Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-04-07
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 07 avril 1897 07 avril 1897
Description : 1897/04/07 (Numéro 10672). 1897/04/07 (Numéro 10672).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7094530
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mercredi ÏÏ Avril 1897
Edition quotidienne. >— 10,672
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Mercredi 7 Avril 1897
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BT7HEAÏ7X : Paris, rne Cassette, îiï
Qn s'ahonne à Rome, place du Gesù, 8
LE MONDE
jkes abonnements partent des l 8 ' et 18 fie chaque m«5f
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
. ANNONCES - '
£ÎM. LAGRANGE, CERF et G 1 ", 6, place de la Bourse ;
PARIS, 6 AVRIL 1897
SOMMAIRE
Après l'école. ... .*.. F rançois V euilloï 1 .
Une lettre de Bf.fa-
. . • P ierre V euillot.
Çà et là : Choses du "
'^Pacifique ,... G. d' A zambuja.
A la Chambre G. de T àiors.
Au Sénat........... J. M.
L©- pacte de . Bor
deaux E ugène T avernier.
Correspondance ro-
["rp,ajfnè .1.......... ***. •
Bulletin. — La taxe d'abonnement. — L'af
faire Arton. — Informations politiques
et parlementaires. — A' l'Hôtel de Ville.
—. Chronique. —. La question ouvrière.
— Les affaires de Crète. — Dépêches de
l'étranger. — ]\jg r Dupont des Loges. —•
Chronique religieuse. — Chambre des
députés. — Nécrologie. — Echos . de
jpartout. —. Lettres, sciences et arts. —
Cercle catholique des étudiants. •— Tri
bunaux.— Nouvelles diverses. — Calen
drier. Tableau et bulletin delà Bourse.
— Dernière heure.
APRÈS k'ÉCOLE
- Les Ligueurs de l'enseignement
■et M; Léon Bourgeois, leur nouveau
conducteur^ organisent partout,
avec une hâte fiévreuse, un puis
sant ^ mouvement de' réunions et de
conférences, en vue de créer l'en
seignement libre-penseur ét l'édu-
çatioh. laïque « après l'école ». Ils
on.ls fini par découvrir, il y a peu
d'années, que l'école obligatoire et
athée, à laquelle ils ayaient consa
cré tant de soins et qu'ils avaien;
présentée comme un incomparable
moyen, unique et suffisant, de pré
parer les . nouvelles générations,
n'aboutissait gaèré qu'à encombrer
de déclassés et de vagabonds le
pavé des grandes villes et la pous
sière des grandps routes, — sans
parler des prisons où s'enfour
nent chaque année, depuis les lois
scolaires, un nombre toujours plus
fort et plus effrayant d'adolescents
coupables. Sans doute, ils n'ont pas
avoué ce lamentable échec; ils ont
jnêmç énergiquement protesté, la
"Voix vibrante, avec des accents indi
gnés, contre la mauvaise foi des
cléricaux, qui ne craignaient pas de
rejeter sur l'école sans Dieu des res
ponsabilités que celle-ci n'avait
point encourues. Mais, néanmoins,
entre eux, ils se sont dit : « Il faut
faire quelque chose ; il faut ajouter
d'autres moyens d'action, plus effi
caces et plus vigoureux, aux trop
faibles moyens que nous fournit
l'école. » , Et, c'est alors, qu'ils ont
inventé la prolongation de l'ensei
gnement et de l'éducation, pendant
}es années, périlleuses pour l'esprit
et le cœur, qui séparent l'école et
le régiment : c'est alors qu'ils ont
inventé le patronage et toutes les
œuvres qui en rayonnent.
L'idée est très juste, assurément;
et s'il y a lieu d'être surpris, ce
n'est "point de voir que les libres-
penlseurs l'aient découverte et s'ef-
îorcent de la pratiquer, c'est de
constater qu'ils aient mis un temps
si long à trouver une idée si simple.
Il èst de toute évidence, en effet*
gue si l'enfant, au sortir de l'école,
à peine imprégné des leçons qu'il a
reçues, est abandonné à lui-même
;ôu plutôt à sés capiarades plus
grands, il oubliera bien vite ensei
gnements et conseils et laissera
pétrir son âme eneorefacile etjeune
entre les mains les plus grossières
et les plus dangereuses. Ce n'est
pas à douze ans qu'un esprit peut
e|re armé de résistance et d'éner-
jgie contre les influences mauvaises,
avoir sa volonté propre et sés opi
nions arrêtées. M. Léon Bourgeois
et" ses ligueurs; ' en principe, ont
donc raison; mais en' pratique, on
doit se demander si une éducation,
{irivée de base morale, amputée de
'éssehtïelle idée du devoir et ne
fournissant à l'âme aucun point d'ap
pui en dehors d'elle-meme, aura
sur les adolescents un plus éner
gique et plus sérieux effet que sur
îçs pe/tits écoliers,. Et ç'est cien là
le vicie ràdicaï dé tous les efforts
accumules par la Ligue de l'ensei-
gnement.Cettê Ligue est enflée de la
hobleamlpitioij de former des; vo-
lontës, dé forcer des caractères ; " et
elle ne sait point quel ressort
mettre au cœur de ces adolescents
cÇônt ellç' vei$ ' fàire des hommes.
Or, le ressort d'une idées, (l'une
croyance et, disons le mot, d'une
foi, est aussi nécessaire à la vo
lonté, qi^e le petit ressort d'acier
est indispensable à là montre. Et
c'est pourquoi nous pouvons être
certains que le mouvement « après
l'école » aboutira, dans un nombre
d'années plus ou moins grand, mai-
gré toute l'ardeur et tout l'acharne
ment qu'on met à le promouvoir, à
ûn échec aussi piteux que celui dont
est menacée l'école elle-même'.
. D'ailleurs, si le ressort est absent,
qui dresserait et ferait jaillir les
jeunes volontés qu'on veut mettre
en action, il manque (également,
celui qui donnerait aux éducateurs
cette longue patience et ce zèle
éclairé, persévérant, sans lesquels |
ne pourra rien. A l'oeuvre qy.'ori
veut entreprendre, il faut, pour
ainsi dire, une fondation de mille
dévouements obscurs, comme il
faut un amas de solides moellons
sous les monuments bâtis dans uii
terrain friable et mou ; il y faut,
surtout/un esprit apôtre; et, à part
quelques exceptions, qui ne pour
ront que défaillir à supporter le
poids de l'œuvre tout entière, où
ira-t-on recruter, puisqu'on se
ferme l'Eglise, une si grande armée
de pareils éducateurs ?
Ces considérations, si justes
qu'elles soient, ne nous permettent j
pas cependant de dédaigner le mou-
vement « après l'école », organisé
? taries Ligueurs de M. Bourgeois,
mpuissants à terminer l'œuvre de
bien qu'ils affichent pour but a
leurs efforts, ils sauront, si nous
n'y prenons garde, accomplir une
œuvre de mal. Ils pourront nous
arracher bien des adolescents, que
l'influence religieuse aurait saisis
au sortir de l'école laïque et trans
formés, d'écoliers ignorants de l'E- I
flise et prêts à tomber aux mains '
es ^ libres-penseurs, en solides
chrétiens, ils pourront, parmi ces
jeunes gens qui viendront les en
tendre et s'inspirer de leurs néfas
tes leçons, découvrir des esprits
intelligents, qu'ils ouvriront à l'a
théisme et dont ils feront des sou
tiens de leur cause abominable. Il
importe donc de yeiller, de soute
nir plus ardemment que jamais nos
œuvres de patronage et de les dé
velopper, et peut-être aussi d'en
élargir et d'en fortifier l'esprit.
Notre collaborateur et ami, M.
Max Turmann, a émis, dans la
Quinzaine, à ce sujet, des réflexions
et présenté des vues, qui pourront
paraître, à d'aucuns, trop hardies,
mais qui nous semblent, à nous,
très sensées ; il a soutenu des idées
qui sont de nature à attirer l'atten
tion et d'importance à provoquer
les méditations de tous les direc
teurs et de tous les amis des patro
nages. C'est dans une série d'arti
cles documentés et intéressants
sur leur histoire en ce temps-ci,
que M. Turmann a dévoloppé son
opinion sur « les patronages de de
main ». Disons en passant que, dans
ce travail, il a réduit à néant, sans
la discuter, par le simple exposé des
faits, la ridicule prétention dont se
targuent les Ligueurs de l'enseigne
ment et autres éducateurs sans Dieu,
quand ils croient déoouvrir et in
tenter les œuvres qui prolongent
jusqu'à vingt ans l'insuffisante ac
tion de l'école. Sous les efforts tan
tôt séparés, tantôt réunis, de zélés
catholiques, les patronages ont pris
dans ce siècle, un essor merveil
leux. Ils n'existaient pas encore au
lendemain de la Révolution ; ils se
montraient à peine, çà et là, sous la
monarchie de Juillet; ils couvrent
maintenant la France entière. Sans
parler des trente mille adolescents
sortis des écoles des Frères, que
leurs anciens maîtres reçoivent
dans les patronages qu'ils ont fon
dés pour eux, on compte aujour
d'hui, répandus à travers le pays,
près de trois mille patronages ou
verts aux enfants des écoles laï
ques. C'est un admirable résultat,
qui remplit le cœur d'espérance et
ermet de regarder tranquillement
avenir.
Mais, pour lutter contre l'entre-
rise acharnée des éducateurs sans
ieu, M. Turmann estime, et avec
raison, qu'il faut donner un peu plu?
de nerf et de vigueur à 1'éaucation
que l'on distribue dans ces mille et
mille foyers de religion. En quel
ques-uns,— etnous en connaissons
des maîtres hardis et prévoyants
se sont déjà orientés dans cette
voie ;mais le plus grand nombre hé
site ou souvent même ignore, ou
parfois redoute et réagit. Du patro
nage,on a fait peut-êtreunpeu trop
exclusivement une œuvre de « pré
servation »; excellent dans une so
ciété religieuse,' un pareil système
est insuffisant, dangereux, dans
une démocratie devenue presquè
païenne, où le chrétien, 1 ouvrier
chrétien surtout, doit lutter cons
tamment contre son propre milieu,
Bour maintenir l'intégrité de sa foi.
i faut donc, au patronage, entre
prendre surtout une œuvre de « for
mation ». On s'attache iin peu trop
peut-être à préserver de tout dan
ger le cœur et l'esprit des adoles
cents qui demain seront des soldats
de l'Eglise : il faudrait s'efforcer"
plutôt de les endurcir au danger. On
doit éh un mot songer à former des
îonimes et des citoyens, sachant
eurs devoirs assurément, mais
aussi connaissant bien leurs droits,
qu'ils pourront mieux défendre. Et,
jour terminer par un mot de M,
Turmann qui nous paraît rendre
son idée d'une façon très çlaire et
rès heureuse, il serait plus à pro-
îos , dans notre temps, de former
« de solides gaillards » que de s'at-
arder à faire encore uniquement
« de bons jeunes gens. »:
François Veuillot.
VULLETI&Ç v
D'après certaines dépêches le blocus
du Pirée serait maintenant un fait ac
compli. Cette mesure suffira-t-elle à ga
rantir la paix européenne ?
Hier > à la Chambre, M. l'abbé Gayraud
a posé sa question à M. Darlan au sujet
de la suppression de traitement des
curés de Lannilis et de Pioudalmezeau.
Nous donnons ce grave incident d'à■
près le compte rendu officiel.
La Chambre s'est ensuite occupée de
diverses questions, parmi lesquelles l'in
terpellation de M. Vivianisur les abus de
la procédure secrète. Le ministère n'a
triomphé qu'à une faible majorité.
On parlait du départ des Chambres
pour ce soir ; mais il paraît difficile que
les vacances commencent aussi tôt ; les
uns disent que ce sera pour jeudi; les
autres pour samedi. Cette dernière date
paraît laplusvraisemblable.
Le Sénat a terminé hier le vote de la
loi sur les sucrés:
Aucun incident important pour le Pa
nama ; on annonce toujours de nouvelles
arrestations.
La nouvelle Chambre italienne s'est
réunia. hier.^.Qn trouvera aux. dépê
ches des détails sur cette rentrée.
UNE LETTRE DE M. FABRE
Et voici que le sénateur de TA-
veyrôn regrette presque de n'avoir
pas été ajourné une fois de plus!.
Il aurait pu produire, — c est du
moins ce qu'il croit, ■— un argument
nouveau à l'appui de sa thèse. De
cet argument, il eût tiré d'autres ef
fets d'éloquence, allongeant son
discours d'une large demi-heure
encore.
Hélas
la lettre du
Souverain
de Tou-
Univers sa-
précis où Je
Sénat repoussait, à une écrasante
majorité, l'ordre du jour de M. Fa-
bre contre l'ingérence étrangère
dans notre politique intérieure.
Déposer une nouvelle demande
d'interpellation, le sénateur anticlé
rical ne l'ose point. Ce n'est pas
qu'il craigne d'abuser. Mais il se
rait trop sûr, les vacances de Pâr
ques arrivant, d'être obligé d'atten
dre jusqu'à la fin de mai, sinon da
vantage.
Or il vient d'éprouver ce que l'on
souffre quand on est gros d'un dis
cours qui ne peut pas s'en aller.
Se revoir si vite dans ce douloureux
état, merci. Le journal remplacera
.donc la tribune. Et ce matin, l'E
clair publie une « lettre ouverte »
de M. FabreàM. Darlan.
Le sénateur de l'Aveyron débute
en ces termes :
F.
Monsieur le ministre, au moment
même où M. le président du conseil et
vous, vous contestiez au Sénat l'ingé
rence du Pape, l'Univers, qui est à Paris
le. Moniteur officiel de Rome, publiait
une lettre du Saint-Père à Mgr Mathieu,
confirmant les directions pontificales,
justifiant la stratégie du clergé républi-
canisé pour combattre plus efficacement
les lois de la République et morigénant
les hommes des anciens partis indociles
à sa tactique.
Le mandement qu'il comble d'éloges
comme l'écho fidèle de sa pensée est un
irrévérencieux manifeste où l'archevêque
de Toulouse revendique pour les prêtres
le droit de faire de la politique, censure
notre législation, prêche la révolte lé
gale contre les envahissements de César
et réclame la formation d'un parti catho
lique, avec force objurgations contre les
réfractaires'.
Je voudrais croire que, conformément
aux lois concordataires, cette lettre a été
préalablement mise sous vos yeux, et
cependant je ne puis le croirp.
M. Fabre s'interrompt ici pour
reproduire un fragment de la lettre
du Souverain Pontife. Il ajoute cette
réflexion
Si les réfractaires n'entendent
as ce langage, c'est qu'ils auront
e parti pris de se boucher les
oreilles. »
Puis il cite, les commentant çà
et là d'un mot à sa guise, divers
ssages du mandement de Mgr
dathieu. Après quoi, il conclut en
ces termes sévères, pathétiques et
surtout empreints d'un souffle libé-
rçtl ;
J'ignore, monsieur le ministre, ce que
pensera la majorité républicaine qui, sur
la foi de vos assurances catégoriques, n'a
pas voulu entendre parler d'un ordre
jour visant une prétendue ingérence
du Pape dans la politique française.
Ce que je sais bien, c'est que si vous
n'avisez, votre aveuglement confinera à
la complicité.
Ah ! monsieur le ministre, ne consen
tez pas à sembler être, pour la réaction
qui nous guette, le cabinet d'attente, le
cabinet de la conciliation silencieuse
avec les cléricaux. Avisez !
Comment aviser? l°Ennotifiant respec
tueusement au Pontife romain, qu'il est
fi
qualifié pour prescrire à son clergé la
neutralité politique et le désarmement,
mais non pour créer èt diriger chez nous
une confédération de ligueurs coalisés
contre nos lois ; 2° en revenant à la stricte
application du Concordat et en remettant
en vigueur tant de dispositions protec
trices que laisse dormir la ! République,
f %oins -Tiardte- que les-' anciens-régime?
qui les lui ont léguées.
Veuillez agréer j monsieur le ministre
jnes meilleurs hommages.
Joseph F abre.
Ainsi doncj le sénateur de l'Avey
ron n'admet point que le Saint-Père
félicite un archevêque français d'a
voir rappelé aux catholiques, dans
un magistral mandement, leurs de :
voirs vis-à-vis de l'Eglise et de l'E
tat. Et comme le Souverain Pontife,
en outre,nous a exhortés Lui-même j
une fois de plus, à ne pas faire,
comme nous y sommes trop en
clins, de l'opposition systématique,
mais à nous placer, pour soutenir,
nos revendications, sur le terrain
des institutions établies, M. Fabre
déclare que c'est là un acte d'ingé
rence intolérable. Le Pape s'im-.
misce dans nos luttes politiques,
dans nos différends électoraux !...
Vraiment, ce serait trop accorder
aux divagations haineuses de ce
sénateur que de les discuter. Du
rant les deux séances qui viennent
d'avoir lieu au Sénat, Un seul fait
d'ingérence cléricale a été prouvé à
la tribune. C'est M. Fabre qui s'en
est rendu coupable, à son profit,
lorsqu'il a publié dans les journaux
de son département une lettre où
un évêque, ardent patriote voué à
la cause de Jeanne d'Arc, manifes
tait le désir de voir entrer au Sénat
un autre chevalier de la Puçelle.
Au fond de toutes ces récrimina
tions, de celles que M. Fabre, ven
dredi et aujourd'hui, a formulées
par discours et par lettre, de celles
ïue M. Bourgeois rééditait diman
che, on peut voir très clairement
quelle pensée inspire les anticléri
caux. Sectaires ennemis de l'Eglise,
ils ne poursuivent qu'un but : dé
truire la religion. La République,
longtemps, a paru devoir éterniser
cette guerre. Mais l'entrée des ca
tholiques sur le terrain constitu
tionnel fait craindre qu'il n'en soit
bientôt plus ainsi. S'opposer, par
tous • les moyens possibles, à ce
mouvement des catholiques, voilà
donc ce qu'ont résolu les ennemis
de notre foi. Menacer le Pape, me
nacer le .gouvernement, exiger des
.repressions féroces, tout leur est
bon. Ils veulent faire peur. Mais la
passion qu'ils montrent les trahit.
Elle nous éclaire et nous déter
mine à la persévérance.
Pierre V euillot.
Çà et là
CHOSES DU PACIFIQUE
Parler un peu du Pacifique, ce n'est
pas s'écarter du Panama.
Cet océan occupe le tiers du globe,
mais il n'occupe pas la millième partie
de nos pensées.
Derrière l'isthme fatal — pour ne pas
dire le fatal isthme — se passent toute
fois des événements importants.
Une certaine actiyité se manifeste,
tant sur les rivages de l'Amérique occi
dentale que sur la lisière iie l'Extrême-
Orient.
« Quand je vois le Japon,» disait Petit-
Jean dans son immortel exorde. Si Petit-
Jean avait vécu dans ce siècle, il serait
resté beaucoup plus longtemps avant
d'avoir a tout vu ».
Le Japon est entré définitivement dans
le « concert » des nations civilisées. Si le
mikado n'envoie pas des cuirassés se
promener autour de la Crète, cela doit
tenir uniquement à ce que les cousins de
Mme Chrysanthème n'aiment pas à dé
penser leurs taëls pour les beaux yeux de
la diplomatie.
Mais pourquoi parler de « taëls »? Ne
savez-vous pas que le Japon commence
à faire fi de cette monnaie arriérée ?
L'empire du Soleil-Levant, nous ap
prennent les économistes, vient d'adopter
l'étalon d'or.
On ne pourra plus dire, avec feu Léon
Say, que les races blanches [demeurent
fidèles au métal jaune, et les races jaunes
au métal blanc.
Quoi qu'il en soit, ce petit coup d'Etat
monétaire témoigne de hautes visées. Le
mikado et M. Mac-Kinley, par-dessus le
Pacifique, se tendent fraternellement la
main.
Sans prendre parti pour l'or ni pour
l'argent,constatons que le roi des métaux
fascine particulièrement les nations, ri
ches... ou celles qui désirent le devenir,
La richesse de la monnaie-type tend à se
proportionner à l'intensité des transac-
tiôns.
Le Japon aspire donc à être une nation
très affairée.
Maintenant, traversons la mer. Nous
saluons au passage lés iles Ilawaï, qui,
depuis plusieurs années, se civilisent ra
pidement. Les Yankees n'y font pas trop
mauvais ménage aveo les Portugais, et
les ex-sauvages sont devenus, les uns,
d'honorables gentlemen, les autres, de
parfaits caballeros.
Sur le littoral opposé, voici le Mexi
que et l'Amérique centrale qui mordent
avec un appétit croissant aux fruits —
savoureux ou amers — de l'arbre du
progrès.
Les Mexicains ont trouvé moyen' de
réélire un même président cinq fois de
-suite, ce qui est, on en conviendra, un
trait merveilleux de stabilité.
Ils ont quelque peu policé leur pays.
Pour mieux venir à bout des bandits, ils
ont fait de ceux-ci des gendarmes, et
l'opération a , -paraît-il, très bien
réussi.
Pour le moment, ils ont besoin de tra
vailleurs et ils font venir des Chinois.Lest
braves Célestes arrivent en foule, et
chose curieuse — au lieu de rester céli
bataires comme aux Etats-Unis, trou
vent à se marier très facilement avee les
Indiennes du cru.
Ce qui donne à supposer aux ethno-,
logues que les Mexicains ne sont que
d'anciens Chinois, lesquels, jaloux par
avance de Christophe Colomb, ont, eux
aussi, découvert l'Amérique, mais de
l'autre côté.
Pliis bas, les petites républiquettes de
Guatémala, Costa-Rica, Nicaragua...
Etcœtera, méditent une combinaison fé-
dérative.
Beaucoup plus bas, c'est le Chili qui
se. pousse et se fortifie à vue d'œil.
On annonçait l'autre jour que dix vais
seaux de guerre — dix d'un coup ! — vien
nent de sortir des chantiers de Londres
et de mettre le cap sur Yalparaiso, où ils
vont doubler la flotte actuelle. Les Ar
gentins n'ont qu'à bien se tenir.
Aux splendides affaires de guano ont
succédé de splendides affaires de salpê
tre. Des vaisseaux passent et repassent,
chargés de .cette denrée précieuse et
humanitaire, dont l'équilibre européen
saurait de moins en moins se passer.
Nous n'avons pas parlé du Pérou, qui
vient d'organiser son premier congrès
catholique, ni de l'Equateur, où, pour
compenser, l'on fusille les journalistes
chrétiens.
Le Pacifique, on le voit, . constitue,
avec ses rivages, une scène vaste et inté-
ressantè où se jouent des drames di
vers.
Il y a pourtant une chose qu'on n'y
voit guère ; ce sont des vaisseaux fran
çais.
Sur cette immense nappe d'êau, nom
bre de pavillons se promènent. Couleurs
anglaises, américaines, allemandes, ja
ponaises s'y mirent et y flamboient tour
à tour. Seul, le pavillon français n'est
plus qu'une exception, une intermittence
bizarre et lointaine.
Dans les mers de Chine et du Japon,
une seule compagnie française, celle
des Messageries ■maritimes, représente
notre marine marchande..', deux fois par
mois.
Les statistiques enregistrent un mil
lier d'entrées de navires anglais pour
une trentaine d'entrées de navires fran
çais. Dans le même laps de temps, les
entrées allemandes se chiffrent par cen
taines.
Sans nos missionnaires, Chinois et
Japonais ne sauraient presque plus ce
que «'est que la France.
De l'autre côté de l'océan, la situation
est plus lamentable.
Il y a deux ou trois ans encore, une
compagnie de navigation française à va
peur doublait le cap Horn, touchant à
Valpàraiso, à Iquique, au Callao, à
Guayaquil.
La compagnie ne faisait pas ses frais,
et le service n'existe plus.
Paquebots allemands et anglais de
meurent seuls à se disputer le champ de
bataille. La France n'est plus représen
tée, sur les côtes chiliennes et péru
viennes, que par quelques rares s voi
liers.
A mesure que ces pays progressent,
nous reculons ; à mesure qu'ils mon
tent, nous descendons.
C'est au moment où le mouvement des
affaires devient plus actif dans ces pa
rages, où la richesse se développe, que
notre commerce impuissant jette le man
che après la cognée.
C'est peut-être pour cela qu'on parle, à
chaque enfantement ,de budget, d'alour
dir encore davantage les charges qui
pèsent sur le haut commerce et la haute
industrie..
On trouve que nos grands patrons
n'ont pas assez de frais et d'impôts comme
cela, et que la concurrence anglo-alle
mande n'a pas contre eux assez d'avan
tages.
Ils ont trop d'initiative ; décourageons-
es.
Doublons, triplons ces charges, ci
toyens, et vous verrez la belle figure que
feront bientôt et nos productions indus
trielles et notre pavillon commercial,
autour du Pacifique et de toutes les
autres mers.
G. d' A zambuja.
A LA CHAMBRE
La question de M. l'abbé Gayraud.
— L'interpellation Viviani.
Voilà plusieurs jours que M.
l'abbé Gayraud avait demandé à
questionner le ministre des cultes
sur la suppression de traitement
dont viennent d'être frappés les
vénérables curés de Lannilis et de
Ploudalmézeau.
Les émotions parlementaires
causées par les indiscrétions d'Ar-
ton ajournèrent ce débat ; c'est hier
seulement qu'il a été porté à la
tribune de la Chambre.
Le vaillant député du Finistère a
montré avec une vigoureuse élo
quence combien inique et arbitraire
était la mesure prise contre deux
ecclésiastiques pour des faits en
core soumis à une enquête — puis,
donnant plus d'ampleur à la ques
tion, il a hardiment, sans se soucier
des cris et des injures de l'extrême^-
gauche, rappelé les principes de la
suprématie de l'Eglise éternelle et
divine silf la société civile, de la
dette réelle et' indéniable contractée
par l'Etat vis -à-yis du clergé de
France lors de la spoliation du
siècle dernier.
A l'heure où de tous côtés on
parle tant d'ingérence cléricale, et
où beaucoup croient ^ devoir blâ
mer ou regretter que le prêtre se
mêle aux luttes politiques, M. l'ab
bé Gayraud n'a pas craint de pro
clamer devant le Parlement et de
vant le pays qu'on chercherait en
vain dans.le Concordat, voire parmi
les articles organiques, un texte in
terdisant aux membres du cierges
qui sont des citoyens, de prendre
souci des affaires publiques...
M. le ministre des cultes n'avait
rien à répondre : il n'a d'ailleurs pas
tenté d'expliquer la rigueur dont il
fait preuve vis-à-vis des curés bre
tons, privés de traitement ; il s'est
borné à donner lecture de la lettre
qu'il adressait à Mgr l'évêque de
Quimper pour lui faire ^ connaître
cette mesure, et il a cité avec em
barras quelques décisions du Con
seil d'Etat où il veut trouver une
consécration, par la jurisprudence
administrative, du droit arbitraire
que s'arrogent les gouvernements.
M. l'abbé Gayraud verra sans doute
invalider son élection sur la requête
de M. Isambert et de ses "collègues
delà commission d'enquête; il aura
du moins eu l'honneur, avant de
quitter le Palais-Bourbon où ses
à la stupéfaction de M. Jourdan —
de la Lozère — et au scandale de
M. Ernest Bérard, les droits delà
conscience chrétienne ét du prêtre'
catholique.
— Après avoir approuvé, malgré
les efforts de M. Arnous et les pro--
testations du comte de Bernis, l'ac
quisition par l'Etat des bâtiments
du collège de Sainte-Barbe, on a
entendu un éloquent discours f de
M. Viviani sur l'idée singulière v que
se font de leur devoir professionnel
certains juges d'instruction.
Un dramatique procès criminel
qui se déroula, il y a quelque temps,
devant la cour d'assises delà Seine,
vient en effet d'émouvoir justement
l'opinion publique: un homme ac
cusé d'assassinat et gardé trois
mois au secret fut acquitté sur les
instances du ministère public lui-
même qui dut, dès les premiers in
terrogatoires des témoins à l'au
dience, abandonner l'accusation ;
les débats révélèrent, en outre, que
des agents de la Sûreté auraient
offert une somme d'argent à la com
pagne de l'accusé pour obtenir un
témoignage contre lui.
Certes, c'est à bon droit qu'on
proteste contre de semblables abus;
c'est à bon droit que M. Viviani
s'élevait contre cette procédure
cruelle et d'un autre âge qui laisse
l'accusé durant des mois en face
d'un juge, trop enclin souvent à ne
voir en lui qu'un coupable ; mais il
est parfois difficile d'établir avec
justice la responsabilité du magis
trat. .
M. Viviani réclamait des mesures
de rigueur contre le juge d'instruc
tion chargé de l'affaire rappelée plus
haut; il demandait un châtiment
pour les fonctionnaires de la préfec
ture de police qui avaient tenté de
suborner un témoin ; il voulait même,
remontant plus haut et plus loin,
rendre complices de ces défaillan
ces les gardes des sceaux qui ne ré
primèrent pas assez énergique
ment lés abus et qui ne se montrè
rent point assez sévères pour cer
tains magistrats coupables de négli
gence dans l'accomplissement de
leurs devoirs.
Le mal, hélas ! vient moins des
hommes que des rouages vieillis de
la terrible machine judiciaire, et M.
Darlan, qui a toujours réclamé des
réformes profondes du Code d'ins
truction criminelle, n'a pas eu de
peine à prouver - que s'il avait frap
pé ceux de ses subordonnés qui
faillirent à leur redoutable mission,
il n'en'restait pas moins une légis
lation à modifier, des coutumes à
transformer.
Cette œuvre de justice il veut
l'accomplir ; elle doii incessamment
venir en discussion devant le Sénat
par l'initiative de M. Constans ; la
Chambre aura à l'approuver ou
même à la compléter, le ministre
s'emploiera à la faire promptement
aboutir.
Rien.dans la douloureuse affaire
rappelée par M. Viviani n'a permis
d'adresser un reproche au juge qui
l'avait instruite, pour l'arrêt de
renvoi prononcé par lui et approuvé
par la chambre des mises en accu
sation ; quant aux tentatives de su
bornation dont se serait rendu
Edition quotidienne. >— 10,672
.7
Mercredi 7 Avril 1897
ÊDTHQN OUOTIDIEIÏIή
,• PARIS
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Sîxrnois g! >,
Trois mois..... il h
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(union postale)
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UN NUMÉRO i — 1,9 ?«R«.
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BT7HEAÏ7X : Paris, rne Cassette, îiï
Qn s'ahonne à Rome, place du Gesù, 8
LE MONDE
jkes abonnements partent des l 8 ' et 18 fie chaque m«5f
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
. ANNONCES - '
£ÎM. LAGRANGE, CERF et G 1 ", 6, place de la Bourse ;
PARIS, 6 AVRIL 1897
SOMMAIRE
Après l'école. ... .*.. F rançois V euilloï 1 .
Une lettre de Bf.fa-
. . • P ierre V euillot.
Çà et là : Choses du "
'^Pacifique ,... G. d' A zambuja.
A la Chambre G. de T àiors.
Au Sénat........... J. M.
L©- pacte de . Bor
deaux E ugène T avernier.
Correspondance ro-
["rp,ajfnè .1.......... ***. •
Bulletin. — La taxe d'abonnement. — L'af
faire Arton. — Informations politiques
et parlementaires. — A' l'Hôtel de Ville.
—. Chronique. —. La question ouvrière.
— Les affaires de Crète. — Dépêches de
l'étranger. — ]\jg r Dupont des Loges. —•
Chronique religieuse. — Chambre des
députés. — Nécrologie. — Echos . de
jpartout. —. Lettres, sciences et arts. —
Cercle catholique des étudiants. •— Tri
bunaux.— Nouvelles diverses. — Calen
drier. Tableau et bulletin delà Bourse.
— Dernière heure.
APRÈS k'ÉCOLE
- Les Ligueurs de l'enseignement
■et M; Léon Bourgeois, leur nouveau
conducteur^ organisent partout,
avec une hâte fiévreuse, un puis
sant ^ mouvement de' réunions et de
conférences, en vue de créer l'en
seignement libre-penseur ét l'édu-
çatioh. laïque « après l'école ». Ils
on.ls fini par découvrir, il y a peu
d'années, que l'école obligatoire et
athée, à laquelle ils ayaient consa
cré tant de soins et qu'ils avaien;
présentée comme un incomparable
moyen, unique et suffisant, de pré
parer les . nouvelles générations,
n'aboutissait gaèré qu'à encombrer
de déclassés et de vagabonds le
pavé des grandes villes et la pous
sière des grandps routes, — sans
parler des prisons où s'enfour
nent chaque année, depuis les lois
scolaires, un nombre toujours plus
fort et plus effrayant d'adolescents
coupables. Sans doute, ils n'ont pas
avoué ce lamentable échec; ils ont
jnêmç énergiquement protesté, la
"Voix vibrante, avec des accents indi
gnés, contre la mauvaise foi des
cléricaux, qui ne craignaient pas de
rejeter sur l'école sans Dieu des res
ponsabilités que celle-ci n'avait
point encourues. Mais, néanmoins,
entre eux, ils se sont dit : « Il faut
faire quelque chose ; il faut ajouter
d'autres moyens d'action, plus effi
caces et plus vigoureux, aux trop
faibles moyens que nous fournit
l'école. » , Et, c'est alors, qu'ils ont
inventé la prolongation de l'ensei
gnement et de l'éducation, pendant
}es années, périlleuses pour l'esprit
et le cœur, qui séparent l'école et
le régiment : c'est alors qu'ils ont
inventé le patronage et toutes les
œuvres qui en rayonnent.
L'idée est très juste, assurément;
et s'il y a lieu d'être surpris, ce
n'est "point de voir que les libres-
penlseurs l'aient découverte et s'ef-
îorcent de la pratiquer, c'est de
constater qu'ils aient mis un temps
si long à trouver une idée si simple.
Il èst de toute évidence, en effet*
gue si l'enfant, au sortir de l'école,
à peine imprégné des leçons qu'il a
reçues, est abandonné à lui-même
;ôu plutôt à sés capiarades plus
grands, il oubliera bien vite ensei
gnements et conseils et laissera
pétrir son âme eneorefacile etjeune
entre les mains les plus grossières
et les plus dangereuses. Ce n'est
pas à douze ans qu'un esprit peut
e|re armé de résistance et d'éner-
jgie contre les influences mauvaises,
avoir sa volonté propre et sés opi
nions arrêtées. M. Léon Bourgeois
et" ses ligueurs; ' en principe, ont
donc raison; mais en' pratique, on
doit se demander si une éducation,
{irivée de base morale, amputée de
'éssehtïelle idée du devoir et ne
fournissant à l'âme aucun point d'ap
pui en dehors d'elle-meme, aura
sur les adolescents un plus éner
gique et plus sérieux effet que sur
îçs pe/tits écoliers,. Et ç'est cien là
le vicie ràdicaï dé tous les efforts
accumules par la Ligue de l'ensei-
gnement.Cettê Ligue est enflée de la
hobleamlpitioij de former des; vo-
lontës, dé forcer des caractères ; " et
elle ne sait point quel ressort
mettre au cœur de ces adolescents
cÇônt ellç' vei$ ' fàire des hommes.
Or, le ressort d'une idées, (l'une
croyance et, disons le mot, d'une
foi, est aussi nécessaire à la vo
lonté, qi^e le petit ressort d'acier
est indispensable à là montre. Et
c'est pourquoi nous pouvons être
certains que le mouvement « après
l'école » aboutira, dans un nombre
d'années plus ou moins grand, mai-
gré toute l'ardeur et tout l'acharne
ment qu'on met à le promouvoir, à
ûn échec aussi piteux que celui dont
est menacée l'école elle-même'.
. D'ailleurs, si le ressort est absent,
qui dresserait et ferait jaillir les
jeunes volontés qu'on veut mettre
en action, il manque (également,
celui qui donnerait aux éducateurs
cette longue patience et ce zèle
éclairé, persévérant, sans lesquels |
ne pourra rien. A l'oeuvre qy.'ori
veut entreprendre, il faut, pour
ainsi dire, une fondation de mille
dévouements obscurs, comme il
faut un amas de solides moellons
sous les monuments bâtis dans uii
terrain friable et mou ; il y faut,
surtout/un esprit apôtre; et, à part
quelques exceptions, qui ne pour
ront que défaillir à supporter le
poids de l'œuvre tout entière, où
ira-t-on recruter, puisqu'on se
ferme l'Eglise, une si grande armée
de pareils éducateurs ?
Ces considérations, si justes
qu'elles soient, ne nous permettent j
pas cependant de dédaigner le mou-
vement « après l'école », organisé
? taries Ligueurs de M. Bourgeois,
mpuissants à terminer l'œuvre de
bien qu'ils affichent pour but a
leurs efforts, ils sauront, si nous
n'y prenons garde, accomplir une
œuvre de mal. Ils pourront nous
arracher bien des adolescents, que
l'influence religieuse aurait saisis
au sortir de l'école laïque et trans
formés, d'écoliers ignorants de l'E- I
flise et prêts à tomber aux mains '
es ^ libres-penseurs, en solides
chrétiens, ils pourront, parmi ces
jeunes gens qui viendront les en
tendre et s'inspirer de leurs néfas
tes leçons, découvrir des esprits
intelligents, qu'ils ouvriront à l'a
théisme et dont ils feront des sou
tiens de leur cause abominable. Il
importe donc de yeiller, de soute
nir plus ardemment que jamais nos
œuvres de patronage et de les dé
velopper, et peut-être aussi d'en
élargir et d'en fortifier l'esprit.
Notre collaborateur et ami, M.
Max Turmann, a émis, dans la
Quinzaine, à ce sujet, des réflexions
et présenté des vues, qui pourront
paraître, à d'aucuns, trop hardies,
mais qui nous semblent, à nous,
très sensées ; il a soutenu des idées
qui sont de nature à attirer l'atten
tion et d'importance à provoquer
les méditations de tous les direc
teurs et de tous les amis des patro
nages. C'est dans une série d'arti
cles documentés et intéressants
sur leur histoire en ce temps-ci,
que M. Turmann a dévoloppé son
opinion sur « les patronages de de
main ». Disons en passant que, dans
ce travail, il a réduit à néant, sans
la discuter, par le simple exposé des
faits, la ridicule prétention dont se
targuent les Ligueurs de l'enseigne
ment et autres éducateurs sans Dieu,
quand ils croient déoouvrir et in
tenter les œuvres qui prolongent
jusqu'à vingt ans l'insuffisante ac
tion de l'école. Sous les efforts tan
tôt séparés, tantôt réunis, de zélés
catholiques, les patronages ont pris
dans ce siècle, un essor merveil
leux. Ils n'existaient pas encore au
lendemain de la Révolution ; ils se
montraient à peine, çà et là, sous la
monarchie de Juillet; ils couvrent
maintenant la France entière. Sans
parler des trente mille adolescents
sortis des écoles des Frères, que
leurs anciens maîtres reçoivent
dans les patronages qu'ils ont fon
dés pour eux, on compte aujour
d'hui, répandus à travers le pays,
près de trois mille patronages ou
verts aux enfants des écoles laï
ques. C'est un admirable résultat,
qui remplit le cœur d'espérance et
ermet de regarder tranquillement
avenir.
Mais, pour lutter contre l'entre-
rise acharnée des éducateurs sans
ieu, M. Turmann estime, et avec
raison, qu'il faut donner un peu plu?
de nerf et de vigueur à 1'éaucation
que l'on distribue dans ces mille et
mille foyers de religion. En quel
ques-uns,— etnous en connaissons
des maîtres hardis et prévoyants
se sont déjà orientés dans cette
voie ;mais le plus grand nombre hé
site ou souvent même ignore, ou
parfois redoute et réagit. Du patro
nage,on a fait peut-êtreunpeu trop
exclusivement une œuvre de « pré
servation »; excellent dans une so
ciété religieuse,' un pareil système
est insuffisant, dangereux, dans
une démocratie devenue presquè
païenne, où le chrétien, 1 ouvrier
chrétien surtout, doit lutter cons
tamment contre son propre milieu,
Bour maintenir l'intégrité de sa foi.
i faut donc, au patronage, entre
prendre surtout une œuvre de « for
mation ». On s'attache iin peu trop
peut-être à préserver de tout dan
ger le cœur et l'esprit des adoles
cents qui demain seront des soldats
de l'Eglise : il faudrait s'efforcer"
plutôt de les endurcir au danger. On
doit éh un mot songer à former des
îonimes et des citoyens, sachant
eurs devoirs assurément, mais
aussi connaissant bien leurs droits,
qu'ils pourront mieux défendre. Et,
jour terminer par un mot de M,
Turmann qui nous paraît rendre
son idée d'une façon très çlaire et
rès heureuse, il serait plus à pro-
îos , dans notre temps, de former
« de solides gaillards » que de s'at-
arder à faire encore uniquement
« de bons jeunes gens. »:
François Veuillot.
VULLETI&Ç v
D'après certaines dépêches le blocus
du Pirée serait maintenant un fait ac
compli. Cette mesure suffira-t-elle à ga
rantir la paix européenne ?
Hier > à la Chambre, M. l'abbé Gayraud
a posé sa question à M. Darlan au sujet
de la suppression de traitement des
curés de Lannilis et de Pioudalmezeau.
Nous donnons ce grave incident d'à■
près le compte rendu officiel.
La Chambre s'est ensuite occupée de
diverses questions, parmi lesquelles l'in
terpellation de M. Vivianisur les abus de
la procédure secrète. Le ministère n'a
triomphé qu'à une faible majorité.
On parlait du départ des Chambres
pour ce soir ; mais il paraît difficile que
les vacances commencent aussi tôt ; les
uns disent que ce sera pour jeudi; les
autres pour samedi. Cette dernière date
paraît laplusvraisemblable.
Le Sénat a terminé hier le vote de la
loi sur les sucrés:
Aucun incident important pour le Pa
nama ; on annonce toujours de nouvelles
arrestations.
La nouvelle Chambre italienne s'est
réunia. hier.^.Qn trouvera aux. dépê
ches des détails sur cette rentrée.
UNE LETTRE DE M. FABRE
Et voici que le sénateur de TA-
veyrôn regrette presque de n'avoir
pas été ajourné une fois de plus!.
Il aurait pu produire, — c est du
moins ce qu'il croit, ■— un argument
nouveau à l'appui de sa thèse. De
cet argument, il eût tiré d'autres ef
fets d'éloquence, allongeant son
discours d'une large demi-heure
encore.
Hélas
la lettre du
Souverain
de Tou-
Univers sa-
précis où Je
Sénat repoussait, à une écrasante
majorité, l'ordre du jour de M. Fa-
bre contre l'ingérence étrangère
dans notre politique intérieure.
Déposer une nouvelle demande
d'interpellation, le sénateur anticlé
rical ne l'ose point. Ce n'est pas
qu'il craigne d'abuser. Mais il se
rait trop sûr, les vacances de Pâr
ques arrivant, d'être obligé d'atten
dre jusqu'à la fin de mai, sinon da
vantage.
Or il vient d'éprouver ce que l'on
souffre quand on est gros d'un dis
cours qui ne peut pas s'en aller.
Se revoir si vite dans ce douloureux
état, merci. Le journal remplacera
.donc la tribune. Et ce matin, l'E
clair publie une « lettre ouverte »
de M. FabreàM. Darlan.
Le sénateur de l'Aveyron débute
en ces termes :
F.
Monsieur le ministre, au moment
même où M. le président du conseil et
vous, vous contestiez au Sénat l'ingé
rence du Pape, l'Univers, qui est à Paris
le. Moniteur officiel de Rome, publiait
une lettre du Saint-Père à Mgr Mathieu,
confirmant les directions pontificales,
justifiant la stratégie du clergé républi-
canisé pour combattre plus efficacement
les lois de la République et morigénant
les hommes des anciens partis indociles
à sa tactique.
Le mandement qu'il comble d'éloges
comme l'écho fidèle de sa pensée est un
irrévérencieux manifeste où l'archevêque
de Toulouse revendique pour les prêtres
le droit de faire de la politique, censure
notre législation, prêche la révolte lé
gale contre les envahissements de César
et réclame la formation d'un parti catho
lique, avec force objurgations contre les
réfractaires'.
Je voudrais croire que, conformément
aux lois concordataires, cette lettre a été
préalablement mise sous vos yeux, et
cependant je ne puis le croirp.
M. Fabre s'interrompt ici pour
reproduire un fragment de la lettre
du Souverain Pontife. Il ajoute cette
réflexion
Si les réfractaires n'entendent
as ce langage, c'est qu'ils auront
e parti pris de se boucher les
oreilles. »
Puis il cite, les commentant çà
et là d'un mot à sa guise, divers
ssages du mandement de Mgr
dathieu. Après quoi, il conclut en
ces termes sévères, pathétiques et
surtout empreints d'un souffle libé-
rçtl ;
J'ignore, monsieur le ministre, ce que
pensera la majorité républicaine qui, sur
la foi de vos assurances catégoriques, n'a
pas voulu entendre parler d'un ordre
jour visant une prétendue ingérence
du Pape dans la politique française.
Ce que je sais bien, c'est que si vous
n'avisez, votre aveuglement confinera à
la complicité.
Ah ! monsieur le ministre, ne consen
tez pas à sembler être, pour la réaction
qui nous guette, le cabinet d'attente, le
cabinet de la conciliation silencieuse
avec les cléricaux. Avisez !
Comment aviser? l°Ennotifiant respec
tueusement au Pontife romain, qu'il est
fi
qualifié pour prescrire à son clergé la
neutralité politique et le désarmement,
mais non pour créer èt diriger chez nous
une confédération de ligueurs coalisés
contre nos lois ; 2° en revenant à la stricte
application du Concordat et en remettant
en vigueur tant de dispositions protec
trices que laisse dormir la ! République,
f %oins -Tiardte- que les-' anciens-régime?
qui les lui ont léguées.
Veuillez agréer j monsieur le ministre
jnes meilleurs hommages.
Joseph F abre.
Ainsi doncj le sénateur de l'Avey
ron n'admet point que le Saint-Père
félicite un archevêque français d'a
voir rappelé aux catholiques, dans
un magistral mandement, leurs de :
voirs vis-à-vis de l'Eglise et de l'E
tat. Et comme le Souverain Pontife,
en outre,nous a exhortés Lui-même j
une fois de plus, à ne pas faire,
comme nous y sommes trop en
clins, de l'opposition systématique,
mais à nous placer, pour soutenir,
nos revendications, sur le terrain
des institutions établies, M. Fabre
déclare que c'est là un acte d'ingé
rence intolérable. Le Pape s'im-.
misce dans nos luttes politiques,
dans nos différends électoraux !...
Vraiment, ce serait trop accorder
aux divagations haineuses de ce
sénateur que de les discuter. Du
rant les deux séances qui viennent
d'avoir lieu au Sénat, Un seul fait
d'ingérence cléricale a été prouvé à
la tribune. C'est M. Fabre qui s'en
est rendu coupable, à son profit,
lorsqu'il a publié dans les journaux
de son département une lettre où
un évêque, ardent patriote voué à
la cause de Jeanne d'Arc, manifes
tait le désir de voir entrer au Sénat
un autre chevalier de la Puçelle.
Au fond de toutes ces récrimina
tions, de celles que M. Fabre, ven
dredi et aujourd'hui, a formulées
par discours et par lettre, de celles
ïue M. Bourgeois rééditait diman
che, on peut voir très clairement
quelle pensée inspire les anticléri
caux. Sectaires ennemis de l'Eglise,
ils ne poursuivent qu'un but : dé
truire la religion. La République,
longtemps, a paru devoir éterniser
cette guerre. Mais l'entrée des ca
tholiques sur le terrain constitu
tionnel fait craindre qu'il n'en soit
bientôt plus ainsi. S'opposer, par
tous • les moyens possibles, à ce
mouvement des catholiques, voilà
donc ce qu'ont résolu les ennemis
de notre foi. Menacer le Pape, me
nacer le .gouvernement, exiger des
.repressions féroces, tout leur est
bon. Ils veulent faire peur. Mais la
passion qu'ils montrent les trahit.
Elle nous éclaire et nous déter
mine à la persévérance.
Pierre V euillot.
Çà et là
CHOSES DU PACIFIQUE
Parler un peu du Pacifique, ce n'est
pas s'écarter du Panama.
Cet océan occupe le tiers du globe,
mais il n'occupe pas la millième partie
de nos pensées.
Derrière l'isthme fatal — pour ne pas
dire le fatal isthme — se passent toute
fois des événements importants.
Une certaine actiyité se manifeste,
tant sur les rivages de l'Amérique occi
dentale que sur la lisière iie l'Extrême-
Orient.
« Quand je vois le Japon,» disait Petit-
Jean dans son immortel exorde. Si Petit-
Jean avait vécu dans ce siècle, il serait
resté beaucoup plus longtemps avant
d'avoir a tout vu ».
Le Japon est entré définitivement dans
le « concert » des nations civilisées. Si le
mikado n'envoie pas des cuirassés se
promener autour de la Crète, cela doit
tenir uniquement à ce que les cousins de
Mme Chrysanthème n'aiment pas à dé
penser leurs taëls pour les beaux yeux de
la diplomatie.
Mais pourquoi parler de « taëls »? Ne
savez-vous pas que le Japon commence
à faire fi de cette monnaie arriérée ?
L'empire du Soleil-Levant, nous ap
prennent les économistes, vient d'adopter
l'étalon d'or.
On ne pourra plus dire, avec feu Léon
Say, que les races blanches [demeurent
fidèles au métal jaune, et les races jaunes
au métal blanc.
Quoi qu'il en soit, ce petit coup d'Etat
monétaire témoigne de hautes visées. Le
mikado et M. Mac-Kinley, par-dessus le
Pacifique, se tendent fraternellement la
main.
Sans prendre parti pour l'or ni pour
l'argent,constatons que le roi des métaux
fascine particulièrement les nations, ri
ches... ou celles qui désirent le devenir,
La richesse de la monnaie-type tend à se
proportionner à l'intensité des transac-
tiôns.
Le Japon aspire donc à être une nation
très affairée.
Maintenant, traversons la mer. Nous
saluons au passage lés iles Ilawaï, qui,
depuis plusieurs années, se civilisent ra
pidement. Les Yankees n'y font pas trop
mauvais ménage aveo les Portugais, et
les ex-sauvages sont devenus, les uns,
d'honorables gentlemen, les autres, de
parfaits caballeros.
Sur le littoral opposé, voici le Mexi
que et l'Amérique centrale qui mordent
avec un appétit croissant aux fruits —
savoureux ou amers — de l'arbre du
progrès.
Les Mexicains ont trouvé moyen' de
réélire un même président cinq fois de
-suite, ce qui est, on en conviendra, un
trait merveilleux de stabilité.
Ils ont quelque peu policé leur pays.
Pour mieux venir à bout des bandits, ils
ont fait de ceux-ci des gendarmes, et
l'opération a , -paraît-il, très bien
réussi.
Pour le moment, ils ont besoin de tra
vailleurs et ils font venir des Chinois.Lest
braves Célestes arrivent en foule, et
chose curieuse — au lieu de rester céli
bataires comme aux Etats-Unis, trou
vent à se marier très facilement avee les
Indiennes du cru.
Ce qui donne à supposer aux ethno-,
logues que les Mexicains ne sont que
d'anciens Chinois, lesquels, jaloux par
avance de Christophe Colomb, ont, eux
aussi, découvert l'Amérique, mais de
l'autre côté.
Pliis bas, les petites républiquettes de
Guatémala, Costa-Rica, Nicaragua...
Etcœtera, méditent une combinaison fé-
dérative.
Beaucoup plus bas, c'est le Chili qui
se. pousse et se fortifie à vue d'œil.
On annonçait l'autre jour que dix vais
seaux de guerre — dix d'un coup ! — vien
nent de sortir des chantiers de Londres
et de mettre le cap sur Yalparaiso, où ils
vont doubler la flotte actuelle. Les Ar
gentins n'ont qu'à bien se tenir.
Aux splendides affaires de guano ont
succédé de splendides affaires de salpê
tre. Des vaisseaux passent et repassent,
chargés de .cette denrée précieuse et
humanitaire, dont l'équilibre européen
saurait de moins en moins se passer.
Nous n'avons pas parlé du Pérou, qui
vient d'organiser son premier congrès
catholique, ni de l'Equateur, où, pour
compenser, l'on fusille les journalistes
chrétiens.
Le Pacifique, on le voit, . constitue,
avec ses rivages, une scène vaste et inté-
ressantè où se jouent des drames di
vers.
Il y a pourtant une chose qu'on n'y
voit guère ; ce sont des vaisseaux fran
çais.
Sur cette immense nappe d'êau, nom
bre de pavillons se promènent. Couleurs
anglaises, américaines, allemandes, ja
ponaises s'y mirent et y flamboient tour
à tour. Seul, le pavillon français n'est
plus qu'une exception, une intermittence
bizarre et lointaine.
Dans les mers de Chine et du Japon,
une seule compagnie française, celle
des Messageries ■maritimes, représente
notre marine marchande..', deux fois par
mois.
Les statistiques enregistrent un mil
lier d'entrées de navires anglais pour
une trentaine d'entrées de navires fran
çais. Dans le même laps de temps, les
entrées allemandes se chiffrent par cen
taines.
Sans nos missionnaires, Chinois et
Japonais ne sauraient presque plus ce
que «'est que la France.
De l'autre côté de l'océan, la situation
est plus lamentable.
Il y a deux ou trois ans encore, une
compagnie de navigation française à va
peur doublait le cap Horn, touchant à
Valpàraiso, à Iquique, au Callao, à
Guayaquil.
La compagnie ne faisait pas ses frais,
et le service n'existe plus.
Paquebots allemands et anglais de
meurent seuls à se disputer le champ de
bataille. La France n'est plus représen
tée, sur les côtes chiliennes et péru
viennes, que par quelques rares s voi
liers.
A mesure que ces pays progressent,
nous reculons ; à mesure qu'ils mon
tent, nous descendons.
C'est au moment où le mouvement des
affaires devient plus actif dans ces pa
rages, où la richesse se développe, que
notre commerce impuissant jette le man
che après la cognée.
C'est peut-être pour cela qu'on parle, à
chaque enfantement ,de budget, d'alour
dir encore davantage les charges qui
pèsent sur le haut commerce et la haute
industrie..
On trouve que nos grands patrons
n'ont pas assez de frais et d'impôts comme
cela, et que la concurrence anglo-alle
mande n'a pas contre eux assez d'avan
tages.
Ils ont trop d'initiative ; décourageons-
es.
Doublons, triplons ces charges, ci
toyens, et vous verrez la belle figure que
feront bientôt et nos productions indus
trielles et notre pavillon commercial,
autour du Pacifique et de toutes les
autres mers.
G. d' A zambuja.
A LA CHAMBRE
La question de M. l'abbé Gayraud.
— L'interpellation Viviani.
Voilà plusieurs jours que M.
l'abbé Gayraud avait demandé à
questionner le ministre des cultes
sur la suppression de traitement
dont viennent d'être frappés les
vénérables curés de Lannilis et de
Ploudalmézeau.
Les émotions parlementaires
causées par les indiscrétions d'Ar-
ton ajournèrent ce débat ; c'est hier
seulement qu'il a été porté à la
tribune de la Chambre.
Le vaillant député du Finistère a
montré avec une vigoureuse élo
quence combien inique et arbitraire
était la mesure prise contre deux
ecclésiastiques pour des faits en
core soumis à une enquête — puis,
donnant plus d'ampleur à la ques
tion, il a hardiment, sans se soucier
des cris et des injures de l'extrême^-
gauche, rappelé les principes de la
suprématie de l'Eglise éternelle et
divine silf la société civile, de la
dette réelle et' indéniable contractée
par l'Etat vis -à-yis du clergé de
France lors de la spoliation du
siècle dernier.
A l'heure où de tous côtés on
parle tant d'ingérence cléricale, et
où beaucoup croient ^ devoir blâ
mer ou regretter que le prêtre se
mêle aux luttes politiques, M. l'ab
bé Gayraud n'a pas craint de pro
clamer devant le Parlement et de
vant le pays qu'on chercherait en
vain dans.le Concordat, voire parmi
les articles organiques, un texte in
terdisant aux membres du cierges
qui sont des citoyens, de prendre
souci des affaires publiques...
M. le ministre des cultes n'avait
rien à répondre : il n'a d'ailleurs pas
tenté d'expliquer la rigueur dont il
fait preuve vis-à-vis des curés bre
tons, privés de traitement ; il s'est
borné à donner lecture de la lettre
qu'il adressait à Mgr l'évêque de
Quimper pour lui faire ^ connaître
cette mesure, et il a cité avec em
barras quelques décisions du Con
seil d'Etat où il veut trouver une
consécration, par la jurisprudence
administrative, du droit arbitraire
que s'arrogent les gouvernements.
M. l'abbé Gayraud verra sans doute
invalider son élection sur la requête
de M. Isambert et de ses "collègues
delà commission d'enquête; il aura
du moins eu l'honneur, avant de
quitter le Palais-Bourbon où ses
à la stupéfaction de M. Jourdan —
de la Lozère — et au scandale de
M. Ernest Bérard, les droits delà
conscience chrétienne ét du prêtre'
catholique.
— Après avoir approuvé, malgré
les efforts de M. Arnous et les pro--
testations du comte de Bernis, l'ac
quisition par l'Etat des bâtiments
du collège de Sainte-Barbe, on a
entendu un éloquent discours f de
M. Viviani sur l'idée singulière v que
se font de leur devoir professionnel
certains juges d'instruction.
Un dramatique procès criminel
qui se déroula, il y a quelque temps,
devant la cour d'assises delà Seine,
vient en effet d'émouvoir justement
l'opinion publique: un homme ac
cusé d'assassinat et gardé trois
mois au secret fut acquitté sur les
instances du ministère public lui-
même qui dut, dès les premiers in
terrogatoires des témoins à l'au
dience, abandonner l'accusation ;
les débats révélèrent, en outre, que
des agents de la Sûreté auraient
offert une somme d'argent à la com
pagne de l'accusé pour obtenir un
témoignage contre lui.
Certes, c'est à bon droit qu'on
proteste contre de semblables abus;
c'est à bon droit que M. Viviani
s'élevait contre cette procédure
cruelle et d'un autre âge qui laisse
l'accusé durant des mois en face
d'un juge, trop enclin souvent à ne
voir en lui qu'un coupable ; mais il
est parfois difficile d'établir avec
justice la responsabilité du magis
trat. .
M. Viviani réclamait des mesures
de rigueur contre le juge d'instruc
tion chargé de l'affaire rappelée plus
haut; il demandait un châtiment
pour les fonctionnaires de la préfec
ture de police qui avaient tenté de
suborner un témoin ; il voulait même,
remontant plus haut et plus loin,
rendre complices de ces défaillan
ces les gardes des sceaux qui ne ré
primèrent pas assez énergique
ment lés abus et qui ne se montrè
rent point assez sévères pour cer
tains magistrats coupables de négli
gence dans l'accomplissement de
leurs devoirs.
Le mal, hélas ! vient moins des
hommes que des rouages vieillis de
la terrible machine judiciaire, et M.
Darlan, qui a toujours réclamé des
réformes profondes du Code d'ins
truction criminelle, n'a pas eu de
peine à prouver - que s'il avait frap
pé ceux de ses subordonnés qui
faillirent à leur redoutable mission,
il n'en'restait pas moins une légis
lation à modifier, des coutumes à
transformer.
Cette œuvre de justice il veut
l'accomplir ; elle doii incessamment
venir en discussion devant le Sénat
par l'initiative de M. Constans ; la
Chambre aura à l'approuver ou
même à la compléter, le ministre
s'emploiera à la faire promptement
aboutir.
Rien.dans la douloureuse affaire
rappelée par M. Viviani n'a permis
d'adresser un reproche au juge qui
l'avait instruite, pour l'arrêt de
renvoi prononcé par lui et approuvé
par la chambre des mises en accu
sation ; quant aux tentatives de su
bornation dont se serait rendu
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