La tortue donna d'abord
droit dans le piège et fut une heure à
tâtonner. Mais, à la dixième épreuve,
elle arriva en seize minutes, puis en 4 et
hiême en 3. Ces 3 minutes paraissent
éire le temps minimum qu'elle puisse
mettre à atteindre le but.
La tortue ne perd donc pas de temps.
La Fontaine l'avait déjà dit dans une
fable, mais il est intéressant de voir le
témoignage de la poésie confirmé par
celui de la science.
Le jeune La Moulardière va chercher
le médecin pour son père qui est ma
lade.
— Diable, fait le docteur, aprè3 avoir
pris la température de es dernier, il a
une fièvre de cheval.
— Impossible qu'il ait attrapé cela, dit
le fiis.
— Comment? fait le médecin interlo
qué.
— Parce que nous ne sortons plus
qu'en automobile !
AU VATICAN
Nous lisons dans le Bulletin reli
gieux du diocèse de Rouen :
A un prêtre du diocèse de Rouen qui
l'a vu ces jours derniers, et à qui il di-
Bait : a J'aimais tant la France ! s et qui
ss permit d'ajouter : « Mais, Trè3 Saint-
Père, vous l'aimerez encore la France,
car il n'y a pas de peuple au monde où ,
évêques, prêtres et fidèles, vous soient
aussi attachés », là Pape, lui serrant les
mains, et avec cet accent qui lui est pro
pre et les yeux dans les yeux, lui répli-
qya J*»' Oui, mon fils, je l'aimerai,* la
France, jusqu'à mon dernier soupir... »
Çà et là
SAINT-LAZARE
Les jours de Saint-Lazare sont comp
tés. L'hygiène réclame la démolition de
cette prisoa défectueuse dont le sombre
extérieur rappelle les geôles des temps
pasBéB.
Avant que ces vieilles pierres grises,
témoins des «grandeurs d'un régime et
des bienfaits d'un saint, ne soient dis
jointes, évoquons les souvenirs qui b 'at-
tachentà elles.
Au livre VI de son Histoire. Grégoire
de Tours en parle déjà, comme d'une
abbaye ancienne dirigée par uu saint.
C'est là que se trouvait le fameux lo
gis, où les anciens rois s'arrêtaient avant
âe faire leur entrée à Paris, pour rece
voir le serment des autorités munici
pales de leur bonne ville, et où ils reve-
naier.t 'après leur mort, pour séjourner
vingt-quatre heures avant d'être portés
à Saint-Denis. '
Au retour des croiaades,la lè-pre deve
nant plus fréquente, Saint-Lazare, qui
était devenu une église dédiée à saint
Laurent, fut transformé en un refuge
destiné aux malheureux atteints de l'hor
rible fléau.
Sanctuaire do prières, logis du roi,
asile de souffrances, Saint-Lazare sem
blait prédestiné à devenir 1a demeure du
liéroa de la charité moderne : Vincent de
Paul.
A l'époque où le saint habitait encore
le collège des Bons-Enfants, c'est-à-dire
vers 1632, Saint-Lazare n'était plus une
léproserie, mais le bénéfice de messiré
Adrien La Bon, chanoine régulier de
Saint-Victor,qui y vivait en compagnie
de quelques religieux dont il était fort
mécontent. Ayant entendu parler de
bons prêtres, qui s'adonnaient à faire des
missions sous la conduite de M. Vincent,
il eut l'idée de leur donner asile, afin de
participer aux grands fruits qu'ils fai
saient dans l'Eglise. A la surprise du
brave prieur, M. Vincent refuea tout net
sa gracieuse proposition. Modeste pour
lui et ses disciples, il aimait l'exiguïté de
son pauvre logis,et trouvait Saint-Lazare
trop yaste et trop beau. A force d'instan
ces,on vint[cependant à bout de l'humble
mais opiniâtre résistance du saint, et le
8 janvier 1632, il B'y installa au conten
tement de toute la maieon. I! faut noter
que ce n'était point le donateur qui posait
les conditions mais la bénéficiaire. Ainsi,
messire Le Bon demandait à ce que ses
chanoines fissent dortoir commun avec
les religieux de M. Vincent; Celui-ci ne
voulut pas entendre raison,alléguant que
« les Pères de la Mission devaient éire
comme des Chartreux en leur maison et
comme des apôtres au dehors ». Si la ré
ponse n'était pas flatteuse pour les cha
noines, elle était sage.
Maître ie Saint-Lazare où il ne vou
lait point venir, saint Vincent de Paul
transforme l'édifice antique et le rajeu
nit par ses initiatives.
Ces murs qui demain seront abattus,
virent les fameux exercices d'ordination,
les premières conférences ecclésiastiques
ét les retraites spirituelles, exercices
destinés à préparer et à soutenir le prê
tre, à une époque où, l'omnipotence du
pouvoir et le relâchement des mœurs
étaient des dangers bien aussi grands
pour le sacerdoce catholique, que ceux
d'aujourd'hui.
Après une vie employée à répondre à
l'attente de son temps et de son pays,
saint Vincent de Paul mourut dans eoq
quartier général.
Lé centre de cette activité bienfai
sante qui fixe l'attention de tous ceux
dont les yeux sont ouverts aux dons de la
Providence, né semble pas en avoir im
posé à la foule révolutionnaire. Le
13 juillet 1789 une bande furieuse,incons
cients peut-être, en tout cas avide; bou
leversa ht maison de la charité, pour y
chercher des armes qui n'y étaient pas,
et prendre des vivres destinés aux pau
vres.
Après l'avoir saccagé, la Révolution
fit de Saint-Lazare une prison, qui vit la
captivité d'André Chénier et de bien
d'autres. DepuiB, Saint-Lazare est une
maison de détention et, si pour quelques
jours encore il le reste, il est bon de dire
que, de son temps, M. Vincent y gardait
déjà de jeunes débauche'3, sur le désir de
leurs parents et avec l'assentiment des
pouvoirs publies.
L'édifice condamné à mort, est donc
depuis longtemps le témoin des colères,
des désespoirs et aussi des amendements,
de ceux que la société retranche de son
eeinr- / .■■■■■■,
II. semble que la Providence lui ait as
signé,xin rôle Bpécial daaa les choses de
la piété, de la charité et de la jus
tice.
Disparu, les page3 de notre histoire
qu'il marquait comme d'un signet de
pierre, continueront cependant à fixer
notre attention.
Et si nous devions les oublier toutes,
il en est une qui, voltigeant toujours
parmi nous comme une colombe aux lar
ges ailes, nous forcerait au souvenir :
C'est la cornette blanche de la Sœur de
Saint Vincent de Paul.
> Ernest B iixiet.
RÉFLEXIONS
GE S. EXC. r LOREHZELLI
NoiîCQ apostolique; "
Le mardi, 4 février, fut, pour le
clergé de Soissons,un jour ae fête.
Acceptant l'invitation de Mgr De-
ramecourt, S. Exc. Mgr Lorenzeîli,
nonce apostolique, accompagné de
Mgr Ranuzzi, conseiller de la
nonciature, était venu passer quel
ques heures en cette ville.
Au cours d'une visite à la cathé
drale où le nonce admira particuliè
rement, dans l'harmonieux et su
perbe édifice, un chemin de croix
artistique à émaux cloisonnés, dont
M. l'archiprêtre Landais vientde do-
délicatement le représentant du
Pape, au nom de tous lès chanoi
nes et du clergé de la ville, assem
blés ; puis il termina son discours,
en remettant à Mgr Lorenzeîli,
pour le denier de Saint-Pierre, une
généreuse offrande personnelle.
L'après-midi, les élèves des deux
séminaires et une soixantaine de
prêtres étaient réunis pour une
séance solennelle que Mgr Dera-
"mecourt ouvrit par une* éloquente
allocution, qui se poursuivit par
des travaux poétiques, littéraires
et philosophiques, interrompus
par des chants, et qui fut couronnée
enfin par une joute théologique
des plus intéressantes, à laquelle
Mgr Lorenzeîli daigna prendre
part, en admirant la force et là
sûreté des études du grand sémi
naire de Soissons.
Puis, Son Excellence improvisa
une causerie pleine de lumière et
de saveur; où la simplicité du lan
gage était relevée par la force et la
profondeur des enseignements.
Un des auditeurs de ce3 ré
flexions, qui avait pris soin de les
noter au vol, a bien voulu nous en
adresser le texte. Nos lecteurs se
ront heureux de les lire.
Monseigneur,
Messieurs,
Mes chers séminaristes,
La joie que j'ai éprouvée pendant ces
trois heures, qui se sont passées si vite,
est bien profonde et je ne trouve pas les
mots suffisants pour la rendre telle
qu'elle est dans mon âme. En effet, dans
le cours de cette séance nous a été pré
senté le portrait sublima de^Léoa XIII
en vers saphiques qui étaient un hom
mage bien digne de ce Pape latiniste, ex
primé en si beau latin ; nous avons en*
tendu un aperçu des enseignements de
Léon XIII dans toutes les Branches du
savoir intelleotuel. Moi en particulier
j'ai goûté Us bjaux travaux, et latins et
français, qu'on nous a lus dans cette
séance, et j'ai remarqué comment vous,
chers séminaristes, êtes bien dirigés par
vos professeurs dans la bonne voie des
études littéraires, philosophiques, théo-
logiqueB, bibliques et sociales, confor
mément aux Encycliques du Vicaire de
Jésus-Christ.
C'est pourquoi j'ai hâte de féliciter
d'abord Votre Grandeur, Mgr l'évêque
de Soissons, de Laon et de Saint Quen
tin, de vou3 féliciter de tout mon cœur
de cet esprit et de cette ardeur pour les
études telles que le Saint Père les de
mande et telles que l'exigent les besoins
de notre temps.
Votre Grandeur, je le vois, je le cons
tate avec un grand plaisir, donne une
impulsion toujours plus forte à toutes
les plue nobles initiatives intellectuel
les, morales, pastorales et sociales qui
peuvent amener la régénération de ce
diocèse, de oette réunion des trois dio
cèses, qui ont été jadis le cœur de
la France : chrétienne. (Applaudisse
ments.)
Permettez-moi dono de vous remer
cier, Monseigneur, de la bonté que vous
avez eue de m'inwter pour me faire par
tager la joie ei pure de constater le bon
esprit dans les étude3 et dans la vie de
votre clergé. Votre Grandeur a parlé,
dans un langage qu'elle me permettra
d'envier beaucoup, de cette procession
qui avait lieu au temple et qui symbo
lisait déjà la marche de l'humanité vers
le Fils de Dieu en la personne des fils
d'Israël prosternés devant. Lui, roi des
Rois, Seigneur àa tous les Seigneurs.
(Applaudissements.)
Le diocèse de Soissons s'est trouvé,
comme ie disait Votre Grandeur, tau-
jours dans cette procession autour de
Jésus-Christ représenté par son Vicaire,
et ce m'est une joie tout à fait particu
lière de constater que ces nobles et
chrétiennes traditions vont reprendre
sous vos auspices et grâce à votre zèle
très éclairé un nouvel essor et une nou
velle vitalité. (Applaudissements.)
Et puisque j'ai le bonheur de me trou
ver sur un terrain où règne l'esprit de foi,
où fleurit le bon esprit ecclésiastique, où
se cultive l'idéal catholique dans les
études, où s'exerce le zèle chrétien dans
toute la vie, je me permets de féliciter
ce diocèse comms étant à l'abri, en vertu
de ces qualités, des dangers de notre
époque, des dangers qui menacent la
sainte Eglise dans son unité, dans sa
sainteté, dans sa catholicité, dans son
a postolicité.
Vous me demanderez quels sont ces
dangers qui menacent 1a sainte Egli
se, eh bien! jevoudrais avoir le temps
de vous les exposer ; mais vous me per
mettrez de vous dire*que si tout danger
d'ordre religieux est de nature à por
ter atteinte à l'unité de l'Eglise, il y en a
un tout particulier : c'est la triste condi
tion politique du Saint-Siège. Il y en a
un contre la sainteté de l'Eglise, et c'est
une tendance qui cherche à ee glisser
dans plusieurs endroits du monde, ten
dance que j'appellerai naturalistique
et qui vise à dénaturer le véritable esprit
du clergé ; il y en a un contre la catholi
cité de l'Eglise, et il consiste dana la
passion et l'orgueil de race et de natio*
nalité, qui prononceraient comme déjà
définitive la déchéance catholique de
telle pu telle..race,.et attribueraient à
telie ou telle autre la supériorité exclu
sive en ce qui concerne lés destinées du
catholicisme; il y en a un erifm contre
l'apostolicité, et il consiste dans une ma
nière toute humaine de considérer la
mission et la hiérarchie de l'Eglise.
•
• •
C'est un événement bien triste que
cette révolution italienne, aidée par tou
tes ies forces maçonniques du monde
contre le Saint-Siège, puisque le Saint-
Siège, centre de l'usité, principe conser
vateur de l'unité, ne peut remplir ce
rôle qu'en jouissant d'une pleine et in
contestable indépendance.
■Pourquoi en effet faut-il que le Papa
jouisse de son indépendance pour pouvoir
conserver l'unité dans tout le monde et
recevoir l'obéissance des catholiques du
globe ? C'est parce que le jour où le Pape
serait ou paraîtrait devenu un sujet,
Bimple ou privilégié, ou d'un roi ou d'un
empereur, de n'importe quel chef d'É
tat, les catholiques, notamment des au
tres pays, pourraient trouver dans cette
apparence seule, un prétexte à la rébel«
lion et par conséquent à la séparation. Et
c'est bien là le but maçonnique de la
révolution italienne ! Son but est de pré
parer cette séparation que saint Paul
nous prédit comme le signe avant^cou-
reur de l'Antichrist, discessio : l'unité
italienne actuelle, à la base de la spolia-
tioï\.du Pape, n'a pour but dans les es
prits Bectaires que de briser l'unité ca
tholique.
Comment, dit-on, le Pape a*t-il besoin
d'être indépendant et d'avoir sa souve
raineté territoriale ? Le Christ et leB pre
miers Papes ne l'ont pas eue, les Papes
du IV e siècle et ceux qui se succédèrent
jusqu'à la fin du VII e siècle ne l'ont pas
demandée.
Je vais vous montrer en quelques
mots comment le Christ n'en eut pas
besoin, 1 comment n'en avaient pas be
soin non plus les Papes du IV* siècle
au VII*, comment, par contre, en ont eu
besoin, depuis le VIII* Biècle, les Papes
jusqu'à nous et comment ils en auront -
besoin à l'avenir.
La mission du Christ et celle du Pape,
identiques quant au but dernier, le salut
des âmes, diffèrent quant à la manière
de l'atteindre. Le Christ devait remplir
sa mission en prêchant au peuple juif
Non sum missus, nisi ad oves quse pe~
riarunt domus Israël. Il lui suffisait donc
de pouvoir prêcher, de même qu'il n'a
vait pas besoiu de faire usage d'autre
langue que celle d'Israël ; mais les apô
tres, dont le prince est saint Pierre,
ont reçu la mission de prêcher non pas
à une nation privilégiée, mais à tous lea
peuples de la terre, ils gardent le man
dat de rendre témoignage à Jésus-Christ
non seulement dans la Judée et la Sa
rdane, mais jusqu'aux derniers confina
de la terre et doivent faire usage de tou
tes les langues. Voilà la première diïïé"
rencedeo deux missions : celle du Christ
avait une extension restreinte, elle était
nationale; celle des apôtres estdestinéeà
l'humanité tout entière, elle est univer
selle.
Mais le Christ devait encore renoncer
à toute principauté terrestre afin dé
remplir sa mission telle que le Père là
lui avait proposée et qu'il l'avait acceptée
librement ; il devait achever sa_ mission
en s'ofîrant lui même sur la croix d'une
façon très libre. Voilà pourquoi il a dû
renoncer à toute royauté 6ur les anges,
n'en demandant pas au Père les légions,à
Gethsemani, sans quoi la PaseioiTne se
rait pas arrivée. Voilà pourquoi il a dû
renoncer aussi à l'exercice de la royauté
divine et humaine sur les hommes de
son pays, à ses droits de Fils de David;
car s'il avait permis l'organisation d'un
royaume politique d'Israël, comme les
multitudes rassasiées un jour voulaient
le faire, que serait-il arrivé le jour où les
Juifs voulaient le tuer? Il l'a dit lui-même
à Piiate : Si mon royaume était de ce mon
de, si en fait comme en droit il était or
ganisé, mes ministres, mes soldats, mes
officiers lutteraient pour me sauver. Si
exhee mundo esset regnum meum, mi»
nistrimei utique decertarent netraderer
judœis. Joan XVIII, 36. Et de cette
lutte que serait-il arrivé ? Ou le Christ
avec Bes armées aurait gagné la bataille,
et sa mort n'aurait pas ou lieu, et par
suite cette rédemption copieuse prédite
jar .le prophète ne serait paB arrivée; ou
e Christ aurait été battu, et on n'aurait
pu dire alors avec Isaïe: Oblatus est
quia tpse voluit, mais on aurait pu blas
phémer avec les princes des Juifs qui
sur le Calvaire disaient : Il sauva les
les autres, il n'a pu sauver lui-même.
Aizos salvos fecit, seipsum non potest
salvum facere, Math., XXVII, 42. Pour
rendre donc incontestable la liberté de
sa Passion et de sa mort, il devait re
noncer au royaume politique.
: »
Libre devait être le saerifice du Christ,
et libre doit être l'application des fruits
de ce sacrifice à tous les peuples de la
terre. Cette seconde liberté est néces
saire au Pape, chef de l'Eglise, à qui le
Christ a confié le ministère de cette ap
plication. Or, une telle liberté, par suite
des conditions politiques du monde, di
visé en différents Etats, ne devient in
contestable que par la jouissance .d'une
souveraineté territoriale.
Il ne pouvait pas en être question pen
dant les trois premiers siècles, où le
monde était encore païen et où le Fape
ne lui paraissait que le ma gister no vue
superstitionis.
Et même lorsquè Constantin et le
monde civilisé le reconnurent comme
Vicaire du Christ, Roi des rois et Sei
gneur des seigneurs, fut-il nécessaire
tout de suite su.Pape de posséder un
mouvoir politique territorialement dé-
lui ?
Non, aussi longtemps que dans le
monde subsista cette unité politique,
qui était concrétisée dans l 'exiBtence du
premier empire romain ; ausBi longtemps
dono que dans les Gaules,dans l'Espagne,
dans la Germanie et dans tout le monde
civilisé,tout homme était encore, suivant
'e vieil adage, citadin de la même cité
Civis romanus sum, il n'y eut pas besoin
que le Pape jouit d'un pouvoir politique.
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