Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-02-14
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 14 février 1897 14 février 1897
Description : 1897/02/14 (Numéro 10619). 1897/02/14 (Numéro 10619).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k709401h
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
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I"
Dimanche 14 Février 1897
- ( 'OT?
Edltlonquotldienne.— 10,619
Dimanehe 14 Février 1897
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postale^
Unan .... 40 » 51 >» *
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Trois mois.*.. . 11 » 14 ' »
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Paris............... 10 cent.
Départements 15 —
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LE MONDE
ÉDITION semi -QUOTIDIENIO
• : PARIS ' ÉTRANGER
, - et départements , (union postale)":
Un an..20 '» 26
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; -Trois mois:..5 »/ 6;50;
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L'UNIVERS ne répond pas des mûnuscrits gui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAC t RANGB, CERF et C«", 6, place de Ja Bourse
PARIS, 13 FÉVRIER 18S7
SOMMAIRE
li'allianceforcée... . Pierre Veuillot.
Eu Orient F; L.
A la Chambre.... .. Gabriel de Triors.
Triste campagne.. . Eugène Veuillot.
Au Sénat...J. Mantenay.
Les conférences du
Luxembourg..... Edouard Alexandre
Bulletin du jeur. — Les processions de
Poitiers, -r Un discours du sous-pré
fet de Saumur. — Le Jubilé de S. Em.
le*cardinal Richard. — Les fredaines de
l'Assistance publique. — Le fiso et les
congrégations. — Informations politiques
et parlementaires. — Chambre des dé-»
putés. ~ Chronique. — Lettres, sciences
et arts. — Conférence tapageuse. — La
question ouvrière. — Les affaires de.
Crète. —""^Dépêches -de l'étranger. ■—
Chronique religieuse.— Echos de par
tout. — Les. sacrilèges. — Pèlerins en
justice, -*■ Tribunaux;— Nécrologie. —
Crues et inondations. — Nouvelles di
verses. — Calendrier. — Tableau et
bulletin de 1$ Bourse. — Dernière
heure.
L'ALLIANCE FORCÉE
Nous avons annoncé le grand duel
oratoire que MM. Bourgeois et Jau
rès, sur la provocation de celui-ci,
veulent engager à la prochaine oc
casion. La rencontre sera intéres
sante. Le député du Tarn sortira
tout l'attirail de sa vibrante rhétori
que ; le député- de la Marne mon
trera toute l'adresse élégante de sa
parole. On échangera des épigram-
mes, d'ailleurs mouchetées. Les
discours prouveront, clairement,
que les conceptions politiques et;
sociales des deux orateurs sont
contraires sur beaucoup de points.
L'entente apparaîtra dono impos
sible. Et le public, après avoir
écouté ou lu, croira qu'entre le ra
dicalisme et le collectivisme l'ai-/
liarice est rompue définitivement. !
Il n'en sera rien dû tout. La si
tuation est plus forte que M.'Bour
geois et que M. Jaurès. Elle les
oblige à rester pratiquement unis,
au grand avantage du socialisme.
Rejeté aujourd'hui dans l'opposi
tion, revenu demain au pouvoir, le
clxei'des radicaux est contraint de
marcher ayec MM. Millerand, Gé-
rault-Richard, Viviani, Jaurès,
Guesde, etc., etc. Il lui faut même
l'appui des Paberot, des Walter et
des Coûtant. Sans leur concours,
peut-il espérer jamais renverser le
ministère actuel ? Sans leur soutien,
Eeut-il s'imaginer qu'il garderait
uit jours son ministère futur, très
heureusement problématique ?
Ce que nous avons déjà vu, se re
produirait de toute nécessité. Quand
il a pris le pouvoir, en novembre
1895, M. Bourgeois n'avait aucune
ment l'intention de gouverner avec
les collectivistes. Il essaya même,
d'abord, de réunir un cabinet de
concentration.N'ayant pu,il forma un
ministère- homogène, radical. Mais
cet accord du centre et de la gau
che, qu'il n'avait pas su réaliser
entre dix aspirants au portefeuille,
il voulait espérer qu'il parviendrait
à, l'obtenir entre trois cent vingt
députés. Il manœuvrerait ainsi
contre une opposition formée par
les extrêmes : la droite, les ré
publicains -< ultra- modérés » d'une
part, et les socialistes de l'au
tre. M. Bourgeois a l'habitude,
malgré les mécomptes, d'avoir un
peu trop dé confiance dans son
adresse. L'événement déjoua .ses
prévisions. Tout de suite il eut
à combattre, non pas, comme
il » l'avait pensé, cinquante ou
soixante, mais , bien cent soixante
déjantés du centre. Pas de majo
rité sans les pires collectivistes. Il
s'en fut chercher de ce côté le
complément nécessaire ; et l'obtint,
montrant un esprit de transaction
qui semblait incompatible avec l'atti
tude « intégrale » observée par eux
jusqu'alors, descendirent un peu de
la montagne. M. Bourgeois- et M.
Jaurès devinrent alliés, chacun se
réservant d'attirer l'autre. Ce fut le
premier qui fit le plus de chemin.
Tous les jours, il avançait d'un pas.
Le Sénat, mit fin à cette marche
vers le bouleversement social.
Telle a été l'histoire du cabinet
Bourgeois-Doumer. Telle serait l'i
névitable histoire du ministère
Bourgeois-X... Je vois bien que le
député de la Marne veut nous re
plonger dans la concentration. Il l'a
toujours aimée- ; il l'aime encore ; il
y aspire de tout son cœur : c'est l'é
vidence même. Seulement, la con
centration ne dépend pas de lui
seul. Pour s'unir, il faut être au
moins deux. L'ancien président du
conseil dispose du parti simplement
radical et au fameux groupe Isam-
bert, — ce qui ne fait qu'un et lui
donne à peine cent cinquante voix.
Ni la majorité des radicaux-soçia-
ii&tes, que mène M. Goblet, à sa gau
che^ ni la majorité des républicains
de gouvernement, que conduisent
MM-Deschanel etPoincaré,à sa drôi-.
te,-ne -ventent de la concentration.
Toute l'adresse du monde né peut
prévaloir contre une incompatibilité
si formelle. Appelé par le président
de la République à former un mi
nistère, M. Bourgeois se trouverait
toujours en présence de cette diffi
culté. Passerait-il la main, comme
il l'a fait deux ou trois fois ? Peut ;
être. Mais il a déjà goûté du pou
voir : il en a plus envie que jamais ;
il s'est déjà uni aux socialistes :
s'entendre avec euxlui paraîtrait un
sacrifice moins difficile qu'en no
vembre 1895. Malgré tous ses ef
forts présents, toutes ses protesta
tions, il accepterait de nouveau le
même joug,— pour régner. Quant
à M. Jaurès, comme cela le gênerait
peu d'avoir dénoncé l'alliance, du
moment où il trouverait à la re
nouer son avantage !
Forcément, un second ministère
Bourgeois, ce serait, pour les doc
trines .collectivistes, un second suc
cès, une autre poussée en avant,
plus forte sans doute que la pre
mière. Et le député de la Marne,
ce faux radical, qui n'a d'immodéré
que son ambition, accepterait cette
conséqùéricë. Tl se laisserait encore
conduire et appellerait cela gouver
ner !
Pierre V euillot.
—" 1 ' ♦ ... • * ——
BULLETIN DU JOUR
Hier, à la Chambre, suite de la dis
cussion du budget. Sur le chapitré rela
tifs l'impôt des sociétés et congrégations
s'est engagée une chaude discussion.
Nous donnons de larges extraits des im
portants discours prononcés par MM.
Alicot, Denys Cochin, l'abbé Lemire et
Cocliery, ministre des finances.
M. Denys Cochin a fait prendre en
considération un amendement « qui
dispenserait de l'impôt sur le revenu les
biens déjà dispensés du droit d'abonner
ment ». -
Le Sénat a continué hier la discussion,
du projet de loi sur la protection de la
santé publique.
Le Reichstag discute actuellement le
budget de la guerre de l'empire alle
mand. On trouvera plus loin des détails
sur ce débat qui présente, au point de
vue français, un intérêt tout particu
lier.
Toujours graves les nouvelles de Crète.
Les vaisseaux des grandes puissances
ont reçu l'ordre de s'opposer à une ac
tion de la flottille grecque.
La Chambre des communes a refusé,
hier, de voter la suppression du crédit
pour les quatre mille hommes qui com
posent l'armée anglo-égijp tienne.
D'autre part, le Parlement a adopté le
projet du gouvernement augmentant,
d'une manière notable, l'effectif de
l'armée britannique:
EN ORIENT
Aujourd'hui encore les nouvelles
d'Orient ne nous apportent rien de
nouveau en tant que faits positifs et
précis. Les résolutions des grandes
puissances à l'égard de la Grèce, en
raison de son intervention dans les
affaires de Crète, sont l'objet de
conjectures variées dans la presse
européenne, mais c'est tout.
On parle bien de représentations
faites au gouvernement d'Athènes,
mais rien ne prouve que toutes les
puissances se 'soient trouvées d'ac
cord pour parler sur le même ton
et avec la même force.
Des rumeurs qui ne sont pas sans
vraisemblance font craindre une
vraie déclaration de guerre entre
la Grèce et la Turquie, celle-ci me
naçant d'envahir la Thessalie, si les
Grecs interviennent en Crète. Il y a
là un danger imminent que les len
teurs et l'inertie des grandes puis
sances pourraient bien laisser écla
ter.
Pendant ce temps, tout le monde
parle à qui mieux mieux de respec
ter l'intégrité de l'empire ottoman,
ce qui doit paraître aux Turcs d'une
formidable ironie : sans parler de
l'Egypte, ils ont perdu, en Eu
rope, la Serbie, la Moldavie et la
Valachie, la Bulgarie . avec la Rou-
mélie, la Bosnie et l'Herzégovine,
la Thessalie et l'Epire, enfin en
Asie-Mineure l'île de Chypre. On ne
voit pas pourquoi, en présence de ce
long chapelet de provinces enle
vées à la domination directe ou à la
vassalité turque, l'Europe pourrait
faire difficulté, d'y ajouter l'île de
Crète en la donnant à la Grèce à la
quelle elle appartient moralement
et historiquement par l'affinité de
la race, de la religion et de la tra
dition.
Si du côté de l'Europe l'attitude
finale de l'Angleterre reste une
grosse énigme, il en est une plus
redoutable encore peut-être, en
Orient j dans l'attitude silencieuse
et obstinément- dilatoire du sultan;
, Dans le mystère de Yildiz-Kiosk,
on peut craindre que ne couve quel
que sombre résolution. Si le Sul
tan, estimant que la domination
turque est condamnée dans les ar
rière-pensées de l'Europe et que
l'exécution de la sentence n'est re
tardée que par les divisions et les
jalousies ; des puissances, en venait
à ne plus se considérer que comme :
le Commandeur des croyants et
prenait le parti, de faire appel à
ce fanatisme musulman dont on
sent partout la sourde fermenta
tion, il déchaînerait une conflagra
tion dont la seule pensée remplit
l'âme d'épouvante.
F. L. •.
LIS PMCMWS DE MÏIÏBS
Le Courrier de la Vienne annonce
que la Cour de cassation vient de
casser.:
.1° L'arrêt de la cour d'appel de
Poitiers condamnant M. Paul Oudin
à 300 francs d'amende pour « com
plicité de provocation à un attroupe
ment séditieux ».
2° Le jugement du tribunal cor
rectionnel de Poitiers condamnant
MM. Mousset, Marit, Robineau, de
Lagenest, Gléron et Prêt à 5 .francs
d'amende pour contravention à l'ar
rêté municipal interdisant les pro
cessions ;
3° Le s deux jugements de M. le
juge de paix Rossignol, condam
nant MM. Robain, Pichard et autres
à 2 francs d'amende pour contra
vention au même arrêté municipal.
— , » . : . '
A LA CHAMBRE
La loi de finances.
Après liquidation très prompte
des derniers chapitres concernant
les dépenses du ministère des finan
ces on a commencé l'étude*du bud
get des recettes.
C'est en réalité la législation ini
que du droit d'abonnement contre
les congrégations qui s'est trouvée
remise en discussion et qui a occupé
la plus grande partie de la séance.
. Cet impôt qui consacre une injus
tice et une illégalité a pu être une
fois de plus exposé" devant la
Chambre et jugé: il serait difficile de
ne pas convenir qu'il demeure con
damné par ceux mêmes qui tentè
rent de le défendre...
Tout d'abord, dans la discussion
générale, M. Dussaussoy avait mon
tré le péril social et national qui
résulte de l'exemption de l'impôt
accordée aux fonds disponibles, et
aux comptes courants des sociétés
de crédit ; puis, au cours de l'exa
men des articles, les députés de
l'Algérie avaient, d'ailleurs en vain,
réclamé la suppression du droit de
fabrication sur les absinthes ou si
milaires consommés dans notre
grande colonie d'Afrique, — M. Ali-*
cot déposait, à ce propos, un article
additionnel tendant à modifier l'ar
ticle 9 delà loi du 29 décembre 1884
qui détermine à 5 0^0 le revenu des
sociétés à moins qu'un revenu supé
rieur ne soit constaté. Il montrait
nettement combien il est injuste de
n'avoir point voulu prévoir le . cas
où ce revenu est inférieur à 5 0^0.
« Il s'agit là des congrégations,
« criait M. Rouanet, est-ce que le
« mot brûle vos lèvres ?»
Et M. Rouanet clamait une sot
tise, car il s'agit là de toutes les so
ciétés qui ne se partagent point de
bénéfices, sans savoir si elles fsont
composées de catholiques ou de pro
testants, d'israélistes ou de libres^
penseurs. -
A l'argumentation très nette et ir
réfutable de M. Alicot, il abien fallu
que le ministre répliquât;.il l'a fait
avec embarras : Ne touchez pas à la
loi de 1884 ! elle eut pour but d'évi
ter que l'administration reçût des
déclarations de revenu trop sou
vent illusoires, elle est applicable à
toutes les sociétés privées de con
seil d'administration, à moins qu'el
les ne prouvent n'avoir pas de re
venu.
« Nous ne demandons pas autre
« chose pour les congrégations,
« disait M. Alicot, nous réclamons
« pour elles le droit commun et la
« faculté de prouver qu'elles n'ont
« point de revenu. »
Mais les socialistes crient et ap
plaudissent le ministre. .. et M. Bris-
son préside avec une. scandaleuse
partialité : la prise en considération
est aussitôt mise aux voix et re
poussée par 347 voix contre 146.
« L'article suivant.... » commence
bien vite M. Brisson qui veut esca
moter une embarrassante discus
sion — et voici M. l'abbé' Lemire à
la tribune; il a un amendement à
présenter et la méchante humeur
au président ne l'empêchera point
de parler et de faire encore une
fois appel aux sentiments de justice
et d'équité de ses collègues.
Il remarque que certaines socié
tés de bienfaisance sont obligées
par la loi de transformer leur avoir
en rentes sur l'Etat qui rapportent
3 0^0 ; il demande simplement si el
les doivent continuer à payer l'im
pôt sur un revenu à forfait de 5 0i0.
Les socialistes se tordent : c'est
en effet fort drôle ! et voilà un pre
mier pas dans la voie, qui leur tient
tant à cœur, de l'expropriation ; le
e g
rappéïteur général du budget s'a
muse,'moins, il fait signe de son
banc que la commission repousse
l'amendèment, mais M. l'abbé Le
mire exige une réponse, unè expli
cation à ce déni de justice ; M.
Krantz voudrait bien, ne fût-ce que
pendant quelques instants, être à la
buvette ou siéger à l'extrême gau
che pour, pouvoir rire...
Il trouve, en gravissant les mar
ches de la tribune, un singulier
moyen de s'en tirer : la commission
ne discute pas — on le comprend
de reste! — mais elle combat la
modification proposée, la Chambre
ayant marqué là volonté de ne pas
toucher à la loi de 1884 « même dans
« les parties qui ne sont pas très
« claires».
I/argument a paru péremptoire
à la majorité ; On s'en est déclaré
satisfait par 363 voix contre 114.
« J'avertis la Chambre qu'il y a en
core un amendement », laisse
tristement tomber M. Brisson dé
couragé...
C'est celui de M. Denys Cochin.
Pour les associations de bienfai
sance et de charité exemptes, par,
la loi . même, si elles en font la de
mande,^-" droit d'accroissement,
l'orateur réclame la dispense de
l'impôt sur le revenu ; son discours
d'une éloquence sobre et d'une impi
toyable logique, à peine interrompu
par les cris^ d'énergumènea des ci
toyens Fabérot et Rouanet, con
quiert l'attention de la Chambre, de
la commission, du ministre.,
Ici, tous se sentent acculés : dût-
on déplaire à M. Coûtant, à M.
Chauvin, à M. Gustave-Adolphe
Hubbard, il est inutile de protester,
et M. Cochery déclare lui-même à
a tribune que l'impôt sur le revenu
semble ne-pas devoir s'appliquer
aux biens destinés obligatoirement
à des œuvres d'assistance. Cette
fois, le pacte clérical est affirmé et
les socialistes s'indignent, pour tout
de bon, de voir le gouvernement
lui-même se refuser à spolier les
admirables petites sœurs dès pau
vres qui hospitalisent et soignent
gratuitement les vieillards malades
et infirmes.
Ce point devra être clairement
défini dans la loi et la proposition
de M. Cochin a été renvoyée à la
commission, il en a été de même
d'un amendement de M. Linard ten
dant à autoriser la vente, par l'ad
ministration des contributions indi
rectes, des différents types étran
gers de poudres pyroxilées.
Gabriel de T riors.
TRISTE CAMPAGNE
glise et des prêtres que de- leurs grande?
chasses et de leurs fêtes mondaines...
Conformez-vous, cher oncle, aux indica
tions de votre bon curé, M. Ollivier ; c'est
un homme très éclairé et très dévoué à la
bonne cause. Sa conduite politique est ap
prouvée par tous les professeurs du grand
séminaire et les grosses têtes de Quimper.
En- le suivant, vous serez dans le droit
chemin. Bon courage donc, cher oncle,
faites un bon usage de votre influence ;
agissez sur vos parents, amis,» connaissan
ces et sur vos clients si nombreux, dont
j'espère que le nombre va en augmen
tant. •
Votre neveu affectionné,
Jean-Marie G...
L'Ami de Maryvonne.
Grand séminaire de Quimper,
22 janvier 1897,
Monsieur,
Le sénateurJosephFabre,voulant
montrer que s'il ajourne son inter
pellation contre les « menées cléri
cales » il n'y renonce pas, a commu
niqué au Matin, comme nous l'avons
dit hier, des « documents » sur les
quels il compte pour faire quelque
bruit. Ces documents sont, on le
sait déjà, trois lettres particulières
adressées par des séminaristes à
trois électeurs de la troisième cir
conscription de Brest. Toutes trois
appuient la candidature de M. l'abbé
Gayraud et M. Fabre en conclut
que leurs auteurs s'inspiraient visi
blement d'un canevas commun. La
Vérité ayant jugé utile à sa cause
de reproduire ces lettres avec le
petit commentaire du sénateur • an
ticlérical, nous devons les repro
duire aussi. Autrement, on nous
accuserait dans le camp réfractaire
de cacher les preuves de l 'action
abusive du clergé breton.
Voici donc ces trois lettres. Nous
ne garantissons ni qu'elles sont
complètes, ni qu'elles sont exactes.
Nous les donnons avec les titres
d'une ironie brutale, œuvre de M.
Fabre et telles qu'elles ont été re
produites par la Vérité.
Cher oncle.
Quimper, la 16 janvier 1897.' :
Cher oncle, -
Les divers régimes ne sont mauvais que
lorsque les hommes qui sont à la tête de
l'Etat sont mauvais : c'est ce qui existé
maintenant, comme vous l'avez constaté
depuis " longtemps, et justement le devoir
électoral de tout bon chrétien est de com
battre ceux qui dirigent actuellement la
France et de mettre à leur place des hom
mes qui aiment vraiment et protègent la
religion.
Par cela même qu'il désobéit à Léon XIII,
chef de l'Eglise catholique, le comte de
Blois n'est plus,un bon chrétien,, ni même
un bon Français ; car, en se posant comme
royaliste, il met obstacle à 1 union qui de
vrait se faire entre tous les honnêtes gens,
afin de résister avec sucoès aux méchants.
Il sait d'ailleurs très bien que, dans la si
tuation actuelle des choses, il est impossi
ble d'avoir un roi en France. Et même y
eût-il un roi, il est très probable que la
religion n'en profiterait guère. Au con
traire, elle serait peut-être plus opprimée
encore. En effet, le roi très chrétien est
mort.
Et, ce que le comte de Blois ne vous dira
point, c'est que le prétendant au trôné de
France est un descendant de Louis-Phi
lippe, dont l'histoire nous dit qu'il était un
homme sans Dieu, un adversaire acharna
des illustres catholiques de ce temps : c'est
que ce prétendant lui-même est, dit-on; un
jeune homme plus ou moins libertin ;fç'est
que les grands chefs royalistes sont ou 4ès,-
ennemis de la religion, ou du moins dë^
libres-penseurs s'ooeupant moins de l'E-"
Permettez-moi, s'il vous plaît, de vous
adresser un mot, quoique vous méconnais
siez probablement très peu. Votre épouse,
Maryvonne, me connaît mieux.
Quoi qu'il en soit, c'est dimanche qu'ont
lieu les-élections, comme vous le savez.
Il y a deux candidats en présence, entre
lesquels, je le sais, votre choix n'est pas
douteux, étant donné votre amour pour
notre sainte religion. Cependant, j'ai jugé
à propos de vous donner quelques éclair-,
cissements à ce sujet.
Vous avez peut-être trouvé étrange que
M. Gayraud, un prêtre catholique, se posât
comme candidat républicain. Or, il n'y a là
rien d'étonnant pour ceux qui sont au cou-
rant de la situation et des - enseignements
de N. S. P. le Pape.
En effet, Léon XIII, dans une encyclique
du mois de février 1893, a dit à tous les
catholiques français d'accepter la forme du
gouvernement actuelle, c'est-à-dire la Ré
publique, ipais la République débarrassée
des mauvaises lois qui sont actuellement
én vigueur sur les écoles, les congrégations
religieuses, etc. .
Or, le clergé de'France s'est soumis à ces
enseignements du Pape, et M. Gayraud
peut s'intituler candidat républicain ca
tholique, candidat du Pap'è, de l'èvêque; de
MM. les professeurs du grand séminaire...
M. de Blois, au contraire, n'est pas catho
lique,- parce qu'il ne s'est pas soumis aux
enseignements du Pape et rêve encore le
relèvement de la monarchie... ■
. Votre tout dévoué en Notre-Seigneur
Jésus-Christ.
J.-N. II.
Lui toujours!
Grand séminaire de Quimper
21 janvier 1897.
Mon cher G...,
Permettez-moi de vous entretenir des
prochaines élections... L'abbé Gayraud a
quitté l'habit dominicain uniquement dans
le but de se dévouer aux questions socia
les. Il n'a pas de famille à nourrir ni de
rang à soutenir, pas. de terres à diriger,
pas de domestiques pour chasser les bons
paysans qui voudraient parler à leur maî
tre. En votant pour l'abrié Gayraud, mon
cher G..., vous votez non pour.un roi, non
pour une république, mais pour votre reli
gion, pour votre Dieu.
Votre bon compatriote,
J.-M. Q.
« Et combien d'autres lettres encore,
. conclut M. Joseph Fabre, je pourrais sor
tir de mon dossier 1 II est nécessaire que le
gouvernement, prévenu, nous dise quelles
mesures il compte prendre sur cette nou
velle campagne du clergé. Voilà pourquoi
j'interpelle. »
Voici les commentaires dont la
Vérité fait suivre cette reproduc
tion;
Onsaitceque nous pensons de l'in
terpellation du sénateur radical de l'A-
veyron.
Nous avons, à cette occasion, rappelé
quels sont les principes dont doivent
s'inspirer les catholiques, et, en atten
dant le développementde l'interpellation,
il ne paraît pas nécessaire de revenir sur
ces observations, qui trouveront alors
leur application.
Quant aux lettres d'élèves du grand
séminaire de Quimper publiées par le
Matin, si elles sont authentiques, nous
n'hésitons pas adiré qu'elles sont profon
dément regrettables.
On ne saurait trop regretter, > en effet,
que des jeunes clercs, dont les études ne
sont pas spécialement dirigées vers les
luttes politiques, y interviennent de la
sorte, plus ou moins spontanément , soit
pour pousser à la haine des classes, soit
pour décider, contrairement aux encycli
ques pontificales dont ils s'arrogent la
mission de donner une interprétation to
talement vicieuse, qu'un candidat, parce
qu'il garde des préférences monarchistes,
éesse d'être catholique.
Si tel est l'enseignement qu'on donne
au grand séminaire rite non pas d'être déféré au jugement de
M. Fabre, du Sénat ou du gouvernement,
mais d'appeler l'attention d'autres juges
plus compétents.
Auguste Roussel.
Si Mgr l'évêque de Quimper ne
tient pas compte du nouvel avis
comminatoire que lui donne ici la
Vérité, il encourra certainement les
sévères répréhensions de cette feuil
le et de ses amis.
Quant aux lettres des trois sémi
naristes, il faut se reporter à leurs
dates et se rappeler combien alors
la lutte était ardente pour les bien
juger. Si l'on s'échauffait du côté
catholique, de l'autre côté on était
en feu. Dans ces cas-là l'exacte me
sure n'est nulle part observée. Les
catholiques, accusés par les réfrac-
taires de soutenir un candidat pré
chant la guerre des classes, l'incen
die des châteaux, la démagogie, le
socialisme, etc., etc., pouvaient dif
ficilement se défendre de toute ré-
partietrop vive.—Votre candidatest
un socialiste, un incendiaire, unmau
vais prêtre, leur criait-on. Ils ré
pondaient : Le vôtre a des domes
tiques qui écartent les bons pay
sans, il repousse les instructions du
Pape, il fait des avances aux enne
mi rriig de la religion, ce n'est plus un
tbbri chrétien, ce n'est plus un vrai
catholique.
Dans cette mêlée, ceux qui ont
criéjjle plus fort, le plus méconnu les
lois d'une lutte électorale correcte,
ce ne sont pas nos amis. Comme il
nous serait facile de le prouver si
nous ne voulions pas avant tout
qu'on rentrât dans la paix ! r
Quant aux lettres des trois sémi
naristes que prouvent-elles, en som
me? Elles prouvent que la bataille
électorale de Brest les intéressait
fort et que pleins de foi, pleins d'ar
deur, très dévoués à l'Eglise, très
zélés pour les directions pontificales,
ils souhaitaient ardemment dans -
l'intérêtdelareligionetde la Franco,
que le candidat qui répondait à
leurs aspirations fût élu.
Avaient-ils le droit, ces séminaris
tes, de marquer leurs préférences ?
Au point de vue de la loi, c'est sûr.
Au point de vue du monde, il en est
de même. Et la discipline ecclésias
tique? nous dit-on. Premièrement
cela ne nous regardé point, et, de
plus, il nous semble que, dans le
cas dont il s'agit, alors que tout le
diocèse se préoccupait vivement de
la campagne engagée, des sémi
naristes pouvaient sans abus don
ner leur avis à des parents ou
amis. r
: La Vérité, VAutorité et les autres
du même groupe veulent voir là un
abus et pour l'accentuer elles insi
nuent, comme M. Fabre, que les sé
minaristes ont écrit d'après un ca
nevas commun, c'est-à-dire sur' le
conseil ou l'ordre des professeurs.
Cela corse la dénonciation. -
Après avoir dit que la Vérité a
grandement raison de parler comme
elle le fait, VAutorité la cite et-
ajoute :
Il est inouï qu'à la fin du XIX e siècle,
de jeunes clercs se réclament du Pape
-pour prétendre qu'on n'est pas un bon
chrétien parce qu'on est royaliste, qu'on
n'est pas catholique parce qu'on souhaite
le rétablissement de la monarchie.
Une semblable confusion des questions
religieuses et politiques, une pareille in
trusion dans le domaine politique au nom
du catholicisme, nous ramènerait a une
intolérance analogue à celle qui, en des
temps plus violents, établit le régime de-
l'inquisition et éleva les autodafés.
Ne commentons pas ce commen
taire. A quoi bon ! Mais répétons-»
le : ce n'est pas l'acte mêmeae trois
séminaristes écrivant dans l'inti
mité contre un candidat au profit
d'un autre qui suscite cette colère
et ces menaces ; c'est l'appui donné
au catholique avant tout contre le
monarchiste-réfractaire. L'interven
tion et les vivacités de parole dont
l'on s'indigne, on les trouverait li
cites et même louables si elles
s'étaient produites en sens inverse.
Eugène V euillot.
AU SÉNAT
La protection de la santé publique.
Le Sénat, en votant l'amendement
de M. Volland, a, aux trois quarts,
démoli la loi sur la protection de la
santé publique qui lui était soumise.
MM.. Volland et Treille ont fait ob
server que cette loi, destinée pré-
tendûment, disaient-ils, à protéger
la santé publique, allait créer une
nouvelle armée de fonctionnaires,
lesquels auraient eu le droit de pé
nétrer dans l'intimité de nos de
meures.
M. Brouardel, commissaire du
gouvernement, trouvait cela tout
simple et déclarait qu'il était né
cessaire pour l'administration d'a
voir de nombreux agents afin de
« vaincre les résistances locales » ;
La haute assemblée n'a pas été
de cet avis et,par 197 voix contre 38,
elle a voté l'amendement de M. Vol
land, qui attribue àune commission
communale le droit de prendre les
mesures que réclame la santé pu-.
blique. La suite de la discussion a
été renvoyée à lundi. «
*
* *
Nous avons donné, hier, en Der
nière Heure, le texte de l'ordre du
jourque M, J. Fabre doit déposer le
jour de son interpellation sur « les
jagissements du clergé breton ».
^ Vigoureux! cet ordre du jour,
mais peut-être un peu rengaine.
Jadis, le morceau eût peut-être eu
quelque succès. Feu Ilavin écrivait
de ce style ; et les lecteurs du Siècle
l'appréciaient fort. Les correspon
dances de M. Ilomais, dans le Fa
nal de Rouen , devaient être aussi
du même goût. M. J. Fabre re
tarde.
C'est vraisemblablement jeudi
prochain que le Sénat prononcera
sur le cas de M. Constans. Le
•premièr bureau, chargé d'exami
ner l'élection de la Haute-Garonne,
se réunira en effet, lundi, pour en
tendre le rapport de M. Cordelet.
Le jour même, ce rapport sera dé
posé en séance et la discussion
viendra très probablement jeudi.
J„. M antena*.
I"
Dimanche 14 Février 1897
- ( 'OT?
Edltlonquotldienne.— 10,619
Dimanehe 14 Février 1897
ÉDITION QUOTIDIENNE
PARIS ÉTRANGER
et départements (union postale^
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Six mois...... 21 » 26 50
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LE MONDE
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; -Trois mois:..5 »/ 6;50;
Les abonhemëntà partent des 1 er et 16. de* cia^ue Jttoi®.
L'UNIVERS ne répond pas des mûnuscrits gui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAC t RANGB, CERF et C«", 6, place de Ja Bourse
PARIS, 13 FÉVRIER 18S7
SOMMAIRE
li'allianceforcée... . Pierre Veuillot.
Eu Orient F; L.
A la Chambre.... .. Gabriel de Triors.
Triste campagne.. . Eugène Veuillot.
Au Sénat...J. Mantenay.
Les conférences du
Luxembourg..... Edouard Alexandre
Bulletin du jeur. — Les processions de
Poitiers, -r Un discours du sous-pré
fet de Saumur. — Le Jubilé de S. Em.
le*cardinal Richard. — Les fredaines de
l'Assistance publique. — Le fiso et les
congrégations. — Informations politiques
et parlementaires. — Chambre des dé-»
putés. ~ Chronique. — Lettres, sciences
et arts. — Conférence tapageuse. — La
question ouvrière. — Les affaires de.
Crète. —""^Dépêches -de l'étranger. ■—
Chronique religieuse.— Echos de par
tout. — Les. sacrilèges. — Pèlerins en
justice, -*■ Tribunaux;— Nécrologie. —
Crues et inondations. — Nouvelles di
verses. — Calendrier. — Tableau et
bulletin de 1$ Bourse. — Dernière
heure.
L'ALLIANCE FORCÉE
Nous avons annoncé le grand duel
oratoire que MM. Bourgeois et Jau
rès, sur la provocation de celui-ci,
veulent engager à la prochaine oc
casion. La rencontre sera intéres
sante. Le député du Tarn sortira
tout l'attirail de sa vibrante rhétori
que ; le député- de la Marne mon
trera toute l'adresse élégante de sa
parole. On échangera des épigram-
mes, d'ailleurs mouchetées. Les
discours prouveront, clairement,
que les conceptions politiques et;
sociales des deux orateurs sont
contraires sur beaucoup de points.
L'entente apparaîtra dono impos
sible. Et le public, après avoir
écouté ou lu, croira qu'entre le ra
dicalisme et le collectivisme l'ai-/
liarice est rompue définitivement. !
Il n'en sera rien dû tout. La si
tuation est plus forte que M.'Bour
geois et que M. Jaurès. Elle les
oblige à rester pratiquement unis,
au grand avantage du socialisme.
Rejeté aujourd'hui dans l'opposi
tion, revenu demain au pouvoir, le
clxei'des radicaux est contraint de
marcher ayec MM. Millerand, Gé-
rault-Richard, Viviani, Jaurès,
Guesde, etc., etc. Il lui faut même
l'appui des Paberot, des Walter et
des Coûtant. Sans leur concours,
peut-il espérer jamais renverser le
ministère actuel ? Sans leur soutien,
Eeut-il s'imaginer qu'il garderait
uit jours son ministère futur, très
heureusement problématique ?
Ce que nous avons déjà vu, se re
produirait de toute nécessité. Quand
il a pris le pouvoir, en novembre
1895, M. Bourgeois n'avait aucune
ment l'intention de gouverner avec
les collectivistes. Il essaya même,
d'abord, de réunir un cabinet de
concentration.N'ayant pu,il forma un
ministère- homogène, radical. Mais
cet accord du centre et de la gau
che, qu'il n'avait pas su réaliser
entre dix aspirants au portefeuille,
il voulait espérer qu'il parviendrait
à, l'obtenir entre trois cent vingt
députés. Il manœuvrerait ainsi
contre une opposition formée par
les extrêmes : la droite, les ré
publicains -< ultra- modérés » d'une
part, et les socialistes de l'au
tre. M. Bourgeois a l'habitude,
malgré les mécomptes, d'avoir un
peu trop dé confiance dans son
adresse. L'événement déjoua .ses
prévisions. Tout de suite il eut
à combattre, non pas, comme
il » l'avait pensé, cinquante ou
soixante, mais , bien cent soixante
déjantés du centre. Pas de majo
rité sans les pires collectivistes. Il
s'en fut chercher de ce côté le
complément nécessaire ; et l'obtint,
qui semblait incompatible avec l'atti
tude « intégrale » observée par eux
jusqu'alors, descendirent un peu de
la montagne. M. Bourgeois- et M.
Jaurès devinrent alliés, chacun se
réservant d'attirer l'autre. Ce fut le
premier qui fit le plus de chemin.
Tous les jours, il avançait d'un pas.
Le Sénat, mit fin à cette marche
vers le bouleversement social.
Telle a été l'histoire du cabinet
Bourgeois-Doumer. Telle serait l'i
névitable histoire du ministère
Bourgeois-X... Je vois bien que le
député de la Marne veut nous re
plonger dans la concentration. Il l'a
toujours aimée- ; il l'aime encore ; il
y aspire de tout son cœur : c'est l'é
vidence même. Seulement, la con
centration ne dépend pas de lui
seul. Pour s'unir, il faut être au
moins deux. L'ancien président du
conseil dispose du parti simplement
radical et au fameux groupe Isam-
bert, — ce qui ne fait qu'un et lui
donne à peine cent cinquante voix.
Ni la majorité des radicaux-soçia-
ii&tes, que mène M. Goblet, à sa gau
che^ ni la majorité des républicains
de gouvernement, que conduisent
MM-Deschanel etPoincaré,à sa drôi-.
te,-ne -ventent de la concentration.
Toute l'adresse du monde né peut
prévaloir contre une incompatibilité
si formelle. Appelé par le président
de la République à former un mi
nistère, M. Bourgeois se trouverait
toujours en présence de cette diffi
culté. Passerait-il la main, comme
il l'a fait deux ou trois fois ? Peut ;
être. Mais il a déjà goûté du pou
voir : il en a plus envie que jamais ;
il s'est déjà uni aux socialistes :
s'entendre avec euxlui paraîtrait un
sacrifice moins difficile qu'en no
vembre 1895. Malgré tous ses ef
forts présents, toutes ses protesta
tions, il accepterait de nouveau le
même joug,— pour régner. Quant
à M. Jaurès, comme cela le gênerait
peu d'avoir dénoncé l'alliance, du
moment où il trouverait à la re
nouer son avantage !
Forcément, un second ministère
Bourgeois, ce serait, pour les doc
trines .collectivistes, un second suc
cès, une autre poussée en avant,
plus forte sans doute que la pre
mière. Et le député de la Marne,
ce faux radical, qui n'a d'immodéré
que son ambition, accepterait cette
conséqùéricë. Tl se laisserait encore
conduire et appellerait cela gouver
ner !
Pierre V euillot.
—" 1 ' ♦ ... • * ——
BULLETIN DU JOUR
Hier, à la Chambre, suite de la dis
cussion du budget. Sur le chapitré rela
tifs l'impôt des sociétés et congrégations
s'est engagée une chaude discussion.
Nous donnons de larges extraits des im
portants discours prononcés par MM.
Alicot, Denys Cochin, l'abbé Lemire et
Cocliery, ministre des finances.
M. Denys Cochin a fait prendre en
considération un amendement « qui
dispenserait de l'impôt sur le revenu les
biens déjà dispensés du droit d'abonner
ment ». -
Le Sénat a continué hier la discussion,
du projet de loi sur la protection de la
santé publique.
Le Reichstag discute actuellement le
budget de la guerre de l'empire alle
mand. On trouvera plus loin des détails
sur ce débat qui présente, au point de
vue français, un intérêt tout particu
lier.
Toujours graves les nouvelles de Crète.
Les vaisseaux des grandes puissances
ont reçu l'ordre de s'opposer à une ac
tion de la flottille grecque.
La Chambre des communes a refusé,
hier, de voter la suppression du crédit
pour les quatre mille hommes qui com
posent l'armée anglo-égijp tienne.
D'autre part, le Parlement a adopté le
projet du gouvernement augmentant,
d'une manière notable, l'effectif de
l'armée britannique:
EN ORIENT
Aujourd'hui encore les nouvelles
d'Orient ne nous apportent rien de
nouveau en tant que faits positifs et
précis. Les résolutions des grandes
puissances à l'égard de la Grèce, en
raison de son intervention dans les
affaires de Crète, sont l'objet de
conjectures variées dans la presse
européenne, mais c'est tout.
On parle bien de représentations
faites au gouvernement d'Athènes,
mais rien ne prouve que toutes les
puissances se 'soient trouvées d'ac
cord pour parler sur le même ton
et avec la même force.
Des rumeurs qui ne sont pas sans
vraisemblance font craindre une
vraie déclaration de guerre entre
la Grèce et la Turquie, celle-ci me
naçant d'envahir la Thessalie, si les
Grecs interviennent en Crète. Il y a
là un danger imminent que les len
teurs et l'inertie des grandes puis
sances pourraient bien laisser écla
ter.
Pendant ce temps, tout le monde
parle à qui mieux mieux de respec
ter l'intégrité de l'empire ottoman,
ce qui doit paraître aux Turcs d'une
formidable ironie : sans parler de
l'Egypte, ils ont perdu, en Eu
rope, la Serbie, la Moldavie et la
Valachie, la Bulgarie . avec la Rou-
mélie, la Bosnie et l'Herzégovine,
la Thessalie et l'Epire, enfin en
Asie-Mineure l'île de Chypre. On ne
voit pas pourquoi, en présence de ce
long chapelet de provinces enle
vées à la domination directe ou à la
vassalité turque, l'Europe pourrait
faire difficulté, d'y ajouter l'île de
Crète en la donnant à la Grèce à la
quelle elle appartient moralement
et historiquement par l'affinité de
la race, de la religion et de la tra
dition.
Si du côté de l'Europe l'attitude
finale de l'Angleterre reste une
grosse énigme, il en est une plus
redoutable encore peut-être, en
Orient j dans l'attitude silencieuse
et obstinément- dilatoire du sultan;
, Dans le mystère de Yildiz-Kiosk,
on peut craindre que ne couve quel
que sombre résolution. Si le Sul
tan, estimant que la domination
turque est condamnée dans les ar
rière-pensées de l'Europe et que
l'exécution de la sentence n'est re
tardée que par les divisions et les
jalousies ; des puissances, en venait
à ne plus se considérer que comme :
le Commandeur des croyants et
prenait le parti, de faire appel à
ce fanatisme musulman dont on
sent partout la sourde fermenta
tion, il déchaînerait une conflagra
tion dont la seule pensée remplit
l'âme d'épouvante.
F. L. •.
LIS PMCMWS DE MÏIÏBS
Le Courrier de la Vienne annonce
que la Cour de cassation vient de
casser.:
.1° L'arrêt de la cour d'appel de
Poitiers condamnant M. Paul Oudin
à 300 francs d'amende pour « com
plicité de provocation à un attroupe
ment séditieux ».
2° Le jugement du tribunal cor
rectionnel de Poitiers condamnant
MM. Mousset, Marit, Robineau, de
Lagenest, Gléron et Prêt à 5 .francs
d'amende pour contravention à l'ar
rêté municipal interdisant les pro
cessions ;
3° Le s deux jugements de M. le
juge de paix Rossignol, condam
nant MM. Robain, Pichard et autres
à 2 francs d'amende pour contra
vention au même arrêté municipal.
— , » . : . '
A LA CHAMBRE
La loi de finances.
Après liquidation très prompte
des derniers chapitres concernant
les dépenses du ministère des finan
ces on a commencé l'étude*du bud
get des recettes.
C'est en réalité la législation ini
que du droit d'abonnement contre
les congrégations qui s'est trouvée
remise en discussion et qui a occupé
la plus grande partie de la séance.
. Cet impôt qui consacre une injus
tice et une illégalité a pu être une
fois de plus exposé" devant la
Chambre et jugé: il serait difficile de
ne pas convenir qu'il demeure con
damné par ceux mêmes qui tentè
rent de le défendre...
Tout d'abord, dans la discussion
générale, M. Dussaussoy avait mon
tré le péril social et national qui
résulte de l'exemption de l'impôt
accordée aux fonds disponibles, et
aux comptes courants des sociétés
de crédit ; puis, au cours de l'exa
men des articles, les députés de
l'Algérie avaient, d'ailleurs en vain,
réclamé la suppression du droit de
fabrication sur les absinthes ou si
milaires consommés dans notre
grande colonie d'Afrique, — M. Ali-*
cot déposait, à ce propos, un article
additionnel tendant à modifier l'ar
ticle 9 delà loi du 29 décembre 1884
qui détermine à 5 0^0 le revenu des
sociétés à moins qu'un revenu supé
rieur ne soit constaté. Il montrait
nettement combien il est injuste de
n'avoir point voulu prévoir le . cas
où ce revenu est inférieur à 5 0^0.
« Il s'agit là des congrégations,
« criait M. Rouanet, est-ce que le
« mot brûle vos lèvres ?»
Et M. Rouanet clamait une sot
tise, car il s'agit là de toutes les so
ciétés qui ne se partagent point de
bénéfices, sans savoir si elles fsont
composées de catholiques ou de pro
testants, d'israélistes ou de libres^
penseurs. -
A l'argumentation très nette et ir
réfutable de M. Alicot, il abien fallu
que le ministre répliquât;.il l'a fait
avec embarras : Ne touchez pas à la
loi de 1884 ! elle eut pour but d'évi
ter que l'administration reçût des
déclarations de revenu trop sou
vent illusoires, elle est applicable à
toutes les sociétés privées de con
seil d'administration, à moins qu'el
les ne prouvent n'avoir pas de re
venu.
« Nous ne demandons pas autre
« chose pour les congrégations,
« disait M. Alicot, nous réclamons
« pour elles le droit commun et la
« faculté de prouver qu'elles n'ont
« point de revenu. »
Mais les socialistes crient et ap
plaudissent le ministre. .. et M. Bris-
son préside avec une. scandaleuse
partialité : la prise en considération
est aussitôt mise aux voix et re
poussée par 347 voix contre 146.
« L'article suivant.... » commence
bien vite M. Brisson qui veut esca
moter une embarrassante discus
sion — et voici M. l'abbé' Lemire à
la tribune; il a un amendement à
présenter et la méchante humeur
au président ne l'empêchera point
de parler et de faire encore une
fois appel aux sentiments de justice
et d'équité de ses collègues.
Il remarque que certaines socié
tés de bienfaisance sont obligées
par la loi de transformer leur avoir
en rentes sur l'Etat qui rapportent
3 0^0 ; il demande simplement si el
les doivent continuer à payer l'im
pôt sur un revenu à forfait de 5 0i0.
Les socialistes se tordent : c'est
en effet fort drôle ! et voilà un pre
mier pas dans la voie, qui leur tient
tant à cœur, de l'expropriation ; le
e g
rappéïteur général du budget s'a
muse,'moins, il fait signe de son
banc que la commission repousse
l'amendèment, mais M. l'abbé Le
mire exige une réponse, unè expli
cation à ce déni de justice ; M.
Krantz voudrait bien, ne fût-ce que
pendant quelques instants, être à la
buvette ou siéger à l'extrême gau
che pour, pouvoir rire...
Il trouve, en gravissant les mar
ches de la tribune, un singulier
moyen de s'en tirer : la commission
ne discute pas — on le comprend
de reste! — mais elle combat la
modification proposée, la Chambre
ayant marqué là volonté de ne pas
toucher à la loi de 1884 « même dans
« les parties qui ne sont pas très
« claires».
I/argument a paru péremptoire
à la majorité ; On s'en est déclaré
satisfait par 363 voix contre 114.
« J'avertis la Chambre qu'il y a en
core un amendement », laisse
tristement tomber M. Brisson dé
couragé...
C'est celui de M. Denys Cochin.
Pour les associations de bienfai
sance et de charité exemptes, par,
la loi . même, si elles en font la de
mande,^-" droit d'accroissement,
l'orateur réclame la dispense de
l'impôt sur le revenu ; son discours
d'une éloquence sobre et d'une impi
toyable logique, à peine interrompu
par les cris^ d'énergumènea des ci
toyens Fabérot et Rouanet, con
quiert l'attention de la Chambre, de
la commission, du ministre.,
Ici, tous se sentent acculés : dût-
on déplaire à M. Coûtant, à M.
Chauvin, à M. Gustave-Adolphe
Hubbard, il est inutile de protester,
et M. Cochery déclare lui-même à
a tribune que l'impôt sur le revenu
semble ne-pas devoir s'appliquer
aux biens destinés obligatoirement
à des œuvres d'assistance. Cette
fois, le pacte clérical est affirmé et
les socialistes s'indignent, pour tout
de bon, de voir le gouvernement
lui-même se refuser à spolier les
admirables petites sœurs dès pau
vres qui hospitalisent et soignent
gratuitement les vieillards malades
et infirmes.
Ce point devra être clairement
défini dans la loi et la proposition
de M. Cochin a été renvoyée à la
commission, il en a été de même
d'un amendement de M. Linard ten
dant à autoriser la vente, par l'ad
ministration des contributions indi
rectes, des différents types étran
gers de poudres pyroxilées.
Gabriel de T riors.
TRISTE CAMPAGNE
glise et des prêtres que de- leurs grande?
chasses et de leurs fêtes mondaines...
Conformez-vous, cher oncle, aux indica
tions de votre bon curé, M. Ollivier ; c'est
un homme très éclairé et très dévoué à la
bonne cause. Sa conduite politique est ap
prouvée par tous les professeurs du grand
séminaire et les grosses têtes de Quimper.
En- le suivant, vous serez dans le droit
chemin. Bon courage donc, cher oncle,
faites un bon usage de votre influence ;
agissez sur vos parents, amis,» connaissan
ces et sur vos clients si nombreux, dont
j'espère que le nombre va en augmen
tant. •
Votre neveu affectionné,
Jean-Marie G...
L'Ami de Maryvonne.
Grand séminaire de Quimper,
22 janvier 1897,
Monsieur,
Le sénateurJosephFabre,voulant
montrer que s'il ajourne son inter
pellation contre les « menées cléri
cales » il n'y renonce pas, a commu
niqué au Matin, comme nous l'avons
dit hier, des « documents » sur les
quels il compte pour faire quelque
bruit. Ces documents sont, on le
sait déjà, trois lettres particulières
adressées par des séminaristes à
trois électeurs de la troisième cir
conscription de Brest. Toutes trois
appuient la candidature de M. l'abbé
Gayraud et M. Fabre en conclut
que leurs auteurs s'inspiraient visi
blement d'un canevas commun. La
Vérité ayant jugé utile à sa cause
de reproduire ces lettres avec le
petit commentaire du sénateur • an
ticlérical, nous devons les repro
duire aussi. Autrement, on nous
accuserait dans le camp réfractaire
de cacher les preuves de l 'action
abusive du clergé breton.
Voici donc ces trois lettres. Nous
ne garantissons ni qu'elles sont
complètes, ni qu'elles sont exactes.
Nous les donnons avec les titres
d'une ironie brutale, œuvre de M.
Fabre et telles qu'elles ont été re
produites par la Vérité.
Cher oncle.
Quimper, la 16 janvier 1897.' :
Cher oncle, -
Les divers régimes ne sont mauvais que
lorsque les hommes qui sont à la tête de
l'Etat sont mauvais : c'est ce qui existé
maintenant, comme vous l'avez constaté
depuis " longtemps, et justement le devoir
électoral de tout bon chrétien est de com
battre ceux qui dirigent actuellement la
France et de mettre à leur place des hom
mes qui aiment vraiment et protègent la
religion.
Par cela même qu'il désobéit à Léon XIII,
chef de l'Eglise catholique, le comte de
Blois n'est plus,un bon chrétien,, ni même
un bon Français ; car, en se posant comme
royaliste, il met obstacle à 1 union qui de
vrait se faire entre tous les honnêtes gens,
afin de résister avec sucoès aux méchants.
Il sait d'ailleurs très bien que, dans la si
tuation actuelle des choses, il est impossi
ble d'avoir un roi en France. Et même y
eût-il un roi, il est très probable que la
religion n'en profiterait guère. Au con
traire, elle serait peut-être plus opprimée
encore. En effet, le roi très chrétien est
mort.
Et, ce que le comte de Blois ne vous dira
point, c'est que le prétendant au trôné de
France est un descendant de Louis-Phi
lippe, dont l'histoire nous dit qu'il était un
homme sans Dieu, un adversaire acharna
des illustres catholiques de ce temps : c'est
que ce prétendant lui-même est, dit-on; un
jeune homme plus ou moins libertin ;fç'est
que les grands chefs royalistes sont ou 4ès,-
ennemis de la religion, ou du moins dë^
libres-penseurs s'ooeupant moins de l'E-"
Permettez-moi, s'il vous plaît, de vous
adresser un mot, quoique vous méconnais
siez probablement très peu. Votre épouse,
Maryvonne, me connaît mieux.
Quoi qu'il en soit, c'est dimanche qu'ont
lieu les-élections, comme vous le savez.
Il y a deux candidats en présence, entre
lesquels, je le sais, votre choix n'est pas
douteux, étant donné votre amour pour
notre sainte religion. Cependant, j'ai jugé
à propos de vous donner quelques éclair-,
cissements à ce sujet.
Vous avez peut-être trouvé étrange que
M. Gayraud, un prêtre catholique, se posât
comme candidat républicain. Or, il n'y a là
rien d'étonnant pour ceux qui sont au cou-
rant de la situation et des - enseignements
de N. S. P. le Pape.
En effet, Léon XIII, dans une encyclique
du mois de février 1893, a dit à tous les
catholiques français d'accepter la forme du
gouvernement actuelle, c'est-à-dire la Ré
publique, ipais la République débarrassée
des mauvaises lois qui sont actuellement
én vigueur sur les écoles, les congrégations
religieuses, etc. .
Or, le clergé de'France s'est soumis à ces
enseignements du Pape, et M. Gayraud
peut s'intituler candidat républicain ca
tholique, candidat du Pap'è, de l'èvêque; de
MM. les professeurs du grand séminaire...
M. de Blois, au contraire, n'est pas catho
lique,- parce qu'il ne s'est pas soumis aux
enseignements du Pape et rêve encore le
relèvement de la monarchie... ■
. Votre tout dévoué en Notre-Seigneur
Jésus-Christ.
J.-N. II.
Lui toujours!
Grand séminaire de Quimper
21 janvier 1897.
Mon cher G...,
Permettez-moi de vous entretenir des
prochaines élections... L'abbé Gayraud a
quitté l'habit dominicain uniquement dans
le but de se dévouer aux questions socia
les. Il n'a pas de famille à nourrir ni de
rang à soutenir, pas. de terres à diriger,
pas de domestiques pour chasser les bons
paysans qui voudraient parler à leur maî
tre. En votant pour l'abrié Gayraud, mon
cher G..., vous votez non pour.un roi, non
pour une république, mais pour votre reli
gion, pour votre Dieu.
Votre bon compatriote,
J.-M. Q.
« Et combien d'autres lettres encore,
. conclut M. Joseph Fabre, je pourrais sor
tir de mon dossier 1 II est nécessaire que le
gouvernement, prévenu, nous dise quelles
mesures il compte prendre sur cette nou
velle campagne du clergé. Voilà pourquoi
j'interpelle. »
Voici les commentaires dont la
Vérité fait suivre cette reproduc
tion;
Onsaitceque nous pensons de l'in
terpellation du sénateur radical de l'A-
veyron.
Nous avons, à cette occasion, rappelé
quels sont les principes dont doivent
s'inspirer les catholiques, et, en atten
dant le développementde l'interpellation,
il ne paraît pas nécessaire de revenir sur
ces observations, qui trouveront alors
leur application.
Quant aux lettres d'élèves du grand
séminaire de Quimper publiées par le
Matin, si elles sont authentiques, nous
n'hésitons pas adiré qu'elles sont profon
dément regrettables.
On ne saurait trop regretter, > en effet,
que des jeunes clercs, dont les études ne
sont pas spécialement dirigées vers les
luttes politiques, y interviennent de la
sorte, plus ou moins spontanément , soit
pour pousser à la haine des classes, soit
pour décider, contrairement aux encycli
ques pontificales dont ils s'arrogent la
mission de donner une interprétation to
talement vicieuse, qu'un candidat, parce
qu'il garde des préférences monarchistes,
éesse d'être catholique.
Si tel est l'enseignement qu'on donne
au grand séminaire
M. Fabre, du Sénat ou du gouvernement,
mais d'appeler l'attention d'autres juges
plus compétents.
Auguste Roussel.
Si Mgr l'évêque de Quimper ne
tient pas compte du nouvel avis
comminatoire que lui donne ici la
Vérité, il encourra certainement les
sévères répréhensions de cette feuil
le et de ses amis.
Quant aux lettres des trois sémi
naristes, il faut se reporter à leurs
dates et se rappeler combien alors
la lutte était ardente pour les bien
juger. Si l'on s'échauffait du côté
catholique, de l'autre côté on était
en feu. Dans ces cas-là l'exacte me
sure n'est nulle part observée. Les
catholiques, accusés par les réfrac-
taires de soutenir un candidat pré
chant la guerre des classes, l'incen
die des châteaux, la démagogie, le
socialisme, etc., etc., pouvaient dif
ficilement se défendre de toute ré-
partietrop vive.—Votre candidatest
un socialiste, un incendiaire, unmau
vais prêtre, leur criait-on. Ils ré
pondaient : Le vôtre a des domes
tiques qui écartent les bons pay
sans, il repousse les instructions du
Pape, il fait des avances aux enne
mi rriig de la religion, ce n'est plus un
tbbri chrétien, ce n'est plus un vrai
catholique.
Dans cette mêlée, ceux qui ont
criéjjle plus fort, le plus méconnu les
lois d'une lutte électorale correcte,
ce ne sont pas nos amis. Comme il
nous serait facile de le prouver si
nous ne voulions pas avant tout
qu'on rentrât dans la paix ! r
Quant aux lettres des trois sémi
naristes que prouvent-elles, en som
me? Elles prouvent que la bataille
électorale de Brest les intéressait
fort et que pleins de foi, pleins d'ar
deur, très dévoués à l'Eglise, très
zélés pour les directions pontificales,
ils souhaitaient ardemment dans -
l'intérêtdelareligionetde la Franco,
que le candidat qui répondait à
leurs aspirations fût élu.
Avaient-ils le droit, ces séminaris
tes, de marquer leurs préférences ?
Au point de vue de la loi, c'est sûr.
Au point de vue du monde, il en est
de même. Et la discipline ecclésias
tique? nous dit-on. Premièrement
cela ne nous regardé point, et, de
plus, il nous semble que, dans le
cas dont il s'agit, alors que tout le
diocèse se préoccupait vivement de
la campagne engagée, des sémi
naristes pouvaient sans abus don
ner leur avis à des parents ou
amis. r
: La Vérité, VAutorité et les autres
du même groupe veulent voir là un
abus et pour l'accentuer elles insi
nuent, comme M. Fabre, que les sé
minaristes ont écrit d'après un ca
nevas commun, c'est-à-dire sur' le
conseil ou l'ordre des professeurs.
Cela corse la dénonciation. -
Après avoir dit que la Vérité a
grandement raison de parler comme
elle le fait, VAutorité la cite et-
ajoute :
Il est inouï qu'à la fin du XIX e siècle,
de jeunes clercs se réclament du Pape
-pour prétendre qu'on n'est pas un bon
chrétien parce qu'on est royaliste, qu'on
n'est pas catholique parce qu'on souhaite
le rétablissement de la monarchie.
Une semblable confusion des questions
religieuses et politiques, une pareille in
trusion dans le domaine politique au nom
du catholicisme, nous ramènerait a une
intolérance analogue à celle qui, en des
temps plus violents, établit le régime de-
l'inquisition et éleva les autodafés.
Ne commentons pas ce commen
taire. A quoi bon ! Mais répétons-»
le : ce n'est pas l'acte mêmeae trois
séminaristes écrivant dans l'inti
mité contre un candidat au profit
d'un autre qui suscite cette colère
et ces menaces ; c'est l'appui donné
au catholique avant tout contre le
monarchiste-réfractaire. L'interven
tion et les vivacités de parole dont
l'on s'indigne, on les trouverait li
cites et même louables si elles
s'étaient produites en sens inverse.
Eugène V euillot.
AU SÉNAT
La protection de la santé publique.
Le Sénat, en votant l'amendement
de M. Volland, a, aux trois quarts,
démoli la loi sur la protection de la
santé publique qui lui était soumise.
MM.. Volland et Treille ont fait ob
server que cette loi, destinée pré-
tendûment, disaient-ils, à protéger
la santé publique, allait créer une
nouvelle armée de fonctionnaires,
lesquels auraient eu le droit de pé
nétrer dans l'intimité de nos de
meures.
M. Brouardel, commissaire du
gouvernement, trouvait cela tout
simple et déclarait qu'il était né
cessaire pour l'administration d'a
voir de nombreux agents afin de
« vaincre les résistances locales » ;
La haute assemblée n'a pas été
de cet avis et,par 197 voix contre 38,
elle a voté l'amendement de M. Vol
land, qui attribue àune commission
communale le droit de prendre les
mesures que réclame la santé pu-.
blique. La suite de la discussion a
été renvoyée à lundi. «
*
* *
Nous avons donné, hier, en Der
nière Heure, le texte de l'ordre du
jourque M, J. Fabre doit déposer le
jour de son interpellation sur « les
jagissements du clergé breton ».
^ Vigoureux! cet ordre du jour,
mais peut-être un peu rengaine.
Jadis, le morceau eût peut-être eu
quelque succès. Feu Ilavin écrivait
de ce style ; et les lecteurs du Siècle
l'appréciaient fort. Les correspon
dances de M. Ilomais, dans le Fa
nal de Rouen , devaient être aussi
du même goût. M. J. Fabre re
tarde.
C'est vraisemblablement jeudi
prochain que le Sénat prononcera
sur le cas de M. Constans. Le
•premièr bureau, chargé d'exami
ner l'élection de la Haute-Garonne,
se réunira en effet, lundi, pour en
tendre le rapport de M. Cordelet.
Le jour même, ce rapport sera dé
posé en séance et la discussion
viendra très probablement jeudi.
J„. M antena*.
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