Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-01-26
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 janvier 1897 26 janvier 1897
Description : 1897/01/26 (Numéro 10601). 1897/01/26 (Numéro 10601).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mardi 26 Janvier 18Ô7
, P aris
> : ET DEPARTEMENTS
Un an......... 40 -n
Six moisi...,. ' 21 »
ïfrois riiois. ;.. »« 11 " »
Les abonnements parten t dea 1" et 16 de chaîne mois
*t*t l Paris..; 10 cent.
UN NUMÉRO j DépÈLtteiïiénts..... 1S —
BUREAUX : Paris, ne Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8 -
paris étranger.
et départements (union postale),
Un an...] 20 »
Six mois 10 »
Trois mois;.... 5 ».
26 »
13 »
6 50
ET
LE MONDE
Les aïonnemênts partent des ;l«* et 18 de chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CÉRF et O, 6, place de M Bourse
PARIS, 25 JANVIER 18S7
SOMMAIRE
L'éleotion de Brest. E ugène V euillot.
Discours du Souve
rain Pontifé au
patriciat romain. ;
Diana; , Vaughan :
Lettre de.. .. *..... M gr L azzare S chi.
Correspondance ro
maine....... ***.
L'école ménagère de
Plaisance.»...:.;. Ph.
Causerie littéraire. E dmond B ibé. "
Bulletin du jour. — Les élections législa
tives. —Après l'élection de Brest. — Infor
mations politiques et parlementaires. —
Une exception.—A travers la presse, V-
Chronique. — Lettres, sciences et arts.
— Au cercle catholique des étudiants. —
Dépêches de l'étranger. — Chronique
religieuse. — Le syndicat de l'aiguille. —
La question ouvrière. — Echos de par
tout.— Nécrolgie. — Le froid et la neige.
—Nouvelles diverses.—Dernière heure.
— Tableau et bulletin de la Bourse.
L'ÉLECTION DE BREST
M. l'abbé Gayraud est. élu;
. Cette bataille éleétoFalë, ëngagée
dariâ dés conditions exceptionnelle
ment difficiles, les catholiqùes l'ont
gagnée. Certes, d'après les calculs
«rdinair.es, iioS amis devaiënt être
Dâttuê. Tbiis ies éléments du succès
ïi'ëtaient-ils pas du côté de leurs
adversaires : la naissance, la for
tune, les appuis éclatants j le titre
d'homme dit pâys, très important
partout èt si puissant en Breta
gne?
, Â ce candidat bien ]iosé> connu
tlë tous, ayant fait son devoir comme
magistrat, comme soldat, comme
chrétien, qui opposait-on? Un sim
ple prêtre, tenu pour un maître
dans le groupe restreint où l'on
s'occupe au savoir et des doctrines,
mais inconnu dans le pays et que
ses adversaires traitaient « d'étran
ger ».
Ce n'est pas tout : M. le comtede
Blois, bon gentilhomme*, vivant
tranquillement et Confortàbleitient
$ur terrs.^ g ans grand souci des
questions qui passionnent de nos
jours les esprits, ne fournissait ma
tière, ni prétexte à aucune attaque
qui pût troubler l'électeur ami de
1 ordre et de la propriété. S'il était
difïicilede.léglorifier, il n'y avait pas
non plus à le diminuer. Du reste,
on ny songeait point.
Il en allait autrement pour M;
l'abbé Gayraud. On n'avait pas en
lui un effacé. Religieux, il «tait sorti
de son ordre, ce qui toujours, quel
qu'en soit le motif, prête à la cri
tique. Orateur, écrivain, homme
de doctrine, homme de combat, eri-
ftemi déclaré du socialisme et parti
san convaincu des réformes sociales,
il avait abordé de la parole et de là
plume les graves questions qui
préoccupent et passionnent aujour
d'hui quiconque pense à l'avenir du
pays et de la société ; puis il avait
dit : « Il y a quelque chose à faire. »
C'était assez pour le déclarer socia
liste. On n'y manqua point. Et de
quelles autres accusations on -le
chargea ! Avec quel acharnement,
quelle fureur on s'en prit à l'homme
et au prêtre ! On voulait le perdre,
et on le déclara perdu dans l'esprit
des âmis de l'ordre, de la propriété,
de là rélîgion. Résultât ; 7,233 voix
conservatrices et catholiques l'ont i
; élu.'-' ■ . ■ i
. Et comment cela? Parce que cette
population vraiment chrétienne/
rènseignée par des laïques ' $vànt
tout catholiques et pàf des prêtres
dont elle connaît l'indépendance èt i
les vertus, qu'elle sait soumis
et dévoués au Pape* a voulu un
député qui, sans négliger lés affai
res de sa circonscription électorale,
serait essentiellement l'homme des
intérêts religieux. Au fond» ce n'est
pas M.Gayraud qu'elle a élu, cé n'est
pas M. de Blois qu'elle a repoussé
elle a obéi à des doctrines, elle s'est
prononcée sur une politique. Les
uns lui offraient la monarchie par- _
lèmentaire, les autres la démocra
tie chrétienne. C'est à là démocratie
qu'elle s'est donnée. . .
' Aussi cette élection est-elle de
beaucoup la plus importante, la
plus significative de toutes çélles qui
ont été faites depuis le fameux toast.
du cardinal. Lavigerie, sanctionné,
quant au fond, par le Souverain
I?ontif@i
Sans doute, ce n'est pas- la pre
mière fois que catholiques avant
tbut et réfraétairés etf trouvent àux
iiHséàj iàâié jâiftàis lâ- éituàildri
n'avait eu cette netteté, cette gra
vité. Après des escarmouches, sans
arriver à .s'çntendrej qn avait ce
pendant évité le conlbat ouvert.
Cette fois la question ëst bien tran-
chéë. On peut même dire à certains
égard?, trop tranchée : Pour; notre
$art, d'accord avec ceux qui vien
nent de vaincre, nous avons au
début souhaité et cherché un
succès moins éclatant. Une, adhé
sion mitigéej comme celle de Mgr
d'Iiuist, à la politique'constitution
nelle, voilà tout ce que les catholi
ques demandaient... Comme ils
sont rappelés à l'ordre les réfrac-
taires qui par cette élection rê
vaient de fairé condamner les pres
criptions pontificales ! Ils voulaient
une condamnation : elle est portée
et c'est eiix qu'ellé frappe*
■ Assurément cette lutte si vive a
eu des côtés fâcheux. Elle a mis la
guerrë ou il n'y avait que des dis-
S ëiitinlents . A qui la faute ? .Qui
donc a prétendu, taire violence àiix
élëctéurs ? Qui donô aù lieii de s'en
tenir aux doctrines est descendu à
une polémique personnelle, insul
tante, odieusè ? Qui donc s'est allié
aux républicains révolutionnaires et
sectaires? Qui donc a fait la guerre
au couteau ?
Oui, il est fâcheux qu'il en ait été
ainsi, mais sachons reconnaître que
si la séparation a été trop violente,
elle était inévitable. Pour bien éclai
rer la situation,pour montrer à tous
avec quelle loyauté, quelle fermeté,
les catholiques se sont établis sur
le terrain constitutionnel, il fallait
qu'un jour ou l'autre il y eût lutte
électorale bien caractérisée entre
eux et les réfactaires. C'est fait. Per
sonne n'a caché son jeu. M. de Blois
s'est déclaré monarchiste parlemen
taire, orléaniste. M. l'abbe Gayraud
s'est affirmé démocrate,républicain,
partisan des réformes sociales, dé
fenseur absolu des encycliques
que tournent ou repoussent les
réfractaires. Et dans cette circons
cription foncièrement : catholique,
son programme a triomphé. ,
Ce triomphe est d'autant .plus
significatif, plus instructif ; il expri
me d'autant mieux les sentiments du
corps électoral que le candidat des
orléanistes, grâce à sa situation
personnelle dans le .pays, a gagné
Un très grand nombre d'électeurs
qui par les idées appartenaient â
son concurrent; V
Nous avons fecôîinu' durant la
lutte et nous tenons à reconnaître
dç nouveau aujourd 'hui qué M. de
Blois était'lé candidat; bieri choisi;
d'un groupe conservateur, aimant
la religion et exerçant, quand la
passion politique ne le dominé
ttoirit, iinë iiifuiencë légitime et
heureuse. La campagne que les
chefs de ce groupe, de ce parti,
viennent de faire les a certainement
affaiblis. Il ëst àdésirer riu'ils se
relèvent, car leur action'.doit ët petit
être féconde.,Ce résultat qui réta
blirait la paix et bientôt l'unidn,
ils robtietidft)iit si, saris renier leur
'passé, sans cesser de voir dàiis là
monarchie, même philippieririe,,
l'idéal d'un bon gouvernement,
ils savent ëé âouniettré. ëri chré
tiens qu'ils , sont, aux directions
du chêf dé i f Egliséj ët servir, en
patriotes, qu'ils sont aussi', ce qU ii y
a de juste dans lés aspirations du
pays et de ce temps. *
Eugène Veuillot.
bulMTÎN DU JOUR
i La journée d'hier a été bonne au point
de vue éleciôrâL
 Brest, M. l'abbé Gayraud & été élu
à une très forte majorité contre M. le
comte de Blois, monarchiste.
A .Albertville^ le républicain modéré,
M; Forni, soutenu pair ies catholiques
constitutionnels, a triomphé de son Con
current radical:
Enfin, h Lille, aux élections munici
pales complémentaires, les deux can
didats libéraux ont été noMmés pontre
leurs concurrents collectivistes. Les so
cialistes, furieux de cet échec, se sont
livrés dans la soirée à de violentes mani
festations.
Le ministre dés affaires étrangères de
Russie à, Paris.
Voici la note officielle communiquée
aux journaux :
« Le baron de Mohreriheim a informé
M. Hanotaux, ministre des affaires
étrangères, que, par ordre de l'empe
reur, le comte Mouraview, gérant du
ministère des affaires étrangères russe,
se rendrait à Paris en quittant Copen
hague, en Vue d'être pr'éaentéàM. lepré-
sident de la République et d'entrer en
relations avec les ministres français.
« Le comte Mouraview arrivera jeudi
matin khuit heures. U restera quarante-
huit heures à Paris.
« Un dîner officiel aura lieu jeudi soir
à l'Elysée, »
M. Georges Thiébaud, poursuivant sa
campagnècontre l'influence protestante,
a fait, Mer, à Bergerac une conférence
qui a été très mouvementée.
Un arrêt du conseil d'Etat annule
les élections municipales de Montpel
lier.
Le conseil municipal de Metz avait
voté une décision donnant à la rue de
l'Evêché le nom de Mgr Dupont des
Loges, le patriote évêque de Metz. Lo
statthalter d'Alsace-Lorraine a refusé de
ratifier celte décision.
Les nouvelles officielles de Cuba an
noncent que la pacification est complète
dans les deux provinces de la Havane
et dp Matanzas.
Nous prions instamment ceux de
nos lecteurs dont l'abonnement expire
le 31 janvier de ne pas attendre
plus longtemps pour le renouveler.
Cette exaçtitude aura un double
ay&itage pour eux : elle diminuera les
chances d'erreur et elle évitera dés
frais.
DISCOURS I SIÎEMIÎ Mil
AU PATRICIAT ROMAIN
Rome, 22 janvier.
Voici,d'après le texte officiel publié au
jourd'hui par l'Osservatoire Rômano, la
traduction du discours adressé hier par
le Souverain Pbntife aux nombreusés fa-
tailies dù patriciat romain qui étaient
allées lui renouveler l'hommage de leur
fidélité .inviolable et du plus affectueUi
dévouement:
Chers Fils,
C'est une joie pour Notre coeur de
vous revoir après un an, dans ce
lieu riièrriej fraternellement Unis par
cette communauté de peiisees .et.a af
fections qui' vous honorent. Notrë
pharité ne fait ni ne doit faire acçëp-
tion de personnes ;, mais elle ne
saurait etre" , réprehensible si elle
met particulièrement en. vous sa
complaisance-, en vue précisément
dU rang social qui vous a été assi
gné par un fait en apparence fortuit,
mais, en vérité, par Une clémente
disposition du Ciel. Commêiît refu
ser un égard particulier à l'éclat du
nonij du moment que le divin Ré
dempteur â montré par le fait le te
nir en èstinïe ? Certes^ danë son pè
lerinage terrestre, il adopta la. pau
vreté et ne voulut jamais-la richesse'
pour eonjpagne; mais_ pourtant il
voului riàitrë de raee royale.
Ce n'est point potir natter un fol
orgueil, que Nous vous rappelons
ces choses,chers fils; mais plutôt
pour voUs réconforter dans les
oeuvres dignes de vôtr'ë rang-. Tout
individu, toute classe d'individus a
ses fonctions et sa valeur propres,
ët ë'ëst, de l'assemblage bien or
donné de toiis, due jaillit l'harmo
nie de la Société humaine^ Il est
cependant indéniable que, daris les
institutions privées et publiques,
l'aristocratie [du sang est une forcé
spéciale, comme la fortune, comme
le talent. S'il y avait là dissonance
avec les dispositions de la nature*
ce n'aurait pas été, comme dans
tous les temps, une des lois modé
ratrices des événements humains.
C'est pourquoi, jugeant d'après le
passé, il n'est pas illogique d'en in
férer, quelles que soient les vicissi
tudes des temps, qu'un nom illustre
ne manquera jamais d'avoir quelque
efficacité, pour qui sait dignement
le portër.
Èt de ces noms célèbres, il n'y a
pas pénurie parmi vous, car cna-
cune de vos familles en possède par
la vertu des ancêtres. Mais leur di
gnité et leur lustre fut accru pour
eux et partant pour vous-mêmes par
le fait qu'ils ràttachèrent de diver
ses manières leur propre nom à
l'histoire de la Papauté 11 n'y a cer
tes pas ailleurs autant de maisons,
même illustres, qui soient compa
rables sous ce rapport à celles de
Rome, lesquelles, ressentant l'in
fluence immédiate du suprême pou
voir hiérarchique, fournirent, en si
grande abondance, des hommes si
gnalés à la robe .à l'épée, à la crosse,
a la pourpre. Et le plus haUt des
•honneurs, que d'autres n'ont jamais
obtenu en pareille proportion, le
patriciat romain le doit à ceux qu'il
vit surgir de son sein pour être éle
vés à la chaire de Saint-Pierre. A ce
propos,-il Nous advint de faire men
tion ici-même, il, y a un an, de la fa
mille des Colonha ; mais beaucoup
d'autres .qui formaient alors et for
ment encore maintenant Notre cou
ronne, voient briller dans leurs ar-
. mes le fulgurant reflet de la Tiare
qu'ils ont possédée.
Au reste, plus important encore;
et honorable qué le priyilège de la
naissance est l'accomplissement des
deyoirs qu'elle impose. Vous venez
de Nous indiquer, monsieur, le
prince, comme un juste motif de
consolation le réveil du sentiment
chrétien. En vérité, il Nous parvient;
à cet effet de diverses parties' de la
Péninsule des indices et des symptô
mes de bon augure. Qu'il en soit
rendu grâces au Seigneur qui, se
souvenant de sa miséricorde, tiré
des fautes mêmes, des désillusions,
du. malaise présent et des périls fu
turs, l'occasion de secouer et d'aver
tir les esprits oublieux. Nous savons
combien parmi vous aident à Rome,
depuis des années, cë mouvement
salutaire, par leurs oeuvres et par
leurs exemples. De la part aussi de
vos ancêtres, leâ Pontifes romains
avaient trouvé un généreux con
cours à leurs soins. prévoyants et
bienfaisants. Comme nos sollicitu
de^ votre prompte et très opportune
coopération se manifeste en faveur
de cette auguste ville. Aussin'est-ce
pas sans une intime complaisance,
què Nous reconnaissons combien
vous doivent les associations utiles,
les écoles, les asiles de l'enfance, la
défense m'êm'e de la vérité et du
droit.
Mais, vous le voyez, les besoins
matériels et moraux de Rome, plutôt
que de diminuer, persistent vivants
et pressants. Ce qui est donc requis
davantage de votre activité, de votre
zèle, de votre charité, c'est la persé
vérance, et Nous y comptons. Ayez
l'oeil ouvert sur les événements qui
mûrissent et ne perdez jamais de
vUë que, au milieu du ferment crois
sant des convoitises populaires,
la franche et constante vertu chez
les classes plus élevées est l'un des
plus nécessaires moyens de défense.
Heureux et reconnaissant de votre
filial hommage, Npus implorons sur
vous et sur les vôtres les plus pré
cieuses bénédictions du Ciel. Re
cevez-en le gage dans Notre bénédic
tion que Nous vous accordons avec
toute l'effusion de Notre coeur.
A personne je n'ai indiqué le nom de l'é-
vêque. susdit, par la très simple raison
que je ne connais paslce nom ; Et je ne le
connais pas parce que M. Léo Taxil ne
me l'a pas révélé, quoiqu'il eût promis de
le faire. Telle est la pure vérité.
Le manque de paroie de,M. Taxil a d'a
bord éveillé ma défiance. A partir dé ce
jour, j'ai eu des doutes sérieux sur l'exis
tence de Diana Vaughan.
L'opinion que j'exprime maintenant,
j'ai commencé à l'indiquer immédiate
ment à Trente. Je sais que depuis plu
sieurs mois beaucoup de journaux l'ont
constaté. Ma sincérité est ainsi éta
blie.
! Je vous prie d'insérer ces observations
dans votre excellent journal en en con
servant la substance et aveo les remar
ques que vous jugerez utiles.
Pardonnez-moi l'ennui que je vous
cause et veuillez agréer les sentiments
d'estime avec lesquels je suis, honoré
Monsieur,
Votre bien dévoué,
•f* Luigi L azzareschi-.
Cette déclaration catégorique
permet de repousser d'un mot le
fatras de mensonges amassé par
les organisateurs ae la farce vau-
§hanesque. Nous nous empressons
e remercier le vénéré prélat, dont
la parole défie tous les soupçons...
E. T. -
E lections législatives
du 24 février 1897
DIANA VAUGHAN
L'audace des mystificateurs est
vraiment prodigieuse.
Dans les derniers numéros des
absurdes Mémoirêé d'une ex-pa,lla-
diste, la prétendue Diaflâ raconté
longuement que M, Taxil aurait ré
vélé à Mgr Lazzareschi le nom de
l'évêque qui l'aurait confessée et
baptisée. Cela est dit avec de nom
breux détails, dont chacun est une
fausseté. Nous n'avons pas eu le
temps ces jours-ci de.nous occuper
encore de l'incroyable mystifica
tion.
En attendant, voici une lettre que
Mgr Lazzareschi nous fait l'hon
neur de nous adresser :
Rome, 20 janvier.
Honoré monsieur,
Dans le dernier fascicule de ses mé
moires, Diana Vaughan m'accuse de dé
loyauté. Bien que j'eusse promis à M.
Léo Taxil, représentant de Diana Vau
ghan, de ne révéler qu'au Saint-Père le
nom-de l'évêque qui l'a reçue dans la re
ligion, et de ne faire cette révélation que
lorsque le Saint-Père daignerait en ex
primer le désir, j'aurais indiqué le nom
à une autre personne.
L'opprobre de la déloyauté ne saurait
m'atteindre. Je proteste contre l'injure.
Finistère.
Troisième circonscription de Brest.
Inscrits : 17,669. — Votants : 13,584.
MM.l'abbé Gayraud, catholique. 7.233ELU
le comte de Blois, monar. . 6.980
le- docteur Loysel, opport.. 154
Divers....... 61
Il s'agissait de remplacer Mgr d'Hulst,
élu en 1893 par 11,097 voix «ans concur
rent.
Savoie.
Arrondissement d'Albertville.
Inscrits : 9,255. — Votants : 7,089.
MM. Forni, rép. modéré 3.630 Elu
Denarlé, radical... 3.375
. Miêge, socialiste.. 3
Voix perdues 81
Il s'agissait de remplacer M. Berthet,
radical, décédé, élu en, 1896, après la
mort de M. Pierre Blanc, par 4,620 voix
contre 2,231 à M. Ancenay, conserva
teur.
^
apbès l'election
NOUS lisons dans l'Etoile de la
mer:
Nous avons dit qGe l'on a essayé de dif
famer M. l'abbé Gayraud et sa famille.
Rien n'a été respecté.
Il y a, auprès de M. Tabï>é Gayraud,
trois femmes sans joie et sans fortune:
l'aïeuie, la petite-fille et la mère.
La chevalerie a tiré dessus !...
Après l'élection, l'heure viendra de
rendre les comptes et nous savons, en
toute connaissance de cause, que ce sera
potir beaucoup l'heure de la honte. Ici,
nous nous refusons absolument à entrer
dans des questions qui sont le domaine
sacré des familles, dans ce domaine où
nous avons tous quelque chose de secret,
dans ce domaine où ce qu'il y a de plus
honorable et de plus délicat peut être
changé en grossièreté par la main bru
tale des intrus.
Nous ne serons pas plus difficiles que
ne l'est la plus haute autorité ecclésias
tique de France.
S. Em. le cardinal Richard,archevêque
FEUILLETON DE L 'UNÎVEKS
du 26 janvier 1897 '
CAUSERIE LITTÉRAIRE
M. Lecoy de La Marche et M. iéon
Le Grand (1).
La haine de l'Eglise et les préjugés
révolutionnaires ont empoisonné chez
nqius les sources mêmes de l'histoire.
Nous assistons, en France,Vdepuis long
temps déjà, il faut bien le dire, , à Un
spectacle étrange, inconnu chez les au
tres nations. Au delà de nos frontièresj-èn
Angleterre comme en Allemagne, én Es
pagne comme en Russie, partout,lepassé
de là patrie est l'objet d'un culte afdent,
passionné. Où a la religion des ancêtres,
et si l'on dit : 'la vieille Angleterre, la
vieille Allemagne, cé n'est "pas avec ïè
sourire du dédain sur ïes lèvres, c'est
avec le respect attendri d'un fils qui voit
(1) JLà Guerre aux erreurs historiques,
par A. Lecoy de La Marche, un volume
îri~18 ; Letouzey, éditeur. — Les Quinze-
Vingts depuis leur fondation jusqu'à leur
translation' au faubourg - Saint-Antoine
(XIH'-XVllI* sïêcie),par M. Léon Le Grand ;
dans la collection de la Société de l'histoire
dë Paris.— L 'Hospice nztiona.1 dutribunal
révolutionnaire, par le même. (Jîeuue des
questions Historiques, d« i?» juillet 1890).
passer dans ses souvenirs d'enfance îa
figure bénie de soil aïeule. Pour nous,
nous avons changé tout cela et nous
avons mis le cœur à droite. Chaque jour,
historiens et journalistes tournent en dé
rision les hoinmes et les choses d'autre
fois, rabaissent nos grandeurs anciennes,
font litière de'nos anciennès gloires ; ils
se livrent à cette besogne saris soulever
autour de leur nom la réprobation géné
rale, sans que l'indignation publique
fasse justice de leur œuvre sacrilège.
Que dis-j e ? C'est à eux que vont lés fa
veurs de la popularité, aux écrivains qui
poursuivent de leurs outrages tout ce qui
a précédé 1789, qui font dp' nos pères je
ne sais quel troupeau misérable, man
geant de l'herbe et courbant sous dés
maîtres avilis un front déshonoré. Insul
ter le passé de la patrie est aujourd'hui
en France le plus court chemin pour ar
river à conquérir le titre de patriote e't
pour être proclamé historien national.
L'ignorance, si grande ispit-élle, ne
saurait suffire à expliquer une aussi dé
plorable aberration, ,0'est ailleurs qu'il
en faut chercher la.cause.
Il y a un siècle, toutes nos traditions
. ont été rompues. Comme un vaisseau qui
a perdu ses ancres, la France est deve
nue le jpuet des tempêtes et flep révolu
tions ; elle a subi trois invasions, elle a
perdu deux provinces. La Révolution,qui
sent -bien qu'à elle incombe la., res
ponsabilité d'aussi efïroyàbles malheurs;
« compris qu'il lui fallait trouver une
excuse. One fois de plus; jellê a payé
'd'audace ; elle a fait lé pro'cès à ses vie-?
times, elfe a traduit à la barre âe l'opi-
nion cette royauté qu'elle avait renver
sée au lieu d'en guérir les abus,
cette Eglise qu'elle s'était efforcée de
détruire^ ces gentilshommes qu'elle avait,
égorgés, ces prêtres et -ces religieu
ses qu'elle avait jetés à l'échafaud, toute
cette France d'autrefois qu'elle avait
noyée dans des flots de sang. De là ces
violents réquisitoires cpptre la France
d'avant 1789; de là ces perpétuels traves
tissements de l'histoire et de la vérité.
A côté des habiles, je le sais, il y a les
naïfs. A côté de ceux qui font la guerre
à"u passé par politique; par principes,
parce qu'il faut, pour que la Révolution,
ne soit pas criminelle, que l'ancienne
France ait été «oupable, il y a ceux qui y
vont de bonne foi et qui n'y entendent pas
malice. Eh! mon Dieu ! ils méprisent le
vieux temps tout simplement parce qu'en
ce temps-là il n'y avait pas de chemins de
fer. Ne leur parlez pas de ce siècle ridi-
cule;où Mme de Sévigné adressait à sa
fille les lettres que vous savez j mais où il
n'y avait pas de bureaux de télégraphe,
où Bossuet écrivait le Discours sur l'his
toire universelle, mais où l'on ne con
naissait pas le téléphone ; où Corneille
faisait jouer le Cid et Polyeucte, mais où
l'on mettait deux jours pour se rendre de
Paris à Rouen ! Depuis que nos gens vont
en wagon, ils ont pour leurs aïeux, qui
cheminaient bêtement par le coche, le
parfait dédain, le mépris superbe de la
tortue de La Fontaine pour "ses compa
gnes restées à terre, tandis qu'elle était
voiturée dans l'air par les deux canards :
yehex voir dans les
[nues
JJirâcle l çriait>»on
, Passer la teine des tortues,
La reine I, vraiment oui : je la suis en
[effet...
On sait quelle fortune échut à la va
niteuse tortue :
Elle tombe, elle crève aux pieds des regar
dants (2).
•Tâchons de profiter de la leçon et mé
fions-nous des canards, dés journaux qui,
nous trompent, des historiens qui nous
abusent, des pamphlétaires qui nous a-
musent. Soyons plus modestes et, s'il se
peut, moins ignorants. Ne repoussons
pas la vérité, lorsqu'elle se présente à
nous. Lorsque des écrivains consacrent -
leur talent et leurs veilles à combattre le
mensonge, à montrer combien la vieille
France était digne de respect, sachons
comprendre que notre devoir est d'ap
plaudir à leurs efforts, et, si nous tenons
une plume, de signaler léurs ouvrages à
.ràttention et à la sympathie des hon
nêtes gens. Au même titre que le soldat
qui défend la frontière menacée, saluons
l'homme de cœur qui fait sentinelle au
tour dù passé, qui défend ce. patrimoine
d'honneur et de gloire que nous ont
légué nos pères et qui n'est pas moins
précieux que l'intégrité du sol.
.. -, II. .
Ils ne sont pas rares, grâce à Dieu, les
écrivains qui ont fait ainsi œuvre dé bon
Français, saris souci d'une vaine et
fausse popularité. J'en rappellerai ici
(2) Fables X, m : La tortue et les deux
canards.- - - • '
quelques-uns, et tout d'abord, au pre
mier rang, ce vaillant et admirable abbé
Gorini, l'auteur de la Défense de l'Eglise,
publiée en 1853. L'abbè Gorini n'habitait
ni Paris, ni une grande ville de province.
II a vécu éloigné des bibliothèques, de
toute source intellectuelle, de tout ren
seignement. C'est au fond d'un village,
dans une des plus pauvres paroisses du
département de l'Ain, qu'il a formé et
réalisé le dessein de redresser nos histo
riens les plus célèbres, de venger l'E
glise, de rétablir, sûr nombre de ques
tions aussi iriiportantes que variées, la
vérité méconnue et travestie. Une telle
entreprise, dans les conditions où l'hum
ble curé de lâ Trànchère était placé, n'é
tait pas seulement téméraire ; elle pou
vait paraître impossible, et cependant il
l'a menée à bien. II est vrai qu'il y a con
sacré vingt années dé sa vie, vingt ans
d'un labeur incessant,prodigieux, invrai
semblable.
Ce fut un étonnant tour de force, ou
plutôt un miracle de patience, d'énergie,
de talent, et que seul pouvait faire un
prêtre pâssionnjiémènt épris de vérité et
de justice, soutenu par un ardent amour
de l'Eglise. L'abbé Gorini avait deux à
trois amis à des points assez distants
dans le pays, et qui possédaient quelques
bouquins comme on en a à la campagne.
Il les leur emprunta et il en chercha en
core. Il se fit, selon lé mot de fearbey
d'Aurevilly, un mendiant de livrés ! un
frère quêteur, un capucin d'érudition !
On le rencontrait par les chemins courbé
"sous le poids dés volumes qu'il rappor
tait à dos, comme lès pauvres rappor
tent leur bois et leur pain. Ceux-là une,
fois lus, il s'ingéniait pour en découvrir
d'autres plus loin dans la contrée. « C'é
tait, dit encore Barbey d'Aurevilly, un
Robinson de lecture dans son île déserte,
finissant, comme l'autre Robinson, par
se nourrir et s'ameubler à force d'indus
trie, de ressources dans la pensée et la
volonté. Il lisait d'ailleurs comme on lit
quand on n'a que très peu délivrés, avec
une mémoire qui retient tout et une in
telligence avivée par le besoin et deve
nue intuitive, qui devine ce qui manque
et dégage l'inconnu de l'équation (3). » Et
c'est ainsi qu'en vingt années, et sans :
sortir de l'aride milieu qu'il sut fécon
der, il put ésrire les trois savants et irré
futables volumes auxquels il a donné ce
titre : Défense de l'Eglise contre les er
reurs historiques de MM. Guizot, Au
gustin et Amédée Thierry, Michelet,,
Ampère, Quinet, Fauriel et H. . Mar
tin. -,
Une petite remarque, en passant. On
ne trouve pas lë nom de l'abbé Gorini
dans le Dictionnaire des littératures,
de M; Vapereau, non plus que dans le
Dictionnaire des contemporains.
Deux ans avant la publication du livre
de l'abbé Gorini, en 1851, un des rédacr
teurs.de l'Univers, M. Léon Aubineau,
avait publié sur Augustin Thierry et ses
trop nombreuses erreurs un volume, mo
dèle de critique érudite et courtoise, œu
vre à la fois solide et agréable, qui est
. (3) J. Barbey d'Aurevilly, les Œuvres et
les hommes au XIX e siècle, tome I, page
159. •
, P aris
> : ET DEPARTEMENTS
Un an......... 40 -n
Six moisi...,. ' 21 »
ïfrois riiois. ;.. »« 11 " »
Les abonnements parten t dea 1" et 16 de chaîne mois
*t*t l Paris..; 10 cent.
UN NUMÉRO j DépÈLtteiïiénts..... 1S —
BUREAUX : Paris, ne Cassette, 17
On s'abonne à Rome, place du Gesù, 8 -
paris étranger.
et départements (union postale),
Un an...] 20 »
Six mois 10 »
Trois mois;.... 5 ».
26 »
13 »
6 50
ET
LE MONDE
Les aïonnemênts partent des ;l«* et 18 de chaque mois
L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui M sont adressés
ANNONCES
MM. LAGRANGE, CÉRF et O, 6, place de M Bourse
PARIS, 25 JANVIER 18S7
SOMMAIRE
L'éleotion de Brest. E ugène V euillot.
Discours du Souve
rain Pontifé au
patriciat romain. ;
Diana; , Vaughan :
Lettre de.. .. *..... M gr L azzare S chi.
Correspondance ro
maine....... ***.
L'école ménagère de
Plaisance.»...:.;. Ph.
Causerie littéraire. E dmond B ibé. "
Bulletin du jour. — Les élections législa
tives. —Après l'élection de Brest. — Infor
mations politiques et parlementaires. —
Une exception.—A travers la presse, V-
Chronique. — Lettres, sciences et arts.
— Au cercle catholique des étudiants. —
Dépêches de l'étranger. — Chronique
religieuse. — Le syndicat de l'aiguille. —
La question ouvrière. — Echos de par
tout.— Nécrolgie. — Le froid et la neige.
—Nouvelles diverses.—Dernière heure.
— Tableau et bulletin de la Bourse.
L'ÉLECTION DE BREST
M. l'abbé Gayraud est. élu;
. Cette bataille éleétoFalë, ëngagée
dariâ dés conditions exceptionnelle
ment difficiles, les catholiqùes l'ont
gagnée. Certes, d'après les calculs
«rdinair.es, iioS amis devaiënt être
Dâttuê. Tbiis ies éléments du succès
ïi'ëtaient-ils pas du côté de leurs
adversaires : la naissance, la for
tune, les appuis éclatants j le titre
d'homme dit pâys, très important
partout èt si puissant en Breta
gne?
, Â ce candidat bien ]iosé> connu
tlë tous, ayant fait son devoir comme
magistrat, comme soldat, comme
chrétien, qui opposait-on? Un sim
ple prêtre, tenu pour un maître
dans le groupe restreint où l'on
s'occupe au savoir et des doctrines,
mais inconnu dans le pays et que
ses adversaires traitaient « d'étran
ger ».
Ce n'est pas tout : M. le comtede
Blois, bon gentilhomme*, vivant
tranquillement et Confortàbleitient
$ur terrs.^ g ans grand souci des
questions qui passionnent de nos
jours les esprits, ne fournissait ma
tière, ni prétexte à aucune attaque
qui pût troubler l'électeur ami de
1 ordre et de la propriété. S'il était
difïicilede.léglorifier, il n'y avait pas
non plus à le diminuer. Du reste,
on ny songeait point.
Il en allait autrement pour M;
l'abbé Gayraud. On n'avait pas en
lui un effacé. Religieux, il «tait sorti
de son ordre, ce qui toujours, quel
qu'en soit le motif, prête à la cri
tique. Orateur, écrivain, homme
de doctrine, homme de combat, eri-
ftemi déclaré du socialisme et parti
san convaincu des réformes sociales,
il avait abordé de la parole et de là
plume les graves questions qui
préoccupent et passionnent aujour
d'hui quiconque pense à l'avenir du
pays et de la société ; puis il avait
dit : « Il y a quelque chose à faire. »
C'était assez pour le déclarer socia
liste. On n'y manqua point. Et de
quelles autres accusations on -le
chargea ! Avec quel acharnement,
quelle fureur on s'en prit à l'homme
et au prêtre ! On voulait le perdre,
et on le déclara perdu dans l'esprit
des âmis de l'ordre, de la propriété,
de là rélîgion. Résultât ; 7,233 voix
conservatrices et catholiques l'ont i
; élu.'-' ■ . ■ i
. Et comment cela? Parce que cette
population vraiment chrétienne/
rènseignée par des laïques ' $vànt
tout catholiques et pàf des prêtres
dont elle connaît l'indépendance èt i
les vertus, qu'elle sait soumis
et dévoués au Pape* a voulu un
député qui, sans négliger lés affai
res de sa circonscription électorale,
serait essentiellement l'homme des
intérêts religieux. Au fond» ce n'est
pas M.Gayraud qu'elle a élu, cé n'est
pas M. de Blois qu'elle a repoussé
elle a obéi à des doctrines, elle s'est
prononcée sur une politique. Les
uns lui offraient la monarchie par- _
lèmentaire, les autres la démocra
tie chrétienne. C'est à là démocratie
qu'elle s'est donnée. . .
' Aussi cette élection est-elle de
beaucoup la plus importante, la
plus significative de toutes çélles qui
ont été faites depuis le fameux toast.
du cardinal. Lavigerie, sanctionné,
quant au fond, par le Souverain
I?ontif@i
Sans doute, ce n'est pas- la pre
mière fois que catholiques avant
tbut et réfraétairés etf trouvent àux
iiHséàj iàâié jâiftàis lâ- éituàildri
n'avait eu cette netteté, cette gra
vité. Après des escarmouches, sans
arriver à .s'çntendrej qn avait ce
pendant évité le conlbat ouvert.
Cette fois la question ëst bien tran-
chéë. On peut même dire à certains
égard?, trop tranchée : Pour; notre
$art, d'accord avec ceux qui vien
nent de vaincre, nous avons au
début souhaité et cherché un
succès moins éclatant. Une, adhé
sion mitigéej comme celle de Mgr
d'Iiuist, à la politique'constitution
nelle, voilà tout ce que les catholi
ques demandaient... Comme ils
sont rappelés à l'ordre les réfrac-
taires qui par cette élection rê
vaient de fairé condamner les pres
criptions pontificales ! Ils voulaient
une condamnation : elle est portée
et c'est eiix qu'ellé frappe*
■ Assurément cette lutte si vive a
eu des côtés fâcheux. Elle a mis la
guerrë ou il n'y avait que des dis-
S ëiitinlents . A qui la faute ? .Qui
donc a prétendu, taire violence àiix
élëctéurs ? Qui donô aù lieii de s'en
tenir aux doctrines est descendu à
une polémique personnelle, insul
tante, odieusè ? Qui donc s'est allié
aux républicains révolutionnaires et
sectaires? Qui donc a fait la guerre
au couteau ?
Oui, il est fâcheux qu'il en ait été
ainsi, mais sachons reconnaître que
si la séparation a été trop violente,
elle était inévitable. Pour bien éclai
rer la situation,pour montrer à tous
avec quelle loyauté, quelle fermeté,
les catholiques se sont établis sur
le terrain constitutionnel, il fallait
qu'un jour ou l'autre il y eût lutte
électorale bien caractérisée entre
eux et les réfactaires. C'est fait. Per
sonne n'a caché son jeu. M. de Blois
s'est déclaré monarchiste parlemen
taire, orléaniste. M. l'abbe Gayraud
s'est affirmé démocrate,républicain,
partisan des réformes sociales, dé
fenseur absolu des encycliques
que tournent ou repoussent les
réfractaires. Et dans cette circons
cription foncièrement : catholique,
son programme a triomphé. ,
Ce triomphe est d'autant .plus
significatif, plus instructif ; il expri
me d'autant mieux les sentiments du
corps électoral que le candidat des
orléanistes, grâce à sa situation
personnelle dans le .pays, a gagné
Un très grand nombre d'électeurs
qui par les idées appartenaient â
son concurrent; V
Nous avons fecôîinu' durant la
lutte et nous tenons à reconnaître
dç nouveau aujourd 'hui qué M. de
Blois était'lé candidat; bieri choisi;
d'un groupe conservateur, aimant
la religion et exerçant, quand la
passion politique ne le dominé
ttoirit, iinë iiifuiencë légitime et
heureuse. La campagne que les
chefs de ce groupe, de ce parti,
viennent de faire les a certainement
affaiblis. Il ëst àdésirer riu'ils se
relèvent, car leur action'.doit ët petit
être féconde.,Ce résultat qui réta
blirait la paix et bientôt l'unidn,
ils robtietidft)iit si, saris renier leur
'passé, sans cesser de voir dàiis là
monarchie, même philippieririe,,
l'idéal d'un bon gouvernement,
ils savent ëé âouniettré. ëri chré
tiens qu'ils , sont, aux directions
du chêf dé i f Egliséj ët servir, en
patriotes, qu'ils sont aussi', ce qU ii y
a de juste dans lés aspirations du
pays et de ce temps. *
Eugène Veuillot.
bulMTÎN DU JOUR
i La journée d'hier a été bonne au point
de vue éleciôrâL
 Brest, M. l'abbé Gayraud & été élu
à une très forte majorité contre M. le
comte de Blois, monarchiste.
A .Albertville^ le républicain modéré,
M; Forni, soutenu pair ies catholiques
constitutionnels, a triomphé de son Con
current radical:
Enfin, h Lille, aux élections munici
pales complémentaires, les deux can
didats libéraux ont été noMmés pontre
leurs concurrents collectivistes. Les so
cialistes, furieux de cet échec, se sont
livrés dans la soirée à de violentes mani
festations.
Le ministre dés affaires étrangères de
Russie à, Paris.
Voici la note officielle communiquée
aux journaux :
« Le baron de Mohreriheim a informé
M. Hanotaux, ministre des affaires
étrangères, que, par ordre de l'empe
reur, le comte Mouraview, gérant du
ministère des affaires étrangères russe,
se rendrait à Paris en quittant Copen
hague, en Vue d'être pr'éaentéàM. lepré-
sident de la République et d'entrer en
relations avec les ministres français.
« Le comte Mouraview arrivera jeudi
matin khuit heures. U restera quarante-
huit heures à Paris.
« Un dîner officiel aura lieu jeudi soir
à l'Elysée, »
M. Georges Thiébaud, poursuivant sa
campagnècontre l'influence protestante,
a fait, Mer, à Bergerac une conférence
qui a été très mouvementée.
Un arrêt du conseil d'Etat annule
les élections municipales de Montpel
lier.
Le conseil municipal de Metz avait
voté une décision donnant à la rue de
l'Evêché le nom de Mgr Dupont des
Loges, le patriote évêque de Metz. Lo
statthalter d'Alsace-Lorraine a refusé de
ratifier celte décision.
Les nouvelles officielles de Cuba an
noncent que la pacification est complète
dans les deux provinces de la Havane
et dp Matanzas.
Nous prions instamment ceux de
nos lecteurs dont l'abonnement expire
le 31 janvier de ne pas attendre
plus longtemps pour le renouveler.
Cette exaçtitude aura un double
ay&itage pour eux : elle diminuera les
chances d'erreur et elle évitera dés
frais.
DISCOURS I SIÎEMIÎ Mil
AU PATRICIAT ROMAIN
Rome, 22 janvier.
Voici,d'après le texte officiel publié au
jourd'hui par l'Osservatoire Rômano, la
traduction du discours adressé hier par
le Souverain Pbntife aux nombreusés fa-
tailies dù patriciat romain qui étaient
allées lui renouveler l'hommage de leur
fidélité .inviolable et du plus affectueUi
dévouement:
Chers Fils,
C'est une joie pour Notre coeur de
vous revoir après un an, dans ce
lieu riièrriej fraternellement Unis par
cette communauté de peiisees .et.a af
fections qui' vous honorent. Notrë
pharité ne fait ni ne doit faire acçëp-
tion de personnes ;, mais elle ne
saurait etre" , réprehensible si elle
met particulièrement en. vous sa
complaisance-, en vue précisément
dU rang social qui vous a été assi
gné par un fait en apparence fortuit,
mais, en vérité, par Une clémente
disposition du Ciel. Commêiît refu
ser un égard particulier à l'éclat du
nonij du moment que le divin Ré
dempteur â montré par le fait le te
nir en èstinïe ? Certes^ danë son pè
lerinage terrestre, il adopta la. pau
vreté et ne voulut jamais-la richesse'
pour eonjpagne; mais_ pourtant il
voului riàitrë de raee royale.
Ce n'est point potir natter un fol
orgueil, que Nous vous rappelons
ces choses,chers fils; mais plutôt
pour voUs réconforter dans les
oeuvres dignes de vôtr'ë rang-. Tout
individu, toute classe d'individus a
ses fonctions et sa valeur propres,
ët ë'ëst, de l'assemblage bien or
donné de toiis, due jaillit l'harmo
nie de la Société humaine^ Il est
cependant indéniable que, daris les
institutions privées et publiques,
l'aristocratie [du sang est une forcé
spéciale, comme la fortune, comme
le talent. S'il y avait là dissonance
avec les dispositions de la nature*
ce n'aurait pas été, comme dans
tous les temps, une des lois modé
ratrices des événements humains.
C'est pourquoi, jugeant d'après le
passé, il n'est pas illogique d'en in
férer, quelles que soient les vicissi
tudes des temps, qu'un nom illustre
ne manquera jamais d'avoir quelque
efficacité, pour qui sait dignement
le portër.
Èt de ces noms célèbres, il n'y a
pas pénurie parmi vous, car cna-
cune de vos familles en possède par
la vertu des ancêtres. Mais leur di
gnité et leur lustre fut accru pour
eux et partant pour vous-mêmes par
le fait qu'ils ràttachèrent de diver
ses manières leur propre nom à
l'histoire de la Papauté 11 n'y a cer
tes pas ailleurs autant de maisons,
même illustres, qui soient compa
rables sous ce rapport à celles de
Rome, lesquelles, ressentant l'in
fluence immédiate du suprême pou
voir hiérarchique, fournirent, en si
grande abondance, des hommes si
gnalés à la robe .à l'épée, à la crosse,
a la pourpre. Et le plus haUt des
•honneurs, que d'autres n'ont jamais
obtenu en pareille proportion, le
patriciat romain le doit à ceux qu'il
vit surgir de son sein pour être éle
vés à la chaire de Saint-Pierre. A ce
propos,-il Nous advint de faire men
tion ici-même, il, y a un an, de la fa
mille des Colonha ; mais beaucoup
d'autres .qui formaient alors et for
ment encore maintenant Notre cou
ronne, voient briller dans leurs ar-
. mes le fulgurant reflet de la Tiare
qu'ils ont possédée.
Au reste, plus important encore;
et honorable qué le priyilège de la
naissance est l'accomplissement des
deyoirs qu'elle impose. Vous venez
de Nous indiquer, monsieur, le
prince, comme un juste motif de
consolation le réveil du sentiment
chrétien. En vérité, il Nous parvient;
à cet effet de diverses parties' de la
Péninsule des indices et des symptô
mes de bon augure. Qu'il en soit
rendu grâces au Seigneur qui, se
souvenant de sa miséricorde, tiré
des fautes mêmes, des désillusions,
du. malaise présent et des périls fu
turs, l'occasion de secouer et d'aver
tir les esprits oublieux. Nous savons
combien parmi vous aident à Rome,
depuis des années, cë mouvement
salutaire, par leurs oeuvres et par
leurs exemples. De la part aussi de
vos ancêtres, leâ Pontifes romains
avaient trouvé un généreux con
cours à leurs soins. prévoyants et
bienfaisants. Comme nos sollicitu
de^ votre prompte et très opportune
coopération se manifeste en faveur
de cette auguste ville. Aussin'est-ce
pas sans une intime complaisance,
què Nous reconnaissons combien
vous doivent les associations utiles,
les écoles, les asiles de l'enfance, la
défense m'êm'e de la vérité et du
droit.
Mais, vous le voyez, les besoins
matériels et moraux de Rome, plutôt
que de diminuer, persistent vivants
et pressants. Ce qui est donc requis
davantage de votre activité, de votre
zèle, de votre charité, c'est la persé
vérance, et Nous y comptons. Ayez
l'oeil ouvert sur les événements qui
mûrissent et ne perdez jamais de
vUë que, au milieu du ferment crois
sant des convoitises populaires,
la franche et constante vertu chez
les classes plus élevées est l'un des
plus nécessaires moyens de défense.
Heureux et reconnaissant de votre
filial hommage, Npus implorons sur
vous et sur les vôtres les plus pré
cieuses bénédictions du Ciel. Re
cevez-en le gage dans Notre bénédic
tion que Nous vous accordons avec
toute l'effusion de Notre coeur.
A personne je n'ai indiqué le nom de l'é-
vêque. susdit, par la très simple raison
que je ne connais paslce nom ; Et je ne le
connais pas parce que M. Léo Taxil ne
me l'a pas révélé, quoiqu'il eût promis de
le faire. Telle est la pure vérité.
Le manque de paroie de,M. Taxil a d'a
bord éveillé ma défiance. A partir dé ce
jour, j'ai eu des doutes sérieux sur l'exis
tence de Diana Vaughan.
L'opinion que j'exprime maintenant,
j'ai commencé à l'indiquer immédiate
ment à Trente. Je sais que depuis plu
sieurs mois beaucoup de journaux l'ont
constaté. Ma sincérité est ainsi éta
blie.
! Je vous prie d'insérer ces observations
dans votre excellent journal en en con
servant la substance et aveo les remar
ques que vous jugerez utiles.
Pardonnez-moi l'ennui que je vous
cause et veuillez agréer les sentiments
d'estime avec lesquels je suis, honoré
Monsieur,
Votre bien dévoué,
•f* Luigi L azzareschi-.
Cette déclaration catégorique
permet de repousser d'un mot le
fatras de mensonges amassé par
les organisateurs ae la farce vau-
§hanesque. Nous nous empressons
e remercier le vénéré prélat, dont
la parole défie tous les soupçons...
E. T. -
E lections législatives
du 24 février 1897
DIANA VAUGHAN
L'audace des mystificateurs est
vraiment prodigieuse.
Dans les derniers numéros des
absurdes Mémoirêé d'une ex-pa,lla-
diste, la prétendue Diaflâ raconté
longuement que M, Taxil aurait ré
vélé à Mgr Lazzareschi le nom de
l'évêque qui l'aurait confessée et
baptisée. Cela est dit avec de nom
breux détails, dont chacun est une
fausseté. Nous n'avons pas eu le
temps ces jours-ci de.nous occuper
encore de l'incroyable mystifica
tion.
En attendant, voici une lettre que
Mgr Lazzareschi nous fait l'hon
neur de nous adresser :
Rome, 20 janvier.
Honoré monsieur,
Dans le dernier fascicule de ses mé
moires, Diana Vaughan m'accuse de dé
loyauté. Bien que j'eusse promis à M.
Léo Taxil, représentant de Diana Vau
ghan, de ne révéler qu'au Saint-Père le
nom-de l'évêque qui l'a reçue dans la re
ligion, et de ne faire cette révélation que
lorsque le Saint-Père daignerait en ex
primer le désir, j'aurais indiqué le nom
à une autre personne.
L'opprobre de la déloyauté ne saurait
m'atteindre. Je proteste contre l'injure.
Finistère.
Troisième circonscription de Brest.
Inscrits : 17,669. — Votants : 13,584.
MM.l'abbé Gayraud, catholique. 7.233ELU
le comte de Blois, monar. . 6.980
le- docteur Loysel, opport.. 154
Divers....... 61
Il s'agissait de remplacer Mgr d'Hulst,
élu en 1893 par 11,097 voix «ans concur
rent.
Savoie.
Arrondissement d'Albertville.
Inscrits : 9,255. — Votants : 7,089.
MM. Forni, rép. modéré 3.630 Elu
Denarlé, radical... 3.375
. Miêge, socialiste.. 3
Voix perdues 81
Il s'agissait de remplacer M. Berthet,
radical, décédé, élu en, 1896, après la
mort de M. Pierre Blanc, par 4,620 voix
contre 2,231 à M. Ancenay, conserva
teur.
^
apbès l'election
NOUS lisons dans l'Etoile de la
mer:
Nous avons dit qGe l'on a essayé de dif
famer M. l'abbé Gayraud et sa famille.
Rien n'a été respecté.
Il y a, auprès de M. Tabï>é Gayraud,
trois femmes sans joie et sans fortune:
l'aïeuie, la petite-fille et la mère.
La chevalerie a tiré dessus !...
Après l'élection, l'heure viendra de
rendre les comptes et nous savons, en
toute connaissance de cause, que ce sera
potir beaucoup l'heure de la honte. Ici,
nous nous refusons absolument à entrer
dans des questions qui sont le domaine
sacré des familles, dans ce domaine où
nous avons tous quelque chose de secret,
dans ce domaine où ce qu'il y a de plus
honorable et de plus délicat peut être
changé en grossièreté par la main bru
tale des intrus.
Nous ne serons pas plus difficiles que
ne l'est la plus haute autorité ecclésias
tique de France.
S. Em. le cardinal Richard,archevêque
FEUILLETON DE L 'UNÎVEKS
du 26 janvier 1897 '
CAUSERIE LITTÉRAIRE
M. Lecoy de La Marche et M. iéon
Le Grand (1).
La haine de l'Eglise et les préjugés
révolutionnaires ont empoisonné chez
nqius les sources mêmes de l'histoire.
Nous assistons, en France,Vdepuis long
temps déjà, il faut bien le dire, , à Un
spectacle étrange, inconnu chez les au
tres nations. Au delà de nos frontièresj-èn
Angleterre comme en Allemagne, én Es
pagne comme en Russie, partout,lepassé
de là patrie est l'objet d'un culte afdent,
passionné. Où a la religion des ancêtres,
et si l'on dit : 'la vieille Angleterre, la
vieille Allemagne, cé n'est "pas avec ïè
sourire du dédain sur ïes lèvres, c'est
avec le respect attendri d'un fils qui voit
(1) JLà Guerre aux erreurs historiques,
par A. Lecoy de La Marche, un volume
îri~18 ; Letouzey, éditeur. — Les Quinze-
Vingts depuis leur fondation jusqu'à leur
translation' au faubourg - Saint-Antoine
(XIH'-XVllI* sïêcie),par M. Léon Le Grand ;
dans la collection de la Société de l'histoire
dë Paris.— L 'Hospice nztiona.1 dutribunal
révolutionnaire, par le même. (Jîeuue des
questions Historiques, d« i?» juillet 1890).
passer dans ses souvenirs d'enfance îa
figure bénie de soil aïeule. Pour nous,
nous avons changé tout cela et nous
avons mis le cœur à droite. Chaque jour,
historiens et journalistes tournent en dé
rision les hoinmes et les choses d'autre
fois, rabaissent nos grandeurs anciennes,
font litière de'nos anciennès gloires ; ils
se livrent à cette besogne saris soulever
autour de leur nom la réprobation géné
rale, sans que l'indignation publique
fasse justice de leur œuvre sacrilège.
Que dis-j e ? C'est à eux que vont lés fa
veurs de la popularité, aux écrivains qui
poursuivent de leurs outrages tout ce qui
a précédé 1789, qui font dp' nos pères je
ne sais quel troupeau misérable, man
geant de l'herbe et courbant sous dés
maîtres avilis un front déshonoré. Insul
ter le passé de la patrie est aujourd'hui
en France le plus court chemin pour ar
river à conquérir le titre de patriote e't
pour être proclamé historien national.
L'ignorance, si grande ispit-élle, ne
saurait suffire à expliquer une aussi dé
plorable aberration, ,0'est ailleurs qu'il
en faut chercher la.cause.
Il y a un siècle, toutes nos traditions
. ont été rompues. Comme un vaisseau qui
a perdu ses ancres, la France est deve
nue le jpuet des tempêtes et flep révolu
tions ; elle a subi trois invasions, elle a
perdu deux provinces. La Révolution,qui
sent -bien qu'à elle incombe la., res
ponsabilité d'aussi efïroyàbles malheurs;
« compris qu'il lui fallait trouver une
excuse. One fois de plus; jellê a payé
'd'audace ; elle a fait lé pro'cès à ses vie-?
times, elfe a traduit à la barre âe l'opi-
nion cette royauté qu'elle avait renver
sée au lieu d'en guérir les abus,
cette Eglise qu'elle s'était efforcée de
détruire^ ces gentilshommes qu'elle avait,
égorgés, ces prêtres et -ces religieu
ses qu'elle avait jetés à l'échafaud, toute
cette France d'autrefois qu'elle avait
noyée dans des flots de sang. De là ces
violents réquisitoires cpptre la France
d'avant 1789; de là ces perpétuels traves
tissements de l'histoire et de la vérité.
A côté des habiles, je le sais, il y a les
naïfs. A côté de ceux qui font la guerre
à"u passé par politique; par principes,
parce qu'il faut, pour que la Révolution,
ne soit pas criminelle, que l'ancienne
France ait été «oupable, il y a ceux qui y
vont de bonne foi et qui n'y entendent pas
malice. Eh! mon Dieu ! ils méprisent le
vieux temps tout simplement parce qu'en
ce temps-là il n'y avait pas de chemins de
fer. Ne leur parlez pas de ce siècle ridi-
cule;où Mme de Sévigné adressait à sa
fille les lettres que vous savez j mais où il
n'y avait pas de bureaux de télégraphe,
où Bossuet écrivait le Discours sur l'his
toire universelle, mais où l'on ne con
naissait pas le téléphone ; où Corneille
faisait jouer le Cid et Polyeucte, mais où
l'on mettait deux jours pour se rendre de
Paris à Rouen ! Depuis que nos gens vont
en wagon, ils ont pour leurs aïeux, qui
cheminaient bêtement par le coche, le
parfait dédain, le mépris superbe de la
tortue de La Fontaine pour "ses compa
gnes restées à terre, tandis qu'elle était
voiturée dans l'air par les deux canards :
yehex voir dans les
[nues
JJirâcle l çriait>»on
, Passer la teine des tortues,
La reine I, vraiment oui : je la suis en
[effet...
On sait quelle fortune échut à la va
niteuse tortue :
Elle tombe, elle crève aux pieds des regar
dants (2).
•Tâchons de profiter de la leçon et mé
fions-nous des canards, dés journaux qui,
nous trompent, des historiens qui nous
abusent, des pamphlétaires qui nous a-
musent. Soyons plus modestes et, s'il se
peut, moins ignorants. Ne repoussons
pas la vérité, lorsqu'elle se présente à
nous. Lorsque des écrivains consacrent -
leur talent et leurs veilles à combattre le
mensonge, à montrer combien la vieille
France était digne de respect, sachons
comprendre que notre devoir est d'ap
plaudir à leurs efforts, et, si nous tenons
une plume, de signaler léurs ouvrages à
.ràttention et à la sympathie des hon
nêtes gens. Au même titre que le soldat
qui défend la frontière menacée, saluons
l'homme de cœur qui fait sentinelle au
tour dù passé, qui défend ce. patrimoine
d'honneur et de gloire que nous ont
légué nos pères et qui n'est pas moins
précieux que l'intégrité du sol.
.. -, II. .
Ils ne sont pas rares, grâce à Dieu, les
écrivains qui ont fait ainsi œuvre dé bon
Français, saris souci d'une vaine et
fausse popularité. J'en rappellerai ici
(2) Fables X, m : La tortue et les deux
canards.- - - • '
quelques-uns, et tout d'abord, au pre
mier rang, ce vaillant et admirable abbé
Gorini, l'auteur de la Défense de l'Eglise,
publiée en 1853. L'abbè Gorini n'habitait
ni Paris, ni une grande ville de province.
II a vécu éloigné des bibliothèques, de
toute source intellectuelle, de tout ren
seignement. C'est au fond d'un village,
dans une des plus pauvres paroisses du
département de l'Ain, qu'il a formé et
réalisé le dessein de redresser nos histo
riens les plus célèbres, de venger l'E
glise, de rétablir, sûr nombre de ques
tions aussi iriiportantes que variées, la
vérité méconnue et travestie. Une telle
entreprise, dans les conditions où l'hum
ble curé de lâ Trànchère était placé, n'é
tait pas seulement téméraire ; elle pou
vait paraître impossible, et cependant il
l'a menée à bien. II est vrai qu'il y a con
sacré vingt années dé sa vie, vingt ans
d'un labeur incessant,prodigieux, invrai
semblable.
Ce fut un étonnant tour de force, ou
plutôt un miracle de patience, d'énergie,
de talent, et que seul pouvait faire un
prêtre pâssionnjiémènt épris de vérité et
de justice, soutenu par un ardent amour
de l'Eglise. L'abbé Gorini avait deux à
trois amis à des points assez distants
dans le pays, et qui possédaient quelques
bouquins comme on en a à la campagne.
Il les leur emprunta et il en chercha en
core. Il se fit, selon lé mot de fearbey
d'Aurevilly, un mendiant de livrés ! un
frère quêteur, un capucin d'érudition !
On le rencontrait par les chemins courbé
"sous le poids dés volumes qu'il rappor
tait à dos, comme lès pauvres rappor
tent leur bois et leur pain. Ceux-là une,
fois lus, il s'ingéniait pour en découvrir
d'autres plus loin dans la contrée. « C'é
tait, dit encore Barbey d'Aurevilly, un
Robinson de lecture dans son île déserte,
finissant, comme l'autre Robinson, par
se nourrir et s'ameubler à force d'indus
trie, de ressources dans la pensée et la
volonté. Il lisait d'ailleurs comme on lit
quand on n'a que très peu délivrés, avec
une mémoire qui retient tout et une in
telligence avivée par le besoin et deve
nue intuitive, qui devine ce qui manque
et dégage l'inconnu de l'équation (3). » Et
c'est ainsi qu'en vingt années, et sans :
sortir de l'aride milieu qu'il sut fécon
der, il put ésrire les trois savants et irré
futables volumes auxquels il a donné ce
titre : Défense de l'Eglise contre les er
reurs historiques de MM. Guizot, Au
gustin et Amédée Thierry, Michelet,,
Ampère, Quinet, Fauriel et H. . Mar
tin. -,
Une petite remarque, en passant. On
ne trouve pas lë nom de l'abbé Gorini
dans le Dictionnaire des littératures,
de M; Vapereau, non plus que dans le
Dictionnaire des contemporains.
Deux ans avant la publication du livre
de l'abbé Gorini, en 1851, un des rédacr
teurs.de l'Univers, M. Léon Aubineau,
avait publié sur Augustin Thierry et ses
trop nombreuses erreurs un volume, mo
dèle de critique érudite et courtoise, œu
vre à la fois solide et agréable, qui est
. (3) J. Barbey d'Aurevilly, les Œuvres et
les hommes au XIX e siècle, tome I, page
159. •
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