Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-06-20
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 juin 1901 20 juin 1901
Description : 1901/06/20 (Numéro 12171). 1901/06/20 (Numéro 12171).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7107618
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Jeudi 20 Juin 4801
Edition quotidianas. — 18,171
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Jeudi 20 Juin 1901
PARIS
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PARIS, 19 JUIN 1901
@ÔA£A1A.IIUSI
N o t r » protectorat
menacé.
Récriminations
Çà et là : La So
ciété française du
XVI» siècle au XX»
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La guerre sud-afri-
CftlAO *»«••*«»•««*•
Au Sénat
À la Chambre
Les fêtes de Notre-
Dame de Brebiè-
res ..............
Nouvelles agricoles
L. G.
.P ierre V euillot.
E ugène T avehnier.
F. L.
J. M antenay.
G abiusi bk ï7ios3.
à. D oal.
A. DE VlLUEKS DE
l' I sle -A dam.
Bulletin. — Groupe parlementaire de l'ac-
tiea libérale. — Le Souverain Pontife et
l'UniverBité do Glascow. •— Un pendant
au scandale de Denain. — Les proces
sions. — Le pavoisement. — Colpor
teurs d'infamies. — Laïcisation d'école.
— Infor mations politiques et parlemen
taires. — L'affaire de Lur-Saluces. —
L'ambassade marocaine. — En Russie,
— En Angleterre. — La guerre du
Transvaal. — Ea Chine. — Dépêche* de
l'étranger. — A travers la presse. —
Chronique. Lettres, sciences et arts.
— Echos de partout. — Hommage à Mgr
Le Camus. —- Chronique religieuse. —
La question ouvrière. — Sénat. — Ea
province. — Nécrologie. — Guerre et
- marine. — Tribunaux. — L'attentat con
tre un prêtre. — Jardin d'acclimatation.
— Nouvelles diverses. -— Calendrier.
— Bourse et bulletin fin&nsler. — Deï-
nière heure.
tisttsesBSB2ss&B3S&&mm$ʧ
r' . I
C'était à prévoir : la Consulta., qui
est une personne très pratique, tra
vaille, sans perdre une seule mi
nute, à tirer le plus possible de
résultats réels du rapprochement
franco-italien.
Elle laisse au ministère de l'agri
culture et du commerce le scinde
préparer les clauses des nouveaux
traités. Et dans le même temps, elle
recommence, pour la vingtième fois,
l'assaut du protectorat français en
Orient et en Extrême-Orient.
Il faut avouer que jamais les cir
constances ne lui turent plus favo
rables : la diplomatie française pa
raît bien hésitant». Elle ne semble
songer qu'à s'assurer une zone
d'influence dans les provinces mé
ridionales de la Chine. On ne l'a
guère entendue parler jusqu'ici de sa
ferme résolution de maintenir à
tout prix à la France la place pré
pondérante que lui assurait le pro
tectorat général de toutes les chré
tientés chinoises. Les déclamations
-anticléricales des radicaux et des
socialistes auraient-elles fait perdre
le sens des réalités aux directeurs
de notre politique étrangère? Ou
bien, les quelques hommes d'Etat
qui nous restent encore se ver
raient-ils contraints de céder, la
mort dans l'âme, à la pression delà
maçonnerie, dont l'esprit inspire si
manifestement, à l'heure actuelle,
toute notre diplomatie ?
En tous cas, les francs-maçons
qui gouvernent l'Italie ne semblent
pas, eux, dédaigner le moins du
monde ce protectorat dont leurs
-frères et amis de France font si
ben marché. Au contraire ils re
doublent en ce moment leurs ef
forts pour ravir à la France cette
source de gloire nationale, de pres
tige et d'influence réelle.
D'ailleurs, ils avouent que la
guerre déclarée par le gouverne
ment français aux congrégatioas
religieuses et au Saint-Siège aug
mente encore leurs chances de sue-
cès. Seule, la volonté de Léon XIII
a sauvegardé jusqu'ici le protecto
rat de la France contre les assauts
que lui faisaient subir les puissan
ces rivales, au nom du nouveau
principe de la nationalisation des
missions. On se rappelle les actes
personnels de Léon XIII : instruc
tions de la Propagande aux évêques
missionnaires, lettre au cardinal
Langénieux, etc. Il faut noter que
le Pape, en chacune de ces circons
tances solennelles, consentait à re
dire publiquement les dreits recon
nus par le Saint-Siège à la France,
{>arce que le gouvernement français
ui en témoignait le désir et voulait
trouver dans ces actes du Pape
une force contre les pressions ri
vales.
Dans son jeu, la Consultk es
compte la douloureuse indignation
qu'ont produite chez le Pape l'aber
ration et l'ingratitude du gouver
nement français : comment Léon
XIII réussira-t-il à sauver les droits
de la France, non plus cette fois
contre leurs ennemis naturels mais
contre ceux-là mêmes qui devraient
les défendre?
Il faut le redire sans se lasser :
quelle responsabilité porteront de
vant l'histoire ces Français qui as
sistent indifférents à la diminution
de la France; cés hommes d'Etat qui,
avec un peu d'énergie, de sagesse
et de désintéressement, pourraient
faire reprendre à leur patrie un
rôle de premier ordre dans la direc
tion du monde, et qui ont la lâcheté
ou l'aberration de travailler eux-
mêmes à sa propre déchéance i
Bref, voici ce qu'on écrivait l 'au
tre jour de Florence à VOsservitore
cstlolico :
« Au moment même où, dans les
eaux de Toulon, on applaudissait à
l'amitié, à la fraternité de l'Italie
avec la France, arrivait à Milan un®
lettre d'où il ressort que l'Italie, par
le moyen de son ministre* à Pékin,
travaille activement à supplanter le
gouvernement français dans le pro
tectorat des missionnaires italiens
d'Extrême-Orient. Les missionnai
res de l'institut milanais de San Ca-
locero, résidant en Chine, ont reçu
l'ordre de se mettre sous la protec*
tion du gouvernement du roi d'Ita
lie. S'ils ne veulent pas se sou
mettre, le marquis Salvago Rag-
ei, ministre à Pékin, les menace
d'empêcher que ces missionnaires
continuent à être protégés par la
France. Je ne sais pas ce qu'aura
fait le ministre français de Pékin,
en-face de cette prétention nouvelle
et peu modeste ae son collègue ita
lien. On m'assure que la menace
n'a pas été faite aux missionnaires
de San Calocero seulement; ce fait
et les autres montrent «ru'on cher
che à réaliser un véritable plan, au
quel n'a pas été étrangère une as
sociation de secours pour les mis
sionnaires italiens, ayant son siège
ici à Florence. Mais, si j'ignore ce
qu'a fait à cette occasion le repré
sentant de la République. française
en Chine, je sais que le Saint-Siège
a donné des instructiens pour main-,
tenir le statu quo. »
Le correspondant est sûrement
bien informé. Et le Journal des Dé
bats a bien fait de prendre au sé
rieux les graves nouvelles publiées
par VOsservatere cattolico. Il n'en
faudrait d'autre preuve que Tim-
Bortance donnée à cet article des
ébats par le correspondant pari
sien de la Tribuna, dont les rela
tions avec l'ambassadour Tornielli
sont bien connues; Mais lé Journal
des Débats se fourvoie, lorsque,pour
sauver la situation de la France, il
fait appel à la bonne volonté et au
bon sens de l'Italie. Nous essaie
rons de lui montrer son erreur dans
un prochain article.
L. G.
— —— : —♦
•BULLETIÎNL
Toujours impatient de voter l'o
dieuse loi des associations, le Sénat a
adopté hier les articles 5, 9, 10, Il et
12 du projet, sa,ns rien changer su
texte de ta. commission. Puis Von a com
mencé l'examen de l'article 13 qui vise
spécialement les congrégations et M. de
Marcère a prononcé un éloquent dis-
cours que nous reproduisons plus loin
d'après l'Analytique.
Hier, la. Chambre des députés a ter
miné la discussion générale du projet
de loi relatif aux retraites ouvrières et
l'on a décidé de passer à l'examen des
articles.
L'Officiel publie aujourd'hui la nomi
nation de M. Revoil comme gouverneur
général de l'Algérie en remplacement
de M. Jon.ns.rt, démissionnaire.
Le Sobranyé a autorisé les poursuites
contre les anciens ministres au cabinet
IvantchofRzdoslovof, accusés de con
cussion, et a nommé une commission
d'enquête de douze membres. Ce n'est
qu'après le rzpptrt de cette ca.mmiasi»n
que sera jugé, devant la Saute-Cour
bulgare, le procès des ministres incri
minés.
Hier, à la C&née, les consuls ont com
muniqué au prince Georges la volonté
des puissances de maintenir le statu quo
en Crète ; ils s'opposent donc à l'union
de Vile avec la Grèce.
A Pékin, le cerps diplomatique vient
de repousser la préposition de la Chine
d'envoyer immédiatement 3,000 stldats
chinois dans la capitale du Céleste-Em
pire.
ItgemMmATiONS
En attendant qu'ils se mettent
d'accord en vue des élections, les
radicaux et les socialistes échan
gent des propos aigres-doux (et
même dota: est presque de trop). Ce
sont surtout les socialistes qui ré
clament. Ils se plaignent d'être
persécutés. Leur parti compte
beaucoup d'adhérents parmi les
instituteurs et les professeurs offi
ciels. Vous le saviez déjà. Mais ce
que vous ne saviez point, c'est que
les instituteurs et professeurs so
cialistes sont abreuvés de trasas-
series et d'injustices. On menace le
ministère, à ce sujet, d'une inter
pellation. Elle obtiendra, sans d®u-
te, un tour de faveur et n'attendra
pas son vendredi, puisqu'elle ne
viendra point de la droite ou du
centre. ^
Le cabinet sera donc mis sur la
sellette. Pour qu'il n'y ait pas de
temps perdu, les radicaux y sont
déjà. Suivez le raisonnement. Si le
ministère persécute les instituteurs
et professeurs- socialistes, c'est
parce qu'il veut plaire aux radi
caux, qui forment le gros appoint
de sa majorité. Les radicaux, en
effet, trouvent fort bon de recevoir
l'appui éleetoral des instituteurs et
professeurs de l'Etat. Ceux-ci ne se
rendent coupables d'aucun abus en
soutenant M. Léen Bourgeois eu
M.Trouillot, par exemple. Mais que
des hommes chargés d'instruire la
jeunesse oublient ce qu'ils doivent
à la sérénité de leurs augustes fonc-
tiens, jusqu'au point de se jeter
dans la melée des partis pour faire
triompher des collectivistes con
tre des radicaux, voilà qui est cou
pable et même scandaleux. Les
radicaux somment le ministère de
sévir, et le ministère sévit.
C'est ce qui vient de se passer,
notamment, a Rochefort. Il y a là
un maire, M. Braud, qui s'apprête
à se porter comme radical aux élec
tions de l'an prechain, contre le dé
puté sortant, l'amiral Rieunier,
progressiste. M. Braud a peur,
évidemment, de voir se dresser un
troisième candidat, champion du
collectivisme. Déjà même, on don
nait le nom de ce candidat. C'est
M. Tournier, qui était professeur
de philosophie au lycée de Roche-
fort. Qu'a fait M. Braud? Il a prié
le ministère de déplacer M. Tour
nier; immédiatement le ministère
a envoyé M. Tournier dans le dé
partement de l'Orne.
Sous quel prétexte? Un prétexte
misérable. Au cours, parait-il, d'une
réunion organisé® par cet estimable
professeur de philosophie, on a dé
chiré puis foulé aux pieds le dra
peau tricolore. Voyons, ce geste
méritait-il qu'on infligeât au bon
Français Tournier la terrible peine
du déplacement ? Nul n'en peut
douter: si c'était un professeur
prêtre ou religieux qui eut commis
cette peccadille, les collectivistes
n'auraient rien dit, les radicaux non
plus, et le ministère n'aurait rien
fait. Décidément, les socialistes
sont persécutés !
Pierre Veuillot.
Çà eî là
LA SOCIETE FRANÇAISE, DU XVI*
SIÈCLE AU XX« SIECLE
Assez souvent on se laisse aller, pour
ane minute, à s'imaginer les impressions
d'un Français d'autrefois ressuscité et
introduit brusquement dans notre monde
démocratique... ét mécanique. Ce serait
une surprise à perdre la téte. Mais on ne
fait guère attention que nous-mêmes noua
avons, sur la société disparue, des idées
fort peu complètes et très inconsistan
tes. Déplacé en sens inverse, transporté
à la cour de François I", à celle de
Louis XIV ou de Louis XV, n'importe
lequel de nos contemporains serait joli
ment einbarraBSé p»ur s'orienter et pour
retrouver ses esprits. Quelques dates;
quelques faits historiques; certains traits
de mœurs puisés dans) les Mémoires ; de
vagues-notions empruntées des gravures
et des tableaux ; un étalage de dentelles,
de vertugadins, de paniers, de perruques
et d'armures, telle est à peu près, pour
nous, la représentation du passé. Les
gens qui peuvent faire des lectures et
des observations suivies ne sont pas
nombreux. En somme, est-ce que la
changement, sinon le plus profond du
moins le plus frappant, accompli dans les
mœurs ne consisterait pas en ceci : que
nous n'avons plus le temps de vivre ?
Jadis, on prenait son temps ; et c'est
certainement une des raisons principales
psur lesquelles la, société offrait souvent
l'aspect d'une immense œuvre d'art. Il y
avait un art de se conduire, de se mon
trer, de parler, et même de se taire.
Alors, on avait le moyen de composer un
livre sans se presser et de rédiger une
lettre avec des pensées et du style.
Quelle perfection dans la causerie ! Que
de ressources pour tant dè personnages
distingués qui possédaient le goût et le
talent d'écrire et qui se faisaient lès
chroniqueurs des salons 1
Ils ont des successeurs qui leur sont
restés Sdèles, même à travers l'éloigné-
ment, même dans un milieu qui ne rap
pel le .pour ainsi dire,l'ancien que par les
contrastes.
M. Victor du Bled poursuit cette tâche,
qui contribua beaucoup au prestige et à
l'inSuence réelle de la vieille France. Il
vit dans la compagnie d'hommes et de
femmes adonnés aux brillants loisirs, à
la culture de l'esprit français considérée
d'instinct comme une fonction capitale.
Le succès de plusieurs publications et de
nombreuses conférences a persuadé l'é
légant écrivain d'entreprendre ?une lon
gue étude qui fût en même temps l'his
toire et la représentation de l'ancienne
société, ou plutôt l'histoire au moyen de
la représentation. M. du Bled n'avait qu'à
Buivre son penchant et ses aptitudes, en
utilisant un savoir considérable amassé
avec discernement. Voici deux volumes
qui commencent la série. Voici comment
l'auteur a défini son projet :
La société française est, si l'on v ut, l'en
semble des personnes qui ont des loisirs,
vont dans les mêmes endroits, s'habillent
de la môme façon, se recherchent dans le
but de créer du bonheur ou des semblants
de bonheur, de constituer une espèce d'as
surance mutuelle contre les risques de
l'ennui. Slle a mille points de rencontre,
Paris, la cour, sous l'ancien régime, les
châteaux des grands seigneurs et des fer
miers généraux, les villes de Parlement,
tout endroit où le génie aimable d'une
femme a su grouper quelques hommes dis
tingués : comme place d'armes, les salons ;
comme foyer principal, la conversation
parlée ou écrite, cette conversation fran
çaise, si universelle, si généreuse, si pro
fondément humaine ; comme moyens, la
comédie, la bal, les jeux d'esprit, la musi
que, la galanterie; comme passe-partout, la
courtoisie, le désir de plaire. De savoir
comment ces princes et ces personnages
célèbres ont causé, pensé, aimé, comment
ces favorites ont subjugué leurs maîtres,
comment ces financiers ont dépensé leur
* argent, marlâJeurs filles aux ducs et pairs,
comment les Mécènes ont protégé les arts,
comment l'hôtel de Rambouillet a amélioré
la morale et la langue, comment les gens
d'esprit, les lettrés conquièrent le droit de
cité dans les Balons de l'aristocratie, une
telle curiosité n'a-t-elle pas sa raison suffi
sante? Les hommes d 'Etat se montrent
dans l'histoire officielle et solennelle tels;
qu'ils veulent paraître, dans l'histoire in-;
time, grâce aux Mémoires, auprès des fem
mes qu'ils aiment d'amitié aneureuse ou
d'&mitié sans épithète, ils déposent le har
nais diplomatique, n'habitent plus les de
hors de l&urs âmes ; on les surprend parfois
en déshabillé moral, ils divulguent leur
secret, ils veulent aussi leur part de
bonheur, goûtent la volupté delà confiance
et de la confidence (i).
Si délicatement tracé que soit ce pro
gramme, il permet de deviner que l'his
toire racontée ne sera pas en général très
édifiante. II fait soupçonner que la gau
loiserie salée, et plus encore, le liberti
nage pervers y prendront leurs aises
avec une insolente désinvolture. On
rencontre la vertu même au temps des
Valois, mais elle est là comme perdue
dans le grouillement dont se délectent
d'innombrables Brantômes. Et ce n'est
pas seulement l'intensité de cette fièvre^
la fois raffinée et brutale, qui est prodi
gieuse : c'en est aussi la durée. Il faut
bien regarder ce l«ng et violent phéno
mène qui remplit toute une période de
notre histoire.
Heureusement on y trouve aussi autre
chose que de la galanterie,biem qu'elle sait
en quelque sorte le cadre où se remuent
tant d'éléments. Il y a des épisodes cu
rieux, comme, par exemple, la première
académie de poésie et de musique fondée
en 1570 et mille détails sur les tentatives
faites, de loin en loin, pour ramener la
morale et la pudeur dans un monde dé
chaîné.
M. du Bled nous fait suivr e les phases
diverses de ce mouvement où se confon
daient tous les intérêts. Quelle quantité
de lecture 1 Certains chapitres ont ab-
ssrbé la matière de cinquante volumes.
Sur la société de Richelieu et sur Pôrt-
Royal, l'auteur a réussi à grouper des
détails nombreux qui complètent ces su
jets souvent étudiés. Il a réservé à la
prédication avant Bossuet une part éten
due et intéressante Jqui permet de juger,
outre les variations de la méthode et de
la manière, les changements des idées et
des mœurs, les reculs et les progrès. A
côté des hommes d'église et des hommes
politiques, les gens de lettres des deux
sexes tint la grande place qui leur con
vient. Le salon de Mlle de Scudéry et les
amis de Mme de Sévigné jouent leur
rôle, qui mérite toujours d'être observé
et que M. du Bled retrace avec vivacité.
Les modes et les costumes reparaissent
aveo leur diversité et leur aberration
également inépuisables. L'auteur n'au
rait-il pas pu réserver à la vie des cou
vents un domaine spécial ? Il y avait là
beaucoup d'égarements ; mais la haute
vertu et la foi éclairée n'en étaient pas
absentes. Il est vrai que M. du Bled s'eBt
surtout occupé de la Cour. Elle fut si
longtemps le centre de l'activité et de
l'agitation qu'elle semblait avoir absorbé
la France entière. D'un style élégant et
fin, l'auteur a reconstitué tout un monde,
toute une époque, et il en fait pressentir
la destinée. Dans ces pages brillantes où
l'on voit vivre l'ancien régime, on com
prend mieux comment l'ancien régime
devait mourir: et, certainement, les vo
lumes suivants qui nous rapprocheront
peu à peu de la Révolution, feront encore
mieux saiiir les caractères et la cause
du cataclysme social survenu il y a plus
d'un siècle et animé aujourd'hui d'un
élan nouveau.
Eugène T avehniba.
U GUERRE SUD-AFRICAIHE
La guerre sud-africaine poursuit
son cours, toujours avec des alter
natives de succès et de revers, pour
les Anglais comme pour lés Boers,
mais qui n'ont rien de décourageant
pour ces derniers, autant du moins
3ue nous en pouvons juger, même
'après les informations que nous
fournissent les agences britanni
ques. ,
Il faut convenir néanmoins que
le voyage de Mme Botha donne à
penser, malgré, ou plutôt à cause
des commentaires contradictoires
dont il est l'objet. On ne peut
vraiment guère s'arrêter aux déné
gations des journaux qui soutien
nent mordicus que la vaillante
femme du général en chef desBeers
n'est chargée d'aucune mission, et
qu'elle est simplement venue en Eu
rope pour y remettre sa santé. Ces
affirmations sont d'ailleurs tenues
en échec par des affirmations con
traires, également énergiques, et
que l'on peut croire tout aussi au
torisées. <
Dans l'impossibilité où nous som
mes de choisir entre ces contradie-.
tions obstinées, le plus sage est
évidemment d'attendre que la vé
rité se fasse jour ; elle n'est jamais
très longtemps prisonnière, et nous
mettra bientôt au courant du réel
état des choses.
A la réflexion, la ténacité réci
proque de ces contradictions sug
gère la conjecture qu'elles pour
raient bien avoir droit chacune à
une part de crédibilité. On sait
déjà que les Boers, tout en conti-
(l)Là société fr&nçaiée,du XVI • Siècle àu
siècle, par il. Victor du Bled. Librairie
Perrin, Paris.
nuant de combattre avec un admi
rable héroïsme, ne sont pas tous
également confiants dans 1 issue fi
nale de la lutte, ni tous également
décidés à la poursuivre désespéré
ment, sans repos ni trêve,jusqu'à la
mort! A diverses reprises, deux
partis ont paru se dessiner parmi
eux : un parti de la meilleure paix
possible, et un parti de la guerre à
outrance ; le premier fait valoir que
f>ersisterplus longtemps dans une
uttesi manifestement inégale, c'est
vouer à une extermination totale la
race des Boers,et à une ruine irré
parable tout le territoire des deux
républiques; à quoi le second parti
répond qu'avec les Anglais, la paix
sera pire que la guerre, et que leur
domination consommera méthodi
quement, par esprit de vengeance,
et par peur des revanches de l'a
venir, toutes les destructions, toutes
les ruines qu'on espère éviter par
la soumission...
Ainsi s'expliqueraient les contra
dictions auxquelles donne lieu le
voyage de-Mme Botha; elles ne se
raient que l'expressien des deux
courants qui se partagent les esprits
Êarmi ces héroïques et infortunés
oers, et viendraient ainsi compli
quer douloureusement les suprê
mes péripéties de ce terrible drame.
F. L.
LE SOUVERAIN PONTIFE
ET L'UmVEBSITÉ DE GUSCOW
L'Université de Glascow, çui fut éri
gée et gratifiée de divers privilèges par
le Pape Nicolas V, a célébré ces jours-ci,
en des fêtes solennelles, son quatre cent
cinquantième anniversaire. Dans cette
circonstance, tout le corps académique
et les étudiants ont tenu à envoyer à Sa
Sainteté Léon XIII une adresse qui rap
pelait que cet Institut, aujourd'hui si
florissant, dut son existence au Saint-
Siège.
Le Souverain Pontife ne pouvant as
sister aux fêtes, le préfet de l'Université
le priait respectueusement de donner à
celle ci une autre marque de sa bienveil
lance. Léon XIII a répondu par une let
tre écrite en un latin d'une grande élé
gance, et dont voici la traduction :
A Nstre Vénérable Frère Herbert
Story, -préfet et vice-chancelier,
ainsi qu'au recteur, aux profes
seurs'et aux étudiants de VUni-
vèrsité de Glascow.
LÉON XIII, PAPE.
Sachez gue votre lettre collective
Nous a été agréable. Cultiver le
souvenir des bienfaits reçus, et bien
plus, les proclamer publiquement
et en toute franchise, c'est là certes
la vertu d'une âme dont les senti
ments ne sont ni bas ni étroits. Et
c'est uue telle vertu qu'il Nous plaît
de reconnaître envous, et qui ajoute
un vif éclat à celui de vos excel
lents travaux et de votre talent.
Comme la grande Université ou
se déploie votre zèle à tous doit son
origine au Siège apostolique, votre
pensée reconnaissante s'est élancée
vers le Pontife romain, à la veille
des fêtes du centenaire d9 cet Insti
tut, et spontanément vous Nous
avez convié à Nous unir à votre
joie. Il semble que quelque chose
vous aurait manqué, si veus n'aviez
pas reçu à cette époque une mar
que de Notre bienveillants. Certes
Nous avons pour agréable et Nous
apprécions hautement une telle
preuve de déférence, jointe à la
justesse de votre jugement.
Repassant dans Notre souvenir
nés antiques annales, Nous Nous
transportons complètement en es
prit parmi vous durant ces jours, et
rîotre pensée s'arrête avec joie sur
l'institution si utilement créée par
le Souverain Pontife Nicolas V. Par
cette fondation certes, Notre grand
prédécesseur a rendu à la nation
écossaise un service immortel. En
outre, il a mis en évidence ce fait
que par sa nature propre, la vertu
du pontificat romain contribue gran
dement au progrès des connaissan
ces supérieures et des arts libéraux,
qui entretiennent surtout la civilisa
tion des peuples.
Nous souhaitons que cet illustre
asile des hautes sciences demeure
toujours florissant par l'abondance
de ses fruits salutaires et par l'éclat
de sa renommée : Nous prions le
Dieu tout-puissant qu'il daigne
dans sa bienveillance diriger vos
doctes labeurs, en tout ordre de
connaissances, vers la vérité, et
vous unir tous avec Nous par les
liens d'une parfaite charité.
Donné à Rome, près de Saint-
Pierre, le 9 juin de l'année 190 i , de
Notre pontineat la vingt-quatrième.
LÉON XIII, PAPE.
AU 8&NAT
La loi sur les associations.
Sixième journée.
« Vous voulez transformer ce
grand pays de France et changer
son âme. Vous ne réussirez pas ! »
C'est un républicain de vieille
date, c'est un « ancien 363 », ami et
disciple dô Gambetta,, adversaire
acharné du régime de (< l'ordre mo
ral », — bien mieux : c'est un an.
cie.-î membre du comité de perma
nence des '33 fondé sous leSeize-
Mai pour lutter contre le maréchal,
en un mot, c'est M. de Marcère, qui
a adressé hier à ses coreligionnai
res politiques la phrase que nous
venons de reproduire. M. de Mar
cère a ajouté :
— Ne continuez pas à violer mani
festement, ouvertement, les princi
pes de liberté, d'égalité, qui sont la
base et le fondement même de no
tre vie nationale. Ne le faites pas
avec cette légèreté ou avec cette
certitude d'insuccès dans votre en
treprise ; ou, si vous le faisiez, si
vous continuiez cette guerre à la foi
nationale, à la liberté, aux principes
de la Révolution françaisej il en est
un dans cette Déclaration des droits
de l'homme, qu'on veut afficher sur
les murs et qu'ilfaut vous rappeler,
je parle de l'article de la Déclara-
tien des droits de la Constitution
de 1791, où il est dit qu'une des
conditions essentielles de la liberté,
c'est le droit à la résistance contre
l'oppression.
On lira Ge beau discours qui a
produit sur le Sénat une impression
réelle. En terminant, M. de Marcère
a conjuré la Chambre haute de ne
pas conduire le pays « à la néces
sité redoutable de la résistance »,
car, a t-il dit, « on ne sait pas jus
qu'où elle va et où elle porte !... »
Que les sectaires du Luxembourg
y songent bien. Aucun d'eux n'a du
oublier les luttes du 16 mai. Eh
bien l M. de Marcère adressait alors
— presque dans les mêmes termes,
si nos souvenirs sont exacts—à
MM. de Broglie et de Fourtou l'a
vertissement prophétique qu'il don
nait hier au Sénat. Il suppliait les
ministres du maréchal de ne point
acculer le pays à la résistance...
Tous les républicains sincères —
libres-penseurs ou croyants — de
vraient désirer que les conseils de
M. de Marcère fussent suivis.;
L'amendement de M. de Marcère
tendait à supprimer les articles 13 à
18; c'est-à-dire que l'ancien ministre
demandait au Sénat de considérer
que les congrégations no doivent
pas être placées sous le régime de
la loi proposée, qu'elles doivent être
considérées comme faisant partie
intégrante de l'Eglise et, par consé
quent, être placées sous le régime
du Concordat..
M. Vallé, rapporteur, ne sachant
comment répondre à son contra
dicteur, s'est borné à dire que M.
de Marcère étant rentré dans la dis
cussion général®, il n'y avait pas
lieu de le suivre sur ce terrain. Et
le Sénat a passé outre.
Dans la séance d'hier, les articles
8 à 12 ont été adoptés sans change
ment.
On abordera aujourd'hui l'article
13. Il suffira de le citer pour qu'on
juge de son libéralisme :
« Aucune congrégation religieuse
ne peut se former sans une autori
sation donnée par une loi qui déter
minera les conditions de son fonc
tionnement.
« Elle ne pourra fonder aucun
nouvel établissement qu'en vertu
d'un décret rendu en Conseil d'E
tat.
« La dissolution de la congréga
tion ou la fermeture de tout établis
sement pourront être prononcées
par décret rendu en conseil des mi
nistres. »
De nombreux amendements ont
été déposés et seront discutés au
jourd'hui. C'est, en effet, sur cet
article que se livrera la grande ba
taille.
J. M àntenay .
A LA CHAMBRE
Les retraites ouvrières.
La Chambre a clos hier la dis
cussion générale du projet sur les
retraites ouvrières, et prononcé
l'urgence par 458 voix contre 60. On
avait entendu, au cours de la séan
ce, de nouvelles critiques du texte
de la commission et les explications
du ministre des finances.
M. Caillaux tenait à répondre plus
particulièrement aux objections for
mulées, il y a quelques j ours, par M.
Ribot.
Il affirmait qu'on exagère en par
lant d'une accumulation de capitaux
devant atteindre, en un demi-siècle,
la somme de 22 milliards ; on doit
prévoir un maximum de 9 à 12 mil
liards qui pourront être employés
en prêts aux départements et aux
communes, et aussi en achats de
valeurs internationales.
Il n'est pas exact de dire que
l'Etat sera libre de disposer de ces
capitaux, puisque la Caisse des dé
pôts et consignations est indépen
dante ; le gouvernement est d'ail
leurs tout disposé à mettre les so
ciétés de secours mutuels sur le
même pied que la Caisse nationale
des retraites. Enfin, l'Etat ne s'in
terdit nullement, dans l'avenir, la
conversion de la rente, il s'engage
seulement à servir à la Caisse des
retraites une subvention suffisante
pour donner à son portefeuille un
revenu de 3 pour cent.
Les autres orateurs ont formulé
dés réserves et expo&é des systè
mes.
Edition quotidianas. — 18,171
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Jeudi 20 Juin 1901
PARIS
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L'USIVESS ru répond pas tes manuscrits çtrf lui ssni airr,ii%
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KM. LAGRANGE, CERF eî C'-», 6, place de la Scan»
PARIS, 19 JUIN 1901
@ÔA£A1A.IIUSI
N o t r » protectorat
menacé.
Récriminations
Çà et là : La So
ciété française du
XVI» siècle au XX»
sl6cl@...... (..••««
La guerre sud-afri-
CftlAO *»«••*«»•««*•
Au Sénat
À la Chambre
Les fêtes de Notre-
Dame de Brebiè-
res ..............
Nouvelles agricoles
L. G.
.P ierre V euillot.
E ugène T avehnier.
F. L.
J. M antenay.
G abiusi bk ï7ios3.
à. D oal.
A. DE VlLUEKS DE
l' I sle -A dam.
Bulletin. — Groupe parlementaire de l'ac-
tiea libérale. — Le Souverain Pontife et
l'UniverBité do Glascow. •— Un pendant
au scandale de Denain. — Les proces
sions. — Le pavoisement. — Colpor
teurs d'infamies. — Laïcisation d'école.
— Infor mations politiques et parlemen
taires. — L'affaire de Lur-Saluces. —
L'ambassade marocaine. — En Russie,
— En Angleterre. — La guerre du
Transvaal. — Ea Chine. — Dépêche* de
l'étranger. — A travers la presse. —
Chronique. Lettres, sciences et arts.
— Echos de partout. — Hommage à Mgr
Le Camus. —- Chronique religieuse. —
La question ouvrière. — Sénat. — Ea
province. — Nécrologie. — Guerre et
- marine. — Tribunaux. — L'attentat con
tre un prêtre. — Jardin d'acclimatation.
— Nouvelles diverses. -— Calendrier.
— Bourse et bulletin fin&nsler. — Deï-
nière heure.
tisttsesBSB2ss&B3S&&mm$ʧ
r' . I
C'était à prévoir : la Consulta., qui
est une personne très pratique, tra
vaille, sans perdre une seule mi
nute, à tirer le plus possible de
résultats réels du rapprochement
franco-italien.
Elle laisse au ministère de l'agri
culture et du commerce le scinde
préparer les clauses des nouveaux
traités. Et dans le même temps, elle
recommence, pour la vingtième fois,
l'assaut du protectorat français en
Orient et en Extrême-Orient.
Il faut avouer que jamais les cir
constances ne lui turent plus favo
rables : la diplomatie française pa
raît bien hésitant». Elle ne semble
songer qu'à s'assurer une zone
d'influence dans les provinces mé
ridionales de la Chine. On ne l'a
guère entendue parler jusqu'ici de sa
ferme résolution de maintenir à
tout prix à la France la place pré
pondérante que lui assurait le pro
tectorat général de toutes les chré
tientés chinoises. Les déclamations
-anticléricales des radicaux et des
socialistes auraient-elles fait perdre
le sens des réalités aux directeurs
de notre politique étrangère? Ou
bien, les quelques hommes d'Etat
qui nous restent encore se ver
raient-ils contraints de céder, la
mort dans l'âme, à la pression delà
maçonnerie, dont l'esprit inspire si
manifestement, à l'heure actuelle,
toute notre diplomatie ?
En tous cas, les francs-maçons
qui gouvernent l'Italie ne semblent
pas, eux, dédaigner le moins du
monde ce protectorat dont leurs
-frères et amis de France font si
ben marché. Au contraire ils re
doublent en ce moment leurs ef
forts pour ravir à la France cette
source de gloire nationale, de pres
tige et d'influence réelle.
D'ailleurs, ils avouent que la
guerre déclarée par le gouverne
ment français aux congrégatioas
religieuses et au Saint-Siège aug
mente encore leurs chances de sue-
cès. Seule, la volonté de Léon XIII
a sauvegardé jusqu'ici le protecto
rat de la France contre les assauts
que lui faisaient subir les puissan
ces rivales, au nom du nouveau
principe de la nationalisation des
missions. On se rappelle les actes
personnels de Léon XIII : instruc
tions de la Propagande aux évêques
missionnaires, lettre au cardinal
Langénieux, etc. Il faut noter que
le Pape, en chacune de ces circons
tances solennelles, consentait à re
dire publiquement les dreits recon
nus par le Saint-Siège à la France,
{>arce que le gouvernement français
ui en témoignait le désir et voulait
trouver dans ces actes du Pape
une force contre les pressions ri
vales.
Dans son jeu, la Consultk es
compte la douloureuse indignation
qu'ont produite chez le Pape l'aber
ration et l'ingratitude du gouver
nement français : comment Léon
XIII réussira-t-il à sauver les droits
de la France, non plus cette fois
contre leurs ennemis naturels mais
contre ceux-là mêmes qui devraient
les défendre?
Il faut le redire sans se lasser :
quelle responsabilité porteront de
vant l'histoire ces Français qui as
sistent indifférents à la diminution
de la France; cés hommes d'Etat qui,
avec un peu d'énergie, de sagesse
et de désintéressement, pourraient
faire reprendre à leur patrie un
rôle de premier ordre dans la direc
tion du monde, et qui ont la lâcheté
ou l'aberration de travailler eux-
mêmes à sa propre déchéance i
Bref, voici ce qu'on écrivait l 'au
tre jour de Florence à VOsservitore
cstlolico :
« Au moment même où, dans les
eaux de Toulon, on applaudissait à
l'amitié, à la fraternité de l'Italie
avec la France, arrivait à Milan un®
lettre d'où il ressort que l'Italie, par
le moyen de son ministre* à Pékin,
travaille activement à supplanter le
gouvernement français dans le pro
tectorat des missionnaires italiens
d'Extrême-Orient. Les missionnai
res de l'institut milanais de San Ca-
locero, résidant en Chine, ont reçu
l'ordre de se mettre sous la protec*
tion du gouvernement du roi d'Ita
lie. S'ils ne veulent pas se sou
mettre, le marquis Salvago Rag-
ei, ministre à Pékin, les menace
d'empêcher que ces missionnaires
continuent à être protégés par la
France. Je ne sais pas ce qu'aura
fait le ministre français de Pékin,
en-face de cette prétention nouvelle
et peu modeste ae son collègue ita
lien. On m'assure que la menace
n'a pas été faite aux missionnaires
de San Calocero seulement; ce fait
et les autres montrent «ru'on cher
che à réaliser un véritable plan, au
quel n'a pas été étrangère une as
sociation de secours pour les mis
sionnaires italiens, ayant son siège
ici à Florence. Mais, si j'ignore ce
qu'a fait à cette occasion le repré
sentant de la République. française
en Chine, je sais que le Saint-Siège
a donné des instructiens pour main-,
tenir le statu quo. »
Le correspondant est sûrement
bien informé. Et le Journal des Dé
bats a bien fait de prendre au sé
rieux les graves nouvelles publiées
par VOsservatere cattolico. Il n'en
faudrait d'autre preuve que Tim-
Bortance donnée à cet article des
ébats par le correspondant pari
sien de la Tribuna, dont les rela
tions avec l'ambassadour Tornielli
sont bien connues; Mais lé Journal
des Débats se fourvoie, lorsque,pour
sauver la situation de la France, il
fait appel à la bonne volonté et au
bon sens de l'Italie. Nous essaie
rons de lui montrer son erreur dans
un prochain article.
L. G.
— —— : —♦
•BULLETIÎNL
Toujours impatient de voter l'o
dieuse loi des associations, le Sénat a
adopté hier les articles 5, 9, 10, Il et
12 du projet, sa,ns rien changer su
texte de ta. commission. Puis Von a com
mencé l'examen de l'article 13 qui vise
spécialement les congrégations et M. de
Marcère a prononcé un éloquent dis-
cours que nous reproduisons plus loin
d'après l'Analytique.
Hier, la. Chambre des députés a ter
miné la discussion générale du projet
de loi relatif aux retraites ouvrières et
l'on a décidé de passer à l'examen des
articles.
L'Officiel publie aujourd'hui la nomi
nation de M. Revoil comme gouverneur
général de l'Algérie en remplacement
de M. Jon.ns.rt, démissionnaire.
Le Sobranyé a autorisé les poursuites
contre les anciens ministres au cabinet
IvantchofRzdoslovof, accusés de con
cussion, et a nommé une commission
d'enquête de douze membres. Ce n'est
qu'après le rzpptrt de cette ca.mmiasi»n
que sera jugé, devant la Saute-Cour
bulgare, le procès des ministres incri
minés.
Hier, à la C&née, les consuls ont com
muniqué au prince Georges la volonté
des puissances de maintenir le statu quo
en Crète ; ils s'opposent donc à l'union
de Vile avec la Grèce.
A Pékin, le cerps diplomatique vient
de repousser la préposition de la Chine
d'envoyer immédiatement 3,000 stldats
chinois dans la capitale du Céleste-Em
pire.
ItgemMmATiONS
En attendant qu'ils se mettent
d'accord en vue des élections, les
radicaux et les socialistes échan
gent des propos aigres-doux (et
même dota: est presque de trop). Ce
sont surtout les socialistes qui ré
clament. Ils se plaignent d'être
persécutés. Leur parti compte
beaucoup d'adhérents parmi les
instituteurs et les professeurs offi
ciels. Vous le saviez déjà. Mais ce
que vous ne saviez point, c'est que
les instituteurs et professeurs so
cialistes sont abreuvés de trasas-
series et d'injustices. On menace le
ministère, à ce sujet, d'une inter
pellation. Elle obtiendra, sans d®u-
te, un tour de faveur et n'attendra
pas son vendredi, puisqu'elle ne
viendra point de la droite ou du
centre. ^
Le cabinet sera donc mis sur la
sellette. Pour qu'il n'y ait pas de
temps perdu, les radicaux y sont
déjà. Suivez le raisonnement. Si le
ministère persécute les instituteurs
et professeurs- socialistes, c'est
parce qu'il veut plaire aux radi
caux, qui forment le gros appoint
de sa majorité. Les radicaux, en
effet, trouvent fort bon de recevoir
l'appui éleetoral des instituteurs et
professeurs de l'Etat. Ceux-ci ne se
rendent coupables d'aucun abus en
soutenant M. Léen Bourgeois eu
M.Trouillot, par exemple. Mais que
des hommes chargés d'instruire la
jeunesse oublient ce qu'ils doivent
à la sérénité de leurs augustes fonc-
tiens, jusqu'au point de se jeter
dans la melée des partis pour faire
triompher des collectivistes con
tre des radicaux, voilà qui est cou
pable et même scandaleux. Les
radicaux somment le ministère de
sévir, et le ministère sévit.
C'est ce qui vient de se passer,
notamment, a Rochefort. Il y a là
un maire, M. Braud, qui s'apprête
à se porter comme radical aux élec
tions de l'an prechain, contre le dé
puté sortant, l'amiral Rieunier,
progressiste. M. Braud a peur,
évidemment, de voir se dresser un
troisième candidat, champion du
collectivisme. Déjà même, on don
nait le nom de ce candidat. C'est
M. Tournier, qui était professeur
de philosophie au lycée de Roche-
fort. Qu'a fait M. Braud? Il a prié
le ministère de déplacer M. Tour
nier; immédiatement le ministère
a envoyé M. Tournier dans le dé
partement de l'Orne.
Sous quel prétexte? Un prétexte
misérable. Au cours, parait-il, d'une
réunion organisé® par cet estimable
professeur de philosophie, on a dé
chiré puis foulé aux pieds le dra
peau tricolore. Voyons, ce geste
méritait-il qu'on infligeât au bon
Français Tournier la terrible peine
du déplacement ? Nul n'en peut
douter: si c'était un professeur
prêtre ou religieux qui eut commis
cette peccadille, les collectivistes
n'auraient rien dit, les radicaux non
plus, et le ministère n'aurait rien
fait. Décidément, les socialistes
sont persécutés !
Pierre Veuillot.
Çà eî là
LA SOCIETE FRANÇAISE, DU XVI*
SIÈCLE AU XX« SIECLE
Assez souvent on se laisse aller, pour
ane minute, à s'imaginer les impressions
d'un Français d'autrefois ressuscité et
introduit brusquement dans notre monde
démocratique... ét mécanique. Ce serait
une surprise à perdre la téte. Mais on ne
fait guère attention que nous-mêmes noua
avons, sur la société disparue, des idées
fort peu complètes et très inconsistan
tes. Déplacé en sens inverse, transporté
à la cour de François I", à celle de
Louis XIV ou de Louis XV, n'importe
lequel de nos contemporains serait joli
ment einbarraBSé p»ur s'orienter et pour
retrouver ses esprits. Quelques dates;
quelques faits historiques; certains traits
de mœurs puisés dans) les Mémoires ; de
vagues-notions empruntées des gravures
et des tableaux ; un étalage de dentelles,
de vertugadins, de paniers, de perruques
et d'armures, telle est à peu près, pour
nous, la représentation du passé. Les
gens qui peuvent faire des lectures et
des observations suivies ne sont pas
nombreux. En somme, est-ce que la
changement, sinon le plus profond du
moins le plus frappant, accompli dans les
mœurs ne consisterait pas en ceci : que
nous n'avons plus le temps de vivre ?
Jadis, on prenait son temps ; et c'est
certainement une des raisons principales
psur lesquelles la, société offrait souvent
l'aspect d'une immense œuvre d'art. Il y
avait un art de se conduire, de se mon
trer, de parler, et même de se taire.
Alors, on avait le moyen de composer un
livre sans se presser et de rédiger une
lettre avec des pensées et du style.
Quelle perfection dans la causerie ! Que
de ressources pour tant dè personnages
distingués qui possédaient le goût et le
talent d'écrire et qui se faisaient lès
chroniqueurs des salons 1
Ils ont des successeurs qui leur sont
restés Sdèles, même à travers l'éloigné-
ment, même dans un milieu qui ne rap
pel le .pour ainsi dire,l'ancien que par les
contrastes.
M. Victor du Bled poursuit cette tâche,
qui contribua beaucoup au prestige et à
l'inSuence réelle de la vieille France. Il
vit dans la compagnie d'hommes et de
femmes adonnés aux brillants loisirs, à
la culture de l'esprit français considérée
d'instinct comme une fonction capitale.
Le succès de plusieurs publications et de
nombreuses conférences a persuadé l'é
légant écrivain d'entreprendre ?une lon
gue étude qui fût en même temps l'his
toire et la représentation de l'ancienne
société, ou plutôt l'histoire au moyen de
la représentation. M. du Bled n'avait qu'à
Buivre son penchant et ses aptitudes, en
utilisant un savoir considérable amassé
avec discernement. Voici deux volumes
qui commencent la série. Voici comment
l'auteur a défini son projet :
La société française est, si l'on v ut, l'en
semble des personnes qui ont des loisirs,
vont dans les mêmes endroits, s'habillent
de la môme façon, se recherchent dans le
but de créer du bonheur ou des semblants
de bonheur, de constituer une espèce d'as
surance mutuelle contre les risques de
l'ennui. Slle a mille points de rencontre,
Paris, la cour, sous l'ancien régime, les
châteaux des grands seigneurs et des fer
miers généraux, les villes de Parlement,
tout endroit où le génie aimable d'une
femme a su grouper quelques hommes dis
tingués : comme place d'armes, les salons ;
comme foyer principal, la conversation
parlée ou écrite, cette conversation fran
çaise, si universelle, si généreuse, si pro
fondément humaine ; comme moyens, la
comédie, la bal, les jeux d'esprit, la musi
que, la galanterie; comme passe-partout, la
courtoisie, le désir de plaire. De savoir
comment ces princes et ces personnages
célèbres ont causé, pensé, aimé, comment
ces favorites ont subjugué leurs maîtres,
comment ces financiers ont dépensé leur
* argent, marlâJeurs filles aux ducs et pairs,
comment les Mécènes ont protégé les arts,
comment l'hôtel de Rambouillet a amélioré
la morale et la langue, comment les gens
d'esprit, les lettrés conquièrent le droit de
cité dans les Balons de l'aristocratie, une
telle curiosité n'a-t-elle pas sa raison suffi
sante? Les hommes d 'Etat se montrent
dans l'histoire officielle et solennelle tels;
qu'ils veulent paraître, dans l'histoire in-;
time, grâce aux Mémoires, auprès des fem
mes qu'ils aiment d'amitié aneureuse ou
d'&mitié sans épithète, ils déposent le har
nais diplomatique, n'habitent plus les de
hors de l&urs âmes ; on les surprend parfois
en déshabillé moral, ils divulguent leur
secret, ils veulent aussi leur part de
bonheur, goûtent la volupté delà confiance
et de la confidence (i).
Si délicatement tracé que soit ce pro
gramme, il permet de deviner que l'his
toire racontée ne sera pas en général très
édifiante. II fait soupçonner que la gau
loiserie salée, et plus encore, le liberti
nage pervers y prendront leurs aises
avec une insolente désinvolture. On
rencontre la vertu même au temps des
Valois, mais elle est là comme perdue
dans le grouillement dont se délectent
d'innombrables Brantômes. Et ce n'est
pas seulement l'intensité de cette fièvre^
la fois raffinée et brutale, qui est prodi
gieuse : c'en est aussi la durée. Il faut
bien regarder ce l«ng et violent phéno
mène qui remplit toute une période de
notre histoire.
Heureusement on y trouve aussi autre
chose que de la galanterie,biem qu'elle sait
en quelque sorte le cadre où se remuent
tant d'éléments. Il y a des épisodes cu
rieux, comme, par exemple, la première
académie de poésie et de musique fondée
en 1570 et mille détails sur les tentatives
faites, de loin en loin, pour ramener la
morale et la pudeur dans un monde dé
chaîné.
M. du Bled nous fait suivr e les phases
diverses de ce mouvement où se confon
daient tous les intérêts. Quelle quantité
de lecture 1 Certains chapitres ont ab-
ssrbé la matière de cinquante volumes.
Sur la société de Richelieu et sur Pôrt-
Royal, l'auteur a réussi à grouper des
détails nombreux qui complètent ces su
jets souvent étudiés. Il a réservé à la
prédication avant Bossuet une part éten
due et intéressante Jqui permet de juger,
outre les variations de la méthode et de
la manière, les changements des idées et
des mœurs, les reculs et les progrès. A
côté des hommes d'église et des hommes
politiques, les gens de lettres des deux
sexes tint la grande place qui leur con
vient. Le salon de Mlle de Scudéry et les
amis de Mme de Sévigné jouent leur
rôle, qui mérite toujours d'être observé
et que M. du Bled retrace avec vivacité.
Les modes et les costumes reparaissent
aveo leur diversité et leur aberration
également inépuisables. L'auteur n'au
rait-il pas pu réserver à la vie des cou
vents un domaine spécial ? Il y avait là
beaucoup d'égarements ; mais la haute
vertu et la foi éclairée n'en étaient pas
absentes. Il est vrai que M. du Bled s'eBt
surtout occupé de la Cour. Elle fut si
longtemps le centre de l'activité et de
l'agitation qu'elle semblait avoir absorbé
la France entière. D'un style élégant et
fin, l'auteur a reconstitué tout un monde,
toute une époque, et il en fait pressentir
la destinée. Dans ces pages brillantes où
l'on voit vivre l'ancien régime, on com
prend mieux comment l'ancien régime
devait mourir: et, certainement, les vo
lumes suivants qui nous rapprocheront
peu à peu de la Révolution, feront encore
mieux saiiir les caractères et la cause
du cataclysme social survenu il y a plus
d'un siècle et animé aujourd'hui d'un
élan nouveau.
Eugène T avehniba.
U GUERRE SUD-AFRICAIHE
La guerre sud-africaine poursuit
son cours, toujours avec des alter
natives de succès et de revers, pour
les Anglais comme pour lés Boers,
mais qui n'ont rien de décourageant
pour ces derniers, autant du moins
3ue nous en pouvons juger, même
'après les informations que nous
fournissent les agences britanni
ques. ,
Il faut convenir néanmoins que
le voyage de Mme Botha donne à
penser, malgré, ou plutôt à cause
des commentaires contradictoires
dont il est l'objet. On ne peut
vraiment guère s'arrêter aux déné
gations des journaux qui soutien
nent mordicus que la vaillante
femme du général en chef desBeers
n'est chargée d'aucune mission, et
qu'elle est simplement venue en Eu
rope pour y remettre sa santé. Ces
affirmations sont d'ailleurs tenues
en échec par des affirmations con
traires, également énergiques, et
que l'on peut croire tout aussi au
torisées. <
Dans l'impossibilité où nous som
mes de choisir entre ces contradie-.
tions obstinées, le plus sage est
évidemment d'attendre que la vé
rité se fasse jour ; elle n'est jamais
très longtemps prisonnière, et nous
mettra bientôt au courant du réel
état des choses.
A la réflexion, la ténacité réci
proque de ces contradictions sug
gère la conjecture qu'elles pour
raient bien avoir droit chacune à
une part de crédibilité. On sait
déjà que les Boers, tout en conti-
(l)Là société fr&nçaiée,du XVI • Siècle àu
siècle, par il. Victor du Bled. Librairie
Perrin, Paris.
nuant de combattre avec un admi
rable héroïsme, ne sont pas tous
également confiants dans 1 issue fi
nale de la lutte, ni tous également
décidés à la poursuivre désespéré
ment, sans repos ni trêve,jusqu'à la
mort! A diverses reprises, deux
partis ont paru se dessiner parmi
eux : un parti de la meilleure paix
possible, et un parti de la guerre à
outrance ; le premier fait valoir que
f>ersisterplus longtemps dans une
uttesi manifestement inégale, c'est
vouer à une extermination totale la
race des Boers,et à une ruine irré
parable tout le territoire des deux
républiques; à quoi le second parti
répond qu'avec les Anglais, la paix
sera pire que la guerre, et que leur
domination consommera méthodi
quement, par esprit de vengeance,
et par peur des revanches de l'a
venir, toutes les destructions, toutes
les ruines qu'on espère éviter par
la soumission...
Ainsi s'expliqueraient les contra
dictions auxquelles donne lieu le
voyage de-Mme Botha; elles ne se
raient que l'expressien des deux
courants qui se partagent les esprits
Êarmi ces héroïques et infortunés
oers, et viendraient ainsi compli
quer douloureusement les suprê
mes péripéties de ce terrible drame.
F. L.
LE SOUVERAIN PONTIFE
ET L'UmVEBSITÉ DE GUSCOW
L'Université de Glascow, çui fut éri
gée et gratifiée de divers privilèges par
le Pape Nicolas V, a célébré ces jours-ci,
en des fêtes solennelles, son quatre cent
cinquantième anniversaire. Dans cette
circonstance, tout le corps académique
et les étudiants ont tenu à envoyer à Sa
Sainteté Léon XIII une adresse qui rap
pelait que cet Institut, aujourd'hui si
florissant, dut son existence au Saint-
Siège.
Le Souverain Pontife ne pouvant as
sister aux fêtes, le préfet de l'Université
le priait respectueusement de donner à
celle ci une autre marque de sa bienveil
lance. Léon XIII a répondu par une let
tre écrite en un latin d'une grande élé
gance, et dont voici la traduction :
A Nstre Vénérable Frère Herbert
Story, -préfet et vice-chancelier,
ainsi qu'au recteur, aux profes
seurs'et aux étudiants de VUni-
vèrsité de Glascow.
LÉON XIII, PAPE.
Sachez gue votre lettre collective
Nous a été agréable. Cultiver le
souvenir des bienfaits reçus, et bien
plus, les proclamer publiquement
et en toute franchise, c'est là certes
la vertu d'une âme dont les senti
ments ne sont ni bas ni étroits. Et
c'est uue telle vertu qu'il Nous plaît
de reconnaître envous, et qui ajoute
un vif éclat à celui de vos excel
lents travaux et de votre talent.
Comme la grande Université ou
se déploie votre zèle à tous doit son
origine au Siège apostolique, votre
pensée reconnaissante s'est élancée
vers le Pontife romain, à la veille
des fêtes du centenaire d9 cet Insti
tut, et spontanément vous Nous
avez convié à Nous unir à votre
joie. Il semble que quelque chose
vous aurait manqué, si veus n'aviez
pas reçu à cette époque une mar
que de Notre bienveillants. Certes
Nous avons pour agréable et Nous
apprécions hautement une telle
preuve de déférence, jointe à la
justesse de votre jugement.
Repassant dans Notre souvenir
nés antiques annales, Nous Nous
transportons complètement en es
prit parmi vous durant ces jours, et
rîotre pensée s'arrête avec joie sur
l'institution si utilement créée par
le Souverain Pontife Nicolas V. Par
cette fondation certes, Notre grand
prédécesseur a rendu à la nation
écossaise un service immortel. En
outre, il a mis en évidence ce fait
que par sa nature propre, la vertu
du pontificat romain contribue gran
dement au progrès des connaissan
ces supérieures et des arts libéraux,
qui entretiennent surtout la civilisa
tion des peuples.
Nous souhaitons que cet illustre
asile des hautes sciences demeure
toujours florissant par l'abondance
de ses fruits salutaires et par l'éclat
de sa renommée : Nous prions le
Dieu tout-puissant qu'il daigne
dans sa bienveillance diriger vos
doctes labeurs, en tout ordre de
connaissances, vers la vérité, et
vous unir tous avec Nous par les
liens d'une parfaite charité.
Donné à Rome, près de Saint-
Pierre, le 9 juin de l'année 190 i , de
Notre pontineat la vingt-quatrième.
LÉON XIII, PAPE.
AU 8&NAT
La loi sur les associations.
Sixième journée.
« Vous voulez transformer ce
grand pays de France et changer
son âme. Vous ne réussirez pas ! »
C'est un républicain de vieille
date, c'est un « ancien 363 », ami et
disciple dô Gambetta,, adversaire
acharné du régime de (< l'ordre mo
ral », — bien mieux : c'est un an.
cie.-î membre du comité de perma
nence des '33 fondé sous leSeize-
Mai pour lutter contre le maréchal,
en un mot, c'est M. de Marcère, qui
a adressé hier à ses coreligionnai
res politiques la phrase que nous
venons de reproduire. M. de Mar
cère a ajouté :
— Ne continuez pas à violer mani
festement, ouvertement, les princi
pes de liberté, d'égalité, qui sont la
base et le fondement même de no
tre vie nationale. Ne le faites pas
avec cette légèreté ou avec cette
certitude d'insuccès dans votre en
treprise ; ou, si vous le faisiez, si
vous continuiez cette guerre à la foi
nationale, à la liberté, aux principes
de la Révolution françaisej il en est
un dans cette Déclaration des droits
de l'homme, qu'on veut afficher sur
les murs et qu'ilfaut vous rappeler,
je parle de l'article de la Déclara-
tien des droits de la Constitution
de 1791, où il est dit qu'une des
conditions essentielles de la liberté,
c'est le droit à la résistance contre
l'oppression.
On lira Ge beau discours qui a
produit sur le Sénat une impression
réelle. En terminant, M. de Marcère
a conjuré la Chambre haute de ne
pas conduire le pays « à la néces
sité redoutable de la résistance »,
car, a t-il dit, « on ne sait pas jus
qu'où elle va et où elle porte !... »
Que les sectaires du Luxembourg
y songent bien. Aucun d'eux n'a du
oublier les luttes du 16 mai. Eh
bien l M. de Marcère adressait alors
— presque dans les mêmes termes,
si nos souvenirs sont exacts—à
MM. de Broglie et de Fourtou l'a
vertissement prophétique qu'il don
nait hier au Sénat. Il suppliait les
ministres du maréchal de ne point
acculer le pays à la résistance...
Tous les républicains sincères —
libres-penseurs ou croyants — de
vraient désirer que les conseils de
M. de Marcère fussent suivis.;
L'amendement de M. de Marcère
tendait à supprimer les articles 13 à
18; c'est-à-dire que l'ancien ministre
demandait au Sénat de considérer
que les congrégations no doivent
pas être placées sous le régime de
la loi proposée, qu'elles doivent être
considérées comme faisant partie
intégrante de l'Eglise et, par consé
quent, être placées sous le régime
du Concordat..
M. Vallé, rapporteur, ne sachant
comment répondre à son contra
dicteur, s'est borné à dire que M.
de Marcère étant rentré dans la dis
cussion général®, il n'y avait pas
lieu de le suivre sur ce terrain. Et
le Sénat a passé outre.
Dans la séance d'hier, les articles
8 à 12 ont été adoptés sans change
ment.
On abordera aujourd'hui l'article
13. Il suffira de le citer pour qu'on
juge de son libéralisme :
« Aucune congrégation religieuse
ne peut se former sans une autori
sation donnée par une loi qui déter
minera les conditions de son fonc
tionnement.
« Elle ne pourra fonder aucun
nouvel établissement qu'en vertu
d'un décret rendu en Conseil d'E
tat.
« La dissolution de la congréga
tion ou la fermeture de tout établis
sement pourront être prononcées
par décret rendu en conseil des mi
nistres. »
De nombreux amendements ont
été déposés et seront discutés au
jourd'hui. C'est, en effet, sur cet
article que se livrera la grande ba
taille.
J. M àntenay .
A LA CHAMBRE
Les retraites ouvrières.
La Chambre a clos hier la dis
cussion générale du projet sur les
retraites ouvrières, et prononcé
l'urgence par 458 voix contre 60. On
avait entendu, au cours de la séan
ce, de nouvelles critiques du texte
de la commission et les explications
du ministre des finances.
M. Caillaux tenait à répondre plus
particulièrement aux objections for
mulées, il y a quelques j ours, par M.
Ribot.
Il affirmait qu'on exagère en par
lant d'une accumulation de capitaux
devant atteindre, en un demi-siècle,
la somme de 22 milliards ; on doit
prévoir un maximum de 9 à 12 mil
liards qui pourront être employés
en prêts aux départements et aux
communes, et aussi en achats de
valeurs internationales.
Il n'est pas exact de dire que
l'Etat sera libre de disposer de ces
capitaux, puisque la Caisse des dé
pôts et consignations est indépen
dante ; le gouvernement est d'ail
leurs tout disposé à mettre les so
ciétés de secours mutuels sur le
même pied que la Caisse nationale
des retraites. Enfin, l'Etat ne s'in
terdit nullement, dans l'avenir, la
conversion de la rente, il s'engage
seulement à servir à la Caisse des
retraites une subvention suffisante
pour donner à son portefeuille un
revenu de 3 pour cent.
Les autres orateurs ont formulé
dés réserves et expo&é des systè
mes.
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