Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-02-04
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 04 février 1897 04 février 1897
Description : 1897/02/04 (Numéro 10610). 1897/02/04 (Numéro 10610).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG44 Collection numérique : BIPFPIG44
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7093919
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Jeùdi 4 Février 1897
Edition quotidienne. — 10,610
ÉDITION QUOTIDIENNE
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L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C io , 6, placé de k Bourse
PARIS, 3 FÉVRIER 1897
SOMMAIRE
A propos du parti
socialiste et de l'u- t f
mon...;.......... F rançois V euillot.
N'est-ce paa assez?. E ugène V euillot.
Çà et là : Archie et
cratie.vv.......... G. d' A zambuja.
A la Chambre G abriel de T riors.
Au Sénat J. M antenay.
La Constitution a-
postolique sur
l'« Index ......... ;
Bulletin du jour. — Nouvelles de Rome.
—• Rectification. — L'élection de Brest. —
Le vitrail de M. Bourgeois. — Questions
d'Arménie. — Prouesse allemande.— Le
fisc et les congrégations. — Informa
tions politiques et parlementaires. ~ Une
circulaire ministérielle.— Mme la du
chesse de Montpensier. — Les scandales.
— Chronique. — Lettres, sciences et
arts. — A Clichy. — Canonisation, du
bienheureux Fourier. — Echos de par
tout. — Le servicè médical de nuit. —Dé
pêches de l'étranger. — La peste. —
Guerre et marine. —Nécrologie. -r- Nou
velles diverses. — Dernière heure. — Ta
bleau et bulletin de la Bourse.
A PROPOS LU PARTI SOCIALISTE
ET DE L'UNION
Tous les jours, la division aug
mente au sein du parti socialiste et
fait éclore, au milieu de ses rangs,
de nouveaux groupes, donnant nais
sance à de nouveaux sous-groupes.
Ce parti, vraiment, semble des
tiné à se fractionner à l'infini: dès
qu'il se fonde une petite église à
1 extrême gauche, on peut être cer
tain qu'elle sera bientôt cassée en
deux ou trois petites chapelles. Et,
chose cùrieuse et digne d'attention,
chaque fois que se produit ce phé
nomène, un pas de plus est fait aans
le sens dé la révolution sociale ; et
la sous-fraction la plus avancée réu
nit toujours le plus grand nombre
d'adhérents.
La Petite République «st, à ce
point dé vue, un thermomètre ex
cellent du parti.
Voici trois ouquatre ans,M. Goblet
dirigeait cè journal avec le concours
de M. Millerand ; M. Goblet était
alors à peu près socialiste et frater
nisait avec les partisans de la sociale
et du « chambardement ». Fut-il ef
frayé, un jour qu'il se regardait sé
rieusement, de se voir aussi révo
lutionnaire ou biën comprit-il que,
poiir assouvir son prurit de minis
tère, il lui fallait adoucir un peu ses
opinions ? — toujours est-il que M.
Goblet se sépara bientôt ae ses
compromettants alliés. Mais la Pe
tite République et le plus gros de la
fraction resta fidèle à M. Millerand ;
et le journal socialiste, allégé des
timidités de M. Goblet, accentua sa
couleur roiige. A quelque temps de
là, M. Jules Guesde et son ami Chau
vin renforcèrent l'équipe de la
feuille révolutionnaire; toutefois, M.
Millerand demeura le maître. Un
peu plus tard, l'ex-farouche Basly
sortit de la maison,. escorté de
quelques compagnons désireux,
comme lui, de s'embourgeoiser et
de s'opporturiiser. Mais le gouver
nement restait toujours entre les
mains de M. Millerand. Cependant,
l'adjonction ; du terrible Guesde et la
sortie du néo-modéré Basly n'é
taient pas sans, rendre la feuille
•un peu plus révolutionnaire.
Aujourd'hui, nouvelle scission
dans le parti ; nouvelle accentuation
des idées vers l'extrême extrême-
gauche. Et voici que l'organe socia
liste, échappant aux mains de M.
Millerand, tombé au pouvoir de M.
Jules Guesde, avec la plus grande
partie de se&anciens rédacteurs.
C'est de la sorte, en effet, que
vient de se terminer la crise, 'ou
verte il y a quelque temps, à la Pe
tite République. On se souvient que
'la rédaction tout entière avait aban
donné ce journal entre les mains de
l'administrateur et en même temps,
pserais-je dire,' à son malheureux
sort. Mais ce n?était qu'une feinte ;
et si M. Millerand, jusque-là grand
chef, était obligéde sortir en vaincu,
M. Guesde emportait l'espoir et
l'ambition de revenir en maître,
après qu'on aurait nettoyé la place.
Aujourd'hui, la chose est faite.
L'organe du parti socialiste appar
tient à M. Guesde, entouré de nom
breux amis, et M. Millerand, flanqué
de MM. Viviani et Rouanet, reste à
•la porte.
C'est donc une division nôuvélle
au sein du parti et, comme nous le
faisions remarquer tout à l'heure,
un succès pour l'opinion la plus
avancée. M. Millerand n'est plus
qu'un opportuniste.
On peut se réjouir, quand éclate
-une division dans l'armée ennemie.
■Aujourd'hui cependant, nous au
rions tort de nous abandonner tout
h la joie. Les socialistes sont di-,
visés ; mais ils sont unis. Ceci a l'air j
"d'un paradoxe et c'est pourtant une !
vérité. Le parti socialiste est frac- !,
tionné en maints groupes, sous-
groupës, chapelles'et cénacles; mais
tout cela, ce sont des grains de
plomb qui font balle. Il est surpre
nant comme ces révolutionnaires
savent s'unir et devenir compacts,
pour marcher à l'assaut de la so
ciété capitaliste et même, — ils l'ont
montré pendant le cabinet Bour
geois, •— pour accomplir une ma
nœuvre parlementaire. Et, malgré
ces dissentiments qui créent au
milieu d'eux tant d'écoles diverses,
ils ont grandi, ils se sont accrus
en nombre et en force. Il ne faut
pas les craindre, assurément : mais
il ne faut pas non plus les dédai
gner; il faut se rendre un compte
exact de leur puissance et les com
battre énergiquement.
Il faut faire plus encore; il faut,
raillant leurs divisions, ne pas s'ex
poser, de leur part, aux mêmes
railleries. Il faut nous unir étroite
ment, malgré les inévitables dis
sentiments qui nous séparent, pour
marcher à l'assaut de la législation
sectaire et des anticléricaux,—
comme, eux, ils marchent en
rangs serrés contre l'état social
détruire. Existe-t-il
possède, ainsi que
chef incoaitestablè,
lumière divine et
autorité lui don-
qu'ils veulent
un parti qui
le nôtre , un
assisté d'une
pourvu d'une
nant le droit de commander et
le droit d'être obéi, quand la ques
tion politique est liée par des liens
si étroits aux intérêts supérieurs de
la religion? — Car enfin, ou bien
l'on se refuse à placer la question
religieuse avant tout, ou Dien, si
l'on met avant tout la question reli-
tieuste, on doit reconnaître au chef
e la religion le droit de commander.
—■ Et, dans ces conditions, avant ce
privilège unique, entre tous les par-
tis^de posséder un chef qui nous a
marque le terrain du combat, com
ment se fait-il que nous ne soyons
Êas unis sur ce terrain, pour com-
attre l'ennemi commun? Si tous
ceux qui prêchent l'union venaient
se placer sur le seul terrain où elle
peut s'opérer — parce que c'est le
èeulcpi ait été choisi par l'autorité
suprême — on gérait uni depuis
longtemps et l'on posséderait; chez
nous, cette ^cohésion dans l'assaut,
dont le parti socialiste, en dépit de
ses dissensions, nous a toujours
donné l'exemple. Assurément l'u
nion,dans les conditions ordinaires,
doit être faite de concessions mu
tuelles. Mais sommes-nous dans les
conditions ordinaires, quand le Pape,
a pris soin de nous prescrire un
terrain de combat ? Nous formons
une armée ; le général en chef a
donne un ordre; ils seront donc seuls
coupables de la désunion, ceux qui
refuseront d'obéir. Mais,Dieu merci,
leur nombre diminue ; il sera de
plus en plus négligeable et le jour
viendra ou, unis pour la lutte, en dé
pit des divergences d'opinion qui
pourront subsister entre les es
prits, nous mènerons enfin victo
rieusement la bataille ordonnée par
Léon XIII.
François V euillot.
BULLETIN DU JOUR
L'interpellation de M. Joseph Fabre
sur l'élection de Brest sera, discutée au
Sénat le 12 février.
Les promotions et 'nominations dans
la Légion d'honneur, en préparation
dans les divers ministères civils, seront
définitivement arrêtées'dans le conseil de
cabinet de demain jeudi et transmises au
conseil de la Légion d'honneur, qui -se
réunira spécialement vendredi pour les
examiner.
La Petite République cesse d'être ûn
journal d'union socialiste : elle devient
un organe guesdiste.
. La nouvelle de là signature d'un traité
de commerce entre la France et l'Ethio
pie inquiète la presse anglaise -, le
Morning Post déclare notamment que i
« l'Angleterre, comme puissance prédo- i
minante dans la vallée du Nil; doit
veiller à ce que ses intérêts rie soient pas i
lésés par cette admission de l'Abyssinie j
dans la liste des Etats civilisés ».
Le Parlement anglais sera saisi d'un i
projet de crédit destiné à assister finan
cièrement le gouvernement égyptien
pour la récente expédition contre les i
derviches. :
On annonce que les ministres d»\
France et de Russie au Caire ont reçu i
l'ordre de protester auprès du khédive ;
contre cette aide prêtée par le gouverne- ;
ment britannique.
Les nouvelles de Crète sont alarman
tes : l'ordre est de nouveau troublé. On
trouvera des détails aux Dépêches de
l'étranger.
La plupart des journaux italiens'
cherchent à donner une importance po
litique à la présence de M. Léon Bour
geois se Rome, tandis qu'il est avéré qu'il
s'agit d'un simple voyage d'agrément,
l'ancien président du conseil étant venu
à Rome sur l'invitation d'un de ses amis
qui a eu connaissance de son séjour en
Corse.
■ N'EST-CE PAS ASSEZ ■
Les diverses lettres des RR. PP.
Gallàis et Garaud contre M. l'abbé
Gayraud et les réponses de celui-ci
devraient terminer pour la presse
un débat que nous ne voulons plus
qualifier, afin de ne pas contribuer à
le prolonger.
Les journaux qui ont mené cette
campagne avec tant de "passion et
l'on pourrait ajouter,pour quelques-
"uns, avec tant de haine, rappellent
qu'avant l'élection M. l'abbé Gay-
raud a parlé d'un jury d'honneur et
le pressent de tenir cette parole.
Les réponses du député du Finis
tère àUx reporters de la Libre Pa
role, de VEclair, du Temps, prouvent
qu'il y est disposé. Nous l'approu
verons, de le faire, surtout si c'est
le moyen d'en finir.
Mais pour constituer un jury ;
d'honneur il faut l'accord des deux
parties. D'un côté nous voyons M.
l'abbé Gayraud ; de l'autre,qui ? Une
quantité de journaux sans droit à se
poser comme partie adverse et à
constituer des mandataire^. Ce.
n'est pas là qu'on peut trouver des
juges.
Cependant si M. l'abbé Gayraud
compose seul le jury, ses ennemis,
ceux qui ne lui pardonneront ja
mais d'avoir été élu, le récuseront.
La Gazette, qui par embarras et
peut-être pudeur refuse même de
charger .des amis à elle d'étudier le
dossier du député du Finistère ou
plutôt de l'ancien dominicain, pour
rait-elle dire comment elle com
prend le jury d'honneur? Qu'elle
parle, si sa proposition est loyale
et pratique, nous l'appuierons.
Certains journaux— nos lecteurs
les devinent — vont prétendre que
notre vif désir de mettre fin au dé
bat vient de ce qu'il nous gêne. Non,
il nous écœure et nous afflige. Le
parti que peuvent en tirer nos enne
mis absolus et que déjà même ils en
tirent prouve qu'il est foncière
ment contraire aux intérêts religieux.
Voyez quels représentants de l'Eglise
il permet de mettre en cause et à
quelles attaques d'un caractère gé
néral il donne lieu. Je n'insiste pas
sur ce côté particulièrement délicat
et pénible, mais je prie les catho
liques sincères, trop engagés dans
cette lutte, d'y réfléchir. J'ose dire
qu'ils en ont le devoir.
Et que l'on sache bien qu'en par
lant ainsi VUnivers n'entend pas re
fuser de s'expliquer à fond sur son
rôle dans la lutte où nos idées, no
tre politique ont triomphé.
Ce rôle a été celui d'un journal
absolument catholique, qui se r en
seigne avant de parler et d'écrire,
qui prend en considération des avis
opposés et peut dire après le suc
cès comme il l'eût dit après.la dé
faite qu'il a tenu la conduite qu'il
devait tenir. Aucun sentiment per
sonnel n'a pesé sur nous.
Quant à M. l'abbé Gayraud, je ne
terminerai pas cet article par le
quel je voudrais — mais je ne l'es
père point— fermer la polémique,
sans affirmer 'qu'il n'a pas cherché
la candidature : elle est venue le
trouver; et sans ajouter qu'il a été
au-devànt des explications qu'on de-!,
vaitlui demander.
Eugène V euillot.
«
RECTIFICATION
La Gazette de France ajoute à la
lettre du R. P. Garaud que nous
avons donnée hier des observations
où on la reconnaît. Nous en ex
trayons ce qui suit ; ,
- Remarquons aussi que bien avant l'é
lection l'Univers savaita' quoi s'en tenir
sur l'abbé Gayraud puisque le R. P.
prieur avait écrit plusieurs fois à M. Eu
gène Veuillot.
Le même coup qui frappe l'abbé Gay
raud avec la dernière gravité atteint gra
vement aussi le journal rallié qui l'a sou
tenu malgré et contre tous les avis. i
Voici la lettre que nbus " avons
adressées la Gazette:
Paris, le 3 février 1897.
Monsieur, . ...
Journaliste, je ne songe pas à discuter
chez vous contre vous, mais, je peux vous
demander une rectification.
Vous dites que le R. P. Garaud m'a
a bien avant » l'élection fait savoir plu
sieurs fois à quoi m'en tenir sur l'abbé
Gayraud. ■
Le ft. P. Garaud m'a écrit deux fois
contre M. l'abbé Gayraud : la première
fois, trois jours avant l'élection (lettre;
du 20, reçue le 21), la seconde après l'é
lection (lettre du 25, reçue le 26).
La-première lettre disait en termes
vifs et au long que M. l'abbé Gayraud
était sorti de l'Ordre parce qu'il en avait
perdu l'esprit. Elle ne précisait aucun
fait.-La seconde s'élevait avec amertume
contre le succès de M. Gayraud.
Ces deux lettres étaient personnelles.
Si le P. Garaud trouve bon de les pu
blier, je les reproduirai.
Veuillez agréer, monsieur, mes salu
tations empressées.
Eugène V euillot.
Mai ntenant une simple question :
La Gazette croit-eile que, sur la
lettre personnelle d'un religieux qui'
apportait visiblement de la passion
dans le débat et, de plus, ne préci
sait rien, l 'Univers aurait dû dire :
nous n'appuyons plus M. l'abbé
Gayraud ?
Sans doute à la veille de l'élection
ce coup de la fin pouvait servir les
réfractaires, mais servir les réfrac-
taires n'entrait pas du tout dans nos
idées.
L'ÉLECTIONJJE BREST
A la lettre du R. P. Garaud,
M. Gayraud fait cette réponse, au
cours d'une lettre adressée au
Figaro ;
1° La lettre du R. P. G&llais à l'évêque
de Quimper ne m'est pas du tout incon
nue. Et je sais de très bonne source
qu'elle a fait làrbas une impression fâ-
icheuse, mais contre son auteur. Quand
■ un supérieur religieux croit devoir atta
quer un prêtre, il faut qu il ait à formu
ler contre lui autrechose que des plaintes
! vagues et des récriminations sans motifs
i précis. A Quimper,mon élection a causé,
je le sais, plus de plaisir que de peine.
2° Si quarante religieux dominicains
de Toulouse savent ce que je vaux de
vant Dieu, ils sont plus avancés que
moi, car la Sainte Ecriture dit que « nul
ne sait s'il est digne ou d'amour ou de
haine ». S'ils savent ce que je vaux de
vant les hommes, je serais curieux de
savoir de quels hommes il s'agit ici ; car
j'en connais qui, certainement, ne pen
sent pas de moi ce qu'en pensent aujour
d'hui le R. P. Garaud et les quarante re
ligieux du couvent de Toulouse. Encore,
est-il bien sûr qu'il n'y ait parmi ces
quarante aucun dissentiment à mon su
jet? J'en doute, et j'ai là certaine lettre
qui prouve que mon doute est fondé.
Il serait temps, je crois, monsieur le
rédacteur en chef, que cette querelle prît
fin. Voilà des gens qui n'ont rien trouvé
à dire contre moi alors que j'étais admis
à exercer toutes les fonctions ecclésias
tiques, à monter dans les premières chai
res de Paris. Maintenant que je suis
appelé à paraître et à parler au Palais-
Bourbon, ils s'avisent que j'en suis indi
gne. Quelle idée se font-ils donc de la
dignité de la chaire et de celle de la tri
bune ? Un prêtre bon à confesser et à
prêcher ne serait-il pas bon à être dé
puté? "
Je vous remercie, monsieur le rédac
teur en chef, de l'accueil que vous faites
à ces lignes, et je suis
- Votre dévoué serviteur en Jésus-
Christ.
Abbé II. G ayraud,
Missionnaire apostolique, •
député du Finistère.
NOUVELLES DE ROME
Le Saint-Père a admis aujourd'hui à
assister à sa messe, dans sa chapelle pri
vée, une cinquantaine de catholiques
marquants de divers pays. Il y avait
parmi eux, comme je vous l'indiquais
dès hier, M. le comte de La Salle de Ro-
chemaure, avec Mme la comtesse sa
femme et Mlle de Forceville, sa belle-
sœur* Le Saint-Père lss a ensuite reçus
en audience privée.
Aujourd'hui aussi le Souverain Pontife
a donné une longue audience au préfet
des Rites, S. Em. le cardinal Aloisi-Ma-
sella, pour l'entretenir au sujet de la so
lennelle cérémonie de canonisation, qui
est fixée à la fête de l'Ascension, le
27 mai.
M. Harmel vient de partir pour Flo
rence où il continuera sa tournée de con-
férehoes sociales, assurées du meilleur
succès après celui qu'il a obtenu à
Rome.
Çà et là
ARCHIE ET CRATIEJ
Il est universellement reconnu, depuis
plus d'un siècle, que la question de la
forme de gouvernement est 'la plus pal
pitante entre toutes celles qui peuvent
préoccuper la cervelle humaine et ali
menter agréablement les conversations
d'ici-bas.
Qu'importe l'acte, si le geste est beau?
disait un snob célèbre. Qu'importe lé
contenu du flacon, pourvu que l'étiquette
soit rose, ou jaune, ou bleue ? répètent,
depuis cent ans, d'innombrables théori
ciens qui, malgré les divergences de dé
tail, sont tous d'accord, au moins, sur
cette vérité fondamentale.
La politique transcendante, après tout,
n'est pas plus sotte que la métaphysique
transcendante. On a du moins l'avantage
déne pas parler allemand, mais de parler
grec. Or le grec est plus clair que l'alle
mand, et nous préférons de toute notre
âme, aux brouillards de Kant, l'azur ra
dieux de Platon;
La politique est née en Grèce, et le
mot même le dit. C'est l'art de gouverner
des «cités », non de grands États; et nous
pourrions démontrer, si nous disposions
de cent pages au lieu de cent lignes, que
nombre d'erreurs dans l'administration
des peuples modernes proviennent de ce
que les modernes politiciens, férus d'é
ducation classique, se sont acharnés à
appliquer à de vastes territoires des pro
cédés de gouvernement qui ne conve
naient qu'à de tout petits.
Tout cela, pour avoir traduit le mot
grec poîis par le mot français Etat, con
tresens des plus malfaisants, mais des
plus indéracinables. Nos Procustes veu
lent coucher toutes les constitutions dans
dés lits d'enfants.
Les mots grecs spécialement destinés
à émailler les conversations politiques
se terminent généralement en archie ou
en cratie.
Ces deux suffixes viennent de deux
verbes qui signifient « gouverner, com
mander ». On a employé, au petit bon
heur, tantôt l'un, tantôt l'autre. Quelque
fois, pour plus de sûreté, on les a pris
tous les deux pour donner à la même
idée, au besoin, un substantif de re
change. ■ - -
Nous avons tout d'abord la monarchie.
On aurait pu tout aussi bien dire la mo-
nocratie. Le mot n'existe pas, mais l'on
a créé autocratie, qui exprime un genre
spécial de monarchie, celui où le souve
rain commande « par lui-même » au lieu
de confier ce soin à des subalternes, ce
qui donne, suivant les cas, en barbari-
sant un tantinet la langue de Périclès, la
ministrocratie, la chambrocratie, la
courtisanocratie. Notre pays a connu
toutes ces variétés, de constitutions offi
cieuses.
Vient ensuite Varistocratie, traduction
usuelle : « gouvernement des meil
leurs » ; traduction exacte : « gouverne-.
ment des gens comme il faut » On pour
rait y opposer la cacocratie, spécimen
gouvernemental beaucoup plus répandu,
mais les linguistes n'ont pas voulu abu
ser de caco, qui avait déjà formé caco
phonie, cacochyme et même cacotha-
nasie. D'autre part, les gens « comme il
faut » n'étant jamais —hélas ! — la majo
rité dans les agglomérations humaines,
la coutume est venue de donner à l'aris-
tocratiele synonyme désobligeant d'oli
garchie, soit le « gouvernement d'un-
petit nombre ». Mais ce petit nombre
peut être recruté de diverses façons. S'il
l'est parmi les riches, on a la plouto
cratie (Platon disait la timocratie). Des
constitutions ont établi la prédominance
des vieillards. Ecrivons : gérontocratie.
Le même Platon, déjà nommé, voulait le
gouvernement des philosophes. Ici, le
mot serait un peu long : philosophocra-
tie. En retranchant philo, il nous reste
tout simplement le gouvernement des
sages.Le mot—quia existé,croyons-nous,
— serait alors : sophocratie.
En continuant à descendre l'échelle
sociale, nous rencontrons un monstre
gréco-latin, dont la bâtardise évoque
agréablement l'époque de la monarchie
philippiste ; médio.cratie. Epée à deux
tranchants, oe néologisme évoque simul
tanément l'idée du gouvernement des
épiciers — lesquels ne sont pas tous mé
diocres — et celle du gouvernement des
médiocres — lesquels ne sont pas tous
.épiciers.
Nous arrivons à la démocratie, un mot
brûlant comme la lave, sur lequel nous
ne voulons pas marcher, de peur de nous
griller les orteils. Contentons-nous d'ob
server que l'expression signifie « gouver
nement par le peuple ». Or quel est,
assez souvent, le peuple effectif dans les
constitutions de ce genre ? C'est parfois
le peuple vrai, et les petits cantons suis
ses offrent un. bon spécimen du genre.
C'est Quelquefois la populace, et le mot
se prononce : voyoucratie. Souvent c'est
une armée de ronds-de-cuir, et l'ortho
graphe exacte est : bureaucratie.
Observons d'ailleurs que le mot démo
cratie, depuis le commencement du
monde, a toujours si on prend le mot
a peuple » dans son sens le plus étendu,
servi d'enveloppe à une illusion. A
Athènes, par exemple, "r,i les escla
ves, ni les métèques, ni les citoyens
des villes soumises, ne participaient au
vote. Idem à Rome, où quelques milliers
de citoyens, réunis sur le forum, déci
daient du sort de plusieurs millions
d'hommes sans les avoir consultés. Des
démocraties dans ce goût-là sont essen
tiellement relatives. Tant que les femmes
et les enfants ne voteront pas, les puris
tes pourront taxer le mot d'inexactitude.
Il équivaut à androcratie. Les hommes
font des lois auxquelles les femmes obéis
sent sans avoir, pu contribuer le moins du
monde à leur formation. A quand la pa-
narchie ou la pancratie ?
En attendant le gouvernement de tout
le monde,qui n'est réclamé par personne,
il est de temps en temps question, assez
bruyamment, du « gouvernement de per-
«onne » réclamé par quelques-uns : l'anar
chie.
Si quelques jours nous avons le temps
et la place, nous exposerons à nos lecteurs
comment il importe de changer désor
mais le point de vue dans l'opposition de
nos deux suffixes ; comment il est plus
malin et plus original, tout à la-fois, de
considérer la manière de gouverner que
de se laisser hypnotiser par la per 6 -
sonne quigouverne; comment,selon nous,
la grande lutte existe et existera toujours
entre deux systèmes de gouvernement :
celui où l'Etat se mêle de beaucoup de
choses et celui où il seTenferme dans des
attributions modestes : la mégarchie et la
micrarchien
G. d'A zambuja.
Il est nécessaire de joindre à toute
lettre, quel qu'en soit l'objet, une des
dernières bandes d'adresse imprimées,
rectifiée s'il y a lieu.
Chaque ' demande de changement
d'adresse doit être accompagnée de
50 cent, en timbres-poste.
CONSTITUTION APOSTOLIQUE
de-
m
MU"
pape par la divine providence
Sur l'interdiction et la censure
des livres
léon évèque -serviteur des serviteurs
de dieu
Ad perpetuam rei memoriam.
Parmi les devoirs et les charges dont
Nous devons Nous acquitter avec beau
coup de soin et de scrupule Nous qui occu
pons le faîte de la hiérarchie apostolique,
Notre obligation principale, celle qui ré
sume les autres,consiste à veiller assidû
ment et à faire tous Nos efforts pour que'
la foi et les mœurs ne subissent aucun
dommage. Si cette tâche fut jamais né
cessaire elle l'est surtout à une époque
où les esprits sont en proie à une licence
effrénée et où presque toutes les doctrines
dont le Sauveur Jésus-Christ a confié la
garde à son Eglise pour le salut du genre
humain sont quotidiennement attaquées et
mises en péril.
Dans cette lutte les ennemis de la foi'
possèdent des ruses variées, d'innom
brables armes, mais parmi celles-ci l'une'
des plus dangereuses est l'intempérance
d'écrire qui sévit actuellement, et la dif
fusion, parmi la foule, des mauvais ou
vrages. On ne peut en effet rien imaginer
de plus funeste, de plus propre à corrom
pre les âmes par le mépris de la religion
et par l'exposé des attraits nombreux et
trompeurs du péché.
Aussi, craignant un si grand mal, et
remplissant son devoir de gardienne et
de protectrice de la foi et des mœurs,
l'Eglise a très justement compris qu'il
fallait opposer des remèdes à un tel
fléau : elle s'est toujours appliquée, au
tant qu'il était en elle, à détourner les
hommes de la lecture des mauvais livres,
qui est un terrible poison. Les premiers
temps du christianisme furent-témoins
du zèle que déploya sur ce point le bien
heureux Paul, et les siècles qui suivirent
purent connaître la vigilance des Pères,
les décisions des évêques, les décrets des
conciles tendant au même but.
Mais surtout de nombreux documents
écrits prouvent le soin et l'ardeur que
déployèrent les. Pontifes romains pour
que les ouvrages des hérétiques ne se
répandissent pas,au grand détriment du
public. L'histoire ancienne de l'Eglise
est pleine d'exemples de cette vigilance.
Anastase I or condamna par un édit ri
goureux les livres pernicieux d'Origène,
Innocent I 0 'ceux de Pélage et Léon le
Grand tous ceux des Manichéens. On
connaît aussi les lettres décrétâtes que
Gelase publia opportunément sur les li
vres qu'il fallait recevoir et ceux qu'il he
fallait pas recevoir. De même, dans le
cours des siècles, des sentences du Siège
apostolique frappèrent les livres fu
nestes des Monothélites, d'Abélard, de
Marsile de Padoue, deWicleff et de Jean
Huss.
Au quinzième siècle, à la suite de la
découverte de l'imprimerie, on dut non
seulement s'occuper des mauvais écrits
qui avaient déjà paru, mais encore
prendre des mesures pour qu'aucun ou
vrage de ce genre ne fût publié posté
rieurement. Cette prévoyance était né
cessitée alors non par des motifs sans
importance, mais par le besoin absolu de
protéger l'honnêteté publique et d'assu
rer le salut de la société. En effet, un
art excellent en soi, fécond en grands
avantages, propre à répandre le christia
nisme parmi les nations, avait été très
vite transformé par un trop grand nom-
bre.d'hommes en un puissant instrument
de ruines.Les effets funestes des mauvais
écrits étaient aggravés et précipités par
la rapidité de la diffusion. C'est donc
avec beaucoup de sagesse qu'Alexan--
dre VI et Léon X, Nos prédécesseurs,
établirent des lois précises et très appro
priées au temps et aux mœurs, pour
maintenir dans le devoir les libraires.
Bientôt s'éleva une très redoutable
tempête et il fallut s'opposer avec urite
. vigilance- et une énergie croissantes à la
contagion des hérésies. C'est pourquoi ce
même Léon X, puis Clément VII, établi-
. rent sous les peines les plus graves qu'il
était interdit à quiconque de lire ou de
conserver les livres de Luther. Mais com
me,par suite du malheur des temps,le flot
impur des mauvais livres avait grossi
outre mesure et s'était étendu dans tous
les pays,il sembla qu'une répression plus
vaste et_ plus efficace était nécessaire.
C'est ce remède qu'appliqua le premier
avec beaucoup d'opportunité Notre pré
décesseur Paul IV, à savoir la publica
tion du catalogue des livres dont les fidè
les ne doivent pas faire usager
Peu de temps après les Pères du con
cile de Trente prirent soin d'opposer
une nouvelle digue à la licence crois
sante des écrits et des lectures. Par leur
ordre des préposés spéciaux et des théo
logiens furent choisis qui non seulement
: prirent soin d'augmenter et de mettre à
jour l'Index que Paul IV avait publié,
mais aussi qui établirent les règles à
suivre dans l'édition, la lecture et
l'emploi des livres : Pie IV revêtit ces
règles, de la force de son autorité apos
tolique.
Mais le souci de l'intérêt public qui
avait inspiré au début les règles du Con
cile de Trente commanda aussi d'y ap
porter quelques modifications dans le
cours des siècles. Aussi les Pontifes ro
mains, notamment Clément VIII, Alexan
dre VII, Benoit XIV, connaissant les be
soins de leur époque et obéissant aux lois
delà prudence, prirent plusieurs déci
sions de nature à expliquer ces règles ou
à les approprier aux circonstances.
Tous ces faits prouvent bien que les
soins des Pontifes romains ont toujours
été appliqués à cet objet: éloigner de la
société les opinions erronées et la cor- •
ruption des mœurs, honte et ruine des
Etats, que les mauvais livres engendrent
Edition quotidienne. — 10,610
ÉDITION QUOTIDIENNE
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L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CERF et C io , 6, placé de k Bourse
PARIS, 3 FÉVRIER 1897
SOMMAIRE
A propos du parti
socialiste et de l'u- t f
mon...;.......... F rançois V euillot.
N'est-ce paa assez?. E ugène V euillot.
Çà et là : Archie et
cratie.vv.......... G. d' A zambuja.
A la Chambre G abriel de T riors.
Au Sénat J. M antenay.
La Constitution a-
postolique sur
l'« Index ......... ;
Bulletin du jour. — Nouvelles de Rome.
—• Rectification. — L'élection de Brest. —
Le vitrail de M. Bourgeois. — Questions
d'Arménie. — Prouesse allemande.— Le
fisc et les congrégations. — Informa
tions politiques et parlementaires. ~ Une
circulaire ministérielle.— Mme la du
chesse de Montpensier. — Les scandales.
— Chronique. — Lettres, sciences et
arts. — A Clichy. — Canonisation, du
bienheureux Fourier. — Echos de par
tout. — Le servicè médical de nuit. —Dé
pêches de l'étranger. — La peste. —
Guerre et marine. —Nécrologie. -r- Nou
velles diverses. — Dernière heure. — Ta
bleau et bulletin de la Bourse.
A PROPOS LU PARTI SOCIALISTE
ET DE L'UNION
Tous les jours, la division aug
mente au sein du parti socialiste et
fait éclore, au milieu de ses rangs,
de nouveaux groupes, donnant nais
sance à de nouveaux sous-groupes.
Ce parti, vraiment, semble des
tiné à se fractionner à l'infini: dès
qu'il se fonde une petite église à
1 extrême gauche, on peut être cer
tain qu'elle sera bientôt cassée en
deux ou trois petites chapelles. Et,
chose cùrieuse et digne d'attention,
chaque fois que se produit ce phé
nomène, un pas de plus est fait aans
le sens dé la révolution sociale ; et
la sous-fraction la plus avancée réu
nit toujours le plus grand nombre
d'adhérents.
La Petite République «st, à ce
point dé vue, un thermomètre ex
cellent du parti.
Voici trois ouquatre ans,M. Goblet
dirigeait cè journal avec le concours
de M. Millerand ; M. Goblet était
alors à peu près socialiste et frater
nisait avec les partisans de la sociale
et du « chambardement ». Fut-il ef
frayé, un jour qu'il se regardait sé
rieusement, de se voir aussi révo
lutionnaire ou biën comprit-il que,
poiir assouvir son prurit de minis
tère, il lui fallait adoucir un peu ses
opinions ? — toujours est-il que M.
Goblet se sépara bientôt ae ses
compromettants alliés. Mais la Pe
tite République et le plus gros de la
fraction resta fidèle à M. Millerand ;
et le journal socialiste, allégé des
timidités de M. Goblet, accentua sa
couleur roiige. A quelque temps de
là, M. Jules Guesde et son ami Chau
vin renforcèrent l'équipe de la
feuille révolutionnaire; toutefois, M.
Millerand demeura le maître. Un
peu plus tard, l'ex-farouche Basly
sortit de la maison,. escorté de
quelques compagnons désireux,
comme lui, de s'embourgeoiser et
de s'opporturiiser. Mais le gouver
nement restait toujours entre les
mains de M. Millerand. Cependant,
l'adjonction ; du terrible Guesde et la
sortie du néo-modéré Basly n'é
taient pas sans, rendre la feuille
•un peu plus révolutionnaire.
Aujourd'hui, nouvelle scission
dans le parti ; nouvelle accentuation
des idées vers l'extrême extrême-
gauche. Et voici que l'organe socia
liste, échappant aux mains de M.
Millerand, tombé au pouvoir de M.
Jules Guesde, avec la plus grande
partie de se&anciens rédacteurs.
C'est de la sorte, en effet, que
vient de se terminer la crise, 'ou
verte il y a quelque temps, à la Pe
tite République. On se souvient que
'la rédaction tout entière avait aban
donné ce journal entre les mains de
l'administrateur et en même temps,
pserais-je dire,' à son malheureux
sort. Mais ce n?était qu'une feinte ;
et si M. Millerand, jusque-là grand
chef, était obligéde sortir en vaincu,
M. Guesde emportait l'espoir et
l'ambition de revenir en maître,
après qu'on aurait nettoyé la place.
Aujourd'hui, la chose est faite.
L'organe du parti socialiste appar
tient à M. Guesde, entouré de nom
breux amis, et M. Millerand, flanqué
de MM. Viviani et Rouanet, reste à
•la porte.
C'est donc une division nôuvélle
au sein du parti et, comme nous le
faisions remarquer tout à l'heure,
un succès pour l'opinion la plus
avancée. M. Millerand n'est plus
qu'un opportuniste.
On peut se réjouir, quand éclate
-une division dans l'armée ennemie.
■Aujourd'hui cependant, nous au
rions tort de nous abandonner tout
h la joie. Les socialistes sont di-,
visés ; mais ils sont unis. Ceci a l'air j
"d'un paradoxe et c'est pourtant une !
vérité. Le parti socialiste est frac- !,
tionné en maints groupes, sous-
groupës, chapelles'et cénacles; mais
tout cela, ce sont des grains de
plomb qui font balle. Il est surpre
nant comme ces révolutionnaires
savent s'unir et devenir compacts,
pour marcher à l'assaut de la so
ciété capitaliste et même, — ils l'ont
montré pendant le cabinet Bour
geois, •— pour accomplir une ma
nœuvre parlementaire. Et, malgré
ces dissentiments qui créent au
milieu d'eux tant d'écoles diverses,
ils ont grandi, ils se sont accrus
en nombre et en force. Il ne faut
pas les craindre, assurément : mais
il ne faut pas non plus les dédai
gner; il faut se rendre un compte
exact de leur puissance et les com
battre énergiquement.
Il faut faire plus encore; il faut,
raillant leurs divisions, ne pas s'ex
poser, de leur part, aux mêmes
railleries. Il faut nous unir étroite
ment, malgré les inévitables dis
sentiments qui nous séparent, pour
marcher à l'assaut de la législation
sectaire et des anticléricaux,—
comme, eux, ils marchent en
rangs serrés contre l'état social
détruire. Existe-t-il
possède, ainsi que
chef incoaitestablè,
lumière divine et
autorité lui don-
qu'ils veulent
un parti qui
le nôtre , un
assisté d'une
pourvu d'une
nant le droit de commander et
le droit d'être obéi, quand la ques
tion politique est liée par des liens
si étroits aux intérêts supérieurs de
la religion? — Car enfin, ou bien
l'on se refuse à placer la question
religieuse avant tout, ou Dien, si
l'on met avant tout la question reli-
tieuste, on doit reconnaître au chef
e la religion le droit de commander.
—■ Et, dans ces conditions, avant ce
privilège unique, entre tous les par-
tis^de posséder un chef qui nous a
marque le terrain du combat, com
ment se fait-il que nous ne soyons
Êas unis sur ce terrain, pour com-
attre l'ennemi commun? Si tous
ceux qui prêchent l'union venaient
se placer sur le seul terrain où elle
peut s'opérer — parce que c'est le
èeulcpi ait été choisi par l'autorité
suprême — on gérait uni depuis
longtemps et l'on posséderait; chez
nous, cette ^cohésion dans l'assaut,
dont le parti socialiste, en dépit de
ses dissensions, nous a toujours
donné l'exemple. Assurément l'u
nion,dans les conditions ordinaires,
doit être faite de concessions mu
tuelles. Mais sommes-nous dans les
conditions ordinaires, quand le Pape,
a pris soin de nous prescrire un
terrain de combat ? Nous formons
une armée ; le général en chef a
donne un ordre; ils seront donc seuls
coupables de la désunion, ceux qui
refuseront d'obéir. Mais,Dieu merci,
leur nombre diminue ; il sera de
plus en plus négligeable et le jour
viendra ou, unis pour la lutte, en dé
pit des divergences d'opinion qui
pourront subsister entre les es
prits, nous mènerons enfin victo
rieusement la bataille ordonnée par
Léon XIII.
François V euillot.
BULLETIN DU JOUR
L'interpellation de M. Joseph Fabre
sur l'élection de Brest sera, discutée au
Sénat le 12 février.
Les promotions et 'nominations dans
la Légion d'honneur, en préparation
dans les divers ministères civils, seront
définitivement arrêtées'dans le conseil de
cabinet de demain jeudi et transmises au
conseil de la Légion d'honneur, qui -se
réunira spécialement vendredi pour les
examiner.
La Petite République cesse d'être ûn
journal d'union socialiste : elle devient
un organe guesdiste.
. La nouvelle de là signature d'un traité
de commerce entre la France et l'Ethio
pie inquiète la presse anglaise -, le
Morning Post déclare notamment que i
« l'Angleterre, comme puissance prédo- i
minante dans la vallée du Nil; doit
veiller à ce que ses intérêts rie soient pas i
lésés par cette admission de l'Abyssinie j
dans la liste des Etats civilisés ».
Le Parlement anglais sera saisi d'un i
projet de crédit destiné à assister finan
cièrement le gouvernement égyptien
pour la récente expédition contre les i
derviches. :
On annonce que les ministres d»\
France et de Russie au Caire ont reçu i
l'ordre de protester auprès du khédive ;
contre cette aide prêtée par le gouverne- ;
ment britannique.
Les nouvelles de Crète sont alarman
tes : l'ordre est de nouveau troublé. On
trouvera des détails aux Dépêches de
l'étranger.
La plupart des journaux italiens'
cherchent à donner une importance po
litique à la présence de M. Léon Bour
geois se Rome, tandis qu'il est avéré qu'il
s'agit d'un simple voyage d'agrément,
l'ancien président du conseil étant venu
à Rome sur l'invitation d'un de ses amis
qui a eu connaissance de son séjour en
Corse.
■ N'EST-CE PAS ASSEZ ■
Les diverses lettres des RR. PP.
Gallàis et Garaud contre M. l'abbé
Gayraud et les réponses de celui-ci
devraient terminer pour la presse
un débat que nous ne voulons plus
qualifier, afin de ne pas contribuer à
le prolonger.
Les journaux qui ont mené cette
campagne avec tant de "passion et
l'on pourrait ajouter,pour quelques-
"uns, avec tant de haine, rappellent
qu'avant l'élection M. l'abbé Gay-
raud a parlé d'un jury d'honneur et
le pressent de tenir cette parole.
Les réponses du député du Finis
tère àUx reporters de la Libre Pa
role, de VEclair, du Temps, prouvent
qu'il y est disposé. Nous l'approu
verons, de le faire, surtout si c'est
le moyen d'en finir.
Mais pour constituer un jury ;
d'honneur il faut l'accord des deux
parties. D'un côté nous voyons M.
l'abbé Gayraud ; de l'autre,qui ? Une
quantité de journaux sans droit à se
poser comme partie adverse et à
constituer des mandataire^. Ce.
n'est pas là qu'on peut trouver des
juges.
Cependant si M. l'abbé Gayraud
compose seul le jury, ses ennemis,
ceux qui ne lui pardonneront ja
mais d'avoir été élu, le récuseront.
La Gazette, qui par embarras et
peut-être pudeur refuse même de
charger .des amis à elle d'étudier le
dossier du député du Finistère ou
plutôt de l'ancien dominicain, pour
rait-elle dire comment elle com
prend le jury d'honneur? Qu'elle
parle, si sa proposition est loyale
et pratique, nous l'appuierons.
Certains journaux— nos lecteurs
les devinent — vont prétendre que
notre vif désir de mettre fin au dé
bat vient de ce qu'il nous gêne. Non,
il nous écœure et nous afflige. Le
parti que peuvent en tirer nos enne
mis absolus et que déjà même ils en
tirent prouve qu'il est foncière
ment contraire aux intérêts religieux.
Voyez quels représentants de l'Eglise
il permet de mettre en cause et à
quelles attaques d'un caractère gé
néral il donne lieu. Je n'insiste pas
sur ce côté particulièrement délicat
et pénible, mais je prie les catho
liques sincères, trop engagés dans
cette lutte, d'y réfléchir. J'ose dire
qu'ils en ont le devoir.
Et que l'on sache bien qu'en par
lant ainsi VUnivers n'entend pas re
fuser de s'expliquer à fond sur son
rôle dans la lutte où nos idées, no
tre politique ont triomphé.
Ce rôle a été celui d'un journal
absolument catholique, qui se r en
seigne avant de parler et d'écrire,
qui prend en considération des avis
opposés et peut dire après le suc
cès comme il l'eût dit après.la dé
faite qu'il a tenu la conduite qu'il
devait tenir. Aucun sentiment per
sonnel n'a pesé sur nous.
Quant à M. l'abbé Gayraud, je ne
terminerai pas cet article par le
quel je voudrais — mais je ne l'es
père point— fermer la polémique,
sans affirmer 'qu'il n'a pas cherché
la candidature : elle est venue le
trouver; et sans ajouter qu'il a été
au-devànt des explications qu'on de-!,
vaitlui demander.
Eugène V euillot.
«
RECTIFICATION
La Gazette de France ajoute à la
lettre du R. P. Garaud que nous
avons donnée hier des observations
où on la reconnaît. Nous en ex
trayons ce qui suit ; ,
- Remarquons aussi que bien avant l'é
lection l'Univers savaita' quoi s'en tenir
sur l'abbé Gayraud puisque le R. P.
prieur avait écrit plusieurs fois à M. Eu
gène Veuillot.
Le même coup qui frappe l'abbé Gay
raud avec la dernière gravité atteint gra
vement aussi le journal rallié qui l'a sou
tenu malgré et contre tous les avis. i
Voici la lettre que nbus " avons
adressées la Gazette:
Paris, le 3 février 1897.
Monsieur, . ...
Journaliste, je ne songe pas à discuter
chez vous contre vous, mais, je peux vous
demander une rectification.
Vous dites que le R. P. Garaud m'a
a bien avant » l'élection fait savoir plu
sieurs fois à quoi m'en tenir sur l'abbé
Gayraud. ■
Le ft. P. Garaud m'a écrit deux fois
contre M. l'abbé Gayraud : la première
fois, trois jours avant l'élection (lettre;
du 20, reçue le 21), la seconde après l'é
lection (lettre du 25, reçue le 26).
La-première lettre disait en termes
vifs et au long que M. l'abbé Gayraud
était sorti de l'Ordre parce qu'il en avait
perdu l'esprit. Elle ne précisait aucun
fait.-La seconde s'élevait avec amertume
contre le succès de M. Gayraud.
Ces deux lettres étaient personnelles.
Si le P. Garaud trouve bon de les pu
blier, je les reproduirai.
Veuillez agréer, monsieur, mes salu
tations empressées.
Eugène V euillot.
Mai ntenant une simple question :
La Gazette croit-eile que, sur la
lettre personnelle d'un religieux qui'
apportait visiblement de la passion
dans le débat et, de plus, ne préci
sait rien, l 'Univers aurait dû dire :
nous n'appuyons plus M. l'abbé
Gayraud ?
Sans doute à la veille de l'élection
ce coup de la fin pouvait servir les
réfractaires, mais servir les réfrac-
taires n'entrait pas du tout dans nos
idées.
L'ÉLECTIONJJE BREST
A la lettre du R. P. Garaud,
M. Gayraud fait cette réponse, au
cours d'une lettre adressée au
Figaro ;
1° La lettre du R. P. G&llais à l'évêque
de Quimper ne m'est pas du tout incon
nue. Et je sais de très bonne source
qu'elle a fait làrbas une impression fâ-
icheuse, mais contre son auteur. Quand
■ un supérieur religieux croit devoir atta
quer un prêtre, il faut qu il ait à formu
ler contre lui autrechose que des plaintes
! vagues et des récriminations sans motifs
i précis. A Quimper,mon élection a causé,
je le sais, plus de plaisir que de peine.
2° Si quarante religieux dominicains
de Toulouse savent ce que je vaux de
vant Dieu, ils sont plus avancés que
moi, car la Sainte Ecriture dit que « nul
ne sait s'il est digne ou d'amour ou de
haine ». S'ils savent ce que je vaux de
vant les hommes, je serais curieux de
savoir de quels hommes il s'agit ici ; car
j'en connais qui, certainement, ne pen
sent pas de moi ce qu'en pensent aujour
d'hui le R. P. Garaud et les quarante re
ligieux du couvent de Toulouse. Encore,
est-il bien sûr qu'il n'y ait parmi ces
quarante aucun dissentiment à mon su
jet? J'en doute, et j'ai là certaine lettre
qui prouve que mon doute est fondé.
Il serait temps, je crois, monsieur le
rédacteur en chef, que cette querelle prît
fin. Voilà des gens qui n'ont rien trouvé
à dire contre moi alors que j'étais admis
à exercer toutes les fonctions ecclésias
tiques, à monter dans les premières chai
res de Paris. Maintenant que je suis
appelé à paraître et à parler au Palais-
Bourbon, ils s'avisent que j'en suis indi
gne. Quelle idée se font-ils donc de la
dignité de la chaire et de celle de la tri
bune ? Un prêtre bon à confesser et à
prêcher ne serait-il pas bon à être dé
puté? "
Je vous remercie, monsieur le rédac
teur en chef, de l'accueil que vous faites
à ces lignes, et je suis
- Votre dévoué serviteur en Jésus-
Christ.
Abbé II. G ayraud,
Missionnaire apostolique, •
député du Finistère.
NOUVELLES DE ROME
Le Saint-Père a admis aujourd'hui à
assister à sa messe, dans sa chapelle pri
vée, une cinquantaine de catholiques
marquants de divers pays. Il y avait
parmi eux, comme je vous l'indiquais
dès hier, M. le comte de La Salle de Ro-
chemaure, avec Mme la comtesse sa
femme et Mlle de Forceville, sa belle-
sœur* Le Saint-Père lss a ensuite reçus
en audience privée.
Aujourd'hui aussi le Souverain Pontife
a donné une longue audience au préfet
des Rites, S. Em. le cardinal Aloisi-Ma-
sella, pour l'entretenir au sujet de la so
lennelle cérémonie de canonisation, qui
est fixée à la fête de l'Ascension, le
27 mai.
M. Harmel vient de partir pour Flo
rence où il continuera sa tournée de con-
férehoes sociales, assurées du meilleur
succès après celui qu'il a obtenu à
Rome.
Çà et là
ARCHIE ET CRATIEJ
Il est universellement reconnu, depuis
plus d'un siècle, que la question de la
forme de gouvernement est 'la plus pal
pitante entre toutes celles qui peuvent
préoccuper la cervelle humaine et ali
menter agréablement les conversations
d'ici-bas.
Qu'importe l'acte, si le geste est beau?
disait un snob célèbre. Qu'importe lé
contenu du flacon, pourvu que l'étiquette
soit rose, ou jaune, ou bleue ? répètent,
depuis cent ans, d'innombrables théori
ciens qui, malgré les divergences de dé
tail, sont tous d'accord, au moins, sur
cette vérité fondamentale.
La politique transcendante, après tout,
n'est pas plus sotte que la métaphysique
transcendante. On a du moins l'avantage
déne pas parler allemand, mais de parler
grec. Or le grec est plus clair que l'alle
mand, et nous préférons de toute notre
âme, aux brouillards de Kant, l'azur ra
dieux de Platon;
La politique est née en Grèce, et le
mot même le dit. C'est l'art de gouverner
des «cités », non de grands États; et nous
pourrions démontrer, si nous disposions
de cent pages au lieu de cent lignes, que
nombre d'erreurs dans l'administration
des peuples modernes proviennent de ce
que les modernes politiciens, férus d'é
ducation classique, se sont acharnés à
appliquer à de vastes territoires des pro
cédés de gouvernement qui ne conve
naient qu'à de tout petits.
Tout cela, pour avoir traduit le mot
grec poîis par le mot français Etat, con
tresens des plus malfaisants, mais des
plus indéracinables. Nos Procustes veu
lent coucher toutes les constitutions dans
dés lits d'enfants.
Les mots grecs spécialement destinés
à émailler les conversations politiques
se terminent généralement en archie ou
en cratie.
Ces deux suffixes viennent de deux
verbes qui signifient « gouverner, com
mander ». On a employé, au petit bon
heur, tantôt l'un, tantôt l'autre. Quelque
fois, pour plus de sûreté, on les a pris
tous les deux pour donner à la même
idée, au besoin, un substantif de re
change. ■ - -
Nous avons tout d'abord la monarchie.
On aurait pu tout aussi bien dire la mo-
nocratie. Le mot n'existe pas, mais l'on
a créé autocratie, qui exprime un genre
spécial de monarchie, celui où le souve
rain commande « par lui-même » au lieu
de confier ce soin à des subalternes, ce
qui donne, suivant les cas, en barbari-
sant un tantinet la langue de Périclès, la
ministrocratie, la chambrocratie, la
courtisanocratie. Notre pays a connu
toutes ces variétés, de constitutions offi
cieuses.
Vient ensuite Varistocratie, traduction
usuelle : « gouvernement des meil
leurs » ; traduction exacte : « gouverne-.
ment des gens comme il faut » On pour
rait y opposer la cacocratie, spécimen
gouvernemental beaucoup plus répandu,
mais les linguistes n'ont pas voulu abu
ser de caco, qui avait déjà formé caco
phonie, cacochyme et même cacotha-
nasie. D'autre part, les gens « comme il
faut » n'étant jamais —hélas ! — la majo
rité dans les agglomérations humaines,
la coutume est venue de donner à l'aris-
tocratiele synonyme désobligeant d'oli
garchie, soit le « gouvernement d'un-
petit nombre ». Mais ce petit nombre
peut être recruté de diverses façons. S'il
l'est parmi les riches, on a la plouto
cratie (Platon disait la timocratie). Des
constitutions ont établi la prédominance
des vieillards. Ecrivons : gérontocratie.
Le même Platon, déjà nommé, voulait le
gouvernement des philosophes. Ici, le
mot serait un peu long : philosophocra-
tie. En retranchant philo, il nous reste
tout simplement le gouvernement des
sages.Le mot—quia existé,croyons-nous,
— serait alors : sophocratie.
En continuant à descendre l'échelle
sociale, nous rencontrons un monstre
gréco-latin, dont la bâtardise évoque
agréablement l'époque de la monarchie
philippiste ; médio.cratie. Epée à deux
tranchants, oe néologisme évoque simul
tanément l'idée du gouvernement des
épiciers — lesquels ne sont pas tous mé
diocres — et celle du gouvernement des
médiocres — lesquels ne sont pas tous
.épiciers.
Nous arrivons à la démocratie, un mot
brûlant comme la lave, sur lequel nous
ne voulons pas marcher, de peur de nous
griller les orteils. Contentons-nous d'ob
server que l'expression signifie « gouver
nement par le peuple ». Or quel est,
assez souvent, le peuple effectif dans les
constitutions de ce genre ? C'est parfois
le peuple vrai, et les petits cantons suis
ses offrent un. bon spécimen du genre.
C'est Quelquefois la populace, et le mot
se prononce : voyoucratie. Souvent c'est
une armée de ronds-de-cuir, et l'ortho
graphe exacte est : bureaucratie.
Observons d'ailleurs que le mot démo
cratie, depuis le commencement du
monde, a toujours si on prend le mot
a peuple » dans son sens le plus étendu,
servi d'enveloppe à une illusion. A
Athènes, par exemple, "r,i les escla
ves, ni les métèques, ni les citoyens
des villes soumises, ne participaient au
vote. Idem à Rome, où quelques milliers
de citoyens, réunis sur le forum, déci
daient du sort de plusieurs millions
d'hommes sans les avoir consultés. Des
démocraties dans ce goût-là sont essen
tiellement relatives. Tant que les femmes
et les enfants ne voteront pas, les puris
tes pourront taxer le mot d'inexactitude.
Il équivaut à androcratie. Les hommes
font des lois auxquelles les femmes obéis
sent sans avoir, pu contribuer le moins du
monde à leur formation. A quand la pa-
narchie ou la pancratie ?
En attendant le gouvernement de tout
le monde,qui n'est réclamé par personne,
il est de temps en temps question, assez
bruyamment, du « gouvernement de per-
«onne » réclamé par quelques-uns : l'anar
chie.
Si quelques jours nous avons le temps
et la place, nous exposerons à nos lecteurs
comment il importe de changer désor
mais le point de vue dans l'opposition de
nos deux suffixes ; comment il est plus
malin et plus original, tout à la-fois, de
considérer la manière de gouverner que
de se laisser hypnotiser par la per 6 -
sonne quigouverne; comment,selon nous,
la grande lutte existe et existera toujours
entre deux systèmes de gouvernement :
celui où l'Etat se mêle de beaucoup de
choses et celui où il seTenferme dans des
attributions modestes : la mégarchie et la
micrarchien
G. d'A zambuja.
Il est nécessaire de joindre à toute
lettre, quel qu'en soit l'objet, une des
dernières bandes d'adresse imprimées,
rectifiée s'il y a lieu.
Chaque ' demande de changement
d'adresse doit être accompagnée de
50 cent, en timbres-poste.
CONSTITUTION APOSTOLIQUE
de-
m
MU"
pape par la divine providence
Sur l'interdiction et la censure
des livres
léon évèque -serviteur des serviteurs
de dieu
Ad perpetuam rei memoriam.
Parmi les devoirs et les charges dont
Nous devons Nous acquitter avec beau
coup de soin et de scrupule Nous qui occu
pons le faîte de la hiérarchie apostolique,
Notre obligation principale, celle qui ré
sume les autres,consiste à veiller assidû
ment et à faire tous Nos efforts pour que'
la foi et les mœurs ne subissent aucun
dommage. Si cette tâche fut jamais né
cessaire elle l'est surtout à une époque
où les esprits sont en proie à une licence
effrénée et où presque toutes les doctrines
dont le Sauveur Jésus-Christ a confié la
garde à son Eglise pour le salut du genre
humain sont quotidiennement attaquées et
mises en péril.
Dans cette lutte les ennemis de la foi'
possèdent des ruses variées, d'innom
brables armes, mais parmi celles-ci l'une'
des plus dangereuses est l'intempérance
d'écrire qui sévit actuellement, et la dif
fusion, parmi la foule, des mauvais ou
vrages. On ne peut en effet rien imaginer
de plus funeste, de plus propre à corrom
pre les âmes par le mépris de la religion
et par l'exposé des attraits nombreux et
trompeurs du péché.
Aussi, craignant un si grand mal, et
remplissant son devoir de gardienne et
de protectrice de la foi et des mœurs,
l'Eglise a très justement compris qu'il
fallait opposer des remèdes à un tel
fléau : elle s'est toujours appliquée, au
tant qu'il était en elle, à détourner les
hommes de la lecture des mauvais livres,
qui est un terrible poison. Les premiers
temps du christianisme furent-témoins
du zèle que déploya sur ce point le bien
heureux Paul, et les siècles qui suivirent
purent connaître la vigilance des Pères,
les décisions des évêques, les décrets des
conciles tendant au même but.
Mais surtout de nombreux documents
écrits prouvent le soin et l'ardeur que
déployèrent les. Pontifes romains pour
que les ouvrages des hérétiques ne se
répandissent pas,au grand détriment du
public. L'histoire ancienne de l'Eglise
est pleine d'exemples de cette vigilance.
Anastase I or condamna par un édit ri
goureux les livres pernicieux d'Origène,
Innocent I 0 'ceux de Pélage et Léon le
Grand tous ceux des Manichéens. On
connaît aussi les lettres décrétâtes que
Gelase publia opportunément sur les li
vres qu'il fallait recevoir et ceux qu'il he
fallait pas recevoir. De même, dans le
cours des siècles, des sentences du Siège
apostolique frappèrent les livres fu
nestes des Monothélites, d'Abélard, de
Marsile de Padoue, deWicleff et de Jean
Huss.
Au quinzième siècle, à la suite de la
découverte de l'imprimerie, on dut non
seulement s'occuper des mauvais écrits
qui avaient déjà paru, mais encore
prendre des mesures pour qu'aucun ou
vrage de ce genre ne fût publié posté
rieurement. Cette prévoyance était né
cessitée alors non par des motifs sans
importance, mais par le besoin absolu de
protéger l'honnêteté publique et d'assu
rer le salut de la société. En effet, un
art excellent en soi, fécond en grands
avantages, propre à répandre le christia
nisme parmi les nations, avait été très
vite transformé par un trop grand nom-
bre.d'hommes en un puissant instrument
de ruines.Les effets funestes des mauvais
écrits étaient aggravés et précipités par
la rapidité de la diffusion. C'est donc
avec beaucoup de sagesse qu'Alexan--
dre VI et Léon X, Nos prédécesseurs,
établirent des lois précises et très appro
priées au temps et aux mœurs, pour
maintenir dans le devoir les libraires.
Bientôt s'éleva une très redoutable
tempête et il fallut s'opposer avec urite
. vigilance- et une énergie croissantes à la
contagion des hérésies. C'est pourquoi ce
même Léon X, puis Clément VII, établi-
. rent sous les peines les plus graves qu'il
était interdit à quiconque de lire ou de
conserver les livres de Luther. Mais com
me,par suite du malheur des temps,le flot
impur des mauvais livres avait grossi
outre mesure et s'était étendu dans tous
les pays,il sembla qu'une répression plus
vaste et_ plus efficace était nécessaire.
C'est ce remède qu'appliqua le premier
avec beaucoup d'opportunité Notre pré
décesseur Paul IV, à savoir la publica
tion du catalogue des livres dont les fidè
les ne doivent pas faire usager
Peu de temps après les Pères du con
cile de Trente prirent soin d'opposer
une nouvelle digue à la licence crois
sante des écrits et des lectures. Par leur
ordre des préposés spéciaux et des théo
logiens furent choisis qui non seulement
: prirent soin d'augmenter et de mettre à
jour l'Index que Paul IV avait publié,
mais aussi qui établirent les règles à
suivre dans l'édition, la lecture et
l'emploi des livres : Pie IV revêtit ces
règles, de la force de son autorité apos
tolique.
Mais le souci de l'intérêt public qui
avait inspiré au début les règles du Con
cile de Trente commanda aussi d'y ap
porter quelques modifications dans le
cours des siècles. Aussi les Pontifes ro
mains, notamment Clément VIII, Alexan
dre VII, Benoit XIV, connaissant les be
soins de leur époque et obéissant aux lois
delà prudence, prirent plusieurs déci
sions de nature à expliquer ces règles ou
à les approprier aux circonstances.
Tous ces faits prouvent bien que les
soins des Pontifes romains ont toujours
été appliqués à cet objet: éloigner de la
société les opinions erronées et la cor- •
ruption des mœurs, honte et ruine des
Etats, que les mauvais livres engendrent
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