Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-03-22
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 22 mars 1901 22 mars 1901
Description : 1901/03/22 (Numéro 12084). 1901/03/22 (Numéro 12084).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7106766
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Vendredi 22 Mars l©Qi
édition -quotidienne. » 42,08-1
Vendredi 22 Mars 1001
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postai^
Cn an......... 40 » 51 »
Six mois 21 » 26 50
Trois mois..... 11 » 14 »
«e» abonnements partent des 1" et 16 de chaque mois
UN NUMÉRO | Pans. 10 cent.
( Départements....» 15 —«
BUREAUX : Paris, rue Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8
EX
LE MONDE
ÊMltlOM SUMS-QUOTmiEN^
PARIS ÉTRANGER
ira départements (union. postale}
Un an 20 » » 28 ®
Six mois. 10 s» 13 s»
Trois mois...... 5 » 6 50
Les abonnements partent des 1" et 16 de .chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C ie , 6, place de ïa Bourse
PARIS, 21 MARS 5.901
SOMMAIRE
« Le théologien de
la Providence . Eb&ène Taveknie*.
Çà et là : Un petit
séminariste A. de ségur.
En Afrique aus
trale.. F. L.
A la Chambre.. .... Gabriel »e Triors.
L>es conférences du
Luxembourg Edouard Alexandre
Bulletin. — Nouvelle iniquité. — L'emploi du
milliard.— La Lanterne et les ministres.
— Pour les congrégations. — Le scandale
de Lille. — L'affaire Quilici. — Informa
tions politiques et parlementaires. — La
guerre du Transvàaï. — En Chine.—
Dépêches de l'étranger. — A travers la
presse. — Chronique. — Lettres, sciences
et arts. — Les grèves. — Echos de par-
.tout.—- En province. — Chronique reli
gieuse. — Chambre des députés. — Né
crologie. —Guerre et marine. — Tribu
naux. — Nouvelles diverses. — Calen
drier. — Bourse et bulletin financier. —
Dernière heure.
"LU ÏIÊIM1I IIA PROMU"
En écoutant, c'est-à-dire en ad
mirant M. Brunetière, qui parlait
hier-soir à l'Institut cathôlique de
Paris, on était encore une fois frappé
de l'exactitude avec laquelle il ap
précie le rôle et la pensée maîtresse
ae Bossuet.
Lorsque, vers 1894, il entreprit
sa longue et très brillante série
d'études sur ce sujet, beaucoup
d'hommes distingués, jugeant tout
à coup à la façon des badauds (ce
fait n'est point rare), supposèrent
que l'éminent académicien se payait
une espèce de fantaisie, fort im
prévue d'ailleurs. Bossuet! Quelle
idée de s'occuper de Bossuet 1
Ces exclamations rappelaient les
cris joyeux qui retentirent dans la
Chambre, un jour que M. de Dou-
viile-Mailleîeu, répondant à quel
qu'un qui avait cité Guizot, s'écriait
avec sa formidable désinvolture :
« Guizot 1 Mais on ne lit plus ça! »
Et les deux ou trois cents législa
teurs qui applaudissaient follement
témoignaient qu'en effet ils ne li
saient plus ça, ne l'ayant même ja
mais lu, non plus qu'autre chcrser
Sainte-Beuve qui, assurément,
goûtait et comprenait le génie litté
raire de Bossuet, ne prenait pas
toujours au sérieux sa-valeur philo
sophique ni simplement sa clair
voyance. II l'accusait de s'être mé
pris tout à fait sur la portée des
questions soulevées de son temps.
Ainsi, et M. Brunetière a relevé ce
reproche 'étourdi, Sainte-Beuve, blâ
mait le grand évêque de s'être at
tardé à discuter le Quiétisme, lors
que déjà se manifestaient les présa
ges de la révolution philosophique,
lorsque Voltaire était:né, etc.
Mais le sophisme que Sainte-
Beuvè considérait comme une pué
rilité démodée, nous l'av,ons vu
grandir à notre époque et enthou
siasmer les âmes. C'est un thème
très familier aux pédagogues et aux
politiciens libres-penseurs (d'au
tant mieux qu'ils n'en ont guère
d'autre) que la pratique du bien par
le seul amour du ; bien, sans nul
souci d'une récompense. D'après ce
système, nous sommes des gens
trop intéressés. Eux, qui se sont
détachés du ciel comme ils se sont
délivrés de l'enfer, veulent nous
accabler sous leur supériorité mo
rale, dont le poids cependant leur
est assez léger. Sans le savoir, ils
ont emprunté quelque chose de
l'erreur combattue par Bossuet et
ils en ont fait une doctrine qui leur
sert à tout ce qu'ils veulent.
Et en ramenant, pour ainsi dire
toujours, son argumentation à l'i
dée fondamentale de la Providence,
est-ce que Bossuet ne défendait pas
un principe qui est en quelque
sorte la ligne ae démarcation entre
les chrétiens et les incrédules d'à
présent? A la Chambre, un de nos
orateurs ne peut pas exprimer sa
foi en la Providence sans çxciter
les huées. Elles inspirent une quan
tité de volumes, de discours, d'arti
cles de journaux.. Une Providence,
un Dieu qui aurait créé le monde et
qui continuerait de le gouverner,
c'est une idée insupportable à la
libre-pensée contemporaine. 'Es
sayez et vous verrez l'état de fu
rieux ahurissement dans lequel nos
adversaires entrent tout de suite.
M. Brunetière ne s'est pas dé
couragé le moins du monde et il
persiste à démontrer que le point
de vue choisi par Bossuet ést l'un
de ceux d'où l'on voit très clair et
très loin.
Bossuet avait, profondément et
supérieurement le sens de l'équili
bre de la raison. Or, c'est de quoi
manquent tout à fait la plupart de nos
advèrsaires. Leurs idées confuses
se rejoignent confusément et sou
dain s'éparpillent. Ils doutent de la
raison qu'ils invoquent. Ils ne veu
lent pas que Dieu commande aux
hommes, ni que ce soit l'homme
non plus qui commande et chacun
enrage du désir de commander.
Leur bonheur est de songer qu'il
n'y a plus rien de certain; et aussi
tôt ils nous opposent les lois immua
bles de la nature.
Mais cette immutabilité, Bossuet
en a parlé avec une précision et
une fermeté qui déroutent les so-
phismes ; et il a montré comment
elle est enveloppée et soutenue par
une autre immutabilité d'ordre sur
naturel et pleine de ressources in
finies. Il faut ces deux conceptiens
pour mettre d'aplomb notre esprit,
qui a besoin de stabilité et de per
fectionnement.
Et sans la stabilité, pas de per
fectionnement possible. M. Bru
netière le dit en résumant la
méthode de Bossuet et en l'appli
quant aux théories les plus actuel
les. Je ne sais pas quelle est la par
tie de ce beau discours où se trouve
le plus de vigueur et le plus d'élo
quence, mais celle-ci assurément a
une force démonstrativè très bril
lante et très précieuse. Les sophis
tes et le vulgaire s'imaginent qu'il
y a une incompatibilité absolue
entre ce qui ne change pas et ce qui
change et que l'une de ces deux idées
exclut l'autre. Or, M. Brunetière
leur dit et leur prouve que le pro
grès lui-même pour avoir un appui
exige une vérité fondamentale, qui
no varie pas, sinon tout s'écrou
lerait et se dissoudrait- Il prend
dans les sciences un exemple sai
sissant : n'est-ce pas depuis que
l'astronomie et la physique ont été
établies sur des bases immuables
que les découvertes se sont multi
pliées et que le progrès s'est avancé
d'une allure si rapide ?
Cet accord de principes invaria
bles etd'une extension continue, M.
Brunetière le désigne réalisé et vi
vant par l'Eglise. Elle pourvoit au
gouvernement des idées, tout en
laissant aux particuliers leur carac
tère propre et même en protégeant
le caractère qui fait leur individua
lité. Est-ce que les Docteurs, les
Pères, les Saints ne furent pas aus
si différents entre eux que diffé
raient leurs époques et leurs langa
ges et leurs procédés? Et cepen
dant ils enseignaient la même
doctrine et ils obéissaient à la même
Eglise.
M. Brunetière, qui parle si élo-
quemment et si judicieusement de
Bossuet, ne saurait donner dans
aucun exclusivisme superstitieux.
Il ne soutient pas que le grand
homme qu'il glai îiie no se soit-ja
mais trompé ni dans le raisonne
ment, ni dans la conduite ; mais il af
firme que l'oeuvre édifiée par« le théo
logien de la Providence » reste un
monument d'une solidité magnifique.
De là, en effet, on a une vue large
et claire et on aperçoit l'harmonie
de la- nature et du surnaturel, ce
surnaturel sans lequel, dit-il, « la
« vie ne vaudrait pas la peine d'être
« vécue »!
Cette éloquence n'est pas faite
pour plaire à notre monde libre-
penseur, si enfoncé dans les propos
incohérents; mais elle eontiéntl'en
seignement dont il a un impérieux
besoin; et M. Brunetière réussit à
faire impression même sur l'incohé
rence obstinée. Il amène à réfléchir
tant de gens qui ont pris l'habitude
de parler au hasard. C'est une des
victoires les plus difficiles. On voit
ce qu'elle exige de savoir, de talent
et ae courage. Les catholiques en
comprennent le prix et ils en reçoi-
vént un réconfort qu'ils ne m anque-
ront pas d'utiliser.
Eugène Tavernier.
*BULLETI&C
Hier, après avoir entendu la dernière
partie du discours documenté de M.
Prache contre la franc-maçonnerie dont
on trouvera plus' loin des extraits, la
Chambre a voté l'ensemble de l'article
13. Puis on a a,b&rdé la discussion de
l'article 14 qui enlève le droit d'ensei
gner aux membres des congrégations
non autorisées. M. Aynard a prononcé
un admirable discours dont on lira
aussi de larges extraits.
Hier après-midi, le président de la
République a reçu officiellement la
mission anglaise chargée de lui an
noncer l'avènement d'Edouard VIL
De vifs incidents se sont produits hier
a Marseille, provoqués par Vattitude des
grévistes.La force armée a dû charger, et
plusieurs personnes ont été blessées.
Le duc d'York, commençant son
voyage dans les colonies anglaises, est
arrivé hier à Gibraltar où il a été reçu
officiellement.
Au Danemark, les élections au Folke-
thing ont été fixées au 3 avril ; elles se
féront au scrutin secret et on pense
qu'elles marqueront les progrès du par
ti socialiste danois.
Hier, au Reiclistag, s'est produit .un
violent débat provoqué par les députés
socialistes qui protestaient contre cer-
tainsprocédés de la police.
A Tien-Tsin, les Russes et les Anglais
sont ■ toujours en présence, aucune des
deux parties ne voulant céder.*On
annonce même que le général russe
Wogack a envoyé au commandant des
forces britanniques un quasi-ultima
tum.
. Le général Bàilloud est arrivé à Tien-
Tsin pour ouvrir une enquête sur In
cident anglo-français.
NOUVELLE INIQUITÉ
Le ministère et ses amis deman-5
dent des lois contraires à tous les
droits, à.toute justice et, en atten
dant qu'ils les aient, ils agissent
comme s'ils les avaient. C'est du cy
nisme. Ainsi, voilà que M. Leygues,
ministre de l'instruction publique,
écarte du droit à l'examen, du droit
au concours, les élèves sortis des
maisons religieuses d'enseigne
ment. On l'avait annoncé, mais
nous hésitions à le croire. Aujour
d'hui,aucun démenti n'étant venu, il
est confirmé que sur quarante can
didats qui se présentaient au con
cours pour l'emploi de rédacteur
au ministère de l'instruction pu
blique, vingt ont été éliminés parce
3u'ils avaient terminé leurs études
ans des maisons religieuses.
Voilà les catholiques exclus du
droit aux emplois publics ! Ces ini
quités seront punies.
L'EMPLOI DU MILLIARD
Aube.
Résultat de l'enquête :
Immeubles possédés ou oc
cupés par les congréga
tions, au l" r janvier 1900
(valeur vénale) : 6.675.005 fr,
(Tableau officiel, tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Orphelinats.. ' 6
Hôpitaux 4
Hospices... 8
Guvroirs., 9
Ecoles primaires 28
Maisons de refuge 3
Asiles de vieillards 2
Asile d'incurables. 1
Total : 73 maisons de charité et
d'éducation.
; :— ♦
Çà et là
UN PETIT SEMINARISTE
Il s'appelait Maximilien Naxos. Né à
Poissy, d'une famille transplantée du
Midi, il atteignait à peine sa vingtième
année, et rien, six mois avant sa mort,
ne faisait présager que sa jeune vie tou
chât à son terme. Grand de taille, élégant
d'attitude, d'une figure charmante, tùar à
toursérieuse etriante, il respirait lasanté,
l'intelligence et la bonté, l'amour du bien
et la joie de vivre.
Dès l'âge de dix-huit ans, président de
son patronage, il savait se faire aimer et
respecter de ses jeunes eamarades. Il
était le premier au jeu comme à l'église,
et il étonnait les brillants auditoires des
séances récréatives, dans les comédies
et les drames où il remplissait les rôles
les plus divers avec le même talent et la
même simplicité.
Placé à Paris dans les bureaux de la
Société générale où il se rendait tous les
jours, il était estimé de ses chefs et de
ses camarades comme à Poissy, et son
avancement rapide lui présageait un
brillant avenir.
Une bronchite négligée éteignit tout à
coup ces beaux rêves, détruisit toutes
ces espérances. Habitué à se bien porter,
il promena trop longtemps sur le chemin
de fer de Poissy à Paris, sa toux persis
tante, et quand il se décida à se laisser
soigner, il était trop tard. La bronchite
avait gagné les poumons., la pneumonie
engendra la phtisie, et le pauvre Maxi
milien rendit saintement son âme à Dieu
avant la naissance du printemps.
La mortde cepetitemployé de vingt'ans
éveilla mille sympathies. Le clergé et la
ville lui firent de touchantes funérailles :
ses louanges étaient sur toutes les lèvres,
des larmes dans bien des yeux. Et cepen
dant, une circonstance de sa vie, présente
à la pensée de tous, auraitpu.s'ilne l'avait
fait tourner à son honneur, jeter une om
bre sur sa douce et pieuse mémoire.
Voici le fait, bien petit, bien simple en
lui-même, mais qui renferme une grande
leçon à méditer, un grand exemple à
suivre, pour les jeunes chrétiens soumis
à la même épreuve.
- La pieuse enfance de Maximilien, sa
physionomie angélique, sa première com-
jnunion fervente, et aussi son intelli
gence, avaient porté le jeune vicaire, son
confesseur, à le diriger vers le sacerdoce,
et l'enfant avait répondu à cet appel
avec un joyeux empressement. Il entra
donc au petit séminaire de Versailles, et,
pendant trois années, il y vécut heureux,
Studieux, édifiant. Je le voyais souvent
pendant les vacances que je passais dans
un château voisin de Poissy, et j'admi
rais sa tenue à l'église, sa gaieté de bon
augure, et la dévotion vraiment ravis
sante avec laquelle il servait la messe.
Un jour, pendant les vacaBces de Pâ
ques, je le vis entrer chez moi à Paris.
Il avait alors seize ans. Je fus frappé de
sa physionomie émuç, troublée, « Qu'y
a-t-il donc, cher enfant? lui dis-je en lui
tendant la main. M'apportes-tu quelque
triste nouvelle? — Oui », reprit-il. Et il
m'apprit, avec des larmes dans les yeux
et dans la voix, qu'il n'était plus au sémi
naire. — « Comment, renvoyé? m'écriai-
je saisi de surprise et d'effroi. — Oh!
non, c'est moi qui ai voulu partir. »
Il me raconta .alors que sans rien per
dre de sa foi, ni de sa piété, il avait senti
jour par jour, depûis sa rentrée de va
cances en octobre, sa vocation s'affaiblir,
ia peur d'engager sa vie pour jamais naî
tre en son cœur et bientôt l'envahir. Il
avait cambattu, prié, consulté son direc
teur, ses parents. Bref, il ne se sentait
pas assez sûr de lui-même, assez dégagé
du monde, pour se donner tout à Dieu
dans le saint ministère ; et comme sa na
ture droite et sincère répugnait à feindre
même pour un temps des sentiments qu'il
n'avait plus, il avait profité du congé de
Pâquèspour partir sans attendre la fin de
l'année scolaire.
« Pouvais-je honnêtement, ajoutait-il
avec un accent qui me frappa, continuer
à imposer au séminaire et à M. le curé,
déjà si bon pour moi, des sacrifices trop
longtemps prolongés ? Il me semble que
c'eût été voler le pain du bon Dieu. »
Sa résolution était prise, .exécutée : il
n'y avait plus à revenir là-dessus, et je
n'insistai pas. Je l'approuvai même de sa
loyauté ; je lui promis de lui garder mon
estime et mon affection, mais à une con
dition, que d'ailleurs il s'était déjà posée,
imposée à^ lui-même : mener une vie si
exemplaire que tout le monde autour de
lui dût reconnaître que le séminaire est
une école de vertu, d'élévation morale,
d'où l'on sort, même avant le temps,
meilleur, plus homme, plus chrétien
qu'en y entrant. « Ainsi, ajoutai-je, de ce
qui eût pu être un sujet de scandale, tu
feras un sujet d'édification, et tu rendras
un juste hommage aux bons maîtres que
tu as quittés. Bien plus, tu pourras être
proposé en exemple aux jeunes sémina
ristes qui, ne se sentant plus la vocation,
seraient tentés, par un calcul coupable,
de continuer leurs études ou même d'en
trer au grand séminaire, pour se faire
une carrière, au risque de devenir des
prêtres médiocres, indifférents, peut-
être, hélas ! de mauvais prêtres, le plus
grand des malheurs. Mieux vaudrait ceqt
fois mourir de faim que de vivre de l'au
tel sans vocation, sans foi, sans amour...
Car si, comme l'a dit le Sauveur à ses
apôtres, les vrais prêtres sont le sel de la
terre, c'est-à-dire la vie de l'Eglise, les
mauvais prêtres en sont le poison, c'est-
à-dire la honte et la mort. »
Maximilien Naxos conforma sa vie à ee
conseil, à sa propre résolution ; il n'eut
pas un moment d'oubli, pas une défail
lance; et c'est pourquoi, estimé, regretté
de tous, il a laissé à sa famille, à ses
amis, à sa ville natale, le souvenir d'une
vie sans tache et d'une sainte mort.
à. de Ségur.
& LA CHAMBRE
Le droit d'association.
M. Prache a poursuivi hier, mal
gré les protestations qui s'élevaient
de certains bancs, son étude sur la
franc-maçonnerie;, il a montré les
loges travaillant, aussi bien sur le
terrain politique que sur le terrain
religieux, à déraciner la foi reli
gieuse dans notre pays ; il a prou
vé, par des documents, que pour
imposer sa morale naturaliste et
pour détruire les effets du rallie
ment des catholiques à la Constitu
tion républicaine, la maçonnerie
n'hésita point, depuis douze ans, à
se rapprocher du socialisme collec
tiviste, et à étendre son action no
tamment sur l'enseignement par
une propagande ^incessante et des
œuvres de toutes sortes.
Elle se proclame elle-même so
ciété secrète, agissant secrètement,
assujettissant ses membres à des
rites ridicules, au secret absolu, à
d'étroites obligations, et réclamant
des candidats aux fonctions électo
rales, pour prix de son précieux
appui, des engagements écrits et
formels qu'ils kont d'ailleurs auto
risés à dissimuler dans leurs pro
clamations et dans leurs discours.
Il semble que tous ceux dont
l'indignation se manifeste si dure
ment contre « la puissance occulte »
des congrégations, contre la doc
trine religieuse « des restrictions
mentales », auraient dû être les pre
miers à réclamer, au nom du pou
voir civil, des garanties efficaces
vis-à-vis de ces congrégations laï
ques; ils" se contentaient d'applau
dir aux extraits de statuts, de rè
glements et de discours maçonni
ques apportés par M. Prache.
L'opposition a voulu donner aux
sectaires une leçon de libéralisme ;
elle s'est refusée à pratiquer une
politique de représaillés et à tra
quer législativement les sociétés
secrètes, comme font nos adversai
res pour les ordres religieux; M.
Ribot, après M. Iloltz et M. Lasies,
invoquait le droit de tous à la li
berté d'association, et M. Prache
retirait son amendement.
Repris par M. Viviani, sous pré
texte de donner une sanction au dé
bat qui venait d'être soulevé, il a
été repoussé par 296 voix contre 2.
; Nous voici parvenus à l'article 14,
le plus important de la loi de haine,
celui qui tient le plus à cœur aux
ennemis de l'Eglise, puisqu'il inter
dit d'enseigner aux membres des
congrégations religieuses non auto
risées.
La Chambre a entendu un magni
fique discours de M. Aynard qui
demande la suppression pure et
simple de cette disposition.
Avec l'autorité considérable qui
s'attache à son talent, à son carac
tère, à sa situation de vice-prési
dent, l'éloquent député du Rhône a
fait entendre au gouvernement, à la
commission et à leurs amis, de du
res' vérités. Il montrait l'hypocrisie
des adversaires de l'enseignement
libre qui, se voyant battus ces der
niers mois, tant à la commission
d'enseignement qu'à la Chambre,
même, à propos de l'urgence sur les
propositions Rabier et Levraud,
viennent tenter par une voie dé
tournée, par ricochet, de sacrifier
une des lois primordiales de notre
pays.
A la rigueur, en effet, M. Treuil-
lot et ses compères laisseraient aux
religieux la liberté de la parole et la
liberté de la charité ; ce qu'il im
porte d'arracher à l'Eglise, la cita
delle à conquérir, c'est la liberté de
l'enseignement
Et M. Aynard, qu'on n'accusera
point d'un libéralisme de circons
tance, et qui pouvait affirmer son
attachement à l'Université, puisqu'il
lui confia l'éducation de ses fils,rap
pelait que dans tous les temps, sous
tous les régimes, cette liberté de
l'enseignement fut réclamée par les
esprits les plus éminents de tous
les partis ; il rappelait que devant
la grande commission, spéciale
nommée par la Chambre, il ne se
trouva pas un membre de l'Univer
sité, entendu au cours de l'enquête,
pour réclamer le rétablissement du
monopole.
Qu'a donc à redouter de la liberté
la puissance laïque de l'Etat qui, de
puis vingt ans, n'a cessé de s'ac-
croitre ? Elle s'est attribué assez de
privilèges exorbitants avec la laïci
sation de l'école primaire, la sup
pression des bourses dans les sémi
naires, le vote du droit d'accroisse
ment, pour ne pas refuser aux pères
de famille la faculté de faire élever
chrétiennement leurs enfants.
On veut davantage encore, on en
tend, suivant la forte expression de
M. Aynard, édifier une fois pour
toutes « une loi de sûreté générale
contre l'esprit religieux ».
A cet exposé de la doctrine libé^
raie en matière d'enseignement,
d'une si magistrale éloquence, le
gouvernement et la commission ré
pondront par - les sophismes habi
tuels sur la nécessité d'assurer la
défense de l'Etat laïque; en atten
dant, M. Massé a vaguement tenté
de justifier la prétention du cabinet
de « défense républicaine » de 'con
fisquer ce qui nous reste de la li
berté d'enseignement.
Il a surtout fortifié son argumen
tation d'arrêts rendus par les lé
gistes de l'ancien régime et de re
vendications de la vieille Université
contre les Jésuites.
C'est là le système de discussion
définitivement adopté, on le sait,
par les socialistes et les radicaux.
Gabriel de Triors.
EH AFRIQUE AUSTRALE
Après avoir longuement gardé un
silence discret mais qui, parait-il,
laissait percer une souriante con
fiance dans le. résultat final, le gou
vernement britannique, très désap
pointé, a dû se résoudre à annoncer
i'éehec des négociations dont lord
Kitchener avait pris l'initiative; et
le général Botha, en faisant connaî
tre son refus des conditions de paix
qui lui étaient proposées, a pris soin
de déclarer qu'il était pleinement
d'accord avec tous les généraux
boers aussi bien qu'avec les repré
sentants civils des gouvernements
du Transvaal et de l'Orange.
La déception de l'opinion publi
que, chez nos voisins d'Qùtre-Man-
che, est très grande, et cela se com-
drend. Tout persuadés qu'ils soient
qu'ils finiront par triompher,à n'im
porte quel prix, de cette héroïque
obstination, ils n'envisagent pas
sans un certain crève-cœur les nou
veaux t.• orifices d'hommes et d'ar
gent que va leur coûter cette pro-
longationde la lutte. Aussi la presse
anglaise ne manque-t-elle pas de
faire ressortir tout ce qu'a d'insensé,
à son point de vue, une résistance
qui ne peut plus avoir maintenant
d'autre résultat que la ruine com
plète des deux républiques et une
stérile effusion de sang humain.
Les'promoteurs et les approba
teurs de cette abominable entreprise
auraient pu s'aviser plus tôt de ces
considérations humanitaires dont la
sincérité est d'ailleurs suspecte. Il
est en effet probable que, parmi les
regrets qu'excite en Angleterre l'é
chec des négociations avec le géné
ral Botha, le souci de ce qui se passe
en Extrême-Orient tient une large
place. Il est certain que la prolon
gation indéfinie de la guerre sud-
africaine, alors que la saison d'hi
ver vient là-bas de commencer,
alors que là peste gagne du terrain
et que l'on signale son apparition
dans les principaux ports de la colo
nie du Cap, embarrasse singulière
ment l'action politique de la Grande-
Bretagne dans les autres parties
du monde : comment sa diplomatie
pourrait-elle aujourd'hui parler avec
son assurance, avec ses audaces
coutumières, tant que le redoutable
problème de l'Afrique australe n'est
pas résolu ?
F. L.
LA " mm " ET M MI5ISTÈSE
... tiâ.X-IUiterne, journal naguère dirigé
par M. Millerand, aujourd'hui ministre,
attaquait violemment hier M. Monis, au
tre ministre :
Depuis une dizaine d'années, les choix
faits par les chefs de gouvernement dans la
nomination des gardes des sceaux décèlent
une singulière négligence. Doit-on l'attri
buer à une serte d'indifférence que les pré
sidents de. cabinets professeraient à l'égard
de la, justice ? Considéreraient-ils ce dépar
tement comme un département secondaire,,
à la tête duquel on peut placer un figurant
quelconque?...
Il nous paraît difficile qu'un seul homme,
si bien doué soit-il sous ee rapport, puisse
commettre simultanément des gaffes aussi
nombreuses que M. Monis, sans se prêter,
avec une pointe de malice, au petit jeu qui
consiste à affecter d'être plus jocrisse en
core qu'on ne l'est, même quand on Test au
degré du chef actuel de la justice fran
çaise. •
La Lanterne reprochait à M. Monis son
dernier « mouvement «judiciaire et son
attitude dans la question des poursuites
contre M. Jaluzot. M. Rouanet, auteur de
l'article, concluait ainsi ••
M. Monis croit, évidemment, par ces
moyens dilatoires et peu loyaux, amortir
l'effet d'un débat dont la gravité ne saurait
échapper à personne. A moins qu'il n'ait
des pensées de derrière la tête qu'il dissimule
à la perspicacité de ses collègues du ca
binet.
Nous le prévenons charitablement que,
dans un cas comme dans l'autre, }1 se
trempe et que ses calculs pourraient bien
ne pas aboutir au total qu'il vise. Qui
compte sans son hôte compte deux fois, dit
le proverbe. J'engage M. Monis à méditer
cet adage.
Aujourd'hui, le même journal reproche
à M. Waldeck-Rousseau de ne pas avoir
reçu M. Flaissières :
Ainsi le président du conseil semble vou
loir rompre avec les habitudes de neutra
lité qui lui ont cependant assez bien réussi
jusqu'à présent.
' Ce serait une imprudence qui lui pourrait
coûter cher.
Il y a des craquements dans le parti
ministériel.
POUR LES CONGREGATIONS
Sous ce titre : « Alors... c'est la mi
sère », le vaillant rédacteur de la Fran
che-Comté, adresse une lettre ouverte à
M. Waldeck-Rousseau, président du
conseil des ministres, dans laquelle il fait
énergiquement ressortir les conséquen
ces désastreuses au point de vue écono
mique de la suppression des congréga
tions religieuses.
M. Ghambon tire ces conclusions :
Résumons-nous. Tous les ans : .
1° Par votre loi de disper
sion des congrégations, vous
F rivez les commerçants et
ouvrier français, de 116 millions
2° Vous grevez le budget
de l'Etat des œuvres [charita
bles des congrégations expul
sées de ggp —
3° Il vous faudra, pour rece
voir les élèves de leurs éco
les, au moins 48 —
Total
289 millions
Deux cent quatre-vingt-neuf millions qui
vont peser, d'une façon ou d'une autre, sur
les épaules des Français, soit en privant les
uns de leur gagne-pain, soit en augmentant
le bordereau des autres.
LE SCANDALE DE LILLE
Mardi est venue, au tribunal de simple
police de Lille, devant M. le juge de paix
Devette, l'action en possessoire intentée
par le conseil de fabrique de l'église de
de Saint Maurice des Champs à M. De-
lory, maire de Lille,\ pour l'odieuse et
inique destruction du calvaire, dit du
« Dieu de-Marcq ».
Un public nombreux emplissait le pré
toire.
Le maire de Lille a fait défaut. M* Ba
taille, qui représente le conseil de fabri
que, dépose immédiatement des conclu
sions, puis, dans un langage très modé
ré, il les appuie. Il dit combien la des
truction du calvaire a émotionné et émo-
tionne encore l'opinion, combien elle a
passionné la presse et la population.
M e Bataille défend le caractère de l'ac
tion introduite, ^qui vise à la fois M. De-
lory comme homme et comme maire.
Puis il cite, d'après Dalloz à l'article
« possessoire », les conditions juridiques
de l'action en réintégrande et il établit
que ces conditions ne sauraient être plus
complètement remplies que dans le cas
présent. Le conseil de fabrique avait la
détention matérielle du calvaire, il en
avait la clef, il en avait l'entretien, il y
faisait les réparations.
La détention était paisible et publique
et la dépossession a été violente, sans
avis préalable, sans mise en demeure et
presque clandestinement, car les ou
vriers qui forcèrent la grille, arrachèrent
la croix, enlevèrent les objets pieux dé
posés sur l'autel, donnèrent le change à
l'opinion en affirmant que c'était pour les
réparer et les remettre à neuf.
Le 6 mars, acte a été signifié à M. De-
lory de faire cesser l'illégale destruction
qu'il avait ordonnée, et M. Delory n'en a
pas tenu compte.
Toutes les conditions juridiques, ajou-
te-t-il, sont en notre faveur, le droit, la
loi; c'est pourquoi nous demandons le
rétablissement du Calvaire en son état
antérieur.
Le juge de paix demande alors à M"
Bataille si le conseil de fabrique est au
torisé à. intenter l'action ouverte par
lui.
M" Bataille prouve immédiatemeat, et
d'une façon péremptbire, qu'en l'espèce
l'autorisation est inutile, qu'elle n'a pas
à être demapdée, et il cite la jurispru
dence du" Conseil d'Etat — la plus haute
autorité en matière administrative, —
qui a tranché formellement la question
dans un décret du 20 septembre 1863,
décret dont la portée et l'autorité n'ont
édition -quotidienne. » 42,08-1
Vendredi 22 Mars 1001
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postai^
Cn an......... 40 » 51 »
Six mois 21 » 26 50
Trois mois..... 11 » 14 »
«e» abonnements partent des 1" et 16 de chaque mois
UN NUMÉRO | Pans. 10 cent.
( Départements....» 15 —«
BUREAUX : Paris, rue Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8
EX
LE MONDE
ÊMltlOM SUMS-QUOTmiEN^
PARIS ÉTRANGER
ira départements (union. postale}
Un an 20 » » 28 ®
Six mois. 10 s» 13 s»
Trois mois...... 5 » 6 50
Les abonnements partent des 1" et 16 de .chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C ie , 6, place de ïa Bourse
PARIS, 21 MARS 5.901
SOMMAIRE
« Le théologien de
la Providence . Eb&ène Taveknie*.
Çà et là : Un petit
séminariste A. de ségur.
En Afrique aus
trale.. F. L.
A la Chambre.. .... Gabriel »e Triors.
L>es conférences du
Luxembourg Edouard Alexandre
Bulletin. — Nouvelle iniquité. — L'emploi du
milliard.— La Lanterne et les ministres.
— Pour les congrégations. — Le scandale
de Lille. — L'affaire Quilici. — Informa
tions politiques et parlementaires. — La
guerre du Transvàaï. — En Chine.—
Dépêches de l'étranger. — A travers la
presse. — Chronique. — Lettres, sciences
et arts. — Les grèves. — Echos de par-
.tout.—- En province. — Chronique reli
gieuse. — Chambre des députés. — Né
crologie. —Guerre et marine. — Tribu
naux. — Nouvelles diverses. — Calen
drier. — Bourse et bulletin financier. —
Dernière heure.
"LU ÏIÊIM1I IIA PROMU"
En écoutant, c'est-à-dire en ad
mirant M. Brunetière, qui parlait
hier-soir à l'Institut cathôlique de
Paris, on était encore une fois frappé
de l'exactitude avec laquelle il ap
précie le rôle et la pensée maîtresse
ae Bossuet.
Lorsque, vers 1894, il entreprit
sa longue et très brillante série
d'études sur ce sujet, beaucoup
d'hommes distingués, jugeant tout
à coup à la façon des badauds (ce
fait n'est point rare), supposèrent
que l'éminent académicien se payait
une espèce de fantaisie, fort im
prévue d'ailleurs. Bossuet! Quelle
idée de s'occuper de Bossuet 1
Ces exclamations rappelaient les
cris joyeux qui retentirent dans la
Chambre, un jour que M. de Dou-
viile-Mailleîeu, répondant à quel
qu'un qui avait cité Guizot, s'écriait
avec sa formidable désinvolture :
« Guizot 1 Mais on ne lit plus ça! »
Et les deux ou trois cents législa
teurs qui applaudissaient follement
témoignaient qu'en effet ils ne li
saient plus ça, ne l'ayant même ja
mais lu, non plus qu'autre chcrser
Sainte-Beuve qui, assurément,
goûtait et comprenait le génie litté
raire de Bossuet, ne prenait pas
toujours au sérieux sa-valeur philo
sophique ni simplement sa clair
voyance. II l'accusait de s'être mé
pris tout à fait sur la portée des
questions soulevées de son temps.
Ainsi, et M. Brunetière a relevé ce
reproche 'étourdi, Sainte-Beuve, blâ
mait le grand évêque de s'être at
tardé à discuter le Quiétisme, lors
que déjà se manifestaient les présa
ges de la révolution philosophique,
lorsque Voltaire était:né, etc.
Mais le sophisme que Sainte-
Beuvè considérait comme une pué
rilité démodée, nous l'av,ons vu
grandir à notre époque et enthou
siasmer les âmes. C'est un thème
très familier aux pédagogues et aux
politiciens libres-penseurs (d'au
tant mieux qu'ils n'en ont guère
d'autre) que la pratique du bien par
le seul amour du ; bien, sans nul
souci d'une récompense. D'après ce
système, nous sommes des gens
trop intéressés. Eux, qui se sont
détachés du ciel comme ils se sont
délivrés de l'enfer, veulent nous
accabler sous leur supériorité mo
rale, dont le poids cependant leur
est assez léger. Sans le savoir, ils
ont emprunté quelque chose de
l'erreur combattue par Bossuet et
ils en ont fait une doctrine qui leur
sert à tout ce qu'ils veulent.
Et en ramenant, pour ainsi dire
toujours, son argumentation à l'i
dée fondamentale de la Providence,
est-ce que Bossuet ne défendait pas
un principe qui est en quelque
sorte la ligne ae démarcation entre
les chrétiens et les incrédules d'à
présent? A la Chambre, un de nos
orateurs ne peut pas exprimer sa
foi en la Providence sans çxciter
les huées. Elles inspirent une quan
tité de volumes, de discours, d'arti
cles de journaux.. Une Providence,
un Dieu qui aurait créé le monde et
qui continuerait de le gouverner,
c'est une idée insupportable à la
libre-pensée contemporaine. 'Es
sayez et vous verrez l'état de fu
rieux ahurissement dans lequel nos
adversaires entrent tout de suite.
M. Brunetière ne s'est pas dé
couragé le moins du monde et il
persiste à démontrer que le point
de vue choisi par Bossuet ést l'un
de ceux d'où l'on voit très clair et
très loin.
Bossuet avait, profondément et
supérieurement le sens de l'équili
bre de la raison. Or, c'est de quoi
manquent tout à fait la plupart de nos
advèrsaires. Leurs idées confuses
se rejoignent confusément et sou
dain s'éparpillent. Ils doutent de la
raison qu'ils invoquent. Ils ne veu
lent pas que Dieu commande aux
hommes, ni que ce soit l'homme
non plus qui commande et chacun
enrage du désir de commander.
Leur bonheur est de songer qu'il
n'y a plus rien de certain; et aussi
tôt ils nous opposent les lois immua
bles de la nature.
Mais cette immutabilité, Bossuet
en a parlé avec une précision et
une fermeté qui déroutent les so-
phismes ; et il a montré comment
elle est enveloppée et soutenue par
une autre immutabilité d'ordre sur
naturel et pleine de ressources in
finies. Il faut ces deux conceptiens
pour mettre d'aplomb notre esprit,
qui a besoin de stabilité et de per
fectionnement.
Et sans la stabilité, pas de per
fectionnement possible. M. Bru
netière le dit en résumant la
méthode de Bossuet et en l'appli
quant aux théories les plus actuel
les. Je ne sais pas quelle est la par
tie de ce beau discours où se trouve
le plus de vigueur et le plus d'élo
quence, mais celle-ci assurément a
une force démonstrativè très bril
lante et très précieuse. Les sophis
tes et le vulgaire s'imaginent qu'il
y a une incompatibilité absolue
entre ce qui ne change pas et ce qui
change et que l'une de ces deux idées
exclut l'autre. Or, M. Brunetière
leur dit et leur prouve que le pro
grès lui-même pour avoir un appui
exige une vérité fondamentale, qui
no varie pas, sinon tout s'écrou
lerait et se dissoudrait- Il prend
dans les sciences un exemple sai
sissant : n'est-ce pas depuis que
l'astronomie et la physique ont été
établies sur des bases immuables
que les découvertes se sont multi
pliées et que le progrès s'est avancé
d'une allure si rapide ?
Cet accord de principes invaria
bles etd'une extension continue, M.
Brunetière le désigne réalisé et vi
vant par l'Eglise. Elle pourvoit au
gouvernement des idées, tout en
laissant aux particuliers leur carac
tère propre et même en protégeant
le caractère qui fait leur individua
lité. Est-ce que les Docteurs, les
Pères, les Saints ne furent pas aus
si différents entre eux que diffé
raient leurs époques et leurs langa
ges et leurs procédés? Et cepen
dant ils enseignaient la même
doctrine et ils obéissaient à la même
Eglise.
M. Brunetière, qui parle si élo-
quemment et si judicieusement de
Bossuet, ne saurait donner dans
aucun exclusivisme superstitieux.
Il ne soutient pas que le grand
homme qu'il glai îiie no se soit-ja
mais trompé ni dans le raisonne
ment, ni dans la conduite ; mais il af
firme que l'oeuvre édifiée par« le théo
logien de la Providence » reste un
monument d'une solidité magnifique.
De là, en effet, on a une vue large
et claire et on aperçoit l'harmonie
de la- nature et du surnaturel, ce
surnaturel sans lequel, dit-il, « la
« vie ne vaudrait pas la peine d'être
« vécue »!
Cette éloquence n'est pas faite
pour plaire à notre monde libre-
penseur, si enfoncé dans les propos
incohérents; mais elle eontiéntl'en
seignement dont il a un impérieux
besoin; et M. Brunetière réussit à
faire impression même sur l'incohé
rence obstinée. Il amène à réfléchir
tant de gens qui ont pris l'habitude
de parler au hasard. C'est une des
victoires les plus difficiles. On voit
ce qu'elle exige de savoir, de talent
et ae courage. Les catholiques en
comprennent le prix et ils en reçoi-
vént un réconfort qu'ils ne m anque-
ront pas d'utiliser.
Eugène Tavernier.
*BULLETI&C
Hier, après avoir entendu la dernière
partie du discours documenté de M.
Prache contre la franc-maçonnerie dont
on trouvera plus' loin des extraits, la
Chambre a voté l'ensemble de l'article
13. Puis on a a,b&rdé la discussion de
l'article 14 qui enlève le droit d'ensei
gner aux membres des congrégations
non autorisées. M. Aynard a prononcé
un admirable discours dont on lira
aussi de larges extraits.
Hier après-midi, le président de la
République a reçu officiellement la
mission anglaise chargée de lui an
noncer l'avènement d'Edouard VIL
De vifs incidents se sont produits hier
a Marseille, provoqués par Vattitude des
grévistes.La force armée a dû charger, et
plusieurs personnes ont été blessées.
Le duc d'York, commençant son
voyage dans les colonies anglaises, est
arrivé hier à Gibraltar où il a été reçu
officiellement.
Au Danemark, les élections au Folke-
thing ont été fixées au 3 avril ; elles se
féront au scrutin secret et on pense
qu'elles marqueront les progrès du par
ti socialiste danois.
Hier, au Reiclistag, s'est produit .un
violent débat provoqué par les députés
socialistes qui protestaient contre cer-
tainsprocédés de la police.
A Tien-Tsin, les Russes et les Anglais
sont ■ toujours en présence, aucune des
deux parties ne voulant céder.*On
annonce même que le général russe
Wogack a envoyé au commandant des
forces britanniques un quasi-ultima
tum.
. Le général Bàilloud est arrivé à Tien-
Tsin pour ouvrir une enquête sur In
cident anglo-français.
NOUVELLE INIQUITÉ
Le ministère et ses amis deman-5
dent des lois contraires à tous les
droits, à.toute justice et, en atten
dant qu'ils les aient, ils agissent
comme s'ils les avaient. C'est du cy
nisme. Ainsi, voilà que M. Leygues,
ministre de l'instruction publique,
écarte du droit à l'examen, du droit
au concours, les élèves sortis des
maisons religieuses d'enseigne
ment. On l'avait annoncé, mais
nous hésitions à le croire. Aujour
d'hui,aucun démenti n'étant venu, il
est confirmé que sur quarante can
didats qui se présentaient au con
cours pour l'emploi de rédacteur
au ministère de l'instruction pu
blique, vingt ont été éliminés parce
3u'ils avaient terminé leurs études
ans des maisons religieuses.
Voilà les catholiques exclus du
droit aux emplois publics ! Ces ini
quités seront punies.
L'EMPLOI DU MILLIARD
Aube.
Résultat de l'enquête :
Immeubles possédés ou oc
cupés par les congréga
tions, au l" r janvier 1900
(valeur vénale) : 6.675.005 fr,
(Tableau officiel, tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Orphelinats.. ' 6
Hôpitaux 4
Hospices... 8
Guvroirs., 9
Ecoles primaires 28
Maisons de refuge 3
Asiles de vieillards 2
Asile d'incurables. 1
Total : 73 maisons de charité et
d'éducation.
; :— ♦
Çà et là
UN PETIT SEMINARISTE
Il s'appelait Maximilien Naxos. Né à
Poissy, d'une famille transplantée du
Midi, il atteignait à peine sa vingtième
année, et rien, six mois avant sa mort,
ne faisait présager que sa jeune vie tou
chât à son terme. Grand de taille, élégant
d'attitude, d'une figure charmante, tùar à
toursérieuse etriante, il respirait lasanté,
l'intelligence et la bonté, l'amour du bien
et la joie de vivre.
Dès l'âge de dix-huit ans, président de
son patronage, il savait se faire aimer et
respecter de ses jeunes eamarades. Il
était le premier au jeu comme à l'église,
et il étonnait les brillants auditoires des
séances récréatives, dans les comédies
et les drames où il remplissait les rôles
les plus divers avec le même talent et la
même simplicité.
Placé à Paris dans les bureaux de la
Société générale où il se rendait tous les
jours, il était estimé de ses chefs et de
ses camarades comme à Poissy, et son
avancement rapide lui présageait un
brillant avenir.
Une bronchite négligée éteignit tout à
coup ces beaux rêves, détruisit toutes
ces espérances. Habitué à se bien porter,
il promena trop longtemps sur le chemin
de fer de Poissy à Paris, sa toux persis
tante, et quand il se décida à se laisser
soigner, il était trop tard. La bronchite
avait gagné les poumons., la pneumonie
engendra la phtisie, et le pauvre Maxi
milien rendit saintement son âme à Dieu
avant la naissance du printemps.
La mortde cepetitemployé de vingt'ans
éveilla mille sympathies. Le clergé et la
ville lui firent de touchantes funérailles :
ses louanges étaient sur toutes les lèvres,
des larmes dans bien des yeux. Et cepen
dant, une circonstance de sa vie, présente
à la pensée de tous, auraitpu.s'ilne l'avait
fait tourner à son honneur, jeter une om
bre sur sa douce et pieuse mémoire.
Voici le fait, bien petit, bien simple en
lui-même, mais qui renferme une grande
leçon à méditer, un grand exemple à
suivre, pour les jeunes chrétiens soumis
à la même épreuve.
- La pieuse enfance de Maximilien, sa
physionomie angélique, sa première com-
jnunion fervente, et aussi son intelli
gence, avaient porté le jeune vicaire, son
confesseur, à le diriger vers le sacerdoce,
et l'enfant avait répondu à cet appel
avec un joyeux empressement. Il entra
donc au petit séminaire de Versailles, et,
pendant trois années, il y vécut heureux,
Studieux, édifiant. Je le voyais souvent
pendant les vacances que je passais dans
un château voisin de Poissy, et j'admi
rais sa tenue à l'église, sa gaieté de bon
augure, et la dévotion vraiment ravis
sante avec laquelle il servait la messe.
Un jour, pendant les vacaBces de Pâ
ques, je le vis entrer chez moi à Paris.
Il avait alors seize ans. Je fus frappé de
sa physionomie émuç, troublée, « Qu'y
a-t-il donc, cher enfant? lui dis-je en lui
tendant la main. M'apportes-tu quelque
triste nouvelle? — Oui », reprit-il. Et il
m'apprit, avec des larmes dans les yeux
et dans la voix, qu'il n'était plus au sémi
naire. — « Comment, renvoyé? m'écriai-
je saisi de surprise et d'effroi. — Oh!
non, c'est moi qui ai voulu partir. »
Il me raconta .alors que sans rien per
dre de sa foi, ni de sa piété, il avait senti
jour par jour, depûis sa rentrée de va
cances en octobre, sa vocation s'affaiblir,
ia peur d'engager sa vie pour jamais naî
tre en son cœur et bientôt l'envahir. Il
avait cambattu, prié, consulté son direc
teur, ses parents. Bref, il ne se sentait
pas assez sûr de lui-même, assez dégagé
du monde, pour se donner tout à Dieu
dans le saint ministère ; et comme sa na
ture droite et sincère répugnait à feindre
même pour un temps des sentiments qu'il
n'avait plus, il avait profité du congé de
Pâquèspour partir sans attendre la fin de
l'année scolaire.
« Pouvais-je honnêtement, ajoutait-il
avec un accent qui me frappa, continuer
à imposer au séminaire et à M. le curé,
déjà si bon pour moi, des sacrifices trop
longtemps prolongés ? Il me semble que
c'eût été voler le pain du bon Dieu. »
Sa résolution était prise, .exécutée : il
n'y avait plus à revenir là-dessus, et je
n'insistai pas. Je l'approuvai même de sa
loyauté ; je lui promis de lui garder mon
estime et mon affection, mais à une con
dition, que d'ailleurs il s'était déjà posée,
imposée à^ lui-même : mener une vie si
exemplaire que tout le monde autour de
lui dût reconnaître que le séminaire est
une école de vertu, d'élévation morale,
d'où l'on sort, même avant le temps,
meilleur, plus homme, plus chrétien
qu'en y entrant. « Ainsi, ajoutai-je, de ce
qui eût pu être un sujet de scandale, tu
feras un sujet d'édification, et tu rendras
un juste hommage aux bons maîtres que
tu as quittés. Bien plus, tu pourras être
proposé en exemple aux jeunes sémina
ristes qui, ne se sentant plus la vocation,
seraient tentés, par un calcul coupable,
de continuer leurs études ou même d'en
trer au grand séminaire, pour se faire
une carrière, au risque de devenir des
prêtres médiocres, indifférents, peut-
être, hélas ! de mauvais prêtres, le plus
grand des malheurs. Mieux vaudrait ceqt
fois mourir de faim que de vivre de l'au
tel sans vocation, sans foi, sans amour...
Car si, comme l'a dit le Sauveur à ses
apôtres, les vrais prêtres sont le sel de la
terre, c'est-à-dire la vie de l'Eglise, les
mauvais prêtres en sont le poison, c'est-
à-dire la honte et la mort. »
Maximilien Naxos conforma sa vie à ee
conseil, à sa propre résolution ; il n'eut
pas un moment d'oubli, pas une défail
lance; et c'est pourquoi, estimé, regretté
de tous, il a laissé à sa famille, à ses
amis, à sa ville natale, le souvenir d'une
vie sans tache et d'une sainte mort.
à. de Ségur.
& LA CHAMBRE
Le droit d'association.
M. Prache a poursuivi hier, mal
gré les protestations qui s'élevaient
de certains bancs, son étude sur la
franc-maçonnerie;, il a montré les
loges travaillant, aussi bien sur le
terrain politique que sur le terrain
religieux, à déraciner la foi reli
gieuse dans notre pays ; il a prou
vé, par des documents, que pour
imposer sa morale naturaliste et
pour détruire les effets du rallie
ment des catholiques à la Constitu
tion républicaine, la maçonnerie
n'hésita point, depuis douze ans, à
se rapprocher du socialisme collec
tiviste, et à étendre son action no
tamment sur l'enseignement par
une propagande ^incessante et des
œuvres de toutes sortes.
Elle se proclame elle-même so
ciété secrète, agissant secrètement,
assujettissant ses membres à des
rites ridicules, au secret absolu, à
d'étroites obligations, et réclamant
des candidats aux fonctions électo
rales, pour prix de son précieux
appui, des engagements écrits et
formels qu'ils kont d'ailleurs auto
risés à dissimuler dans leurs pro
clamations et dans leurs discours.
Il semble que tous ceux dont
l'indignation se manifeste si dure
ment contre « la puissance occulte »
des congrégations, contre la doc
trine religieuse « des restrictions
mentales », auraient dû être les pre
miers à réclamer, au nom du pou
voir civil, des garanties efficaces
vis-à-vis de ces congrégations laï
ques; ils" se contentaient d'applau
dir aux extraits de statuts, de rè
glements et de discours maçonni
ques apportés par M. Prache.
L'opposition a voulu donner aux
sectaires une leçon de libéralisme ;
elle s'est refusée à pratiquer une
politique de représaillés et à tra
quer législativement les sociétés
secrètes, comme font nos adversai
res pour les ordres religieux; M.
Ribot, après M. Iloltz et M. Lasies,
invoquait le droit de tous à la li
berté d'association, et M. Prache
retirait son amendement.
Repris par M. Viviani, sous pré
texte de donner une sanction au dé
bat qui venait d'être soulevé, il a
été repoussé par 296 voix contre 2.
; Nous voici parvenus à l'article 14,
le plus important de la loi de haine,
celui qui tient le plus à cœur aux
ennemis de l'Eglise, puisqu'il inter
dit d'enseigner aux membres des
congrégations religieuses non auto
risées.
La Chambre a entendu un magni
fique discours de M. Aynard qui
demande la suppression pure et
simple de cette disposition.
Avec l'autorité considérable qui
s'attache à son talent, à son carac
tère, à sa situation de vice-prési
dent, l'éloquent député du Rhône a
fait entendre au gouvernement, à la
commission et à leurs amis, de du
res' vérités. Il montrait l'hypocrisie
des adversaires de l'enseignement
libre qui, se voyant battus ces der
niers mois, tant à la commission
d'enseignement qu'à la Chambre,
même, à propos de l'urgence sur les
propositions Rabier et Levraud,
viennent tenter par une voie dé
tournée, par ricochet, de sacrifier
une des lois primordiales de notre
pays.
A la rigueur, en effet, M. Treuil-
lot et ses compères laisseraient aux
religieux la liberté de la parole et la
liberté de la charité ; ce qu'il im
porte d'arracher à l'Eglise, la cita
delle à conquérir, c'est la liberté de
l'enseignement
Et M. Aynard, qu'on n'accusera
point d'un libéralisme de circons
tance, et qui pouvait affirmer son
attachement à l'Université, puisqu'il
lui confia l'éducation de ses fils,rap
pelait que dans tous les temps, sous
tous les régimes, cette liberté de
l'enseignement fut réclamée par les
esprits les plus éminents de tous
les partis ; il rappelait que devant
la grande commission, spéciale
nommée par la Chambre, il ne se
trouva pas un membre de l'Univer
sité, entendu au cours de l'enquête,
pour réclamer le rétablissement du
monopole.
Qu'a donc à redouter de la liberté
la puissance laïque de l'Etat qui, de
puis vingt ans, n'a cessé de s'ac-
croitre ? Elle s'est attribué assez de
privilèges exorbitants avec la laïci
sation de l'école primaire, la sup
pression des bourses dans les sémi
naires, le vote du droit d'accroisse
ment, pour ne pas refuser aux pères
de famille la faculté de faire élever
chrétiennement leurs enfants.
On veut davantage encore, on en
tend, suivant la forte expression de
M. Aynard, édifier une fois pour
toutes « une loi de sûreté générale
contre l'esprit religieux ».
A cet exposé de la doctrine libé^
raie en matière d'enseignement,
d'une si magistrale éloquence, le
gouvernement et la commission ré
pondront par - les sophismes habi
tuels sur la nécessité d'assurer la
défense de l'Etat laïque; en atten
dant, M. Massé a vaguement tenté
de justifier la prétention du cabinet
de « défense républicaine » de 'con
fisquer ce qui nous reste de la li
berté d'enseignement.
Il a surtout fortifié son argumen
tation d'arrêts rendus par les lé
gistes de l'ancien régime et de re
vendications de la vieille Université
contre les Jésuites.
C'est là le système de discussion
définitivement adopté, on le sait,
par les socialistes et les radicaux.
Gabriel de Triors.
EH AFRIQUE AUSTRALE
Après avoir longuement gardé un
silence discret mais qui, parait-il,
laissait percer une souriante con
fiance dans le. résultat final, le gou
vernement britannique, très désap
pointé, a dû se résoudre à annoncer
i'éehec des négociations dont lord
Kitchener avait pris l'initiative; et
le général Botha, en faisant connaî
tre son refus des conditions de paix
qui lui étaient proposées, a pris soin
de déclarer qu'il était pleinement
d'accord avec tous les généraux
boers aussi bien qu'avec les repré
sentants civils des gouvernements
du Transvaal et de l'Orange.
La déception de l'opinion publi
que, chez nos voisins d'Qùtre-Man-
che, est très grande, et cela se com-
drend. Tout persuadés qu'ils soient
qu'ils finiront par triompher,à n'im
porte quel prix, de cette héroïque
obstination, ils n'envisagent pas
sans un certain crève-cœur les nou
veaux t.• orifices d'hommes et d'ar
gent que va leur coûter cette pro-
longationde la lutte. Aussi la presse
anglaise ne manque-t-elle pas de
faire ressortir tout ce qu'a d'insensé,
à son point de vue, une résistance
qui ne peut plus avoir maintenant
d'autre résultat que la ruine com
plète des deux républiques et une
stérile effusion de sang humain.
Les'promoteurs et les approba
teurs de cette abominable entreprise
auraient pu s'aviser plus tôt de ces
considérations humanitaires dont la
sincérité est d'ailleurs suspecte. Il
est en effet probable que, parmi les
regrets qu'excite en Angleterre l'é
chec des négociations avec le géné
ral Botha, le souci de ce qui se passe
en Extrême-Orient tient une large
place. Il est certain que la prolon
gation indéfinie de la guerre sud-
africaine, alors que la saison d'hi
ver vient là-bas de commencer,
alors que là peste gagne du terrain
et que l'on signale son apparition
dans les principaux ports de la colo
nie du Cap, embarrasse singulière
ment l'action politique de la Grande-
Bretagne dans les autres parties
du monde : comment sa diplomatie
pourrait-elle aujourd'hui parler avec
son assurance, avec ses audaces
coutumières, tant que le redoutable
problème de l'Afrique australe n'est
pas résolu ?
F. L.
LA " mm " ET M MI5ISTÈSE
... tiâ.X-IUiterne, journal naguère dirigé
par M. Millerand, aujourd'hui ministre,
attaquait violemment hier M. Monis, au
tre ministre :
Depuis une dizaine d'années, les choix
faits par les chefs de gouvernement dans la
nomination des gardes des sceaux décèlent
une singulière négligence. Doit-on l'attri
buer à une serte d'indifférence que les pré
sidents de. cabinets professeraient à l'égard
de la, justice ? Considéreraient-ils ce dépar
tement comme un département secondaire,,
à la tête duquel on peut placer un figurant
quelconque?...
Il nous paraît difficile qu'un seul homme,
si bien doué soit-il sous ee rapport, puisse
commettre simultanément des gaffes aussi
nombreuses que M. Monis, sans se prêter,
avec une pointe de malice, au petit jeu qui
consiste à affecter d'être plus jocrisse en
core qu'on ne l'est, même quand on Test au
degré du chef actuel de la justice fran
çaise. •
La Lanterne reprochait à M. Monis son
dernier « mouvement «judiciaire et son
attitude dans la question des poursuites
contre M. Jaluzot. M. Rouanet, auteur de
l'article, concluait ainsi ••
M. Monis croit, évidemment, par ces
moyens dilatoires et peu loyaux, amortir
l'effet d'un débat dont la gravité ne saurait
échapper à personne. A moins qu'il n'ait
des pensées de derrière la tête qu'il dissimule
à la perspicacité de ses collègues du ca
binet.
Nous le prévenons charitablement que,
dans un cas comme dans l'autre, }1 se
trempe et que ses calculs pourraient bien
ne pas aboutir au total qu'il vise. Qui
compte sans son hôte compte deux fois, dit
le proverbe. J'engage M. Monis à méditer
cet adage.
Aujourd'hui, le même journal reproche
à M. Waldeck-Rousseau de ne pas avoir
reçu M. Flaissières :
Ainsi le président du conseil semble vou
loir rompre avec les habitudes de neutra
lité qui lui ont cependant assez bien réussi
jusqu'à présent.
' Ce serait une imprudence qui lui pourrait
coûter cher.
Il y a des craquements dans le parti
ministériel.
POUR LES CONGREGATIONS
Sous ce titre : « Alors... c'est la mi
sère », le vaillant rédacteur de la Fran
che-Comté, adresse une lettre ouverte à
M. Waldeck-Rousseau, président du
conseil des ministres, dans laquelle il fait
énergiquement ressortir les conséquen
ces désastreuses au point de vue écono
mique de la suppression des congréga
tions religieuses.
M. Ghambon tire ces conclusions :
Résumons-nous. Tous les ans : .
1° Par votre loi de disper
sion des congrégations, vous
F rivez les commerçants et
ouvrier français, de 116 millions
2° Vous grevez le budget
de l'Etat des œuvres [charita
bles des congrégations expul
sées de ggp —
3° Il vous faudra, pour rece
voir les élèves de leurs éco
les, au moins 48 —
Total
289 millions
Deux cent quatre-vingt-neuf millions qui
vont peser, d'une façon ou d'une autre, sur
les épaules des Français, soit en privant les
uns de leur gagne-pain, soit en augmentant
le bordereau des autres.
LE SCANDALE DE LILLE
Mardi est venue, au tribunal de simple
police de Lille, devant M. le juge de paix
Devette, l'action en possessoire intentée
par le conseil de fabrique de l'église de
de Saint Maurice des Champs à M. De-
lory, maire de Lille,\ pour l'odieuse et
inique destruction du calvaire, dit du
« Dieu de-Marcq ».
Un public nombreux emplissait le pré
toire.
Le maire de Lille a fait défaut. M* Ba
taille, qui représente le conseil de fabri
que, dépose immédiatement des conclu
sions, puis, dans un langage très modé
ré, il les appuie. Il dit combien la des
truction du calvaire a émotionné et émo-
tionne encore l'opinion, combien elle a
passionné la presse et la population.
M e Bataille défend le caractère de l'ac
tion introduite, ^qui vise à la fois M. De-
lory comme homme et comme maire.
Puis il cite, d'après Dalloz à l'article
« possessoire », les conditions juridiques
de l'action en réintégrande et il établit
que ces conditions ne sauraient être plus
complètement remplies que dans le cas
présent. Le conseil de fabrique avait la
détention matérielle du calvaire, il en
avait la clef, il en avait l'entretien, il y
faisait les réparations.
La détention était paisible et publique
et la dépossession a été violente, sans
avis préalable, sans mise en demeure et
presque clandestinement, car les ou
vriers qui forcèrent la grille, arrachèrent
la croix, enlevèrent les objets pieux dé
posés sur l'autel, donnèrent le change à
l'opinion en affirmant que c'était pour les
réparer et les remettre à neuf.
Le 6 mars, acte a été signifié à M. De-
lory de faire cesser l'illégale destruction
qu'il avait ordonnée, et M. Delory n'en a
pas tenu compte.
Toutes les conditions juridiques, ajou-
te-t-il, sont en notre faveur, le droit, la
loi; c'est pourquoi nous demandons le
rétablissement du Calvaire en son état
antérieur.
Le juge de paix demande alors à M"
Bataille si le conseil de fabrique est au
torisé à. intenter l'action ouverte par
lui.
M" Bataille prouve immédiatemeat, et
d'une façon péremptbire, qu'en l'espèce
l'autorisation est inutile, qu'elle n'a pas
à être demapdée, et il cite la jurispru
dence du" Conseil d'Etat — la plus haute
autorité en matière administrative, —
qui a tranché formellement la question
dans un décret du 20 septembre 1863,
décret dont la portée et l'autorité n'ont
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