Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-12-21
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 21 décembre 1901 21 décembre 1901
Description : 1901/12/21 (Numéro 12349). 1901/12/21 (Numéro 12349).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Samedi 21 Dêcemèré
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Edition quotidienn* — 12,349
' wjtWOT LEGAÎ
'*§L,
Samedi 21 Décèmhre 1901
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1001/
— f-
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postale)
Ua ao .. 25 » 36 »
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ET
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LE MONDE
L'UNIVERS rie répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et G'», 6, place da la Bourse
m
PARIS, 20 DÉCEMBRE 1901 .
SOMMAIRE
La grande émula
tion.....
Çà *tlà : Un tréso
rier original
Correspondance ro-
J22&1I1# • i « • •
A la Chambre.....
Au Sénat... .»
..." Eugène Tavernies.
Edouard Alexandre
J. Mantenay.
J. estérac.
Bulletin. — Nouvelles de Rome. —No
tre appel. — Au joar le jour. — Le»
; congrégations. — Réponse de Mgr' Du-
bourg. — Iniormationtr politiques et
parlementaires. — A l'Hôtel de Ville. —
Chronique électorale. — M. l'abbé Blam-
pied. — La guerre du Transvaal. —
Etranger. — A travers la presse. — La
question ouvrière. Les anarchistes.
— Lettre», sciasces et arts. — A l'Ins
titut catholique. — Echos ds partout.
— Chronique religieuse. — L'œuvre de
Jeanne d'Arc. — Nécrologie. — En
province. — Guerre et marine. — Les
chants de Noël. — Œuvre de l'hospitalité
de nuit. — Les congrès eucharistiques.
' —Eglise du Sacré-Cœur. — Mouvement
judiciaire. — L'affaire Brierre. — iSou-
veiits diverses. — Uaiendrier. —, Ta-
, bleau et bulletin de la,Bourse. — Der
nière heure.
LA GRANDE ÉMULATION
Quelle est la liberté que l'on pour
rait bien encore supprimer?—Ainsi
beaucoup de législateurs et d'admi
nistrateurs s'interrogent du matin
au soir, le cœur en émoi, l'esprit
tendu, possédés d'une fièvre dont
ils entretiennent l'ardeur; Ce sont
les « libéraux », les vrais et même
et surtout les seuls ; car ils ont dé
couvert que la liberté a pour carac
tère fondamental d'être un mono
pole. Elle n'existe et elle ne pros
père que lorsqu'elle est confisquée,
bien entendu en certaines mains,
qui sont justement les leurs.
La loi Waldeck frappe les collè
ges comme les couvents ; et, sous
prétexte de réglementer les asso
ciations on s'est procuré le moyen
d'attaquer l'enseignement libre. N'y
a -t-il pas mieux à faire ? — Mais
certainement, répondent en choeur
des hommes pubiios zélés, parmi
lesquels se distingue M. Béraud.
M. Béraud, c'est un sénateur de
Vaucluse, un ancien député et lin
médecin.
Voilà tout ce que nous pouvons
savoir sur lui ; et il n'a pas besoin
de posséder plus d'illustration, ni
plus d'importance, ni plus de com
pétence pour se trouver soudain
muni d'un rôle de premier choix. ^
La loi d'enseignement présentée
à la Chambre avant la loi sur les
associations était destinée à com
battre les collèges libres, mais elle
a rencontré des obstacles et elle a
traîné. Aussi a-t-on pris l'affaire
par un autre bout; Puisque les col
lèges ne pouvaient pas etre fermés
tout de suite, on allait du moins en
expulser les professeurs congréga-
nistes; Commencée sans retard, la
belle besogne va se continuer, d'une
façon indirecte.
— Que la Chambre agisse indi
rectement tant qu'elle voudra, s'est
dit l'éminent et inconnu Béraud.
Moi, je vais droit au but. — Et le
dit sénateur a demandé en termes
propres, bien que cyniques, l'abro
gation de la loi Falloux et la sup
pression complète * de la liberté
d'enseignement. Il ne s'agit que de
biffer un texte. Biffons! répondent
douze sénateurs, qui sont aussitôt
élus commissaires; Ne doutez pas
nue M. Pochon ne fasse partie de
la cohorte d'honneur : c'est lui qui,
avant d'entrer dans les assemblées
délibérantes, conçut l'idée et rédi
gea la formule sur lesquelles le Sé
nat travaille maintenant.Tout en re
fusant de croire à la liberté, M. Po-
chOn devra croire à la justice, qui
ee manifeste en sa personne. D'au
tres commissaires refusent de bif
fer ; mais ils ne sont que six contre
jà$uze; et la majorité du Sénat
éprouve un si grand désir de se
montrer plus avancée que la Cham
bre que la proposition Béraud a
chance d'être votée avec d§s trans
ports d'enthousiasme furieux..
Quelle est la liberté que l'on
Eourrait bien encore supprimer ? —
,a même émulation s'est établie
entre M- Waldeck-Rousseau et son
subordonné M. Dumay, directeur
général des cultes.
Ce n'est pas assez, pour le prési
dent du conseil, de disposer à la
Chambre de deux majorités, l'une
féroce, l'autre modérée, dont il se
«ert suivant les circonstances. Il a
encore trente-six langages ; et
quand il est visité par l'ennui, par
Ja fatigue, par la mauvaise humeur,
jl trouve dans la fumisterie un pré
cieux délassement. Avant le débat
sur les associations, il distribuait
aux modérés des paroles absolu
ment rassurantes. Il affirmait que
la loi serait appliquée avec une telle
douceur que, de sectaire, elle en
deviendrait toute libérale. Il insi
nuait que toutes les associations
seraient autorisées et que la liberté
religieuse jouirait de plus de garan
tie? qu'ayjc meilleures épojjuç» da
la monarchie chrétiénne. Mainte
nant, le président du-conseil, qui
dispose, enfin de sa chère loi, paraît
avoir envie de ne pa,s tolérer une
eienante.
des
associations pour menacer et pour
atteindre l'enseignement, il est
bien capable de dire ensuite que
l'enseignement et l'association re
présentent deux choses très /dis
tinctes et qu'on ne doit pas autori
ser des congrégations qui profite
raient de cet avantage en conti
nuant d'enseigner.
M. Dumay a encore plus d'exi
gences. Il veut soumettre à l'auto
risation même les congréganistes
dont le concours est employé par
l'Etat dans les œuvres de charité
ou do philanthropie. Ce directeur
des cultes frémit à la pensée qiie
la situation des pouvoirs publics
pourrait être irrégùiière et illégale.
Ce serait le bouleversement de
toute l'administration.
Or, M. Dumay ne conçoit les cho
ses qu'au point de vue administra
tif. Tant que la liberté, les mœurs,
la politique, la science, la religion
ne sont pas représentées, par des
papiers rangés dans des cartons,
elles lui produisent l'effet du chaos-
Son système philosophique se com
posé d'étiquettes et se réduit à Un
numérotage. Pour lui, le monde
c'est un. immense cartonnier ; et
l'idéal de la beauté artistique c'est
une armoire.
M. Waldeck-Rousseau tourne en
dérision cette manie de vouloir tout
mettre sous clef; tandis que M. Du
may le blâme de n'avoir pas de
l'ordre un souci suffisant. Ils ne
s'aiment pas; ils s'accusent l'un
l'autre ; ils se joueront réciproque
ment quelque bon tour, mais, au
fond, ils sont parfaitement d'ac
cord pour nuire le plus possible à la
liberté.
Que l'orateur se moque de la vul
garité du rond-de-cuir;que le rond-
de-cuir juge avec dédain la phraséo
logie de l'orateur pincé, peu im
porte : la cause de la vérité, du
droit, delà fierté nationale n'y ga
gnera pas grand'chose.
Nous vivons en plein déchaîne
ment de la passion sectaire; Plumi
tifs, rhéteurs, légistes, sont tout
entiers à l'absurde et abominable
pensée de ligotter et d'étouffer la
religion. Ils quêtent des systèmes
et des procédés. Ils les recevraient
avec joie et avec fierté des vaga
bonds et des cambrioleurs, aux
quels la France est désignée com
me une proie. '
Eugène T ayernier. „
NOUVELLES DE EOM1
'BULLETIN
Au Palais - Bourbon comme au
Luxembourg on a décidé d'envoyer une
délégation à l'inauguration, fixée à di
manche prochain, du monument Bau-
din.
La Chambre, avant d'aborder les cha
pitres du budget de l'intérieur,a discuté
l'interpellation Vaillant sur la révoca
tion du maire sans-patrie de Bour
ges.
Le président du conseil a donné lec
ture d'abominables paroles prononcées
par le citoyen Vaillandet et l'ordre du
jour pur et simple, portant approba
tion d'un acte énergique, en cette cir
constance, du gouvernement, a été
adopté à une énorme majorité.
Aujourd'hui , à deux heures et demi e,
discussion des interpellations de M.
Colliard. svr des incidents survenus au
cours des grandes manœuvres du Sud-
Est, vt de M. Paslre sur « les persécu
tions dont sont victimes les instituteurs
laïques ».
Le Sénat, dans la suite du débat sur
l'admission temporaire des blés, a en-
tendu un discours intéressant et docu
menté de M. Couteaux.
D'après une information du Daily
Chronicle, qu'il convient de signaler
sous toutes réserves, le Vatican aurâit
fait appel au gouvernement français
pour obtenir satisfaction de la Turquie,
kl'occasion des récents troubles de Jé
rusalem. ,
Le bruit court dans les milieux offi
ciels russss, en y produisant une vive
émetion, que l'Autriche, avec le consen
tement, voire l'appui de l'Allemagne,
méditerait l'incorporation d'un e partie
de la Bosnie et de l'Herzégovine. à l'em
pire austro-hongrois.
Un incident anglo allemand vient de
se produire en. Australie ; le comman
dant d'un paquebot allemand a été em
prisonné par ordre des autori tés aus
traliennes sur son refus de payer une
amende encourue pour bris de scellés.
Le consul d'Allemagne a protesté.
En Espagne, on recommence à.parler
de crise ministérielle..
Plusieurs députés républicains se
montrent malveillants pour la famille
royale, et le journal El Pais, déjà, saisi
une fois, annonce la suite d'articles
violents contre le Palais.
On mande d'Athènes que le gouver
nement hellénique a décidé de rempla
cer ses chargés d'affaires à Londres, et
à Rome par des ministres plénipoten
tiaires.
L'organe officiel du Venezuela publie
une note assez menaçante pour VAlle r
magne, déclarant que le président Cas
tro est déterminé à ne permettre, en au
cun cas, l'humiliation ou la méconnais
sance des droits de la République sud-
mirictine,
• La « Sclioia cantorum »
du séminaire français.
Rome, 17 décembre.
Le conseil central italien de l'œuvre
de la préservation de la foi a célébré di
manche gafète annuelle à Saint-André
délia Yalle. La messe pontificale a été
célébrée à 10 h. 1(2. Les clercs officiants
étaient les élèves du séminaire de la Pro
pagande. Co,mme les annéeB précédentes
on avait fait , appel à la « Schola canto
rum « du séminaire français ; c'est qu'en
effet la « Schola cantorum » de Santa
Chiara jouit à bon droit de la meilleure
réputation parmi la population romaine
en ce qui concerne l'exécution parfaite
du plain chant grégorien.
Au cercle universitaire catholique 1
Le cercle universitaire catholique a
inauguré dimanche l'année scolaire. Le
matin, S. Em. le cardinal Gennari à cé-
lébr.é à Saint-Marcel au Corso la messe
dé communion générale. Le R. P. Zoc-
chi, aumônier du cercle, a adressé aux
jeunes étudiants qui venaient se presser
nombreux à ia Table sainte, une fervente
allocution sur la nécessité de conserver
intactes leur foi et leur vertu s'ils veu
lent atteindre les sommets du savoir hu
main. ~
Le soir, les étudiants se Bont réunis de
nouveau à leur cercle, à Saint-Charles
au Corso. Le Père Zocchi a donné com
munication d'une dépêche du cardinal
Rampolla transmettant la bénédiction du
Souverain Pontife. M. Persichetti, prési
dent de la Fédération des associations
catholiques romaines, a salué en quel
ques mots vibrants les jeunes frères
d'armes.
Puis un docteur en droit a communi
qué une circulaire de M. l'avocat mila
nais Mauri, président de la fédération
générale des cercles universitaires catho
liques italiens. Cette fédération vient de
se reconstituer. M. Mauri invitait tous
les étudiants à protester contre le projet
de loi sur le divorce. Sans tarder, les
jeunes gens du cercle de Rome ont ex
pédié à M. Zanardelli une dépâche lui
portant leur protestation vibrante < au
nom des meilleures traditions des Uni
versités et des sciences juridiques ita
liennes. »
Le : travail do dimanche au palais
de la reine.
La presse catholique Tait remarquer
avec un étonnement plein de tristesse
que ces derniers dimanches, on n'a pas
cessé de travailler aux façades et sur la
terrasse du palais que ia reine Margue
rite habite depuis un an au quartier Lu-
dovisi, et où elle est rentrée aujourd'hui
même, après une absençe de quatre
mois. « Ce scandale,dit la Voce, eBt d'au
tant plus déplorable que ce mauvais
exemple tombe de plus haut, s
ASSontecHorio.
Les incidents soulevés par le député
Ferri ont eu aujourd'hui un dénouement
plutôt comique. Au début de la séance, le
socialiste Pantano a proposé à ses collè
gues d'accepter comme une explication
suffisante le discours qu'hier soir M. Ferri
adressa aux journalistes restés dans ieur
tribune après que tous les députés
avaient quitté la Chambre; et aussi la
lettre qu'il avait fait publier hier dans
l'Avanti. Cet essai de sauvetage est
resté infructueux. Les députés ont main
tenu la censure avec exclusion pour cinq
jours.
Au moment où le président proclamait
le vote, un grand bruit de vitres cas-
Bées ; la tête ébourriffée et barbue de
M.Ferri apparaît à travers l'une des portes
du fond de l'hémicycle. .
Tableau !
La scène est tellement émotionnante
que dans la tribune de la presse deux
journalistes s'embrassent de joie !
Cependant que M. Ferri crie de sa voix
de stentor : « Un triomphe de plus pour
cette Chambre camorriste ! Vive là ca-
morrade la Chambre! » Aussitôt deux
soldats sont mis de planton à la garde de
la vitre cassée pour empêcher M. Ferri de
passer.
A en juger par les journaux,les der
niers incidents ont fait perdre la tête à
tout le monde. Et on fait remarquer que
tout cela est dû à un seul individu. Soli
dité du parlementarisme italien ! Heu
reusement pourM.Zanardelli/la Chambre
part en vacances samedi prochain,... Bi
elle n'est expédiée plus tôt encore.
Aïï JOUR LE JOUE
Le buste de ce pauvre Verlaine donne
du a tintouin >, si nous osons nous ex- :
primer ainsi, à ceux qui ont entrepris de'
perpétuer la gloire de l'auteur de-Sagesse
et de Parallèlement.
Primo, on n'avait pas récolté beaucoup
d'argent ; secundo, cinq mille francs ont
été gaspillés d'une façon imprévoyante
avant que la pierre du buste eût seule
ment reçu dix coups d'ébauchoir.
Voyant cette détresse, le ministère est
venu au secours du comité. Il a pris dans
notre poche mille francs pour les lui
donner. On a battu le rappel de droite et
de gauche. Bref, le buste sortira vain
queur — nous promet on — des épreuves
qu'il vient de traverser.
Ajoutons que, si ce buste est beau, ce
ne sera plus Verlaine, et que, s'il est
ressemblant, il sera bien laid.
•
: - ... » -•
Nous avons parlé de la chanson Com
père Milleri, qui vient d'être interdite
comme lésant la majesté de M. Mille-
rand.
Çe^ chsww ne chante eyr l'ejrâe
Compère Guilleri , qui fut familier à
oiotrejjB.nfance._-
En voici quelques couplets : . :
4 II était un p'tit homms
. Qui s'app'lait Milleri,
Tubini.
Il devait aux bourgeois
Faire un' guerr' sans merci,
Tubini. - - ,
TU1 Tubini, toto Lorando,
. Compère Milleri,
Te lairas-tu (ter) mouri?
Il s'en fut à la Chambre
Comm' député d'Paris, etc.
Dé tous les ministères, '*
Il devint l'ennemi, etc.
Jusqu'au jour où lui-même
Il fut ministre aussi, etc.
Ce jour-là le p'tit homme
Crut qu'il avait grandi, etc...
L'ex-révolutionnalre
Put baron Milleri, etc.
Les Paquins et les riches
D'honneurs il les comblit, etc.
Ce n'était pas très méchant ; mais les
despotes d'aujourd'hui ne veulent même
pas que le gouvernement de la France
soit, comme sous l'ancien régime, un
pouvoir abBolu tempéré par une chan-
son.
m
* •
M. Roger-Ballu, inspecteur des beaux-
arts, critique le gouvernement.
On le révoque. -
M, Dayot, inspecteur des beaux-arts,
écrivait dernièrement dans une revue
une réhabilitation de la Commune.
Celui-là, on ne le révoque pas.
», ■ '.-V •
Le président Roosévelt se met de mieux
en mieux avec les nègres.
Dernièrement, il recevait l'un d'eux à
sa table.
On annonce aujourd'hui que deux au
tres noirs, MM. Crosslina et Daney, sont
nommés, l'un ministre de la Liberie (?},
l'autre greffier à Washington.
Les Etats du Sud ne lui pardonneront
pas cette nouvelle noirceur.
A propos du prix Nobel, dont on parle
tant depuis quelques jours,, un bienveil
lant chercheur de petites bétes s'est de
mandé si le nom du célèbre inventeur de
la dynamite ne renfermait pas, à lui tout
seul, une prédestination.
< Il suffit d'écrire au rebours le nom de
Nobel pour lire Lebon. Il suffit aussi
d'intervertir l'ordre des deux dernières
lettres pour obtenir Noble.
La noblesse et la bonté, deux qualités
du grand chimiste suédoib qui, en in
ventant l'un des explosifs les plus terri
nes qui aient jamais enrichi les arse-
'naux des peuples modernes, a pensé
travailler efficacement pour la paix !
•
■ ■ • •
Les récents discours de MM, Caillaux
et Leygues sont maintenant affichés par
tout.
On ne les lit pas, car il fait froid, et
puis ils sont longs et ennuyeux. Mais ça
tient de la place.
Ça en tient tellement qu'à certains en
droits, notamment en Vendée, des maires
dont la mairie est très petite ont dû af
ficher le discours de M. Leygues sur ce
lui de M. Caillaux, ce qui fait un pas
grand'chose sur un rien du tout.
Cette débauche d'affichage fait l'affaire
des colleurs, mais non celle des contri
buables.
Rappelons d'ailleurs, une fois de plus,
que ces affichages sont inconstitution
nels, puisque toute dépense doit être ap
prouvée par les deux Chambres. Or, les
affichages ordonnés par la Chambre ne
sont pas soumis à l'approbation du Sé
nat. .
^Le respect.de la constitution,ça se prê
che aux adversaires, mais les amis du
gouvernement n'y sont pas tenus.
« •
Un référendum vient d'avoir lieu à Mi
lan.
La question était de savoir si la com
mune de continuerait à servir au fa
meux théâtre de la Scala une dotation
annuelle de 150.000 francs.
Par 11,000 voix contre 7,000, la popu
lation a répondu non.
Cela scandalise les mélomanes. Pour
quoi ? N'est il pas juste que les dépenses
superflues soient supportées uniquement
par ceux qui en profitent, ou encore par
ceux qui s'y intéressent bénévolement ?
»
• •" •.
Un solliciteur se présente chez M.
Waldeck Rousseau.
—■ Et puis, dit-il après avoir exposéses
titres, je suis le cousin d'un député de
votre majorité.
— De laquelle ? de ma majorité nu
méro 1 ou de ma majorité numéro 2 ?
NOTHS APPEL
Comme on l'a vu déjà,.l'assem
blée des actionnaires, tenue le 28 no
vembre, a voté l'augmentation, de
capital (ou plutôt la reconstitution
de l'ancien capital) que nous ju-
gepns nécessaire pour la transfor
mation du journal et l'extension de
son influence par la baisse de son
prix et diverses améliorations.
Nous disions l'autre jour que plus
des cinq sixièmes des 300,000 francs
demandés étaient souscrits.
Nous pouvons dire aujourd'hui
que les neuf dixièmes de la somme
sont atteints.
La souscription reste ouverte.
Nous insistons auprès de tous
ceux. de nos amis qui sont en me
sure de le faire, pour qu'ils veuil
lent bien souscrire.
L'action est de cent francs.
Çà et là
UN TRESORIER ORIGINAL
J'ai souvent songé au beau livre qu'il
y aurait lieu d'écrire sur ces petites vies
sans éclat extérieur et tout embaumées
du parfum de la vériu. Que d'humbles,
ignorés de tous, cheminent en ce monde
sans autre satisfaction que celle du de
voir accompli ! Pour eux, les académies
n'ont point de lauriers. Les joars se suc
cèdent,- calmes et monotones. Rien ne
produit jamais le moindre Bursaut dans
leur existence mélancolique. Et ils mar
chent toujours, fermes et résignés, sans
porter envie à personne, heureux dans
leur obscurité et ne connaissant, sur
la route parfois si rude du. sacrifice,
aucune lassitude, ni aucun décourage
ment. Ils travaillent pour Dieu : voilà
leur secret ! ^
C'est un de ces humbles chrétiens
exemplaires dont je vais essayer— parce
qu'il est mort depuis longtemps — de
dévoiler ici les charitables industries.
Cœur d'or ; mais bourru et rébarbatif
à l'excès, ronchonnant du matin au soir
contre les autres etj surtout contre
lui-même, le père L... trésorier de
toutes les bonnes œuvres d'une grande
ville de l'Ouest — il y a de cela tantôt;
vingt ans — était à la fois le meilleur et
le plus insupportable des hommes que
j'aie connus.
C'était toute une affaire, le plus ardu
des problèmes,que de l'aborder. Et alors
même que l'on arrivait chez lui avec une
somme rondelette pour ses bonnes œu
vres, on n'était pas sûr, pour cela, d'être
bien reçu. Jamais il n'était absolument
satisfait des dames de charité qui lui re
mettaient le produit des fêtes et des ker
messes organisées au profit des malheu
reux. Il trouvait toujours que l'on avait
payé trop cher les musiciens. Les ca
chets des artistes, les bouquets des chan
teuses, tout cela lui paraissait inutile,
ridicule, abusif. Et il eût voulu que toute
la recette fût pour les pauvres. ^
A son avis, les cercles catholiques dé
pensaient trop ; les tontines ouvrières
n'étaient pas assez soucieuses de leurs
statuts et règlements ; la fabrique de l'é
glise paroissiale ne eontrôlait point com
me il eût fallu les frais d'éclairage et de
luminaire. On gaspillait l'encre et le pa
pier dans les écoles libres. Les récom
penses étaient trop nombreuses ; les dis
tributions de prix coûtaient trop cher.
Etpatati et patata. Bref, d'après le père
L..., tout marchait de travers. Il mau
gréait sans cesse ; son humeur atrabilaire
était toujours en mouvement. Il ne déco
lérait point. Mais, malgré toutes ses ai
gres bourrades et ses perpétuelles cen
sures, au fond, le père L... n'avait au
cun sujet réel de mécontentement. Tou<
tes les œuvres de charité dont il était
trésorier marchaient à merveille. On ou
vrait de nouvelles écoles libres. L'hôpi
tal catholique augmentait chaque année
le nombre de ses lits, etc., etc.
*
Mais — phénomène étrange — six mois
après la mort du père L... toutes les
bounes œuvres qu'il avait administrées
périclitaient. Les recettes ne correspon
daient plus aux dépense?. Chaque bud
get accusait un notable déficit.
Et pourtant la libéralité charitable des
habitants de la ville était toujours la
même. Et ce n'était guère l'amabilité du
père L... qui, vraisemblablement, de
vait attirer l'eau au moulin, puisque, par
sa miBanthropique humeur, il était plutôt
capable, ce trésorier farouche, de rebuter
les gens que de les attirer. .... .
* •
On chercha longtemps, sans y parve
nir, à déchiffrer l'énigme. Mais un jour,
pressé de questions, un des employés qui
avait été chargé de mettre à jour les li
vres du père L... finit par trouver le fa
meux secret de ce dernier pour assurer
le bon fonctionnement des œuvres de
la ville.
Le père L..., Bans en rien jdire à per
sonne, grossissait toutes les petites som
mes que lui fournissait la charité de ses
concitoyens. Lorsque, par exemple, on
lui versait, pour telle ou telle bonne œu
vre, 1 fr. 50 ou 2 fr. 25, il enregistrait :
2 fr. et 2 fr. 50.
Avec lui, toutes les sommes fraction
naires étaient arrondies. Les « 25 cen
times » devenaient des « 50 centimes » ;
les a 50 centimes » se transformaient en
francs, etc., etc.
Et s'il remettait au bienfaiteur ou à la
bienfaitrice un reçu conforme à la sous
cription versée, par_conîre,_ il prenait
l'augmentation de la somme et la diffé
rence à sa charge.
Et c'est ainsi que —r à l'insu de tous —
il donna,de sa poche,pendant plus de dix
ans, de 4 à 5,000 francs chaque année
aux diverses bonnes œuvres qu'il était
chargé de régir.
Jamais pendant ce laps de temps au
cun compliment à son adresse. Aucune
louange pour lui dans tous les rapports
éloquents de MM. les secrétaires des éco
les libres ou des cercles catholiques qui
célébraient à l'envi la prospérité crois
sante de toutes les œuvres...
Sa main droite avait voulu ignorer ce
que faisait sa main gauche.
Seuls, les anges du bon Dieu con
naissaient son arithmétique. Quels excel
lents placements il a dû faire là-haut, cet
étrange trésorier, aussi humble que
bourru, dont tout le monde se plaignait
et que personne ne remplaça jamais,
hélas ! dans la bonne ville de... pourtant
si charitable !
• •
fce père L... fc'efrt point — comme on
pourrait le croire — line fiction, une
création imaginaire et de pure fantaisie.
C'était un négociant qui, bon an, mal
an, se faisait dans les affaires environ
12,000 francs de bénéfice. Il vivait assez
confortablement, mais sans aucun luxe.
Esprit fin, homme au jugement sûr, il ne
s'occupait que de son commerce et d'œu-
vres charitables. Il se privait de tout
plaisir. Et lorsqu'on lui demandait pour
quoi il n'allait pas à l'Opéra, il répondait
qu'il ne comprenait rien à l'art lyrique
et qu'il ne connaissait que « la musique
commerciale ». ;
Le père L... fut un saint sous la peau
d'un... grincheux.
On rapporte qu'un moine du moyen
âge nommé Jacopone affectait par humi
lité de ne comprendre rien, voire même
de se faire passer pour idiot,afin d'échap
per aux éloges que lui auraient valu ses
travaux d'art remarquables et ses émi-
nentes vertus.
Le charitable trésorier dont je viens
de parler fut par sa, modestie et son hu
milité un... frère de Jacopone!
Edouard A lexandre.
CORRESPONDANCE ROMAINE
"
Les finances italiennes.
Equilibre imprévu. — Les sources des bé«
Défiçes. — Economies. — Le n Iotto ». —
Droits sur le blé. — Prévisions trop con
fiantes pour les exercices prochains.
Rome, 15 décembre.
L'équilibre des finances italien
nes est essentiellement dû, on va le
voir, au hasard.
Commençons d'abord par répé
ter, après tous les journaux ita
liens, que nous prenons les chiffres
du rapport tels qu'ils sont donnés.
Il est impossible de faire «ubir le
moindre contrôle à ces recettes et
dépenses dont le rapport di Bro-
glio ne donne que les résultats les
plus généraux; , -
: Comment donc s'est réalisé le
fameux équilibre? Ecoutons M. di
Broglio. 5
En prévisions, le budget 1900-
1901 se clôturait par un excédent
net de 27 millions. Au cours de
l'exercice, cet excédent a failli se
transformer én un déficit de 7 mil
lions 1\2. Les principales dépenses
imprévues, font venues de crédits
extraordinaires pour le matériel
de guerre : plus de 9 millions 1|2 ;
d'augmentations de crédit pour le
renouvellement de la flotte militai
re : 6 millions 1$ ; 14 millions pour
l'expédition de Chine ; - 350,000 fr.
pour les troupes envoyées dans l'île
ae Crète.
Mais ce déficit sur les prévisions
qui eût été au total de 34 millions,
s'est heureusement converti [en un
excédent de près de s50 millions.
Pourquoi ?. parce que d'autres cha
pitres du budget ont fourni à leur
tour un rendement supérieur aux
prévisions.
Ce sont ces chapitres qu'il est
intéressant d'étudier ; car de la na
ture des éléments qui ont composé
cet excédent, dépend évidemment
la plus ou moins grande stabilité
vraie, future, durable, du budget
italien.
Une bonne part de cette plus-va
lue est due à des causes purement
accidentelles, par exemple 6 mil
lions et demi de bénéfices sur les
droits fiscaux du « lotto », 18 mil
lions et demi d'augmentation sur
les droits d'entrée du blé.
L'exposé accuse 9 millions d'é
conomies réalisées dans les admi
nistrations publiques. C'est de
bon augure, bien que cela n'ac
croisse pas évidemment la richesse
intérieure; il faut remarquer que,
dans ce pays, la plaie du fonction
narisme sévit plus que partout ail
leurs ; pourra-t-on maintenir, pour-
ra-t-on accroître ces économies,
qui heurtent les habitudes plus vio
lemment qu'ailleurs ?
Notons les. bénéfices réalisés par
l'Etat sur le « lotto ». Ce jeu de ha
sard existe toujours en Italie, élevé
à la dignité d'Une institution d'Etat.
Or M. di Broglio prend bien soin
de nous dire à quelle cause est dû
le bénéfice réalisé par l'Etat sur la
« lotto », dans l'exercice 1900-1901'.
Ce n'est pas qu'il y ait eu plus de
joueurs, au contraire : les mises ont
été inférieures de 2 miîiions et 1^4
aux chiffres prévus. Ce résultat
prouverait qu'il y a dans le peuple,
non pas, hélas 1 un progrès de mo
ralité, mais un accroissement de
Êauvreté. Cette année, dit M, di
roglio, les joueurs ont été moins
heureux, ce qui fait que l'Etat, pro
priétaire de la banque, de la rou
lotte ou du lotto, comme on voudra,
a pu empocher 6 millions et demi
de plus qu'il n'avait espéré dans ses
prévisions... On voit tout de suite
qu'à ce compte, l'exercice prochain
pourrait se clôturer par un déficit
impossible à'déterminer.
L'élément le .plus intéressant à
étudier est le rendement de l'impôt
sur le blé. Il a fourni sur les prévi
sions une augmentation de près de
19 millions. Ce résultat prouve que
plus de blé encore qu'on ne l'avait
prévu. Ce n'est pas un indice de
prospérité nationale.
Il faut noter que, dans le même
temple rendement des impôts eur
tmi
sma
Edition quotidienn* — 12,349
' wjtWOT LEGAÎ
'*§L,
Samedi 21 Décèmhre 1901
ma
1001/
— f-
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postale)
Ua ao .. 25 » 36 »
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LE MONDE
L'UNIVERS rie répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et G'», 6, place da la Bourse
m
PARIS, 20 DÉCEMBRE 1901 .
SOMMAIRE
La grande émula
tion.....
Çà *tlà : Un tréso
rier original
Correspondance ro-
J22&1I1# • i « • •
A la Chambre.....
Au Sénat... .»
..." Eugène Tavernies.
Edouard Alexandre
J. Mantenay.
J. estérac.
Bulletin. — Nouvelles de Rome. —No
tre appel. — Au joar le jour. — Le»
; congrégations. — Réponse de Mgr' Du-
bourg. — Iniormationtr politiques et
parlementaires. — A l'Hôtel de Ville. —
Chronique électorale. — M. l'abbé Blam-
pied. — La guerre du Transvaal. —
Etranger. — A travers la presse. — La
question ouvrière. Les anarchistes.
— Lettre», sciasces et arts. — A l'Ins
titut catholique. — Echos ds partout.
— Chronique religieuse. — L'œuvre de
Jeanne d'Arc. — Nécrologie. — En
province. — Guerre et marine. — Les
chants de Noël. — Œuvre de l'hospitalité
de nuit. — Les congrès eucharistiques.
' —Eglise du Sacré-Cœur. — Mouvement
judiciaire. — L'affaire Brierre. — iSou-
veiits diverses. — Uaiendrier. —, Ta-
, bleau et bulletin de la,Bourse. — Der
nière heure.
LA GRANDE ÉMULATION
Quelle est la liberté que l'on pour
rait bien encore supprimer?—Ainsi
beaucoup de législateurs et d'admi
nistrateurs s'interrogent du matin
au soir, le cœur en émoi, l'esprit
tendu, possédés d'une fièvre dont
ils entretiennent l'ardeur; Ce sont
les « libéraux », les vrais et même
et surtout les seuls ; car ils ont dé
couvert que la liberté a pour carac
tère fondamental d'être un mono
pole. Elle n'existe et elle ne pros
père que lorsqu'elle est confisquée,
bien entendu en certaines mains,
qui sont justement les leurs.
La loi Waldeck frappe les collè
ges comme les couvents ; et, sous
prétexte de réglementer les asso
ciations on s'est procuré le moyen
d'attaquer l'enseignement libre. N'y
a -t-il pas mieux à faire ? — Mais
certainement, répondent en choeur
des hommes pubiios zélés, parmi
lesquels se distingue M. Béraud.
M. Béraud, c'est un sénateur de
Vaucluse, un ancien député et lin
médecin.
Voilà tout ce que nous pouvons
savoir sur lui ; et il n'a pas besoin
de posséder plus d'illustration, ni
plus d'importance, ni plus de com
pétence pour se trouver soudain
muni d'un rôle de premier choix. ^
La loi d'enseignement présentée
à la Chambre avant la loi sur les
associations était destinée à com
battre les collèges libres, mais elle
a rencontré des obstacles et elle a
traîné. Aussi a-t-on pris l'affaire
par un autre bout; Puisque les col
lèges ne pouvaient pas etre fermés
tout de suite, on allait du moins en
expulser les professeurs congréga-
nistes; Commencée sans retard, la
belle besogne va se continuer, d'une
façon indirecte.
— Que la Chambre agisse indi
rectement tant qu'elle voudra, s'est
dit l'éminent et inconnu Béraud.
Moi, je vais droit au but. — Et le
dit sénateur a demandé en termes
propres, bien que cyniques, l'abro
gation de la loi Falloux et la sup
pression complète * de la liberté
d'enseignement. Il ne s'agit que de
biffer un texte. Biffons! répondent
douze sénateurs, qui sont aussitôt
élus commissaires; Ne doutez pas
nue M. Pochon ne fasse partie de
la cohorte d'honneur : c'est lui qui,
avant d'entrer dans les assemblées
délibérantes, conçut l'idée et rédi
gea la formule sur lesquelles le Sé
nat travaille maintenant.Tout en re
fusant de croire à la liberté, M. Po-
chOn devra croire à la justice, qui
ee manifeste en sa personne. D'au
tres commissaires refusent de bif
fer ; mais ils ne sont que six contre
jà$uze; et la majorité du Sénat
éprouve un si grand désir de se
montrer plus avancée que la Cham
bre que la proposition Béraud a
chance d'être votée avec d§s trans
ports d'enthousiasme furieux..
Quelle est la liberté que l'on
Eourrait bien encore supprimer ? —
,a même émulation s'est établie
entre M- Waldeck-Rousseau et son
subordonné M. Dumay, directeur
général des cultes.
Ce n'est pas assez, pour le prési
dent du conseil, de disposer à la
Chambre de deux majorités, l'une
féroce, l'autre modérée, dont il se
«ert suivant les circonstances. Il a
encore trente-six langages ; et
quand il est visité par l'ennui, par
Ja fatigue, par la mauvaise humeur,
jl trouve dans la fumisterie un pré
cieux délassement. Avant le débat
sur les associations, il distribuait
aux modérés des paroles absolu
ment rassurantes. Il affirmait que
la loi serait appliquée avec une telle
douceur que, de sectaire, elle en
deviendrait toute libérale. Il insi
nuait que toutes les associations
seraient autorisées et que la liberté
religieuse jouirait de plus de garan
tie? qu'ayjc meilleures épojjuç» da
la monarchie chrétiénne. Mainte
nant, le président du-conseil, qui
dispose, enfin de sa chère loi, paraît
avoir envie de ne pa,s tolérer une
eienante.
des
associations pour menacer et pour
atteindre l'enseignement, il est
bien capable de dire ensuite que
l'enseignement et l'association re
présentent deux choses très /dis
tinctes et qu'on ne doit pas autori
ser des congrégations qui profite
raient de cet avantage en conti
nuant d'enseigner.
M. Dumay a encore plus d'exi
gences. Il veut soumettre à l'auto
risation même les congréganistes
dont le concours est employé par
l'Etat dans les œuvres de charité
ou do philanthropie. Ce directeur
des cultes frémit à la pensée qiie
la situation des pouvoirs publics
pourrait être irrégùiière et illégale.
Ce serait le bouleversement de
toute l'administration.
Or, M. Dumay ne conçoit les cho
ses qu'au point de vue administra
tif. Tant que la liberté, les mœurs,
la politique, la science, la religion
ne sont pas représentées, par des
papiers rangés dans des cartons,
elles lui produisent l'effet du chaos-
Son système philosophique se com
posé d'étiquettes et se réduit à Un
numérotage. Pour lui, le monde
c'est un. immense cartonnier ; et
l'idéal de la beauté artistique c'est
une armoire.
M. Waldeck-Rousseau tourne en
dérision cette manie de vouloir tout
mettre sous clef; tandis que M. Du
may le blâme de n'avoir pas de
l'ordre un souci suffisant. Ils ne
s'aiment pas; ils s'accusent l'un
l'autre ; ils se joueront réciproque
ment quelque bon tour, mais, au
fond, ils sont parfaitement d'ac
cord pour nuire le plus possible à la
liberté.
Que l'orateur se moque de la vul
garité du rond-de-cuir;que le rond-
de-cuir juge avec dédain la phraséo
logie de l'orateur pincé, peu im
porte : la cause de la vérité, du
droit, delà fierté nationale n'y ga
gnera pas grand'chose.
Nous vivons en plein déchaîne
ment de la passion sectaire; Plumi
tifs, rhéteurs, légistes, sont tout
entiers à l'absurde et abominable
pensée de ligotter et d'étouffer la
religion. Ils quêtent des systèmes
et des procédés. Ils les recevraient
avec joie et avec fierté des vaga
bonds et des cambrioleurs, aux
quels la France est désignée com
me une proie. '
Eugène T ayernier. „
NOUVELLES DE EOM1
'BULLETIN
Au Palais - Bourbon comme au
Luxembourg on a décidé d'envoyer une
délégation à l'inauguration, fixée à di
manche prochain, du monument Bau-
din.
La Chambre, avant d'aborder les cha
pitres du budget de l'intérieur,a discuté
l'interpellation Vaillant sur la révoca
tion du maire sans-patrie de Bour
ges.
Le président du conseil a donné lec
ture d'abominables paroles prononcées
par le citoyen Vaillandet et l'ordre du
jour pur et simple, portant approba
tion d'un acte énergique, en cette cir
constance, du gouvernement, a été
adopté à une énorme majorité.
Aujourd'hui , à deux heures et demi e,
discussion des interpellations de M.
Colliard. svr des incidents survenus au
cours des grandes manœuvres du Sud-
Est, vt de M. Paslre sur « les persécu
tions dont sont victimes les instituteurs
laïques ».
Le Sénat, dans la suite du débat sur
l'admission temporaire des blés, a en-
tendu un discours intéressant et docu
menté de M. Couteaux.
D'après une information du Daily
Chronicle, qu'il convient de signaler
sous toutes réserves, le Vatican aurâit
fait appel au gouvernement français
pour obtenir satisfaction de la Turquie,
kl'occasion des récents troubles de Jé
rusalem. ,
Le bruit court dans les milieux offi
ciels russss, en y produisant une vive
émetion, que l'Autriche, avec le consen
tement, voire l'appui de l'Allemagne,
méditerait l'incorporation d'un e partie
de la Bosnie et de l'Herzégovine. à l'em
pire austro-hongrois.
Un incident anglo allemand vient de
se produire en. Australie ; le comman
dant d'un paquebot allemand a été em
prisonné par ordre des autori tés aus
traliennes sur son refus de payer une
amende encourue pour bris de scellés.
Le consul d'Allemagne a protesté.
En Espagne, on recommence à.parler
de crise ministérielle..
Plusieurs députés républicains se
montrent malveillants pour la famille
royale, et le journal El Pais, déjà, saisi
une fois, annonce la suite d'articles
violents contre le Palais.
On mande d'Athènes que le gouver
nement hellénique a décidé de rempla
cer ses chargés d'affaires à Londres, et
à Rome par des ministres plénipoten
tiaires.
L'organe officiel du Venezuela publie
une note assez menaçante pour VAlle r
magne, déclarant que le président Cas
tro est déterminé à ne permettre, en au
cun cas, l'humiliation ou la méconnais
sance des droits de la République sud-
mirictine,
• La « Sclioia cantorum »
du séminaire français.
Rome, 17 décembre.
Le conseil central italien de l'œuvre
de la préservation de la foi a célébré di
manche gafète annuelle à Saint-André
délia Yalle. La messe pontificale a été
célébrée à 10 h. 1(2. Les clercs officiants
étaient les élèves du séminaire de la Pro
pagande. Co,mme les annéeB précédentes
on avait fait , appel à la « Schola canto
rum « du séminaire français ; c'est qu'en
effet la « Schola cantorum » de Santa
Chiara jouit à bon droit de la meilleure
réputation parmi la population romaine
en ce qui concerne l'exécution parfaite
du plain chant grégorien.
Au cercle universitaire catholique 1
Le cercle universitaire catholique a
inauguré dimanche l'année scolaire. Le
matin, S. Em. le cardinal Gennari à cé-
lébr.é à Saint-Marcel au Corso la messe
dé communion générale. Le R. P. Zoc-
chi, aumônier du cercle, a adressé aux
jeunes étudiants qui venaient se presser
nombreux à ia Table sainte, une fervente
allocution sur la nécessité de conserver
intactes leur foi et leur vertu s'ils veu
lent atteindre les sommets du savoir hu
main. ~
Le soir, les étudiants se Bont réunis de
nouveau à leur cercle, à Saint-Charles
au Corso. Le Père Zocchi a donné com
munication d'une dépêche du cardinal
Rampolla transmettant la bénédiction du
Souverain Pontife. M. Persichetti, prési
dent de la Fédération des associations
catholiques romaines, a salué en quel
ques mots vibrants les jeunes frères
d'armes.
Puis un docteur en droit a communi
qué une circulaire de M. l'avocat mila
nais Mauri, président de la fédération
générale des cercles universitaires catho
liques italiens. Cette fédération vient de
se reconstituer. M. Mauri invitait tous
les étudiants à protester contre le projet
de loi sur le divorce. Sans tarder, les
jeunes gens du cercle de Rome ont ex
pédié à M. Zanardelli une dépâche lui
portant leur protestation vibrante < au
nom des meilleures traditions des Uni
versités et des sciences juridiques ita
liennes. »
Le : travail do dimanche au palais
de la reine.
La presse catholique Tait remarquer
avec un étonnement plein de tristesse
que ces derniers dimanches, on n'a pas
cessé de travailler aux façades et sur la
terrasse du palais que ia reine Margue
rite habite depuis un an au quartier Lu-
dovisi, et où elle est rentrée aujourd'hui
même, après une absençe de quatre
mois. « Ce scandale,dit la Voce, eBt d'au
tant plus déplorable que ce mauvais
exemple tombe de plus haut, s
ASSontecHorio.
Les incidents soulevés par le député
Ferri ont eu aujourd'hui un dénouement
plutôt comique. Au début de la séance, le
socialiste Pantano a proposé à ses collè
gues d'accepter comme une explication
suffisante le discours qu'hier soir M. Ferri
adressa aux journalistes restés dans ieur
tribune après que tous les députés
avaient quitté la Chambre; et aussi la
lettre qu'il avait fait publier hier dans
l'Avanti. Cet essai de sauvetage est
resté infructueux. Les députés ont main
tenu la censure avec exclusion pour cinq
jours.
Au moment où le président proclamait
le vote, un grand bruit de vitres cas-
Bées ; la tête ébourriffée et barbue de
M.Ferri apparaît à travers l'une des portes
du fond de l'hémicycle. .
Tableau !
La scène est tellement émotionnante
que dans la tribune de la presse deux
journalistes s'embrassent de joie !
Cependant que M. Ferri crie de sa voix
de stentor : « Un triomphe de plus pour
cette Chambre camorriste ! Vive là ca-
morrade la Chambre! » Aussitôt deux
soldats sont mis de planton à la garde de
la vitre cassée pour empêcher M. Ferri de
passer.
A en juger par les journaux,les der
niers incidents ont fait perdre la tête à
tout le monde. Et on fait remarquer que
tout cela est dû à un seul individu. Soli
dité du parlementarisme italien ! Heu
reusement pourM.Zanardelli/la Chambre
part en vacances samedi prochain,... Bi
elle n'est expédiée plus tôt encore.
Aïï JOUR LE JOUE
Le buste de ce pauvre Verlaine donne
du a tintouin >, si nous osons nous ex- :
primer ainsi, à ceux qui ont entrepris de'
perpétuer la gloire de l'auteur de-Sagesse
et de Parallèlement.
Primo, on n'avait pas récolté beaucoup
d'argent ; secundo, cinq mille francs ont
été gaspillés d'une façon imprévoyante
avant que la pierre du buste eût seule
ment reçu dix coups d'ébauchoir.
Voyant cette détresse, le ministère est
venu au secours du comité. Il a pris dans
notre poche mille francs pour les lui
donner. On a battu le rappel de droite et
de gauche. Bref, le buste sortira vain
queur — nous promet on — des épreuves
qu'il vient de traverser.
Ajoutons que, si ce buste est beau, ce
ne sera plus Verlaine, et que, s'il est
ressemblant, il sera bien laid.
•
: - ... » -•
Nous avons parlé de la chanson Com
père Milleri, qui vient d'être interdite
comme lésant la majesté de M. Mille-
rand.
Çe^ chsww ne chante eyr l'ejrâe
Compère Guilleri , qui fut familier à
oiotrejjB.nfance._-
En voici quelques couplets : . :
4 II était un p'tit homms
. Qui s'app'lait Milleri,
Tubini.
Il devait aux bourgeois
Faire un' guerr' sans merci,
Tubini. - - ,
TU1 Tubini, toto Lorando,
. Compère Milleri,
Te lairas-tu (ter) mouri?
Il s'en fut à la Chambre
Comm' député d'Paris, etc.
Dé tous les ministères, '*
Il devint l'ennemi, etc.
Jusqu'au jour où lui-même
Il fut ministre aussi, etc.
Ce jour-là le p'tit homme
Crut qu'il avait grandi, etc...
L'ex-révolutionnalre
Put baron Milleri, etc.
Les Paquins et les riches
D'honneurs il les comblit, etc.
Ce n'était pas très méchant ; mais les
despotes d'aujourd'hui ne veulent même
pas que le gouvernement de la France
soit, comme sous l'ancien régime, un
pouvoir abBolu tempéré par une chan-
son.
m
* •
M. Roger-Ballu, inspecteur des beaux-
arts, critique le gouvernement.
On le révoque. -
M, Dayot, inspecteur des beaux-arts,
écrivait dernièrement dans une revue
une réhabilitation de la Commune.
Celui-là, on ne le révoque pas.
», ■ '.-V •
Le président Roosévelt se met de mieux
en mieux avec les nègres.
Dernièrement, il recevait l'un d'eux à
sa table.
On annonce aujourd'hui que deux au
tres noirs, MM. Crosslina et Daney, sont
nommés, l'un ministre de la Liberie (?},
l'autre greffier à Washington.
Les Etats du Sud ne lui pardonneront
pas cette nouvelle noirceur.
A propos du prix Nobel, dont on parle
tant depuis quelques jours,, un bienveil
lant chercheur de petites bétes s'est de
mandé si le nom du célèbre inventeur de
la dynamite ne renfermait pas, à lui tout
seul, une prédestination.
< Il suffit d'écrire au rebours le nom de
Nobel pour lire Lebon. Il suffit aussi
d'intervertir l'ordre des deux dernières
lettres pour obtenir Noble.
La noblesse et la bonté, deux qualités
du grand chimiste suédoib qui, en in
ventant l'un des explosifs les plus terri
nes qui aient jamais enrichi les arse-
'naux des peuples modernes, a pensé
travailler efficacement pour la paix !
•
■ ■ • •
Les récents discours de MM, Caillaux
et Leygues sont maintenant affichés par
tout.
On ne les lit pas, car il fait froid, et
puis ils sont longs et ennuyeux. Mais ça
tient de la place.
Ça en tient tellement qu'à certains en
droits, notamment en Vendée, des maires
dont la mairie est très petite ont dû af
ficher le discours de M. Leygues sur ce
lui de M. Caillaux, ce qui fait un pas
grand'chose sur un rien du tout.
Cette débauche d'affichage fait l'affaire
des colleurs, mais non celle des contri
buables.
Rappelons d'ailleurs, une fois de plus,
que ces affichages sont inconstitution
nels, puisque toute dépense doit être ap
prouvée par les deux Chambres. Or, les
affichages ordonnés par la Chambre ne
sont pas soumis à l'approbation du Sé
nat. .
^Le respect.de la constitution,ça se prê
che aux adversaires, mais les amis du
gouvernement n'y sont pas tenus.
« •
Un référendum vient d'avoir lieu à Mi
lan.
La question était de savoir si la com
mune de continuerait à servir au fa
meux théâtre de la Scala une dotation
annuelle de 150.000 francs.
Par 11,000 voix contre 7,000, la popu
lation a répondu non.
Cela scandalise les mélomanes. Pour
quoi ? N'est il pas juste que les dépenses
superflues soient supportées uniquement
par ceux qui en profitent, ou encore par
ceux qui s'y intéressent bénévolement ?
»
• •" •.
Un solliciteur se présente chez M.
Waldeck Rousseau.
—■ Et puis, dit-il après avoir exposéses
titres, je suis le cousin d'un député de
votre majorité.
— De laquelle ? de ma majorité nu
méro 1 ou de ma majorité numéro 2 ?
NOTHS APPEL
Comme on l'a vu déjà,.l'assem
blée des actionnaires, tenue le 28 no
vembre, a voté l'augmentation, de
capital (ou plutôt la reconstitution
de l'ancien capital) que nous ju-
gepns nécessaire pour la transfor
mation du journal et l'extension de
son influence par la baisse de son
prix et diverses améliorations.
Nous disions l'autre jour que plus
des cinq sixièmes des 300,000 francs
demandés étaient souscrits.
Nous pouvons dire aujourd'hui
que les neuf dixièmes de la somme
sont atteints.
La souscription reste ouverte.
Nous insistons auprès de tous
ceux. de nos amis qui sont en me
sure de le faire, pour qu'ils veuil
lent bien souscrire.
L'action est de cent francs.
Çà et là
UN TRESORIER ORIGINAL
J'ai souvent songé au beau livre qu'il
y aurait lieu d'écrire sur ces petites vies
sans éclat extérieur et tout embaumées
du parfum de la vériu. Que d'humbles,
ignorés de tous, cheminent en ce monde
sans autre satisfaction que celle du de
voir accompli ! Pour eux, les académies
n'ont point de lauriers. Les joars se suc
cèdent,- calmes et monotones. Rien ne
produit jamais le moindre Bursaut dans
leur existence mélancolique. Et ils mar
chent toujours, fermes et résignés, sans
porter envie à personne, heureux dans
leur obscurité et ne connaissant, sur
la route parfois si rude du. sacrifice,
aucune lassitude, ni aucun décourage
ment. Ils travaillent pour Dieu : voilà
leur secret ! ^
C'est un de ces humbles chrétiens
exemplaires dont je vais essayer— parce
qu'il est mort depuis longtemps — de
dévoiler ici les charitables industries.
Cœur d'or ; mais bourru et rébarbatif
à l'excès, ronchonnant du matin au soir
contre les autres etj surtout contre
lui-même, le père L... trésorier de
toutes les bonnes œuvres d'une grande
ville de l'Ouest — il y a de cela tantôt;
vingt ans — était à la fois le meilleur et
le plus insupportable des hommes que
j'aie connus.
C'était toute une affaire, le plus ardu
des problèmes,que de l'aborder. Et alors
même que l'on arrivait chez lui avec une
somme rondelette pour ses bonnes œu
vres, on n'était pas sûr, pour cela, d'être
bien reçu. Jamais il n'était absolument
satisfait des dames de charité qui lui re
mettaient le produit des fêtes et des ker
messes organisées au profit des malheu
reux. Il trouvait toujours que l'on avait
payé trop cher les musiciens. Les ca
chets des artistes, les bouquets des chan
teuses, tout cela lui paraissait inutile,
ridicule, abusif. Et il eût voulu que toute
la recette fût pour les pauvres. ^
A son avis, les cercles catholiques dé
pensaient trop ; les tontines ouvrières
n'étaient pas assez soucieuses de leurs
statuts et règlements ; la fabrique de l'é
glise paroissiale ne eontrôlait point com
me il eût fallu les frais d'éclairage et de
luminaire. On gaspillait l'encre et le pa
pier dans les écoles libres. Les récom
penses étaient trop nombreuses ; les dis
tributions de prix coûtaient trop cher.
Etpatati et patata. Bref, d'après le père
L..., tout marchait de travers. Il mau
gréait sans cesse ; son humeur atrabilaire
était toujours en mouvement. Il ne déco
lérait point. Mais, malgré toutes ses ai
gres bourrades et ses perpétuelles cen
sures, au fond, le père L... n'avait au
cun sujet réel de mécontentement. Tou<
tes les œuvres de charité dont il était
trésorier marchaient à merveille. On ou
vrait de nouvelles écoles libres. L'hôpi
tal catholique augmentait chaque année
le nombre de ses lits, etc., etc.
*
Mais — phénomène étrange — six mois
après la mort du père L... toutes les
bounes œuvres qu'il avait administrées
périclitaient. Les recettes ne correspon
daient plus aux dépense?. Chaque bud
get accusait un notable déficit.
Et pourtant la libéralité charitable des
habitants de la ville était toujours la
même. Et ce n'était guère l'amabilité du
père L... qui, vraisemblablement, de
vait attirer l'eau au moulin, puisque, par
sa miBanthropique humeur, il était plutôt
capable, ce trésorier farouche, de rebuter
les gens que de les attirer. .... .
* •
On chercha longtemps, sans y parve
nir, à déchiffrer l'énigme. Mais un jour,
pressé de questions, un des employés qui
avait été chargé de mettre à jour les li
vres du père L... finit par trouver le fa
meux secret de ce dernier pour assurer
le bon fonctionnement des œuvres de
la ville.
Le père L..., Bans en rien jdire à per
sonne, grossissait toutes les petites som
mes que lui fournissait la charité de ses
concitoyens. Lorsque, par exemple, on
lui versait, pour telle ou telle bonne œu
vre, 1 fr. 50 ou 2 fr. 25, il enregistrait :
2 fr. et 2 fr. 50.
Avec lui, toutes les sommes fraction
naires étaient arrondies. Les « 25 cen
times » devenaient des « 50 centimes » ;
les a 50 centimes » se transformaient en
francs, etc., etc.
Et s'il remettait au bienfaiteur ou à la
bienfaitrice un reçu conforme à la sous
cription versée, par_conîre,_ il prenait
l'augmentation de la somme et la diffé
rence à sa charge.
Et c'est ainsi que —r à l'insu de tous —
il donna,de sa poche,pendant plus de dix
ans, de 4 à 5,000 francs chaque année
aux diverses bonnes œuvres qu'il était
chargé de régir.
Jamais pendant ce laps de temps au
cun compliment à son adresse. Aucune
louange pour lui dans tous les rapports
éloquents de MM. les secrétaires des éco
les libres ou des cercles catholiques qui
célébraient à l'envi la prospérité crois
sante de toutes les œuvres...
Sa main droite avait voulu ignorer ce
que faisait sa main gauche.
Seuls, les anges du bon Dieu con
naissaient son arithmétique. Quels excel
lents placements il a dû faire là-haut, cet
étrange trésorier, aussi humble que
bourru, dont tout le monde se plaignait
et que personne ne remplaça jamais,
hélas ! dans la bonne ville de... pourtant
si charitable !
• •
fce père L... fc'efrt point — comme on
pourrait le croire — line fiction, une
création imaginaire et de pure fantaisie.
C'était un négociant qui, bon an, mal
an, se faisait dans les affaires environ
12,000 francs de bénéfice. Il vivait assez
confortablement, mais sans aucun luxe.
Esprit fin, homme au jugement sûr, il ne
s'occupait que de son commerce et d'œu-
vres charitables. Il se privait de tout
plaisir. Et lorsqu'on lui demandait pour
quoi il n'allait pas à l'Opéra, il répondait
qu'il ne comprenait rien à l'art lyrique
et qu'il ne connaissait que « la musique
commerciale ». ;
Le père L... fut un saint sous la peau
d'un... grincheux.
On rapporte qu'un moine du moyen
âge nommé Jacopone affectait par humi
lité de ne comprendre rien, voire même
de se faire passer pour idiot,afin d'échap
per aux éloges que lui auraient valu ses
travaux d'art remarquables et ses émi-
nentes vertus.
Le charitable trésorier dont je viens
de parler fut par sa, modestie et son hu
milité un... frère de Jacopone!
Edouard A lexandre.
CORRESPONDANCE ROMAINE
"
Les finances italiennes.
Equilibre imprévu. — Les sources des bé«
Défiçes. — Economies. — Le n Iotto ». —
Droits sur le blé. — Prévisions trop con
fiantes pour les exercices prochains.
Rome, 15 décembre.
L'équilibre des finances italien
nes est essentiellement dû, on va le
voir, au hasard.
Commençons d'abord par répé
ter, après tous les journaux ita
liens, que nous prenons les chiffres
du rapport tels qu'ils sont donnés.
Il est impossible de faire «ubir le
moindre contrôle à ces recettes et
dépenses dont le rapport di Bro-
glio ne donne que les résultats les
plus généraux; , -
: Comment donc s'est réalisé le
fameux équilibre? Ecoutons M. di
Broglio. 5
En prévisions, le budget 1900-
1901 se clôturait par un excédent
net de 27 millions. Au cours de
l'exercice, cet excédent a failli se
transformer én un déficit de 7 mil
lions 1\2. Les principales dépenses
imprévues, font venues de crédits
extraordinaires pour le matériel
de guerre : plus de 9 millions 1|2 ;
d'augmentations de crédit pour le
renouvellement de la flotte militai
re : 6 millions 1$ ; 14 millions pour
l'expédition de Chine ; - 350,000 fr.
pour les troupes envoyées dans l'île
ae Crète.
Mais ce déficit sur les prévisions
qui eût été au total de 34 millions,
s'est heureusement converti [en un
excédent de près de s50 millions.
Pourquoi ?. parce que d'autres cha
pitres du budget ont fourni à leur
tour un rendement supérieur aux
prévisions.
Ce sont ces chapitres qu'il est
intéressant d'étudier ; car de la na
ture des éléments qui ont composé
cet excédent, dépend évidemment
la plus ou moins grande stabilité
vraie, future, durable, du budget
italien.
Une bonne part de cette plus-va
lue est due à des causes purement
accidentelles, par exemple 6 mil
lions et demi de bénéfices sur les
droits fiscaux du « lotto », 18 mil
lions et demi d'augmentation sur
les droits d'entrée du blé.
L'exposé accuse 9 millions d'é
conomies réalisées dans les admi
nistrations publiques. C'est de
bon augure, bien que cela n'ac
croisse pas évidemment la richesse
intérieure; il faut remarquer que,
dans ce pays, la plaie du fonction
narisme sévit plus que partout ail
leurs ; pourra-t-on maintenir, pour-
ra-t-on accroître ces économies,
qui heurtent les habitudes plus vio
lemment qu'ailleurs ?
Notons les. bénéfices réalisés par
l'Etat sur le « lotto ». Ce jeu de ha
sard existe toujours en Italie, élevé
à la dignité d'Une institution d'Etat.
Or M. di Broglio prend bien soin
de nous dire à quelle cause est dû
le bénéfice réalisé par l'Etat sur la
« lotto », dans l'exercice 1900-1901'.
Ce n'est pas qu'il y ait eu plus de
joueurs, au contraire : les mises ont
été inférieures de 2 miîiions et 1^4
aux chiffres prévus. Ce résultat
prouverait qu'il y a dans le peuple,
non pas, hélas 1 un progrès de mo
ralité, mais un accroissement de
Êauvreté. Cette année, dit M, di
roglio, les joueurs ont été moins
heureux, ce qui fait que l'Etat, pro
priétaire de la banque, de la rou
lotte ou du lotto, comme on voudra,
a pu empocher 6 millions et demi
de plus qu'il n'avait espéré dans ses
prévisions... On voit tout de suite
qu'à ce compte, l'exercice prochain
pourrait se clôturer par un déficit
impossible à'déterminer.
L'élément le .plus intéressant à
étudier est le rendement de l'impôt
sur le blé. Il a fourni sur les prévi
sions une augmentation de près de
19 millions. Ce résultat prouve que
plus de blé encore qu'on ne l'avait
prévu. Ce n'est pas un indice de
prospérité nationale.
Il faut noter que, dans le même
temple rendement des impôts eur
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