Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1898-01-23
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 23 janvier 1898 23 janvier 1898
Description : 1898/01/23 (Numéro 10955). 1898/01/23 (Numéro 10955).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Dimanche 23 Janvier 1898
édition quotidienne. — 10,955
f JJ/TPCf Ld'GAi
v t. o :.:St
Dimanche 23 Janvier189Ô
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union- postale) •
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Six mois...... 21 » 26 50
Trois mois..... - 11 » 14 »
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UN NUMÉRO j ^ rlS cent -
l Départements 15 —
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ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
\'v PARIS' ÉTRANGER
et départements (union'postale)
tJn an 20 » ■» 26 »
Six mois ;. 10 » 13 »,
Trois mois 5 » 6 50
EJT
LE MONDE
Les abonnements partent des 1 er et 10 de chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés •
ANNONCES .
MM. LAGRANGE, CERF et O, 6, place de la Bourse
Hamana
PARIS, 22 JANVIER 1898
SOMMAIRE
A la Chambre. ....-.■■■ G. de T iuors.
Parlementarisme al
lemand.. L. I ribarnegaray.
Bulletin.' Sur la charité. — Les messes
cerdotale d'Autun. — Les suites de l'af
faire Dreyfus. — L'agression contre M.
Orlhand.— Chambre, des députés. —
Informations politiques* et parlementai
res. — Chronique électorale. — Chroni
que. — Lettres, sciences et arts. — La
question ouvrière. — Les anarchistes. —
En Extrême-Orient. — Dépêches de l'é
tranger. — En province. — Echos de
partout. — Nouvelles diverses. — Ca-
• lendrier. — Tableau/et bulletin de la
Bourse, Dernière heure.
A LA CHAMBRE
Le budget des cultes.
. Il semble qu'on eût dû être fati
gué d'interpeller le gouvernement
sur les périls que court la société
civile, et dégoûté de reprocher au
ministère son cléricalisme, par la
façon dont se trouvent accueillies
d'habitude ces stériles récrimina
tions.
Il n'en est rien : c'est avec une ar
deur qui ne s'éteint jamais, et tou
jours aussi avec la même mauvaise
foi que la question religieuse est
mise en discussion devant la Cham
bre. /
Il est vrai que, depuis quelque
temps, les, chefs du parti radical
OfU de la concentration ont garde
de se risqxier dans une bataille
qu'ils savent bien, par expérience,
aie pouvoir se terminer que par
une déroute : on laisse aller de
Ijavant ceux dont la parole est
sans autorité, ceux qu'on pourra
aisément * désavouer si leur échec
les rend trop ridicules.
Ceux-ci, d'ordinaire muets, gravis
sent alors la tribune, pénétrés dé
l'importance du rôle qu'ils se sont at
tribué; ils y apportent-les mômes
formules vieiliotes, les mêmes ar
guments ..toujours ressassés. Il y a
nres de deux ans que cette plaisan
terie nous est infligée, dépuis qu'un
ministère modéré -prit le pouvoir
des mains radicales de M. Bour
geois; elle est aujourd'hui de très
mauvais goût : il faudra trouver
autre chose.
C'était hier le tour de M. Alexan
dre Bérard ; il portait avec solen
nité l'espoir, ou mieux les reliques
du groupe anticlérical, et durant
une longue heure, il a refait le dis
cours que pr ononçait à cette même
tribune M.Cr.-A. Hubbard, quelques
jours auy&ravant. Il a reproché au
gouvernement de laisser s'organi
ser po.àr les élections futures l'ar
mée ùes archevêques, des évêques
et d és prêtres, de laisser inappli
quées les lois que les sectaires
seuls regardent comme l'honneur
de la République ; il s'est élevé con
tre l'ingérence du Saint-Père, qu'il
appelle avec une sotte emphase un
souverain étranger — il s'est mon
tré pour tout dire aussi inconve
nant que ridicule.
Une partie de son discours était
ipour nous attrister, lorsqu'il a pu,
.hélas ! avec raison, opposer aux ca
tholiques pleinement soumis aux
prescriptions pontificales,tous ceux,
catholiques aussi, qui ramassent
les armes gallicanes les plus démo
dées pour refuser au Père commun
des fidèles de donner des directions
qui doivent être reçues comme des
ordres.
Un autre point mérite d'être re
tenu, nous y trouvons une satisfac
tion et un encouragement ; contrai
rement à ceux qui nous reprochent
d'accepter la , législation antichré
tienne .en, donnant un concours
loyal à la Constitution républicaine,
les radicaux savent bien que nous
ne renonçons.à aucune de nos re
vendications légitimes, ils compren
nent bien le danger qui menace les:
lois dites intangibles au mépris de
tous les droits et de toutes les li
bertés — ils le disent, et M. Bérard
n'a point su le cacher.
Les catholiques qui abandonnè
rent l'opposition si longtemps sté
rile, à la forme gouvernementale,
entendent ne renoncer à rien de ce
qui leur est dû comme à tous les ci
toyens, il ne faut pas qu'on l'oublie,
et M. l'abbé Gayraud tenait à le
rappeler dans une interruption.
Si M. Alexandre Bérard n'a rien
dit qui n'eût été maintes fois répé
té, le président' du conseil n'a point
modifié sa réponse habituelle ; les
lois antichrétiennes sont scrupuleu
sement appliquées ; on laïcise, on
poursuit les congrégations qui re
fusent de se soumettre au droit d'ac
croissement, on charge le Conseil
d'Etat de compléter la législation
des fabriques par une sanction
qu'on dit lui manquer — que faut-
il donc de plus à M. Bérard, et
pourquoi ces foudres répétées con
tre M. Méline et ses collabora
teurs?
Il ffst vrai que le président du
conseil a rendu un hommage, qui
n'est refusé sur aucun point du
globe, « à la prudence et a la sa-'
gesse» du Chef de l'Eglise ; il est
vrai aussi que le garde des s'çeaûx,
après avoir déclaré que la lof des
fabriques comme la loi scolaire de
vaient être appliquées « avec per
sévérance et fermeté », se refusait
à faire preuve de « passion et de
violence ».
La passion, la violence, l'esprit
jacobin, c'est bien là ce qu'appel
lent les vœux de M. Bérard. N'a-t-
il pas terminé sa harangue par le
cri tristement fameux : « Le cléri
calisme, voilà l'ennemi? » en omet
tant de rappeler, comme l'a fait le
rapporteur, M". Sauzet, que dans le
même discours, Gambetta, le Gam-
betta de 1877, se proclamait « parti
san du système qui rattache l'Eglièe
à l'Etat » et déclarait vouloir tenir
compte de « l'état social et moral de
son pays ».
Ce débat devait avoir une conclu
sion, et M. Dutreix a présenté une
motion en faveur de la dénonciation
du Concordat. Elle a été repoussée
par 311 voix contre 183.,
On avait beaucoup parlé de l'in
gérence du clergé dans les affaires
publiques ; lorsque s'est présenté,
au cours de la discussion du bud-
§et, le chapitre relatif au personnel
u culte israélite, deux courageu
ses, et éloquentes protestations se
sont élevées : M. Julien Goujon a
demandé au gouvernement, qui
frappe à chaque instant les mem
bres du clergé catholique, de rap
peler les rabbins à leurs devoirs et
notamment au respect des lois
qiai assurent la défende de la pa
trie ; on a applaudi sur tous les
bancs de la Chambre et le garde;
des sceaux s'est associé à ces pa
roles patriotiques, en ajoutant que
le traitement des rabbins pouvait
êttfe supprimé comme celui d'un
desservant — et voilà ce qu'il n'était
pas inutile de déclarer, car on ne
pourrait guère s'en douter.
C'est M 7 , de Mahy qui a fait enten
dre l'autre protestation. M. de Mahy
voit un danger bien plus réel dans
les agissements des missionnaires
protestants, pour la plupart étran
gers, que dans « l'ingérence toute'
« conciliante du Pape »,
- S'il y a un clergé qui veut, comme
le pense sérieusement M. Bérard,
s'emparer de toutes les forces de
notre pays, ce n'est pas le clergé
catholique, mais bien les clergés is
raélite et protestant.
On n'a pas voté l'a légère réduc
tion, demandée par M. de Beaure-
gard et repoussée par M. l-'abbé Le-
mire pour des raisons d'équité, sur
le traitement du grand rabbin, mais
il s'est dit à la tribune d'une Cham
bre française des paroles de justice
qui seront répétées par le pays —
et nous avons aujourd'hui à enre-
fistrer autre chose que la défaite
es sectaires et le ridicule de- M.
Alexandre Bérard.
Gabriél raf T riors, .
VULLETIPÇ
La Chambre a examiné hier le budget
des cultes : comme tous les ans, cet
examen a donné lieu à une discussion
quelque peu. .orageuse. Mais, chose nou
velle, le chapitre relatif au culte israé
lite a été Voccasion d'un débat assez vif.
Aujourd'hui, la chose est dès mainte'
nant certaine, vient devant la Chambre
la discussion dé l'interpellation Cavai-
gn ac.
On croit que le gouvernement, persis
tant dans sa résolution de ne, point pu-
blier le rapport du capitaine Lebrun-
Renaud, prendra les devants et que, dès
le début de la séance, le président du
conseil fera une déclaration catégo
rique.
Le débat de .cet après- midi a pris
d'ailleurs un caractère nettement poli
tique : c'est l'assaut de tous les partis
d'opposition donné au cabinet Méline.
On annonce que les trois experts en
écriture, qui rédigèrent le rapport de
mandé par le commandant Ravary sur
le fameux bordereau,intentent un procès
en diffamation à M. Zola et à i'Aurore.
L'affaire viendra en police correction
nelle le 16 février.
Les mesures prises par les autorités
commencent à porter leurs fruits.; sur
tout à Paris, les manifestations semblent
diminuer d'intensité.
Au Sénat italien, le ministère a été
interpellé sur les désordres qui se sont
produits ces jours-ci dans les Marches-
et sur lesquels nous avons donné de
nombreux détails. M. di Rudini, prési
dent du conseil, a déclaré que ces trou
bles étaient dûs à la cherté des vivres,
coïncidant avec les chômages, et exploi
tée d'ailleurs par les révolutionnai
res.
La séance d'hier à la Diète de Bohême
a été de nouveau très agitée : les députés
allemands,furieux que le gouverneur ne
répondît pas immédiatement à l'inter
pellation qu'ils avaient déposée au sujet
des mesures de police, ont organisé un
violent tapage : on se serait cru au
Reichsrath l
On lira à l'Etranger le résumé d'une
plainte de l'amiral Canevaro qui com
mande les forces européennes en Crète.
Cet officier estime que les Turcs ne peu
vent garantir l'ordre à Candie et déclare,
en outre, que les troupes anglaises par
ticipent trop platoniquement à la sur
veillance de l'île.
Les puissances continuent à négocier
au sujet du futur gouverneur de la
Crète : la Russie insiste pour que l'on
choisisse le prince Georges de Grèce.
SUR LA CHARITÉ
La Semaine religieuse d'Evreux
a publié, sur la charité dans les
polémiques, de très justes ré
flexions, qui ont été données aussi
par les organes de quelques autres
diocèses, notamment par celui de
Toulouse.
Nous sommes d'autant plus heu
reux de les reproduire, que nous
nous sommes toujours efforcés de
les mettre en pratique :
Il y a un mot facilement jeté par cer
taines bonnes personnes à la- face des
feuilles chrétiennes, quand celles-ci for
mulent quelques fortes vérités. Tout de
suite, elles ont sur le bord de la bou
che cette plainte : Manque de charité.
Ce reproche grondeur, en vérité, ne
tient guère lorsqu'on y réfléchit un peu.
Il faut commencer par se faire une juste
idée de la charité. Depuis que nous li
sons trop peu l'évangile, nous l'avons
oublié.
La charité, ce n'est pas cette complai
sance béate qui fait dire Amen à tout ce
que l'on dit ou fait. Oe n'est pas non plus
ce mutisme qui laisse dans l'ombre ce
qu'il faudrait signaler, pour le plus grand
bien de tous.
Elle est faite, la charité, de force et de
douceur, d'intelligence et de prévoyance,
de sacrifices et de dévouement. Elle en
courage, aide, prie; mais aussi, elle aver
tit, corrige, arrache, défend.
Ecoutons là-dessus le plus doux des
évêques, saint François de Sales, si mo
déré, si indulgent, si tolérant :
a II ne faut pas, pensant fuir le vice de
« la médisance, favoriser, flatter ou
« nourrir les autres (vices), mais il faut
« dire rondement et franchement mai du
« mal, et blâmer les choses blâmables.
« Il faut observer, en blâmant le vice,
« d'épargner, le pîus que vous pourrez,
« la personne en laquelle il est. »
«
LES MES® DE L'ÉGHSÊ SlINï-JOAGM
Nous avons reçu les promesses de
messes suivantes :
M. l'abbé J. Trôlé, vicaire à Montmo-
rency 10
M. l'abbé Vieuloup, recteur de Grâce-
Uzel (Côtes du Nord) 5
M. l'abbé Dumondelle, curé de Carie-
pont (Oise).... ". 5
M. l'abbé Peurière, curé de Jozerand
par Combronde (Puy-de-Dôme). 5,
M. l'abbé Sajiis, à Agen • 5
M. G. Martii), professeur à l'institution
Notre-Dame à Chartres ■ 5
M. l'abbé Véziat, à Cazenac (Dordo-
gne)-. 5
Les trois prêtres d'une paroisse bre
tonne (diocèse de Saint-Brieuc) 20,
Mgr l'évêque de Langres recommande
à son clergé l'œuvre des messes de l'é
glise Saint Joachim et engage tous les
prêtres de son diocèse à célébrer au
moins chacun deiix messes dans l'espace
de deux à trois mois.
l^a chancellerie de l'évèché de Nevers
a reçu la promesse de mille messes.
PARLEMENTARISME ALLEMAND
Le Reichstag allemand et la Diète
de Prusse sont en pleine activité
depuis une dizaine de jours. Si les
électeurs peuvent à bon droit n'.être
pas tous satisfaits delà qualité du
travail oratoire et législatif fourni
par leurs députés, ils n'ont rien à
dire sur la quantité, si ce n'est
qu'elle est peut-être excessive. Les
discours prononcés sont, en effet,
innombrables.
Au Reichstag, il y a à noter un
projet de loi dit lex Heinze, pré
senté par le centre catholique et
ayant pour but la répression de l'im
moralité sous toutes ses formes. En
Allemagne, comme ailleurs, hélas
il y a là ample matière à discourir
et à légiférer. Nous nous garderons
bien d'entrer dans les détails. Bor
nons-nous à signaler le fait (Jue c'est
le centre -catholique, qui a pris la
louable initiative d'une campagne
contre le dévergondage et que, de
l'aveu même de ses adversaires^
c'est encore du centre 'que sont ve
nus les meilleurs arguments et l'in
dication des remèdes les plus pro
pres à. combattre le mal. Les catho
liques ont au reste trouvé un allié
tout à fait inattendu dans le député
socialiste Bebel, bien connu pour
ses idées rien moins que prudes et
tout particulièrement pour son ou
vrage : la Femme de l'avenir, où la
morale « bourgeoise » n'est guère
mise en honneur.
Le projet a été renvoyé à une
commission spéciale de quatorze
membres. Il risque fort d'y rester
où d'en sortir en mauvais état et do
mourir de sa belle mort devant la
Chambre, où la liberté de penser et
d'écrire se confond volontiers avec
une licence à peu près complète.
Aussi bien faudrait-il, pour répri
mer efficacement l'immoralité, com
mencer par interdire la publication
de nombre d'ouvrages scandaleux
sortis, de la plume de... Luther, ou
les soumettre préalablement à une
sévère censure. Et qui," parmi les
protestants allemands, se permet
trait de toucher à l'idole?
A la Chambre prussienne, au
cours de la discussion générale du
budget, un orateur catholique, M.
Porsch, a prononcé un excellent
discours à propos de la campagne
de violences et d'outrages menée
çar le haut personnel de l'Eglise
évangélique, l'an .dernier, contre le
Pape, coupable d'avoir écrit son
Enoyclique sur le B. Pierre Ca-
nisius. Le docteur Porsch n'a
Eas eu de peine à démontrer que
iéon XIII ne pouvait parler autre
ment qu'il a fait sur la pseudo-ré
forme et sur ses désastreuses con
séquences pour la paix européenne
comme pour la société chrétienne ;
que d'autre part les plus grands
esprits sont unanimes à rendre
hommage aux sentiments paci
fiques et » conciliateurs du chef
de l'Eglise catholique ; qu'enfin
les catholiques allemands,- en con
formité avec l'exemple de Léon XIII,
nepensent à rien moins qu'à trou
bler la paix confessionnelle, qu'ils
ne cessent de donner de nom
breuses preuves du désir qu'ils ont
de ne froisser en rien leurs conci
toyens dissidents.
Il ressort de l'attitude de la
Chambre comme du gouvernement
que très probablement personne ne
proposera la suppression de la lé
gation prussienne près le Saint-
Siège. Une semblable motion n'au
rait aucune chance de succès. Non
seulement Guillaume II et le minis
tère y sont opposés, mais la diète
elle-même dans son ensemble s'y
montre hostile. On y aassëz de bon
sens pour comprendre qu'une telle
mesure serait plus nuisible à l'Etat
qu'à la Papauté. D'ailleurs, le réta
blissement de la léjgation en 1882 a
été motivé par M. de Bismarck sur
l'intérêt du pays et non dans le sens
d'une concession au chef de l'Eglise
catholique. 1
Si en cela le Landtag de Prusse
mérite des éloges —quoi qu'en
puisse dire l'ex-jésuite von Hœns-
brœch — il en va autrement à pro
pos du fonds de cent millions de
marks qu'il accordera au gouver
nement en faveur de l'immigration
allemande dans la Posnanie. D'au
tant plus qu'il y , a récidive. Une
somme égale a été consacrée à cette
néfaste entreprise. Nous en avons
parlé plus d'une fois. Les résultats
obtenus sont connus. Le polonisme
ne s'en porte guère plus mal, tandis
que le protestantisme y trouve son
compte. Sous prétexte de germa
niser, on fait de la propagande évan
gélique. Les neuf dixièmes des im
migrés aux frais des contribuables
sont , protestants. Les temples, les
écoles, les presbytères créés à l'aide
de ce nouveau Reptilienfonds sont
entre des mains protestantes.
Evidemment la deuxième centaine
dé millions de marks aura la même
destination.
Les catholiques sont à peu près
les seuls au Landtag à protester
contre uné telle politique payée à
si grands frais. Bien entendu, mal-
fré les faits, malgré les données
e la statistique, gouvernement et
majorité se défendent de visées
anticatholiques comme de toute
tendance à opprimer les Polonais.
Tout est-fait au nom de la Kultur :
c'est pour le bien des Posnaniens
annexés qu'on implante des colons
de langue allemande dans les du 1 -
chés. Les nations européennès ne
pénètrent-elles pas dans le centre
de l'Afrique ou en Chine avec des
vues analogues ? Que voulez-vous ?
La Prusse ne fait pas de si énormes
dépenses pour son plaisir, elle re
présente la civilisation et elle rend
service aux Polonais en la leur im
posant.
Ainsi parle-t-on très sérieuse
ment au Landtag de Prusse et il
s'y trouve une majorité '■ pour ap
plaudir et pour voter...
L. Iribarnegaray.
LA LIGUE SACERDOTALE D'AUTUN
Conformément à ses règlements, le
bureau de défense sacerdotale du dio
cèse d'Autun a intenté une action en
diffamation contre l'Union républi
caine, à la suite de deux : articles calom
nieux publiés par ce journal contre M.
l'abbé Claude Landré, ancien curé de
Saint-Sernin-du-Bois. L'affaire est venue
à l'audience le 17 janvier courant, le gé
rant du journal ne s'est pas présenté, et
le tribunal d'Autun, sur la plaidoirie de
M 0 Lenoël, l'a condamné à deux mois de
prison, cent francs d'amende et mille
francs de dommages-intérêts envers M.
l'abbé Landré. Le tribunal a en outre or
donné l'insertion in extenso de son juge
ment dans l'Union républicaine,, aux
frais du gérant.
' —♦-
lis suis miwm mis
La réponse de M. Zola
à l 'assignation.
"M. Emile Zola cherche à aggraver son
cas ; il publie aujourd'hui dans l'aurore
une lettre au ministre de la guerre, dans
laquelle il s'étonne qu'on ne le poursuive
que pour avoir attaqué le conseil de
guerre.
Il réitère ses accusations contre le co
lonel du Paty de Clam, contre le général
Mercier, contre le général de Boisdefîre,
contre le général de Pellieux, contre le
commandant Ravary, contre les experts
en écritures, contre les hureaux de la
guerre, contre le général Billot lui-
même :
Relisez ces textes, monsieur le ministre,
et tout en pensant ce qu'il vous plaira de
mon ^udace, reconnaissez que je n'ai pé
ché ni par manque de précision ni par dé
faut de clarté.
Et si vous êtes obligé de le reconnaître,
et si, dans votre silence prudent, tout le
monde doit avec moi le reconnaître, dites-
moi pourquoi aujourd'hui, après cinq
jours de méditations, de consultations,
d'hésitations, de tergiversations, vous vous
précipitez dans une reculade.
La lettre reproduit les accusations
qu'on connaît et qui formaient la conclu
sion de la première lettre de M. Zola,
celle qui est déférée à la justice; M. Zo
la ajoute :
J'ai dit ces choses, et je les maintiens.
Est-il vraiment possible que vous n'accep
tiez pas la discussion sur des accusations
aussi nettement formulées, non moins
graves pour l'accusateur que pour les ac
cusés ?
vous n avez pas ose
accusations, je vais
relever
vous le
Pourquoi
toutes mes
dire :
Redoutant le débat dans la lumière, vous
avez recours, pour vous sauver, à des
moyens de procureur.'On vous a.découvert,
dans la loi du 29 juillet 1881, un article 52
qui ne me permet d'offrir la preuve que des
faits « articulés et qualifiés dans la cita
tion».
Et, maintenant, vous voilà bien tran
quille, n'est-ce pas ?
» • • r • • •. • • » .. • « • • • •
Vous avez oublié que je vais avoir pour
juges douze citoyens français, dans leur
indépendance.
Je saurai vaincre par la force de la jus
tice, je ferai la lumière dans- les conscien>
ces par l'éclat de la vérité. On verra, dès
les premiers mots, les arguties, procéduriè
res balayées par l'impérieuse (nécessité de
la pTeuve. Cette preuve, la loi m'ordonne
de la faire, et la loi serait menteuse si,
m'imposant ce de.voir, elle m'en refusait le
moyen.
■ Comment ferais-je la preuve des accusa
tions que vous relevez contre moi, si je ne
pouvais montrer l'enchaînement des faits
et si l'on m'empêchait de mettre toute l'af
faire en pleine clarté ?
La liberté de la preuve, voilà la force où
je m'attache.
Les experts contre "M. Zola.
Les experts visés dans les lettres de
M. Emile Zola poursuivent ce dernier en
police correctionnelle.
L'ambassadeur d'Allemagne et le
procès.
Le Gaulois affirme que l'ambassadeur
d'Allemagne; pressenti B 'est toujours re
fusé et se refusera toujours à être mêlé
en quoi que ce soit au procès intenté à
Zola ; il ajoute :
* On nous dit également qu'une personna
lité bien connue de la presse parisienne a
sollicité une'audience de Guillaume II par
l'entremise de l'ambassadeur. Le comte de
M tins ter s'est énergiquement refusé à trans
mettre à l'empereur la demande qui lui a
été faite.
Manifeste de M. Jaurès aux soldats.
M. Jaurès adresse, dans la Lanterne,
un manifeste « aux soldats ». Voici des
passages de ce factum :
' Soldats, ne vous laissez pas égarer par
ces fourbes. Que le peuple libre vienne à
nous et vous verrez que. nous briserons
vite et les syndicats de financiers juifs qui
trafiquent de la patrie et les clans jésuites
qui vous asservissent et vous exploi
tent. •
Nous organiserons la responsabilité des
chefs pour que leurs fautes ne soient pas
impunies. Nous adoucirons les pénalités
monstrueuses d'un code sauvage. Nous
rendrons la discipline plus humaine, la
caserne moins abêtissante, et nous vous
permettrons, >sous les drapeaux de .la Ré
publique, de penser, d'être des hommes.
Souvenez-vous qu'un peuple est perdu
s'il garde à sa tête les généraux du privilège,
les généraux de la classe ennemie.
Il est temps aujourd'hui, si nous ne vou
lons pas périr, de révolutionner la haute
armée par la loi républicaine.
Lés manifestations.
> f A PARIS
L'agitation continue. Mais ce n'est
plus comme aux premiers jours le quar
tier Latin qui manifeste. Il est arrivé des
quartiers excentriques . une cohue de
gens interlopes qui prolongent le tapage
commencé naguère par les étudiants.
Les opérations du tirage au sort avaient
lieu hier à la mairie du cinquième ar
rondissement (Panthéon).
Un certain nombre des individus lou
ches dont nous avons parlé s'étant mêlés
aux conscrits en les excitant à manifester,
soixante-douze arrestations ont été opé
rées et maintenues. Les tapageurs sur
lesquels la police a mis la main sont
presque tous de vieilles connaissances
des tribunaux correctionnels.
M. Blanc, préfet de police, a envoyé
hier aux commissaires l'instruction sui
vante :
• Lors'que vous jugerez à |propos de ne pas
envoyer les individus arrêtés au Dépôt,
veus les garderez au poste jusqu'au lende
main matin," à huit heures.
II n'y aura donc plus de mises en. li
berté immédiates. Voilà qui va donner à
réflécKir.aux tapageurs de la rue. .
Signalons une petite manifestation qui
a été organisée hier à Auteuil pïir les
très jeunes élèves de l'école J.-B. Say,
qui ont parcouru le quartier en conspuant
Zola. ■ •
Il existe actuellement un groupe d a-
narchistes, toujours les mêmes, -, qui. se
transportent sur les divers points de Pa
ris, où ils suscitent dès troubles. Avant-
hier, ils ont interrompu à la Gaîté-Mont-
parnasse line conférence faite par' un
jeune orateui- catholique, M. Billiet ; hier
ils ont tenu pour leur propre compte une
réunion à la Montagne Sainte-Geneviève.
A la sortie, ils ont eu une altercation as
sez vive avec des étudiants. Qu'est-ce
qu'ils vont faire aujourd'hui ?
en province'
Blidah. —Les manifestations antisé
mitiques d'Alger ont eu leur contrecoup
à Blidah. Avant-hier soir, un groupe de
plus de deux cents personnes a envahi la
rué principale'(où se trouvent les maga
sins israélites) en criant : « A bas les
juifs ! » Des coups de canne ont été
échangés et les vitres de plusieurs bouti
ques ont volé. en éclats. La police et la
pluie qui s'est mise à tomber vers minuit
| ont dispersé les manifestants.
Angers. — Avant-hier soir, une mani
festation importante contre M. Zola et les
israélites a eu lieu à .Angers. De nom
breux étudiants, employés et ouvriers
ont parcouru les principaux quartiers eii
conspuant les juifs. Une ovation a été
faite à l'armée devant lès casernes. Plu
sieurs devantures ont éié brisées. Un
magasin a été pillé. Vingt-sdeux arresta
tions ont été opérées. La pïa.ce du Rallie
ment a été occupée par les troupes.
Dijon. — Vers minuit, une pe,tite bandé
dejeunes gens, en sortant des cafés, a
crié : « A bas Zola! A bas les juifs! »
Une manifestation est organisé pour
ce soir. Des mesures sont pris ef afin
de prévenir tout désordre.
Niort. — Quelques individus; ont ma-
festé, la nuit dernière, devant les maga
sins israélites. Ils ont injurié et menace-
les propriétaires de ces établissements ot
ont brisé les vitres.
Rouen Les manifestations ont.re
pris hier soir à Rouen. Les >. rues étaient
encombrées par une foule de curieux. A
partir de sept heures, des bandes se sont
forméës et ont parcouru la'ville en tous
sens.
. A dix heures, la gendarmerie à clieval
a,été appelée, et des charges ont eu lieu
pour dégager les abords de l'hôtel de
ville; on a chargé également devant le
théâtre des Arts et sur plusieurs autres
points. Un grand nombre d'arrestations
ont été opérées; on ne signale aucun
blessé. Un escadron de chasseurs à che
val vient d'être consigné.
L'AGRESSION CONTRE III. ORHAHD
L'Arvor nous donne aujourd'hui les
nouvelles suivantes de son directeur, M.
Alphonse Orhand, victime, on ' s'en sou
vient, d'une odieuse agression, le soir de
l'élection de Vannes :
Depuis l'attentat dont il a été victime, le
rédacteur en chef de l'^lruor est très souf j
frant, et bien qu'il n'ait pas de blessures
apparentes, il lui est impossible de repren
dre activement son travail.
Nous avons dit qu'il ne voulait pas por
ter plainte, et c'était vrai. Mais comme on a
répandu depuis sur son compte des bruits
très calomnieux — qu'on- a dit, par exem
ple, qu'il avait frappé le courageux citoyen
qui a été blessé en le défendant —il a dû
demander à M. le procureur de la Répu
blique de faire une enquête.
Cette enquête va commencer, et ' sera,
nous le savons, vigoureusement poursui
vie.
Encore une fois, comme nous l'avona
dit le premier jour, nous espérons que
les coupables seront punis et nous sou
haitons vivement que notre excellent
confrère de 'l'Arvor, promptement réta
bli, puisse reprendre bientôt la direction,
de son journal.
CHAMBRE DES DEPUTES
Séance du 21 janvier.
Le budget des cultes.
* Discours de Al. Méline.
Nous avons résumé hier, en Dernière
Heure, le discours de M, Alexandre Bé
rard; voici, d'après le Journal officiel , la
réponse du président du conseil :
M. Jules Méline, président duconseil*
ministre de l'agriculture. Messieurs, il est
impossible au 1 gouvernement de laisser
passer sans un mot de réponse le discours
que vous venez d'entendre.
Si, en effet, le gouvernement, comme l'af
firme l'honorable M. Bérard, à l'exécution, rigoureuse des prescriptions
du Concordat, s'il les laisse violer audacieu-
sement tous les jours, s'il» n'applique pas
les lois dont il a la garde, il manque au
premier de ses devoirs et serait coupable
envers vous et envers le pays. (Très bien i
au centre.) ■.<.h
Ce n'est pas la première fois qu'onmule cette accusation devant vous ;'«'est
la centième fois peut-être ; mais, puisqu'on
la renouvelle, je suis obligé d'y opposer
toujours la même réponse et de dire à/enos
honorables collègues; à nos adversaires* et
à M. Bérard-: Mais prouvez donc que nous
ne faisons pas appliquer les lois-du pays;
prouvez-le! (Rumeurs a gauche.) Oui, pro\ij
vez-le, autrement que par des articulations
vagues ; prouvez-le par des faits, des pré
cisions!' ■ -
Or, ces faits, ces précisions, ,vous ! ne les
avez jamais trouvés, vous ne 'les trouverez
jamais,.et c'est ce qui fait que le pays ne se
préoccupe plus de l'accusation Incessante
que vous dirigez contre nous. (Très bien !
très bien ! au centre.)
Dernièrement, vous; avez institué à cette
tribune un - débat i pour. établir que nou3
n'appliquions pas la loi sur la laïcisation, et
le débat a tourné'entièrement à votre con
fusion. Aujourd'hui, vous essayez, en pas
sant la revue-des lois que' nous>avons- mis»
sion de faire respecter, de persuader à la
Chambre que nous nous refusons à faire ce
qu'elle veut. - - '•<
Je vous en demande pardon. Ces lois sont
parfaitement* appliquées* etj je vous le ré
pète, 11 vous- sera impossible de découvrir
un seul fait qui constitue, de notre part,
soitune négligence, soit un défaut de vigi
lance.
; Vous avez parlé de la loi des fabriques'.
Eh bien! si cette loi n ; a pas reçu son exé
cution complète, c'esVpttrce que 1 le décret
de 1893 manquait de sanction, et c'est pré
cisément notre 'gouvernement qùi™s'est •oc
cupé'de rechercher cette sanction,'en intro
duisant devant le conseil d'Etat une 'de
mande de règlement qui lui est soumise en ce
moment. Ne dites donc pas que nous négli
geons ■ l'application de la loi des fabriques,
alors que c'est - nousj au-contralre, qui tâ
chons delà rendre applicable: (Très bien !
très bien ! au centre et à droite. — Bruit à
l'extrême gauche et sur' divers r bancs à
gauohe.)
Mais oui,' messieurs', tes gouvernements
précédents avaient omis ■ de .-remarquer
qu'en effet la' 1 loi était dépourvue dô sanc
tion ; les commis chargés- de percevoir les
amendes étaient dans Timpoasibilité' de
les recouvrer. C'est aussi simple que 1 cela.
Quant au droit d'accroissement, nous
l'appliquons dans - toute ; la : mesure où nous
pouvons -l'appliquer ; nous 'ne pouvons pas
empêcher les congrégations d'user'du droit
que leur confère la loi pour résister, et tant
que les procès en cours ne seront pas iter-
mlnés il n'est pas possible au gouverne
ment d'arriver aux moyens d'exécution;
II reste dono démontré, je le répète, jus
qu'à l'évidence, que îles n lois dont nous
avons la garde sont respectées et observées.
(Très tien I très bien ! au centre.)
édition quotidienne. — 10,955
f JJ/TPCf Ld'GAi
v t. o :.:St
Dimanche 23 Janvier189Ô
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union- postale) •
Un an ..... 40 ». 51 »
Six mois...... 21 » 26 50
Trois mois..... - 11 » 14 »
Si6s abonnements partent des l« et 16 de chaque mola
UN NUMÉRO j ^ rlS cent -
l Départements 15 —
BUREAUX : Paris, rue Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8 ;
ÉDITION SEMI-QUOTIDIENNE
\'v PARIS' ÉTRANGER
et départements (union'postale)
tJn an 20 » ■» 26 »
Six mois ;. 10 » 13 »,
Trois mois 5 » 6 50
EJT
LE MONDE
Les abonnements partent des 1 er et 10 de chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés •
ANNONCES .
MM. LAGRANGE, CERF et O, 6, place de la Bourse
Hamana
PARIS, 22 JANVIER 1898
SOMMAIRE
A la Chambre. ....-.■■■ G. de T iuors.
Parlementarisme al
lemand.. L. I ribarnegaray.
Bulletin.' Sur la charité. — Les messes
faire Dreyfus. — L'agression contre M.
Orlhand.— Chambre, des députés. —
Informations politiques* et parlementai
res. — Chronique électorale. — Chroni
que. — Lettres, sciences et arts. — La
question ouvrière. — Les anarchistes. —
En Extrême-Orient. — Dépêches de l'é
tranger. — En province. — Echos de
partout. — Nouvelles diverses. — Ca-
• lendrier. — Tableau/et bulletin de la
Bourse, Dernière heure.
A LA CHAMBRE
Le budget des cultes.
. Il semble qu'on eût dû être fati
gué d'interpeller le gouvernement
sur les périls que court la société
civile, et dégoûté de reprocher au
ministère son cléricalisme, par la
façon dont se trouvent accueillies
d'habitude ces stériles récrimina
tions.
Il n'en est rien : c'est avec une ar
deur qui ne s'éteint jamais, et tou
jours aussi avec la même mauvaise
foi que la question religieuse est
mise en discussion devant la Cham
bre. /
Il est vrai que, depuis quelque
temps, les, chefs du parti radical
OfU de la concentration ont garde
de se risqxier dans une bataille
qu'ils savent bien, par expérience,
aie pouvoir se terminer que par
une déroute : on laisse aller de
Ijavant ceux dont la parole est
sans autorité, ceux qu'on pourra
aisément * désavouer si leur échec
les rend trop ridicules.
Ceux-ci, d'ordinaire muets, gravis
sent alors la tribune, pénétrés dé
l'importance du rôle qu'ils se sont at
tribué; ils y apportent-les mômes
formules vieiliotes, les mêmes ar
guments ..toujours ressassés. Il y a
nres de deux ans que cette plaisan
terie nous est infligée, dépuis qu'un
ministère modéré -prit le pouvoir
des mains radicales de M. Bour
geois; elle est aujourd'hui de très
mauvais goût : il faudra trouver
autre chose.
C'était hier le tour de M. Alexan
dre Bérard ; il portait avec solen
nité l'espoir, ou mieux les reliques
du groupe anticlérical, et durant
une longue heure, il a refait le dis
cours que pr ononçait à cette même
tribune M.Cr.-A. Hubbard, quelques
jours auy&ravant. Il a reproché au
gouvernement de laisser s'organi
ser po.àr les élections futures l'ar
mée ùes archevêques, des évêques
et d és prêtres, de laisser inappli
quées les lois que les sectaires
seuls regardent comme l'honneur
de la République ; il s'est élevé con
tre l'ingérence du Saint-Père, qu'il
appelle avec une sotte emphase un
souverain étranger — il s'est mon
tré pour tout dire aussi inconve
nant que ridicule.
Une partie de son discours était
ipour nous attrister, lorsqu'il a pu,
.hélas ! avec raison, opposer aux ca
tholiques pleinement soumis aux
prescriptions pontificales,tous ceux,
catholiques aussi, qui ramassent
les armes gallicanes les plus démo
dées pour refuser au Père commun
des fidèles de donner des directions
qui doivent être reçues comme des
ordres.
Un autre point mérite d'être re
tenu, nous y trouvons une satisfac
tion et un encouragement ; contrai
rement à ceux qui nous reprochent
d'accepter la , législation antichré
tienne .en, donnant un concours
loyal à la Constitution républicaine,
les radicaux savent bien que nous
ne renonçons.à aucune de nos re
vendications légitimes, ils compren
nent bien le danger qui menace les:
lois dites intangibles au mépris de
tous les droits et de toutes les li
bertés — ils le disent, et M. Bérard
n'a point su le cacher.
Les catholiques qui abandonnè
rent l'opposition si longtemps sté
rile, à la forme gouvernementale,
entendent ne renoncer à rien de ce
qui leur est dû comme à tous les ci
toyens, il ne faut pas qu'on l'oublie,
et M. l'abbé Gayraud tenait à le
rappeler dans une interruption.
Si M. Alexandre Bérard n'a rien
dit qui n'eût été maintes fois répé
té, le président' du conseil n'a point
modifié sa réponse habituelle ; les
lois antichrétiennes sont scrupuleu
sement appliquées ; on laïcise, on
poursuit les congrégations qui re
fusent de se soumettre au droit d'ac
croissement, on charge le Conseil
d'Etat de compléter la législation
des fabriques par une sanction
qu'on dit lui manquer — que faut-
il donc de plus à M. Bérard, et
pourquoi ces foudres répétées con
tre M. Méline et ses collabora
teurs?
Il ffst vrai que le président du
conseil a rendu un hommage, qui
n'est refusé sur aucun point du
globe, « à la prudence et a la sa-'
gesse» du Chef de l'Eglise ; il est
vrai aussi que le garde des s'çeaûx,
après avoir déclaré que la lof des
fabriques comme la loi scolaire de
vaient être appliquées « avec per
sévérance et fermeté », se refusait
à faire preuve de « passion et de
violence ».
La passion, la violence, l'esprit
jacobin, c'est bien là ce qu'appel
lent les vœux de M. Bérard. N'a-t-
il pas terminé sa harangue par le
cri tristement fameux : « Le cléri
calisme, voilà l'ennemi? » en omet
tant de rappeler, comme l'a fait le
rapporteur, M". Sauzet, que dans le
même discours, Gambetta, le Gam-
betta de 1877, se proclamait « parti
san du système qui rattache l'Eglièe
à l'Etat » et déclarait vouloir tenir
compte de « l'état social et moral de
son pays ».
Ce débat devait avoir une conclu
sion, et M. Dutreix a présenté une
motion en faveur de la dénonciation
du Concordat. Elle a été repoussée
par 311 voix contre 183.,
On avait beaucoup parlé de l'in
gérence du clergé dans les affaires
publiques ; lorsque s'est présenté,
au cours de la discussion du bud-
§et, le chapitre relatif au personnel
u culte israélite, deux courageu
ses, et éloquentes protestations se
sont élevées : M. Julien Goujon a
demandé au gouvernement, qui
frappe à chaque instant les mem
bres du clergé catholique, de rap
peler les rabbins à leurs devoirs et
notamment au respect des lois
qiai assurent la défende de la pa
trie ; on a applaudi sur tous les
bancs de la Chambre et le garde;
des sceaux s'est associé à ces pa
roles patriotiques, en ajoutant que
le traitement des rabbins pouvait
êttfe supprimé comme celui d'un
desservant — et voilà ce qu'il n'était
pas inutile de déclarer, car on ne
pourrait guère s'en douter.
C'est M 7 , de Mahy qui a fait enten
dre l'autre protestation. M. de Mahy
voit un danger bien plus réel dans
les agissements des missionnaires
protestants, pour la plupart étran
gers, que dans « l'ingérence toute'
« conciliante du Pape »,
- S'il y a un clergé qui veut, comme
le pense sérieusement M. Bérard,
s'emparer de toutes les forces de
notre pays, ce n'est pas le clergé
catholique, mais bien les clergés is
raélite et protestant.
On n'a pas voté l'a légère réduc
tion, demandée par M. de Beaure-
gard et repoussée par M. l-'abbé Le-
mire pour des raisons d'équité, sur
le traitement du grand rabbin, mais
il s'est dit à la tribune d'une Cham
bre française des paroles de justice
qui seront répétées par le pays —
et nous avons aujourd'hui à enre-
fistrer autre chose que la défaite
es sectaires et le ridicule de- M.
Alexandre Bérard.
Gabriél raf T riors, .
VULLETIPÇ
La Chambre a examiné hier le budget
des cultes : comme tous les ans, cet
examen a donné lieu à une discussion
quelque peu. .orageuse. Mais, chose nou
velle, le chapitre relatif au culte israé
lite a été Voccasion d'un débat assez vif.
Aujourd'hui, la chose est dès mainte'
nant certaine, vient devant la Chambre
la discussion dé l'interpellation Cavai-
gn ac.
On croit que le gouvernement, persis
tant dans sa résolution de ne, point pu-
blier le rapport du capitaine Lebrun-
Renaud, prendra les devants et que, dès
le début de la séance, le président du
conseil fera une déclaration catégo
rique.
Le débat de .cet après- midi a pris
d'ailleurs un caractère nettement poli
tique : c'est l'assaut de tous les partis
d'opposition donné au cabinet Méline.
On annonce que les trois experts en
écriture, qui rédigèrent le rapport de
mandé par le commandant Ravary sur
le fameux bordereau,intentent un procès
en diffamation à M. Zola et à i'Aurore.
L'affaire viendra en police correction
nelle le 16 février.
Les mesures prises par les autorités
commencent à porter leurs fruits.; sur
tout à Paris, les manifestations semblent
diminuer d'intensité.
Au Sénat italien, le ministère a été
interpellé sur les désordres qui se sont
produits ces jours-ci dans les Marches-
et sur lesquels nous avons donné de
nombreux détails. M. di Rudini, prési
dent du conseil, a déclaré que ces trou
bles étaient dûs à la cherté des vivres,
coïncidant avec les chômages, et exploi
tée d'ailleurs par les révolutionnai
res.
La séance d'hier à la Diète de Bohême
a été de nouveau très agitée : les députés
allemands,furieux que le gouverneur ne
répondît pas immédiatement à l'inter
pellation qu'ils avaient déposée au sujet
des mesures de police, ont organisé un
violent tapage : on se serait cru au
Reichsrath l
On lira à l'Etranger le résumé d'une
plainte de l'amiral Canevaro qui com
mande les forces européennes en Crète.
Cet officier estime que les Turcs ne peu
vent garantir l'ordre à Candie et déclare,
en outre, que les troupes anglaises par
ticipent trop platoniquement à la sur
veillance de l'île.
Les puissances continuent à négocier
au sujet du futur gouverneur de la
Crète : la Russie insiste pour que l'on
choisisse le prince Georges de Grèce.
SUR LA CHARITÉ
La Semaine religieuse d'Evreux
a publié, sur la charité dans les
polémiques, de très justes ré
flexions, qui ont été données aussi
par les organes de quelques autres
diocèses, notamment par celui de
Toulouse.
Nous sommes d'autant plus heu
reux de les reproduire, que nous
nous sommes toujours efforcés de
les mettre en pratique :
Il y a un mot facilement jeté par cer
taines bonnes personnes à la- face des
feuilles chrétiennes, quand celles-ci for
mulent quelques fortes vérités. Tout de
suite, elles ont sur le bord de la bou
che cette plainte : Manque de charité.
Ce reproche grondeur, en vérité, ne
tient guère lorsqu'on y réfléchit un peu.
Il faut commencer par se faire une juste
idée de la charité. Depuis que nous li
sons trop peu l'évangile, nous l'avons
oublié.
La charité, ce n'est pas cette complai
sance béate qui fait dire Amen à tout ce
que l'on dit ou fait. Oe n'est pas non plus
ce mutisme qui laisse dans l'ombre ce
qu'il faudrait signaler, pour le plus grand
bien de tous.
Elle est faite, la charité, de force et de
douceur, d'intelligence et de prévoyance,
de sacrifices et de dévouement. Elle en
courage, aide, prie; mais aussi, elle aver
tit, corrige, arrache, défend.
Ecoutons là-dessus le plus doux des
évêques, saint François de Sales, si mo
déré, si indulgent, si tolérant :
a II ne faut pas, pensant fuir le vice de
« la médisance, favoriser, flatter ou
« nourrir les autres (vices), mais il faut
« dire rondement et franchement mai du
« mal, et blâmer les choses blâmables.
« Il faut observer, en blâmant le vice,
« d'épargner, le pîus que vous pourrez,
« la personne en laquelle il est. »
«
LES MES® DE L'ÉGHSÊ SlINï-JOAGM
Nous avons reçu les promesses de
messes suivantes :
M. l'abbé J. Trôlé, vicaire à Montmo-
rency 10
M. l'abbé Vieuloup, recteur de Grâce-
Uzel (Côtes du Nord) 5
M. l'abbé Dumondelle, curé de Carie-
pont (Oise).... ". 5
M. l'abbé Peurière, curé de Jozerand
par Combronde (Puy-de-Dôme). 5,
M. l'abbé Sajiis, à Agen • 5
M. G. Martii), professeur à l'institution
Notre-Dame à Chartres ■ 5
M. l'abbé Véziat, à Cazenac (Dordo-
gne)-. 5
Les trois prêtres d'une paroisse bre
tonne (diocèse de Saint-Brieuc) 20,
Mgr l'évêque de Langres recommande
à son clergé l'œuvre des messes de l'é
glise Saint Joachim et engage tous les
prêtres de son diocèse à célébrer au
moins chacun deiix messes dans l'espace
de deux à trois mois.
l^a chancellerie de l'évèché de Nevers
a reçu la promesse de mille messes.
PARLEMENTARISME ALLEMAND
Le Reichstag allemand et la Diète
de Prusse sont en pleine activité
depuis une dizaine de jours. Si les
électeurs peuvent à bon droit n'.être
pas tous satisfaits delà qualité du
travail oratoire et législatif fourni
par leurs députés, ils n'ont rien à
dire sur la quantité, si ce n'est
qu'elle est peut-être excessive. Les
discours prononcés sont, en effet,
innombrables.
Au Reichstag, il y a à noter un
projet de loi dit lex Heinze, pré
senté par le centre catholique et
ayant pour but la répression de l'im
moralité sous toutes ses formes. En
Allemagne, comme ailleurs, hélas
il y a là ample matière à discourir
et à légiférer. Nous nous garderons
bien d'entrer dans les détails. Bor
nons-nous à signaler le fait (Jue c'est
le centre -catholique, qui a pris la
louable initiative d'une campagne
contre le dévergondage et que, de
l'aveu même de ses adversaires^
c'est encore du centre 'que sont ve
nus les meilleurs arguments et l'in
dication des remèdes les plus pro
pres à. combattre le mal. Les catho
liques ont au reste trouvé un allié
tout à fait inattendu dans le député
socialiste Bebel, bien connu pour
ses idées rien moins que prudes et
tout particulièrement pour son ou
vrage : la Femme de l'avenir, où la
morale « bourgeoise » n'est guère
mise en honneur.
Le projet a été renvoyé à une
commission spéciale de quatorze
membres. Il risque fort d'y rester
où d'en sortir en mauvais état et do
mourir de sa belle mort devant la
Chambre, où la liberté de penser et
d'écrire se confond volontiers avec
une licence à peu près complète.
Aussi bien faudrait-il, pour répri
mer efficacement l'immoralité, com
mencer par interdire la publication
de nombre d'ouvrages scandaleux
sortis, de la plume de... Luther, ou
les soumettre préalablement à une
sévère censure. Et qui," parmi les
protestants allemands, se permet
trait de toucher à l'idole?
A la Chambre prussienne, au
cours de la discussion générale du
budget, un orateur catholique, M.
Porsch, a prononcé un excellent
discours à propos de la campagne
de violences et d'outrages menée
çar le haut personnel de l'Eglise
évangélique, l'an .dernier, contre le
Pape, coupable d'avoir écrit son
Enoyclique sur le B. Pierre Ca-
nisius. Le docteur Porsch n'a
Eas eu de peine à démontrer que
iéon XIII ne pouvait parler autre
ment qu'il a fait sur la pseudo-ré
forme et sur ses désastreuses con
séquences pour la paix européenne
comme pour la société chrétienne ;
que d'autre part les plus grands
esprits sont unanimes à rendre
hommage aux sentiments paci
fiques et » conciliateurs du chef
de l'Eglise catholique ; qu'enfin
les catholiques allemands,- en con
formité avec l'exemple de Léon XIII,
nepensent à rien moins qu'à trou
bler la paix confessionnelle, qu'ils
ne cessent de donner de nom
breuses preuves du désir qu'ils ont
de ne froisser en rien leurs conci
toyens dissidents.
Il ressort de l'attitude de la
Chambre comme du gouvernement
que très probablement personne ne
proposera la suppression de la lé
gation prussienne près le Saint-
Siège. Une semblable motion n'au
rait aucune chance de succès. Non
seulement Guillaume II et le minis
tère y sont opposés, mais la diète
elle-même dans son ensemble s'y
montre hostile. On y aassëz de bon
sens pour comprendre qu'une telle
mesure serait plus nuisible à l'Etat
qu'à la Papauté. D'ailleurs, le réta
blissement de la léjgation en 1882 a
été motivé par M. de Bismarck sur
l'intérêt du pays et non dans le sens
d'une concession au chef de l'Eglise
catholique. 1
Si en cela le Landtag de Prusse
mérite des éloges —quoi qu'en
puisse dire l'ex-jésuite von Hœns-
brœch — il en va autrement à pro
pos du fonds de cent millions de
marks qu'il accordera au gouver
nement en faveur de l'immigration
allemande dans la Posnanie. D'au
tant plus qu'il y , a récidive. Une
somme égale a été consacrée à cette
néfaste entreprise. Nous en avons
parlé plus d'une fois. Les résultats
obtenus sont connus. Le polonisme
ne s'en porte guère plus mal, tandis
que le protestantisme y trouve son
compte. Sous prétexte de germa
niser, on fait de la propagande évan
gélique. Les neuf dixièmes des im
migrés aux frais des contribuables
sont , protestants. Les temples, les
écoles, les presbytères créés à l'aide
de ce nouveau Reptilienfonds sont
entre des mains protestantes.
Evidemment la deuxième centaine
dé millions de marks aura la même
destination.
Les catholiques sont à peu près
les seuls au Landtag à protester
contre uné telle politique payée à
si grands frais. Bien entendu, mal-
fré les faits, malgré les données
e la statistique, gouvernement et
majorité se défendent de visées
anticatholiques comme de toute
tendance à opprimer les Polonais.
Tout est-fait au nom de la Kultur :
c'est pour le bien des Posnaniens
annexés qu'on implante des colons
de langue allemande dans les du 1 -
chés. Les nations européennès ne
pénètrent-elles pas dans le centre
de l'Afrique ou en Chine avec des
vues analogues ? Que voulez-vous ?
La Prusse ne fait pas de si énormes
dépenses pour son plaisir, elle re
présente la civilisation et elle rend
service aux Polonais en la leur im
posant.
Ainsi parle-t-on très sérieuse
ment au Landtag de Prusse et il
s'y trouve une majorité '■ pour ap
plaudir et pour voter...
L. Iribarnegaray.
LA LIGUE SACERDOTALE D'AUTUN
Conformément à ses règlements, le
bureau de défense sacerdotale du dio
cèse d'Autun a intenté une action en
diffamation contre l'Union républi
caine, à la suite de deux : articles calom
nieux publiés par ce journal contre M.
l'abbé Claude Landré, ancien curé de
Saint-Sernin-du-Bois. L'affaire est venue
à l'audience le 17 janvier courant, le gé
rant du journal ne s'est pas présenté, et
le tribunal d'Autun, sur la plaidoirie de
M 0 Lenoël, l'a condamné à deux mois de
prison, cent francs d'amende et mille
francs de dommages-intérêts envers M.
l'abbé Landré. Le tribunal a en outre or
donné l'insertion in extenso de son juge
ment dans l'Union républicaine,, aux
frais du gérant.
' —♦-
lis suis miwm mis
La réponse de M. Zola
à l 'assignation.
"M. Emile Zola cherche à aggraver son
cas ; il publie aujourd'hui dans l'aurore
une lettre au ministre de la guerre, dans
laquelle il s'étonne qu'on ne le poursuive
que pour avoir attaqué le conseil de
guerre.
Il réitère ses accusations contre le co
lonel du Paty de Clam, contre le général
Mercier, contre le général de Boisdefîre,
contre le général de Pellieux, contre le
commandant Ravary, contre les experts
en écritures, contre les hureaux de la
guerre, contre le général Billot lui-
même :
Relisez ces textes, monsieur le ministre,
et tout en pensant ce qu'il vous plaira de
mon ^udace, reconnaissez que je n'ai pé
ché ni par manque de précision ni par dé
faut de clarté.
Et si vous êtes obligé de le reconnaître,
et si, dans votre silence prudent, tout le
monde doit avec moi le reconnaître, dites-
moi pourquoi aujourd'hui, après cinq
jours de méditations, de consultations,
d'hésitations, de tergiversations, vous vous
précipitez dans une reculade.
La lettre reproduit les accusations
qu'on connaît et qui formaient la conclu
sion de la première lettre de M. Zola,
celle qui est déférée à la justice; M. Zo
la ajoute :
J'ai dit ces choses, et je les maintiens.
Est-il vraiment possible que vous n'accep
tiez pas la discussion sur des accusations
aussi nettement formulées, non moins
graves pour l'accusateur que pour les ac
cusés ?
vous n avez pas ose
accusations, je vais
relever
vous le
Pourquoi
toutes mes
dire :
Redoutant le débat dans la lumière, vous
avez recours, pour vous sauver, à des
moyens de procureur.'On vous a.découvert,
dans la loi du 29 juillet 1881, un article 52
qui ne me permet d'offrir la preuve que des
faits « articulés et qualifiés dans la cita
tion».
Et, maintenant, vous voilà bien tran
quille, n'est-ce pas ?
» • • r • • •. • • » .. • « • • • •
Vous avez oublié que je vais avoir pour
juges douze citoyens français, dans leur
indépendance.
Je saurai vaincre par la force de la jus
tice, je ferai la lumière dans- les conscien>
ces par l'éclat de la vérité. On verra, dès
les premiers mots, les arguties, procéduriè
res balayées par l'impérieuse (nécessité de
la pTeuve. Cette preuve, la loi m'ordonne
de la faire, et la loi serait menteuse si,
m'imposant ce de.voir, elle m'en refusait le
moyen.
■ Comment ferais-je la preuve des accusa
tions que vous relevez contre moi, si je ne
pouvais montrer l'enchaînement des faits
et si l'on m'empêchait de mettre toute l'af
faire en pleine clarté ?
La liberté de la preuve, voilà la force où
je m'attache.
Les experts contre "M. Zola.
Les experts visés dans les lettres de
M. Emile Zola poursuivent ce dernier en
police correctionnelle.
L'ambassadeur d'Allemagne et le
procès.
Le Gaulois affirme que l'ambassadeur
d'Allemagne; pressenti B 'est toujours re
fusé et se refusera toujours à être mêlé
en quoi que ce soit au procès intenté à
Zola ; il ajoute :
* On nous dit également qu'une personna
lité bien connue de la presse parisienne a
sollicité une'audience de Guillaume II par
l'entremise de l'ambassadeur. Le comte de
M tins ter s'est énergiquement refusé à trans
mettre à l'empereur la demande qui lui a
été faite.
Manifeste de M. Jaurès aux soldats.
M. Jaurès adresse, dans la Lanterne,
un manifeste « aux soldats ». Voici des
passages de ce factum :
' Soldats, ne vous laissez pas égarer par
ces fourbes. Que le peuple libre vienne à
nous et vous verrez que. nous briserons
vite et les syndicats de financiers juifs qui
trafiquent de la patrie et les clans jésuites
qui vous asservissent et vous exploi
tent. •
Nous organiserons la responsabilité des
chefs pour que leurs fautes ne soient pas
impunies. Nous adoucirons les pénalités
monstrueuses d'un code sauvage. Nous
rendrons la discipline plus humaine, la
caserne moins abêtissante, et nous vous
permettrons, >sous les drapeaux de .la Ré
publique, de penser, d'être des hommes.
Souvenez-vous qu'un peuple est perdu
s'il garde à sa tête les généraux du privilège,
les généraux de la classe ennemie.
Il est temps aujourd'hui, si nous ne vou
lons pas périr, de révolutionner la haute
armée par la loi républicaine.
Lés manifestations.
> f A PARIS
L'agitation continue. Mais ce n'est
plus comme aux premiers jours le quar
tier Latin qui manifeste. Il est arrivé des
quartiers excentriques . une cohue de
gens interlopes qui prolongent le tapage
commencé naguère par les étudiants.
Les opérations du tirage au sort avaient
lieu hier à la mairie du cinquième ar
rondissement (Panthéon).
Un certain nombre des individus lou
ches dont nous avons parlé s'étant mêlés
aux conscrits en les excitant à manifester,
soixante-douze arrestations ont été opé
rées et maintenues. Les tapageurs sur
lesquels la police a mis la main sont
presque tous de vieilles connaissances
des tribunaux correctionnels.
M. Blanc, préfet de police, a envoyé
hier aux commissaires l'instruction sui
vante :
• Lors'que vous jugerez à |propos de ne pas
envoyer les individus arrêtés au Dépôt,
veus les garderez au poste jusqu'au lende
main matin," à huit heures.
II n'y aura donc plus de mises en. li
berté immédiates. Voilà qui va donner à
réflécKir.aux tapageurs de la rue. .
Signalons une petite manifestation qui
a été organisée hier à Auteuil pïir les
très jeunes élèves de l'école J.-B. Say,
qui ont parcouru le quartier en conspuant
Zola. ■ •
Il existe actuellement un groupe d a-
narchistes, toujours les mêmes, -, qui. se
transportent sur les divers points de Pa
ris, où ils suscitent dès troubles. Avant-
hier, ils ont interrompu à la Gaîté-Mont-
parnasse line conférence faite par' un
jeune orateui- catholique, M. Billiet ; hier
ils ont tenu pour leur propre compte une
réunion à la Montagne Sainte-Geneviève.
A la sortie, ils ont eu une altercation as
sez vive avec des étudiants. Qu'est-ce
qu'ils vont faire aujourd'hui ?
en province'
Blidah. —Les manifestations antisé
mitiques d'Alger ont eu leur contrecoup
à Blidah. Avant-hier soir, un groupe de
plus de deux cents personnes a envahi la
rué principale'(où se trouvent les maga
sins israélites) en criant : « A bas les
juifs ! » Des coups de canne ont été
échangés et les vitres de plusieurs bouti
ques ont volé. en éclats. La police et la
pluie qui s'est mise à tomber vers minuit
| ont dispersé les manifestants.
Angers. — Avant-hier soir, une mani
festation importante contre M. Zola et les
israélites a eu lieu à .Angers. De nom
breux étudiants, employés et ouvriers
ont parcouru les principaux quartiers eii
conspuant les juifs. Une ovation a été
faite à l'armée devant lès casernes. Plu
sieurs devantures ont éié brisées. Un
magasin a été pillé. Vingt-sdeux arresta
tions ont été opérées. La pïa.ce du Rallie
ment a été occupée par les troupes.
Dijon. — Vers minuit, une pe,tite bandé
dejeunes gens, en sortant des cafés, a
crié : « A bas Zola! A bas les juifs! »
Une manifestation est organisé pour
ce soir. Des mesures sont pris ef afin
de prévenir tout désordre.
Niort. — Quelques individus; ont ma-
festé, la nuit dernière, devant les maga
sins israélites. Ils ont injurié et menace-
les propriétaires de ces établissements ot
ont brisé les vitres.
Rouen Les manifestations ont.re
pris hier soir à Rouen. Les >. rues étaient
encombrées par une foule de curieux. A
partir de sept heures, des bandes se sont
forméës et ont parcouru la'ville en tous
sens.
. A dix heures, la gendarmerie à clieval
a,été appelée, et des charges ont eu lieu
pour dégager les abords de l'hôtel de
ville; on a chargé également devant le
théâtre des Arts et sur plusieurs autres
points. Un grand nombre d'arrestations
ont été opérées; on ne signale aucun
blessé. Un escadron de chasseurs à che
val vient d'être consigné.
L'AGRESSION CONTRE III. ORHAHD
L'Arvor nous donne aujourd'hui les
nouvelles suivantes de son directeur, M.
Alphonse Orhand, victime, on ' s'en sou
vient, d'une odieuse agression, le soir de
l'élection de Vannes :
Depuis l'attentat dont il a été victime, le
rédacteur en chef de l'^lruor est très souf j
frant, et bien qu'il n'ait pas de blessures
apparentes, il lui est impossible de repren
dre activement son travail.
Nous avons dit qu'il ne voulait pas por
ter plainte, et c'était vrai. Mais comme on a
répandu depuis sur son compte des bruits
très calomnieux — qu'on- a dit, par exem
ple, qu'il avait frappé le courageux citoyen
qui a été blessé en le défendant —il a dû
demander à M. le procureur de la Répu
blique de faire une enquête.
Cette enquête va commencer, et ' sera,
nous le savons, vigoureusement poursui
vie.
Encore une fois, comme nous l'avona
dit le premier jour, nous espérons que
les coupables seront punis et nous sou
haitons vivement que notre excellent
confrère de 'l'Arvor, promptement réta
bli, puisse reprendre bientôt la direction,
de son journal.
CHAMBRE DES DEPUTES
Séance du 21 janvier.
Le budget des cultes.
* Discours de Al. Méline.
Nous avons résumé hier, en Dernière
Heure, le discours de M, Alexandre Bé
rard; voici, d'après le Journal officiel , la
réponse du président du conseil :
M. Jules Méline, président duconseil*
ministre de l'agriculture. Messieurs, il est
impossible au 1 gouvernement de laisser
passer sans un mot de réponse le discours
que vous venez d'entendre.
Si, en effet, le gouvernement, comme l'af
firme l'honorable M. Bérard,
du Concordat, s'il les laisse violer audacieu-
sement tous les jours, s'il» n'applique pas
les lois dont il a la garde, il manque au
premier de ses devoirs et serait coupable
envers vous et envers le pays. (Très bien i
au centre.) ■.<.h
Ce n'est pas la première fois qu'on
la centième fois peut-être ; mais, puisqu'on
la renouvelle, je suis obligé d'y opposer
toujours la même réponse et de dire à/enos
honorables collègues; à nos adversaires* et
à M. Bérard-: Mais prouvez donc que nous
ne faisons pas appliquer les lois-du pays;
prouvez-le! (Rumeurs a gauche.) Oui, pro\ij
vez-le, autrement que par des articulations
vagues ; prouvez-le par des faits, des pré
cisions!' ■ -
Or, ces faits, ces précisions, ,vous ! ne les
avez jamais trouvés, vous ne 'les trouverez
jamais,.et c'est ce qui fait que le pays ne se
préoccupe plus de l'accusation Incessante
que vous dirigez contre nous. (Très bien !
très bien ! au centre.)
Dernièrement, vous; avez institué à cette
tribune un - débat i pour. établir que nou3
n'appliquions pas la loi sur la laïcisation, et
le débat a tourné'entièrement à votre con
fusion. Aujourd'hui, vous essayez, en pas
sant la revue-des lois que' nous>avons- mis»
sion de faire respecter, de persuader à la
Chambre que nous nous refusons à faire ce
qu'elle veut. - - '•<
Je vous en demande pardon. Ces lois sont
parfaitement* appliquées* etj je vous le ré
pète, 11 vous- sera impossible de découvrir
un seul fait qui constitue, de notre part,
soitune négligence, soit un défaut de vigi
lance.
; Vous avez parlé de la loi des fabriques'.
Eh bien! si cette loi n ; a pas reçu son exé
cution complète, c'esVpttrce que 1 le décret
de 1893 manquait de sanction, et c'est pré
cisément notre 'gouvernement qùi™s'est •oc
cupé'de rechercher cette sanction,'en intro
duisant devant le conseil d'Etat une 'de
mande de règlement qui lui est soumise en ce
moment. Ne dites donc pas que nous négli
geons ■ l'application de la loi des fabriques,
alors que c'est - nousj au-contralre, qui tâ
chons delà rendre applicable: (Très bien !
très bien ! au centre et à droite. — Bruit à
l'extrême gauche et sur' divers r bancs à
gauohe.)
Mais oui,' messieurs', tes gouvernements
précédents avaient omis ■ de .-remarquer
qu'en effet la' 1 loi était dépourvue dô sanc
tion ; les commis chargés- de percevoir les
amendes étaient dans Timpoasibilité' de
les recouvrer. C'est aussi simple que 1 cela.
Quant au droit d'accroissement, nous
l'appliquons dans - toute ; la : mesure où nous
pouvons -l'appliquer ; nous 'ne pouvons pas
empêcher les congrégations d'user'du droit
que leur confère la loi pour résister, et tant
que les procès en cours ne seront pas iter-
mlnés il n'est pas possible au gouverne
ment d'arriver aux moyens d'exécution;
II reste dono démontré, je le répète, jus
qu'à l'évidence, que îles n lois dont nous
avons la garde sont respectées et observées.
(Très tien I très bien ! au centre.)
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