Titre : L'Univers
Éditeur : L'Univers (Paris)
Date d'édition : 1897-01-13
Contributeur : Veuillot, Louis (1813-1883). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, Pierre (1859-1907). Rédacteur
Contributeur : Veuillot, François (1870-1952). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34520232c
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 13 janvier 1897 13 janvier 1897
Description : 1897/01/13 (Numéro 10588). 1897/01/13 (Numéro 10588).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
Mercredi 13 Janvier 1897
Edition quotidienne. — 10,588
Mercredi 13 Janvier 1897
ÉDITION QUOTIDIENNE
1 " • i - • •" ' ~~ i i "i j * ~ "*-i ''• -
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: L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont vtâressis
ANNONCES
■MM. LAGRANGE, CER£ §t,0 i< ', 6., plaçe de la Bourse
•>Ï*J i-iUSi*
PARIS, 12 JANVIER .1897
- - . ■ ■* '■ :
SOMMAIRE
La foi et la raison»*.
Çà et là : Le gui'...
L'élection de Brest.
Noces d'opi pasto
rales
Causeries "militai
res...,
M.l'abbé Roussel..
F rançois Veuillot.
J oseph L eg U eu.-
P ierre '-vëtjiiéot.
\À>-
E ugène V euillot.
C olonel O rtus.
E douard A lexandre
Bulletin du jour. — L'évêché de Rodez. —,
A la France nouvelle.. —.Offre de service.
— Mgr Péchenard .et la. jeunesse catho
lique.— La France et l'Eglise. — L'im
pératrice de Russie". î — Informations, po-^
lltiqùes et parlementaires. J —' Madagas
car. "j- Nouvelle'campagne coitire -Ml'mé-
•line. — Chronique. Lettres, sciences
et arts. — La Comédie-Française- à
Athènes. — L'œuvre de la première com
munion. — La nejivaine de sainte ' Gene
viève. r— La, question ouvrière.»— Echos
de partout. — Dépêches, de l'étranger.
— Guerre et mariné. — Les anarchistes.
— Nécrologie. — ' Tribunaux. —' Nou
velles diverses. — Dernière heure. —
Calendrier. — Bourse et bulletin finan
cier.- ■
I ' - r ■ - ■
*. LA FOI ET LA RAISON
Les rapports de la raison avec la
foiy grave et.perpétuel sujet de dis
cussion, agité,, depuis les. premiers
temps,de l'Eglise, entre les apolo
gistes chrétiens et les. ennemis de
la religion ; — ceux-ci jugeant de la
foi sans la connaître, et -ceux-là,
montrant, par la vigueur et la clarté
de leurs arguments, .que, si la foi
possède leur esprit, leur raison
n'en* est pas obscurcie; ni . dimi
nuée.
Cette question, d'autres aussi de
pareille nature et d'égale hauteur,
ont le don de passionner aujour
d'hui, même en dehors du ; public
chrétien, un certain nombre d'es
prits élevés et chercheurs, qui com
prennent la puissance et sentent la
grandeur de la religion. M. Brune-»
tière en faisait'.■■■récemment ■■l'objet
d'une discussion profonde et Ser
rée, dans un article qui fut com
menté par- maints journaux, *et par
maintes revues -r- et dont 1 ■Univers
a parlé déjà. / v r ;
Le R. P. Coubé, de la Compagnie
de Jésus, s'armant des théories ex
posées dans cet arti.sle et considé
rant la bataille d'idéiés soulevée par
son apparition, a pérté, ces jours-ci,
la question dansv la chaire. En même
temps,- d'ailleurs, il l'a élevée au-
dessus de^ querelles présentes,
dont il ne voulait point, devant l'au
tel, interpeller et critiquer les" cham
pions et auxquelles il s'est contenté
de faire une allusion discrète et
remplie de tact. II a donc exposé*
de haut, cette graye question, les
rapports de la raison , et de ,1a foi :
il l'a fait dans deux .conférences
données, en l'église , Saint-Thomas
"4'Àquin, comme épilogue à la sta-
ijon de l'Avent qu'il y avait prêchée,
avec.succès et fruit, devant un nom
breux et fidèle auditoire, Ajoutons
immédiatement qu'il a, mis en lu
mière et développé, dans ces con
férences, un côté, non le moins
beau ni le moins important, de son
remarquable talent d'orateur reli
gieux ; il y a montré une grande et
sure vigueur de dialectique, un es
prit, net et précis, sachant conduire
avec beaucoup de force et mener
droit vers une conclusion logique et
lumineuse, une discussion ardue.
L'auditoire a goûté ce rare et forti
fiant plaisir de se sentir élever "au
nivëàù des plus hautes questions
et de'Voir, comme ,iine, Driïlanté
clarté, 1 la puissance,des arguments.
En'; d'autres occasions, comme en
son discours de Noël sur le bap
tême de Clovis et la mission des
Francs, l'éloquent religieux avait
déployé d'autres qualités, la chaleur
et l'émotion, l'élévation des vues et
ta mâlè harmonie des phrases, — j -
qualités. qui complètent excellem
ment sa, physionomie d'orateur sa
cré.
Au début de son premier discours,
le R. P. Coubé a rendu un vif hom
mage, encore que tout discret, aux
écrivains dont l'intelligence, et l'au
torité contribuent, en dehors de
l'Eglise, à provoquer, ou à dévelop
per une .réaction favorable àl'E
glise ;; il .a reconnu et loué la droi
ture et la sincérité de leurs inten
tions. Il a constaté et souligné avec
joie cette réaction, dont ils sont les'
partisans et même les champions,
contre le positivisme hier triom
phant. L'écrivain qui raille, en plein
milieu d'indifférence à la religion,
les « petites drôleries de la libre-
pensée », qui ose appeler l'esprit
voltairien s « un phénomène da sur
vivance »,adu courage et du mérite.
Il doit être loué de penser ainsi,
encore plus de le proclamer tout
haut.. . . ,
. S'ensuit-il que nous devions ac
cepter, sans réserve et sans hésita-;
tion, son concours ? Le R. P. Coubé
ne le, pense point. En effet, M. Bru
netière a une: façon, très particu
lière et très à .lui» d'exalter la reli
gion, ou plutôt le sentiment reli
gieux.Jl.est d'autant plus nécessaire
de le remarquerj et de refuser, sinon
cet appui lui-mehie, au 1 moins quel
ques-uns des arguments qu'on nous
offre avec lui, -m, que cet appui nous*
.est présenté d'un; air aimable et
d'un cœur ! sincère. On risquerait de
l'accepter sans défiance et" sans
examen, venant d'un tel allié.; et "ce
serait fort dangereux.
• Mv Brunetière, en effet, dans sa
juste inimitié contre le positivisme,
: en-, arrive. à combattre, la ' çàison
elle-même." Il lui attribue les excès
du raisonnement froid, dont la ri
gueur exagérée aboutit parfois à
l'erreur; et, lui opposantles trou
vaille» du sentimentales découver
tes de l'instinct, les- vérités qui
s'épanouissent* du cœur," sans. cul
ture et., sans travail, -r-..et qui, en
fait, ne sont vérités, que par leur
conformité pleine et entiere avec
la raison — il en arrive à con
clure : « Il ne s'est peut-êtreaccôm-
pli rien de grand ou de véritable
mentfécond dans l'histoire qui 1 ne
contienne à son origine, dans son
principe ou dans son germe, quel- :
que chose d'irrationnel.. ; La raison
a si .peu de rapports avec la vie
qu'aussitôt qu'eil^ entreprend de la
régler, elle: la, tr4>pble. Ses inspira
tions ne servent .on quelque sorfô"
qu'à nous déshumaniser. »
- Or, et c'est précisément ce
qu'il importe avant tout de mettre
en relief — si M. Brunetière estime
assez haut la religion, c'est qu'il la
déclare fondée sur cet excellent ir
rationnel, qu!il met à la base de
toute chose, utile et bonne. Assuré
ment la religion n'est point, selon
lui, formellement contraire à la rai
son, ~ mft ' irrationnel ne < va pas
aussi loin, — mais, dit-il, ellerepose
uniquement sur je séntiment reli
gieux et ne saurait soutenir' le froid
et dissolvant examen de la raison.
« Une religion rationnelle, écrit-il,
n'est pas une religion. » Et ailleurs,
il affirme doctoralement que l'on 1 ne
peut démontrer par des motifs de
l'ordre intellectuel ni l'existence de
Dieu* ni l'immortalité de l'âme, ■-<-
Et voilà, pour quel motif, au senti
ment de M. Brunetière, il y a du bon
dans la religion catholique. Eh bien,
il n'est pas possible, il n'est pas
permis .. d'admettre uner. théorie
aussi contraire au traditionnel en
seignement de l'Eglise,
L'éloquent orateur a rigoureuse
ment conduit cette thèse a sa con
clusion logique, afin d'en montrer
L'extrême péril. Or, cette conclu
sion n'est rien moins que l'anéantis
sement de la ■ religion même/Et, en
effet, si l'existence de Dieu relève
du sentiment pur et n'est pas sus
ceptible de démonstration, il en ré
sulte ceci : que Dieu existe... peut-
être. Ayant le sens religieux, je
c'roia.T-r-, sans bien savoir pourquoi
d'ailleurs-.— à son existence ; un
autre, dépourvu de ce sens reli
gieux, n'y croira point. Qui pourra
nous départager?La raison? Mais
l'existence de Dieu* de par la théo
rie même, échappe à la raison. Il
ne reste donc plus qu'à se réfugier
dans un scepticisme universel et
désespérant
Le R. P; Coubé a fait cette dé
monstration, d^une façon beaucoup
plus convaincante,' en termes vrai
ment lumineux. Il a - également
prouvé combien la théorie de l'i?'-
rationnel, exposée par M. ' Brune- !
tière, en dehors même de la ques
tion religieuse, est fausse. Elle re
pose, au fond, sur une confusion
prodigieuse. entre la raison et les
excès, du : raisonnement, entre une
fallacieuse et séduisante apparence
et la réalité. Oui, parfois, on peut
dire ingénieusefnent que le cœur a
raison contre la raison ; on peut af
firmer qu'un açte, absurde aux yeux
de la raison, est excellent néanmoins
parce qu'il, est, dicté par le senti
ment. Mais,, dans ce cas, n'est-il
pas évident que? le mot raison si
gnifie ■ prudence et -■ sagesse>: hu
maine? Et qui donc peut juger, en
dernier- ressort, entre cette ' pru
dence de l'esprit et là • généreuse
imprudence du coeur, si, ce-n'est
la raison vraie, ce . qu'on appelle
la raison, toujours conforme axi
devoir, même' aiors qu'il faut être
fou, aux yeux des prudents, pour
l'accomplir? Le sentiment,, quand
il est' juste et bon, peut être ir
raisonné; mais toujours, en ce. cas,
il est raisonnable. Et M. Brune
tière a été la dupe d'une illusion,'
qu'on pourrait traiter de paradoxe
ingénieux- s'il! en avait l'ait un ar.r
ticle humoristique, - mais. ; qu'il faut
combattre értergiquement quand on
la trouve en une étude philosophi
que et sérieuse, où l'on prétend
exposer les bases de la foi.-
! Le-R. P. Coubé, après afoir .ac
compli,, avec une. parfaite rigueur,
ce travail de critique^ a montré, lar
gement et clairement, le rôle de la
raison dans la foi. Il serait très in
téressant de le suivre aussi sur cè
terrain, et nous souhaitons fort que
ces deux discours; si pleinset si lu
mineux, soient publies. Mais nous-
voulions surtout relever, chez l'élo
quent prédicâteùr, l'exposé qu'il a
;fait et la'discussion qu'il a conduite
avec tant de sûreté, de théories, qui
ont été l'objet, de si nombreux com-
:mentaires. Constatons simplement,
en terminant ces quelques mots,
qu'aujourd'hui comme toujours,
c est la religion, — la religion taxée
d'obscurantisme et d'absurdité ! —
qui défend, qui exalte la raison hu
maine! :
François V euillot.
♦—j. —f-^
BULLETIN DU JOUR
Aujourd'hui, ' rentrée , des ■ Gham*,
bre$>- • ; - : .• . ;
1 Au Luxembourg, la séance sera pré
sidée par M. Wallon ; au Palais-Bour-
: bon, c'est M. le comte Lemercier qui oc
cupera le fauteuil présidentiel. Les deux-
assemblées procéderont à, d'élection de t
leur-bureau définitif. *:
C'est jeudi prochain que la commis
sion parlementaire chargée du- reriou-
; vellemeni' "'de 1 la 'Barique de France : eri-
tendra le rapport de'M. Maurice Lebon '
et statuera définitivement. . .
Le même jour, le'conseil de régence
de la' Banque de France se réunira
pour délibérer sur lés modifications pro
posées.- - - ; J "• • - ■ •
M. Constans remettra aujourd'hui à
la questure '.du .Sénat sa protestation
contre lesîélections ■sénatoriales de la
Haute-Garonne.
Les ving t-cinq conseillers municipaux
de Toulouse dont l'élection a i^té annulée
par le conseil de préfecture, adressent
aux électeurs toulousains une lettre par.
laquelle ils> annoncent qu'ils vont se
pourvoir devant le Conseil d'Etat centre
la décision qui les frappe. 1 '
Les Anglais viennent d'éprouver sur
la côte occidentale-d'Afrique un mal
heur analogue à celui qui a frappé ré
cemment les Italiens dans le pays des
Somalis: Une-dépêche reçue hier à. Lon
dres annonce, eneffet,qù'uneimportante
mission anglaise qui s'était mise en
marché le 1 e ' janvier de la côte des Es
claves à destination de la ville de Bénin,
a été massacrée par les indigènes, svCjets
du roi de Bénin. Le yacht du consul
général anglais qui avait transporté
celle mission 'sur la côte des Esclaves,
est: revenu à Bonny- annoncer le dé
sastre. -
La nouvelle a causé une très vive-émo
tion à Londres. • ■ > > '
Lord Salisbury a conféré avec le pre
mier lord de l'amirauté au sujet des me
sures qu'il- convient de ■ prendre■/ Par
crainte que le massacre de l'expédition
anglaise n'ait une-fàcheuse répercussion
dans toute la région.du bas Niger, plu
sieurs vaisseaux de guerre vont être ex-
pédiés dans le golfe de Guinée pour pro
téger les sujets britanniques. En outre,
il est presque certain qu'une expédition
sera organisée au Bénin afin ' de -venger
le massaere de la mission anglaise. <
,Un télégramme de Tokio annonce que
le ministre d'Allemagne en passant en
voiture dans la ville frappa d'un coup
de fouet un Japonais au visage. Cet in
cident a vivement ému la presse indir
gène ; elle affirme que cette attaque n'a
vait, nullement été provoquée et demande
le rappel du ministre « h>
Les socialistes autrichiens viennent de
faire paraître un manifeste électoral. On
en trouvera le résumé aux Dépêches de
l'Etranger.. ; ■;■•.' n , ..
Çà et là
■ ' LE'GUI
« Achetez le gui, mes belles dames, le
gui qui porte bonheur;:: i> Comme cha
que hiver,-les rues . de Paris,-depuis
quelques semaines, 'retentissent quoti
diennement, au matin, de ce cri ppussé
par d'humbles marchands qui s'en vont,
d'un, jpas balancé, portant sur leurs
épaules une grosse branche d'arbre où
pendent des rameaux verdoyants. Et ces
modestes Mndùstmls "du ,' en somme d'assez belles recettes.
Il ne faudrait pas conclure de ce
;■ suocès que les- Parisiens* gens scepti
ques, hélas ! sont -persuadés-<■*- comme
les habitants de certaines provinces - 1 -
des vertus merveilleuses et curativés que
posséderait la plante parasite .qui, au
dire dès viëux paysans bretons, préserve
des mauvais sorts, et guérit toutes les
maladies connues, sans compter.quelques
autres. Quand: nous achetons ces feuil
lages toujours frais, nous n'avons d'au
tre but que d'orner nos cheminées et nos
suspensions. • • 1 : -, • '' - v
Pieutrètre si nous sommes aussi incré
dules, est-ce parce que.dans la capitale
onvend seulement, le gui du peuplier ou
du pommier, et non le vrai gui, l'authen
tique, celui du chêne, celui; que le vent de
mer balance, aux landes de Bretagne...
- Parmi les marchands de la rive gau
cherie plus connu certes est le père Brin-
card, dont je m'honore d'être le client.
Et même le préambule ci-dessus n'a
vait pour objet que de vous présepter le
père Brincard. C'est maintenant un oc
togénaire dont la taille [se voûte, dont la
démarche chancelle, dont la barbé blan-i
che indomptée ressemblé à celle des
druides ses ancêtres, qui, si l'on en croit
les historiens, ne faisaient que de rares
visites aux salons de coiffure de l'épo
que. Et le spectacle que présente ce bon
homme — à la'casquette lamentable, au
pardessus dont la couleur primitive a dis
paru depuis longtemps sous des' nuances
indécises, à la: voix: éraillée ' et sépul
crale . t fait un contraste d'une na?
vrante ironie avec la ramure qu'il porte
sur son dos et qui est comme un souvenir
otiblié parmi nous^par le printemps, ' et
awèe son cri plein d'espérances : « Ache-,
téz le guij ipes belles dames,.le gui qui
porte bonheur. » . ,
Le père Brincarl n'est pas loquace, et
depuis'trois ou quatre ans que j'avais le
plaisir de le connaître, les seuls mots que
j'aie pu lui-arracher jusqu'à hier étaient
ceux-ci:« II pleut; fait froid, fait pas
chaud ! » ou encore]: « Ça pince ! » locution
qu'.il. employait parfois à ia place des
deux, dernières afin d'éviter- la 1 monor
tonie. ■ ' ■ .■ ,
Or voici que vers le 20 décembre le,
vieux successeur-des druides disparut,
tout à Coup de la circulation. Vous dirai-
je qu'il me ^manquait, et que j 7 étais tout
peiné de, n'entendre plus dien?...,Le printemps était .encore loin,
pourtant, et je ne pouvais croire que le
vieux marchand de gui s'était trans
formé, comme à chaque rënouvéàu, en:
marchand de violettes, faisant les gares
de la banlieue où-débarquént enfouie; au
ïûois de' 'mai, 'les familles bourgeoises
soudain éprises des bois ensoleillés.:'.
Ët je'pensais'que le pauvre bonhomme
était mort, sans dout e," mort de misère
tout seul, comme il avait vécu, ou qu'un
fiacre l'avait renversé alors qu'il traver--
sait le :boulevjard, ce vieillard presque
av^iigle et presque paralytiqueavait
su réuniripour son compte personnel les
maux des déux héros de Florian.
. Je fus donc agréablement surpris,d'une
surprise émue, quand hier matin j'en
tendis de nouveau retentir le cri du père
Brincart, quand je vis sa silhouette de
vieil ascète paraître à l'angle dé ma rue.
En faisant ma provision' habituelle, je
remarquai que sur la face usée du mar
chand, se dessinait quelque chose qui
pouvait bien être un sourire, qu'il avait
une casquette neuve, et que, miracle
étrange, il avait, brossé son paletot. Et
de Iui ; mêmé il parla ; il avait besoin,
comme tous les miséreux, de crier qu'en
fin lui aussi, il avait eu sa modique part
dfe"bonheur, son rayon de soleil.
Il me raconta, que son petit-fils, l'en
fant de sa fille morte à trente ans de ,1a
poitrine, l'orphelin qu'il avait élevé, qu'il
avait fait entrer au séminaire, dans
je;ne sais plus çuel diopèse de Bretagne,
avait été ordonné prêtre, aux, Quatre-
Temps de NoCl, qu'il était allé là-bas,
lui, le grand-père, r assister à la première
messe du jeune lévite, et qu'il avait dû
faire à pied, péniblement par économie,
une partie du voyage de retour. .
I — A présent, Monsieur,conclut-il, tan
dis qu'une larme douce glissait lentement
le long de. s,a fearbejjlancjie^à présent j'ai
atteint inon but» Ça iri'èst' égal-que le
commerce ne marche plus guère, et le
bon Dieu .peut prendre ma vieille car
casse... . .
• Le bonhomme [se doutait-il qu'il dé
marquait un mot de Turenne ? C'est peu
probable* et il ne s'en soucierait guère
d'ailleurs. Heureux d'avoir trouvé un
confident à son allégresse,lui qui ne cher
chait jamais! de confident à ses peines, il
s'en alla toutdoucement,lançant aux échos
spn refrain : a Achetez le gui, mes belles
dames, le gui qui porté bonheur. » Et sa
voix était presque éclatante, et sa dé
marche était toute rajeunie. C'est qu'il
avait bu quelques gOuttes de cet élixir dé
longue vie qu'on appelle la joie, qu'il
avait,eu quelques-unes de ces heures.bé
nies f que Dieu; sème parfois comme' des
oasis à'travers lë désert de l'existence,
comme des fleurs à travers les douleurs,
des pauvres.' "
Joseph L egueu.
— : ; —
Plusieurs journaux reproduisent
la, dépêche suivante, adressée de
jRodez : ■ ,
D'après un bruit qui circule ici, le gou
vernement français serait tombé Rac
cord avec le Saint-Siège pour- offrir
l'évêché de Rodez, vacant depuis la mort
àù cardinal Bourretj à M; l'abbé iHazera;
curé, de la Bastide à Bordeaux. - - -
L'ÉLECTIONJE BREST
Les journaux catholiques, sauf
la Croix qui se réserve, prennent
parti pour M. l'abbé Gayraud. Les
feuilles réfractairejs soutiennent
avec frénésie M. de Blois./ Nous fe
rons, en passant, une remarque :
tandis que les partisans du candidat
ecclésiastique parlent du candidat
royaliste en termes pleins de con
venance, les partisans de M. le
comte de Blois se montrent agres
sifs et même fielleux çontre'M. Gay
raud. Il est évident qué l'entrée en
ligne de ce prêtre éloquent, prenant
position nette sur le terrain des
instructions pontificales* dérange
certains calculs, a
La Vérité — avons-nous besoin de
le dire? —donné en faveur du comte
de Blois : E n pouvait-il être diffé
remment; puisqu'elle devait choisir
entre un orléaniste iav.oué et un ca
tholique hautement soumis à Rome?
Ce journal a ■ dai\s le Finistère un
correspondant -qui fait rage* sans
signer, contre M. l'abbé Gayraud
et les promoteurs de sa candida
ture. En vaillant anonyme, il s'est
emporté si loin qiie' VÉtoile de la
mer lui a servi cette riposte
« Quand on écrit de pareilles cho
ses, l'on a raison de se cacher. »
Sous ce çoup, l'anonyme a .gardé
quelque temps le silence. Mais le
voici qui reparait, toujours avec son
masque, pôUr tenir des propos
comme "ceruirci : . . r . ; .
Il est bien vrai quel'histoiré'se recom
mence sans cesse: nous allons'^assisterà
la lutté d'un prêtre contre un gentil
homme breton qui représente la «délité
à Dieu et la Royauté*
Quelle royauté? Celle, sans doute,
oue vient de nous promettre M. le
auc d'Orléans, la royauté gallicane
où « les Eglises » seront traitées
én"sùjettès qùé l'on révère;/.."et
qu'on,. ei\Cs]tiaîçiç. - - r
La Vérité ne ±rouve pas que' son
correspondait ( dise rien .de trop.
Même, elle " 'y ajoute 5 . "Soii ami au
Finistère s'obstine à garder le mas
que ; mais elle, dé plus en'plus, lève :
le sien et' s^e montre ce ..quelle est l
l'alliée • des rièfrâctaires. Nou§ en
avons eu ces jours-ci d'autres preu
ves, que nous aurions pu relever,
si nous ne laissions bénévolement,
neuf fois sur dix, passer les attaques
sournoises' de ce journal contre
nous, sàhs même profiter dés àrgu-
ments qu'il nous offre contre'lui."
l,Un des prétextes" mis en avant,
par la Vérité. pour combattre Rf. •
l'abbé ■■ Gayraud, c'est quiil s'est
présenté, quand JVL de ;î31ois. ayait
déjà pris position^Ea Vérité sait
fort bien, au contraire, que la can
didature dé M. Gayraud est anté
rieure à celle du partisan de la
«monarchie constitutionnelle ». Si
le premier s'est retiré durant quel
ques jours, ce n'a été que pour
faire place au R: P. Charmetant,
qui continuait, sous un autre nom,
la candidature ecclésiastique. C'est
en face de cette candidature, dont
la signification et le caractère, à
défaut de la personne, étaient déjà
déterminés, que l'honorable M. ae
Blois est venu poser la sienne.
Croirà-t-il devoir la maintenir ?
Nous ne savons. En tout- cas,' si
les électeurs de la troisième cir
conscription de Brest, fidèles à leur
s glorieuse tradition, veùlqnt' pour
député un catholique marchant
avec Rome, tout dévoué ,aux inté
rêts locaux et en même temps
jouant à la Chambre, par s,on talent
et son activité,un rôle impor
tant comme ses. éminents prédé
cesseurs, s ils voteront pour-M. l'abbé
Gayraud. , '.
; ' . :■ Pierre V euillot.
H-f-
La France nouvelle veut bien, da
tèmps à autre, reproduire nos articles en
Premiers-Paris: C'est tin honneur dont
nous la remercions: Nous serions plus
satisfaits encore, si elle indiquait que ces
articles ont paru dans l'Univers.' '
— -♦ T- r-T-r—
OFFRE DE SERVICE
La Gazette,- armée, comme tou
jours, de soulignements de divers
calibres, folâtre, encore autour de
l'interview du.Figa.ro pour y décou
vrir un changement 4.ans là politi
que de Rome. Si cet exercice l'a
muse et là consolé; elle peut le con
tinuer. C'est sans conséquence'.- ;
Mais pourquoi ne dit-elle mot de'
notre obsérvation sur le langage ul
tra gallican et libre-penseur du duc
d'Orléans ? Passerait-elle aussi au'
parti « des églises »?
A propos des prescriptions du
Pape, nous signalons à la Gazette
la lettre de : Rome où: le P-. Emma
nuel Bailly, frère du « Moine », rap
porte que Sa Sainteté -félicite la
Croix de seconder sesëvues et se
plaint des messieurs:. ; chrétiens
rebelles à. sa direction. ' ■ "
Ces messieurs... rebelles , la Ga
zette aurait-elle beaucoup' de peine
à les trouver? "
Au besoin, nous pourrions l'aider
dans cette recherche.
NOCES D'OR PASTORALES
-.11 y a cinquante, ans, le 3 janvier
1847, un jeune prêtre, M. l'abbé De-
lor, était installé curé de l'une des
§randes paroisses - de Limoges,
aint-Pierre-du-Queyrois. Le lundi
' 4 janvier 1897, cette paroisse; à'là-
i quelle toute la ville de Limoges
s'est.associée, a, célébré les noces
d'or de son pasteur. Une tellé fête
est rare et reçoit nécessairement
i de sa rareté même une grandeur et
un charme^ particuliers. Çelie-ci a
été des plus touchantes. Du.compte,
rendu développé que nous apporte
la Semaine religieuse du diocèse se
dégage un parfum "de piété qui fait
comprendre combien ce demirsiècle
de pastorat a été doux, attentif et
fécond.. Et quel, témoignage appor
taient au vénérable curé,,ce nom
breux clergé, cette foule de fidèles
qui lui disaient : Nous vous aimons,
nous vous 1 vénérons, nous vous re
mercions. L'évêque de Limoges;
Mgr Renouard, a, dans son beaii
discours, très : noblement exprimé 5
les sentiments dé tous, en prenant
texte de ôettê solennité pour dire
Ce qu'est le prêtre. « Je laisse, a-t-il
ajouté, à mes auditeurs la liberté
de faiçg les applications. »
. .Avant, d'être curé .de. Saint-Pierre
M-l'ahbê' D'eJor avait. eté .prpfesseur
au collège de Felletin, .un ' centre
d!instrùction et d'éducation reli;
gieusés et .sacerdotales. En' même
temps qu'il y faisait excellemment
son devoir, il suivait avec "attention
et syrnpathièle. mouvement .c'atholï-
qùe d'Eilô.rs; Il aimait trop 1 la vérité,
il avait trop à cœur le salut des
âmes pour ,ne pas ,'se rapprocher dès
hommes de combat, cj'Une âmé.com-
me la-sienne,,dit là Semaine .reli
gieuse, âûràit-éllé pu res,teîr indiffé
rente aux grandes^ luttes qui. f vé-
nàie'nt de s'engager en. faveur de là
5 liberté religieuse ? /Paxjtageant et
; dépassarijt r.énthbûsi.àsmev <^e ses
; confrères, il se liait ' ; ^yec les plus-
vaillants défenseurs du -c .ath r ôli.cjs-
rae. Mpntaïernbert, auquel 'il dédiait '
son premier ' recueil, dè s pqésiéé ; ,
iBerryer, de Fallôux.et. dayantage
encore avec celui qui* devait, par je
ne sais quelle" affinité de cjontra ? ste's
entfé deux esprits de, nature " diffé-,
rente» lui rester le plus' cher, Louis,
Veuillot, l'indomptable . champion
dç l'orthodoxie. * . r . ,.r
Oui, il y avait contraste entre le
doux abbé'Delor et l'indomptable '
Louis Veuillot, • m,ais le même' ar- !
dent amour de Dieu, le même dé-'
vouement au Saint-Siège" lefe ani- '
maient, et quand ce qu'ils aimaient
par-dessus tout était menacé ils de-'
vaient s'unir.
C'èsf en 1840 que s'ouvrirent leurs
relations. L'abbé Delor avait lu les
Pèlerinages de Suisse et, charmé, en
levé, il Voulait les faire lire à ses
élèves. Mais le " livre étant ..un peu,
cher, i} désirait, afin d'en prendre
plusieurs exemplaires,unéréduction
de prix. Mon frere lùi répondit :
Mon libraire étant seul et rentier pro
priétaire des livres que j'ai .publiés, c'est
à lui de voir à quel prix il peut les cé
der... Quanta moi je voudrais, pouvoir
les donner pour rien à qèux qui, comme :
vous, les destinent à une forte et Ijonne
œuvre ; 'mais pour les pouvoir donner'il
faut que je les achète moi-même, et c'est
ce què ma bourse ne me ; permet pas sou
vent. Je ne suis, malheureusement pour
mon cœur, qu'un ouvrier; j'ai besoin dè
ma journée pour vivre.
Il terminait en lui disant : « Dai
gnez vous souvenir de moi à l'au
tel » et demandez à notre bon maî
tre « que je ne perde jamais de vue.
l'humble et constant usage dés fa
cultés qu'il m'a données pour l'ac
complissement de devoirs négligés
trop longtemps. »
'Le lien d'amitié était formé et ne
fut jamais rompu. ' Si un moment, ,
par suite d'un malentendu, M.
l'abbé Delor cessa de lire l'Uni
vers, il n'y eut point' rupture avec
Louis Veuillot. — Reprenez bien
vite le journal, lui écrivit mon frëré
et" il le reprit. '' ,
Je reparlerai de cétté correspOn-"
dancé des plus variées. Je viens d'y;
: lire' une lettre 1 sur l'Honnête femme
que je donnerai un de ces jours. On :
publie tant de fades et 'scrts Vboriâ'
livres » à l'usage de la jeunesse que
je veux faire entendre une note de
■ mon frère touchant' ce sujet. Pour®
auj ourd'hui j'éxtrairaf "seulement j
des lettres de Louis Veuillot le salut
qu'il adressa à soii amf quand celui--
ci'filt nommé curé de Saint-Pierre i
. Vous voilà curé. Je serais: itenté d'en,
félieiter votre paroisse plus. que. vous ;
mais nous ne sommes pas ici pour nous;
divertir et tout travail qui nous est im
posé dç Dieu est bon. Que ne puis-jé'aller
s a Limoges, pour avoir le plaisir d'em
brasser un curé pétitionnaire I Est-ce
que votre l?ori évêque n'y voit pas un peu
à redire?;^ ' ■ '-.fi ?. .-
> -j :■ ; ' -A.f ■• ï' ; % * -.S
C'était au temps de la grande
guerre contre l'université. M. l'abbé
•elor avait pris, à Limôgès 'i 5 l'initia
tive du pëtitionnëmejit cç)htre i, des
p'rojéts aè loi qûi, sous- prétexte de-
donner une certaine liberté dé 1 l'en
seignement,devaient affermir, le mp-
inopole; universitaire. Son intérvën-
; tion v active .était un . acte , de cou
rage, d'autres disaient : ■ une im
prudence.. 1 : Il fallût attendre - la
; deuxième république pouf 'aybir eir
partie raison de ce mônopolè qui à
si profondément blessé en France la
! religion.. M. Delo,r fut de, cette ÏUtte
nécessaire, non seulement par les
pétitions, mais aussi; par r la. plu
me. Dès ce tempp il était bien, des
nôtres. C'est une joie pour moi .de
'pouvoir dir6 j quMl est'encore des-nô-
tres aujourd'hui/ ' : ■ 1 ■
" La lèttre très;touchante et char
gée de précieux . souyënirs «que
Pabbé Delor m'écrivit après. mort
de mon frère se terminait, pp. .l'af
firmation de savive ?j 8ympathie .ppwr
« le cher Univers ». Cett.e ; ;bonne
parole, il me l'a répétée, depuis lors
chaque fois qu'une crise queleonque
a 'frappé notre œuvre ou ma per
sonne. Ces jours-ci encôre il. là ré
pétait à l'un de'mes fils..,'
. Bien cher et bien vénérable, ami,
vrai prêtre; deJDieu, aimez toujours
« le cher Univers , y,, et, .pernjÇjttéz-
moi de vous demander^ pour le
journal et eeux qui- le font,"çe que
vous demandait il y .a cinquante-
sept ans Louis Veuillot : « un sou
venir à l'autel. »
Eugène V euillot.
Edition quotidienne. — 10,588
Mercredi 13 Janvier 1897
ÉDITION QUOTIDIENNE
1 " • i - • •" ' ~~ i i "i j * ~ "*-i ''• -
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: On s'abdnne à Rome, place du Gésù, 8
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: L'UNIVERS ne répond pas des manuscrits qui lui sont vtâressis
ANNONCES
■MM. LAGRANGE, CER£ §t,0 i< ', 6., plaçe de la Bourse
•>Ï*J i-iUSi*
PARIS, 12 JANVIER .1897
- - . ■ ■* '■ :
SOMMAIRE
La foi et la raison»*.
Çà et là : Le gui'...
L'élection de Brest.
Noces d'opi pasto
rales
Causeries "militai
res...,
M.l'abbé Roussel..
F rançois Veuillot.
J oseph L eg U eu.-
P ierre '-vëtjiiéot.
\À>-
E ugène V euillot.
C olonel O rtus.
E douard A lexandre
Bulletin du jour. — L'évêché de Rodez. —,
A la France nouvelle.. —.Offre de service.
— Mgr Péchenard .et la. jeunesse catho
lique.— La France et l'Eglise. — L'im
pératrice de Russie". î — Informations, po-^
lltiqùes et parlementaires. J —' Madagas
car. "j- Nouvelle'campagne coitire -Ml'mé-
•line. — Chronique. Lettres, sciences
et arts. — La Comédie-Française- à
Athènes. — L'œuvre de la première com
munion. — La nejivaine de sainte ' Gene
viève. r— La, question ouvrière.»— Echos
de partout. — Dépêches, de l'étranger.
— Guerre et mariné. — Les anarchistes.
— Nécrologie. — ' Tribunaux. —' Nou
velles diverses. — Dernière heure. —
Calendrier. — Bourse et bulletin finan
cier.- ■
I ' - r ■ - ■
*. LA FOI ET LA RAISON
Les rapports de la raison avec la
foiy grave et.perpétuel sujet de dis
cussion, agité,, depuis les. premiers
temps,de l'Eglise, entre les apolo
gistes chrétiens et les. ennemis de
la religion ; — ceux-ci jugeant de la
foi sans la connaître, et -ceux-là,
montrant, par la vigueur et la clarté
de leurs arguments, .que, si la foi
possède leur esprit, leur raison
n'en* est pas obscurcie; ni . dimi
nuée.
Cette question, d'autres aussi de
pareille nature et d'égale hauteur,
ont le don de passionner aujour
d'hui, même en dehors du ; public
chrétien, un certain nombre d'es
prits élevés et chercheurs, qui com
prennent la puissance et sentent la
grandeur de la religion. M. Brune-»
tière en faisait'.■■■récemment ■■l'objet
d'une discussion profonde et Ser
rée, dans un article qui fut com
menté par- maints journaux, *et par
maintes revues -r- et dont 1 ■Univers
a parlé déjà. / v r ;
Le R. P. Coubé, de la Compagnie
de Jésus, s'armant des théories ex
posées dans cet arti.sle et considé
rant la bataille d'idéiés soulevée par
son apparition, a pérté, ces jours-ci,
la question dansv la chaire. En même
temps,- d'ailleurs, il l'a élevée au-
dessus de^ querelles présentes,
dont il ne voulait point, devant l'au
tel, interpeller et critiquer les" cham
pions et auxquelles il s'est contenté
de faire une allusion discrète et
remplie de tact. II a donc exposé*
de haut, cette graye question, les
rapports de la raison , et de ,1a foi :
il l'a fait dans deux .conférences
données, en l'église , Saint-Thomas
"4'Àquin, comme épilogue à la sta-
ijon de l'Avent qu'il y avait prêchée,
avec.succès et fruit, devant un nom
breux et fidèle auditoire, Ajoutons
immédiatement qu'il a, mis en lu
mière et développé, dans ces con
férences, un côté, non le moins
beau ni le moins important, de son
remarquable talent d'orateur reli
gieux ; il y a montré une grande et
sure vigueur de dialectique, un es
prit, net et précis, sachant conduire
avec beaucoup de force et mener
droit vers une conclusion logique et
lumineuse, une discussion ardue.
L'auditoire a goûté ce rare et forti
fiant plaisir de se sentir élever "au
nivëàù des plus hautes questions
et de'Voir, comme ,iine, Driïlanté
clarté, 1 la puissance,des arguments.
En'; d'autres occasions, comme en
son discours de Noël sur le bap
tême de Clovis et la mission des
Francs, l'éloquent religieux avait
déployé d'autres qualités, la chaleur
et l'émotion, l'élévation des vues et
ta mâlè harmonie des phrases, — j -
qualités. qui complètent excellem
ment sa, physionomie d'orateur sa
cré.
Au début de son premier discours,
le R. P. Coubé a rendu un vif hom
mage, encore que tout discret, aux
écrivains dont l'intelligence, et l'au
torité contribuent, en dehors de
l'Eglise, à provoquer, ou à dévelop
per une .réaction favorable àl'E
glise ;; il .a reconnu et loué la droi
ture et la sincérité de leurs inten
tions. Il a constaté et souligné avec
joie cette réaction, dont ils sont les'
partisans et même les champions,
contre le positivisme hier triom
phant. L'écrivain qui raille, en plein
milieu d'indifférence à la religion,
les « petites drôleries de la libre-
pensée », qui ose appeler l'esprit
voltairien s « un phénomène da sur
vivance »,adu courage et du mérite.
Il doit être loué de penser ainsi,
encore plus de le proclamer tout
haut.. . . ,
. S'ensuit-il que nous devions ac
cepter, sans réserve et sans hésita-;
tion, son concours ? Le R. P. Coubé
ne le, pense point. En effet, M. Bru
netière a une: façon, très particu
lière et très à .lui» d'exalter la reli
gion, ou plutôt le sentiment reli
gieux.Jl.est d'autant plus nécessaire
de le remarquerj et de refuser, sinon
cet appui lui-mehie, au 1 moins quel
ques-uns des arguments qu'on nous
offre avec lui, -m, que cet appui nous*
.est présenté d'un; air aimable et
d'un cœur ! sincère. On risquerait de
l'accepter sans défiance et" sans
examen, venant d'un tel allié.; et "ce
serait fort dangereux.
• Mv Brunetière, en effet, dans sa
juste inimitié contre le positivisme,
: en-, arrive. à combattre, la ' çàison
elle-même." Il lui attribue les excès
du raisonnement froid, dont la ri
gueur exagérée aboutit parfois à
l'erreur; et, lui opposantles trou
vaille» du sentimentales découver
tes de l'instinct, les- vérités qui
s'épanouissent* du cœur," sans. cul
ture et., sans travail, -r-..et qui, en
fait, ne sont vérités, que par leur
conformité pleine et entiere avec
la raison — il en arrive à con
clure : « Il ne s'est peut-êtreaccôm-
pli rien de grand ou de véritable
mentfécond dans l'histoire qui 1 ne
contienne à son origine, dans son
principe ou dans son germe, quel- :
que chose d'irrationnel.. ; La raison
a si .peu de rapports avec la vie
qu'aussitôt qu'eil^ entreprend de la
régler, elle: la, tr4>pble. Ses inspira
tions ne servent .on quelque sorfô"
qu'à nous déshumaniser. »
- Or, et c'est précisément ce
qu'il importe avant tout de mettre
en relief — si M. Brunetière estime
assez haut la religion, c'est qu'il la
déclare fondée sur cet excellent ir
rationnel, qu!il met à la base de
toute chose, utile et bonne. Assuré
ment la religion n'est point, selon
lui, formellement contraire à la rai
son, ~ mft ' irrationnel ne < va pas
aussi loin, — mais, dit-il, ellerepose
uniquement sur je séntiment reli
gieux et ne saurait soutenir' le froid
et dissolvant examen de la raison.
« Une religion rationnelle, écrit-il,
n'est pas une religion. » Et ailleurs,
il affirme doctoralement que l'on 1 ne
peut démontrer par des motifs de
l'ordre intellectuel ni l'existence de
Dieu* ni l'immortalité de l'âme, ■-<-
Et voilà, pour quel motif, au senti
ment de M. Brunetière, il y a du bon
dans la religion catholique. Eh bien,
il n'est pas possible, il n'est pas
permis .. d'admettre uner. théorie
aussi contraire au traditionnel en
seignement de l'Eglise,
L'éloquent orateur a rigoureuse
ment conduit cette thèse a sa con
clusion logique, afin d'en montrer
L'extrême péril. Or, cette conclu
sion n'est rien moins que l'anéantis
sement de la ■ religion même/Et, en
effet, si l'existence de Dieu relève
du sentiment pur et n'est pas sus
ceptible de démonstration, il en ré
sulte ceci : que Dieu existe... peut-
être. Ayant le sens religieux, je
c'roia.T-r-, sans bien savoir pourquoi
d'ailleurs-.— à son existence ; un
autre, dépourvu de ce sens reli
gieux, n'y croira point. Qui pourra
nous départager?La raison? Mais
l'existence de Dieu* de par la théo
rie même, échappe à la raison. Il
ne reste donc plus qu'à se réfugier
dans un scepticisme universel et
désespérant
Le R. P; Coubé a fait cette dé
monstration, d^une façon beaucoup
plus convaincante,' en termes vrai
ment lumineux. Il a - également
prouvé combien la théorie de l'i?'-
rationnel, exposée par M. ' Brune- !
tière, en dehors même de la ques
tion religieuse, est fausse. Elle re
pose, au fond, sur une confusion
prodigieuse. entre la raison et les
excès, du : raisonnement, entre une
fallacieuse et séduisante apparence
et la réalité. Oui, parfois, on peut
dire ingénieusefnent que le cœur a
raison contre la raison ; on peut af
firmer qu'un açte, absurde aux yeux
de la raison, est excellent néanmoins
parce qu'il, est, dicté par le senti
ment. Mais,, dans ce cas, n'est-il
pas évident que? le mot raison si
gnifie ■ prudence et -■ sagesse>: hu
maine? Et qui donc peut juger, en
dernier- ressort, entre cette ' pru
dence de l'esprit et là • généreuse
imprudence du coeur, si, ce-n'est
la raison vraie, ce . qu'on appelle
la raison, toujours conforme axi
devoir, même' aiors qu'il faut être
fou, aux yeux des prudents, pour
l'accomplir? Le sentiment,, quand
il est' juste et bon, peut être ir
raisonné; mais toujours, en ce. cas,
il est raisonnable. Et M. Brune
tière a été la dupe d'une illusion,'
qu'on pourrait traiter de paradoxe
ingénieux- s'il! en avait l'ait un ar.r
ticle humoristique, - mais. ; qu'il faut
combattre értergiquement quand on
la trouve en une étude philosophi
que et sérieuse, où l'on prétend
exposer les bases de la foi.-
! Le-R. P. Coubé, après afoir .ac
compli,, avec une. parfaite rigueur,
ce travail de critique^ a montré, lar
gement et clairement, le rôle de la
raison dans la foi. Il serait très in
téressant de le suivre aussi sur cè
terrain, et nous souhaitons fort que
ces deux discours; si pleinset si lu
mineux, soient publies. Mais nous-
voulions surtout relever, chez l'élo
quent prédicâteùr, l'exposé qu'il a
;fait et la'discussion qu'il a conduite
avec tant de sûreté, de théories, qui
ont été l'objet, de si nombreux com-
:mentaires. Constatons simplement,
en terminant ces quelques mots,
qu'aujourd'hui comme toujours,
c est la religion, — la religion taxée
d'obscurantisme et d'absurdité ! —
qui défend, qui exalte la raison hu
maine! :
François V euillot.
♦—j. —f-^
BULLETIN DU JOUR
Aujourd'hui, ' rentrée , des ■ Gham*,
bre$>- • ; - : .• . ;
1 Au Luxembourg, la séance sera pré
sidée par M. Wallon ; au Palais-Bour-
: bon, c'est M. le comte Lemercier qui oc
cupera le fauteuil présidentiel. Les deux-
assemblées procéderont à, d'élection de t
leur-bureau définitif. *:
C'est jeudi prochain que la commis
sion parlementaire chargée du- reriou-
; vellemeni' "'de 1 la 'Barique de France : eri-
tendra le rapport de'M. Maurice Lebon '
et statuera définitivement. . .
Le même jour, le'conseil de régence
de la' Banque de France se réunira
pour délibérer sur lés modifications pro
posées.- - - ; J "• • - ■ •
M. Constans remettra aujourd'hui à
la questure '.du .Sénat sa protestation
contre lesîélections ■sénatoriales de la
Haute-Garonne.
Les ving t-cinq conseillers municipaux
de Toulouse dont l'élection a i^té annulée
par le conseil de préfecture, adressent
aux électeurs toulousains une lettre par.
laquelle ils> annoncent qu'ils vont se
pourvoir devant le Conseil d'Etat centre
la décision qui les frappe. 1 '
Les Anglais viennent d'éprouver sur
la côte occidentale-d'Afrique un mal
heur analogue à celui qui a frappé ré
cemment les Italiens dans le pays des
Somalis: Une-dépêche reçue hier à. Lon
dres annonce, eneffet,qù'uneimportante
mission anglaise qui s'était mise en
marché le 1 e ' janvier de la côte des Es
claves à destination de la ville de Bénin,
a été massacrée par les indigènes, svCjets
du roi de Bénin. Le yacht du consul
général anglais qui avait transporté
celle mission 'sur la côte des Esclaves,
est: revenu à Bonny- annoncer le dé
sastre. -
La nouvelle a causé une très vive-émo
tion à Londres. • ■ > > '
Lord Salisbury a conféré avec le pre
mier lord de l'amirauté au sujet des me
sures qu'il- convient de ■ prendre■/ Par
crainte que le massacre de l'expédition
anglaise n'ait une-fàcheuse répercussion
dans toute la région.du bas Niger, plu
sieurs vaisseaux de guerre vont être ex-
pédiés dans le golfe de Guinée pour pro
téger les sujets britanniques. En outre,
il est presque certain qu'une expédition
sera organisée au Bénin afin ' de -venger
le massaere de la mission anglaise. <
,Un télégramme de Tokio annonce que
le ministre d'Allemagne en passant en
voiture dans la ville frappa d'un coup
de fouet un Japonais au visage. Cet in
cident a vivement ému la presse indir
gène ; elle affirme que cette attaque n'a
vait, nullement été provoquée et demande
le rappel du ministre « h>
Les socialistes autrichiens viennent de
faire paraître un manifeste électoral. On
en trouvera le résumé aux Dépêches de
l'Etranger.. ; ■;■•.' n , ..
Çà et là
■ ' LE'GUI
« Achetez le gui, mes belles dames, le
gui qui porte bonheur;:: i> Comme cha
que hiver,-les rues . de Paris,-depuis
quelques semaines, 'retentissent quoti
diennement, au matin, de ce cri ppussé
par d'humbles marchands qui s'en vont,
d'un, jpas balancé, portant sur leurs
épaules une grosse branche d'arbre où
pendent des rameaux verdoyants. Et ces
modestes Mndùstmls "du ,' en somme d'assez belles recettes.
Il ne faudrait pas conclure de ce
;■ suocès que les- Parisiens* gens scepti
ques, hélas ! sont -persuadés-<■*- comme
les habitants de certaines provinces - 1 -
des vertus merveilleuses et curativés que
posséderait la plante parasite .qui, au
dire dès viëux paysans bretons, préserve
des mauvais sorts, et guérit toutes les
maladies connues, sans compter.quelques
autres. Quand: nous achetons ces feuil
lages toujours frais, nous n'avons d'au
tre but que d'orner nos cheminées et nos
suspensions. • • 1 : -, • '' - v
Pieutrètre si nous sommes aussi incré
dules, est-ce parce que.dans la capitale
onvend seulement, le gui du peuplier ou
du pommier, et non le vrai gui, l'authen
tique, celui du chêne, celui; que le vent de
mer balance, aux landes de Bretagne...
- Parmi les marchands de la rive gau
cherie plus connu certes est le père Brin-
card, dont je m'honore d'être le client.
Et même le préambule ci-dessus n'a
vait pour objet que de vous présepter le
père Brincard. C'est maintenant un oc
togénaire dont la taille [se voûte, dont la
démarche chancelle, dont la barbé blan-i
che indomptée ressemblé à celle des
druides ses ancêtres, qui, si l'on en croit
les historiens, ne faisaient que de rares
visites aux salons de coiffure de l'épo
que. Et le spectacle que présente ce bon
homme — à la'casquette lamentable, au
pardessus dont la couleur primitive a dis
paru depuis longtemps sous des' nuances
indécises, à la: voix: éraillée ' et sépul
crale . t fait un contraste d'une na?
vrante ironie avec la ramure qu'il porte
sur son dos et qui est comme un souvenir
otiblié parmi nous^par le printemps, ' et
awèe son cri plein d'espérances : « Ache-,
téz le guij ipes belles dames,.le gui qui
porte bonheur. » . ,
Le père Brincarl n'est pas loquace, et
depuis'trois ou quatre ans que j'avais le
plaisir de le connaître, les seuls mots que
j'aie pu lui-arracher jusqu'à hier étaient
ceux-ci:« II pleut; fait froid, fait pas
chaud ! » ou encore]: « Ça pince ! » locution
qu'.il. employait parfois à ia place des
deux, dernières afin d'éviter- la 1 monor
tonie. ■ ' ■ .■ ,
Or voici que vers le 20 décembre le,
vieux successeur-des druides disparut,
tout à Coup de la circulation. Vous dirai-
je qu'il me ^manquait, et que j 7 étais tout
peiné de, n'entendre plus
pourtant, et je ne pouvais croire que le
vieux marchand de gui s'était trans
formé, comme à chaque rënouvéàu, en:
marchand de violettes, faisant les gares
de la banlieue où-débarquént enfouie; au
ïûois de' 'mai, 'les familles bourgeoises
soudain éprises des bois ensoleillés.:'.
Ët je'pensais'que le pauvre bonhomme
était mort, sans dout e," mort de misère
tout seul, comme il avait vécu, ou qu'un
fiacre l'avait renversé alors qu'il traver--
sait le :boulevjard, ce vieillard presque
av^iigle et presque paralytiqueavait
su réuniripour son compte personnel les
maux des déux héros de Florian.
. Je fus donc agréablement surpris,d'une
surprise émue, quand hier matin j'en
tendis de nouveau retentir le cri du père
Brincart, quand je vis sa silhouette de
vieil ascète paraître à l'angle dé ma rue.
En faisant ma provision' habituelle, je
remarquai que sur la face usée du mar
chand, se dessinait quelque chose qui
pouvait bien être un sourire, qu'il avait
une casquette neuve, et que, miracle
étrange, il avait, brossé son paletot. Et
de Iui ; mêmé il parla ; il avait besoin,
comme tous les miséreux, de crier qu'en
fin lui aussi, il avait eu sa modique part
dfe"bonheur, son rayon de soleil.
Il me raconta, que son petit-fils, l'en
fant de sa fille morte à trente ans de ,1a
poitrine, l'orphelin qu'il avait élevé, qu'il
avait fait entrer au séminaire, dans
je;ne sais plus çuel diopèse de Bretagne,
avait été ordonné prêtre, aux, Quatre-
Temps de NoCl, qu'il était allé là-bas,
lui, le grand-père, r assister à la première
messe du jeune lévite, et qu'il avait dû
faire à pied, péniblement par économie,
une partie du voyage de retour. .
I — A présent, Monsieur,conclut-il, tan
dis qu'une larme douce glissait lentement
le long de. s,a fearbejjlancjie^à présent j'ai
atteint inon but» Ça iri'èst' égal-que le
commerce ne marche plus guère, et le
bon Dieu .peut prendre ma vieille car
casse... . .
• Le bonhomme [se doutait-il qu'il dé
marquait un mot de Turenne ? C'est peu
probable* et il ne s'en soucierait guère
d'ailleurs. Heureux d'avoir trouvé un
confident à son allégresse,lui qui ne cher
chait jamais! de confident à ses peines, il
s'en alla toutdoucement,lançant aux échos
spn refrain : a Achetez le gui, mes belles
dames, le gui qui porté bonheur. » Et sa
voix était presque éclatante, et sa dé
marche était toute rajeunie. C'est qu'il
avait bu quelques gOuttes de cet élixir dé
longue vie qu'on appelle la joie, qu'il
avait,eu quelques-unes de ces heures.bé
nies f que Dieu; sème parfois comme' des
oasis à'travers lë désert de l'existence,
comme des fleurs à travers les douleurs,
des pauvres.' "
Joseph L egueu.
— : ; —
Plusieurs journaux reproduisent
la, dépêche suivante, adressée de
jRodez : ■ ,
D'après un bruit qui circule ici, le gou
vernement français serait tombé Rac
cord avec le Saint-Siège pour- offrir
l'évêché de Rodez, vacant depuis la mort
àù cardinal Bourretj à M; l'abbé iHazera;
curé, de la Bastide à Bordeaux. - - -
L'ÉLECTIONJE BREST
Les journaux catholiques, sauf
la Croix qui se réserve, prennent
parti pour M. l'abbé Gayraud. Les
feuilles réfractairejs soutiennent
avec frénésie M. de Blois./ Nous fe
rons, en passant, une remarque :
tandis que les partisans du candidat
ecclésiastique parlent du candidat
royaliste en termes pleins de con
venance, les partisans de M. le
comte de Blois se montrent agres
sifs et même fielleux çontre'M. Gay
raud. Il est évident qué l'entrée en
ligne de ce prêtre éloquent, prenant
position nette sur le terrain des
instructions pontificales* dérange
certains calculs, a
La Vérité — avons-nous besoin de
le dire? —donné en faveur du comte
de Blois : E n pouvait-il être diffé
remment; puisqu'elle devait choisir
entre un orléaniste iav.oué et un ca
tholique hautement soumis à Rome?
Ce journal a ■ dai\s le Finistère un
correspondant -qui fait rage* sans
signer, contre M. l'abbé Gayraud
et les promoteurs de sa candida
ture. En vaillant anonyme, il s'est
emporté si loin qiie' VÉtoile de la
mer lui a servi cette riposte
« Quand on écrit de pareilles cho
ses, l'on a raison de se cacher. »
Sous ce çoup, l'anonyme a .gardé
quelque temps le silence. Mais le
voici qui reparait, toujours avec son
masque, pôUr tenir des propos
comme "ceruirci : . . r . ; .
Il est bien vrai quel'histoiré'se recom
mence sans cesse: nous allons'^assisterà
la lutté d'un prêtre contre un gentil
homme breton qui représente la «délité
à Dieu et la Royauté*
Quelle royauté? Celle, sans doute,
oue vient de nous promettre M. le
auc d'Orléans, la royauté gallicane
où « les Eglises » seront traitées
én"sùjettès qùé l'on révère;/.."et
qu'on,. ei\Cs]tiaîçiç. - - r
La Vérité ne ±rouve pas que' son
correspondait ( dise rien .de trop.
Même, elle " 'y ajoute 5 . "Soii ami au
Finistère s'obstine à garder le mas
que ; mais elle, dé plus en'plus, lève :
le sien et' s^e montre ce ..quelle est l
l'alliée • des rièfrâctaires. Nou§ en
avons eu ces jours-ci d'autres preu
ves, que nous aurions pu relever,
si nous ne laissions bénévolement,
neuf fois sur dix, passer les attaques
sournoises' de ce journal contre
nous, sàhs même profiter dés àrgu-
ments qu'il nous offre contre'lui."
l,Un des prétextes" mis en avant,
par la Vérité. pour combattre Rf. •
l'abbé ■■ Gayraud, c'est quiil s'est
présenté, quand JVL de ;î31ois. ayait
déjà pris position^Ea Vérité sait
fort bien, au contraire, que la can
didature dé M. Gayraud est anté
rieure à celle du partisan de la
«monarchie constitutionnelle ». Si
le premier s'est retiré durant quel
ques jours, ce n'a été que pour
faire place au R: P. Charmetant,
qui continuait, sous un autre nom,
la candidature ecclésiastique. C'est
en face de cette candidature, dont
la signification et le caractère, à
défaut de la personne, étaient déjà
déterminés, que l'honorable M. ae
Blois est venu poser la sienne.
Croirà-t-il devoir la maintenir ?
Nous ne savons. En tout- cas,' si
les électeurs de la troisième cir
conscription de Brest, fidèles à leur
s glorieuse tradition, veùlqnt' pour
député un catholique marchant
avec Rome, tout dévoué ,aux inté
rêts locaux et en même temps
jouant à la Chambre, par s,on talent
et son activité,un rôle impor
tant comme ses. éminents prédé
cesseurs, s ils voteront pour-M. l'abbé
Gayraud. , '.
; ' . :■ Pierre V euillot.
H-f-
La France nouvelle veut bien, da
tèmps à autre, reproduire nos articles en
Premiers-Paris: C'est tin honneur dont
nous la remercions: Nous serions plus
satisfaits encore, si elle indiquait que ces
articles ont paru dans l'Univers.' '
— -♦ T- r-T-r—
OFFRE DE SERVICE
La Gazette,- armée, comme tou
jours, de soulignements de divers
calibres, folâtre, encore autour de
l'interview du.Figa.ro pour y décou
vrir un changement 4.ans là politi
que de Rome. Si cet exercice l'a
muse et là consolé; elle peut le con
tinuer. C'est sans conséquence'.- ;
Mais pourquoi ne dit-elle mot de'
notre obsérvation sur le langage ul
tra gallican et libre-penseur du duc
d'Orléans ? Passerait-elle aussi au'
parti « des églises »?
A propos des prescriptions du
Pape, nous signalons à la Gazette
la lettre de : Rome où: le P-. Emma
nuel Bailly, frère du « Moine », rap
porte que Sa Sainteté -félicite la
Croix de seconder sesëvues et se
plaint des messieurs:. ; chrétiens
rebelles à. sa direction. ' ■ "
Ces messieurs... rebelles , la Ga
zette aurait-elle beaucoup' de peine
à les trouver? "
Au besoin, nous pourrions l'aider
dans cette recherche.
NOCES D'OR PASTORALES
-.11 y a cinquante, ans, le 3 janvier
1847, un jeune prêtre, M. l'abbé De-
lor, était installé curé de l'une des
§randes paroisses - de Limoges,
aint-Pierre-du-Queyrois. Le lundi
' 4 janvier 1897, cette paroisse; à'là-
i quelle toute la ville de Limoges
s'est.associée, a, célébré les noces
d'or de son pasteur. Une tellé fête
est rare et reçoit nécessairement
i de sa rareté même une grandeur et
un charme^ particuliers. Çelie-ci a
été des plus touchantes. Du.compte,
rendu développé que nous apporte
la Semaine religieuse du diocèse se
dégage un parfum "de piété qui fait
comprendre combien ce demirsiècle
de pastorat a été doux, attentif et
fécond.. Et quel, témoignage appor
taient au vénérable curé,,ce nom
breux clergé, cette foule de fidèles
qui lui disaient : Nous vous aimons,
nous vous 1 vénérons, nous vous re
mercions. L'évêque de Limoges;
Mgr Renouard, a, dans son beaii
discours, très : noblement exprimé 5
les sentiments dé tous, en prenant
texte de ôettê solennité pour dire
Ce qu'est le prêtre. « Je laisse, a-t-il
ajouté, à mes auditeurs la liberté
de faiçg les applications. »
. .Avant, d'être curé .de. Saint-Pierre
M-l'ahbê' D'eJor avait. eté .prpfesseur
au collège de Felletin, .un ' centre
d!instrùction et d'éducation reli;
gieusés et .sacerdotales. En' même
temps qu'il y faisait excellemment
son devoir, il suivait avec "attention
et syrnpathièle. mouvement .c'atholï-
qùe d'Eilô.rs; Il aimait trop 1 la vérité,
il avait trop à cœur le salut des
âmes pour ,ne pas ,'se rapprocher dès
hommes de combat, cj'Une âmé.com-
me la-sienne,,dit là Semaine .reli
gieuse, âûràit-éllé pu res,teîr indiffé
rente aux grandes^ luttes qui. f vé-
nàie'nt de s'engager en. faveur de là
5 liberté religieuse ? /Paxjtageant et
; dépassarijt r.énthbûsi.àsmev <^e ses
; confrères, il se liait ' ; ^yec les plus-
vaillants défenseurs du -c .ath r ôli.cjs-
rae. Mpntaïernbert, auquel 'il dédiait '
son premier ' recueil, dè s pqésiéé ; ,
iBerryer, de Fallôux.et. dayantage
encore avec celui qui* devait, par je
ne sais quelle" affinité de cjontra ? ste's
entfé deux esprits de, nature " diffé-,
rente» lui rester le plus' cher, Louis,
Veuillot, l'indomptable . champion
dç l'orthodoxie. * . r . ,.r
Oui, il y avait contraste entre le
doux abbé'Delor et l'indomptable '
Louis Veuillot, • m,ais le même' ar- !
dent amour de Dieu, le même dé-'
vouement au Saint-Siège" lefe ani- '
maient, et quand ce qu'ils aimaient
par-dessus tout était menacé ils de-'
vaient s'unir.
C'èsf en 1840 que s'ouvrirent leurs
relations. L'abbé Delor avait lu les
Pèlerinages de Suisse et, charmé, en
levé, il Voulait les faire lire à ses
élèves. Mais le " livre étant ..un peu,
cher, i} désirait, afin d'en prendre
plusieurs exemplaires,unéréduction
de prix. Mon frere lùi répondit :
Mon libraire étant seul et rentier pro
priétaire des livres que j'ai .publiés, c'est
à lui de voir à quel prix il peut les cé
der... Quanta moi je voudrais, pouvoir
les donner pour rien à qèux qui, comme :
vous, les destinent à une forte et Ijonne
œuvre ; 'mais pour les pouvoir donner'il
faut que je les achète moi-même, et c'est
ce què ma bourse ne me ; permet pas sou
vent. Je ne suis, malheureusement pour
mon cœur, qu'un ouvrier; j'ai besoin dè
ma journée pour vivre.
Il terminait en lui disant : « Dai
gnez vous souvenir de moi à l'au
tel » et demandez à notre bon maî
tre « que je ne perde jamais de vue.
l'humble et constant usage dés fa
cultés qu'il m'a données pour l'ac
complissement de devoirs négligés
trop longtemps. »
'Le lien d'amitié était formé et ne
fut jamais rompu. ' Si un moment, ,
par suite d'un malentendu, M.
l'abbé Delor cessa de lire l'Uni
vers, il n'y eut point' rupture avec
Louis Veuillot. — Reprenez bien
vite le journal, lui écrivit mon frëré
et" il le reprit. '' ,
Je reparlerai de cétté correspOn-"
dancé des plus variées. Je viens d'y;
: lire' une lettre 1 sur l'Honnête femme
que je donnerai un de ces jours. On :
publie tant de fades et 'scrts Vboriâ'
livres » à l'usage de la jeunesse que
je veux faire entendre une note de
■ mon frère touchant' ce sujet. Pour®
auj ourd'hui j'éxtrairaf "seulement j
des lettres de Louis Veuillot le salut
qu'il adressa à soii amf quand celui--
ci'filt nommé curé de Saint-Pierre i
. Vous voilà curé. Je serais: itenté d'en,
félieiter votre paroisse plus. que. vous ;
mais nous ne sommes pas ici pour nous;
divertir et tout travail qui nous est im
posé dç Dieu est bon. Que ne puis-jé'aller
s a Limoges, pour avoir le plaisir d'em
brasser un curé pétitionnaire I Est-ce
que votre l?ori évêque n'y voit pas un peu
à redire?;^ ' ■ '-.fi ?. .-
> -j :■ ; ' -A.f ■• ï' ; % * -.S
C'était au temps de la grande
guerre contre l'université. M. l'abbé
•elor avait pris, à Limôgès 'i 5 l'initia
tive du pëtitionnëmejit cç)htre i, des
p'rojéts aè loi qûi, sous- prétexte de-
donner une certaine liberté dé 1 l'en
seignement,devaient affermir, le mp-
inopole; universitaire. Son intérvën-
; tion v active .était un . acte , de cou
rage, d'autres disaient : ■ une im
prudence.. 1 : Il fallût attendre - la
; deuxième république pouf 'aybir eir
partie raison de ce mônopolè qui à
si profondément blessé en France la
! religion.. M. Delo,r fut de, cette ÏUtte
nécessaire, non seulement par les
pétitions, mais aussi; par r la. plu
me. Dès ce tempp il était bien, des
nôtres. C'est une joie pour moi .de
'pouvoir dir6 j quMl est'encore des-nô-
tres aujourd'hui/ ' : ■ 1 ■
" La lèttre très;touchante et char
gée de précieux . souyënirs «que
Pabbé Delor m'écrivit après. mort
de mon frère se terminait, pp. .l'af
firmation de savive ?j 8ympathie .ppwr
« le cher Univers ». Cett.e ; ;bonne
parole, il me l'a répétée, depuis lors
chaque fois qu'une crise queleonque
a 'frappé notre œuvre ou ma per
sonne. Ces jours-ci encôre il. là ré
pétait à l'un de'mes fils..,'
. Bien cher et bien vénérable, ami,
vrai prêtre; deJDieu, aimez toujours
« le cher Univers , y,, et, .pernjÇjttéz-
moi de vous demander^ pour le
journal et eeux qui- le font,"çe que
vous demandait il y .a cinquante-
sept ans Louis Veuillot : « un sou
venir à l'autel. »
Eugène V euillot.
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