Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-05-02
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 02 mai 1901 02 mai 1901
Description : 1901/05/02 (Numéro 12124). 1901/05/02 (Numéro 12124).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7107152
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Jeudi 2 Mai 1601
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Hditlcn notîâUa».' £» 12,184
Jeudi 3 Mai 1901
ËMÎÏGN QUOTIDIENNE
PARIS
SB. DÉPARTEMENTS
U& fiSit*'*nie* ^0 A
Six mois...... 21 « ».
Trois mois.*... 11 »
.-ÉTRANGER
(UNION ÎOSTAJLS}
51 »
26 5G
14 »
bs» abonnements partent des I e * et 13 de eliaqua mois
UN NUMÉRO [ Jf ls V * cent '
{ Départements..,,. 15 —
BinîgAïîX s Paris, rus Cassette, 17
Oa s'abonne & Rome, plaça du Gesù s .1
13 T
LE MONDE
êMTïQW gSMï-QtJOTIBMNîîa
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Six. mois...,;. 10 » 48 » !'
. Troie mois g » • 6 ££
fiés ajbsBjiesiêiiia partent des lo/et 16 ds cïsaqss aïoift
L'UNIVERS rte répond pas des vtanuscHis gui lui ssr,i adressât
^ " AKNOiÉCE®
MM. LAGRANGE; cerf e! c", S, place de 1s Boums
Iles t née essaire de Joindre & tonte
lettre, quel qu'en soit l'objet, «ne des
dernières bandes d'adresse Impri
mées* rectifiée s'il y a lieu»
PARIS, i" MAI 1901
©OSKiMiAJÏSJEI
Y ves L ancêtre,
P ierre V euillot.
E ugène T averoteh.
Post-seriptum.......
Finissons-en,......
Tolstoï et la saint-
* synode..,.:.*...,..
Correspondance ro
maine.... .••• *** —
Lettres de Belgique." L.
fcettres d'Egypte.... A. C otjderc.
Nouvelles agricoles A. de V iliïer S de
l' I sle- A dam.
BûIIeiln. — Nouvelles de Rome. — Pour
les congrégations: — Tolstoï et le saint-
synode. — Un nom . justifié. — Laïcisa
tion d'école. — Les attaques contre le
clergé. — Le référendum des mineurs.
— Le i ep mai. — Les bagarres d'Alger.
— En Algérie. — A Tunis. — Chroni
que. t En CSiiue. — La guerre du
Tranévaal. — Dépêches de l'étranger.
— La reine du Paradis. — Chronique re
ligieuse.— Conférences du Luxembourg.
— Vols Baorilèges. — En province. —
Nécrologie. —- Echos de partout. —
Les industries du livre. — Le crime de
Gor&ncez. —Tribunaux. — Jardin d'ac
climatation. — Nouvelles diverses. —
Calendrier. — Dernières nouvelles. —
Bourse et bulletin financier. -
POST-SCRIPTUM
Un ami attire mon attention sur
certaine lacune de mon article >
Unité' de l'âme française. _
— Vous avez démontré, mo dit-il,
torité, aussi nécessaires
que
l'autre pour réunir tous les citoyens
dans l'unité de la pensée et dans l'u
nité de l'action . C'est bien. Mais vous
avez négligé un aspect de la ques
tion. Il me semble que vous auriez
mieux affiché l'impuissance de ces
messieurs à rétablir l'unité dans la
nation, si vous les aviez montrés
incapables de conserver l'union au
sein même de la famille.
— Alors, lui dis-je, vous pensez
que beaucoup de ces grands prô-
neurs d'unité et semeurs de dis
corde, pourraient, bien ne pas of
frir des modèles d'union fami
liale?
— Si j'avais .des. .motifs de le
croire, je sais que vous ne voudriez
pas employer cet argument ad ho-
minem. Mais n'y a-t-il pas des symp
tômes publics, et le mal dont un
parti -politique est atteint ne se ma-
nifeste-t-il point par de certains
désordres^ comme tout, mal dont
souffre un organisme quelconque ?
Avant d'entreprendre ae nous ral
lier à leur doctrine, les ennemis de
l'Eglise devraient bien s'accorder
entre eux. Ceci vous ramènerait, il
est vrai, sur le terrain des doctri
nes. Pour rester sur le terrain de la
famille, vous avez la loi du divorce
et les ravages faits par cette loi, no
tamment dans le monde des politi
ciens hostiles à la religion.
A commencer par le promoteur dé
eette loi, qui nous dira où réside le
fameux Gustave NaqUet ? Sur quels
chemins roule -t-il sa bosse? Ayant
introduit dans la législation fran
çaise ce principe de dissolution so
ciale, il s'est payé lui-même le prix
d 'une telle besogne : il s'est; dit-on,
expatrié.Pour unFrançais d'origine
juive, le saerific» a dû être léger; la
séparation d'avec l'âme française
n'a provoqué aucune déchirure : la
bourse était sauve. Ce fugitif n'a pas
malheureusement emporté avec lui
la loi qui désunit les familles.
— Je ne sais s'il y a beaucoup
de. divorcés parmi ces messieurs.
Ils lé seraient tous que pas un ci
toyen ne pourrait le trouver mau
vais, pas plus qu'ils n'auraient eux-
mêmes légalement'le droit d'en
rougir. N'est-ce pas en vertu de la
loi que le divorce se pare de sa nou
velle femme? Les mesures de ri
gueur prises parle-ministre de la
guerre à l'égard de certains offi
ciers dont les femmes refusaient de
frayer avec les femmés divorcées
d'autres officiers, n'avaient pas
d'autre but que de conquérir au di
vorce, par la forcp, l'auréole atta
chée au mariage légitime.
— Je saisis votre pensée, voici
•ornment je la formule : Mettons que,
parmi les preneurs de l'unité, il y ait
aes divorcés. Il y en à certainement.
Le privilège de laloiNaquet est tom
bé au cœur des familles dont ils sont
les : pères, comme un épervier sur
une volée de ramiers,.ou comme la
fouine sur ixne.couvée de .poussins.-
Le lien de la famille est dissous, la
nichée s'envole où elle peut : fplus
d'autorité, plus d'éducation, plus de
bon exemple.. Est-ce là l'unité de la
famille? Il n'y.» plus de famille du
tout.
« Que les politiciens qui préconi
sent. cette loi, qui en ont hâté -les
suites, qui s'efforcent vainement de
racoler la considération à une chose
couverte dé mépris, nourrissent,
en outre, l'incroyable prétention de
fournir les éléments, à l'unité de
l'âme française, c'est le fait, n'est -il
pas vrai? ou d'une naïve confiance,
ou d'un esprit machiavélique.
« Il serait curieux et instructif, si
les maisons habitées par eux
étaient de verre, dé jeter un regard
au foyer de ces législateurs intè
gres qui, à l'aide de principes men
songers, décapitent la loi d'ensei
gnement, étranglent la loi d'asso
ciation, et prêchent vertueusement
l'union, l'unité du peuple français.
Les murs sont discrets; le verre
nou3 permettrait de plonger dans
les arcanes, de constater si l'u
nion et la vertu qui siègent au foyer, ■
autorisent par l'exemple l'union
et la vertu qu'ils prêchent en pu-
plic.
— Vos remarques, répondis-je à
mon interlocuteur, méritent d'être
soumises aux lecteurs de l'Univers.
Elles contiennent la rectification
que mon article avait provoquée
dans votre esprit. Si vous le per
mettez, je rédigerai le procès-ver
bal de notre conversation et j'en
donnerai une copie conforme.
Yves L àncètre. " •
"BULLETIN
La journée du i er mai s'est jusqu'ici
tassée tranquillement en France comme
l'étranger; du moins on ne signale au
cun incident sérieux.
La grosse question du moment est
toujours celle du référendum des mi
neurs. La majorité pour la grève géné
rale est grande parmi les votants, mais
ces vêlants ne forment pas le tiers du
nombre des mineurs. Dans ces condi
tions peut-on dire qu'il y ait une majo
rité?
On annonce de Lille que les mineurs
du Pas-de-Calais ont immédiatement dé
cidé qu'ils ne suspendraient pas, le tra
vail. D'&illeurs le comité du syndicat,
réuni sous la présidence deM.B&sly, a
rédigé et adressé aux mineurs un ma
nifeste contre la grève générale.
' De nouveaux désordres ont eu lieu à
Alger qui paraissent avoir une certaine
gravité -, le maire, M. Max Régis, et son
frère ont été blessés. Nous donnons plus-
loin des détails.
L'affaire de Margueriite semble tout
à fait terminée.
Les dépêches de Chine ne nous fixent
pas encore sur les résultats desdernières
opérations militaires. Si, par la voie de
Londres, on annonce un échec des Alle
mands, qui encouragerait les Chinoisi
nous ne sommes pas fixés sur la gravité
dudit échec. ■ ' ' •
Une dépêche explique comment' les
troupes françaises qui marchaient avec
les Allemands n'ont pas pris part au
cembat. Il ne faut pas voir, là l'indice
d'un dissentiment entre les Français et
les Allemands. <
; Du Transvaal aucune nouvelle im
portante. On dément que M. Cécil Rho*
des ait failli être pris par les Boers;
comme certains nouvellistes l'avaient
annoncé.
Les Chambres italiennes sent de nou
veau réunies; au Sénat, le ministère a
obtenu un succès; à la Chambre des dé
putés, M. Villa a déclaré qu'à, la suite
de la manifestation de sympathie dont
il a été l'objet avant les vacances, il
croit devoir retirer sa démission.
... î. m' • ♦ :
NOUVELLES DE ROME
Au Vatican.
Rome, 29 avril.
Aujourd'hui S. S. Léon XIII a reçu en
audience particulière : Mgr Paul Bas-
tous, archevêque maronite de Tyr et
Sion; Mgr Stanislas Taleski, délégué
apostolique des Indes orientales; Mgr
Joseph Ridolfl, évêque de Todi ; Mgr Jo
seph . Martinelli, évêque de Penne e
Atri. , • '.
— Par billet de la sécrétairerie d'Etat,
le Pape a nommé S. Em. le cardinal
Barthélémy Bacilieri protecteur des reli
gieuses missionnaires connues, bous le
nom de RR. MM. de la Nigricede Vé
rone. ' : --
La vie catholique & Rome:
A l'église du Gesù vient d'avoir lieu un
triduum solennel en l'honneur de la bien
heureuse Jeanne de Lestônnac, fonda
trice de l'ordre des Filles de Notre-
Dame. Hier, dernier jour du triduum, la
messe a été célébré par S. Em. le cardi
nal Rampolla di Tindaro. La communion
générale a été très nombreuse, et toutes
les élèves de l'institut de Saint-Denis y
ont pris part.
Chacun des trois jours, il y a eu le ma
tin une messe de communion célébrée
par un éminentissime cardinal, et une
messe pontificale célébrée par un arche
vêque; panégyrique en italien, et, béné
diction du Saint-Sacrement donnée par
un cardinal. Les chants étaient exécu
tés par les mémbres des « chapelles >
des basiliques romaines. A l'intérieur
étaient suspendus les tableaux qui ornè
rent Saint-Pi erre lors de la béatification
de la Bienheureuse de Lestônnac. Outre
ces décorations, magnifiques, le promo
teur de la cause, Mgr Virili, avait orga-
niséune superbe illunûoatioiL>§électrique,à
^intérieur et à l'extérieur du temple. Â
chacune des fonctions l'affluence était
considérable.
Dans la cité.
"La chambre de travail de Borne vient
d'afîicher un manifeste dans lequel on
invite tous les ouvriers de Rome à s'abs
tenir du travail 1s i" mai, et à se rendre
à une grande réunion où' parleront des
orateurs socialistes, le^ professeurs La-
briole, Soldi, et les avocats Tuccari et
Merliao.
11 est dit dans le manifeste que les
grands succcb obtenus par la olasse ou
vrière en Italie donnent à cette solennité
use importance exceptionnelle.
Lé manifeste finit par le cri : Vive le
i fr mai ! Vivent les travailleurs du
monde entier!
FINISSONS-EN
Savez-vous ce que forait un gou
vernement despotique, un pouvoir
d'ancien régime, pour mettre un
terme aux troubles d'Alger, sur
lesquels vous trouverez plus loin
des détails? Il coffrerait ou expul
serait les chefs et les états-majors
des partis en guerre Et la tranquil
lité serait rétablie. Le moyen ne sem
blerait peut-être pas d'une justice
parfaite ni, surtout, légale; mais
quelle compensation soua le rap
port de l'efficacité!
Les institutions, : comme les
mœurs, ne permettent plus ces pro
cédés expéditifs. Et ei on est parfois
presque tenté de le regretter un
peu, il faut convenir ' que, somme
toute, c'est un bien. Ne maudissons
pas trop notre temp3, même quand
il nous parait avoir trop re3treint"le
champ d'action de l'arbitraire. Nos
gouvernants font ils donc un tel
usage cle leurs prérogatives qu'on
doive déplorer de les voir si- rédui
tes?
En face de l'agitation qui ensan
glante Alger, le pouvoir exécutif
n'est d'ailleurs pas impuissant. La
compression immédiate et radicale
lui est impossible^ Mais il y a d'au
tres moyens, et qui pour etre plus
lents ne sont pas moins sûrs, de ré
tablir la paix. Le gouvernement,
s'il ne songeait qu'au bien du pays
et à l'équité, sortirait vite d'embar
ras et, arrêtant ses résolutions, par
viendrait encore assez prompte-
ment à terminer la crise.
Une ville y tout entière ne se met
point dans uné pareille ébullition
sans motif. En partie, au moins, les
plaintes et les revendications que
formulent les Algérois doivent être
fondées. Un examen sérieux et im
partial ferait connaître ce que com
mandent l'intérêt national et la jus
tice. On accorderait, sans retard, ni
détours, ni reprises, teut ee qu'il y
a lieu d'accoraer. Après quoi, l'on
serait impitoyable, avee une lar
geur sereine,"^ pour les tapageurs,
meneurs et pêcheurs en eau trou
ble de n'importe quel parti.
Lè gouvernement qui agirait de
la sorte serait sûr d'être soutenu
par tous les citoyens raisonnables,
tous les gens tranquilles, d'Algérie
et de France. Il n'aurait là qu'un
appui moral ; les gens tranquilles
n en donnent pas d'autre. Mais,
dans l'occasion, ce serait suffi
sant ; .
Nous ne pouvons guère attendre
cette conduite de nos maîtres ac
tuels. C'est un malheur, car il y a
urgence. Le régime des coups de
revolver, de couteau et de matra
que n'est pas normal. Voici déjà
trop longtemps qu'il dure. Il dé:
veloppe un état d'esprit qui porte
ses ravages plus loin qu'Alger
mêaie et devient dangereux pour
l'avenir de notre colonie. Finissons-
en.
Pierre V eoillot.
TOLSTOÏ & LE SAINT-SYNODE
.Nous reproduisons plus loin les
passages principaux de la réponse
que le eomte Tolstoï vient de rédi
ger contre le Saint-Synode. Le
Temps la publie en entier.
C'est un long morceau où là co
lère et l'orgueil frémissent sous le
voile de la modération et de l'humi
lité. Les blasphèmes de tout genre
y sont répanaus à pleines mains et
comme au hasard. La'divinité" du
Christ, les sacrements, le dogme de
la Trinité, l'enfer, le culte, la prière
dans les temples, etc., sont niés
comme des principes absurdes et
scandaleux.
Bien entendu, le romancier-pro
phète veut appuyer sur l'Evangile
toutes ses dénégations blasphéma
toires et il explique do nouveau
gu'il est à peu près seul en Russie
a comprendre l'Évangile.
Il a expliqué jadis de quelle ma
nière il s'y est pris pour l'étudier.
C'est un enfantillage misérable.
Tolstoï marquait au crayon bleu les
passages qui lui paraissaient clairs ;
au crayon rouge les autres. Puis,
ayant réfléchi, toujours selon - les
conseils de son humeur, il procé
dait à un nouvel examen et faisait
un choix . définitif. Ainsi, il a sup
primé la plus grande partie du li
vre sacré ; et ca qu'il en a gardé est
souvent une.énorme et puérile ca
ricature. Dé tout ce que le Christ a
dit sur son unité consubstantielle
avec le Père, sur le droit des apô
tres de lier et de délier, sur le tri
but à César, sur la prière en com
mun, sur l'enfer, tout cela se trouve
biffé par l'infaillible crayon rouge
et ne compte pas. "
. On peut définir facilement la ca
ractéristique dç l 'état d'esprit de-
Tolstoï : prétention constante et
incap«v~.ité radicale à traiter, des
doctrines. Chez certains écrivains
-de grand talent, l 'esprit n'arrive pas
à se délivrer des images et parfois
il se confond irrémédiablement avec
les images. Ceux-là profèrent des
inepties qui montrent, traduites en
beau style, juste les pensées de M.
Ilomais et parfois d'un Ilomais in
férieur. De Tolstoï telles et telles
pages, magnifiquement tracées, va
lent, pour le fond, les conceptions
intellectuelles des philosophes que
l 'on rencontre chez nous à table
d'hôte, ou dans les innombrables
ezfés du commerce. '
Il repoussera Trinité, parce qu'elle
est. incompréhensible. Mais il ad
met Dieu. Est-ce qu'il comprend
Dieu?
Ne le lui demandez pas. Il suit
son humeur, qui lui sert de théolo
gie et de philosophie.
Un livre finement écrit par M. An
dré Beaunier (i) cite une anecdote
où se peint la fantastique et puérile
vanité de Tolstoï. Devant un ami qui
se permettait de le contredire, très
courtoisement d'ailleurs, on voit le
romancier-prophète se redresser ©t
répondre d'un air dur : « Je ne peux
« pas souffrir tju'on ne soit pas de -
« mon avis. » . Cette petite scène
n'est-elle pas, en peu de mots, très
significative ?
Génie, orgueil et bêtise se mêlent
dans l'âme de Tolstoï. Ce mélange
peut être très malfaisant, car il plaît
a beaucoup de pauvres diables, qui
ne savent plus du tout ce qu'ils veu
lent.
M. Beaunier dit vers la fin de son
livre : « Quelque chose naît là-bas,
« quelque,chose de prodigieux et de
c fécond, dans 1© silence infini des
« plaines de neige. Et cela déchi-
« rera, un jour j le suaire lourd de
« neige. » Il e3t possible que Tols
toï déchaîne la révolution en Rus
sie et qu'il ait ainsi la fécondité.;,
des fléaux. •
Eugène T avernusr.
CORRESPONDANCE ROMAINE
Rome et la question d 'Autriche.
Rome, 28 avril.
Le'"mouvement du « Los von
Rom » est naturellement suivi, à
Rome même, aveeune attention fort
émue/ : "
Tous les partis s'en occupent.
L'autre jour, c'était la Tribuns, qui
exprimait son mécontentement de
l'emploi continu du mot de cr Rome »
comme synonyme du Vatican et de
l'Eglise catholique; Oa lai a ré
pondu avec beaucoup de-raison que
ses lamentations n'y feraient rien ;
et qu'il lui faudra se résigner long
temps encore a voir le monde iden
tifier la Ville Eternelle avec l'Eglise
etla Papauté.
Ce qui n'est pas moins surpre
nant, c'est que ces alliés officiels
de l'Autriche ne montrent aucun
souci de son intégrité territoriale.
On se souvient peut-être qu'il y a
six mois, la presse quirinaliste
tenta de soulever un incident diplo
matique entre le Vatican et l'Au
triche, parce que Léon XIII s'était
permis de recevoir deux évêques,
aussi bons Autrichiens d'ailleurs
qu'ardents patriotes slaves, i
Aujourd'hui, le prince héritier
d'Autriche vient lui-même de dé
noncer avec éclat dans le prétendu
mouvement de, séparation d'avec
Rome, une manœuvre dirigée con
tre l'Autriche elle-même. Los von
Rom, s'est écrié l'archiduc Fran
çois-Ferdinand d'Esté, cela veut
dire Los von Osterreich. Quiconque
a suivi les événements d'Autriche,
quiconque a lu le patriotique ou
vrage d André Chéradame sur VEu
rope et la,-- question d'Autriche au
seuil du XX' siècle (*2), ne peut avoir
le moindre doute sur cette identifica
tion dénoncée par le. prince héritier
d'Autriche.
Mais les directeurs libéraux de
l'opinion .publique en Italie n'ont
jamais cacné leur jeu. Il est évident
que ce n'est pas sur le gouverne
ment de la péninsule que "Autriche
pourrait compter le jour où son
existence serait compromise par la,
cupidité allemande. La monarchie
italienne serait au contraire en
chantée de recevoir une part du bu
tin;," et même si magne », voulait garder pour ; elle
seule les régions irredente ae Trieste
et du Trentin, elle chanterait en
core les gloires du conquérant.'L'I
talie officielle, telle que l'a faite la
Révolution, se résignera à. jouer
n'importe quel rôle dans le monde
transformé par le Pangermanisme ;
ses conditions historiques la con
traignent à accepter avec recon
naissance les situations les plus
humbles, pourvu qu'à ce . prix, elle
conserve 1 existence et un semblant
de sceptre.
Devenir une préfecture du grand
empire allemand, voilà toute l'am
bition de ces hommes qui ont sans
(1) Noies sur WRusiïe. Paris, Tricon,'rue
de Rennes, 90. - ■
(2) On ne saurait trop recommander la
lecture de cet. ouvrage (un vol. cheg Pion)
Sui est fort remarqué dans les divers mi-
etiï du moufle rotnaig,
cessé sùrles lèvres les mots de pa
trie et de grandeur nationale.
Ce n'est pas de ce côté que l'Au
triche peut chercher des alliés fidè
les. '
"Mais par la force des choses, ici
encore, la caiiso de l'Autriche, qui
est la cause de la justice, de la ci
vilisation, . de la paix européenne,
s'identifie avec la cause me me de
l'Eglise.
Le cri de guerre des pangerma :
nistes l'indique assez nettement :
c'est en attaquant Rome, la religion
romaine, qu'ils espèrent affaiblir
l'Autriche. L'Autriohe sera sauvée,
si les puissances dont la politique
extérieure n'est pas hostile au ca
tholicisme comprennent leur de
voir. Malheureusement, pour des
causes diverses et par une coïnci
dence fort heureuse pour l'Allema
gne, ces puissances se débattent
dans des embarras d'ordre inté
rieur. Si la paix religieuse- et so
ciale pouvait se rétablir à l'intérieur
de ces Etats, ils pourraient suivre
d'une attention moins distraite les
graves événements de l'Europe
centrale. ■
Et en assurant l'existence de
l'Autriche, nécessaire à l'Europe,
ils l'aideraient en même temps à
achever cette évolution vers 1® fé-
triche-IIongrie, dégagée de ses dif
ficultés intérieures, deviendrait cet
Etat fédéral qui, par la nature mê
me de ses différents peuples, se-s
rait le trait d'union entre l'oc
cident et l'orient de l'Europe ; dans
eètte nouvelle Triplice, formée cette
fois de puissances amies, et non
dominées, slave comme la Russie,
catholique comme la France, l'Au-
triche-IIongrie serait le complé
ment naturel qu'attend l'alliance
franco-russe pour produire tous ses
fruits.
POUR LES C0II6RÉ6ATI01S
M. Th. Ilomolle, directeur de Pé-
cole française d'Athènes, vient de
publier une très intéressante étude
sur le développement, de- la langue
française en Grèce. •
M. Th. Homolle rend cet hom
mage aux ordres religieux :
L'enseignement du français est surtout
l'œuvre des congrégations d'hommes ou
de femmes : Lazaristes et Ûblats de
;Saint-François de Sales, Eceurs de la
Charité, sœurs de Saint Joseph de l'Ap
parition et Ursulines. La plus ancienne'
fondation est celle des Lazaristes, qui
ont succédé dans l'ile de S^ntorin aux
Jésuites en 1783; la plus récente, celle
des Obîaîe, qui sont établis au Pirée et
à Naxos depuis moins de dix années.
Nous possédons, grâce à ces ordres re
ligieux, des école3 : pour les garçons, à
Santorin (Lazaristes), à Naxos, au Pirée
(Oblats); pour les filles, à Athènes, au
Pirée (Saint-Joseph), à Syra (Saint Jo
seph et sœura de la.Charité), à Naxos et
Tinos (Ursulines), à Santorin (sœurs de
la Charité) et à Corfou (sœurs de la Com
passion).
Les congrégations ont accompli ici de
ces prodiges qui leur sont coutumiers, à
l'encostre de toutes les règles de la pru
dence humaine, entreprenant sans capi
taux/ s'endettant sans ressources assu
rées, et faisant face à tout à force d'or
dre, d'économie, de dévouement. Telles
les Ursulines de Tinos, qui ont fondé
• avec 600 francs le pensionnat modèle de
Lutra, qui ont commencé par coucher à
la belle étoile, et reçoivént aujourd'hui
dans des bâtiments confortables, au mi
lieu de vastes jardins, cent internés et
une trentaine . d'orphelines, habillent,
nourrissent, soignent les malades du
voisinage, assistent matériellement et
moralement tous les malheureux.
 Athènes, au Pirée, mêmes téméri
tés, mêmes succès : les dépenses enga
gées par les sœurs de Saint-Joseph, dass
leurs deux maisons d'Athènes et du Pi
rée, par le P. Berthet dans l'école Saint?
Paul, dépassent pour chacune cent mille
francs, et la rétribution scolaire est peu
élevée, pas toujours régulièrement payée;
cependant chaque année on améliore et
on amortit. Je cité les plus frappants
exemples, mais, pour le dévouement et
les services, tous les ordres et partout
rivalisent et sont égaux. Leurs progrès,
s'ils excitent quelques jalousies, inspi
rent partout le respect. La dignité de leur
vie, la discrétion scrupuleuse de leur foi
exempte de prosélytisme, la haute mora
lité de leur enseignement, la fermeté
douce de leur discipline, leur charité
comme leurs aptitudes pédagogiques, ont
fagné la confiance des familles, et la con-.
ance a triomphé même de la loi qui in
terdit aux maisons religieuses de rece- :
voir des pensionnaires orthodoxes; Le
succès étâit à ce prix, car les catholiques
ne sont en Grèce -qu'une minorité, une
minorité pauvre, et de condition mé
diocre.
= Une initiative digne de tous les éloges
et de tous "les encouragements vient
d'être prise à Lille par un groupe de ca
tholiques à la tête desquels se trouve M.
Grousseau, l'éminent professeur de droit
administratif des facultés libres.;:
Un comité régional de eonférences a
été organisé pour la défense des congré
gations religieuses.
M. Grousseau a inauguré ces confé
rences . à Bergues avec un très grand
succès.
L'orateur, après avoir très éloqu.em-
ment montré l'iniquité flagrante du pro
jet de loi contre les congrégations, a en
gagé l'assemblée à transmettre à. M. le
sénateur Claeys, maire de Bergues, le
vœu que la loi soit amendée par le Sdnat
dans un sens libéral. f r
Cé vœu a été adopté à l'unanimité.
LETTRES BE_BELGIQUE
23 avril.
La criminalité en Belgique. — Faux bruit*
d'abdication.
— La recrudescence de criminalité,
dont les premiers mois de cette année
ont offert l'affligeant spectacle, n'est pas
sans causer assez d'émotioa, surtout de
puis que deux crimes plus retentissants
se sont succédé à peu de jours d'inter
valle, on peut le dire, au centre de
Bruxelles : ceux de la rue de la Senne et
de la rue du Maelbrck, c'est-à-dire à un
pas des Halles et à un pas du quartier
Léopold, deux quartiers bien fréquenté3
et bien habite'g.
Aujourd'hui, l'on pourrait dire que les
grands chemins sont sûrs et que les 'mai-
sons particulières ûulc plus, grâce
aux cambrioleurs, à ces rejetons dégé
nérés des Cartouche, des Robert 5îa«-
Caire, des Mandrin et des Chauffeurs, à
ces bandits grêles et presque imberbes
qui finissent de vivre à l'âge où leurs pré
décesseurs entraient à peine dans la car
rière. Il n'y a plus de vieillards, si ce
n'est des vieillards précoces, parmi eux,
ni des hommes mûrs, ou si peu qu'ils n»
comptent pas : ils sont usés au bout de
peu d'années£t passent la mainAiie plus
jeunes et plus corrompus qu'eux, triste
produit d'un état social et d'une popula
tion qui a rejeté Dieu de son sein, et qui,
depuis près d'un siècle d'incrédulité, re
tourne, de dégradation en dégradation,;
au rang de la brute.
Un amateur s'est donné la peine de.
compter le nombre des crimes commis
en Belgique et relevés par les journaux,,
pendant le premier trimestre de l'année.
Il arrive à un total de 732 méfaits, dont
236 mc-urtres ou assassinats et 196 tenta
tives..
Admettons que la statistique soit sur
jette à rectification et que son auteur ait
pu manquer Boit de critique soit.de ren
seignements, pour donner à son travail
une grande valeur ; mais il faut dire
aussi que les statistiques officielles ou
judiciaires ne sont pas moins fautives.,
Que d'affaires classées avant d'avoir
suffisamment déterminé leur caractère:.
que d'altérations subies par le crime dé
féré à la juridiction correctionnelle,
uniquement pour échapper à l'impunité,
totale !
Or on accusera les lois et la justice :
on dira qu'on fait mauvais usage de la
libération cosdiiioBnelle, puisque l'as-,
Bassin do la rue de la Senne, Smellinckx^
est an libéré conditionnel et indigne.
' Ds fait, nos institutions pénitentiaires
sont peut-être trop, clémentes et nos ad-r
ministrations trop confiantes. Mais ce.
n'est pas tout; Les mœurs sont mauvai
ses : on connaît l'intime relation qui;
existe entre le vice et le crime. Les sol
licitations malsaines se multiplient sous
nos yeux avec une intensité effrayante.
Pour arrêter le débordement de la litté
rature licencieuse et donner une sanction,
efficace à ses mesures préservatrices, le
ministre des chemins de fer a dû faire
appel à son collègue de la justice, qui a
donaé aux Parquets des ordres sévères,
mais salutaires ; et, pendant ce temps,
le tribunal de commerce de Bruxelles
lâche la bride aux éditeurs d'œuvreï:
malpropres, sous prétexte de sauvegar-*
der la liberté commerciale.
Mais tout se tient : ceux qui vivent
dans la débauche sont aussi ceux qui vo
lent et assassinent, et l'on ne verra pas
diminuer le nombre de ceux-ci, tant que.
l'on n'aura pas réussi à réfréner l'audace
des premiers.
— Une fois de plus, des faux bruits ont '
été mis en circulation : ils disaient que
le roi a l'intention d'abdiquer. Il devient
désormais superflu de démentir ces ra
contars, parce qu'à l'étranger même et
notamment en France, on sait à quoi s'en
tenir et sur nos aiTaires intérieures et sur
les dispositions de Léopold II.
Le prétexte qui a servi de thème à ce# ?
bruits, c'est l'habitude des "voyages.qui
semble croître avec l'âge chez notre sou- •
verain : d'où ces gens à courte vue con
cluent que les affaires de.l'Etat ne l'inté- j
ressent plus. Autant dire que les minis- '
très, députés et sénateurs qai prennent
quelques vacances, se moquent de leur
mandat. Est-ce sérieux ?
Les socialistes y ont mis leur part de
grossièreté, et le Peuple, qui ne trouve
rien â redire aux villégiatures de M. ;
Vandervelde, en pleine lune de miel,
opine qu'on peut se passer d'un roi si
peu chez lui. .
Dira-t-il aussi que le parti socialiste
peut se passer, de M. Vandervelde ou que.
celui-ci peut s'en passer, parce qu'il lui "
accorde si peu de temps? L'une et l'autre,
proposition seraient également fausses.
Mais on voit, de nos jours, d'étranges
choses.
Ces meneurs des prolétaires confiants
et jobards ionnent eontre le capitalisme
et se paient du luxe, à côté des souve
rains. Vandervelde I" était le voisin d'hô
tel du roi Léopold, et rien ne dit que ce
dernier, l'ayant rencontré, par hasard,
— le hasard fait si bien les choses, ! —
n'ait fait un bout de causette ou un aima-
ble salut au fareuche révolutionnaire.
D'autant plus qu'on dit que ce dernier
n'est plus aussi insensible que naguère
aux séductions,de la politique royale et "
qu'il est devenu aussi congolais que [le
premier citoyen.de Belgique. J'en' ai
déjà parlé. Mais ce que je n'avais pas
encore dit, c'est que M. Vandervelde
avait interrompu son voyage de noces
pour venir réocceper'son siège au Par
lement et quoiqu'on l'eût dit souffrant.
On a. dit que c'était pour empêcher les
socialistes de la Chambre de ruer danp
ïest&Bgs à propos dfc Congo, et ij a soi-
)
Hditlcn notîâUa».' £» 12,184
Jeudi 3 Mai 1901
ËMÎÏGN QUOTIDIENNE
PARIS
SB. DÉPARTEMENTS
U& fiSit*'*nie* ^0 A
Six mois...... 21 « ».
Trois mois.*... 11 »
.-ÉTRANGER
(UNION ÎOSTAJLS}
51 »
26 5G
14 »
bs» abonnements partent des I e * et 13 de eliaqua mois
UN NUMÉRO [ Jf ls V * cent '
{ Départements..,,. 15 —
BinîgAïîX s Paris, rus Cassette, 17
Oa s'abonne & Rome, plaça du Gesù s .1
13 T
LE MONDE
êMTïQW gSMï-QtJOTIBMNîîa
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y- , paris étranger "
< ■ £* DÉPARTEMENTS (UNIOS POSTALE}
gaaû.-,...,.., 20 » gg » .}
Six. mois...,;. 10 » 48 » !'
. Troie mois g » • 6 ££
fiés ajbsBjiesiêiiia partent des lo/et 16 ds cïsaqss aïoift
L'UNIVERS rte répond pas des vtanuscHis gui lui ssr,i adressât
^ " AKNOiÉCE®
MM. LAGRANGE; cerf e! c", S, place de 1s Boums
Iles t née essaire de Joindre & tonte
lettre, quel qu'en soit l'objet, «ne des
dernières bandes d'adresse Impri
mées* rectifiée s'il y a lieu»
PARIS, i" MAI 1901
©OSKiMiAJÏSJEI
Y ves L ancêtre,
P ierre V euillot.
E ugène T averoteh.
Post-seriptum.......
Finissons-en,......
Tolstoï et la saint-
* synode..,.:.*...,..
Correspondance ro
maine.... .••• *** —
Lettres de Belgique." L.
fcettres d'Egypte.... A. C otjderc.
Nouvelles agricoles A. de V iliïer S de
l' I sle- A dam.
BûIIeiln. — Nouvelles de Rome. — Pour
les congrégations: — Tolstoï et le saint-
synode. — Un nom . justifié. — Laïcisa
tion d'école. — Les attaques contre le
clergé. — Le référendum des mineurs.
— Le i ep mai. — Les bagarres d'Alger.
— En Algérie. — A Tunis. — Chroni
que. t En CSiiue. — La guerre du
Tranévaal. — Dépêches de l'étranger.
— La reine du Paradis. — Chronique re
ligieuse.— Conférences du Luxembourg.
— Vols Baorilèges. — En province. —
Nécrologie. —- Echos de partout. —
Les industries du livre. — Le crime de
Gor&ncez. —Tribunaux. — Jardin d'ac
climatation. — Nouvelles diverses. —
Calendrier. — Dernières nouvelles. —
Bourse et bulletin financier. -
POST-SCRIPTUM
Un ami attire mon attention sur
certaine lacune de mon article >
Unité' de l'âme française. _
— Vous avez démontré, mo dit-il,
torité, aussi nécessaires
que
l'autre pour réunir tous les citoyens
dans l'unité de la pensée et dans l'u
nité de l'action . C'est bien. Mais vous
avez négligé un aspect de la ques
tion. Il me semble que vous auriez
mieux affiché l'impuissance de ces
messieurs à rétablir l'unité dans la
nation, si vous les aviez montrés
incapables de conserver l'union au
sein même de la famille.
— Alors, lui dis-je, vous pensez
que beaucoup de ces grands prô-
neurs d'unité et semeurs de dis
corde, pourraient, bien ne pas of
frir des modèles d'union fami
liale?
— Si j'avais .des. .motifs de le
croire, je sais que vous ne voudriez
pas employer cet argument ad ho-
minem. Mais n'y a-t-il pas des symp
tômes publics, et le mal dont un
parti -politique est atteint ne se ma-
nifeste-t-il point par de certains
désordres^ comme tout, mal dont
souffre un organisme quelconque ?
Avant d'entreprendre ae nous ral
lier à leur doctrine, les ennemis de
l'Eglise devraient bien s'accorder
entre eux. Ceci vous ramènerait, il
est vrai, sur le terrain des doctri
nes. Pour rester sur le terrain de la
famille, vous avez la loi du divorce
et les ravages faits par cette loi, no
tamment dans le monde des politi
ciens hostiles à la religion.
A commencer par le promoteur dé
eette loi, qui nous dira où réside le
fameux Gustave NaqUet ? Sur quels
chemins roule -t-il sa bosse? Ayant
introduit dans la législation fran
çaise ce principe de dissolution so
ciale, il s'est payé lui-même le prix
d 'une telle besogne : il s'est; dit-on,
expatrié.Pour unFrançais d'origine
juive, le saerific» a dû être léger; la
séparation d'avec l'âme française
n'a provoqué aucune déchirure : la
bourse était sauve. Ce fugitif n'a pas
malheureusement emporté avec lui
la loi qui désunit les familles.
— Je ne sais s'il y a beaucoup
de. divorcés parmi ces messieurs.
Ils lé seraient tous que pas un ci
toyen ne pourrait le trouver mau
vais, pas plus qu'ils n'auraient eux-
mêmes légalement'le droit d'en
rougir. N'est-ce pas en vertu de la
loi que le divorce se pare de sa nou
velle femme? Les mesures de ri
gueur prises parle-ministre de la
guerre à l'égard de certains offi
ciers dont les femmes refusaient de
frayer avec les femmés divorcées
d'autres officiers, n'avaient pas
d'autre but que de conquérir au di
vorce, par la forcp, l'auréole atta
chée au mariage légitime.
— Je saisis votre pensée, voici
•ornment je la formule : Mettons que,
parmi les preneurs de l'unité, il y ait
aes divorcés. Il y en à certainement.
Le privilège de laloiNaquet est tom
bé au cœur des familles dont ils sont
les : pères, comme un épervier sur
une volée de ramiers,.ou comme la
fouine sur ixne.couvée de .poussins.-
Le lien de la famille est dissous, la
nichée s'envole où elle peut : fplus
d'autorité, plus d'éducation, plus de
bon exemple.. Est-ce là l'unité de la
famille? Il n'y.» plus de famille du
tout.
« Que les politiciens qui préconi
sent. cette loi, qui en ont hâté -les
suites, qui s'efforcent vainement de
racoler la considération à une chose
couverte dé mépris, nourrissent,
en outre, l'incroyable prétention de
fournir les éléments, à l'unité de
l'âme française, c'est le fait, n'est -il
pas vrai? ou d'une naïve confiance,
ou d'un esprit machiavélique.
« Il serait curieux et instructif, si
les maisons habitées par eux
étaient de verre, dé jeter un regard
au foyer de ces législateurs intè
gres qui, à l'aide de principes men
songers, décapitent la loi d'ensei
gnement, étranglent la loi d'asso
ciation, et prêchent vertueusement
l'union, l'unité du peuple français.
Les murs sont discrets; le verre
nou3 permettrait de plonger dans
les arcanes, de constater si l'u
nion et la vertu qui siègent au foyer, ■
autorisent par l'exemple l'union
et la vertu qu'ils prêchent en pu-
plic.
— Vos remarques, répondis-je à
mon interlocuteur, méritent d'être
soumises aux lecteurs de l'Univers.
Elles contiennent la rectification
que mon article avait provoquée
dans votre esprit. Si vous le per
mettez, je rédigerai le procès-ver
bal de notre conversation et j'en
donnerai une copie conforme.
Yves L àncètre. " •
"BULLETIN
La journée du i er mai s'est jusqu'ici
tassée tranquillement en France comme
l'étranger; du moins on ne signale au
cun incident sérieux.
La grosse question du moment est
toujours celle du référendum des mi
neurs. La majorité pour la grève géné
rale est grande parmi les votants, mais
ces vêlants ne forment pas le tiers du
nombre des mineurs. Dans ces condi
tions peut-on dire qu'il y ait une majo
rité?
On annonce de Lille que les mineurs
du Pas-de-Calais ont immédiatement dé
cidé qu'ils ne suspendraient pas, le tra
vail. D'&illeurs le comité du syndicat,
réuni sous la présidence deM.B&sly, a
rédigé et adressé aux mineurs un ma
nifeste contre la grève générale.
' De nouveaux désordres ont eu lieu à
Alger qui paraissent avoir une certaine
gravité -, le maire, M. Max Régis, et son
frère ont été blessés. Nous donnons plus-
loin des détails.
L'affaire de Margueriite semble tout
à fait terminée.
Les dépêches de Chine ne nous fixent
pas encore sur les résultats desdernières
opérations militaires. Si, par la voie de
Londres, on annonce un échec des Alle
mands, qui encouragerait les Chinoisi
nous ne sommes pas fixés sur la gravité
dudit échec. ■ ' ' •
Une dépêche explique comment' les
troupes françaises qui marchaient avec
les Allemands n'ont pas pris part au
cembat. Il ne faut pas voir, là l'indice
d'un dissentiment entre les Français et
les Allemands. <
; Du Transvaal aucune nouvelle im
portante. On dément que M. Cécil Rho*
des ait failli être pris par les Boers;
comme certains nouvellistes l'avaient
annoncé.
Les Chambres italiennes sent de nou
veau réunies; au Sénat, le ministère a
obtenu un succès; à la Chambre des dé
putés, M. Villa a déclaré qu'à, la suite
de la manifestation de sympathie dont
il a été l'objet avant les vacances, il
croit devoir retirer sa démission.
... î. m' • ♦ :
NOUVELLES DE ROME
Au Vatican.
Rome, 29 avril.
Aujourd'hui S. S. Léon XIII a reçu en
audience particulière : Mgr Paul Bas-
tous, archevêque maronite de Tyr et
Sion; Mgr Stanislas Taleski, délégué
apostolique des Indes orientales; Mgr
Joseph Ridolfl, évêque de Todi ; Mgr Jo
seph . Martinelli, évêque de Penne e
Atri. , • '.
— Par billet de la sécrétairerie d'Etat,
le Pape a nommé S. Em. le cardinal
Barthélémy Bacilieri protecteur des reli
gieuses missionnaires connues, bous le
nom de RR. MM. de la Nigricede Vé
rone. ' : --
La vie catholique & Rome:
A l'église du Gesù vient d'avoir lieu un
triduum solennel en l'honneur de la bien
heureuse Jeanne de Lestônnac, fonda
trice de l'ordre des Filles de Notre-
Dame. Hier, dernier jour du triduum, la
messe a été célébré par S. Em. le cardi
nal Rampolla di Tindaro. La communion
générale a été très nombreuse, et toutes
les élèves de l'institut de Saint-Denis y
ont pris part.
Chacun des trois jours, il y a eu le ma
tin une messe de communion célébrée
par un éminentissime cardinal, et une
messe pontificale célébrée par un arche
vêque; panégyrique en italien, et, béné
diction du Saint-Sacrement donnée par
un cardinal. Les chants étaient exécu
tés par les mémbres des « chapelles >
des basiliques romaines. A l'intérieur
étaient suspendus les tableaux qui ornè
rent Saint-Pi erre lors de la béatification
de la Bienheureuse de Lestônnac. Outre
ces décorations, magnifiques, le promo
teur de la cause, Mgr Virili, avait orga-
niséune superbe illunûoatioiL>§électrique,à
^intérieur et à l'extérieur du temple. Â
chacune des fonctions l'affluence était
considérable.
Dans la cité.
"La chambre de travail de Borne vient
d'afîicher un manifeste dans lequel on
invite tous les ouvriers de Rome à s'abs
tenir du travail 1s i" mai, et à se rendre
à une grande réunion où' parleront des
orateurs socialistes, le^ professeurs La-
briole, Soldi, et les avocats Tuccari et
Merliao.
11 est dit dans le manifeste que les
grands succcb obtenus par la olasse ou
vrière en Italie donnent à cette solennité
use importance exceptionnelle.
Lé manifeste finit par le cri : Vive le
i fr mai ! Vivent les travailleurs du
monde entier!
FINISSONS-EN
Savez-vous ce que forait un gou
vernement despotique, un pouvoir
d'ancien régime, pour mettre un
terme aux troubles d'Alger, sur
lesquels vous trouverez plus loin
des détails? Il coffrerait ou expul
serait les chefs et les états-majors
des partis en guerre Et la tranquil
lité serait rétablie. Le moyen ne sem
blerait peut-être pas d'une justice
parfaite ni, surtout, légale; mais
quelle compensation soua le rap
port de l'efficacité!
Les institutions, : comme les
mœurs, ne permettent plus ces pro
cédés expéditifs. Et ei on est parfois
presque tenté de le regretter un
peu, il faut convenir ' que, somme
toute, c'est un bien. Ne maudissons
pas trop notre temp3, même quand
il nous parait avoir trop re3treint"le
champ d'action de l'arbitraire. Nos
gouvernants font ils donc un tel
usage cle leurs prérogatives qu'on
doive déplorer de les voir si- rédui
tes?
En face de l'agitation qui ensan
glante Alger, le pouvoir exécutif
n'est d'ailleurs pas impuissant. La
compression immédiate et radicale
lui est impossible^ Mais il y a d'au
tres moyens, et qui pour etre plus
lents ne sont pas moins sûrs, de ré
tablir la paix. Le gouvernement,
s'il ne songeait qu'au bien du pays
et à l'équité, sortirait vite d'embar
ras et, arrêtant ses résolutions, par
viendrait encore assez prompte-
ment à terminer la crise.
Une ville y tout entière ne se met
point dans uné pareille ébullition
sans motif. En partie, au moins, les
plaintes et les revendications que
formulent les Algérois doivent être
fondées. Un examen sérieux et im
partial ferait connaître ce que com
mandent l'intérêt national et la jus
tice. On accorderait, sans retard, ni
détours, ni reprises, teut ee qu'il y
a lieu d'accoraer. Après quoi, l'on
serait impitoyable, avee une lar
geur sereine,"^ pour les tapageurs,
meneurs et pêcheurs en eau trou
ble de n'importe quel parti.
Lè gouvernement qui agirait de
la sorte serait sûr d'être soutenu
par tous les citoyens raisonnables,
tous les gens tranquilles, d'Algérie
et de France. Il n'aurait là qu'un
appui moral ; les gens tranquilles
n en donnent pas d'autre. Mais,
dans l'occasion, ce serait suffi
sant ; .
Nous ne pouvons guère attendre
cette conduite de nos maîtres ac
tuels. C'est un malheur, car il y a
urgence. Le régime des coups de
revolver, de couteau et de matra
que n'est pas normal. Voici déjà
trop longtemps qu'il dure. Il dé:
veloppe un état d'esprit qui porte
ses ravages plus loin qu'Alger
mêaie et devient dangereux pour
l'avenir de notre colonie. Finissons-
en.
Pierre V eoillot.
TOLSTOÏ & LE SAINT-SYNODE
.Nous reproduisons plus loin les
passages principaux de la réponse
que le eomte Tolstoï vient de rédi
ger contre le Saint-Synode. Le
Temps la publie en entier.
C'est un long morceau où là co
lère et l'orgueil frémissent sous le
voile de la modération et de l'humi
lité. Les blasphèmes de tout genre
y sont répanaus à pleines mains et
comme au hasard. La'divinité" du
Christ, les sacrements, le dogme de
la Trinité, l'enfer, le culte, la prière
dans les temples, etc., sont niés
comme des principes absurdes et
scandaleux.
Bien entendu, le romancier-pro
phète veut appuyer sur l'Evangile
toutes ses dénégations blasphéma
toires et il explique do nouveau
gu'il est à peu près seul en Russie
a comprendre l'Évangile.
Il a expliqué jadis de quelle ma
nière il s'y est pris pour l'étudier.
C'est un enfantillage misérable.
Tolstoï marquait au crayon bleu les
passages qui lui paraissaient clairs ;
au crayon rouge les autres. Puis,
ayant réfléchi, toujours selon - les
conseils de son humeur, il procé
dait à un nouvel examen et faisait
un choix . définitif. Ainsi, il a sup
primé la plus grande partie du li
vre sacré ; et ca qu'il en a gardé est
souvent une.énorme et puérile ca
ricature. Dé tout ce que le Christ a
dit sur son unité consubstantielle
avec le Père, sur le droit des apô
tres de lier et de délier, sur le tri
but à César, sur la prière en com
mun, sur l'enfer, tout cela se trouve
biffé par l'infaillible crayon rouge
et ne compte pas. "
. On peut définir facilement la ca
ractéristique dç l 'état d'esprit de-
Tolstoï : prétention constante et
incap«v~.ité radicale à traiter, des
doctrines. Chez certains écrivains
-de grand talent, l 'esprit n'arrive pas
à se délivrer des images et parfois
il se confond irrémédiablement avec
les images. Ceux-là profèrent des
inepties qui montrent, traduites en
beau style, juste les pensées de M.
Ilomais et parfois d'un Ilomais in
férieur. De Tolstoï telles et telles
pages, magnifiquement tracées, va
lent, pour le fond, les conceptions
intellectuelles des philosophes que
l 'on rencontre chez nous à table
d'hôte, ou dans les innombrables
ezfés du commerce. '
Il repoussera Trinité, parce qu'elle
est. incompréhensible. Mais il ad
met Dieu. Est-ce qu'il comprend
Dieu?
Ne le lui demandez pas. Il suit
son humeur, qui lui sert de théolo
gie et de philosophie.
Un livre finement écrit par M. An
dré Beaunier (i) cite une anecdote
où se peint la fantastique et puérile
vanité de Tolstoï. Devant un ami qui
se permettait de le contredire, très
courtoisement d'ailleurs, on voit le
romancier-prophète se redresser ©t
répondre d'un air dur : « Je ne peux
« pas souffrir tju'on ne soit pas de -
« mon avis. » . Cette petite scène
n'est-elle pas, en peu de mots, très
significative ?
Génie, orgueil et bêtise se mêlent
dans l'âme de Tolstoï. Ce mélange
peut être très malfaisant, car il plaît
a beaucoup de pauvres diables, qui
ne savent plus du tout ce qu'ils veu
lent.
M. Beaunier dit vers la fin de son
livre : « Quelque chose naît là-bas,
« quelque,chose de prodigieux et de
c fécond, dans 1© silence infini des
« plaines de neige. Et cela déchi-
« rera, un jour j le suaire lourd de
« neige. » Il e3t possible que Tols
toï déchaîne la révolution en Rus
sie et qu'il ait ainsi la fécondité.;,
des fléaux. •
Eugène T avernusr.
CORRESPONDANCE ROMAINE
Rome et la question d 'Autriche.
Rome, 28 avril.
Le'"mouvement du « Los von
Rom » est naturellement suivi, à
Rome même, aveeune attention fort
émue/ : "
Tous les partis s'en occupent.
L'autre jour, c'était la Tribuns, qui
exprimait son mécontentement de
l'emploi continu du mot de cr Rome »
comme synonyme du Vatican et de
l'Eglise catholique; Oa lai a ré
pondu avec beaucoup de-raison que
ses lamentations n'y feraient rien ;
et qu'il lui faudra se résigner long
temps encore a voir le monde iden
tifier la Ville Eternelle avec l'Eglise
etla Papauté.
Ce qui n'est pas moins surpre
nant, c'est que ces alliés officiels
de l'Autriche ne montrent aucun
souci de son intégrité territoriale.
On se souvient peut-être qu'il y a
six mois, la presse quirinaliste
tenta de soulever un incident diplo
matique entre le Vatican et l'Au
triche, parce que Léon XIII s'était
permis de recevoir deux évêques,
aussi bons Autrichiens d'ailleurs
qu'ardents patriotes slaves, i
Aujourd'hui, le prince héritier
d'Autriche vient lui-même de dé
noncer avec éclat dans le prétendu
mouvement de, séparation d'avec
Rome, une manœuvre dirigée con
tre l'Autriche elle-même. Los von
Rom, s'est écrié l'archiduc Fran
çois-Ferdinand d'Esté, cela veut
dire Los von Osterreich. Quiconque
a suivi les événements d'Autriche,
quiconque a lu le patriotique ou
vrage d André Chéradame sur VEu
rope et la,-- question d'Autriche au
seuil du XX' siècle (*2), ne peut avoir
le moindre doute sur cette identifica
tion dénoncée par le. prince héritier
d'Autriche.
Mais les directeurs libéraux de
l'opinion .publique en Italie n'ont
jamais cacné leur jeu. Il est évident
que ce n'est pas sur le gouverne
ment de la péninsule que "Autriche
pourrait compter le jour où son
existence serait compromise par la,
cupidité allemande. La monarchie
italienne serait au contraire en
chantée de recevoir une part du bu
tin;," et même si
seule les régions irredente ae Trieste
et du Trentin, elle chanterait en
core les gloires du conquérant.'L'I
talie officielle, telle que l'a faite la
Révolution, se résignera à. jouer
n'importe quel rôle dans le monde
transformé par le Pangermanisme ;
ses conditions historiques la con
traignent à accepter avec recon
naissance les situations les plus
humbles, pourvu qu'à ce . prix, elle
conserve 1 existence et un semblant
de sceptre.
Devenir une préfecture du grand
empire allemand, voilà toute l'am
bition de ces hommes qui ont sans
(1) Noies sur WRusiïe. Paris, Tricon,'rue
de Rennes, 90. - ■
(2) On ne saurait trop recommander la
lecture de cet. ouvrage (un vol. cheg Pion)
Sui est fort remarqué dans les divers mi-
etiï du moufle rotnaig,
cessé sùrles lèvres les mots de pa
trie et de grandeur nationale.
Ce n'est pas de ce côté que l'Au
triche peut chercher des alliés fidè
les. '
"Mais par la force des choses, ici
encore, la caiiso de l'Autriche, qui
est la cause de la justice, de la ci
vilisation, . de la paix européenne,
s'identifie avec la cause me me de
l'Eglise.
Le cri de guerre des pangerma :
nistes l'indique assez nettement :
c'est en attaquant Rome, la religion
romaine, qu'ils espèrent affaiblir
l'Autriche. L'Autriohe sera sauvée,
si les puissances dont la politique
extérieure n'est pas hostile au ca
tholicisme comprennent leur de
voir. Malheureusement, pour des
causes diverses et par une coïnci
dence fort heureuse pour l'Allema
gne, ces puissances se débattent
dans des embarras d'ordre inté
rieur. Si la paix religieuse- et so
ciale pouvait se rétablir à l'intérieur
de ces Etats, ils pourraient suivre
d'une attention moins distraite les
graves événements de l'Europe
centrale. ■
Et en assurant l'existence de
l'Autriche, nécessaire à l'Europe,
ils l'aideraient en même temps à
achever cette évolution vers 1® fé-
triche-IIongrie, dégagée de ses dif
ficultés intérieures, deviendrait cet
Etat fédéral qui, par la nature mê
me de ses différents peuples, se-s
rait le trait d'union entre l'oc
cident et l'orient de l'Europe ; dans
eètte nouvelle Triplice, formée cette
fois de puissances amies, et non
dominées, slave comme la Russie,
catholique comme la France, l'Au-
triche-IIongrie serait le complé
ment naturel qu'attend l'alliance
franco-russe pour produire tous ses
fruits.
POUR LES C0II6RÉ6ATI01S
M. Th. Ilomolle, directeur de Pé-
cole française d'Athènes, vient de
publier une très intéressante étude
sur le développement, de- la langue
française en Grèce. •
M. Th. Homolle rend cet hom
mage aux ordres religieux :
L'enseignement du français est surtout
l'œuvre des congrégations d'hommes ou
de femmes : Lazaristes et Ûblats de
;Saint-François de Sales, Eceurs de la
Charité, sœurs de Saint Joseph de l'Ap
parition et Ursulines. La plus ancienne'
fondation est celle des Lazaristes, qui
ont succédé dans l'ile de S^ntorin aux
Jésuites en 1783; la plus récente, celle
des Obîaîe, qui sont établis au Pirée et
à Naxos depuis moins de dix années.
Nous possédons, grâce à ces ordres re
ligieux, des école3 : pour les garçons, à
Santorin (Lazaristes), à Naxos, au Pirée
(Oblats); pour les filles, à Athènes, au
Pirée (Saint-Joseph), à Syra (Saint Jo
seph et sœura de la.Charité), à Naxos et
Tinos (Ursulines), à Santorin (sœurs de
la Charité) et à Corfou (sœurs de la Com
passion).
Les congrégations ont accompli ici de
ces prodiges qui leur sont coutumiers, à
l'encostre de toutes les règles de la pru
dence humaine, entreprenant sans capi
taux/ s'endettant sans ressources assu
rées, et faisant face à tout à force d'or
dre, d'économie, de dévouement. Telles
les Ursulines de Tinos, qui ont fondé
• avec 600 francs le pensionnat modèle de
Lutra, qui ont commencé par coucher à
la belle étoile, et reçoivént aujourd'hui
dans des bâtiments confortables, au mi
lieu de vastes jardins, cent internés et
une trentaine . d'orphelines, habillent,
nourrissent, soignent les malades du
voisinage, assistent matériellement et
moralement tous les malheureux.
 Athènes, au Pirée, mêmes téméri
tés, mêmes succès : les dépenses enga
gées par les sœurs de Saint-Joseph, dass
leurs deux maisons d'Athènes et du Pi
rée, par le P. Berthet dans l'école Saint?
Paul, dépassent pour chacune cent mille
francs, et la rétribution scolaire est peu
élevée, pas toujours régulièrement payée;
cependant chaque année on améliore et
on amortit. Je cité les plus frappants
exemples, mais, pour le dévouement et
les services, tous les ordres et partout
rivalisent et sont égaux. Leurs progrès,
s'ils excitent quelques jalousies, inspi
rent partout le respect. La dignité de leur
vie, la discrétion scrupuleuse de leur foi
exempte de prosélytisme, la haute mora
lité de leur enseignement, la fermeté
douce de leur discipline, leur charité
comme leurs aptitudes pédagogiques, ont
fagné la confiance des familles, et la con-.
ance a triomphé même de la loi qui in
terdit aux maisons religieuses de rece- :
voir des pensionnaires orthodoxes; Le
succès étâit à ce prix, car les catholiques
ne sont en Grèce -qu'une minorité, une
minorité pauvre, et de condition mé
diocre.
= Une initiative digne de tous les éloges
et de tous "les encouragements vient
d'être prise à Lille par un groupe de ca
tholiques à la tête desquels se trouve M.
Grousseau, l'éminent professeur de droit
administratif des facultés libres.;:
Un comité régional de eonférences a
été organisé pour la défense des congré
gations religieuses.
M. Grousseau a inauguré ces confé
rences . à Bergues avec un très grand
succès.
L'orateur, après avoir très éloqu.em-
ment montré l'iniquité flagrante du pro
jet de loi contre les congrégations, a en
gagé l'assemblée à transmettre à. M. le
sénateur Claeys, maire de Bergues, le
vœu que la loi soit amendée par le Sdnat
dans un sens libéral. f r
Cé vœu a été adopté à l'unanimité.
LETTRES BE_BELGIQUE
23 avril.
La criminalité en Belgique. — Faux bruit*
d'abdication.
— La recrudescence de criminalité,
dont les premiers mois de cette année
ont offert l'affligeant spectacle, n'est pas
sans causer assez d'émotioa, surtout de
puis que deux crimes plus retentissants
se sont succédé à peu de jours d'inter
valle, on peut le dire, au centre de
Bruxelles : ceux de la rue de la Senne et
de la rue du Maelbrck, c'est-à-dire à un
pas des Halles et à un pas du quartier
Léopold, deux quartiers bien fréquenté3
et bien habite'g.
Aujourd'hui, l'on pourrait dire que les
grands chemins sont sûrs et que les 'mai-
sons particulières ûulc plus, grâce
aux cambrioleurs, à ces rejetons dégé
nérés des Cartouche, des Robert 5îa«-
Caire, des Mandrin et des Chauffeurs, à
ces bandits grêles et presque imberbes
qui finissent de vivre à l'âge où leurs pré
décesseurs entraient à peine dans la car
rière. Il n'y a plus de vieillards, si ce
n'est des vieillards précoces, parmi eux,
ni des hommes mûrs, ou si peu qu'ils n»
comptent pas : ils sont usés au bout de
peu d'années£t passent la mainAiie plus
jeunes et plus corrompus qu'eux, triste
produit d'un état social et d'une popula
tion qui a rejeté Dieu de son sein, et qui,
depuis près d'un siècle d'incrédulité, re
tourne, de dégradation en dégradation,;
au rang de la brute.
Un amateur s'est donné la peine de.
compter le nombre des crimes commis
en Belgique et relevés par les journaux,,
pendant le premier trimestre de l'année.
Il arrive à un total de 732 méfaits, dont
236 mc-urtres ou assassinats et 196 tenta
tives..
Admettons que la statistique soit sur
jette à rectification et que son auteur ait
pu manquer Boit de critique soit.de ren
seignements, pour donner à son travail
une grande valeur ; mais il faut dire
aussi que les statistiques officielles ou
judiciaires ne sont pas moins fautives.,
Que d'affaires classées avant d'avoir
suffisamment déterminé leur caractère:.
que d'altérations subies par le crime dé
féré à la juridiction correctionnelle,
uniquement pour échapper à l'impunité,
totale !
Or on accusera les lois et la justice :
on dira qu'on fait mauvais usage de la
libération cosdiiioBnelle, puisque l'as-,
Bassin do la rue de la Senne, Smellinckx^
est an libéré conditionnel et indigne.
' Ds fait, nos institutions pénitentiaires
sont peut-être trop, clémentes et nos ad-r
ministrations trop confiantes. Mais ce.
n'est pas tout; Les mœurs sont mauvai
ses : on connaît l'intime relation qui;
existe entre le vice et le crime. Les sol
licitations malsaines se multiplient sous
nos yeux avec une intensité effrayante.
Pour arrêter le débordement de la litté
rature licencieuse et donner une sanction,
efficace à ses mesures préservatrices, le
ministre des chemins de fer a dû faire
appel à son collègue de la justice, qui a
donaé aux Parquets des ordres sévères,
mais salutaires ; et, pendant ce temps,
le tribunal de commerce de Bruxelles
lâche la bride aux éditeurs d'œuvreï:
malpropres, sous prétexte de sauvegar-*
der la liberté commerciale.
Mais tout se tient : ceux qui vivent
dans la débauche sont aussi ceux qui vo
lent et assassinent, et l'on ne verra pas
diminuer le nombre de ceux-ci, tant que.
l'on n'aura pas réussi à réfréner l'audace
des premiers.
— Une fois de plus, des faux bruits ont '
été mis en circulation : ils disaient que
le roi a l'intention d'abdiquer. Il devient
désormais superflu de démentir ces ra
contars, parce qu'à l'étranger même et
notamment en France, on sait à quoi s'en
tenir et sur nos aiTaires intérieures et sur
les dispositions de Léopold II.
Le prétexte qui a servi de thème à ce# ?
bruits, c'est l'habitude des "voyages.qui
semble croître avec l'âge chez notre sou- •
verain : d'où ces gens à courte vue con
cluent que les affaires de.l'Etat ne l'inté- j
ressent plus. Autant dire que les minis- '
très, députés et sénateurs qai prennent
quelques vacances, se moquent de leur
mandat. Est-ce sérieux ?
Les socialistes y ont mis leur part de
grossièreté, et le Peuple, qui ne trouve
rien â redire aux villégiatures de M. ;
Vandervelde, en pleine lune de miel,
opine qu'on peut se passer d'un roi si
peu chez lui. .
Dira-t-il aussi que le parti socialiste
peut se passer, de M. Vandervelde ou que.
celui-ci peut s'en passer, parce qu'il lui "
accorde si peu de temps? L'une et l'autre,
proposition seraient également fausses.
Mais on voit, de nos jours, d'étranges
choses.
Ces meneurs des prolétaires confiants
et jobards ionnent eontre le capitalisme
et se paient du luxe, à côté des souve
rains. Vandervelde I" était le voisin d'hô
tel du roi Léopold, et rien ne dit que ce
dernier, l'ayant rencontré, par hasard,
— le hasard fait si bien les choses, ! —
n'ait fait un bout de causette ou un aima-
ble salut au fareuche révolutionnaire.
D'autant plus qu'on dit que ce dernier
n'est plus aussi insensible que naguère
aux séductions,de la politique royale et "
qu'il est devenu aussi congolais que [le
premier citoyen.de Belgique. J'en' ai
déjà parlé. Mais ce que je n'avais pas
encore dit, c'est que M. Vandervelde
avait interrompu son voyage de noces
pour venir réocceper'son siège au Par
lement et quoiqu'on l'eût dit souffrant.
On a. dit que c'était pour empêcher les
socialistes de la Chambre de ruer danp
ïest&Bgs à propos dfc Congo, et ij a soi-
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