Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-12-08
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 08 décembre 1901 08 décembre 1901
Description : 1901/12/08 (Numéro 12337). 1901/12/08 (Numéro 12337).
Description : Note : erreur de numérotation. Note : erreur de numérotation.
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k710929j
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Dimanche 8 Décembre 1901
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
ET départements (union postale)..
Un an..7 25 » ,35 »
Six mois 13 » 18 »
Trois mois- 7. » 10. »
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Edition'quotidienne — 12,33 T
19
Dimanche 8 Décembre 1901
ÉDITION SEMI- QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et .-départements (union postale) ; :i
Un an.. 13 » 20 »^ L ; s
Six mois 7 » 11 » ? * - f
Trois mois 4 »» ■ S 50
EX
LE MONDE
Les abonnemënta partent des 1" et 16 de chaque moia
L'UNIVERS ne rêpondpas des manuscrits qui luijont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C !e , 6, place de la Bourse
PARIS, 7 .'DECEMBRE 1901
SOMMAIRE'
Pierre Véuillot.
II. Cettt.
J. M.
J. ëstérag.
Le Chambardement.
Desiderata sociaux
en Allemagne....
Correspondance ro
mains
A la Chambre.....
Au Sénat............
Chronique des mis
sions Ls Témoin.
Les conférences du
Luxembourg..... Edouard Alexandre
Bulletin. — L'affaire Hervé. —■ Au.jonr
le jour. — Les microbes aurifères. —
Les congrégations.^ — Les attaques
contre le clergé. — Informations poli
tiques et parlementaires. — A l'IIôtel
de Ville. — Le congrès de Bourges. —
A la Guadeloupe. — Les affaires de
Chine. — La guerre du Transvaal. —
: Etranger. — Miss Stone. — A travers la
presse. — Les explications de M e La
bori. — La question ouvrière. — Let
tres, sciences et arts. — Cours et con
férences. — Echos de partout. . L'u
nion ornaise. — Chronique religieuse. —
Nécrologie. — Guerre et marine. — Tri-
buijaus. — Nouvelles diverges. — Jardin
d'acclimatation. — Calendrier. — Tableau
et bulletin de la Bourse. — Dernière
heur?. - .
LE CHÂMSÂRDE1ENT
Ceux qui espèrent de M 0 Labori
des révélations très importantes
courent grand risque d'être déçus.
Dans les articles qu'il a déjà don
nés au Journal, on trouve des ré
criminations emportées ou dolentes,
mais vagues; parfois, aù coin d'un
paragraphe, luit une velléité de me
nace, vague aussi; et c'est tout. On
n'apprend rien. Nous croyons bien
que la suite ne nous émotionnera
point davantage. '
M" Labori ne nous fera pas entrer
dans les arcanes du grand complot.
C'est peut-être, c'est même proba
blement parce que le grand com
plot, tel que l 'ont rêvé certains ro
manciers politiques, n'a'jamais
existé. Ou si M.-Joseph Reinacha
tramé une immense conjuration, il
n 'a pas mis M" Labori dans. la con^
fidence. Et l'on devrait en conclure
que l'ancien député des Basses-Al
pes ne manque pas de quelque pers
picacité.
Il n'avait cependant pas tout
prévu. Quand il nous menaçait du
« chambardement », M. Reinach ne
se doutait point qu'avant d'avoir
réussi au gré de ses désirs, il ver
rait les dissensions intestines cham
barder son ouvrage. Et voilà ce qui
arrive. « Ça se, décolle, » pour em-
Eloyer l'expression de Gambetta.
.'ancien favori du grand opportu
niste peut se répéter tristement,ces
jours-ci, les trois mots fameux de
son maître.
. Ça se décolle, parce que ça devait
se décoller. N'oublions point que
les tenants de Dreyfus étaient venus
de côtés divers, et pas tous dans
les mêmes intentions ni obéissant
à dea mobiles identiques. Il fallait
bien qu'ils finissent par s'en re
tourner là d'où ils étaient venus. De
pareilles séparations ne s'opèrent
jamais sans quelques éclats de
mauvaise humeur, agrémentés de
reproches mutuels.
D'abord, il y a eu les sincères et
ceux qui ne l'étaient point. Ceux-ci,
qu'on a le droit, n'est-il pas vrai?
de supposer les plus nombreux,
put- été attirés par l'espoir d'un joli
bénéfice matériel, ou par l'idée de
tirer profit du mouvement' pour
leurs vues et passions politiques.
Ces derniers, ayant en effet réussi
à rendre pleinement le pouvoir aux
sectaires et jacobins, ne s'occu
pent pas plus de Dreyfus qu'on ne
songe à tirer après soi !e tremplin
qui vous a permis de franchir un
obstacle. Les autres, ceux qui vou
laient empocher,, trouvent que les
distributeurs ont -cessé beaucoup.
trop tôt la répartition de la manne
israélite. .Et comme, à travailler
pour M. Reinàch et Cie, ils ont per
du leurs amis ou leurs clients, ils
estiment que le désert sans manne
est une résidence inhabitable. Nom
bre d'entre eux partent donc, en
faisant claquer la porte, si toutefois
l'on peut admettre qu'il y ait des por
tes au désert.
Quelques-uns restent encore, ce
pendant. Ils espèrent, chaque jour
un peu moins, que, bientôt, on rou
vrira la caisse, à nouveau rem
plie.
Voilà pour ceux qui ne furent
pas sincères. Passons maintenant
a ceux qui l'ont été, ou à peu près.
Il y en a eu.
Là encore, on doit établir une
distinction. Une partie de ces hom
mes qui, à force de se suggestion
ner eux-mêmes, ont fini par croire
qu'ils croyaient servir la justice ou
un intérêt avouable, obéissait à une
apparence de principe ou à un sen
timent de race. Au nombre et en
tête de ces derniers, nous ont as
suré des personnes dignes de foi,
il faut mettre M. Reinach. Il a sin
cèrement voulu servir, dans cette
affaire, la cause juive. Les juifs
étaient déjà suffisamment honnis et
haïs. M. Reinach n'a pas pu suppor
ter que la condamnation de Drey
fus leur portât plits grand préju
dice encore. Dreyfus devait donc
être innocenté. Sacrifiant tout à ce
but, l'ancien député des Basses-
Alpes, vraiment ici criminel envers,
la patrie, s'écriait, et dit toujours
sans doute : — Périsse plutôt la
France...
Mais d'autres, M. Labori proba
blement et M. Picquart,.cette énig
me, ne se proposaient pas desau*
ver Israël. C'était Dreyfus même
qui les intéressait. A un moment
quelconque, cette pensée leur est
venue: — Si, pourtant, ce malheu
reux n'est pas coupable?... Et l'on
comprend le travail de leur cer
veau : Il n'a pas été jugé suivant
les formes; sommes-nous sûrs,
même, qu'il soit coupable; peut-
être ne l'est-il pas; il ne doit pas
l 'être; il ne l'est point... L'idée ob
sédante s'est emparée d'eux; l'autor
suggestion a fait son oeuvre ; ils sont
partis.
Donc,ils s'intéressaient aDreyfus,
à la « victime ». Quel désenchante
ment, lorsqu'ils l'ont vu ! De l'avis
même de ses partisans les plus
chauds, Dreyfus est au suprême
degré l'être antipathique. Visage et
cœur. : fermés, âme haut &iE .é - et
sèche, abord glacial, attitude dé
plaisante et louche, tout en lui, in
vinciblement, provoque la répulsion.
.— Quoi, c'est là notre héros! se
sont dit MM. Labori et Picquart.
C'est pour cet individu que j'ai tout
sacrifié!... Si j'avais su!...
Quand on s'écrie ; Si j'avais, su !...
le dénouement peut tarder plus ou
moins, il est désormais inévitable.
L'ingratitude morale et matérielle
de ceux qu'on regrette déjà ,d'avoir
servis à ses dépens ne fait que pré
cipiter la rupture. On est dans une
disposition d'esprit à s'exagérer les
mauvais procédés, à voir partout
de ténébreux desseins et de noires
traîtrises. Un beau jour, on éclate.
M. Picquart se contient encore, à
peuprè3. M 0 Labori a des parois
moins solides. Il vient de faire ex
plosion.
Nous n'apprendrons pas grand'-
chose. Mais de cette, querelle, il
peut résulter que les sectaires s'en
tendent un peu moins. Tâchons
d'en profiter, entre honnêtes gens,
pour nous entendre de mieux en
mieux.
Pierré V euiIiLot.
TULLE7IN
La grande interpellation sur la crise
viticole s'est terminée, à la Chambre,par
un ordre du jour confiant à une com
mission, qui sera nommée mardi, le
soin de faire une enquête sur les cau
ses de la crise et sur les remèdes à y ap
porter.
Le Sénat, en une séance de deux heu
res, a discuté^ et voté, par 22b voix con
tre !i3, le projet du gouvernement sur
l'emprunt de Chine.
La commission du suffrage.universel,
après avoir entendu M. Waldeck Rous
seau et contrairement à ses conclusions,
a voté, par 7 voix contre 5, le rétablisse
ment du scrutin de liste.
C'est Ik une manifestation très plato
nique; il ne fait doute pour personne
que la Chambre refusera de suivre sa
commission et qu'elle maintiendra, pour
les élections prochaines, le scrutin d'ar
rondissement.
Le conseil supérieur de Vinstruction
publique a admis l'appel du citoyen
Hervé le « sans patrie » de l'Yonne, lia
cassé la sentence du conseil acàdérni-
que de Dijon pour avoir soustrait cer
taines pièces du dossier à l'accusé, mais,
retenant l'affaire au fond, il a aggravé
la peine primitive, et mis le professeur
de Sens en retrait d'emploi.
Le conseil supérieur, doit être félicité
pour ces deux décisions.
Un tumultueux débat a été soulevé, à
la - Chambre italienne, à propos du
transfert à Palerme du corps de Crispi.
. ' Radicaux et sectaires ont fait assaut
de dithyrambes en l'honneur d,u con
dottiere si malfaisant pour son pays ]
les socialistes ont protesté violemment
contre le politicien brutal qui se mon-'
ira, au pouvoir, si impitoyable pour ses
anciens complices.
\ Le groupe polonais du Reichstag in
terpellera mardi sur les châtiments in
fligés aux écoliers de Wreschen.
( L'opinion publique est assez .émue de
l'agitation antiallemande qui vient de
■se manifester à Lemberg et à Varso
vie. ■ -
Elle s'émeut aussi delà crise indus
trielle et financière : la fermeture de la
Banque d'épargne de Dresde entraîne
une perte de près de 82 millions pour
les déposants.
Le duc de Northumberland a déclaré
jeudi, dans un discours au banquet des
voyageurs de commerce,que les Anglais
sont inférieurs avx autres peuples pour
l'habileté manuelle.
Il est question de tenir mobilisée l'es
cadre de la Manche et de n'avoir pas
plus d'un su deux navires en répara
tion.
Le Conseil d'Etat de Norvège a décidé,
de faire un emprunt d'Etat s'élevant à
35 millions de couronnes.
Des nouvelles assez contradictoires
arrivent de Colombie.
Le docteur Alban, qu'on représentait
hier comme devant livrer encore une
grande bataillei serait parti pour Bocca
fiel Toro afin de faire v.ne enquête sur
les mauvais traitements infligés- à l'é
quipage mgfois'de la, Tribune.
L'AFFAIRE HERVÉ
La sentence du conseil de l'ins
truction publique sur l'affaire Ilerfé
a démenti les espérances des en
nemis de l'armée et des anarchistes
qui soutenaient le professeur « sans
patrie ».
. On se rappelle que, devant le
conseil académique dé Dijon, où M.
Hervé avait été jugé une première
fois, la peine de la suspension
avait été prononcée contre lui pour
dix-huit mois, avec maintien des
deux cinquièmes du traitement; le
retrait d'emploi devait se transfor
mer en révocation si, au bout de
cette période, il n'y avait pas eu ré
intégration.
C'est de cejugementque M. Hervé
avait fait appel; et c'est pourquoi
il était convoqué hier matin à neuf
heures devant le .conseil supérieur
de l'instruction publique.
Nous avons dit que-, malgré les
conclusions de M° Briant, défenseur
de M. Hervé, qui invitaient le con
seil à casser le premier jugement
çt à renvoyer le prévenu devant un
autre conseil académique, le con
seil supérieur de l'instruction pu
blique avait évoqué l'affaire pour la
juger au fond.
Une nouvelle séance a donc eu
lieu à quatre heures de l'après-
midi.. Le conseil a ~ entendu M*
Briant et M. Hervé, qui avait pré
féré ne pas faire défaut.
Puis la discussion a recommencé
entre les membres du conseil. A
huit heures, l'arrêt était enfin, ren
du. Par 38 voix contre 13, M. Hervé
était frappé de la peine du retrait
d'emploi. Ce sera au ministre à ju
ger de la durée.
En définitive, le conseil supérieur
de l'instruction publique accentue
la condamnation relativement légère
prononcée par le conseil académi
que de Dijon.
Rappelons que M. Viviani inter
pellera le gouvernement à ce sujet
et que la fixation du jour de l'inter
pellation aura lieu lundi.
. Les journaux socialistes accueil
lent le jugement avec des impréca-,
tions de fureur.
!.. « Ils ont enchaîné la pensée et
l'étude ! » s'écrie sans sourciller la
Petite République en flétrissant de3
membres du conseil dé l'instruction
publique. En revanche les hommes
d'ordre approuveront la décision de
ce conseil. Il a bien fait d'avoir
cassé, d'avoir retenu, d'avoir ag
gravé.
AU JOUR LE JOUR
Tout n'est pas rose dans le métier de
roi et dans celui de reine.
La jeune reine de Hollande en fait au
jourd'hui l'expérience.
Depuis quelques jours, la presse de
tous les pays s'occupe de son ménage.
Le ménage royal marche mal, ont dit
les uns.
Le ménage royal marche bien, ont ré
pondu les autreB.
Et des millions d'hommes se préoccu
pent, depuis plus d'une semaine, de sa
voir si la reine de Hollande s'entend ou
ne s'entend pas avec le prince consort.
• Les dernières nouvelles étant plus ras
surantes, nous nous y arrêtons avec
plaisir.
Mais enfin, il est triste d'être con
damné, par sa situation, à être la proie
de potins élevés à leur plus haute puis
sance.
• a
M. Paul Leroy-Beaulieu, l'homme des
statistiques, n'est pas content du mouve
ment de la population en 1900.
e Jamais, dit le rédacteur en chef de
l'Economiste français, ces résultats sta
tistiques n'avaient été auBsi mauvais et
n'avaient fourni d'indications plus fâ
cheuses. »
Et plus loin : -
« Ce qui caractérise Tannée 1900, c'est
que le chiffre des naissances y est sensi
blement le plus bas que l'on ait vu, en
France, dans tout le courant du dix-neu
vième siècle, à la seule exception de
l'année 1871, année de la guerre... En
core le chiffre des naissances de l'année
1900 dépasse-t-il à peine de quelques
unités oelui de 1871. »
Comme on le voit, le dix-neuvième
siècle a tenu à finir dignement chez
nous, èt le règne de M. Waldeck-Rcus-
seau aura porté bonheur à ses derniers
moments.
Si cela continue, nous serons obligés,
pour repeupler la France, de faire venir
des Chinois, des boxeurs, de préférence,
pour faire plaisir à M. Iiubbard..
• •-
La plus grande crainte éu président
Magnaud, .c'est qu'on vienne à ne plus
parler de lui.
Parlons donc de « sa dernière ».
On accusait une femme d'avoir tenu
des propos diffamatoires à haute voix, de
vant plusieurs personnes, sur le compte
d'un lieHtenant-colonel.
: Poursuites de celui-ci. Le Salomon de
Chàteau-Tierry, devant les preuves
écrasantes qui accablaient la prévenue,
n'a pu faire autrement que de la con
damner. Mais il. l'a condamnée... à un
franc de dommages et intérêts.
. Ah ! si le diffamé, au lieu d'être un co
lonel, avait été un professeur anarchiste
comme M. Hervé, ou un publiciste aux
gages du ministère !
C'est alors que la dame eût été sa
lée !
On devine maintenant que les justi
ciables de M. Magnaud, « au prix où est
le beurre, » ne çe gêneront plus pour dif
famer les officiera supérieurs.
«Après être entré jusqu'aux épaules
dans le dreyfusisme, M. Labori cherche
à s'en évader. »
C'est ainsi que M. Rochefort dans l'In
transigeant apprécie l'attitude du célè
bre avocat de Dreyfus.
Mais, selon le même publiciste, M. La
bori ne sait pas s'y prendre.
Un avocat peut plaider la cause de
n'importe qui sans « entrer dans la peau
du bonhomme ». M. Labori est entré
dans la peau du bonhomme.
Le fameux Lachaud plaida brillam
ment la cause de Mme Lafarge. II n'a
pas épousé Mme Lafarge.
« La faute de M. Labori, conclut pitto»
resquement M. Rochefort, est d'avoir
épousé Dreyfus. »
Voilà un des cas où l'on peut "louer le
divorce. Mais, plus il est légitime, moinB
il est commode. M. Labori divorcera-t-
il? Ne divorcera-t-il pas?
• • ■
Au théâtre.
Monsieur. — Veux-tu la lorgnette ?
Madame. — Impossible, j'ai oublié
mon bracelet.
BisiDiBATÀ. m\m m ÂLimeiE
Le puissant essor imprimé au com
merce et à. l'industrie d« l 'Allemagne
inspirait depuis quelques années des in
quiétudes à certains esprits habitués à
songer au lendemain. La situation dans
laquelle se trouve en ce moment l'indus
trie, la crise longue et douloureuse
qu'elle traverse, leb désastres financiers
qui se succèdent semblent vouloir justi
fier les appréhensions qu'alors on était
tenté de croire trop pessimistes.
Le chômage a jeté son. sinistre réseau
sur la plupart des grandes villes, et, à
l 'approche ds l'hiver,on se demande avec
une certaine anxiété comment on viendra
en aide à ces milliers de sans travail.
Pendant que les associations cherchent
les moyens pratiques, les économistes
appellent l'attention du gouvernement
sur certaines lacunes qu'il est urgent de
combler. On remarque d'abord avec rai
son que depuis quelques années, malgré
le3 promesses faites, le gouvernement se
fait trop longtemps prier avant de pré
senter les projets de loi de réforme so
ciale. On ajoute avec une certaine malice
que toutes les fois qu'il se présente avec
l'une ou l'autre proposition dé ce genre,
c'est comme à son corps défendant, avec
une triste figure et avec un ton presque
larmoyant. Les temps semblent passés
où le message impérial à la Chambre ac
centuait d'une manière si précise les li
gnes d'une législation sagement protec
trice du monde du travail.
En présence des enquêtes ouvertes
pour établir le chiffre approximatif des
ouvriers condamnés au chômage, on fait
ressortir la nécessité d'un ministère du
travail, tel qu'il fonctionne depuis long
temps en Angleterre, tel que les catholi
ques l'ont établi en Belgique. Les enquê
tes sont nécessairement défectueuses ;
elles demandent trop de temps pour abou
tir, et bien souvent, qurnd elles sont pu
bliées, la situation a déjà singulièrement
changé. En Angleterre on publie chaque
mois les données fournies par le minis
tère du travail. Ces données permettent
aux intéressés- de formuler leur juge
ment et de prendre des résolutions prati
ques dans ce -sens. Pourquoi ne suivrait-
on pas en Allemagne un tel exemple ? La
crise actuelle n'est-elle pas une preuve
convaincante de la nécessité d'une telle
institution?
Cette institution rendrait plus facile
l'établissement de bureaux de placement
dont le besoin ou la grande utilité s'ac
centue chaque jour davantage. L'initia
tive privée a pris les devants avec la plus
généreuse ardeur : elle a multiplié les
bureaux de placement gratuits sur un
grand nombre de points de ^Allemagne;
beaucoup de villes ont obéi à la même
impulsion pour créer dans leur sein des
œuvreà assurant du travail aux ouvriers
réduits au chômage.; l'Allemagne du
Sud a surtout bien mérité des travail
leurs eo Û s ce rapport. Mais tous ceB es
sais, si louables et si bienfaisants, ne
suffisent pas, ils sont aussi trop isolés
pour permettre d'obtenir des résultats
plus, marquants. On demande donc au
gouvernement de mettre la main à 1 oeu
vre, d'étendre sa sollicitude sur l'empire
tout entier, de grouper toutes les bonnes,
volontés, toutes les initiatives, afin de
les rendre plus fortes, plus fécondes,
plus durables, d'imposer aux communes
l'accomplissement de ce devoir social.
La question d'assurance en faveur des
veuves et des orphelins doit de nouveau
préoccuper les hommes chargés. de dé
fendre au parlement les intérêts des po
pulations ouvrières. Tout le monde esta
peu près d'accord pour le principe : la
bonne volonté de tous conduira à une so
lution depuis longtemps si ardemment
désirée. On est plus prudent pour l'assu
rance contre le chômage. Pqreonne ne
méconnaît les difficultés presque insur
montables de cette question. Oa de
mande, donc une commission composée
de gens |du métier, capables de se pro
noncer en connaissance de cause, capa
bles aussi de fournir toutes les données
nécessaires à l'étude de cet intéressant
problème.
Que sortira=t-il de tous ces voeux ? La
tâche est lourde et pénible, mais les
hommes pour l'accomplir ne manquent
pas. Les catholiques, ici encore, sauront
être au premier rang pour rester et de
venir de plus en plus les défenseurs du
peuple chrétien.
II. C eïty,
LES " HICRQBES AURIFÈRES "
Il y a'encore, parait-il des alchimistes,
lesquels ont repris les traditions de Ni
colas Flamel, mais sans copier ses allu
res. Ce ne sont pas de vieux savants fri
leusement enveloppés dans des houppe
landes de velours, aux mains sèches
chargées de bagues, à la taille voûtée.
Ce sont des « modernes », jeunes et élé
gants, encore que le décor choisi par
eux soit digne de ces Bombres mélodra
mes où apparaît mystérieusement René
le Florentin.
C'est dans une vieille cité flamande,
toute parfumée de souvenirs du passé, à
Douai, que ces jeunes gens ont rallumé
les fourneaux éteints depuis tant de siè
cles. Ils se sont installés dans un de ces
grands hôtels muets comme il en existe
encore en province; et, là, ils ont procé
dé à leurs expériences auxquelles M. Ju
les Bois, du Matin, a obtenu l'enviable
privilège d'assister.
On a montré d'abord au journaliste
« une matière étrange d'un violet som
bre avec des points rouges ».
— Il nous est défendu, a dit un des
jeunes alchimistes, M. Jollivet-Castelot,
il nous est défendu de dire de quels élé
ments elle se compose. C'est la pierre
philosophale elle-même.
Toilt..- ban» MAAst 9.. - -••• .
Là-dessus, ledit M. Jollivet a pris
du mercure, du plomb, de l'étain, les a
fondus dans une coupelle et y a jeté un
fragment de la pierre philosophale.
t -Alors, ajoute M. Bois, j'assiste à
une hallucinante opération. Devant moi>
le métal s'épaissit,-devient boueux, se
contracte... et soudain une pellicule se
forme à la surface, nettement dorée.
O joie, ô triomphe, ô mystère !
comme dit M. Scribe dans ses livrets
d'opéra.
Est-ce dono de l'or?Non! ® L'amalgame
se résout en un prisme de nuances étran
ges. »
— C'est bien de l'or, dit M. Jollivet,
mais de l'or provisoire, de l'or passager;
il s'est formé, puis il s'est dissous !...
Et il ajoute avec une certaine mélan
colie :
— Nous en sommes encore à chercher
de l'or stable, mais nous ne désespérons
Il parait, en effet, que cès messieurs
iallaient trouver de l'or stable, lorsqu'un
refroidissement brusque du four, dû à la
négligence d'un garçon du laboratoire, se
produisit. Tout était perdu.
*
e « ■/„• ■
Est-ce bien le garçon du laboratoire
qui fut le coupable dans l'espèce? Un
vieil alchimiste de Grenelle (il y en a
aussi à Grenelle) n'a jamais pu faire de
l'or à Paris, mais au Mexique, il en fa
briquait, à l'en croire, tant qu'il voulait.
Si ses expériences ont échoué ici, c'est
que, d'après lui, l'air de Paris n'est pas
favorable aux « microbes aurifères ».
C'est dommage.
J. M.
»T
CORRESPONDANCE ROHAINE
Le congrès da Eologna(*).
L'embrigadement socialiste des paysans
— Office central de statistique pour l'é
migration interne. — L'aveuglement des
hommes au pouvoir. — De Cavour à Gio
litti. — « Le salut est dans la démocratie
chrétienne. »
L'embrigadement socialiste des
paysans fut complété le lendemain,
lorsqu'on discuta le question de
l'adhésion des ligues aux cham
bres de travail. On sait que, dans
chaque centre industriel, les socia
listes ont organisé la Fédération
des syndicats d'ouvriers, et que ces
fédérations urbaines, en même
temps d'ailleurs que leur siège so
cial, portent le nom de chambres
de travail — organisation encore
illégale jusqu'ici.
Après discussion, il fut convenu
que les Ligues de paysans seraient
invitées, sans y être forcées, à
adhérer aux chambres .de travail.
*
♦
Il y a eu d'autres délibérations de
moindre importance.
Les statuts de la Fédération pré
cisent en 2*2 articles le but, la propa
gande, la discipline, la solidarité,
les décisions de grèves, les contri
butions. Les organismes delà Fé
dération comprennent le secrétar
riat, les congrès, le comité exécu
tif qui est composé de onze mem
bres, dont six paysans authenti
ques et dont le siège a été fixé à
Bologne.
Puis les congressistes ont enten
du et approuvé rapidement des rap
ports sur les patti colonici, sur l'hy-
fiène, sur les « conseils de pru-
'hommes » agricoles.
Enfin il a été constitué près du
comité exécutif, un office de statis
tique chargé de recueillir et de
fournir les renseignements les plus
détaillés sur l'offre et la demande
du travail, ses conditions* etc.,
dans les différentes régions de la
péninsule. Cet office de statistique
doit par là diriger « l'émigration in
terne » dont Tes paysans avaient
tous à se plaindre.
Nous nous sommes étendus as
sez longuement sur ce congrès parce
qu'il apparaît comme un événement
social de première importance.
Sur le papier tout au moins, s'est
achevée la concentration des forces
(*) Voir VUnivers du 4 décembre.
socialistes des villes et des campa
gnes, mettant désormais entre les
mains de quelques meneurs une ar
mée formidable toujours prête pour
la. mobilisation.
Et vraiment à la vue de ce spec
tacle, on' comprend l'indignation et
le désespoir des modérés antimi
nistériels. Ils relèvent avec véhé
mence cet éloge. décerné par l'çtn
des orateurs du congrès au minis
tre Giolitti : « L'extension des Li-
fues est due à la méthode libérala
u ministre actuel de l'intérieur. »
Le Nûovo Fanfulla de Rome dé-'
plore cet aveuglement :
« C'est une vraie trahison de la
monarchie, s'écrie-t-il, consommée
par un ministre du roi. » Et ce
journal rapproche du congrès de
Bologne ou on laisse s'organiser
les forces offensives, le hideux pro
cès de Vérone où le gouvernement;
laisse se consommer la désorgani
sation de l'armée, dont les officiers
sont traînés dans la fange par les
mêmes députés et journaux so
cialistes. a II {n'y a plus rien de
sacré en Italie, conclut-il, il n'y a
plus rien qu'on défende contre les
subversifs, ni la propriété, ni l'ar
mée, ni la monarenie. Le nihilisme
1ÉV* j"kîn o dûpriiwant JUvi 61ÛO.
ce ministère, dont la. pierre angu
laire est l'ami des partis anticonsti
tutionnels, l'homme vers qui les
socialistes de la terre font monter
leurs éloges et leurs hymnes, Jean
Giolitti.»
Cette fureur est bien belle ; mais
oii se demande comment pourrait
s'y prendre un gouvernement libé
ral pour entraver, sans manquer à
ses principes et se nier lui-même,
et cette organisation des adversai
res, et cette désorganisation des
! défenseurs d'un régime fondé suc
la révolution. La Voce. delta Veritk
rappelle que « de Cavour à Giolitti »
la descente est logique et que les
différences sont moins profondes
que ne veulent le voir les libéraux.
Contre la propagande socialiste
dans les campagnes, il ne suffirait
même pas de prendre les demi-me
sures indiquées par la Lega Lom-
barda : dégrèvement des impôts qui
écrasent les paysans, lois hygiéni
ques qui diminueraient les dépen
ses communales d'hospitalisation,;
introduction de bonnes méthodes
d'agriculture qui augmenteraient le
rendement de la terre.
Le mal est plus profond ; il no
pourrait se guérir, et l'Italie ne
pourrait éviter le cataclysme chaque
jour plus menaçant que par une
large et énergique diffusion de la
doctrine et de l'action intégralement
catholiques.
La Voce délia Veritk fait à ce
propos des réflexions opportunes :
« Le phénomène politique ne nous
préoccupe pas autant que le phéno
mène social. Les socialistes orga-'
nisent sérieusement les travailleurs
de la terre, la plus grande force
numérique qui existe en ce pays
agricole par excellence. Pour ces
travailleurs, la démocratie chré
tienne a déjà fait beaucoup. Les
caisses rurales sont une œuvre de
bienfaisance locale, mais elles peu
vent en outre devenir les anneaux
d'une organisation des paysans ita
liens, sur la base de la justice et de
la civilisation chrétiennes. »
Et elle précise l'un des points de.
l'action catholique italienne dont
nous avons plus d'une fois déjà
proposé les admirables exemples ;
« Il y a aujourd'hui tant à faire ! Il
faut que, sans perdre de temps, on
organise ces comités paroissiaux
qui voient s'ouvrir devant eux un
immense champ d'activité, non seu
lement religieux, mais aussi écono
mique. Sur nos ennemis, nous
avons déjà l'avantage d'une orga
nisation préexistante : l'organisa
tion paroissiale. La grande majo
rité des paroisses ont leur titulaire;
souvent les plus importantes ont
deux ou trois prêtres. D'un bout à
l'autre de l'Italie, sur dixmille points
en même temps, on peut donc met
tre la main tout de suite à cette
première organisation qui prépa
rera les éléments pour le jour où
l'on pourra coordonner nos popu
lations rurales. Elles sont chrétten-
nes, elles aiment la terre. Dès lors,
quoi de plus pratique et de plus
juste que l'idéal de la démocratie
chrétienne qui dans la question de
la terre entend respecter la pro
priété, combattre les abus du « la-
tifundisme », de l'absentéisme, de
l'usure, et propager le métayage et
la petite propriété suffisante?»
Ce programme est très pratique.
Et c'est pourquoi — sans entrer
davantage dans des polémiques
personnelles qui viennent de surgir
ici, très irritantes — il nous plaît
de terminer par ces paroles de
l'abbé Vercesi dans YOsservatore
cattolico. « Je crains bien que nous
n'arrivions trop tard, si on ne laisse
pas travailler en paix les hommes
ae bonne volonté. Tandis que nous
avons la maisen qui brûle, il y a
des gens chez nous qui ne remuent
pas un doigt pouf éteindre le feu, et
gui se divertissent à faire la guerre
à coups d'épingles contre eux qui
veulent agir. On se sent envahi par.
un vrai découragement en face de
certaines constatations tandis que
les autres partis, au plus fort de
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
ET départements (union postale)..
Un an..7 25 » ,35 »
Six mois 13 » 18 »
Trois mois- 7. » 10. »
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On s'abonne à Rome, place du Gesùj â
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Edition'quotidienne — 12,33 T
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Dimanche 8 Décembre 1901
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Un an.. 13 » 20 »^ L ; s
Six mois 7 » 11 » ? * - f
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LE MONDE
Les abonnemënta partent des 1" et 16 de chaque moia
L'UNIVERS ne rêpondpas des manuscrits qui luijont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C !e , 6, place de la Bourse
PARIS, 7 .'DECEMBRE 1901
SOMMAIRE'
Pierre Véuillot.
II. Cettt.
J. M.
J. ëstérag.
Le Chambardement.
Desiderata sociaux
en Allemagne....
Correspondance ro
mains
A la Chambre.....
Au Sénat............
Chronique des mis
sions Ls Témoin.
Les conférences du
Luxembourg..... Edouard Alexandre
Bulletin. — L'affaire Hervé. —■ Au.jonr
le jour. — Les microbes aurifères. —
Les congrégations.^ — Les attaques
contre le clergé. — Informations poli
tiques et parlementaires. — A l'IIôtel
de Ville. — Le congrès de Bourges. —
A la Guadeloupe. — Les affaires de
Chine. — La guerre du Transvaal. —
: Etranger. — Miss Stone. — A travers la
presse. — Les explications de M e La
bori. — La question ouvrière. — Let
tres, sciences et arts. — Cours et con
férences. — Echos de partout. . L'u
nion ornaise. — Chronique religieuse. —
Nécrologie. — Guerre et marine. — Tri-
buijaus. — Nouvelles diverges. — Jardin
d'acclimatation. — Calendrier. — Tableau
et bulletin de la Bourse. — Dernière
heur?. - .
LE CHÂMSÂRDE1ENT
Ceux qui espèrent de M 0 Labori
des révélations très importantes
courent grand risque d'être déçus.
Dans les articles qu'il a déjà don
nés au Journal, on trouve des ré
criminations emportées ou dolentes,
mais vagues; parfois, aù coin d'un
paragraphe, luit une velléité de me
nace, vague aussi; et c'est tout. On
n'apprend rien. Nous croyons bien
que la suite ne nous émotionnera
point davantage. '
M" Labori ne nous fera pas entrer
dans les arcanes du grand complot.
C'est peut-être, c'est même proba
blement parce que le grand com
plot, tel que l 'ont rêvé certains ro
manciers politiques, n'a'jamais
existé. Ou si M.-Joseph Reinacha
tramé une immense conjuration, il
n 'a pas mis M" Labori dans. la con^
fidence. Et l'on devrait en conclure
que l'ancien député des Basses-Al
pes ne manque pas de quelque pers
picacité.
Il n'avait cependant pas tout
prévu. Quand il nous menaçait du
« chambardement », M. Reinach ne
se doutait point qu'avant d'avoir
réussi au gré de ses désirs, il ver
rait les dissensions intestines cham
barder son ouvrage. Et voilà ce qui
arrive. « Ça se, décolle, » pour em-
Eloyer l'expression de Gambetta.
.'ancien favori du grand opportu
niste peut se répéter tristement,ces
jours-ci, les trois mots fameux de
son maître.
. Ça se décolle, parce que ça devait
se décoller. N'oublions point que
les tenants de Dreyfus étaient venus
de côtés divers, et pas tous dans
les mêmes intentions ni obéissant
à dea mobiles identiques. Il fallait
bien qu'ils finissent par s'en re
tourner là d'où ils étaient venus. De
pareilles séparations ne s'opèrent
jamais sans quelques éclats de
mauvaise humeur, agrémentés de
reproches mutuels.
D'abord, il y a eu les sincères et
ceux qui ne l'étaient point. Ceux-ci,
qu'on a le droit, n'est-il pas vrai?
de supposer les plus nombreux,
put- été attirés par l'espoir d'un joli
bénéfice matériel, ou par l'idée de
tirer profit du mouvement' pour
leurs vues et passions politiques.
Ces derniers, ayant en effet réussi
à rendre pleinement le pouvoir aux
sectaires et jacobins, ne s'occu
pent pas plus de Dreyfus qu'on ne
songe à tirer après soi !e tremplin
qui vous a permis de franchir un
obstacle. Les autres, ceux qui vou
laient empocher,, trouvent que les
distributeurs ont -cessé beaucoup.
trop tôt la répartition de la manne
israélite. .Et comme, à travailler
pour M. Reinàch et Cie, ils ont per
du leurs amis ou leurs clients, ils
estiment que le désert sans manne
est une résidence inhabitable. Nom
bre d'entre eux partent donc, en
faisant claquer la porte, si toutefois
l'on peut admettre qu'il y ait des por
tes au désert.
Quelques-uns restent encore, ce
pendant. Ils espèrent, chaque jour
un peu moins, que, bientôt, on rou
vrira la caisse, à nouveau rem
plie.
Voilà pour ceux qui ne furent
pas sincères. Passons maintenant
a ceux qui l'ont été, ou à peu près.
Il y en a eu.
Là encore, on doit établir une
distinction. Une partie de ces hom
mes qui, à force de se suggestion
ner eux-mêmes, ont fini par croire
qu'ils croyaient servir la justice ou
un intérêt avouable, obéissait à une
apparence de principe ou à un sen
timent de race. Au nombre et en
tête de ces derniers, nous ont as
suré des personnes dignes de foi,
il faut mettre M. Reinach. Il a sin
cèrement voulu servir, dans cette
affaire, la cause juive. Les juifs
étaient déjà suffisamment honnis et
haïs. M. Reinach n'a pas pu suppor
ter que la condamnation de Drey
fus leur portât plits grand préju
dice encore. Dreyfus devait donc
être innocenté. Sacrifiant tout à ce
but, l'ancien député des Basses-
Alpes, vraiment ici criminel envers,
la patrie, s'écriait, et dit toujours
sans doute : — Périsse plutôt la
France...
Mais d'autres, M. Labori proba
blement et M. Picquart,.cette énig
me, ne se proposaient pas desau*
ver Israël. C'était Dreyfus même
qui les intéressait. A un moment
quelconque, cette pensée leur est
venue: — Si, pourtant, ce malheu
reux n'est pas coupable?... Et l'on
comprend le travail de leur cer
veau : Il n'a pas été jugé suivant
les formes; sommes-nous sûrs,
même, qu'il soit coupable; peut-
être ne l'est-il pas; il ne doit pas
l 'être; il ne l'est point... L'idée ob
sédante s'est emparée d'eux; l'autor
suggestion a fait son oeuvre ; ils sont
partis.
Donc,ils s'intéressaient aDreyfus,
à la « victime ». Quel désenchante
ment, lorsqu'ils l'ont vu ! De l'avis
même de ses partisans les plus
chauds, Dreyfus est au suprême
degré l'être antipathique. Visage et
cœur. : fermés, âme haut &iE .é - et
sèche, abord glacial, attitude dé
plaisante et louche, tout en lui, in
vinciblement, provoque la répulsion.
.— Quoi, c'est là notre héros! se
sont dit MM. Labori et Picquart.
C'est pour cet individu que j'ai tout
sacrifié!... Si j'avais su!...
Quand on s'écrie ; Si j'avais, su !...
le dénouement peut tarder plus ou
moins, il est désormais inévitable.
L'ingratitude morale et matérielle
de ceux qu'on regrette déjà ,d'avoir
servis à ses dépens ne fait que pré
cipiter la rupture. On est dans une
disposition d'esprit à s'exagérer les
mauvais procédés, à voir partout
de ténébreux desseins et de noires
traîtrises. Un beau jour, on éclate.
M. Picquart se contient encore, à
peuprè3. M 0 Labori a des parois
moins solides. Il vient de faire ex
plosion.
Nous n'apprendrons pas grand'-
chose. Mais de cette, querelle, il
peut résulter que les sectaires s'en
tendent un peu moins. Tâchons
d'en profiter, entre honnêtes gens,
pour nous entendre de mieux en
mieux.
Pierré V euiIiLot.
TULLE7IN
La grande interpellation sur la crise
viticole s'est terminée, à la Chambre,par
un ordre du jour confiant à une com
mission, qui sera nommée mardi, le
soin de faire une enquête sur les cau
ses de la crise et sur les remèdes à y ap
porter.
Le Sénat, en une séance de deux heu
res, a discuté^ et voté, par 22b voix con
tre !i3, le projet du gouvernement sur
l'emprunt de Chine.
La commission du suffrage.universel,
après avoir entendu M. Waldeck Rous
seau et contrairement à ses conclusions,
a voté, par 7 voix contre 5, le rétablisse
ment du scrutin de liste.
C'est Ik une manifestation très plato
nique; il ne fait doute pour personne
que la Chambre refusera de suivre sa
commission et qu'elle maintiendra, pour
les élections prochaines, le scrutin d'ar
rondissement.
Le conseil supérieur de Vinstruction
publique a admis l'appel du citoyen
Hervé le « sans patrie » de l'Yonne, lia
cassé la sentence du conseil acàdérni-
que de Dijon pour avoir soustrait cer
taines pièces du dossier à l'accusé, mais,
retenant l'affaire au fond, il a aggravé
la peine primitive, et mis le professeur
de Sens en retrait d'emploi.
Le conseil supérieur, doit être félicité
pour ces deux décisions.
Un tumultueux débat a été soulevé, à
la - Chambre italienne, à propos du
transfert à Palerme du corps de Crispi.
. ' Radicaux et sectaires ont fait assaut
de dithyrambes en l'honneur d,u con
dottiere si malfaisant pour son pays ]
les socialistes ont protesté violemment
contre le politicien brutal qui se mon-'
ira, au pouvoir, si impitoyable pour ses
anciens complices.
\ Le groupe polonais du Reichstag in
terpellera mardi sur les châtiments in
fligés aux écoliers de Wreschen.
( L'opinion publique est assez .émue de
l'agitation antiallemande qui vient de
■se manifester à Lemberg et à Varso
vie. ■ -
Elle s'émeut aussi delà crise indus
trielle et financière : la fermeture de la
Banque d'épargne de Dresde entraîne
une perte de près de 82 millions pour
les déposants.
Le duc de Northumberland a déclaré
jeudi, dans un discours au banquet des
voyageurs de commerce,que les Anglais
sont inférieurs avx autres peuples pour
l'habileté manuelle.
Il est question de tenir mobilisée l'es
cadre de la Manche et de n'avoir pas
plus d'un su deux navires en répara
tion.
Le Conseil d'Etat de Norvège a décidé,
de faire un emprunt d'Etat s'élevant à
35 millions de couronnes.
Des nouvelles assez contradictoires
arrivent de Colombie.
Le docteur Alban, qu'on représentait
hier comme devant livrer encore une
grande bataillei serait parti pour Bocca
fiel Toro afin de faire v.ne enquête sur
les mauvais traitements infligés- à l'é
quipage mgfois'de la, Tribune.
L'AFFAIRE HERVÉ
La sentence du conseil de l'ins
truction publique sur l'affaire Ilerfé
a démenti les espérances des en
nemis de l'armée et des anarchistes
qui soutenaient le professeur « sans
patrie ».
. On se rappelle que, devant le
conseil académique dé Dijon, où M.
Hervé avait été jugé une première
fois, la peine de la suspension
avait été prononcée contre lui pour
dix-huit mois, avec maintien des
deux cinquièmes du traitement; le
retrait d'emploi devait se transfor
mer en révocation si, au bout de
cette période, il n'y avait pas eu ré
intégration.
C'est de cejugementque M. Hervé
avait fait appel; et c'est pourquoi
il était convoqué hier matin à neuf
heures devant le .conseil supérieur
de l'instruction publique.
Nous avons dit que-, malgré les
conclusions de M° Briant, défenseur
de M. Hervé, qui invitaient le con
seil à casser le premier jugement
çt à renvoyer le prévenu devant un
autre conseil académique, le con
seil supérieur de l'instruction pu
blique avait évoqué l'affaire pour la
juger au fond.
Une nouvelle séance a donc eu
lieu à quatre heures de l'après-
midi.. Le conseil a ~ entendu M*
Briant et M. Hervé, qui avait pré
féré ne pas faire défaut.
Puis la discussion a recommencé
entre les membres du conseil. A
huit heures, l'arrêt était enfin, ren
du. Par 38 voix contre 13, M. Hervé
était frappé de la peine du retrait
d'emploi. Ce sera au ministre à ju
ger de la durée.
En définitive, le conseil supérieur
de l'instruction publique accentue
la condamnation relativement légère
prononcée par le conseil académi
que de Dijon.
Rappelons que M. Viviani inter
pellera le gouvernement à ce sujet
et que la fixation du jour de l'inter
pellation aura lieu lundi.
. Les journaux socialistes accueil
lent le jugement avec des impréca-,
tions de fureur.
!.. « Ils ont enchaîné la pensée et
l'étude ! » s'écrie sans sourciller la
Petite République en flétrissant de3
membres du conseil dé l'instruction
publique. En revanche les hommes
d'ordre approuveront la décision de
ce conseil. Il a bien fait d'avoir
cassé, d'avoir retenu, d'avoir ag
gravé.
AU JOUR LE JOUR
Tout n'est pas rose dans le métier de
roi et dans celui de reine.
La jeune reine de Hollande en fait au
jourd'hui l'expérience.
Depuis quelques jours, la presse de
tous les pays s'occupe de son ménage.
Le ménage royal marche mal, ont dit
les uns.
Le ménage royal marche bien, ont ré
pondu les autreB.
Et des millions d'hommes se préoccu
pent, depuis plus d'une semaine, de sa
voir si la reine de Hollande s'entend ou
ne s'entend pas avec le prince consort.
• Les dernières nouvelles étant plus ras
surantes, nous nous y arrêtons avec
plaisir.
Mais enfin, il est triste d'être con
damné, par sa situation, à être la proie
de potins élevés à leur plus haute puis
sance.
• a
M. Paul Leroy-Beaulieu, l'homme des
statistiques, n'est pas content du mouve
ment de la population en 1900.
e Jamais, dit le rédacteur en chef de
l'Economiste français, ces résultats sta
tistiques n'avaient été auBsi mauvais et
n'avaient fourni d'indications plus fâ
cheuses. »
Et plus loin : -
« Ce qui caractérise Tannée 1900, c'est
que le chiffre des naissances y est sensi
blement le plus bas que l'on ait vu, en
France, dans tout le courant du dix-neu
vième siècle, à la seule exception de
l'année 1871, année de la guerre... En
core le chiffre des naissances de l'année
1900 dépasse-t-il à peine de quelques
unités oelui de 1871. »
Comme on le voit, le dix-neuvième
siècle a tenu à finir dignement chez
nous, èt le règne de M. Waldeck-Rcus-
seau aura porté bonheur à ses derniers
moments.
Si cela continue, nous serons obligés,
pour repeupler la France, de faire venir
des Chinois, des boxeurs, de préférence,
pour faire plaisir à M. Iiubbard..
• •-
La plus grande crainte éu président
Magnaud, .c'est qu'on vienne à ne plus
parler de lui.
Parlons donc de « sa dernière ».
On accusait une femme d'avoir tenu
des propos diffamatoires à haute voix, de
vant plusieurs personnes, sur le compte
d'un lieHtenant-colonel.
: Poursuites de celui-ci. Le Salomon de
Chàteau-Tierry, devant les preuves
écrasantes qui accablaient la prévenue,
n'a pu faire autrement que de la con
damner. Mais il. l'a condamnée... à un
franc de dommages et intérêts.
. Ah ! si le diffamé, au lieu d'être un co
lonel, avait été un professeur anarchiste
comme M. Hervé, ou un publiciste aux
gages du ministère !
C'est alors que la dame eût été sa
lée !
On devine maintenant que les justi
ciables de M. Magnaud, « au prix où est
le beurre, » ne çe gêneront plus pour dif
famer les officiera supérieurs.
«Après être entré jusqu'aux épaules
dans le dreyfusisme, M. Labori cherche
à s'en évader. »
C'est ainsi que M. Rochefort dans l'In
transigeant apprécie l'attitude du célè
bre avocat de Dreyfus.
Mais, selon le même publiciste, M. La
bori ne sait pas s'y prendre.
Un avocat peut plaider la cause de
n'importe qui sans « entrer dans la peau
du bonhomme ». M. Labori est entré
dans la peau du bonhomme.
Le fameux Lachaud plaida brillam
ment la cause de Mme Lafarge. II n'a
pas épousé Mme Lafarge.
« La faute de M. Labori, conclut pitto»
resquement M. Rochefort, est d'avoir
épousé Dreyfus. »
Voilà un des cas où l'on peut "louer le
divorce. Mais, plus il est légitime, moinB
il est commode. M. Labori divorcera-t-
il? Ne divorcera-t-il pas?
• • ■
Au théâtre.
Monsieur. — Veux-tu la lorgnette ?
Madame. — Impossible, j'ai oublié
mon bracelet.
BisiDiBATÀ. m\m m ÂLimeiE
Le puissant essor imprimé au com
merce et à. l'industrie d« l 'Allemagne
inspirait depuis quelques années des in
quiétudes à certains esprits habitués à
songer au lendemain. La situation dans
laquelle se trouve en ce moment l'indus
trie, la crise longue et douloureuse
qu'elle traverse, leb désastres financiers
qui se succèdent semblent vouloir justi
fier les appréhensions qu'alors on était
tenté de croire trop pessimistes.
Le chômage a jeté son. sinistre réseau
sur la plupart des grandes villes, et, à
l 'approche ds l'hiver,on se demande avec
une certaine anxiété comment on viendra
en aide à ces milliers de sans travail.
Pendant que les associations cherchent
les moyens pratiques, les économistes
appellent l'attention du gouvernement
sur certaines lacunes qu'il est urgent de
combler. On remarque d'abord avec rai
son que depuis quelques années, malgré
le3 promesses faites, le gouvernement se
fait trop longtemps prier avant de pré
senter les projets de loi de réforme so
ciale. On ajoute avec une certaine malice
que toutes les fois qu'il se présente avec
l'une ou l'autre proposition dé ce genre,
c'est comme à son corps défendant, avec
une triste figure et avec un ton presque
larmoyant. Les temps semblent passés
où le message impérial à la Chambre ac
centuait d'une manière si précise les li
gnes d'une législation sagement protec
trice du monde du travail.
En présence des enquêtes ouvertes
pour établir le chiffre approximatif des
ouvriers condamnés au chômage, on fait
ressortir la nécessité d'un ministère du
travail, tel qu'il fonctionne depuis long
temps en Angleterre, tel que les catholi
ques l'ont établi en Belgique. Les enquê
tes sont nécessairement défectueuses ;
elles demandent trop de temps pour abou
tir, et bien souvent, qurnd elles sont pu
bliées, la situation a déjà singulièrement
changé. En Angleterre on publie chaque
mois les données fournies par le minis
tère du travail. Ces données permettent
aux intéressés- de formuler leur juge
ment et de prendre des résolutions prati
ques dans ce -sens. Pourquoi ne suivrait-
on pas en Allemagne un tel exemple ? La
crise actuelle n'est-elle pas une preuve
convaincante de la nécessité d'une telle
institution?
Cette institution rendrait plus facile
l'établissement de bureaux de placement
dont le besoin ou la grande utilité s'ac
centue chaque jour davantage. L'initia
tive privée a pris les devants avec la plus
généreuse ardeur : elle a multiplié les
bureaux de placement gratuits sur un
grand nombre de points de ^Allemagne;
beaucoup de villes ont obéi à la même
impulsion pour créer dans leur sein des
œuvreà assurant du travail aux ouvriers
réduits au chômage.; l'Allemagne du
Sud a surtout bien mérité des travail
leurs eo Û s ce rapport. Mais tous ceB es
sais, si louables et si bienfaisants, ne
suffisent pas, ils sont aussi trop isolés
pour permettre d'obtenir des résultats
plus, marquants. On demande donc au
gouvernement de mettre la main à 1 oeu
vre, d'étendre sa sollicitude sur l'empire
tout entier, de grouper toutes les bonnes,
volontés, toutes les initiatives, afin de
les rendre plus fortes, plus fécondes,
plus durables, d'imposer aux communes
l'accomplissement de ce devoir social.
La question d'assurance en faveur des
veuves et des orphelins doit de nouveau
préoccuper les hommes chargés. de dé
fendre au parlement les intérêts des po
pulations ouvrières. Tout le monde esta
peu près d'accord pour le principe : la
bonne volonté de tous conduira à une so
lution depuis longtemps si ardemment
désirée. On est plus prudent pour l'assu
rance contre le chômage. Pqreonne ne
méconnaît les difficultés presque insur
montables de cette question. Oa de
mande, donc une commission composée
de gens |du métier, capables de se pro
noncer en connaissance de cause, capa
bles aussi de fournir toutes les données
nécessaires à l'étude de cet intéressant
problème.
Que sortira=t-il de tous ces voeux ? La
tâche est lourde et pénible, mais les
hommes pour l'accomplir ne manquent
pas. Les catholiques, ici encore, sauront
être au premier rang pour rester et de
venir de plus en plus les défenseurs du
peuple chrétien.
II. C eïty,
LES " HICRQBES AURIFÈRES "
Il y a'encore, parait-il des alchimistes,
lesquels ont repris les traditions de Ni
colas Flamel, mais sans copier ses allu
res. Ce ne sont pas de vieux savants fri
leusement enveloppés dans des houppe
landes de velours, aux mains sèches
chargées de bagues, à la taille voûtée.
Ce sont des « modernes », jeunes et élé
gants, encore que le décor choisi par
eux soit digne de ces Bombres mélodra
mes où apparaît mystérieusement René
le Florentin.
C'est dans une vieille cité flamande,
toute parfumée de souvenirs du passé, à
Douai, que ces jeunes gens ont rallumé
les fourneaux éteints depuis tant de siè
cles. Ils se sont installés dans un de ces
grands hôtels muets comme il en existe
encore en province; et, là, ils ont procé
dé à leurs expériences auxquelles M. Ju
les Bois, du Matin, a obtenu l'enviable
privilège d'assister.
On a montré d'abord au journaliste
« une matière étrange d'un violet som
bre avec des points rouges ».
— Il nous est défendu, a dit un des
jeunes alchimistes, M. Jollivet-Castelot,
il nous est défendu de dire de quels élé
ments elle se compose. C'est la pierre
philosophale elle-même.
Toilt..- ban» MAAst 9.. - -••• .
Là-dessus, ledit M. Jollivet a pris
du mercure, du plomb, de l'étain, les a
fondus dans une coupelle et y a jeté un
fragment de la pierre philosophale.
t -Alors, ajoute M. Bois, j'assiste à
une hallucinante opération. Devant moi>
le métal s'épaissit,-devient boueux, se
contracte... et soudain une pellicule se
forme à la surface, nettement dorée.
O joie, ô triomphe, ô mystère !
comme dit M. Scribe dans ses livrets
d'opéra.
Est-ce dono de l'or?Non! ® L'amalgame
se résout en un prisme de nuances étran
ges. »
— C'est bien de l'or, dit M. Jollivet,
mais de l'or provisoire, de l'or passager;
il s'est formé, puis il s'est dissous !...
Et il ajoute avec une certaine mélan
colie :
— Nous en sommes encore à chercher
de l'or stable, mais nous ne désespérons
Il parait, en effet, que cès messieurs
iallaient trouver de l'or stable, lorsqu'un
refroidissement brusque du four, dû à la
négligence d'un garçon du laboratoire, se
produisit. Tout était perdu.
*
e « ■/„• ■
Est-ce bien le garçon du laboratoire
qui fut le coupable dans l'espèce? Un
vieil alchimiste de Grenelle (il y en a
aussi à Grenelle) n'a jamais pu faire de
l'or à Paris, mais au Mexique, il en fa
briquait, à l'en croire, tant qu'il voulait.
Si ses expériences ont échoué ici, c'est
que, d'après lui, l'air de Paris n'est pas
favorable aux « microbes aurifères ».
C'est dommage.
J. M.
»T
CORRESPONDANCE ROHAINE
Le congrès da Eologna(*).
L'embrigadement socialiste des paysans
— Office central de statistique pour l'é
migration interne. — L'aveuglement des
hommes au pouvoir. — De Cavour à Gio
litti. — « Le salut est dans la démocratie
chrétienne. »
L'embrigadement socialiste des
paysans fut complété le lendemain,
lorsqu'on discuta le question de
l'adhésion des ligues aux cham
bres de travail. On sait que, dans
chaque centre industriel, les socia
listes ont organisé la Fédération
des syndicats d'ouvriers, et que ces
fédérations urbaines, en même
temps d'ailleurs que leur siège so
cial, portent le nom de chambres
de travail — organisation encore
illégale jusqu'ici.
Après discussion, il fut convenu
que les Ligues de paysans seraient
invitées, sans y être forcées, à
adhérer aux chambres .de travail.
*
♦
Il y a eu d'autres délibérations de
moindre importance.
Les statuts de la Fédération pré
cisent en 2*2 articles le but, la propa
gande, la discipline, la solidarité,
les décisions de grèves, les contri
butions. Les organismes delà Fé
dération comprennent le secrétar
riat, les congrès, le comité exécu
tif qui est composé de onze mem
bres, dont six paysans authenti
ques et dont le siège a été fixé à
Bologne.
Puis les congressistes ont enten
du et approuvé rapidement des rap
ports sur les patti colonici, sur l'hy-
fiène, sur les « conseils de pru-
'hommes » agricoles.
Enfin il a été constitué près du
comité exécutif, un office de statis
tique chargé de recueillir et de
fournir les renseignements les plus
détaillés sur l'offre et la demande
du travail, ses conditions* etc.,
dans les différentes régions de la
péninsule. Cet office de statistique
doit par là diriger « l'émigration in
terne » dont Tes paysans avaient
tous à se plaindre.
Nous nous sommes étendus as
sez longuement sur ce congrès parce
qu'il apparaît comme un événement
social de première importance.
Sur le papier tout au moins, s'est
achevée la concentration des forces
(*) Voir VUnivers du 4 décembre.
socialistes des villes et des campa
gnes, mettant désormais entre les
mains de quelques meneurs une ar
mée formidable toujours prête pour
la. mobilisation.
Et vraiment à la vue de ce spec
tacle, on' comprend l'indignation et
le désespoir des modérés antimi
nistériels. Ils relèvent avec véhé
mence cet éloge. décerné par l'çtn
des orateurs du congrès au minis
tre Giolitti : « L'extension des Li-
fues est due à la méthode libérala
u ministre actuel de l'intérieur. »
Le Nûovo Fanfulla de Rome dé-'
plore cet aveuglement :
« C'est une vraie trahison de la
monarchie, s'écrie-t-il, consommée
par un ministre du roi. » Et ce
journal rapproche du congrès de
Bologne ou on laisse s'organiser
les forces offensives, le hideux pro
cès de Vérone où le gouvernement;
laisse se consommer la désorgani
sation de l'armée, dont les officiers
sont traînés dans la fange par les
mêmes députés et journaux so
cialistes. a II {n'y a plus rien de
sacré en Italie, conclut-il, il n'y a
plus rien qu'on défende contre les
subversifs, ni la propriété, ni l'ar
mée, ni la monarenie. Le nihilisme
1ÉV* j"kîn o dûpriiwant JUvi 61ÛO.
ce ministère, dont la. pierre angu
laire est l'ami des partis anticonsti
tutionnels, l'homme vers qui les
socialistes de la terre font monter
leurs éloges et leurs hymnes, Jean
Giolitti.»
Cette fureur est bien belle ; mais
oii se demande comment pourrait
s'y prendre un gouvernement libé
ral pour entraver, sans manquer à
ses principes et se nier lui-même,
et cette organisation des adversai
res, et cette désorganisation des
! défenseurs d'un régime fondé suc
la révolution. La Voce. delta Veritk
rappelle que « de Cavour à Giolitti »
la descente est logique et que les
différences sont moins profondes
que ne veulent le voir les libéraux.
Contre la propagande socialiste
dans les campagnes, il ne suffirait
même pas de prendre les demi-me
sures indiquées par la Lega Lom-
barda : dégrèvement des impôts qui
écrasent les paysans, lois hygiéni
ques qui diminueraient les dépen
ses communales d'hospitalisation,;
introduction de bonnes méthodes
d'agriculture qui augmenteraient le
rendement de la terre.
Le mal est plus profond ; il no
pourrait se guérir, et l'Italie ne
pourrait éviter le cataclysme chaque
jour plus menaçant que par une
large et énergique diffusion de la
doctrine et de l'action intégralement
catholiques.
La Voce délia Veritk fait à ce
propos des réflexions opportunes :
« Le phénomène politique ne nous
préoccupe pas autant que le phéno
mène social. Les socialistes orga-'
nisent sérieusement les travailleurs
de la terre, la plus grande force
numérique qui existe en ce pays
agricole par excellence. Pour ces
travailleurs, la démocratie chré
tienne a déjà fait beaucoup. Les
caisses rurales sont une œuvre de
bienfaisance locale, mais elles peu
vent en outre devenir les anneaux
d'une organisation des paysans ita
liens, sur la base de la justice et de
la civilisation chrétiennes. »
Et elle précise l'un des points de.
l'action catholique italienne dont
nous avons plus d'une fois déjà
proposé les admirables exemples ;
« Il y a aujourd'hui tant à faire ! Il
faut que, sans perdre de temps, on
organise ces comités paroissiaux
qui voient s'ouvrir devant eux un
immense champ d'activité, non seu
lement religieux, mais aussi écono
mique. Sur nos ennemis, nous
avons déjà l'avantage d'une orga
nisation préexistante : l'organisa
tion paroissiale. La grande majo
rité des paroisses ont leur titulaire;
souvent les plus importantes ont
deux ou trois prêtres. D'un bout à
l'autre de l'Italie, sur dixmille points
en même temps, on peut donc met
tre la main tout de suite à cette
première organisation qui prépa
rera les éléments pour le jour où
l'on pourra coordonner nos popu
lations rurales. Elles sont chrétten-
nes, elles aiment la terre. Dès lors,
quoi de plus pratique et de plus
juste que l'idéal de la démocratie
chrétienne qui dans la question de
la terre entend respecter la pro
priété, combattre les abus du « la-
tifundisme », de l'absentéisme, de
l'usure, et propager le métayage et
la petite propriété suffisante?»
Ce programme est très pratique.
Et c'est pourquoi — sans entrer
davantage dans des polémiques
personnelles qui viennent de surgir
ici, très irritantes — il nous plaît
de terminer par ces paroles de
l'abbé Vercesi dans YOsservatore
cattolico. « Je crains bien que nous
n'arrivions trop tard, si on ne laisse
pas travailler en paix les hommes
ae bonne volonté. Tandis que nous
avons la maisen qui brûle, il y a
des gens chez nous qui ne remuent
pas un doigt pouf éteindre le feu, et
gui se divertissent à faire la guerre
à coups d'épingles contre eux qui
veulent agir. On se sent envahi par.
un vrai découragement en face de
certaines constatations tandis que
les autres partis, au plus fort de
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