Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-04-23
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 23 avril 1897 23 avril 1897
Description : 1897/04/23 (Numéro 10687). 1897/04/23 (Numéro 10687).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7094687
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Vendredi 23 Avril 1897
édition quotidienne. — 10, QS"S
Vendredi 23 Avril 1897
ÉDITION QÙOTIDIÉNira
. ■ • ■ • PARIS '
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• Un an. ,40 » :
Six mois..., „. ,21 ■» ,
Trois mois 11 n
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(union postale)
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Six'niois 10 : ® i> v. •
Trois mois:;;.'» .5 »,>' >
Les fl&annemeafes partent des l ?fi% 16. df eiagne moip
L'ïfNÏVEES ne répond pas âes-mfl^spriisiqui iuijpnt adressé
]' . ; ANNOtibfëiftV/
LAGRÀNGE» GERF et C ie , 6, place delà Bourse
PARIS, 22 AVRIL 1897
SÔMMÀmB
Sous l'ancien régi-' ^
• me. .......:.i . - Pierre Veuillot.
Çà et là : Fusains... Eugène Tavernièr.
Affàireë d'Orient. .p./L.
A propos de M. de
Falloux. ...... Eugène Veuillot.
G ôrr espondance ro- , . >c
mainé.. v. " "
Causèries militai- ' '
res......... —Colonel Ortub;:
' ,* C . I - v> ' S ■». ' - fc— K « « -J» .
Bulletin^ ~ Le pacte de Bordeaux. — Le
a crime » du colonel. — Les démocrates
chrétiens;A l'Hôtèl'de Ville. — Infor
mations politiquès et patlèinéntair'es. —
Lé vb^agé du président. —Les ministres
en Tunisie, -r* L'affaire. Arton; A tra
vers la presse, rr Chronique. ■ Lettres,
sciences et arts. — La guerre turoo-
grecque, -y Dépêches de .l'étranger. — La
question 'ouvrière. — Échos de partout.
— Assemblée des propriétaires chré
tiens. —[Chronique religieuse. — Bulletin
bibliographique: -?•; Nécrologies — Guerre
et marine.' Tribunaux .■ ^ - Nouvelles
diverses: ^ Calendrier.- — Tableau et
bulletin dé la Bourse. — Dernière heure.
SOUS L'ANCIEN RÉGIME
r " *■ ii
On l'a vu, deux évêques' seule
ment résistèrent au roi; lorsqu'il lui
plut de généraliser la régale par
un acte de brigandage^ comme l'a
dit Joseph de Maistre. Ici nous
abordons un autre; terrain. La ques
tion devient plus grave encore. Il
s'agit maintenant du péril, où se
trouvèrent les intérêts spirituels de
l'Eglise. On doit obéir sajis discerne
ment, déclarait Louis XIV ( Instruc-
tionspour le Daùphin), et il étendait
cette règle aux questions ' religieu
ses: «'Lfe roi,-dans la pratique, »
pouvait écrire Fénelon, « est plus
-chef de l'Eglièe" que lè Pape en
France . » L'archevêque' de Carribrài
ne disait rien de trop. Il rie trom
pait pas ses lecteurs , comîrie nous
en accusent' lès feuilles qui nous
obligent à leur opposer des faits
douloureux.
Le brigandage commis par Louis
XIV devait avoir de déplorables
conséquences. Innocent XI protesta
énergiquemer^t. Mais il n'eut point
■ à lutter Contre le roi et les légistes
seuls ; l'assemblée, des évêques se
Ïirononça aussi pour l'extension de
a régale, puisque tel était le bon
plaisir du souverain. Les prélats
« poussèrent l'adulation et lai, fai
blesse », dit Rohrbacher, jusqu'à
proclamer que rien ne serait capa
ble de les séparer de Louis XIV,
ajoutant- qu'iZs voulaient qûé toute
la terre fût informée de leurs dispo
sitions à cet égard. Ils invitaient le
Saint-Père à suivre le mouvement
de sa bonté dans une occasion où il
n'était pas permis d'employer le cou
rage. - • •
Innocent XI leur reproche de se
montrer « pusillanimes». Ce blâme
trop juste les irrite. Ils déclarent au
Souverain Pontife que son langage
répond mal à la dignité d'un si grand
nom, et qu'iZs en rougissent pour
ceux qui Vont inspiré. Ils considè
rent, d'aîllëurs, que le bref .du Pape
est nul par lui-même. On croit que
cette réponse, après un peu de ré
flexion, ne. fut point envoyée à
Rome. Mais la lettre d'Innocent XI
n'eh resta pas moins sans efficacité.
Le corps épiscopàl ne se permit
d'adresser aucune représentation '
au roi. Joseph de Maistre lei cons
tate et dit qu'une telle- conduite
« embarrasse même la plus ardente !
envie d'excuser». Voilà quelle Sujé-,
tion Louis XIV faisait peser sur I»
clergé de France. Et le clergé trou- ;
vaitnaturel qu'il en fût ainsi.
0i, cè n'était là qu'un début.
Voyant dans ces bonnes disposi
tions les prélats réunis par son or- ?
dre, le roi leur commanda de trai-,
ter la question de l'autorité du
Pape. Il faut dôriner une leçon.au!
Saint-Père;' disaient les • courtisans.
L'assemblée obéit, ét rédigea la Dé
claration de 1682. Quand • nous 1 em
ployons le verbe rédiger, nous avons
tort; le verbe transcrire convien
drait-mieux. Il y a quelque chose
d'encore plus déplorable, en effet,
que la Déclaration elle-même, c'est
comment elle fut obtenue. On peut
dire que Colbert la dicta. Ecoutons
Rohrbacher : -
En déux mots, des évêques, piquée de
ce que le Pape n'éprouvait pas la fai
blesse avec laquelle ils avaient, au mé-
{iris du serment de leur sacre, abandonné
és droits de leurs Eglises et violé ainsi
le douzième canon du concile œcuméni
que de Lyon, s'assemblent par ordre du
roi, traite lit; par ordre du roi, la* ques
tion de l'autorité du Pape, la décident
promptement par "ordre dù toi, èt rédi
gent en latin quatre propositions odieu
ses doiit le ministre Golbert était le véri
table auteur. Voilà; d'après le récit de
Fleury et de Bossuet, comment fut faite
la Déclaration de 1682.
Joseph de Maistre n'est pas moins
affirmâtif. Il s'exprime en des ter-,
'mës ■ ' • ' ■
Colbertfutle premier moteur de cette
malheureuse résolution. Ce fut lui qui
détermina Louis XIV. Il fut le véritable
auteur des quatre propositions, et les
courtisans^ en camail qui les écrivirent ne
furent àù fond que ses secrétaires.
On est heureux de pouvoir dire
qu'il y eut des résistances'. La Sor-
bonne refusa d'enregistrer la", Dé-
daràtiôn.' Màis le ! Parlement . n'en
tendait pas que la Sôrbônrçese.pçr-;
mît de aonnér au.pouvoir civil des
Aeçons d& catéchisme. Il se. fit ap
porter.- les registres, de cette com
pagnie et commanda qu'on y- trans
crivît les quatre articles. La Sor-
bonne se soumit. E ;
C'est avec ardeur, stir cé terrain,
&tiè lé Paï'l'éinè'nt ; i àécohdRit : .le. roi.«
Innocent XI défendait les drojits de
l'Eglisè.' L6ùijg' ; XlV nommant : àù^
évêchés vacants'des ecclésiastiques
partisans de la Déclàration, le Pape
leur refusait les huilés d'învesti-
.tiiré. Trerite einq diocèses furent
sans. pasteurs. Sur ces entrefaites^
rambassadeiir Lavardin, excom
munié, ayant été recevoir les sa
crements, la veille, de Noël, à Saint-
Louis defc Français, le Souverain
Pontife déclara cette églisé inter
dite. Uhe telle audace indigna le
Parlement de Paris, qui résolut de
la r*épriinèr sévèrement. Mais lais-
sons de nouveau la parole à Rohr-!
bâcher : ; .
M. dé Harlày, procureur général, in
terjeta, le 22 janvier 1688, appel comme
d'abus, non seulement de la Bfentence du
cardinal-vicaire, mais encore de la huile
du Pape. Il n'admettait pas que celui-ci
eût jamaisle droit de comprendre dans ses
excommunications les ambassadeurs que
le roi-voudrait bien lui envoyer: Il attri
buait cette aberration d'esprit du Souve
rain Pontife à l'âge, qui avait obscurci
ses facultés. L'avocat général Talon fut
plus violent encore ^ il ne se contenta» pas
^d'insinuer que le Souverain Pontife rado
tait, Uvoulut le faire passer pour héré
tique...
Louis XIV et le Parlement conti
nuaient de rencontrer des appuis zé-
lés'dans l'épiscopat, dans le clergé.
C'èst Eohroàcher qui nous rap
pelle encore ce que voici : .
L'archevêque de Paris avait assemblé
les évêques qui se trouvaient dans la
capitale, les curés, letf chefs des chapi
tres et des communautés (Rohrbacher
emploie ce mot, que va dire la feuille
oblique?) et il les avait harangués pour
justifier la conduite du gouvernement
envers la cour de Rome. L'Université de
Paris avait, comme le Parlement, inter
jeté appel au concile universel ; tout le
clergé de France semblait prendre part
avec un même zèle à la. lutte contre le
chef de l'Eglise... Le 7. octobre 1688, les
troupes françaises s'ërtipârèrent du com-
tat d'Avignon...' > '
', jl est certain, écrit Joseph de
Maistre, que dans, le temps on crai
gnit un schisme;.. La catastrophe
se fût produite, si Louis XIV l'a
vait'voulu. A son honneur, on peut
dire qu'il ne : le voulut pas. Mais il
ne s'en fallut gùère, et le germe
était jeté, qui devait, cent ans plus
tard, après mille ravages,, produire
1 a. Constitution civile de 1790.
. Bossuet lui-même eut bientôt à
se repentir d'avoir montré, dans
,1'affaire.de la régale et dans celle
de la Déclaration, une funeste com
plaisance'. Lorsque, le chef de la
magistrature en vint jusqu'à lui im
poser;^ examinateur, iusqu.'à lui
refuser la permission (l'imprimer,
si l'attestation de l'examinateur n e-
tâit placée à la première page du
livre, il s'écriait avec angoisse :
Il est biéri extraordinaire que, pour
exercer notxe. ministère, il nous faille
prendre l'attache de M; le chancelier, et
achever de mettre l*Eglise sous le joug.
Poufr moi, j'y-mettrais la tête.
Le, mot de Joseph de Maistre est
terrible, mais est-il trop fort, c[uand
il parle de la. dégradation de Vepisco-
pat?« Les laïques dominent les évê-
ues », « lès< appellations. comme
'abus ont achevé' de ruiner là juri-
3
diction ecclésiastique »•, disent Fé- >
' îry. C'
point suspect' d'une 1 hostilité trop
nélon et Fleury. C'est ce dernier,
vive contre le gallicanisme, qui for
mulé encore ces plaintes :
On 6te aux évêques la connaissance de
ce qûî leur importe le plus, le choix des
offîcifers dignes de servir l'Eglise sous
eux.et la fidèle administration de son re
venu, et ils ont souvent là doiilëur de
voir, sans le pouvdir empêcher, ùn prê
tre ' iiibapàble et iiidigne se mettre en
possession d'une cure considérable, parce
qu'il est plus habile plaideur qu'un au-
fre, ce qui devrait l'en exclure.
En iiiême temps, l'épiscopat de
vient le privilège presque exclusif
de la noblesse. On doit reconnaître,
avec Rohrbacher,. que « les évêques
plébéiens sont aussi rares que les
officiers de fortune et sont consi
dérés à peu près du même œil dans
leur corporation ». De tout cela,
que résulte-t-il ? Le peuple fidèle
pèrd, de plus en plus, les senti
ments de vénération et d'amour qu'il
avait pour les pasteurs des dio
cèses. Fénélon le constate avec dou
leur, et il écrit à l'évêque d'Arras :
Il ne faut pas que les évêques s'abu
sent sur leur autorité : elle est" Bi'affaiblie
qu'à peine en reste-t-il' des traces dans
I esprit des peuples. On est accoutumé à
nous regarder comme des hommes ri
ches et d'un rang distingué, qui donnent
des bénédictions, des dispenses et des
indulgences ; mais l'autorité qui vient de
la confiance, de la vénération, de la do
cilité et de la persuasion des peuples,
est presque effacée.
Pour . terminer ce ; tàbleau de la
situation faite, à l'Eglise sous»Louis
XIV, donnons, ce dernier extrait de
Joseph de Maistre : ;
L'Eglise gallicane, emmaillotée par
les Parlements, cônservait-elle un seul
mouvement libre ? Elle vantait ses droits,
ses privilèges, ses libertés ; et les magis
trats, avec leurs cas royaux, leurs posses-
soires et leurs appels comme d^mus, ne
lui avaient laissé que le droit de faire le
saint chrême et l'eau bénite.
Comme Louis Veuillot a raison
de s'écrier que là Révolution a
sauvé l'Eglise de France d'un grand
péril 1 Comme il a raison, après
avoir dit : « le roi jeta, jusque dans
l'Eglise, qui dut céder, des courti
sans déjà scandaleux « dans le
monde », d'appeler Louis XIV le
précurseur de 1789, et même de
1793 !
,Le Moniteur n'admettra point
l'autorité du grand publiciste chré
tien. Qu'il écoute alors Frayssi-
rious, en qui l'on ne rencontre pas
un ennemi du gallicanisme. L'é
vêque d'Hermopolis déclare, dans
sa, préface des Vrais principes, , que
le seul moyen qu'ait eu Pie VII de
ressusciter l'Eglise de France a été
de\violer complètement les maxi
mes gallicanes. Si le Pape, dit-il,
n'avait point, par un chef-d'œuvre
.de sagesse,.foulé aux pieds nos usa
ges, la religion était perdue, défini
tivement.
A tout cela, on répond que Louis
XIV était un prince chrétien. Louis
XVj aussi; Ce fut tant mieux pour
eux, nous ne voudrions certes point
en disconvenir. On peut toujours
espérer qu'un prince chrétien s'ar
rêtera à temps. La garantie n'est
pas infaillible, Henri VIII l'a dé
menti e; mais cependant c'en est
une, l'histoire de France le prouve.
Oserons-nous faire observer que
c'est un point à débattre, de savoir
s'il vaut mieux ou non, pour l'Egli
se, que les usurpations contre elle
soient dirigées par Tjn prince chré
tien ou pàr ùn gouvernement qui ne
l'est pas..Sous un certain rapport,
le péril est plus grand avec le
prince. Louis XIV faillit nous con
duire au schisme. On peut défier
MM. Faure et Mélinej ou M. Bour
geois, de nous mettre en si dange
reuse extrémité. L'assujétissement,
qui abaissé, n'est-il pas pire que
la persécution? Enfin, tandis que
noiîs sommes, en veine , d'audace,
nous ajouterons ceci : Assurément,
il est toujours bien d'aller à la
messe. Le fruit qu'on en retiré,
l'exemple qu'on donne restent bons,
malgré tout: Pourtant il n'est peut-
être pas impôssibl# de soutenir que
Louis XIV, quand il sé' montrait
au service divin avec Mme de Mon-
tespan, et plus tard avec ses bâ
tards, Adultérin^ entourés d'hon
neurs, ne faisait guère moins de
mal à l'Eglise, d'une autre façon,
que le président de la République
en n r y a^sistànt pas. , .
Les provocations réitérées de
certâines feuilles, nous accusant de
■tromper nos lecteurs lorsque nous
rappelons certaines pratiques de
l'ancien régime, nous ont forcé d'é
tablir notre justification; En même
temps, qu'avonsrJtious prouvé? Que
la théorie du bloc est toujours
fausse. On dit que - la république
est essentiellement hostile à l'E
glise; que là monarchio- lui est es
sentiellement favorable. C'est une
profonde erreur. La monarchie,
on l'a vu,, a mis l'Eglise, en
France, à. l'extrême bord. de.la rui
ne. Or, le prétendant actuel, qui
se réclame à la fois de. Louis XIV
et de Louis-Philippe, se montre
attaché aux maximes gallicanes.
II ne nous es.t. donc nullement dé
montré qu'il ' rétablirait la religion
dans' ses droits et lui laisserait la
liberté. Par conséquent, nous fe
rions peut-être, à tous points de
vue, un', marché de dupes en tra
vaillant, à Une restauration monar-
chique, fortement improbable. Con
tre une législation oaieûse, infâme,
le plus sûr est de lutter directement
sur le terrain constitutionnel.
Pierre Veuillot.
'BULLETIN ""
Le voyage du président de la Répu
blique se continue sans incident nota
ble. Oh en verra plus loin les détails.
M. Méline est parti hier au soir pour
rentrer à, Paris. M. Félix Faure a quitté
Nantes ce matin pour descendre la Loire
sur l'aviso i'Elan.
Aujourd'hui, aura lieu, dans les pa
lais archiépiscopaux de Lyon, de Rouen
et de Rennes, la remise par les ablégats
de lacalotte cardinalice à NN.SS. > Coul-
lié, Sourrieu et Labouré.
La question du métropolitain est sur le
point d'être tranchée : la sous-commis
sion du conseil municipal de Paris et les
représentants de la compagnie de trac
tion du Creusot sont enfin tombés d'ac
cord. • ' - '
Le conseil municipal va être convoqué
pour statuer définitivement.
Aujourd'hui, à la faculté de droit de
Paris, s'ouvre le premier congrès des
professeurs de l'Université.
Du théâtre de la guerre turco-grecque,
on n'a encore aucune nouvelle très signi
ficative.
Hier matin, Guillaume II est arrivé à
Vienne; la réception que lui a faite
l'empereur d'Autriche semble avoir été
particulièrement cordiale.
Aujourd'hui a lieu la grande revue
qui est le prétexte de la visite du souve
rain allemand.
Çà et là
' FUSAINS '
Des historiettes de tous les jours, des
incidents de la vie moyenne, des faits-
diverSj est-ee que cela peut faire un vo
lume'? Il y paraît, d'après celui-ci,. qui
eSt intitulé Fusains (1). L'auteur a réuni
un nombre considérable d'observations
prises sur le vif et de réflexions notées
de temps en temps, un peu à la manière
d'une méditation. On s'imagine que pour
philosopher il est nécessaire de s.'enion-
cer dans les sujets les plus compliqués;
mais,en réalité, le spectacle de la rue, du
salon, du restaurant, offre beaucoup de
ressources. Le tout est d'avoir le don de
l'attention et aussi de l'utiliser. Avec un
peu d'exercice, l'esprit gagne vite en sa
gacité et en vigueur.
Les nombreux chapitres que M. André
Bessan a réunis sous le titre Fusains
sont très variés. Pourtant la note comi-
que, la note sentimentale et les accents
du prosélytisme s'y mélangent sans dé
saccord. Une pensée élevée donne l'u
nité à des fragments si divers et en fait
une œuvre de foi.
' - Cette foi s'exprime avec une ardeur
touchante qui a le charme de la jeunesse.
On sent palpiter une âme généreuse
éprise des grandes choses. Les souve
nirs des temps héroïques reparaissent
souvent à travers les récits ou les ta
bleaux que M.André Besson a empruntés
à la réalité contemporaine, souvent pi
toyable. Est-il étonnant que l'auteur s'a
bandonne parfois à certains excès d'in
transigeance ? Mieux vaut pécher de
cette manière que de l'autre. On est d'ail
leurs bien plus sûr de se corriger, et,
dans un prochain avenir, de considérer
les choses tout à fait au vrai point de vue.
Il est bon d'avoir une provision d'enthou
siasme pour se mettre en route. Les sur
prises et les fatigues en absorberont
assez.
Il y a aussi de la poésie dans ce joli vo
lume, non seulement de la poésie en vers
comme ceux qui composent la préface,
mais aussi des élévations écrites en prose
harmonieuse. Même de nombreux détails
de moeurs familières sont tracés avec
art; et le dialogue de tels ou tels bour
geois, de tels ou tels paysans, imité de
la langue courante, garde le cachet du
bon style.
Eugène Tavernier.
^—■ - ■ ■ ■- - • ♦ , -,^1-
. LE PACTE DE BORDEAUX
Le directeur du Nouvelliste de
Bordeaux nous envoie encore une
longue lettre au sujet des détails
que nous avons empruntés à la
correspondance la Politique ifou-
velle. ,
Nous avons cité cette correspon
dance. C'est donc à éile que les ré
clamations ou les réctifications,
s'il y a lieu, doivent, être' adres
sées. '
AFFAIRÉS D'ORIENT
La vigoureuse résistance que les
Grecs opposent à la marche des
Turcs, en Thessalie, n'a pas encore
permis à ceux-ci d'occuper Larisse,
ainsi que les dépêches l'annonçaient
hier ; on dit même qu'une, grande
bataille est imminente, en avant de
cette ville. En résumé les nouvelles
d'aujourd'hui ne nous apprennent
rien' d'important sur les faits et
gestes des belligérants.
Au point de vue diplomatique
nous devons signaler la circulaire
que le ministre des affaires étran
gères de Russie vient d'adresser
aux autres membres du concert
européen! Dans cette circulaire, le
comte de Mouravief propose l'adop
tion d'une ligne de conduite com
mune, ayant pour objet : 1° le
maintien du statu quo en Crète, en
attendant que l'organisation de
l'autonomie soit possible; 2° l'ob
servation stricte de la neutralité,
tant que l'un des belligérants
n'aura pas recours à la médiation
de l'Europe.
. Ce programme,que les puissances
{ 1 ) Fusains, [par M. André Besson. Mai
son de la Bonne presse, rue François-Î or , 8.
nous semblent avoir déjà mis en
pratique spontanément, ne rencon
trerait d'objection, suivant certai
nes informations* que de la pârtde
l'Angleterre. Toutefois on ne peut
encore, rien affirmer sur ce point, la
diplomatie anglaise étant, au moins
en apparence, entrée en vacances
avec lord Salisbury, qui continue de
résider tranquillement dans lé midi
"de la France.
F. L.
LE « CRIME » DU COLONEL
On annonce que M. le colonel
Froment vient de demander sa mise
à la'retraite.
On n'a pas oublié que M. le colo
nel Froment avait commis le crime,
impardonnable aux yeux • des radi
caux, de prévenir ses soldats, par
la voie de l'ordre du jour, que des
conférences religieuses étaient don
nées à le,urintention; même, il avait
poussé l'impudence au point de les
avertir que ceux qui voudraient les
entendre auraient permission de le
faire. Accorder cette liberté, c'était
évidemment de la tyrannie.
En agissant ainsi, M. le colonel
Froment ne faisait que suivre un
usage établi par ses prédécesseurs
et, notamment,par un israélite,M.le
colonel Wolf. N 'importe ! Effrayée
par les criailleries de la secte et par
quelques violences de journaux,
l'autorité militaire eut l'indigne
faiblesse d'infliger au colonel Fro
ment une disgrâce, une sorte de
blâme, en le déplaçant.
Les radicaux, point satisfaits en
core ont continué leur campagne et
voici que M, le colonel Froment;
injurié par de misérables sectaires,
..— non moins ennemis de l'armée
que de la religion, — et ne ren
contrant pas, d'autre part, chez ses
chefs, l'appui àuquel il aurait eu
droit, en est réduit à demander sa
mise à la retraite...
La moralité de cet incident est
inquiétante autant que fâcheuse.
Si les radicaux, enhardis par cette
victoire, engagent des campagnes
contre tant d'officiers excellents,
qui usent de leur droit de se mon
trer chrétiens, ne voit-on pas que
leurs menées pourront avoir contre
la discipline une influence déplo
rable ? Ét ne voit-on pas aussi qu'on
les a excités à prenare une telle at
titude, en cédant devant eux une
première fois ?
A PROPOS DE M. DE FALLOUX
M. le comte G. de Blois, sénateur
de Maine-et-Loire, nous adresse la
lettr# suivante : .
La Rochejacquelin, 19 avril.
Monsieur le directeur,
Je ne lis pas régulièrement l'Uni
vers.
G'est une infériorité que j'ai sur M. de
Falloux qai ne se serait pas privé, pour
un empire, de cette récréation quoti
dienne.
Voilà pourquoi je n'ai qu'aujourd'hui
seulement le numéro du 16 avril conte
nant, sur la suppression et la résurrec
tion de l'Univers, unarticle où vous avez
éprouvé le besoin d'écrire que M. de Fal-
loux était un intrigant politique de belle
attitude et d'esprit bas. Gela, parce qu'il
a toujours répété que la suppression de
l'Univers était une suppression... pour
rire.
Je n'ai pas, bien entendu, la préten
tion de vous convaincre personnellement,
mais je compte, qu'ayant fort gratuite
ment, le 16 avril 1897, attaqué la mé
moire de M. de Falloux, votre loyauté
permettra à son héritier de fournir à vos
lecteurs au moins une raison de l'opinion
qui vous révolte si profondément. Ce
sera, d'ailleurs; très bref. Des faits et une
question.
Le Moniteur universel, alors journal
officiel de l'empire, publiait; à la date du
18février 1852, le texte d'un décret orga
nique sur la presse, daté de la veille et
signé Louis-Napeléon.
On y peut lire à l'article premier : « Au
cun journal ou écrit périodique traitant
de matières politiques ou d'économie so
ciale... ne pourra être créé ou publié sans
l'autorisation préalable du gouverne
ment. L'autorisation préalable du gou
vernement sera pareillement nécessaire,
à raison de tous changements opérés ,
dans la personne des gérants, rédac-s
teurs en chef, propriétaire^ ou" adminis
trateurs d'un journal. »
Et à l'article 20 du chapitre III : « Si
la publication d'un journal ou écrit pé
riodique frappé de suppression ou de
suspension administrative ou judiciaire,
est continuée sous un même titre ou sous
un titre déguisé, les auteurs, gérants ou
imprimeurs seront condamnés à la peine
d'un mois à deux d'emprisonnement et
solidairefnent à une amende de 500 à
3,000 francs par chaqne numéro ou
feuille publié en contravention. »
Il est inutile, je pense, d'insister sur la
façon draconienne dont ces prescriptions
furent appliquées par le second empire
jusqu'en 1867. .
Comment donc se fait-il que l'Univers
étant. supprimé le 29 janvier 1860, le
Monde ait pu paraître très peu de temps
après, avec un titre à peine déguisé, chez
le même imprimeur, avec lè même gé- '
rant, les mêmes rédacteurs, sauf
MM. Veuillot? s
Le cas est bien fait, il me semble, pour
étonner. Il est unique en cette espèce —
M. de Falloux ne le comprenait pas, -r- je
ne le comprends pas non plus.
C'est tout ce que je voulais dire à vos
lecteurs d'aujourd'hui qui ne connaissent
guère, sans doute, de cette question que
vos appréciations très naturellement par
tiales.
J'ose espérer, monsieur, que, quoique
démocrate, vous serez assez chrétien,
c'est-à-dire ami de la justice, pour leur
communiquer ces documents et je vous
prie d'agréer l'expression de mes senti
ments très distingués,
Comte Georges de Blois,
3, cité Vaneau, Paris.
M. de Blois cherche lé trait. C'est
uné ambition .permise à tout Je
monde et dont peut s'accommeder
la gravité sénatoriale. Seulement
dans la polémique, pour lé trouver
à point et le bien lancer, il èst utile
de connaître son terrain. M. de Blois
ne connaît pas le sien.
Il est sûr, et nous l'avons rappelé
assez souvent pour, que nul n'en
ignore; qu'à l' Univers succéda d'une
certaine, façon le Monde. Voici, en
deux mots, comment la' chose se
fit : M: Taconet, propriétaire de
l'Universi fut autorisé à acheter un
journal mourant, la Voix de la Vé
rité, et put servir à ses abonnés ce
journal qu'une seconde autorisa
tion lui permit d'intituler le Monde.
L'opération, lui coûta force démar
ches et une cinquantaine de mille
francs. A cette lourde amende s'a
jouta la défense, sous peine de
mort, de laisser entrer au Monde
Louis Veuillot et même moi.
Etait-ee là une suppression pour
rire en ce qui touchait M. Taconet,
rudement atteint dans sa caisse, et
M. Louis Veuillot, exclu de la
presse? Et il y en eut pour sept ans !
C'était pour rire. Une plaisanterie
plus courte nous eût paru meil
leure.
Ce n'est pas tout: le Monde reçut
l'avis très comminatoire d'être très
sage s'il voulait durer. Son pro
priétaire désirant ne pas mourir
deux fois, la sagesse ne manr
ua point. Si M. de Blois en
oute, qu'il compare les derniers
temps de l'Univers aux premiers
temps du Monde et il reconnaîtra
que^ l'Univers était bien réellement
supprimé. Il y avait encore un jour
nal catholique, il. n'y avait plus le
journal de combat. C'était ce que
voulait le gouvernement. Il ne te
nait point à ruiner M. Taconet. Il
lui suffisait d'éteindre des batteries
qui le gênaient, de faire disparaître
un titre qui par lui seul était une
force et de réduire au silence le
journaliste qui avait créé cette
force.
Or, M. de Falloux, qui connais
sait très bien la situation, disait ou
insinuait, non pas que la suppres
sion de l'Univers avait été un jeu
parce qu'il revivait dans le Monde,
mais qu'il y avait eu entente cordiale
entre Napoléon III et Louis Veuillot
pour que l'Univers, qui ne* pouvait
cesser d'être très militant, dispa
rût, ce qui faciliterait les entre
prises de l'empire contre le pou
voir temporel au Pape. Il avait un
papier qui prouvait cela; il a même
un jour, montré ce papier... fà un
aveugle, Mgr de Ségur. Puisque
M. de Blois a hérité de ce gentil
homme, il doit avoir ce même papier.
Nous le prions de le publier.
Voilà comment M. de Falloux
entendait la polémique. J'ai dit
qu'il y avait là le "signé et même la
preuve d'un esprit bas. Je le main
tiens.
Je maintiens aussi le mot « intri
ant ». M. dé Falloùx, qui avait de
'attitude, du talent, quelque sa
voir, a gâté ces dons par la passion
de l'habileté poussée jusqu'à l'in
trigue.
En parlant airtài je n'apprends
rien à M-" de Blois sur son testa
teur. S'il n'en connaît pas bien tous
les actes il ne peut en ignorer la
réputation. Je mettrais, je l'avoue,
quelque plaisir à lui prouver que
cette réputation, incontestablement
mauvaise, était absolument méri
tée. Royaliste, M. de Falloux par
ses manoeuvres a encouru la colere
et le dédain du roi ; catholique, il a
tourné les enseignements' au Pape
et en a été repris. Oui, estait un in
trigant.
Je félicite M. de Blois d'avoir hé
rité de la belle fortune de ce louche
politicien .et jei'èngage à ne pas se
charger^de sa mémoire. Il y dépen
serait sans succès ses petites iro
nies. Et puis qu'il ne manque plus
à ses devoirs d'héritier en raillant
les catholiques d'aller à là démocra
tie. Il fut un temps où M. de Fal
loux se déclara démocrate et enfla
sa faible voix pour acclamer l'in
surrection et saluer d'un cœur ra
dieux la république. M. de. Blois
l'aurait-il oublié ?
De même qu'on ne doit pas hé
riter des gens qu'on assassine, on
ne doit pas railler ceux dont on a
hérité et qui par leur héritage vous
ont fait sénateur.
Eugène Veuillot.
édition quotidienne. — 10, QS"S
Vendredi 23 Avril 1897
ÉDITION QÙOTIDIÉNira
. ■ • ■ • PARIS '
, . ; . .: bs départements
• Un an. ,40 » :
Six mois..., „. ,21 ■» ,
Trois mois 11 n
ÉTRANGER- ■
(union postale)
SI »
; 26 5d
'•14 »-
Les abonnements partent dça 1" et 18 de chaque mola
UN NUMÉRO \ ?^ riS
< Départements...»
BUREAUX s Paris, m Oaaaette, W
10 cent,
15 —
On s'abonne à Rome, place du Qegù, 8
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' départements (union postale)
On an......... 20 • • .26 ; •.
Six'niois 10 : ® i> v. •
Trois mois:;;.'» .5 »,>' >
Les fl&annemeafes partent des l ?fi% 16. df eiagne moip
L'ïfNÏVEES ne répond pas âes-mfl^spriisiqui iuijpnt adressé
]' . ; ANNOtibfëiftV/
LAGRÀNGE» GERF et C ie , 6, place delà Bourse
PARIS, 22 AVRIL 1897
SÔMMÀmB
Sous l'ancien régi-' ^
• me. .......:.i . - Pierre Veuillot.
Çà et là : Fusains... Eugène Tavernièr.
Affàireë d'Orient. .p./L.
A propos de M. de
Falloux. ...... Eugène Veuillot.
G ôrr espondance ro- , . >c
mainé.. v. " "
Causèries militai- ' '
res......... —Colonel Ortub;:
' ,* C . I - v> ' S ■». ' - fc— K « « -J» .
Bulletin^ ~ Le pacte de Bordeaux. — Le
a crime » du colonel. — Les démocrates
chrétiens;A l'Hôtèl'de Ville. — Infor
mations politiquès et patlèinéntair'es. —
Lé vb^agé du président. —Les ministres
en Tunisie, -r* L'affaire. Arton; A tra
vers la presse, rr Chronique. ■ Lettres,
sciences et arts. — La guerre turoo-
grecque, -y Dépêches de .l'étranger. — La
question 'ouvrière. — Échos de partout.
— Assemblée des propriétaires chré
tiens. —[Chronique religieuse. — Bulletin
bibliographique: -?•; Nécrologies — Guerre
et marine.' Tribunaux .■ ^ - Nouvelles
diverses: ^ Calendrier.- — Tableau et
bulletin dé la Bourse. — Dernière heure.
SOUS L'ANCIEN RÉGIME
r " *■ ii
On l'a vu, deux évêques' seule
ment résistèrent au roi; lorsqu'il lui
plut de généraliser la régale par
un acte de brigandage^ comme l'a
dit Joseph de Maistre. Ici nous
abordons un autre; terrain. La ques
tion devient plus grave encore. Il
s'agit maintenant du péril, où se
trouvèrent les intérêts spirituels de
l'Eglise. On doit obéir sajis discerne
ment, déclarait Louis XIV ( Instruc-
tionspour le Daùphin), et il étendait
cette règle aux questions ' religieu
ses: «'Lfe roi,-dans la pratique, »
pouvait écrire Fénelon, « est plus
-chef de l'Eglièe" que lè Pape en
France . » L'archevêque' de Carribrài
ne disait rien de trop. Il rie trom
pait pas ses lecteurs , comîrie nous
en accusent' lès feuilles qui nous
obligent à leur opposer des faits
douloureux.
Le brigandage commis par Louis
XIV devait avoir de déplorables
conséquences. Innocent XI protesta
énergiquemer^t. Mais il n'eut point
■ à lutter Contre le roi et les légistes
seuls ; l'assemblée, des évêques se
Ïirononça aussi pour l'extension de
a régale, puisque tel était le bon
plaisir du souverain. Les prélats
« poussèrent l'adulation et lai, fai
blesse », dit Rohrbacher, jusqu'à
proclamer que rien ne serait capa
ble de les séparer de Louis XIV,
ajoutant- qu'iZs voulaient qûé toute
la terre fût informée de leurs dispo
sitions à cet égard. Ils invitaient le
Saint-Père à suivre le mouvement
de sa bonté dans une occasion où il
n'était pas permis d'employer le cou
rage. - • •
Innocent XI leur reproche de se
montrer « pusillanimes». Ce blâme
trop juste les irrite. Ils déclarent au
Souverain Pontife que son langage
répond mal à la dignité d'un si grand
nom, et qu'iZs en rougissent pour
ceux qui Vont inspiré. Ils considè
rent, d'aîllëurs, que le bref .du Pape
est nul par lui-même. On croit que
cette réponse, après un peu de ré
flexion, ne. fut point envoyée à
Rome. Mais la lettre d'Innocent XI
n'eh resta pas moins sans efficacité.
Le corps épiscopàl ne se permit
d'adresser aucune représentation '
au roi. Joseph de Maistre lei cons
tate et dit qu'une telle- conduite
« embarrasse même la plus ardente !
envie d'excuser». Voilà quelle Sujé-,
tion Louis XIV faisait peser sur I»
clergé de France. Et le clergé trou- ;
vaitnaturel qu'il en fût ainsi.
0i, cè n'était là qu'un début.
Voyant dans ces bonnes disposi
tions les prélats réunis par son or- ?
dre, le roi leur commanda de trai-,
ter la question de l'autorité du
Pape. Il faut dôriner une leçon.au!
Saint-Père;' disaient les • courtisans.
L'assemblée obéit, ét rédigea la Dé
claration de 1682. Quand • nous 1 em
ployons le verbe rédiger, nous avons
tort; le verbe transcrire convien
drait-mieux. Il y a quelque chose
d'encore plus déplorable, en effet,
que la Déclaration elle-même, c'est
comment elle fut obtenue. On peut
dire que Colbert la dicta. Ecoutons
Rohrbacher : -
En déux mots, des évêques, piquée de
ce que le Pape n'éprouvait pas la fai
blesse avec laquelle ils avaient, au mé-
{iris du serment de leur sacre, abandonné
és droits de leurs Eglises et violé ainsi
le douzième canon du concile œcuméni
que de Lyon, s'assemblent par ordre du
roi, traite lit; par ordre du roi, la* ques
tion de l'autorité du Pape, la décident
promptement par "ordre dù toi, èt rédi
gent en latin quatre propositions odieu
ses doiit le ministre Golbert était le véri
table auteur. Voilà; d'après le récit de
Fleury et de Bossuet, comment fut faite
la Déclaration de 1682.
Joseph de Maistre n'est pas moins
affirmâtif. Il s'exprime en des ter-,
'mës ■ ' • ' ■
Colbertfutle premier moteur de cette
malheureuse résolution. Ce fut lui qui
détermina Louis XIV. Il fut le véritable
auteur des quatre propositions, et les
courtisans^ en camail qui les écrivirent ne
furent àù fond que ses secrétaires.
On est heureux de pouvoir dire
qu'il y eut des résistances'. La Sor-
bonne refusa d'enregistrer la", Dé-
daràtiôn.' Màis le ! Parlement . n'en
tendait pas que la Sôrbônrçese.pçr-;
mît de aonnér au.pouvoir civil des
Aeçons d& catéchisme. Il se. fit ap
porter.- les registres, de cette com
pagnie et commanda qu'on y- trans
crivît les quatre articles. La Sor-
bonne se soumit. E ;
C'est avec ardeur, stir cé terrain,
&tiè lé Paï'l'éinè'nt ; i àécohdRit : .le. roi.«
Innocent XI défendait les drojits de
l'Eglisè.' L6ùijg' ; XlV nommant : àù^
évêchés vacants'des ecclésiastiques
partisans de la Déclàration, le Pape
leur refusait les huilés d'învesti-
.tiiré. Trerite einq diocèses furent
sans. pasteurs. Sur ces entrefaites^
rambassadeiir Lavardin, excom
munié, ayant été recevoir les sa
crements, la veille, de Noël, à Saint-
Louis defc Français, le Souverain
Pontife déclara cette églisé inter
dite. Uhe telle audace indigna le
Parlement de Paris, qui résolut de
la r*épriinèr sévèrement. Mais lais-
sons de nouveau la parole à Rohr-!
bâcher : ; .
M. dé Harlày, procureur général, in
terjeta, le 22 janvier 1688, appel comme
d'abus, non seulement de la Bfentence du
cardinal-vicaire, mais encore de la huile
du Pape. Il n'admettait pas que celui-ci
eût jamaisle droit de comprendre dans ses
excommunications les ambassadeurs que
le roi-voudrait bien lui envoyer: Il attri
buait cette aberration d'esprit du Souve
rain Pontife à l'âge, qui avait obscurci
ses facultés. L'avocat général Talon fut
plus violent encore ^ il ne se contenta» pas
^d'insinuer que le Souverain Pontife rado
tait, Uvoulut le faire passer pour héré
tique...
Louis XIV et le Parlement conti
nuaient de rencontrer des appuis zé-
lés'dans l'épiscopat, dans le clergé.
C'èst Eohroàcher qui nous rap
pelle encore ce que voici : .
L'archevêque de Paris avait assemblé
les évêques qui se trouvaient dans la
capitale, les curés, letf chefs des chapi
tres et des communautés (Rohrbacher
emploie ce mot, que va dire la feuille
oblique?) et il les avait harangués pour
justifier la conduite du gouvernement
envers la cour de Rome. L'Université de
Paris avait, comme le Parlement, inter
jeté appel au concile universel ; tout le
clergé de France semblait prendre part
avec un même zèle à la. lutte contre le
chef de l'Eglise... Le 7. octobre 1688, les
troupes françaises s'ërtipârèrent du com-
tat d'Avignon...' > '
', jl est certain, écrit Joseph de
Maistre, que dans, le temps on crai
gnit un schisme;.. La catastrophe
se fût produite, si Louis XIV l'a
vait'voulu. A son honneur, on peut
dire qu'il ne : le voulut pas. Mais il
ne s'en fallut gùère, et le germe
était jeté, qui devait, cent ans plus
tard, après mille ravages,, produire
1 a. Constitution civile de 1790.
. Bossuet lui-même eut bientôt à
se repentir d'avoir montré, dans
,1'affaire.de la régale et dans celle
de la Déclaration, une funeste com
plaisance'. Lorsque, le chef de la
magistrature en vint jusqu'à lui im
poser;^ examinateur, iusqu.'à lui
refuser la permission (l'imprimer,
si l'attestation de l'examinateur n e-
tâit placée à la première page du
livre, il s'écriait avec angoisse :
Il est biéri extraordinaire que, pour
exercer notxe. ministère, il nous faille
prendre l'attache de M; le chancelier, et
achever de mettre l*Eglise sous le joug.
Poufr moi, j'y-mettrais la tête.
Le, mot de Joseph de Maistre est
terrible, mais est-il trop fort, c[uand
il parle de la. dégradation de Vepisco-
pat?« Les laïques dominent les évê-
ues », « lès< appellations. comme
'abus ont achevé' de ruiner là juri-
3
diction ecclésiastique »•, disent Fé- >
' îry. C'
point suspect' d'une 1 hostilité trop
nélon et Fleury. C'est ce dernier,
vive contre le gallicanisme, qui for
mulé encore ces plaintes :
On 6te aux évêques la connaissance de
ce qûî leur importe le plus, le choix des
offîcifers dignes de servir l'Eglise sous
eux.et la fidèle administration de son re
venu, et ils ont souvent là doiilëur de
voir, sans le pouvdir empêcher, ùn prê
tre ' iiibapàble et iiidigne se mettre en
possession d'une cure considérable, parce
qu'il est plus habile plaideur qu'un au-
fre, ce qui devrait l'en exclure.
En iiiême temps, l'épiscopat de
vient le privilège presque exclusif
de la noblesse. On doit reconnaître,
avec Rohrbacher,. que « les évêques
plébéiens sont aussi rares que les
officiers de fortune et sont consi
dérés à peu près du même œil dans
leur corporation ». De tout cela,
que résulte-t-il ? Le peuple fidèle
pèrd, de plus en plus, les senti
ments de vénération et d'amour qu'il
avait pour les pasteurs des dio
cèses. Fénélon le constate avec dou
leur, et il écrit à l'évêque d'Arras :
Il ne faut pas que les évêques s'abu
sent sur leur autorité : elle est" Bi'affaiblie
qu'à peine en reste-t-il' des traces dans
I esprit des peuples. On est accoutumé à
nous regarder comme des hommes ri
ches et d'un rang distingué, qui donnent
des bénédictions, des dispenses et des
indulgences ; mais l'autorité qui vient de
la confiance, de la vénération, de la do
cilité et de la persuasion des peuples,
est presque effacée.
Pour . terminer ce ; tàbleau de la
situation faite, à l'Eglise sous»Louis
XIV, donnons, ce dernier extrait de
Joseph de Maistre : ;
L'Eglise gallicane, emmaillotée par
les Parlements, cônservait-elle un seul
mouvement libre ? Elle vantait ses droits,
ses privilèges, ses libertés ; et les magis
trats, avec leurs cas royaux, leurs posses-
soires et leurs appels comme d^mus, ne
lui avaient laissé que le droit de faire le
saint chrême et l'eau bénite.
Comme Louis Veuillot a raison
de s'écrier que là Révolution a
sauvé l'Eglise de France d'un grand
péril 1 Comme il a raison, après
avoir dit : « le roi jeta, jusque dans
l'Eglise, qui dut céder, des courti
sans déjà scandaleux « dans le
monde », d'appeler Louis XIV le
précurseur de 1789, et même de
1793 !
,Le Moniteur n'admettra point
l'autorité du grand publiciste chré
tien. Qu'il écoute alors Frayssi-
rious, en qui l'on ne rencontre pas
un ennemi du gallicanisme. L'é
vêque d'Hermopolis déclare, dans
sa, préface des Vrais principes, , que
le seul moyen qu'ait eu Pie VII de
ressusciter l'Eglise de France a été
de\violer complètement les maxi
mes gallicanes. Si le Pape, dit-il,
n'avait point, par un chef-d'œuvre
.de sagesse,.foulé aux pieds nos usa
ges, la religion était perdue, défini
tivement.
A tout cela, on répond que Louis
XIV était un prince chrétien. Louis
XVj aussi; Ce fut tant mieux pour
eux, nous ne voudrions certes point
en disconvenir. On peut toujours
espérer qu'un prince chrétien s'ar
rêtera à temps. La garantie n'est
pas infaillible, Henri VIII l'a dé
menti e; mais cependant c'en est
une, l'histoire de France le prouve.
Oserons-nous faire observer que
c'est un point à débattre, de savoir
s'il vaut mieux ou non, pour l'Egli
se, que les usurpations contre elle
soient dirigées par Tjn prince chré
tien ou pàr ùn gouvernement qui ne
l'est pas..Sous un certain rapport,
le péril est plus grand avec le
prince. Louis XIV faillit nous con
duire au schisme. On peut défier
MM. Faure et Mélinej ou M. Bour
geois, de nous mettre en si dange
reuse extrémité. L'assujétissement,
qui abaissé, n'est-il pas pire que
la persécution? Enfin, tandis que
noiîs sommes, en veine , d'audace,
nous ajouterons ceci : Assurément,
il est toujours bien d'aller à la
messe. Le fruit qu'on en retiré,
l'exemple qu'on donne restent bons,
malgré tout: Pourtant il n'est peut-
être pas impôssibl# de soutenir que
Louis XIV, quand il sé' montrait
au service divin avec Mme de Mon-
tespan, et plus tard avec ses bâ
tards, Adultérin^ entourés d'hon
neurs, ne faisait guère moins de
mal à l'Eglise, d'une autre façon,
que le président de la République
en n r y a^sistànt pas. , .
Les provocations réitérées de
certâines feuilles, nous accusant de
■tromper nos lecteurs lorsque nous
rappelons certaines pratiques de
l'ancien régime, nous ont forcé d'é
tablir notre justification; En même
temps, qu'avonsrJtious prouvé? Que
la théorie du bloc est toujours
fausse. On dit que - la république
est essentiellement hostile à l'E
glise; que là monarchio- lui est es
sentiellement favorable. C'est une
profonde erreur. La monarchie,
on l'a vu,, a mis l'Eglise, en
France, à. l'extrême bord. de.la rui
ne. Or, le prétendant actuel, qui
se réclame à la fois de. Louis XIV
et de Louis-Philippe, se montre
attaché aux maximes gallicanes.
II ne nous es.t. donc nullement dé
montré qu'il ' rétablirait la religion
dans' ses droits et lui laisserait la
liberté. Par conséquent, nous fe
rions peut-être, à tous points de
vue, un', marché de dupes en tra
vaillant, à Une restauration monar-
chique, fortement improbable. Con
tre une législation oaieûse, infâme,
le plus sûr est de lutter directement
sur le terrain constitutionnel.
Pierre Veuillot.
'BULLETIN ""
Le voyage du président de la Répu
blique se continue sans incident nota
ble. Oh en verra plus loin les détails.
M. Méline est parti hier au soir pour
rentrer à, Paris. M. Félix Faure a quitté
Nantes ce matin pour descendre la Loire
sur l'aviso i'Elan.
Aujourd'hui, aura lieu, dans les pa
lais archiépiscopaux de Lyon, de Rouen
et de Rennes, la remise par les ablégats
de lacalotte cardinalice à NN.SS. > Coul-
lié, Sourrieu et Labouré.
La question du métropolitain est sur le
point d'être tranchée : la sous-commis
sion du conseil municipal de Paris et les
représentants de la compagnie de trac
tion du Creusot sont enfin tombés d'ac
cord. • ' - '
Le conseil municipal va être convoqué
pour statuer définitivement.
Aujourd'hui, à la faculté de droit de
Paris, s'ouvre le premier congrès des
professeurs de l'Université.
Du théâtre de la guerre turco-grecque,
on n'a encore aucune nouvelle très signi
ficative.
Hier matin, Guillaume II est arrivé à
Vienne; la réception que lui a faite
l'empereur d'Autriche semble avoir été
particulièrement cordiale.
Aujourd'hui a lieu la grande revue
qui est le prétexte de la visite du souve
rain allemand.
Çà et là
' FUSAINS '
Des historiettes de tous les jours, des
incidents de la vie moyenne, des faits-
diverSj est-ee que cela peut faire un vo
lume'? Il y paraît, d'après celui-ci,. qui
eSt intitulé Fusains (1). L'auteur a réuni
un nombre considérable d'observations
prises sur le vif et de réflexions notées
de temps en temps, un peu à la manière
d'une méditation. On s'imagine que pour
philosopher il est nécessaire de s.'enion-
cer dans les sujets les plus compliqués;
mais,en réalité, le spectacle de la rue, du
salon, du restaurant, offre beaucoup de
ressources. Le tout est d'avoir le don de
l'attention et aussi de l'utiliser. Avec un
peu d'exercice, l'esprit gagne vite en sa
gacité et en vigueur.
Les nombreux chapitres que M. André
Bessan a réunis sous le titre Fusains
sont très variés. Pourtant la note comi-
que, la note sentimentale et les accents
du prosélytisme s'y mélangent sans dé
saccord. Une pensée élevée donne l'u
nité à des fragments si divers et en fait
une œuvre de foi.
' - Cette foi s'exprime avec une ardeur
touchante qui a le charme de la jeunesse.
On sent palpiter une âme généreuse
éprise des grandes choses. Les souve
nirs des temps héroïques reparaissent
souvent à travers les récits ou les ta
bleaux que M.André Besson a empruntés
à la réalité contemporaine, souvent pi
toyable. Est-il étonnant que l'auteur s'a
bandonne parfois à certains excès d'in
transigeance ? Mieux vaut pécher de
cette manière que de l'autre. On est d'ail
leurs bien plus sûr de se corriger, et,
dans un prochain avenir, de considérer
les choses tout à fait au vrai point de vue.
Il est bon d'avoir une provision d'enthou
siasme pour se mettre en route. Les sur
prises et les fatigues en absorberont
assez.
Il y a aussi de la poésie dans ce joli vo
lume, non seulement de la poésie en vers
comme ceux qui composent la préface,
mais aussi des élévations écrites en prose
harmonieuse. Même de nombreux détails
de moeurs familières sont tracés avec
art; et le dialogue de tels ou tels bour
geois, de tels ou tels paysans, imité de
la langue courante, garde le cachet du
bon style.
Eugène Tavernier.
^—■ - ■ ■ ■- - • ♦ , -,^1-
. LE PACTE DE BORDEAUX
Le directeur du Nouvelliste de
Bordeaux nous envoie encore une
longue lettre au sujet des détails
que nous avons empruntés à la
correspondance la Politique ifou-
velle. ,
Nous avons cité cette correspon
dance. C'est donc à éile que les ré
clamations ou les réctifications,
s'il y a lieu, doivent, être' adres
sées. '
AFFAIRÉS D'ORIENT
La vigoureuse résistance que les
Grecs opposent à la marche des
Turcs, en Thessalie, n'a pas encore
permis à ceux-ci d'occuper Larisse,
ainsi que les dépêches l'annonçaient
hier ; on dit même qu'une, grande
bataille est imminente, en avant de
cette ville. En résumé les nouvelles
d'aujourd'hui ne nous apprennent
rien' d'important sur les faits et
gestes des belligérants.
Au point de vue diplomatique
nous devons signaler la circulaire
que le ministre des affaires étran
gères de Russie vient d'adresser
aux autres membres du concert
européen! Dans cette circulaire, le
comte de Mouravief propose l'adop
tion d'une ligne de conduite com
mune, ayant pour objet : 1° le
maintien du statu quo en Crète, en
attendant que l'organisation de
l'autonomie soit possible; 2° l'ob
servation stricte de la neutralité,
tant que l'un des belligérants
n'aura pas recours à la médiation
de l'Europe.
. Ce programme,que les puissances
{ 1 ) Fusains, [par M. André Besson. Mai
son de la Bonne presse, rue François-Î or , 8.
nous semblent avoir déjà mis en
pratique spontanément, ne rencon
trerait d'objection, suivant certai
nes informations* que de la pârtde
l'Angleterre. Toutefois on ne peut
encore, rien affirmer sur ce point, la
diplomatie anglaise étant, au moins
en apparence, entrée en vacances
avec lord Salisbury, qui continue de
résider tranquillement dans lé midi
"de la France.
F. L.
LE « CRIME » DU COLONEL
On annonce que M. le colonel
Froment vient de demander sa mise
à la'retraite.
On n'a pas oublié que M. le colo
nel Froment avait commis le crime,
impardonnable aux yeux • des radi
caux, de prévenir ses soldats, par
la voie de l'ordre du jour, que des
conférences religieuses étaient don
nées à le,urintention; même, il avait
poussé l'impudence au point de les
avertir que ceux qui voudraient les
entendre auraient permission de le
faire. Accorder cette liberté, c'était
évidemment de la tyrannie.
En agissant ainsi, M. le colonel
Froment ne faisait que suivre un
usage établi par ses prédécesseurs
et, notamment,par un israélite,M.le
colonel Wolf. N 'importe ! Effrayée
par les criailleries de la secte et par
quelques violences de journaux,
l'autorité militaire eut l'indigne
faiblesse d'infliger au colonel Fro
ment une disgrâce, une sorte de
blâme, en le déplaçant.
Les radicaux, point satisfaits en
core ont continué leur campagne et
voici que M, le colonel Froment;
injurié par de misérables sectaires,
..— non moins ennemis de l'armée
que de la religion, — et ne ren
contrant pas, d'autre part, chez ses
chefs, l'appui àuquel il aurait eu
droit, en est réduit à demander sa
mise à la retraite...
La moralité de cet incident est
inquiétante autant que fâcheuse.
Si les radicaux, enhardis par cette
victoire, engagent des campagnes
contre tant d'officiers excellents,
qui usent de leur droit de se mon
trer chrétiens, ne voit-on pas que
leurs menées pourront avoir contre
la discipline une influence déplo
rable ? Ét ne voit-on pas aussi qu'on
les a excités à prenare une telle at
titude, en cédant devant eux une
première fois ?
A PROPOS DE M. DE FALLOUX
M. le comte G. de Blois, sénateur
de Maine-et-Loire, nous adresse la
lettr# suivante : .
La Rochejacquelin, 19 avril.
Monsieur le directeur,
Je ne lis pas régulièrement l'Uni
vers.
G'est une infériorité que j'ai sur M. de
Falloux qai ne se serait pas privé, pour
un empire, de cette récréation quoti
dienne.
Voilà pourquoi je n'ai qu'aujourd'hui
seulement le numéro du 16 avril conte
nant, sur la suppression et la résurrec
tion de l'Univers, unarticle où vous avez
éprouvé le besoin d'écrire que M. de Fal-
loux était un intrigant politique de belle
attitude et d'esprit bas. Gela, parce qu'il
a toujours répété que la suppression de
l'Univers était une suppression... pour
rire.
Je n'ai pas, bien entendu, la préten
tion de vous convaincre personnellement,
mais je compte, qu'ayant fort gratuite
ment, le 16 avril 1897, attaqué la mé
moire de M. de Falloux, votre loyauté
permettra à son héritier de fournir à vos
lecteurs au moins une raison de l'opinion
qui vous révolte si profondément. Ce
sera, d'ailleurs; très bref. Des faits et une
question.
Le Moniteur universel, alors journal
officiel de l'empire, publiait; à la date du
18février 1852, le texte d'un décret orga
nique sur la presse, daté de la veille et
signé Louis-Napeléon.
On y peut lire à l'article premier : « Au
cun journal ou écrit périodique traitant
de matières politiques ou d'économie so
ciale... ne pourra être créé ou publié sans
l'autorisation préalable du gouverne
ment. L'autorisation préalable du gou
vernement sera pareillement nécessaire,
à raison de tous changements opérés ,
dans la personne des gérants, rédac-s
teurs en chef, propriétaire^ ou" adminis
trateurs d'un journal. »
Et à l'article 20 du chapitre III : « Si
la publication d'un journal ou écrit pé
riodique frappé de suppression ou de
suspension administrative ou judiciaire,
est continuée sous un même titre ou sous
un titre déguisé, les auteurs, gérants ou
imprimeurs seront condamnés à la peine
d'un mois à deux d'emprisonnement et
solidairefnent à une amende de 500 à
3,000 francs par chaqne numéro ou
feuille publié en contravention. »
Il est inutile, je pense, d'insister sur la
façon draconienne dont ces prescriptions
furent appliquées par le second empire
jusqu'en 1867. .
Comment donc se fait-il que l'Univers
étant. supprimé le 29 janvier 1860, le
Monde ait pu paraître très peu de temps
après, avec un titre à peine déguisé, chez
le même imprimeur, avec lè même gé- '
rant, les mêmes rédacteurs, sauf
MM. Veuillot? s
Le cas est bien fait, il me semble, pour
étonner. Il est unique en cette espèce —
M. de Falloux ne le comprenait pas, -r- je
ne le comprends pas non plus.
C'est tout ce que je voulais dire à vos
lecteurs d'aujourd'hui qui ne connaissent
guère, sans doute, de cette question que
vos appréciations très naturellement par
tiales.
J'ose espérer, monsieur, que, quoique
démocrate, vous serez assez chrétien,
c'est-à-dire ami de la justice, pour leur
communiquer ces documents et je vous
prie d'agréer l'expression de mes senti
ments très distingués,
Comte Georges de Blois,
3, cité Vaneau, Paris.
M. de Blois cherche lé trait. C'est
uné ambition .permise à tout Je
monde et dont peut s'accommeder
la gravité sénatoriale. Seulement
dans la polémique, pour lé trouver
à point et le bien lancer, il èst utile
de connaître son terrain. M. de Blois
ne connaît pas le sien.
Il est sûr, et nous l'avons rappelé
assez souvent pour, que nul n'en
ignore; qu'à l' Univers succéda d'une
certaine, façon le Monde. Voici, en
deux mots, comment la' chose se
fit : M: Taconet, propriétaire de
l'Universi fut autorisé à acheter un
journal mourant, la Voix de la Vé
rité, et put servir à ses abonnés ce
journal qu'une seconde autorisa
tion lui permit d'intituler le Monde.
L'opération, lui coûta force démar
ches et une cinquantaine de mille
francs. A cette lourde amende s'a
jouta la défense, sous peine de
mort, de laisser entrer au Monde
Louis Veuillot et même moi.
Etait-ee là une suppression pour
rire en ce qui touchait M. Taconet,
rudement atteint dans sa caisse, et
M. Louis Veuillot, exclu de la
presse? Et il y en eut pour sept ans !
C'était pour rire. Une plaisanterie
plus courte nous eût paru meil
leure.
Ce n'est pas tout: le Monde reçut
l'avis très comminatoire d'être très
sage s'il voulait durer. Son pro
priétaire désirant ne pas mourir
deux fois, la sagesse ne manr
ua point. Si M. de Blois en
oute, qu'il compare les derniers
temps de l'Univers aux premiers
temps du Monde et il reconnaîtra
que^ l'Univers était bien réellement
supprimé. Il y avait encore un jour
nal catholique, il. n'y avait plus le
journal de combat. C'était ce que
voulait le gouvernement. Il ne te
nait point à ruiner M. Taconet. Il
lui suffisait d'éteindre des batteries
qui le gênaient, de faire disparaître
un titre qui par lui seul était une
force et de réduire au silence le
journaliste qui avait créé cette
force.
Or, M. de Falloux, qui connais
sait très bien la situation, disait ou
insinuait, non pas que la suppres
sion de l'Univers avait été un jeu
parce qu'il revivait dans le Monde,
mais qu'il y avait eu entente cordiale
entre Napoléon III et Louis Veuillot
pour que l'Univers, qui ne* pouvait
cesser d'être très militant, dispa
rût, ce qui faciliterait les entre
prises de l'empire contre le pou
voir temporel au Pape. Il avait un
papier qui prouvait cela; il a même
un jour, montré ce papier... fà un
aveugle, Mgr de Ségur. Puisque
M. de Blois a hérité de ce gentil
homme, il doit avoir ce même papier.
Nous le prions de le publier.
Voilà comment M. de Falloux
entendait la polémique. J'ai dit
qu'il y avait là le "signé et même la
preuve d'un esprit bas. Je le main
tiens.
Je maintiens aussi le mot « intri
ant ». M. dé Falloùx, qui avait de
'attitude, du talent, quelque sa
voir, a gâté ces dons par la passion
de l'habileté poussée jusqu'à l'in
trigue.
En parlant airtài je n'apprends
rien à M-" de Blois sur son testa
teur. S'il n'en connaît pas bien tous
les actes il ne peut en ignorer la
réputation. Je mettrais, je l'avoue,
quelque plaisir à lui prouver que
cette réputation, incontestablement
mauvaise, était absolument méri
tée. Royaliste, M. de Falloux par
ses manoeuvres a encouru la colere
et le dédain du roi ; catholique, il a
tourné les enseignements' au Pape
et en a été repris. Oui, estait un in
trigant.
Je félicite M. de Blois d'avoir hé
rité de la belle fortune de ce louche
politicien .et jei'èngage à ne pas se
charger^de sa mémoire. Il y dépen
serait sans succès ses petites iro
nies. Et puis qu'il ne manque plus
à ses devoirs d'héritier en raillant
les catholiques d'aller à là démocra
tie. Il fut un temps où M. de Fal
loux se déclara démocrate et enfla
sa faible voix pour acclamer l'in
surrection et saluer d'un cœur ra
dieux la république. M. de. Blois
l'aurait-il oublié ?
De même qu'on ne doit pas hé
riter des gens qu'on assassine, on
ne doit pas railler ceux dont on a
hérité et qui par leur héritage vous
ont fait sénateur.
Eugène Veuillot.
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