Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1901-02-28
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 28 février 1901 28 février 1901
Description : 1901/02/28 (Numéro 12062). 1901/02/28 (Numéro 12062).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
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Jeudi 28 F&mer 1001
Edition quotidienne. "•* 12,062
Jeudi 28 Février 1901
ÉDITI ON QUOTI DIENNE
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LE MONDE
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EUNIVERS ne répond pas des manuscrits gui M sont adressés
t-'.-vV-f ANNONOE8 • .
MM. LAGRANGE, CERF et C", 6, place de la Bourse
PARIS, 27 FEVRIER 1901
SOMMAIRE
Léon XIII et les
arts ......
Bon programme—
Çàetlà : Quatre des
tinées
La guerre sud-afri
caine
A la Chambre... ...
Lettres d'Angleter
re
Choses d'Espagne..
Nouvelles agricoles
François Veuillot.
Pierre Veuillot.
J. Maktenay.
F. L.
Gabriei de Triobs.
coninfisby i
S.
A. de vllliers de
l'Isle-Adam.
Bulletin. — L'emploi du milliard. — Pour
les congrégations.' — La lettre de S. S.
Léon XIII «t l'épisoopat. — Le fisc et les
congrégations. — Le doyen des curés. —
Informations politiques et parlementai
res. — En Espagne. — En Allemagne. —
La guerre du Tranvaaî. —- En Ohiiie. —
Dépêche» de l'étranger. — Chronique.
— Lettres, sciences et arts. — Echos de
partout.— Au Sacré-Cœur.—En l'honneur
de saint Jean Baptiste de la Salle. —.Les
conférences de Saint-Roch. — Au Sillon.
— Les grèves.— Chambre des députés. —:
La lutte contre l'alcoolisme. — Nécrolo
gie. — Guerre et marine. — Tribunaux.
— L'accident de Noisy-le-Sec. — Nou
velles diverses. — Jardin d'acclimata
tion. — Qafcndrier. — Bourse et bulletin
financier. — Dernière heure.
&5«§â
£*3
LÉON XIII ET LES ARTS
Théologien'lumineux et profond,
pasteur aux admirables sollicitudes
envers les plus petits de son trou
peau, politique aux vues pénétran
tes et aux diréetions sûres, pontife
à la piété vigoureuse et ardente,
écrivain au style énergique et gran
diose, Léon XIII est encore un
émineat protecteur des arts.
Tenir haut et brillant le flambeau
des lettres et des arts, est en effet
l'une des traditions les plus an
ciennes et les mieux conservées de
l'Eglise et, en particulier, des Sou
verains Pontifes.
La religion, que des ignorants,
enfouis dans leur sottise, affectent
d'appeler,'l'ennemie des lumières,
est, à coup sûr, la plus grande école
artistique et intellectuelle qui se
soit levée dans le monde. Au lende
main des bouleversements accumu
lés par les barbares et des trésors
de l'antiquité détruits' ou perdus,
c'est la religion qui a nourri de son
lait divin les peintres et les sculp
teurs et qui a soutenu les premiers
pas de la nouvelle architecture.
Nous vivons encore aujourd'hui des
chefs-d'oeuvre çnfantés par la foi,
sous la conduite et là protection des
Papes.
La haute intelligence et le goût
très fin de Léon XIII, sa connais
sance approfondie des traditions les
plus antiques et sa juste compré
hension des besoins les plus mo
dernes devaient le conduire à gar
der cette auréole au front de l'E
glise. Il n'y a point manqué.
Au milieu des préoccupations
sans nombre et des soucis constam-^
. ment renouvelés de son long et glo-~
rieux pontificat; parmi , les œuvres
de doctrine et de piété qu'il a ré
pandues dans l'univers, avec la ma
gnifique profusion qui n'appartient
qu'au génie, le Saint-Père a trouvé
le temps de mener à. bonne fin, dans
le domaine artistique, une oeuvre
incomparable. La restauration des
chambres Borgia, au Vatican, en
treprise et terminée sous son règne
et par ses soins, suffit à lui mériter
une place éminente entre les plus
éclairés et les plus généreux des
Pontifes protecteurs des arts.
En ordonnant et en dirigeant ce
travail, qui n'a pas pris moins' de
treize années, Léon XIII a révélé
au monde un merveilleux trésor en
foui depuis quatre siècles au sein
. de la poussière et de l'oubli; Léon
XIII a ressuscité un maître, incom
parable entre les primitifs, et dont
on ne possédait plus que désœuvré*
éparses et incomplètes.
Nous venons d'étudier le 'récit de
cette initiative auguste et vraiment
souveraine et, tout à la fois, de sa
vourer le talent du Pinturicchio,
dans une superbe publication, qui
est en train de paraître "et doit glo
rifier l'une et l'autre (1).
M. Boyer d'Agen, l'auteur distin
gué de la Jeunesse et de la Prélature
de Léon XIII (2), a entrepris en effet
de faire connaître et de célébrer ce
rand artiste, aimé et protégé de
éon XIII. Et il a consacré l'in
troduction de ce long et beau tra
vail à exposer comment le Souve
rain Pontife avait restitué à l'admi-
î-atiqq des contemporains le chef-
dkpuvrp du Pinturicchio, les fres
ques de l'appartement des Borgia.
Cette introduction, à elle seule, avec
(') Le Peintre des Borgia., Pinturicchio.
Sa vie, son œuvre, son temps (1454-1513).;Le
monde pontifical et lasociété italienae pen
dant la Renaissance, par M. Boyer d'Agen.
Magnifique in-folio illustré, Paris, Société
d'éditions littéraires et artistiques, Ollen-
dorff, 50, chaussée d'Antin.
(2) 2 vol. chez Marne, Tours. Le premier
a paru en 1897. Nous donnerons prochai
nement un compte rendu du second, qui
vient de paraître^
E
ses soixante pages à l'imposant et
luxueux format, «maillées de fines
gravures, avec ses vingt planches
hors texte, à l'exécution desquelles
ont présidé la richesse et le bon
goût, forme déjà un volume unique,
à la hauteur du peintre et du Pon
tife.
Le Pinturicchio...? Pourquoi le
Pérugin Betto ou Bernardino fut-il
affublé de ce sobriquet, — car pin
turicchio signifie « peintrailleur » et
presque « barbouilleur » — qui a
effacé son vrai nom devant l'his
toire et lui reste attaché désormais?
Maître et ami de Raphaël, il fournit
à ce dernier un modèle assez ac
compli pour que Sanzio s'en inspi
rât à mainte occasion, comme on le
constate aisément par certains dé
tails, aujourd'hui ressuscites, des
chambres Borgia.
Cet appartement n'était constitué
que de grandes salles, aux murs
nus, à la forme impitoyablement
carrée, lorsque Alexandre VI, en
1493, ordonna au jeune Ombrien d'y
jeter tous, les trésors .de son imagi
nation, toutes les magnificences de
son pinceau. Quatre ans après,
le travail était accompli, les cham
bres transformées n'étaient qu'une
suite de chefs-d'œuvre, harmonieu
sement fondus dans un tout merveil
leux. Aux angles et aux coins, le
stuc, artistement moulé, encadrait
les fresques du maître; sur le sol,
un carrelage,- enrichi des nuances
les plus variées de la céramique,
semblait refléter les couleurs du
plafond, Le Pinturicchio s'était im
mortalisé.
Hélas! quelques années se pas
sent... et l'appartement d'Alexan
dre VI, abandonné, condamné pour
ainsi dire, ensevelit, comme au fend
d'un tombeau, les splendeurs que
l'art y avait entassées. Les cham
bres Borgia ne s'ouvrent plus qu'à
de rudes soldats, qui accrochent
aux murs leurs lourdes "dagues et,
sur le pavé jadis étincelant, font
brûler des feux de bivouac. Un peu
plus tard, elles servent de réduits
pour y entasser des fonds de biblio
thèques ou des collections dont .on
respecte trop la poussière.
Mais voici Léon XIII. Il veut sa
voir ce qui reste encore, en ces
chambres délaissées depuis quatre
cents ans, des tableaux a©nt un en
fant de Pérouse en couvrit les mu
railles. En 1884, une commission
est nommée sous la présidence de
Mgr Théodoli, majordome, assisté
du Père Tongiorgi, le savant reli
gieux de la Compagnie de Jésus, et
du prince Lancellotti. Sous la pous
sière et le salpêtre, a traversles dé
chirures etles débris, la commission
déchiffre, avec un soin minutieux
et avec une admiration que chaque
découverte augmente et fortifie, les
traits et les couleurs oubliés d'un
chef-d'œuvre immortel.Elle déclare
•nfin que, malgré ce délabrement
quatre fois séeulaire, l'appartement
Borgia n'a peut-être « rien au monde
qui lui soit supérieur ».
Alors, immédiatement, la restau
ration commence. Après une en
quête approfondie, cette oeuvre im
mense et délicate est confiée par
le Saint-Père au commandeur Seitz.
Mais Léon XIII ne se borne pas à
ordonner ce grand travail et à dis
tribuer généreusement les som
mes nécessaires à son achèvement
prompt et parfait. Il en surveille
assidûment l'exécution. On voit plu
sieurs fois le Pontife, au milieu des
ouvriers, examinant les détails et
donnant de judicieux conseils, dont
la compétence et la justesse éton
nent les professionnels. Rien n'é
chappe à sa sollicitude. Afin de^ res
tituer au sol l'éclat de son carrelage
primitif, il institue un concours en
tre les fabricants de céramiques ita
liens ; puis il confie au professeur
Tesorone, qui lui a paru le plus ha-
_bile et le plus versé dans son art, lo
soin de retrouver, a la chaleur de
ses fours, les antiques nuanegs et
l'harmonieuse variété des pavés
d'autrefois.
Enfin, le 8 mars 1897, Léon XIII
a la joie d'inaugurer ce chef-d'œu
vre, arraché au tombeau après qua
tre siècles de mort. Voici la Salis
des pontifes, où l'on foule une
véritable prairie de céramique,
émaillée de pâquerettes et de bou
tons d'or. Puis le vert tendre du
pavé fait place à un bleu profond,
pour laisser tout son éclatant relief
à la sublime épopée chrétienne,"que
le Pinturicchio a tracée dans la
Salle des mystères. Et la Salle des
saints vient ensuite, étalant sous
nos yeux, parmi d'autres beautés,
sainte Catherine en face de l'empe
reur Maxence. Après elle, nous en
trons dans la Sallecles arts libéraux,
dont les allégories sont tout à la
fois si exactes et si vivantes... Mais
c'est dans le texte imagé comnie un
livre d'heures où M. Boyer d'Agen
a conté ces merveilles et c'est dans
les planches où la perfection de là
gravure en a fait briller quelques
spécimens, qu'il faut étudier l'his
toire et contempler les splendeurs
de l'appartement des Borgia...
Quelques jours avant l'inaugura
tion, dans un discours au Sacré-
Collège, Léon XIII avait caractérisé
lui-même, en quelques mots, l'im
portance de l'œuvre accomplie, en
même temps qu'il rappelait les an
tiques largesses pontificales dont il
continuait la tradition glorieuse.
Après avoir énuméré les grandes
et magistrales besognes auxquelles
il avait attaché ses efforts, le Sou
verain Pontife ajoutait : « Moins
« importante, mais non moins utile
« sous d'autres rapports, a été la
« tâche assumée par Nous, de res
te taurer nouvellement les salles
« Borgia ; salles rendues célèbres
« par le renom des fresques qu'y
« peignit le maître ombrien qui a
« laissé, particulièrement j£Î et à
« Sienne, une si lumineuse trace de
« son génie.
« L'art est lié au christianisme
« par des liens indissolubles ayant
« trouvé avec la foi de nouvelles
« inspirations dans l'Eglise, et chez
« les Papes une tutelle généreuse.
« Folle est la pensée de croire que
« les libres élans du génie s'ac-
« cordent mal avec l'immutabilité
« du dogme. Le Vatican suffit à
« prouver la réalisation du mariage
« beauté vraie avec la véritable re-
« ligion... »
A ces éloquentes et augustes paro
les, nous ne voudrions rien ajouter,
si nous ne tenions encore à féliciter
l'auteur et l'éditeur,dont le superha
monument de littérature et d'art
fait mieux connaître et exalte au
jourd'hui le fruit le plus récent de
ce « mariage merveilleux ».
François Veuillot.
ïïULLETItNL
Hier, la Chambre a voté les articles 9,
10 et 11 de la loi sur les associations et
commencé la discussion de l'article 12.
La fin de la séance a été tumultueuse ;
les socialistes et les radicaux ayant pris
prétexte pour s'indigner de ce que M.
Amédée Reille avait qualifié d'assassinat
la condamnation de Louis XVI par la
Convention. La manifestation était, en
réalité, dirigée contre M. Deschanel que
l'extrême-gauche voudrait a.mener à dé
missionner. On annonce que le tapage
recommencera vendredi.
Nous avons aujourd'hui à enregistrer
pour l'étranger trois crises ministé
rielles qui étaient d'ailleurs prévues.
En Espagne, le général Azcarraga a
remis hier à, la reine régente la démis
sion du cabinet. On croit généralement
que M. Sïlvela. sera chargé de la forma-
tiondu nouveau ministère.
Enïioumanie;leroiapriéM. Stourd-
za, chef des libéraux, de prendre la suc
cession de M. Carp qui avait été mis en
minorité à la Chambre.
Enfin, en Bulgarie, le prince Ferdi
nand vient d'accepter la démission de
M. Pétroff, président du conseil, mais
n'a encore désigné personne pour cons
tituer le ministère.
On annonce qu'Edauard VII restera
en Allemagne, auprès de sa sœur, jus
qu'à. samedi prochain ; hier, l'empereur
Guillaume a pris congé de son oncle et
11 est retourné à Berlin.
Hier, au Reichsrath, Mgr Scheicher
a réduit à néant les odieuses allégations
portées à. la tribune par'.M. Schœnerer
contre le clergé catholique^
La séance a étéiîïarquée par des scènes
tumultueuses.
Hier, à. Pékin-, en présence de déta
chements des troupes internationales,
Tchi-Siou et Sou-Tcheng-You ont été
décapités.
On annonce que les ministres se sont
réunis hier matin pour dresser une
liste des fonctionnaires provinciaux
compromis dans l'insurrection des
boxeurs et contre lesquels ils demande
ront des châtiments.
BON PROGRAMME
La ligue de la Patrie française a
établi une section dans le quartier
Saint-Thomas d'Àquin. Les mem
bres-du bureau adressent une cir
culaire aux électeurs "du quartier.
Cet appel est ainsi conçu :
La ligue de la Patrie française, fondée
le 4 janvier 1899, a pour objet :
1° De maintenir et de fortifier l'amour
de la patrie et de l'armée nationale ;
2® D'éclairer l'opinion sur les grands
intérêts du pays ;
3° De surveiller et de combattre les in
gérences et les propagandes de l'étran
ger ;
. 4° De revendiquer les libertés qui sont
l'essence même du régime républicain,
en particulier la liberté d'association et
la liberté d'enseignement ;
5° D'organiser ie suffrage universel en
vue d'une République honnête et euverte
à tous.
L'ensemble de ces idées forme ce que
nous appelons une politique nationale
par opposition à la politique de parti.
Tandis que la politique de parti a seule
ment pour objet l'accaparement des pou
voirs publics par un groupe ou par une
secte, l'unique but de la politique natio
nale doit être l'intérêt général.
Soutenir cette politique nationale, c'est
faire son devoir de citoyen. Ï1 faut que
tous les bons Français se pénètrent de
cette vérité si simple : Le devoir civique
est un devoir aussi impérieux et aussi
sacré que les autres devoirs de l'homme.
C'est un devoir pour chacun de s'oceuper
des affaires du pays. C'est un devoir
d'exercer tous ses droits politiques, et
surtout le droit de vote. C'est un devoir
de protester par les moyens légaux contre
les abus du pouvoir et les atteintes à la
liberté. Il n'y va pas seulement de notre
propre intérêt, mais de l'intérêt de nos
enfants, de notre famille, de toute la
communauté dont nous faisons partie.
Si ce devoir n'avait pas été négligé de-
pui s quinze ans par tant d'honnêtes ci
toyens, la Francene serait pas dans l'état
de trouble et de division où les meilleurs
républicains reconnaissent qu'elle se
trouve aujourd'hui.
Suivent une demande d'ahésionet
les signatures.
Ce programme et ce langage
nous semblent inspirés par la sa
gesse et l'honnêteté comme par le
patriotisme. Mais en même temps
que nous croyons devoir leur don
ner notre approbation, nous ne pou
vons nous retenir d'exprimer un re
gret.
" Pourquoi la ligue de la Patrie
française ne s'est-elle point placée,
tout de suite et simplement, sur ce
terrain?
. Pourquoi, par la composition de
son état-major, les déclarations et
actes de certains de ses chefs les
plus en vue, a-t-elle Si fort prêté au
soupçon de vouloir constituer et en
cadrer un grand parti plébiscitaire?
Elle ne paraissait point aspirer seu
lement à nous doter d'une Républi
que meilleure, vraiment nationale
et enfin libérale. Elle semblait of
frir un lieu de concentration, à tous
ceux qui ambitionnaient de chan
ger la formo du gourernomont.
Remplacerait-on le réglmë actuel
par une eonstitution césarienne,
préface de l'Empire, ou serait-ce
une autre solution qui prévaudrait ?
Là-dessus, l'accord ne régnait ni
dans lès pronostics, ni dans les vo
lontés. Mais on pouvait toujours,
en attendant, renverser la Républi-
3ue parlementaire. C'était le mot
'ordre.
A recevoir, avec empressement,
tous ceux qui étaient animés d'es
poirs anticonstitutionnels, la Patrie
française a gagné de réunir, très
vite, un nombre, une masse d'adhé
rents plus-considérable. Seulement,
la question est de savoir si, en vue
du combat, c'est une force ou une
gêne, qu'une accumulation d^adhé-
rents qui ne s'entendent guère et
se surveillent avec méfiance, pour
se disputer la victoire, d'ailleurs
problématique.
; Avec un effectif d'abord moins
élevé, mais composé de troupes
plus alertes, plus unies et plus dis
ciplinâmes, nous croyons que la
Patrie française aurait pu faire dé
meilleure besogne. Elle eût vite
Joué un rôle prépondérant. Beau
coup de monarchistes et de plébis
citaires n'y seraient pas venus, sans
doute. Il nous semble que c'eût été
pour elle tout bénéfice. Ces recrues
l'ont bien plus compromise que ser
vie. Leur présence tapageuse dans
la Ligue a permis à un gouverne
ment sectaire de se poser, avec
moins d'invraisemblance, en dé
fenseur de la République. Et la
crainte que la Patrie française ne
fît un jour, sciemment ou non, le
jeu des royalistes ou des césariens,
a dû lui enlever, parmi les électeurs,
bon nombre d'appuis.
D'après la circulaire que nous
avons sous les - yeux, certains li
gueurs, au moins, reviendraient à
une plus juste appréciation du rôle
à remplir pour laPa trie française.
Nous souhaitons que leur manière
de voir l'emporte. Il est un peu
bien tard ; que de défiances à dissi
per, maintenant! Mais,,quelle que
soit la . longueur du chemin déjà
parcouru, il vaut toujours mieux
revenir sur ses pas, quand on s'a
perçoit que l'on faisait fausse
route. . _.
Pierre Veuillot.
Çà et là
QUATRE DESTINEES
En l'année 1810, quatre enfants naqui
rent qui étaient réservés à une haute for
tune... Le premier fut une gloire de
l'Église, le second fut un illustre prince,
le troisième, un admirable poète, le qua
trième, un grand soldat.
m
• •
Ce dernier s'appelait Pierre Bosquet.
En Crimée, il sauva l'armée britannique
qui allait être culbutée par les Russes.
Déjà atteint par la terrible maladie qui
dëvait l'emporter, le maréchal de Saint-
Arnaud, à cheval, soutenu |par deux
aides de camp, attendait avec impatience
le corps de Bosquet. Tout à coup, il aper
çut au loin une masse sombre qui se
rapprochait du champ de bataille.
Etait-ce l'infanterie française ? Etaient-
ce les Russes? Il attendait Grouchy.
Serait-ce Blucher ? Soudain, un flot de
sang colora les joues pâles du maréchal
et ses mains tremblantes laissèrent
échapper sa lorgnette; « Messieurs, dit-
il à ses aides de camp, messieurs, ce
sont des pantalons rouges ! Je reconnais
bien là mon vieux Bosquet d'Afrique ! »
C'était, en effet, le général béarnais
qui venait d'apparaître, à la tête de ses
zouaves, sur le champ de bataille et qui
allait prendre les Russes à revers.
— Général, l'Angleterre vous remer
cie ! lui dit lord Raglan le soir de cette
sânglante journée.
Quelques mois plus tard, après la
paix, Bosquet recevait des mains de Na
poléon III le bâton de maréchal de Fran
ce, et était nommé au commandement
du corps d'armée du Sud-Ouest. Il arri
vait à Pau, au milieu d'un enthousiasme
extraordinaire. Hélas ! il venait de res
sentir, pour la dernière fois, l'ivresse de
la gloire humaine. Encore jeune (il avait
reçu le bâton à l'âge de quarante-six ans)
nerveux et robuste,-il était bientôt atteint
d'an mal mystérieux, et mourait dans
les bras de sa mère qui regrettait d'avoir
si longtemps vécu !... .
# .
• *
Le prince qui naquit en exil [à Pa-
lerme) en 1810, était l'aîné des fils de ee
duc d'Orléans qui devait s'appeler Louis-
Philippe. Il eut la plus brillante et la
plus heureuse jeuûesse. Son père devint
roi. Lui-même fut prince royal. Son
allure, sa bonne grâce, et aussi quelques
succès militaires, d'ailleurs faciles, rem
portés en Afrique, lui valurent une popu
larité de bon aloi. « C'est mon meilleur
appui », disait, en parlant de son fils
aîné, le vieux roi que l'avenir inquiétait.
Un jour, le prince royal, qui se préparait
à partir pour le camp de Saint-Omer,
voulut se rendre à Neuilly pour faire ses
adieux à la reine. Jamais il ne s'était
senti plus gai, plus dispos, plus confiant.
Il déjeuna seul avec son ancien pro
fesseur de mathématiques, M. Guérard,
qu'il aimait fort, et lui. parla avec beau
coup d'entrain de divers projets. Le re
pas terminé, le prince monta en voiture
— une Victoria légère attelée en demi-
daumont. « Eh! quoi, Monseigneur, lui
dit M. Guérard, vous allez seul à Neuilly,
sans aide-dc-camp? oui, répliqua le
duc d'êrléans, tout mon monde fait ses
préparatifs afin de partir ce soir avec
moi pour Saint-Omer et je ne veux dé
ranger personne. Au revoir, Guérard,
nous nous retrouverons à Plombières. »
Le prince donna aussitôt le signal du
départ. Les chevaux étaient ardents et
ombrageux ; le postillon constata bien
vite qu'ils gagnaient à la main. Le duc
d'Orléans s'en aperçut aussi. En arrivant
sur la route de la Révolte, les chevaux
étaient emballés. Après d'énergiques ef
forts, le postill»n réussit enfin à les maî
triser. Il se retourna alors vers le prince.
Celui-ci avait disparu... Avait-il voulu
sauter sur la chaussée? S'était-il levé
pour parler au postillon et avait-il été
projeté hors de la voiture? Personne ne
l'a jamais su. En effet, — chose extraor
dinaire, — il n'y avait, à. ce moment, au
cun passant sur la route de la Révolte.
Et, nous l'avons dit, le duc d'Orléans
était seul dans sa Victoria. Lorsqu'on le
releva, il respirait encore, mais il ne rou
vrit pas les yeux, il ne desserra plus les
lèvres. Le roi et la reine, prévenus à la
hâte, accoururent auprès de cë fils bien-
aimé; pendant plusieurs heures, ils assis
tèrent, impuissants, à cette agonie. La
reine, désespérée, né cessa d'être à ge
noux. Elle demandait à Dieu un miracle.
Quant à Louis-Philippe, il comprenait
sans doute que l'expiation commençait
pour lui.
Le poète, c'est Alfred de Musset...Lui
aussi mourut jeune." Peu d'hommes
furent aussi bien doués. L'auteur de la
page célèbre :
Dors-tu content, Voltaire, et ton hideux
[sourire...
avait été le condisciple de ce duc d'Or
léans dont nous parlons plus haut. Nous
n'avons pas à apprécier ici son oeuvre : il
mena une vie bruyante et dissolue, et il
abrégea volontairement ses jours. On
assure qu'au dernier moment, il revint à
Dieu. _ -
»
• «
De ces quatre hommes qui naquirent
en 1810, un seul vit encore aujourd'hui.
Il porte le glorieux nom de Léon XIII.
Demain, il accomplira sa quatre-vingt-
onzième année. Sa haute intelligence a
conservé tout son éclat. Sa mémoire est
intacte. Les années ont blanchi sa tête
puissante sans la courber. Son unique
souci est le salut des âmes. Il comptera
parmi les plus grands Papes qui ont il
lustré le Saint-Siège.
Que Dieu le garde ! ,
J. M antenay.
L'EMPLOI DU MILLIARD
Hautes-Alpes.
Résultat dé l'enquête :
Immeubles possédés ou
occupés par les con-
- grégations, au 1 er jan
vier 190(1 (valeur vé
nale) : 4,791,600 £r.
(Tableau officiel, Tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Salles d'asiles 9
Hôpitaux.. 7
Hospices - 9
Ecoles piimaires 15
Total : 40.
Alpes-Maritimes.
Résultat de l'enquête :
Immeubles possédés ou
ocoupés par les con
grégations au 1 er jan
vier 1900 (valeur vé
nale) : - 14,710,375 fr.
(Tableau efficiel, Tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Orphelinats... 7
Salles d'asiles 7
Hôpitaux 4
Hospices 7
Ouvroirs 1
Maisons de retraite 3
Ecoles primaires 38
Dispensaires ; 6
Asile d'aliénés %.
Asiles de vieillards 3
Maison de refuge 1
Total : 79.
Soit, pour ces deux départements,
119 maisons hospitalières ou asiles
de charité.
tJL P|flSE, SUD-jlFRICJ jSE,
. Si, d'ici à quelques jours, les in
formations qui prévalent à Londres
en ce moment sont confirmées et
précisées, il y aurait tout lieu de
craindre l'écrasement final des mal
heureux Boers, et la. fin, peut-être
prochaine, de leur héroïque résis
tance.
Les dépêches annoncent, en ef
fet, que le général Botha, qui sou
tient la lutte dans le Transvaal, à
l'est de Prétoria, entre Ermelo et
Middelburg, se trouve présente
ment serré de près par les colonnes
anglaises; après avoir essuyé des
pertes sensibles, en hommes et en
matériel, il se porte péniblement de
plus en plus vers l'est, comme s'il
songeait à franchir . la frontière
portugaise et à mettre bas les ar
mes en pays neutre, ou soi-disant
tel.
La situation du général De Wet,
toujours d'après les mêmes infor
mations, ne serait guère {meilleure.
Pour une raison encore inexpliquée,
on prétend que, renonçant à se diri
ger vers l'ouest, sur Prieska ou
Carnarvon.De Wet serait revenu sur
ses pas et aurait dû retraverser ,1e
chemin de fer entre De Aar et IIo-
petown, un peu au sud de cette der
nière ville, dans le but de repasser
l'Orange, opération qu'une crue su
bite du fleuve rend extrêmement
difficile. Si ces renseignements sont
exacts, le hardi général se trouve
rait forcé de manœuvrer dans un
espace rectangulaire d'environ 100
à 120 kilomètres de côté, délimité
au nord par l'Orange et des trois
autres côtés par une ligne de che
min de fer, çar conséquent, dans
une région où ses adversaires sont
à l'aise et ont, pour le cerner, des
.facilités multiples.
A tout cela, il faut ajouter les in
formations qui signalent sur divers
points, parmi les Boers, des symp
tômes de découragement. Qui pour
rait s'en étonner quand on songe
que du 1 er août 1899 au 31 janvier
1901, les Anglais ont expédié dans
l'Afrique du Sud 282,000 hommes,
et reconnaissent avoir encore là-
bas une force armée de 205,000 hom
mes ?
' F. L.
—— —» —
A LA CHAMBRE
Le droit d'association.
La séance s'est trouvée close
brusquement, à la suite d'un inci
dent violent, soulevé non point par
le fond du débat sur les associa
tions religieuses, mais par le sou
venir de la mort de Louis XVI!
Il est indispensable d'expliquer
comment l'extrême-gauche a cru de
voir saisir l'occasion de manifester
son attachement stupide.et féroce à
l'intangibilité du bloc...
On avait repris la discussion de la
loi spoliatrice, et M. Gourd, après
en avoir terminé avec ses observa
tions, avait retiré s©n amendement
que M. Trouillot, suivant l'usage,
qualifiait de manœuvre contre le
projet lui-même, et que la majorité
toujours intolérante déclarait, par
des manifestations non équivoques,
devoir repousser.
L'article 12, qui fut jadis le para
graphe 1 er de l'ancien article 11
donne au gouvernement le droit dç.
dissoudre par décret les associa
tions composées en majorité d'é
trangers, et M. Julien Goujon de-'
mandait que les associations dont
tous les membres sont étrangers,
soient soumises à la déclaration
préalable.
Il semble que la précaution ait dû
être par tous réclamée, surtout par
le gouvernement mis à même ainsi
de connaître d'avance, et sans en
quête administrative, ces sortes
d'associations, mais les hommes au
pouvoir tiennent à, rester les maî
tres de frapper qui leur déplaira et
« d'ignorer » les autres. Quant à la
majorité, elle semble avoir de plus
en plus le seul souci de tout laisser
à l'arbitraire et a,u bon plaisir.
Malgré une argumentation très
serrée et aussi très spirituelle d«
M. Goujon, qui terminait, en se refu
sant à voir M. Waldeck-Rousseau en
Louis XIV, M. Trouillot en Louvois
et M. Ch. Bos en marquise de Main-
tenon, on a repoussé, par 310 voix
contre 208, son très sage amende
ment.
Le tour était venu-d'une motion
de M. le baron Amédée Reille, qui
proposait d'obliger toute associa
tion à être administrée et dirigée
par des Français ; au cours d'une
très chaude protestation contre les
attentats légaux qui se préparent,
le jeune député du Tarn, citant des
paroles du conventionnel Savary,
était amené à parler de « l'assassi
nat de Louis XVI »—^t voilà les ra
dicaux et les socialistes, ceux qui
siègent à l'extrême gauche auski
droite, debout, hurlant, montrant les
poings à l'orateur pour l'intimider,
au président; pour lui demander de
prononcer un rappel à l'ordre.
Ils veulent une intervention que
M. Paul Deschanel, avec raison,
jugerait déplacée; ils s'échauffent,
/
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v\a v
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Jeudi 28 F&mer 1001
Edition quotidienne. "•* 12,062
Jeudi 28 Février 1901
ÉDITI ON QUOTI DIENNE
PARIS . ÉTRANGER
W3t départements (un|0n postale!}
Un an 40 » 51 »
Six mois...... 21 » 26 50
Trois mois 11 » 14 »
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Six mois 10 »
Trois mois.... „ 5 »
26 »
13 »
a se
UN NUMÉRO |
33 X
BUREAUX : Par}a t rue Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8
LE MONDE
Lea abonnements partent des I e » et 18 de chaque mois
EUNIVERS ne répond pas des manuscrits gui M sont adressés
t-'.-vV-f ANNONOE8 • .
MM. LAGRANGE, CERF et C", 6, place de la Bourse
PARIS, 27 FEVRIER 1901
SOMMAIRE
Léon XIII et les
arts ......
Bon programme—
Çàetlà : Quatre des
tinées
La guerre sud-afri
caine
A la Chambre... ...
Lettres d'Angleter
re
Choses d'Espagne..
Nouvelles agricoles
François Veuillot.
Pierre Veuillot.
J. Maktenay.
F. L.
Gabriei de Triobs.
coninfisby i
S.
A. de vllliers de
l'Isle-Adam.
Bulletin. — L'emploi du milliard. — Pour
les congrégations.' — La lettre de S. S.
Léon XIII «t l'épisoopat. — Le fisc et les
congrégations. — Le doyen des curés. —
Informations politiques et parlementai
res. — En Espagne. — En Allemagne. —
La guerre du Tranvaaî. —- En Ohiiie. —
Dépêche» de l'étranger. — Chronique.
— Lettres, sciences et arts. — Echos de
partout.— Au Sacré-Cœur.—En l'honneur
de saint Jean Baptiste de la Salle. —.Les
conférences de Saint-Roch. — Au Sillon.
— Les grèves.— Chambre des députés. —:
La lutte contre l'alcoolisme. — Nécrolo
gie. — Guerre et marine. — Tribunaux.
— L'accident de Noisy-le-Sec. — Nou
velles diverses. — Jardin d'acclimata
tion. — Qafcndrier. — Bourse et bulletin
financier. — Dernière heure.
&5«§â
£*3
LÉON XIII ET LES ARTS
Théologien'lumineux et profond,
pasteur aux admirables sollicitudes
envers les plus petits de son trou
peau, politique aux vues pénétran
tes et aux diréetions sûres, pontife
à la piété vigoureuse et ardente,
écrivain au style énergique et gran
diose, Léon XIII est encore un
émineat protecteur des arts.
Tenir haut et brillant le flambeau
des lettres et des arts, est en effet
l'une des traditions les plus an
ciennes et les mieux conservées de
l'Eglise et, en particulier, des Sou
verains Pontifes.
La religion, que des ignorants,
enfouis dans leur sottise, affectent
d'appeler,'l'ennemie des lumières,
est, à coup sûr, la plus grande école
artistique et intellectuelle qui se
soit levée dans le monde. Au lende
main des bouleversements accumu
lés par les barbares et des trésors
de l'antiquité détruits' ou perdus,
c'est la religion qui a nourri de son
lait divin les peintres et les sculp
teurs et qui a soutenu les premiers
pas de la nouvelle architecture.
Nous vivons encore aujourd'hui des
chefs-d'oeuvre çnfantés par la foi,
sous la conduite et là protection des
Papes.
La haute intelligence et le goût
très fin de Léon XIII, sa connais
sance approfondie des traditions les
plus antiques et sa juste compré
hension des besoins les plus mo
dernes devaient le conduire à gar
der cette auréole au front de l'E
glise. Il n'y a point manqué.
Au milieu des préoccupations
sans nombre et des soucis constam-^
. ment renouvelés de son long et glo-~
rieux pontificat; parmi , les œuvres
de doctrine et de piété qu'il a ré
pandues dans l'univers, avec la ma
gnifique profusion qui n'appartient
qu'au génie, le Saint-Père a trouvé
le temps de mener à. bonne fin, dans
le domaine artistique, une oeuvre
incomparable. La restauration des
chambres Borgia, au Vatican, en
treprise et terminée sous son règne
et par ses soins, suffit à lui mériter
une place éminente entre les plus
éclairés et les plus généreux des
Pontifes protecteurs des arts.
En ordonnant et en dirigeant ce
travail, qui n'a pas pris moins' de
treize années, Léon XIII a révélé
au monde un merveilleux trésor en
foui depuis quatre siècles au sein
. de la poussière et de l'oubli; Léon
XIII a ressuscité un maître, incom
parable entre les primitifs, et dont
on ne possédait plus que désœuvré*
éparses et incomplètes.
Nous venons d'étudier le 'récit de
cette initiative auguste et vraiment
souveraine et, tout à la fois, de sa
vourer le talent du Pinturicchio,
dans une superbe publication, qui
est en train de paraître "et doit glo
rifier l'une et l'autre (1).
M. Boyer d'Agen, l'auteur distin
gué de la Jeunesse et de la Prélature
de Léon XIII (2), a entrepris en effet
de faire connaître et de célébrer ce
rand artiste, aimé et protégé de
éon XIII. Et il a consacré l'in
troduction de ce long et beau tra
vail à exposer comment le Souve
rain Pontife avait restitué à l'admi-
î-atiqq des contemporains le chef-
dkpuvrp du Pinturicchio, les fres
ques de l'appartement des Borgia.
Cette introduction, à elle seule, avec
(') Le Peintre des Borgia., Pinturicchio.
Sa vie, son œuvre, son temps (1454-1513).;Le
monde pontifical et lasociété italienae pen
dant la Renaissance, par M. Boyer d'Agen.
Magnifique in-folio illustré, Paris, Société
d'éditions littéraires et artistiques, Ollen-
dorff, 50, chaussée d'Antin.
(2) 2 vol. chez Marne, Tours. Le premier
a paru en 1897. Nous donnerons prochai
nement un compte rendu du second, qui
vient de paraître^
E
ses soixante pages à l'imposant et
luxueux format, «maillées de fines
gravures, avec ses vingt planches
hors texte, à l'exécution desquelles
ont présidé la richesse et le bon
goût, forme déjà un volume unique,
à la hauteur du peintre et du Pon
tife.
Le Pinturicchio...? Pourquoi le
Pérugin Betto ou Bernardino fut-il
affublé de ce sobriquet, — car pin
turicchio signifie « peintrailleur » et
presque « barbouilleur » — qui a
effacé son vrai nom devant l'his
toire et lui reste attaché désormais?
Maître et ami de Raphaël, il fournit
à ce dernier un modèle assez ac
compli pour que Sanzio s'en inspi
rât à mainte occasion, comme on le
constate aisément par certains dé
tails, aujourd'hui ressuscites, des
chambres Borgia.
Cet appartement n'était constitué
que de grandes salles, aux murs
nus, à la forme impitoyablement
carrée, lorsque Alexandre VI, en
1493, ordonna au jeune Ombrien d'y
jeter tous, les trésors .de son imagi
nation, toutes les magnificences de
son pinceau. Quatre ans après,
le travail était accompli, les cham
bres transformées n'étaient qu'une
suite de chefs-d'œuvre, harmonieu
sement fondus dans un tout merveil
leux. Aux angles et aux coins, le
stuc, artistement moulé, encadrait
les fresques du maître; sur le sol,
un carrelage,- enrichi des nuances
les plus variées de la céramique,
semblait refléter les couleurs du
plafond, Le Pinturicchio s'était im
mortalisé.
Hélas! quelques années se pas
sent... et l'appartement d'Alexan
dre VI, abandonné, condamné pour
ainsi dire, ensevelit, comme au fend
d'un tombeau, les splendeurs que
l'art y avait entassées. Les cham
bres Borgia ne s'ouvrent plus qu'à
de rudes soldats, qui accrochent
aux murs leurs lourdes "dagues et,
sur le pavé jadis étincelant, font
brûler des feux de bivouac. Un peu
plus tard, elles servent de réduits
pour y entasser des fonds de biblio
thèques ou des collections dont .on
respecte trop la poussière.
Mais voici Léon XIII. Il veut sa
voir ce qui reste encore, en ces
chambres délaissées depuis quatre
cents ans, des tableaux a©nt un en
fant de Pérouse en couvrit les mu
railles. En 1884, une commission
est nommée sous la présidence de
Mgr Théodoli, majordome, assisté
du Père Tongiorgi, le savant reli
gieux de la Compagnie de Jésus, et
du prince Lancellotti. Sous la pous
sière et le salpêtre, a traversles dé
chirures etles débris, la commission
déchiffre, avec un soin minutieux
et avec une admiration que chaque
découverte augmente et fortifie, les
traits et les couleurs oubliés d'un
chef-d'œuvre immortel.Elle déclare
•nfin que, malgré ce délabrement
quatre fois séeulaire, l'appartement
Borgia n'a peut-être « rien au monde
qui lui soit supérieur ».
Alors, immédiatement, la restau
ration commence. Après une en
quête approfondie, cette oeuvre im
mense et délicate est confiée par
le Saint-Père au commandeur Seitz.
Mais Léon XIII ne se borne pas à
ordonner ce grand travail et à dis
tribuer généreusement les som
mes nécessaires à son achèvement
prompt et parfait. Il en surveille
assidûment l'exécution. On voit plu
sieurs fois le Pontife, au milieu des
ouvriers, examinant les détails et
donnant de judicieux conseils, dont
la compétence et la justesse éton
nent les professionnels. Rien n'é
chappe à sa sollicitude. Afin de^ res
tituer au sol l'éclat de son carrelage
primitif, il institue un concours en
tre les fabricants de céramiques ita
liens ; puis il confie au professeur
Tesorone, qui lui a paru le plus ha-
_bile et le plus versé dans son art, lo
soin de retrouver, a la chaleur de
ses fours, les antiques nuanegs et
l'harmonieuse variété des pavés
d'autrefois.
Enfin, le 8 mars 1897, Léon XIII
a la joie d'inaugurer ce chef-d'œu
vre, arraché au tombeau après qua
tre siècles de mort. Voici la Salis
des pontifes, où l'on foule une
véritable prairie de céramique,
émaillée de pâquerettes et de bou
tons d'or. Puis le vert tendre du
pavé fait place à un bleu profond,
pour laisser tout son éclatant relief
à la sublime épopée chrétienne,"que
le Pinturicchio a tracée dans la
Salle des mystères. Et la Salle des
saints vient ensuite, étalant sous
nos yeux, parmi d'autres beautés,
sainte Catherine en face de l'empe
reur Maxence. Après elle, nous en
trons dans la Sallecles arts libéraux,
dont les allégories sont tout à la
fois si exactes et si vivantes... Mais
c'est dans le texte imagé comnie un
livre d'heures où M. Boyer d'Agen
a conté ces merveilles et c'est dans
les planches où la perfection de là
gravure en a fait briller quelques
spécimens, qu'il faut étudier l'his
toire et contempler les splendeurs
de l'appartement des Borgia...
Quelques jours avant l'inaugura
tion, dans un discours au Sacré-
Collège, Léon XIII avait caractérisé
lui-même, en quelques mots, l'im
portance de l'œuvre accomplie, en
même temps qu'il rappelait les an
tiques largesses pontificales dont il
continuait la tradition glorieuse.
Après avoir énuméré les grandes
et magistrales besognes auxquelles
il avait attaché ses efforts, le Sou
verain Pontife ajoutait : « Moins
« importante, mais non moins utile
« sous d'autres rapports, a été la
« tâche assumée par Nous, de res
te taurer nouvellement les salles
« Borgia ; salles rendues célèbres
« par le renom des fresques qu'y
« peignit le maître ombrien qui a
« laissé, particulièrement j£Î et à
« Sienne, une si lumineuse trace de
« son génie.
« L'art est lié au christianisme
« par des liens indissolubles ayant
« trouvé avec la foi de nouvelles
« inspirations dans l'Eglise, et chez
« les Papes une tutelle généreuse.
« Folle est la pensée de croire que
« les libres élans du génie s'ac-
« cordent mal avec l'immutabilité
« du dogme. Le Vatican suffit à
« prouver la réalisation du mariage
« ligion... »
A ces éloquentes et augustes paro
les, nous ne voudrions rien ajouter,
si nous ne tenions encore à féliciter
l'auteur et l'éditeur,dont le superha
monument de littérature et d'art
fait mieux connaître et exalte au
jourd'hui le fruit le plus récent de
ce « mariage merveilleux ».
François Veuillot.
ïïULLETItNL
Hier, la Chambre a voté les articles 9,
10 et 11 de la loi sur les associations et
commencé la discussion de l'article 12.
La fin de la séance a été tumultueuse ;
les socialistes et les radicaux ayant pris
prétexte pour s'indigner de ce que M.
Amédée Reille avait qualifié d'assassinat
la condamnation de Louis XVI par la
Convention. La manifestation était, en
réalité, dirigée contre M. Deschanel que
l'extrême-gauche voudrait a.mener à dé
missionner. On annonce que le tapage
recommencera vendredi.
Nous avons aujourd'hui à enregistrer
pour l'étranger trois crises ministé
rielles qui étaient d'ailleurs prévues.
En Espagne, le général Azcarraga a
remis hier à, la reine régente la démis
sion du cabinet. On croit généralement
que M. Sïlvela. sera chargé de la forma-
tiondu nouveau ministère.
Enïioumanie;leroiapriéM. Stourd-
za, chef des libéraux, de prendre la suc
cession de M. Carp qui avait été mis en
minorité à la Chambre.
Enfin, en Bulgarie, le prince Ferdi
nand vient d'accepter la démission de
M. Pétroff, président du conseil, mais
n'a encore désigné personne pour cons
tituer le ministère.
On annonce qu'Edauard VII restera
en Allemagne, auprès de sa sœur, jus
qu'à. samedi prochain ; hier, l'empereur
Guillaume a pris congé de son oncle et
11 est retourné à Berlin.
Hier, au Reichsrath, Mgr Scheicher
a réduit à néant les odieuses allégations
portées à. la tribune par'.M. Schœnerer
contre le clergé catholique^
La séance a étéiîïarquée par des scènes
tumultueuses.
Hier, à. Pékin-, en présence de déta
chements des troupes internationales,
Tchi-Siou et Sou-Tcheng-You ont été
décapités.
On annonce que les ministres se sont
réunis hier matin pour dresser une
liste des fonctionnaires provinciaux
compromis dans l'insurrection des
boxeurs et contre lesquels ils demande
ront des châtiments.
BON PROGRAMME
La ligue de la Patrie française a
établi une section dans le quartier
Saint-Thomas d'Àquin. Les mem
bres-du bureau adressent une cir
culaire aux électeurs "du quartier.
Cet appel est ainsi conçu :
La ligue de la Patrie française, fondée
le 4 janvier 1899, a pour objet :
1° De maintenir et de fortifier l'amour
de la patrie et de l'armée nationale ;
2® D'éclairer l'opinion sur les grands
intérêts du pays ;
3° De surveiller et de combattre les in
gérences et les propagandes de l'étran
ger ;
. 4° De revendiquer les libertés qui sont
l'essence même du régime républicain,
en particulier la liberté d'association et
la liberté d'enseignement ;
5° D'organiser ie suffrage universel en
vue d'une République honnête et euverte
à tous.
L'ensemble de ces idées forme ce que
nous appelons une politique nationale
par opposition à la politique de parti.
Tandis que la politique de parti a seule
ment pour objet l'accaparement des pou
voirs publics par un groupe ou par une
secte, l'unique but de la politique natio
nale doit être l'intérêt général.
Soutenir cette politique nationale, c'est
faire son devoir de citoyen. Ï1 faut que
tous les bons Français se pénètrent de
cette vérité si simple : Le devoir civique
est un devoir aussi impérieux et aussi
sacré que les autres devoirs de l'homme.
C'est un devoir pour chacun de s'oceuper
des affaires du pays. C'est un devoir
d'exercer tous ses droits politiques, et
surtout le droit de vote. C'est un devoir
de protester par les moyens légaux contre
les abus du pouvoir et les atteintes à la
liberté. Il n'y va pas seulement de notre
propre intérêt, mais de l'intérêt de nos
enfants, de notre famille, de toute la
communauté dont nous faisons partie.
Si ce devoir n'avait pas été négligé de-
pui s quinze ans par tant d'honnêtes ci
toyens, la Francene serait pas dans l'état
de trouble et de division où les meilleurs
républicains reconnaissent qu'elle se
trouve aujourd'hui.
Suivent une demande d'ahésionet
les signatures.
Ce programme et ce langage
nous semblent inspirés par la sa
gesse et l'honnêteté comme par le
patriotisme. Mais en même temps
que nous croyons devoir leur don
ner notre approbation, nous ne pou
vons nous retenir d'exprimer un re
gret.
" Pourquoi la ligue de la Patrie
française ne s'est-elle point placée,
tout de suite et simplement, sur ce
terrain?
. Pourquoi, par la composition de
son état-major, les déclarations et
actes de certains de ses chefs les
plus en vue, a-t-elle Si fort prêté au
soupçon de vouloir constituer et en
cadrer un grand parti plébiscitaire?
Elle ne paraissait point aspirer seu
lement à nous doter d'une Républi
que meilleure, vraiment nationale
et enfin libérale. Elle semblait of
frir un lieu de concentration, à tous
ceux qui ambitionnaient de chan
ger la formo du gourernomont.
Remplacerait-on le réglmë actuel
par une eonstitution césarienne,
préface de l'Empire, ou serait-ce
une autre solution qui prévaudrait ?
Là-dessus, l'accord ne régnait ni
dans lès pronostics, ni dans les vo
lontés. Mais on pouvait toujours,
en attendant, renverser la Républi-
3ue parlementaire. C'était le mot
'ordre.
A recevoir, avec empressement,
tous ceux qui étaient animés d'es
poirs anticonstitutionnels, la Patrie
française a gagné de réunir, très
vite, un nombre, une masse d'adhé
rents plus-considérable. Seulement,
la question est de savoir si, en vue
du combat, c'est une force ou une
gêne, qu'une accumulation d^adhé-
rents qui ne s'entendent guère et
se surveillent avec méfiance, pour
se disputer la victoire, d'ailleurs
problématique.
; Avec un effectif d'abord moins
élevé, mais composé de troupes
plus alertes, plus unies et plus dis
ciplinâmes, nous croyons que la
Patrie française aurait pu faire dé
meilleure besogne. Elle eût vite
Joué un rôle prépondérant. Beau
coup de monarchistes et de plébis
citaires n'y seraient pas venus, sans
doute. Il nous semble que c'eût été
pour elle tout bénéfice. Ces recrues
l'ont bien plus compromise que ser
vie. Leur présence tapageuse dans
la Ligue a permis à un gouverne
ment sectaire de se poser, avec
moins d'invraisemblance, en dé
fenseur de la République. Et la
crainte que la Patrie française ne
fît un jour, sciemment ou non, le
jeu des royalistes ou des césariens,
a dû lui enlever, parmi les électeurs,
bon nombre d'appuis.
D'après la circulaire que nous
avons sous les - yeux, certains li
gueurs, au moins, reviendraient à
une plus juste appréciation du rôle
à remplir pour laPa trie française.
Nous souhaitons que leur manière
de voir l'emporte. Il est un peu
bien tard ; que de défiances à dissi
per, maintenant! Mais,,quelle que
soit la . longueur du chemin déjà
parcouru, il vaut toujours mieux
revenir sur ses pas, quand on s'a
perçoit que l'on faisait fausse
route. . _.
Pierre Veuillot.
Çà et là
QUATRE DESTINEES
En l'année 1810, quatre enfants naqui
rent qui étaient réservés à une haute for
tune... Le premier fut une gloire de
l'Église, le second fut un illustre prince,
le troisième, un admirable poète, le qua
trième, un grand soldat.
m
• •
Ce dernier s'appelait Pierre Bosquet.
En Crimée, il sauva l'armée britannique
qui allait être culbutée par les Russes.
Déjà atteint par la terrible maladie qui
dëvait l'emporter, le maréchal de Saint-
Arnaud, à cheval, soutenu |par deux
aides de camp, attendait avec impatience
le corps de Bosquet. Tout à coup, il aper
çut au loin une masse sombre qui se
rapprochait du champ de bataille.
Etait-ce l'infanterie française ? Etaient-
ce les Russes? Il attendait Grouchy.
Serait-ce Blucher ? Soudain, un flot de
sang colora les joues pâles du maréchal
et ses mains tremblantes laissèrent
échapper sa lorgnette; « Messieurs, dit-
il à ses aides de camp, messieurs, ce
sont des pantalons rouges ! Je reconnais
bien là mon vieux Bosquet d'Afrique ! »
C'était, en effet, le général béarnais
qui venait d'apparaître, à la tête de ses
zouaves, sur le champ de bataille et qui
allait prendre les Russes à revers.
— Général, l'Angleterre vous remer
cie ! lui dit lord Raglan le soir de cette
sânglante journée.
Quelques mois plus tard, après la
paix, Bosquet recevait des mains de Na
poléon III le bâton de maréchal de Fran
ce, et était nommé au commandement
du corps d'armée du Sud-Ouest. Il arri
vait à Pau, au milieu d'un enthousiasme
extraordinaire. Hélas ! il venait de res
sentir, pour la dernière fois, l'ivresse de
la gloire humaine. Encore jeune (il avait
reçu le bâton à l'âge de quarante-six ans)
nerveux et robuste,-il était bientôt atteint
d'an mal mystérieux, et mourait dans
les bras de sa mère qui regrettait d'avoir
si longtemps vécu !... .
# .
• *
Le prince qui naquit en exil [à Pa-
lerme) en 1810, était l'aîné des fils de ee
duc d'Orléans qui devait s'appeler Louis-
Philippe. Il eut la plus brillante et la
plus heureuse jeuûesse. Son père devint
roi. Lui-même fut prince royal. Son
allure, sa bonne grâce, et aussi quelques
succès militaires, d'ailleurs faciles, rem
portés en Afrique, lui valurent une popu
larité de bon aloi. « C'est mon meilleur
appui », disait, en parlant de son fils
aîné, le vieux roi que l'avenir inquiétait.
Un jour, le prince royal, qui se préparait
à partir pour le camp de Saint-Omer,
voulut se rendre à Neuilly pour faire ses
adieux à la reine. Jamais il ne s'était
senti plus gai, plus dispos, plus confiant.
Il déjeuna seul avec son ancien pro
fesseur de mathématiques, M. Guérard,
qu'il aimait fort, et lui. parla avec beau
coup d'entrain de divers projets. Le re
pas terminé, le prince monta en voiture
— une Victoria légère attelée en demi-
daumont. « Eh! quoi, Monseigneur, lui
dit M. Guérard, vous allez seul à Neuilly,
sans aide-dc-camp? oui, répliqua le
duc d'êrléans, tout mon monde fait ses
préparatifs afin de partir ce soir avec
moi pour Saint-Omer et je ne veux dé
ranger personne. Au revoir, Guérard,
nous nous retrouverons à Plombières. »
Le prince donna aussitôt le signal du
départ. Les chevaux étaient ardents et
ombrageux ; le postillon constata bien
vite qu'ils gagnaient à la main. Le duc
d'Orléans s'en aperçut aussi. En arrivant
sur la route de la Révolte, les chevaux
étaient emballés. Après d'énergiques ef
forts, le postill»n réussit enfin à les maî
triser. Il se retourna alors vers le prince.
Celui-ci avait disparu... Avait-il voulu
sauter sur la chaussée? S'était-il levé
pour parler au postillon et avait-il été
projeté hors de la voiture? Personne ne
l'a jamais su. En effet, — chose extraor
dinaire, — il n'y avait, à. ce moment, au
cun passant sur la route de la Révolte.
Et, nous l'avons dit, le duc d'Orléans
était seul dans sa Victoria. Lorsqu'on le
releva, il respirait encore, mais il ne rou
vrit pas les yeux, il ne desserra plus les
lèvres. Le roi et la reine, prévenus à la
hâte, accoururent auprès de cë fils bien-
aimé; pendant plusieurs heures, ils assis
tèrent, impuissants, à cette agonie. La
reine, désespérée, né cessa d'être à ge
noux. Elle demandait à Dieu un miracle.
Quant à Louis-Philippe, il comprenait
sans doute que l'expiation commençait
pour lui.
Le poète, c'est Alfred de Musset...Lui
aussi mourut jeune." Peu d'hommes
furent aussi bien doués. L'auteur de la
page célèbre :
Dors-tu content, Voltaire, et ton hideux
[sourire...
avait été le condisciple de ce duc d'Or
léans dont nous parlons plus haut. Nous
n'avons pas à apprécier ici son oeuvre : il
mena une vie bruyante et dissolue, et il
abrégea volontairement ses jours. On
assure qu'au dernier moment, il revint à
Dieu. _ -
»
• «
De ces quatre hommes qui naquirent
en 1810, un seul vit encore aujourd'hui.
Il porte le glorieux nom de Léon XIII.
Demain, il accomplira sa quatre-vingt-
onzième année. Sa haute intelligence a
conservé tout son éclat. Sa mémoire est
intacte. Les années ont blanchi sa tête
puissante sans la courber. Son unique
souci est le salut des âmes. Il comptera
parmi les plus grands Papes qui ont il
lustré le Saint-Siège.
Que Dieu le garde ! ,
J. M antenay.
L'EMPLOI DU MILLIARD
Hautes-Alpes.
Résultat dé l'enquête :
Immeubles possédés ou
occupés par les con-
- grégations, au 1 er jan
vier 190(1 (valeur vé
nale) : 4,791,600 £r.
(Tableau officiel, Tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Salles d'asiles 9
Hôpitaux.. 7
Hospices - 9
Ecoles piimaires 15
Total : 40.
Alpes-Maritimes.
Résultat de l'enquête :
Immeubles possédés ou
ocoupés par les con
grégations au 1 er jan
vier 1900 (valeur vé
nale) : - 14,710,375 fr.
(Tableau efficiel, Tome I, page 1037.)
Ce que l'enquête ne dit pas :
Orphelinats... 7
Salles d'asiles 7
Hôpitaux 4
Hospices 7
Ouvroirs 1
Maisons de retraite 3
Ecoles primaires 38
Dispensaires ; 6
Asile d'aliénés %.
Asiles de vieillards 3
Maison de refuge 1
Total : 79.
Soit, pour ces deux départements,
119 maisons hospitalières ou asiles
de charité.
tJL P|flSE, SUD-jlFRICJ jSE,
. Si, d'ici à quelques jours, les in
formations qui prévalent à Londres
en ce moment sont confirmées et
précisées, il y aurait tout lieu de
craindre l'écrasement final des mal
heureux Boers, et la. fin, peut-être
prochaine, de leur héroïque résis
tance.
Les dépêches annoncent, en ef
fet, que le général Botha, qui sou
tient la lutte dans le Transvaal, à
l'est de Prétoria, entre Ermelo et
Middelburg, se trouve présente
ment serré de près par les colonnes
anglaises; après avoir essuyé des
pertes sensibles, en hommes et en
matériel, il se porte péniblement de
plus en plus vers l'est, comme s'il
songeait à franchir . la frontière
portugaise et à mettre bas les ar
mes en pays neutre, ou soi-disant
tel.
La situation du général De Wet,
toujours d'après les mêmes infor
mations, ne serait guère {meilleure.
Pour une raison encore inexpliquée,
on prétend que, renonçant à se diri
ger vers l'ouest, sur Prieska ou
Carnarvon.De Wet serait revenu sur
ses pas et aurait dû retraverser ,1e
chemin de fer entre De Aar et IIo-
petown, un peu au sud de cette der
nière ville, dans le but de repasser
l'Orange, opération qu'une crue su
bite du fleuve rend extrêmement
difficile. Si ces renseignements sont
exacts, le hardi général se trouve
rait forcé de manœuvrer dans un
espace rectangulaire d'environ 100
à 120 kilomètres de côté, délimité
au nord par l'Orange et des trois
autres côtés par une ligne de che
min de fer, çar conséquent, dans
une région où ses adversaires sont
à l'aise et ont, pour le cerner, des
.facilités multiples.
A tout cela, il faut ajouter les in
formations qui signalent sur divers
points, parmi les Boers, des symp
tômes de découragement. Qui pour
rait s'en étonner quand on songe
que du 1 er août 1899 au 31 janvier
1901, les Anglais ont expédié dans
l'Afrique du Sud 282,000 hommes,
et reconnaissent avoir encore là-
bas une force armée de 205,000 hom
mes ?
' F. L.
—— —» —
A LA CHAMBRE
Le droit d'association.
La séance s'est trouvée close
brusquement, à la suite d'un inci
dent violent, soulevé non point par
le fond du débat sur les associa
tions religieuses, mais par le sou
venir de la mort de Louis XVI!
Il est indispensable d'expliquer
comment l'extrême-gauche a cru de
voir saisir l'occasion de manifester
son attachement stupide.et féroce à
l'intangibilité du bloc...
On avait repris la discussion de la
loi spoliatrice, et M. Gourd, après
en avoir terminé avec ses observa
tions, avait retiré s©n amendement
que M. Trouillot, suivant l'usage,
qualifiait de manœuvre contre le
projet lui-même, et que la majorité
toujours intolérante déclarait, par
des manifestations non équivoques,
devoir repousser.
L'article 12, qui fut jadis le para
graphe 1 er de l'ancien article 11
donne au gouvernement le droit dç.
dissoudre par décret les associa
tions composées en majorité d'é
trangers, et M. Julien Goujon de-'
mandait que les associations dont
tous les membres sont étrangers,
soient soumises à la déclaration
préalable.
Il semble que la précaution ait dû
être par tous réclamée, surtout par
le gouvernement mis à même ainsi
de connaître d'avance, et sans en
quête administrative, ces sortes
d'associations, mais les hommes au
pouvoir tiennent à, rester les maî
tres de frapper qui leur déplaira et
« d'ignorer » les autres. Quant à la
majorité, elle semble avoir de plus
en plus le seul souci de tout laisser
à l'arbitraire et a,u bon plaisir.
Malgré une argumentation très
serrée et aussi très spirituelle d«
M. Goujon, qui terminait, en se refu
sant à voir M. Waldeck-Rousseau en
Louis XIV, M. Trouillot en Louvois
et M. Ch. Bos en marquise de Main-
tenon, on a repoussé, par 310 voix
contre 208, son très sage amende
ment.
Le tour était venu-d'une motion
de M. le baron Amédée Reille, qui
proposait d'obliger toute associa
tion à être administrée et dirigée
par des Français ; au cours d'une
très chaude protestation contre les
attentats légaux qui se préparent,
le jeune député du Tarn, citant des
paroles du conventionnel Savary,
était amené à parler de « l'assassi
nat de Louis XVI »—^t voilà les ra
dicaux et les socialistes, ceux qui
siègent à l'extrême gauche auski
droite, debout, hurlant, montrant les
poings à l'orateur pour l'intimider,
au président; pour lui demander de
prononcer un rappel à l'ordre.
Ils veulent une intervention que
M. Paul Deschanel, avec raison,
jugerait déplacée; ils s'échauffent,
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